NATIONS UNIES

CCPR

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr.RESTREINTE*

CCPR/C/95/D/1418/200522 avril 2009

FRANÇAISOriginal: ANGLAIS

COMITÉ DES DROITS DE L’HOMMEQuatre-vingt-quinzième session16 mars‑3 avril 2009

CONSTATATIONS

Communication n o  1418/2005

Présentée par:

Yuri Iskiyaev (non représenté par un conseil)

Au nom de:

L’auteur

État partie:

Ouzbékistan

Date de la communication:

12 novembre 2004 (date de la lettre initiale)

Références:

Décision prise par le Rapporteur spécial en application de l’article 97 du Règlement intérieur, communiquée à l’État partie le 16 août 2005 (non publiée sous forme de document).CCPR/C/87/D/1418/2005: Décision concernant la recevabilité adoptée le 6 juillet 2006.

Date de l’adoption des constatations:

20 mars 2009

Objet: Détention d’une personne accusée d’extorsion

Questions de procédure: Épuisement des recours internes, griefs non étayés

Questions de fond: Torture, traitement cruel, inhumain et dégradant, violations pendant la détention; procès inéquitable

Articles du Pacte: 7, 9 (par. 1), 10, 14 (par. 1, 3 e) et 5)

Articles du Protocole facultatif: 2 et 5 (par. 2 b))

Le 20 mars 2009, le Comité des droits de l’homme a adopté le texte ci-après en tant que constatations concernant la communication no 1418/2005 au titre du paragraphe 4 de l’article 5 du Protocole facultatif.

[ANNEXE]

ANNEXE

CONSTATATIONS DU COMITÉ DES DROITS DE L’HOMME AU TITRE DU PARAGRAPHE 4 DE L’ARTICLE 5 DU PROTOCOLE FACULTATIF SE RAPPORTANT AU PACTE INTERNATIONAL RELATIF AUX DROITS CIVILS ET POLITIQUES

Quatre-vingt-quinzième session

concernant la

Communication n o  1418/2005**

Présentée par:

Yuri Iskiyaev (non représenté par un conseil)

Au nom de:

L’auteur

État partie:

Ouzbékistan

Date de la communication:

12 novembre 2004 (date de la lettre initiale)

Décision concernantla recevabilité:

6 juillet 2006

Le Comité des droits de l’homme, institué en vertu de l’article 28 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques,

Réuni le 20 mars 2009,

Ayant achevé l’examen de la communication no 1418/2005 présentée au nom de M. Yuri Iskiyaev en vertu du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques,

Ayant tenu compte de toutes les informations écrites qui lui ont été communiquées par l’auteur de la communication et l’État partie,

Adopte ce qui suit:

Constatations au titre du paragraphe 4 de l’article 5 du Protocole facultatif

1.1L’auteur de la communication est M. Yuri Iskiyaev, ressortissant tadjik, né en 1956. Il se déclare victime d’une violation par l’Ouzbékistan des droits garantis à l’article 7, au paragraphe 1 de l’article 9, aux paragraphes 1 et 2 de l’article 10 et aux paragraphes 1, 3 e) et 5 de l’article 14 du Pacte. Il n’est pas représenté par un conseil.

1.2Le 16 janvier 2006, le Rapporteur spécial chargé des nouvelles communications et des mesures provisoires a décidé que la recevabilité de la communication serait examinée séparément du fond.

Rappel des faits présentés par l’auteur

2.1En 1996, l’auteur a quitté le Tadjikistan pour s’installer à Samarcande (Ouzbékistan), où il a loué un bar-restaurant. Plusieurs fonctionnaires du Ministère ouzbek de l’intérieur, notamment le chef du Service anticorruption et le chef du Département des enquêtes, fréquentaient l’établissement mais ne réglaient jamais leurs notes. Selon l’auteur, ils auraient tenté de lui extorquer de l’argent et l’auraient menacé de le mettre en prison.

