Quarante-cinquième session

* Nouveau tirage pour raisons techniques (16 octobre 2013).

18 janvier-5 février 2010

Observations finales du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes

Ukraine

Le Comité a examiné le rapport unique valant sixième et septième rapports périodiques de l’Ukraine (CEDAW/C/UKR/7) à ses 909e et 910e séances, le 21 janvier 2010. La liste des questions soulevées par le Comité figure dans le document CEDAW/C/UKR/Q/7 et les réponses du Gouvernement ukrainien sont consignées dans le document CEDAW/C/ UKR/Q/7/Add.1.

Introduction

Le Comité remercie l’État partie de son rapport unique valant sixième et septième rapports périodiques, qui est conforme à ses directives sur l’établissement des rapports et tient compte de ses précédentes observations finales. Il le remercie également de ses réponses écrites aux questions soulevées par le groupe de travail d’avant-session, de son exposé oral et de ses réponses orales aux questions posées par le Comité. Il prend note avec satisfaction des documents complémentaires sur l’égalité des sexes, distribués à ses membres durant la séance.

Le Comité salue la délégation de l’État partie, dirigée par le Représentant permanent de l’Ukraine auprès de l’Office des Nations Unies et des autres organisations internationales à Genève et composée de représentants du Ministère de la famille, de la jeunesse et des sports, du Ministère de l’intérieur et du Ministère de l’éducation et de la science. Le Comité se déclare satisfait du dialogue ouvert et constructif que ses membres ont eu avec la délégation.

Le Comité se félicite que l’État partie rende hommage à la contribution positive que les organisations non gouvernementales de défense des droits de l’homme et les organisations féminines ont apportée à l’application de la Convention.

Aspects positifs

Le Comité note avec satisfaction qu’en septembre 2003, l’État partie a ratifié le Protocole facultatif se rapportant à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes.

Le Comité salue l’adoption par le Parlement ukrainien, le 8 septembre 2005, de la loi sur l’égalité des droits et des chances, entrée en vigueur en janvier 2006, qui vise à assurer l’égalité des femmes et des hommes dans tous les domaines de la société.

Le Comité salue l’action menée par l’État partie pour combattre la violence contre les femmes et en particulier la violence conjugale, et notamment l’adoption de la loi sur la prévention de la violence familiale (2001) et de la loi portant modification du Code des délits administratifs (2003), qui incrimine les actes de violence familiale, ainsi que la création de plus de 30 centres de réadaptation médicosociale des victimes de la violence. Il note en outre avec satisfaction que l’État partie s’est associé en 2008 à la campagne pluriannuelle lancée par le Secrétaire général pour mettre fin à la violence contre les femmes.

Le Comité se félicite des mesures que l’État partie a prises depuis l’examen de son dernier rapport périodique (2002) pour combattre et prévenir le travail forcé et la traite des êtres humains, notamment l’adoption d’un programme global de prévention de la traite pour la période 2002-2005 et la ratification en 2004 de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et des protocoles additionnels s’y rapportant.

Le Comité se félicite de la révision en 2008 de la loi relative au Commissaire pour les droits de l’homme, effectuée en application de la loi sur l’égalité des droits et des chances, qui donne au Médiateur de nouvelles responsabilités en matière d’égalité des sexes, telles que le suivi de la réalisation de l’égalité des droits et des chances entre femmes et hommes et l’examen des plaintes pour discrimination fondée sur le sexe.

Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Le Comité rappelle à l’État partie qu’il est tenu d’appliquer systématiquement et en permanence toutes les dispositions de la Convention et considère qu’il devra accorder une attention prioritaire aux préoccupations et recommandations formulées dans les présentes observations finales jusqu’à la présentation de son prochain rapport périodique. Le Comité prie donc instamment l’État partie de concentrer son action sur ces sujets et de rendre compte des mesures prises et des résultats obtenus dans son prochain rapport périodique. Il invite l’État partie à communiquer les présentes observations finales à tous les ministères concernés, au Parlement (Verkhovna Rada) et à l’appareil judiciaire, de façon à en assurer la pleine application.