2.2En août 1997, l’auteur a vu un certain M. Gaziev frapper Mme Boichenko, une des serveuses, et est intervenu. À la suite de cet incident, M. Gaziev a accepté de donner 60 dollars des États-Unis à Mme Boichenko pour la dédommager des frais dentaires qu’elle allait devoir engager à cause des coups reçus. Il a été convenu qu’un parent de M. Gaziev donnerait l’argent à l’auteur, qui le remettrait à Mme Boichenko. Or, le 3 septembre 1997, jour où l’argent devait être versé, l’auteur a été arrêté par la police et placé en détention, puis roué de coups et soumis à des traitements dégradants − on l’a notamment forcé à toucher les parties génitales d’un des enquêteurs. Il a ensuite été accusé d’extorsion de fonds au motif qu’il avait prétendument fait chanter M. Gaziev en le menaçant de porter plainte pour l’agression dont Mme Boichenko avait été victime.

2.3L’auteur affirme qu’il a été détenu sans mandat pendant quatre jours, en violation du Code de procédure pénale qui prévoit qu’un mandat d’arrêt doit être produit dans les soixante‑douze heures. Pendant sa détention, il a été violemment roué de coups à maintes reprises. Le 7 septembre 1997, anéanti par les passages à tabac, il a fait une tentative de suicide et a été conduit à l’hôpital. Ces informations sont confirmées par un rapport médical daté du 7 septembre 1997, qui a été transmis au Comité. Il est dit dans ce rapport que l’auteur se trouvait dans un état critique. Il était inconscient et avait une coupure à l’avant-bras. Le 13 septembre 1997, il a été ramené au centre de détention, où il est resté plus d’un mois et où on l’a de nouveau soumis à des passages à tabac pour lui faire avouer l’extorsion de fonds dont il était accusé. L’auteur a nommément identifié certains des hommes qui l’auraient battu. À un moment donné, il a été placé en isolement cellulaire, dans des conditions très pénibles car il n’avait pas de vêtements chauds alors que la cellule n’était pas chauffée. Il affirme qu’on l’a systématiquement roué de coups devant d’autres détenus «parce qu’il était juif». Il assure également avoir été détenu pendant plus d’un mois avec des prisonniers considérés comme particulièrement dangereux, alors qu’il n’avait pas encore été jugé ni condamné.

2.4Le procès de l’auteur s’est tenu le 3 décembre 1997 devant le tribunal de district de Samarcande et a duré très peu de temps. À l’audience, le juge a refusé de faire comparaître Mme Boichenko en qualité de témoin de la défense, comme le demandait l’auteur. À l’issue du procès, l’auteur a été reconnu coupable d’extorsion et condamné à une peine d’emprisonnement de six ans.

2.5L’auteur déclare qu’il a été jugé par un tribunal de district alors que la loi requiert que les étrangers soient jugés en première instance par un tribunal régional. Il affirme que le tribunal n’a pas cherché à vérifier sa nationalité, malgré ses demandes dans ce sens.

2.6Le 9 mars 1998, le tribunal régional de Samarcande a rejeté le pourvoi en cassation de l’auteur. Celui-ci affirme que cette décision n’est pas valable car les signatures de tous les juges concernés n’apparaissent pas dans l’acte, lequel n’est pas non plus daté.

2.7Le 1er novembre 2000, l’auteur a été gracié en application du décret présidentiel du 28 août 2000 et remis en liberté.