Parlements

Tout en réaffirmant que le Gouvernement est responsable et comptable au premier chef de la pleine observation des obligations que la Convention impose à l’État partie, le Comité rappelle que la Convention lie toutes les instances de l’État, et invite l’État partie à prier son parlement national (Verkhovna Rada) de prendre, le cas échéant, conformément à son mandat et à ses procédures, toutes les mesures nécessaires à la mise en œuvre des présentes observations finales et à l’établissement du prochain rapport qu’il doit présenter au titre de la Convention.

Précédentes observations finales

Le Comité déplore que certaines des préoccupations et recommandations formulées dans ses précédentes observations finales (voir A/57/38) n’aient pas été suffisamment prises en compte, notamment celles qui portent sur les stéréotypes persistants à l’encontre des femmes, la sensibilisation à la Convention, la sous-représentation des femmes aux hautes fonctions dans plusieurs secteurs de la vie publique et le manque de mesures de discrimination positive telles que les quotas et d’autres mesures temporaires spéciales.

Le Comité prie instamment l’État partie de tout mettre en œuvre pour donner suite aux recommandations qui n’ont pas encore été appliquées et répondre aux préoccupations exprimées dans les présentes observations finales.

État de la Convention, cadre juridique pour l’égalité et la non-discrimination, définition de la discrimination

Le Comité note que l’État partie a progressé dans le renforcement de l’égalité des sexes et des droits fondamentaux des femmes sur son territoire, notamment en promulguant des lois antidiscrimination, mais regrette de ne pas avoir reçu suffisamment d’informations sur l’utilisation par les femmes des mécanismes de recours, notamment sur les procès et leur issue. Comme dans ses observations finales de 2002, il constate avec inquiétude que la Convention et ses possibilités d’application restent relativement méconnues, y compris au sein de l’appareil judiciaire et de la police et parmi les femmes elles-mêmes.

Le Comité demande instamment à l’État partie de mener des campagnes de sensibilisation sur la Convention et le Protocole facultatif s’y rapportant à l’intention des magistrats, des juristes et du grand public. Il l’engage également à insister davantage sur le champ d’application de la Convention dans les programmes d’éducation et de formation, en particulier ceux destinés aux juges, aux juristes et aux policiers, afin qu’ils y recourent davantage lors des procédures judiciaires. Il prie également l’État partie de lui fournir dans son prochain rapport périodique des renseignements sur le nombre et la nature des actions intentées pour discrimination à l’égard des femmes auprès des tribunaux, du Ministère public, du Médiateur et des autres mécanismes de recours, et sur la suite qui leur a été donnée.

Tout en saluant l’adoption de la loi sur l’égalité des droits et des chances, le Comité s’inquiète du flou entourant les mécanismes de recours et de sanctions en cas de discrimination sexiste, qui pourrait nuire à sa pleine application. Il est également préoccupé par le fait que la définition de la discrimination à l’égard des femmes figurant dans cette loi ne couvre pas expressément la discrimination indirecte visée à l’article 1 de la Convention.

Le Comité invite l’État partie à modifier la loi sur l’égalité des droits et des chances de manière à renforcer le mécanisme de recours et de sanctions et à rendre la définition de la discrimination à l’égard des femmes pleinement conforme à l’article 1 de la Convention, en y incluant également la discrimination indirecte.

Dispositif national de promotion de la femme

Tout en notant que l’État partie a créé de nombreuses structures et de nombreux organismes pour renforcer les mécanismes nationaux de promotion de la femme, notamment en nommant des conseillers et des points de contacts sur l’égalité des sexes dans les ministères et au niveau régional (oblast), et qu’il a chargé de la coordination le Ministère de la famille, de la jeunesse et des sports, le Comité constate avec préoccupation que le dispositif national n’a pas suffisamment d’autorité, de visibilité ni de ressources humaines et financières pour s’acquitter de son mandat et agir efficacement en faveur de la promotion de la femme et de l’égalité des sexes. Il s’inquiète également du peu de moyens dont le Ministère dispose pour coordonner efficacement l’action de toutes les structures de promotion de l’égalité des sexes aux niveaux national et local et collaborer avec les organisations féminines.

Le Comité recommande à l’État partie de renforcer son dispositif en lui donnant davantage d’autorité et de visibilité, notamment en rehaussant son statut dans l’appareil de l’État et en lui fournissant les ressources humaines et financières nécessaires pour accroître son efficacité. Il s’agit en particulier d’améliorer la coordination entre les différentes structures de promotion de l’égalité des sexes aux niveaux national et local et de renforcer la collaboration avec la société civile.

Compte tenu du fait que le plan d’action national 2006-2010 pour la promotion de la femme et de l’égalité des sexes dans la société arrive à son terme, le Comité est préoccupé par le manque d’informations concernant l’évaluation de la mise en œuvre de ce plan, les résultats obtenus et les obstacles et difficultés rencontrés.

Le Comité engage l’État partie à formuler, en collaboration avec les organisations féminines, et à adopter un nouveau plan d’action national favorisant une approche globale de l’égalité des sexes, doté d’objectifs et d’indicateurs précis, et tenant compte des bonnes pratiques et des enseignements tirés du plan d’action national précédent et des recommandations du Comité. Il recommande en outre à l’État partie de consacrer suffisamment de ressources financières à l’application de ce plan d’action.

Mesures temporaires spéciales

Tout en notant avec satisfaction que la loi sur l’égalité des droits et des chances fait référence à des mesures temporaires spéciales, le Comité s’inquiète du peu d’informations disponibles sur la mise en œuvre de ces mesures dans les domaines où les femmes sont sous-représentées ou désavantagées, ou au bénéfice de groupes exposés à plusieurs formes de discrimination, tels que les femmes roms.

Le Comité recommande à l’État partie de familiariser l’ensemble des fonctionnaires intéressés avec le concept de mesures temporaires spéciales visé au paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention et la recommandation générale n° 25 du Comité, et d’adopter et de mettre en œuvre des mesures temporaires spéciales, notamment des quotas, dans le cadre d’une stratégie générale visant à atteindre l’égalité réelle dans les domaines où les femmes sont sous-représentées ou désavantagées, ou au bénéfice de femmes souffrant de plusieurs formes de discrimination, telles que les femmes roms.

Stéréotypes

Le Comité demeure préoccupé par la persistance de stéréotypes traditionnels concernant les rôles et les tâches des femmes et des hommes dans la famille et dans la société en général, obstacle de taille à la mise en œuvre de la Convention et cause profonde de la position désavantagée des femmes dans la vie politique, sur le marché du travail et dans d’autres domaines. Il s’inquiète également des stéréotypes persistant dans les manuels scolaires et des représentations sexistes de la femme dans les médias et les campagnes publicitaires.

Le Comité prie instamment l’État partie de redoubler d’efforts pour venir à bout des stéréotypes persistants discriminatoires envers les femmes, notamment en menant des campagnes de sensibilisation pour insister sur l’égalité de statut et de responsabilités des femmes et des hommes dans la vie privée et dans la vie publique, en dispensant aux enseignants une formation sur les droits de l’homme et l’égalité des sexes et en révisant les manuels éducatifs afin d’en éliminer les stéréotypes sexistes. Le Comité exhorte en outre l’État partie à encourager les médias à éliminer les publicités sexistes et stéréotypées et à entretenir une image positive de la femme. Enfin, il recommande à l’État partie de s’attaquer spécifiquement aux stéréotypes visant les groupes vulnérables de femmes, comme les femmes roms.