Teneur de la plainte

3.L’auteur affirme que les actes de torture et les mauvais traitements qu’il a subis pendant sa détention constituent une violation des droits garantis à l’article 7 du Pacte (parce qu’il a été torturé et soumis à un traitement dégradant en détention), et que les conditions pénibles dans lesquelles il a été détenu constituent une violation des droits garantis aux paragraphes 1 et 2 a) de l’article 10 (parce qu’il a été détenu avec des prisonniers particulièrement dangereux avant d’être jugé). Il déclare en outre que sa détention illégale constitue une violation des droits garantis au paragraphe 1 de l’article 9 (parce que les règles de procédure n’ont pas été respectées en ce qui concerne sa détention), et que son procès a emporté des violations des droits garantis au paragraphe 1 (parce que le tribunal n’était pas compétent), au paragraphe 3 e) (parce qu’il n’a pas pu obtenir la comparution d’un témoin) et au paragraphe 5 (parce que le jugement rendu en appel était entaché d’irrégularités) de l’article 14 du Pacte.

Observations de l’État partie

4.1Dans une lettre datée du 29 novembre 2005, l’État partie conteste la recevabilité de la communication. Selon lui, l’auteur n’a pas épuisé les recours internes puisqu’il n’a pas demandé un contrôle de la légalité de sa condamnation au moyen de la procédure de réexamen en supervision. L’État partie souligne en particulier que l’auteur n’a pas saisi le tribunal régional de Samarcande, ni la Cour suprême d’Ouzbékistan. Il ajoute que, selon l’article premier de la loi sur l’institution du Médiateur, le Médiateur est un «complément des formes et moyens existants» de protection des droits de l’homme, et que, selon l’article 10 de cette même loi, il est habilité à examiner les plaintes individuelles et à mener ses propres enquêtes. L’État partie affirme en outre que les allégations de l’auteur, qui affirme avoir été bafoué dans ses droits, ne sont pas fondées.

4.2L’État partie indique qu’il a transmis la plainte de l’auteur au tribunal régional de Samarcande aux fins d’un réexamen en supervision.

Commentaires de l’auteur sur les observations de l’État partie

5.1Dans ses commentaires sur les observations de l’État partie, datés du 19 janvier et du 31 mars 2006, l’auteur donne des précisions sur les mauvaises conditions de détention qu’il a endurées dans les deux centres où il a été détenu, à Kattakurgan et à Navoi. Il décrit en particulier des conditions sanitaires déplorables et indique que la tuberculose était endémique. Lorsqu’il s’en est plaint à l’administration pénitentiaire, le Directeur de la prison a menacé de lui «pourrir la vie» s’il se plaignait de nouveau. Il s’est également plaint «à d’autres instances» de l’immobilisme de l’administration, ce qui lui a valu d’être battu tous les jours et placé dans une cellule d’isolement pendant «deux à trois semaines». Il joint des copies de lettres de couverture signées par l’administration pénitentiaire, accompagnant les plaintes qu’il aurait adressées à différentes autorités pour dénoncer ses conditions de détention. L’auteur affirme en outre qu’il n’est pas coupable de l’extorsion de fonds dont on l’accuse.

5.2L’auteur a transmis au Comité une copie de la décision du tribunal régional de Samarcande, datée du 2 décembre 2005. Le tribunal y rejette les prétentions de l’auteur et conclut ce qui suit: la culpabilité de l’auteur a été établie par les éléments de preuve disponibles; il n’y a pas eu de manquement à la procédure en ce qui concerne sa détention; la décision rendue sur le pourvoi en cassation n’est certes pas datée ni signée par les juges, mais cela ne suffit pas à l’invalider; lors du procès, la déclaration écrite de Mme Boichenko a été dûment prise en considération, l’avocat de la défense ayant consenti à ce qu’elle soit lue à l’audience. Enfin, le tribunal relève que l’auteur n’a pas étayé ses allégations de torture et conclut qu’il s’agissait d’une stratégie de défense qu’il a adoptée pour tenter de se soustraire à sa responsabilité pénale. À ce propos, il fait observer que l’auteur peut soumettre ces griefs à la Direction générale de l’application des peines ou au Procureur général.

Examen de la recevabilité

6.1Le 6 juillet 2006, à sa quatre-vingt-septième session, le Comité a examiné la recevabilité de la communication. En ce qui concerne l’argument de l’État partie, qui faisait valoir que l’auteur n’avait pas contesté sa condamnation et la décision rendue en appel au moyen de la procédure de réexamen en supervision, ni saisi le Médiateur, le Comité a relevé que l’affaire avait été examinée le 2 décembre 2005 par le Vice-Président du tribunal régional de Samarcande, lequel avait conclu qu’il n’y avait pas lieu de présenter une demande de réexamen en supervision. Le Comité a relevé également que l’auteur affirmait avoir tenté de dénoncer ses conditions de détention auprès de différentes autorités, ce que l’État partie n’avait pas démenti. En l’absence d’autres informations de la part de l’État partie, en particulier des précisions sur l’existence et l’utilité, dans la pratique, des recours invoqués par celui-ci, le Comité a considéré que le paragraphe 2 b) de l’article 5 ne l’empêchait pas d’examiner la communication.

6.2En ce qui concerne le grief de violation de l’article 9, le Comité a noté que le tribunal régional de Samarcande avait rejeté cette allégation le 2 décembre 2005 et conclu qu’il n’y avait eu aucun manquement à la procédure s’agissant de la détention de l’auteur; le tribunal avait établi que l’auteur avait été arrêté le 4 septembre 1997 pour extorsion de fonds et placé en détention le 6 septembre 1997, ce que l’intéressé n’avait pas démenti. Par conséquent, le Comité a conclu que l’auteur n’avait pas suffisamment étayé ce grief aux fins de la recevabilité, et a déclaré que cette partie de la communication était irrecevable en vertu de l’article 2 du Protocole facultatif.

6.3Le Comité a estimé que les griefs soulevés au titre des articles 7, 10 et 14 du Pacte avaient été suffisamment étayés aux fins de la recevabilité.

Observations complémentaires de l’État partie

7.1Le 12 octobre 2006, l’État partie a fait part de ses observations sur le fond de la communication, sous la forme d’un avis émis par la Cour suprême. Celle-ci confirme la décision du tribunal régional de Samarcande en date du 2 décembre 2005 et conclut qu’il n’y a eu aucun manquement à la procédure pendant l’enquête et le procès. Elle déclare qu’aucune méthode illégale n’a été employée contre l’auteur pendant l’enquête préliminaire, puisque les allégations à ce sujet n’ont pas été confirmées. Elle déclare également qu’un avocat de la défense était toujours présent pendant les interrogatoires, les actes de l’instruction et les audiences. Au procès, l’auteur n’a pas prétendu que ses droits aient été violés pendant l’enquête préliminaire et, en particulier, il n’a pas dénoncé le recours à des méthodes d’enquête interdites ou des brutalités policières. La Cour suprême ajoute que l’auteur et son conseil ont accepté que la déposition de Mme Boichenko soit lue à l’audience.

7.2En ce qui concerne la question de la nationalité, la Cour suprême relève que l’auteur a certifié être apatride.

7.3Au sujet de l’absence des signatures des juges dans la décision rendue en cassation, la Cour suprême explique qu’un arrêt de la chambre de cassation est signé par tous les juges qui ont pris part à l’examen de l’affaire. Le défenseur et les autres parties à la procédure reçoivent habituellement une copie légalisée de la décision, sur laquelle ne figure pas nécessairement la signature de chacun des trois juges. La Cour conclut que les actes de l’auteur ont été correctement qualifiés et que la peine imposée était proportionnée au crime commis.