Violence à l’égard des femmes

Tout en se félicitant des mesures prises par l’État partie pour éliminer la violence à l’égard des femmes, en particulier l’adoption de la loi sur la prévention de la violence familiale (2001), le Comité demeure préoccupé par la persistance de ce phénomène et en particulier par le manque d’informations sur l’application effective de la loi. Il constate avec préoccupation que les sanctions les plus couramment imposées aux agresseurs par les tribunaux sont des amendes, mesure qui est largement inefficace, ainsi qu’il ressort des réponses 14 et 15 adressées par écrit par l’État partie, puisqu’elle frappe l’ensemble de la famille et pas seulement l’agresseur. Le Comité déplore en outre le manque d’informations et de données statistiques ventilées par sexe concernant les types de violence à l’égard des femmes et le nombre de victimes.

Le Comité demande instamment à l’État partie d’appliquer effectivement la loi sur la prévention de la violence familiale (2001) et d’en surveiller l’impact sur les femmes. Il l’engage à adopter une démarche globale pour prévenir et combattre toutes les formes de violence à l’égard des femmes, conformément à sa recommandation générale n o  19, et à améliorer la recherche et la collecte de données sur la prévalence, les causes et les conséquences de la violence à l’égard des femmes, les résultats obtenus devant figurer dans son prochain rapport périodique. Le Comité demande à l’État partie de prendre les mesures nécessaires pour que des sanctions efficaces frappant spécifiquement les agresseurs soient appliquées en cas de violence familiale.

Tout en se félicitant de la création de maisons d’accueil et de centres sociaux pour les victimes de la violence familiale, le Comité est préoccupé par les obstacles mis à l’accès des femmes à ces services à cause de l’enregistrement obligatoire, de la limitation d’âge et du fait que ces centres manquent de fonds et n’existent pas dans toutes les régions.

Le Comité exhorte l’État partie à prendre les mesures nécessaires pour que les femmes victimes de violence familiale, notamment les femmes rurales et les groupes de femmes vulnérables comme les femmes roms, aient pleinement accès aux maisons d’accueil et aux centres sociaux et bénéficient immédiatement de voies de recours et d’une protection, sans limitation d’âge ou autre. Le Comité exhorte également l’État partie à veiller à ce que les fonctionnaires, en particulier les forces de l’ordre, le personnel judiciaire, le personnel de santé et les travailleurs sociaux, soient pleinement familiarisés avec la loi sur la prévention de la violence familiale (2001) et connaissent les autres formes de violence à l’égard des femmes, afin qu’ils puissent apporter l’assistance voulue aux victimes.

Traite des personnes

Tout en reconnaissant les efforts entrepris par l’État partie pour remédier à la traite des femmes et des filles, dont la création de plusieurs organes consultatifs, l’élaboration d’un projet de loi sur la lutte contre la traite des personnes et sur la protection des victimes et la ratification des instruments internationaux pertinents, le Comité note avec préoccupation que les causes profondes du phénomène ne sont pas traitées comme il se doit, que les fonds alloués aux maisons d’accueil restent modiques et qu’en général les ressources allouées à la lutte contre la traite des personnes demeurent insuffisantes. Le Comité est par ailleurs préoccupé par l’insuffisance de la coopération internationale visant à traduire les auteurs en justice.

Le Comité demande à l’État partie de se pencher sur les causes profondes de la traite des personnes, d’accélérer l’adoption de la loi sur la traite, de dégager suffisamment de fonds pour assurer l’application effective du Programme d’État pour la prévention de la traite des personnes en Ukraine et d’autres mesures visant à lutter contre ce phénomène et d’en surveiller régulièrement l’impact. En outre, il engage l’État partie à prendre les mesures voulues, dont l’affectation de fonds suffisants et la création d’autres maisons d’accueil, pour la réadaptation et l’intégration sociale des femmes et des filles victimes de la traite. De même, le Comité demande à l’État partie de veiller à ce que des enquêtes soient systématiquement menées et que les trafiquants soient poursuivis et punis, notamment grâce au renforcement de la coopération internationale, et de fournir des données sur le nombre des victimes ainsi que sur le nombre d’enquêtes et leurs résultats.

Participation à la vie politique et publique

Tout en reconnaissant que le nombre de femmes élues au sein des collectivités locales et de celles occupant des postes dans le service diplomatique a augmenté, le Comité réitère la préoccupation qu’il a exprimée dans ses précédentes observations finales de 2002 concernant la sous-représentation des femmes dans les organes de haut niveau élus ou nommés, notamment au Parlement, où elles ne représentent que 8 % des membres. Par ailleurs, le Comité note avec préoccupation que l’adoption du projet de loi no 1232, présenté depuis 2007 et portant modification de certains textes législatifs aux fins d’assurer l’égalité des chances pour les femmes et les hommes dans le processus électoral, y compris la réalisation d’un taux minimum de 30 % pour les deux sexes dans la composition du Parlement, a été retardée.

Le Comité demande instamment à l’État partie de prendre les mesures nécessaires pour accroître la représentation des femmes dans les organes élus ou nommés, notamment en appliquant des mesures temporaires spéciales, conformément au paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention et à la recommandation générale n o  25 du Comité, afin de permettre aux femmes d’exercer leur droit de participer, sur un pied d’égalité avec les hommes, à tous les domaines de la vie publique et en particulier d’occuper des postes de décision de haut niveau. En outre, le Comité encourage l’État partie à accélérer l’adoption de mesures législatives – comme le projet de loi n o  1232 présenté en 2007 – pour assurer l’égalité des chances aux femmes et aux hommes dans le processus électoral et dans la composition du Parlement.

Emploi

Tout en se félicitant de l’adoption récente du projet de loi modifiant la loi sur l’emploi, qui renforce les garanties d’égalité des chances en matière d’emploi, le Comité est préoccupé par la situation réelle des femmes sur le marché du travail, en particulier par le taux de chômage élevé chez ces dernières, et les importants écarts de salaire entre femmes et hommes, la ségrégation professionnelle et la persistance d’attitudes discriminatoires fondées sur le sexe chez les employeurs des secteurs public et privé, dont les pratiques discriminatoires en matière de recrutement et le harcèlement sexuel sur le lieu de travail. Le Comité s’inquiète également de ce que le manque de garderies d’enfants constitue un obstacle au plein exercice par les femmes de leur droit au travail.

Le Comité recommande que l’État partie prenne les mesures nécessaires pour faire respecter intégralement les dispositions de la Convention et pour garantir que les femmes jouissent, sur un pied d’égalité avec les hommes, de leur droit à un salaire égal pour un travail de valeur égale, pour réduire la ségrégation professionnelle fondée sur le sexe et pour instituer des sanctions appropriées en vue de mettre fin au harcèlement sexuel sur le lieu de travail et aux autres pratiques discriminatoires. En outre, le Comité engage l’État partie à mettre en place davantage de garderies d’enfants et à les rendre plus abordables afin de permettre aux femmes d’exercer leur droit au travail.

Autonomisation économique

Le Comité s’inquiète de ce que, comme indiqué dans les réponses à la liste des questions, l’application des réformes libérales a conduit à la pauvreté de masse, qui a rendu presque impossible, en particulier pour les femmes, l’exercice de la majorité des droits constitutionnels. Il est en outre préoccupé par le fait que la pauvreté touche plus de 70 % de la population en Ukraine, selon l’évaluation du Commissaire aux droits de l’homme, et que les femmes pourraient en pâtir de manière disproportionnée.

Le Comité exhorte l’État partie à évaluer l’incidence des réformes économiques internes et de la crise économique et financière internationale sur les femmes et à remédier à leurs effets négatifs sur celles-ci en prenant les mesures qui s’imposent et en dégageant des ressources financières suffisantes, et de l’en informer dans son prochain rapport. Il recommande également à l’État partie d’adopter une approche soucieuse d’égalité entre les sexes dans tous les programmes et stratégies de lutte contre la pauvreté et de tenir compte en particulier des besoins des femmes appartenant à des groupes vulnérables.