Nouveaux commentaires de l’auteur

8.1Dans une lettre datée du 26 avril 2007, l’auteur réfute les conclusions de la Cour suprême. Il fait observer que son avocate, Mme Rustamova, n’a pas assisté au procès bien qu’il le lui eût demandé, et n’a donc pas pu confirmer sa nationalité. Le tribunal avait désigné Mme Bagirova pour assurer sa défense, mais il a refusé ses services parce qu’il avait déjà engagé Mme Rustamova. En outre, Mme Bagirova avait essayé de le convaincre de se déclarer coupable de tous les chefs d’accusation retenus contre lui. L’auteur affirme qu’il a demandé au tribunal et aux enquêteurs chargés de l’enquête préliminaire de soumettre des documents confirmant son identité, mais cette demande a été ignorée. Il affirme également avoir adressé une protestation au juge, qui n’y a pas donné suite. Il indique que Mme Boichenko était présente dans le bureau de l’un des enquêteurs où il a été roué de coups avant d’être conduit en prison. Elle aurait pu confirmer ces faits, si elle avait été autorisée à venir au procès.

8.2L’auteur affirme que deux des témoins au procès étaient des assistants du juge et deux autres avaient des liens familiaux (mère et fille). Les autres étaient des invités de M. Gaziev et ont donc témoigné en sa faveur. Selon lui, ces personnes étaient présentes lorsque M. Gaziev avait frappé Mme Boichenko, mais n’avaient aucun lien avec sa propre affaire.

Examen au fond

9.1Le Comité des droits de l’homme a examiné la présente communication en tenant compte de toutes les informations qui lui ont été soumises par les parties, conformément au paragraphe 1 de l’article 5 du Protocole facultatif.

9.2Le Comité prend note des allégations de l’auteur, qui affirme que, pendant sa détention, on l’a soumis à des actes de torture et à un traitement dégradant pour lui faire avouer l’extorsion de fonds dont il était accusé. Il constate que l’auteur a décrit en détail les méthodes de torture employées et a produit un rapport médical qui corrobore ses affirmations. Il a aussi nommément identifié certains des hommes qui l’auraient battu. Le Comité relève que le tribunal régional de Samarcande, lorsqu’il a examiné les griefs formulés dans la présente communication, a considéré qu’il s’agissait d’une stratégie de défense adoptée par l’auteur pour se soustraire à sa responsabilité pénale. Cependant, un rapport médical a été établi et l’auteur a dû être hospitalisé pendant sa détention. Ces faits auraient dû suffire pour que les autorités de l’État partie ouvrent une enquête. L’État partie n’a fait aucun commentaire au sujet du rapport médical. Dans ces conditions, il convient d’accorder le crédit voulu aux allégations de l’auteur et le Comité conclut que les faits tels que celui-ci les a présentés font apparaître une violation des droits reconnus à l’article 7 du Pacte.

9.3Le Comité note que l’auteur a donné des informations détaillées sur les mauvaises conditions de détention qu’il a endurées dans les deux centres où il a été détenu. Il a décrit en particulier des conditions sanitaires déplorables et a indiqué que la tuberculose était endémique. Il a joint des copies de lettres de couverture signées par l’administration pénitentiaire, accompagnant les plaintes qu’il aurait adressées à différentes autorités pour dénoncer ses conditions de détention. Selon lui, aucune de ces plaintes, en fait, n’est jamais parvenue à son destinataire. Le Directeur de la prison l’aurait convoqué et menacé s’il se plaignait de nouveau. L’État partie n’a pas répondu au sujet de ces allégations. Compte tenu de la description détaillée que l’auteur donne de ses conditions de détention et des démarches qu’il a entreprises, le Comité conclut que les faits dont il est saisi constituent une violation, par l’État partie, des droits reconnus au paragraphe 1 de l’article 10 du Pacte.

9.4Le Comité prend note des allégations de l’auteur, qui affirme avoir partagé pendant plus d’un mois la cellule de prisonniers considérés comme particulièrement dangereux alors qu’il se trouvait en détention préventive et qu’il n’avait donc pas encore été jugé ni condamné. Il note également que l’État partie, dans ses observations à ce sujet, a affirmé qu’il n’y avait eu aucun manquement à la procédure en ce qui concerne la détention de l’auteur, et que celui-ci n’avait jamais invoqué au procès des violations dont il aurait été victime pendant sa détention préventive. L’auteur n’a pas fait de commentaire sur ce point précis dans ses réponses ultérieures. En l’absence d’autre information, le Comité ne peut pas conclure à une violation du paragraphe 2 a) de l’article 10 du Pacte.

9.5En ce qui concerne le grief de violation du paragraphe 1 de l’article 14, le Comité note que l’État partie l’a rejeté au motif qu’aucun manquement à la procédure n’avait eu lieu pendant le procès de l’auteur; conformément au Code de procédure pénale ouzbek, le tribunal municipal de Samarcande était compétent pour connaître de l’affaire. L’auteur n’a pas contesté cela dans ses nouveaux commentaires. En l’absence d’autre information, le Comité considère qu’il n’y a pas lieu de conclure à une violation du paragraphe 1 de l’article 14.

9.6En ce qui concerne le grief de violation du paragraphe 3 e) de l’article 14, le Comité relève que, d’après l’État partie, l’auteur et son conseil ont accepté que, en l’absence de l’intéressée, la déposition de Mme Boichenko soit lue à l’audience. L’auteur n’a pas contesté cela dans ses nouveaux commentaires, bien qu’il eût affirmé initialement avoir été privé du droit de faire comparaître et interroger Mme Boichenko en qualité de témoin. En l’absence d’autre information, le Comité ne peut pas conclure à une violation du paragraphe 3 e) de l’article 14.

9.7L’auteur a affirmé en outre que la décision rendue en appel n’était pas valable car les signatures des juges concernés et la date n’apparaissaient pas dans l’acte, ce qui est contraire au paragraphe 5 de l’article 14. L’État partie a expliqué que la personne condamnée et les autres parties à la procédure recevaient seulement une copie de la décision, sur laquelle ne figurait pas nécessairement la signature de chacun des trois juges. Le document original était signé par tous les juges ayant pris part à l’examen de l’affaire. L’État partie reconnaît que l’arrêt n’est pas daté, mais affirme que cela ne suffit pas à l’invalider. L’auteur n’a pas contesté cela dans ses nouveaux commentaires. En l’absence d’autre information utile à ce sujet, le Comité considère que les faits tels qu’ils ont été présentés ne constituent pas une violation des droits reconnus au paragraphe 5 de l’article 14 du Pacte.

10.Le Comité des droits de l’homme, agissant en vertu du paragraphe 4 de l’article 5 du Protocole facultatif, est d’avis que les faits dont il est saisi font apparaître une violation de l’article 7 et du paragraphe 1 de l’article 10 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

11.Conformément au paragraphe 3 a) de l’article 2 du Pacte, l’État partie est tenu de fournir à l’auteur un recours utile, y compris en engageant des poursuites pénales afin d’amener les personnes responsables des mauvais traitements infligés à l’auteur à répondre de leurs actes et en accordant à l’auteur une réparation appropriée. Le Comité réitère que l’État partie devrait revoir sa législation et sa pratique de façon à garantir que toutes les personnes soient égales devant la loi et aient droit à une égale protection de la loi.

12.Étant donné qu’en adhérant au Protocole facultatif, l’État partie a reconnu que le Comité avait compétence pour déterminer s’il y a eu ou non violation du Pacte et que, conformément à l’article 2 du Pacte, il s’est engagé à garantir à tous les individus se trouvant sur son territoire et relevant de sa juridiction les droits reconnus dans le Pacte et à assurer un recours utile et exécutoire lorsqu’une violation a été établie, le Comité souhaite recevoir de l’État partie, dans un délai de cent quatre‑vingts jours, des renseignements sur les mesures prises pour donner effet à ses constatations.

[Adopté en anglais (version originale), en espagnol et en français. Paraîtra ultérieurement aussi en arabe, en chinois et en russe dans le rapport annuel du Comité à l’Assemblée générale.]

-----