Santé

Tout en se félicitant du programme sur « la santé de la nation » pour la période 2002-2011 et du programme national de santé procréative adopté pendant la période considérée, le Comité demeure préoccupé par l’état de santé des femmes, en particulier en matière de procréation. Il est préoccupé par le grand nombre de grossesses indésirables et le taux élevé d’avortement mais aussi par le peu d’informations et de données fournies sur l’état de santé des femmes, s’agissant notamment des taux de mortalité chez elles et de leurs causes ainsi que des maladies qui touchent essentiellement les femmes et les filles. Le Comité est en outre préoccupé par le taux très élevé de l’infection au VIH/sida, ainsi que par l’augmentation du taux de mortalité pour des raisons liées directement à l’alcoolisme, qui est passé de 3,5 à 14,2 chez les femmes.

Le Comité recommande que l’État partie mette en place, conformément à sa recommandation générale n o  24 sur la santé, un cadre élargi pour les services de santé, doté de ressources suffisantes, et de suivre systématiquement l’accès des femmes aux services de santé. Il recommande également à l’État partie de redoubler d’efforts pour améliorer la santé procréative des femmes et fournir des services appropriés de planification familiale et des contraceptifs abordables et pour réduire le recours à l’avortement. Il l’encourage à poursuivre systématiquement les programmes d’éducation sexuelle dans les écoles, y compris dans les établissements de formation professionnelle. Il exhorte l’État partie à axer les stratégies de prévention du VIH/sida sur les groupes à risques. Le Comité demande à l’État partie de présenter dans son prochain rapport des informations et des données détaillées sur la santé des femmes, en particulier en ce qui concerne les groupes de femmes vulnérables, notamment sur les causes de mortalité féminine, de l’alcoolisme et du tabagisme, ainsi que sur les principales maladies touchant les femmes et les filles comme le cancer du sein et du col de l’utérus.

Relations familiales

Le Comité est préoccupé par les disparités qui persistent dans l’État partie en ce qui concerne l’âge minimum du mariage pour les garçons et les filles, fixé à 18 et 17 ans respectivement. Il est également préoccupé par le fait que la législation de l’État partie relative à la répartition des biens en cas de divorce ne reconnaît pas les biens incorporels tels que les pensions comme un élément des biens matrimoniaux à répartir.

Le Comité demande à l’État partie de veiller à ce que l’âge minimum du mariage soit porté à 18 ans pour les filles et qu’aucune dérogation à cet âge minimum ne soit permise, conformément à l’article 16 de la Convention et à la recommandation générale n o  21 du Comité. En outre, il recommande à l’État partie de prendre les mesures législatives nécessaires pour faire reconnaître les biens incorporels tels que les pensions comme un élément des biens matrimoniaux.

Groupes de femmes vulnérables

Le Comité déplore le manque de renseignements détaillés concernant les femmes migrantes et les réfugiées et d’autres groupes de femmes vulnérables, en particulier les Roms, qui pourraient subir de multiples formes de discrimination fondée sur le sexe, la race ou l’origine ethnique, le handicap, l’âge ou la sexualité.

L’État partie est invité à fournir, dans son prochain rapport, des informations détaillées et des données statistiques sur la situation des migrantes et des réfugiées et d’autres groupes de femmes vulnérables, en particulier les Roms, qui pourraient subir de multiples formes de discrimination fondée sur le sexe, la race ou l’origine ethnique, le handicap, l’âge ou la sexualité, et sur les mesures prises pour mettre fin à la discrimination à l’égard de ces femmes pour ce qui est de l’accès à la santé, à l’éducation, à l’emploi et aux prestations sociales, entre autres.

Collecte et analyse des données

Tout en se félicitant des efforts entrepris par l’État partie pour améliorer, avec le concours du Fonds des Nations Unies pour la population, la collecte des données relatives à la violence à l’égard des femmes, le Comité déplore le fait que le rapport ne fournisse pas suffisamment d’informations statistiques sur la situation des femmes dans tous les domaines visés par la Convention.

Le Comité demande à l’État partie de renforcer son système de collecte de données, notamment en utilisant des indicateurs mesurables pour évaluer l’évolution de la situation des femmes et les progrès accomplis vers l’égalité de fait entre les femmes et les hommes. Il invite l’État partie, le cas échéant, à solliciter une aide internationale pour développer les activités de collecte et d’analyse des données. Le Comité prie également l’État partie de présenter dans son prochain rapport des données sur la situation des femmes et des analyses statistiques ventilées par sexe et entre zones rurales et urbaines, en indiquant l’impact des politiques et des mesures mises en œuvre et les résultats obtenus.

Élaboration du prochain rapport

Le Comité encourage l’État partie à mettre en place un processus de consultation et de collaboration régulières avec les organisations non gouvernementales sur les questions liées à l’application de la Convention. Il recommande que l’État partie engage des consultations soutenues et systématiques avec diverses organisations non gouvernementales de femmes sur les questions touchant la promotion de l’égalité des sexes, notamment en ce qui concerne le suivi des observations finales du Comité et l’élaboration des futurs rapports.

Déclaration et Programme d’action de Beijing

Le Comité exhorte l’État partie à recourir pleinement, dans l’exécution des obligations qui lui incombent au titre de la Convention, à la Déclaration et au Programme d’action de Beijing, qui renforcent les dispositions de la Convention, et demande à l’État partie de faire figurer, dans son prochain rapport périodique, des éléments d’information sur la question.

Objectifs du Millénaire pour le développement

Le Comité souligne qu’une application pleine et effective de la Convention est indispensable pour atteindre les objectifs du Millénaire pour le développement. Il invite à prendre en compte la problématique hommes-femmes et à faire expressément référence aux dispositions de la Convention dans tous les efforts visant à la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement, et demande à l’État partie de faire figurer, dans son prochain rapport périodique, des éléments d’information sur la question.

Ratification des autres traités

Le Comité note que l’adhésion des États aux neuf grands instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme contribue à promouvoir l’exercice effectif des droits individuels et des libertés fondamentales des femmes dans tous les aspects de leur vie. Il encourage donc l’État partie à envisager de ratifier les instruments auxquels il n’est pas encore partie, à savoir la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille et la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées.

Diffusion des observations finales

Le Comité demande que les présentes observations finales soient largement diffusées dans l’État partie pour que la population du pays, en particulier les responsables gouvernementaux, les responsables politiques, les parlementaires et les membres d’organisations féminines et d’organisations de défense des droits de l’homme, soit au courant des mesures prises pour assurer l’égalité de droit et de fait entre les sexes et des dispositions qui restent à prendre à cet égard. Il prie l’État partie de diffuser largement, surtout auprès des organisations féminines et des organisations de défense des droits de l’homme, le texte de la Convention, de son Protocole facultatif, de ses propres recommandations générales, de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing, ainsi que les textes issus de la vingt-troisième session extraordinaire de l’Assemblée générale, intitulée « Les femmes en l’an 2000 : égalité entre les sexes, développement et paix pour le XXIe siècle ».

Suivi des observations finales

Le Comité prie l’État partie de présenter par écrit, dans un délai de deux ans, des informations concernant les mesures prises pour mettre en œuvre les recommandations figurant aux paragraphes 31 et 33 ci-dessus.

Date du prochain rapport et directives concernant l’établissementde rapports

Le Comité prie l’État partie de répondre aux préoccupations exprimées dans les présentes observations finales dans le prochain rapport périodique qu’il doit soumettre en vertu de l’article 18 de la Convention. Il invite l’État partie à présenter son prochain rapport périodique en février 2014.

Le Comité invite l’État partie à suivre les Directives harmonisées pour l’établissement de rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, englobant le document de base commun et les rapports pour chaque instrument, approuvées lors de la cinquième réunion intercomités des organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, en juin 2006 (HRI/MC/2006/3). Les directives sur l’établissement de rapports propres à un instrument international, que le Comité a adoptées à sa quarantième session en janvier 2008, doivent être appliquées concurremment avec les directives harmonisées relatives au document de base commun. Ensemble, elles constituent les directives harmonisées pour l’établissement de rapports au titre de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. Le document propre à cet instrument ne devrait pas dépasser 40 pages et le document de base commun actualisé devrait comporter de 60 à 80 pages.