NATIONS

UNIES

CCPR

Pacte international

relatif aux droits civils et politiques

Distr.

GÉNÉRALE

CCPR/C/DEU/2002/5

4 décembre 2002

FRANÇAIS

Original : ANGLAIS

COMITÉ DES DROITS DE L’HOMME

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES

CONFORMÉMENT À L'ARTICLE 40 DU PACTE

Cinquième rapport périodique

ALLEMAGNE *

[13 novembre 2002]

_______________

* Le présent document est publié sans modifications d'ordre rédactionnel, conformément au vœu exprimé par le Comité des droits de l’homme à sa soixante-sixième session, en juillet 1999.

GE.02-46198 (EXT)

TABLE DES MATIÈRES

Page

Liste des abréviations8

A. Observations préliminaires9

B. Observations finales du Comité des droits de l’homme12

C. Faits nouveaux concernant les droits de l'individu12

Article premier12

Article 212

Application au plan national des droits reconnus dans le Pacte12

Article 314

Égalité de droits des femmes et des hommes14

1. Faits récents concernant le droit constitutionnel14

2. Politique en matière d'égalité15

3. Faits récents concernant la législation du travail15

a)Fonction publique fédérale15

b)Industrie privée16

4. Activités internationales18

Articles 4 et 518

Article 618

Droit à la vie18

1. Observations fondamentales18

2. Protection de la vie humaine dans le système juridique : deux exemples19

a)Utilisation d'armes à feu par la police19

b)Protection contre l'expulsion de toute personne dont la vie est menacée21

3. Poursuites pénales intentées du chef d'homicide réalisé en violation desdroits de l'homme à la frontière intra-allemande22

TABLE DES MATIÈRES ( suite )

Page

4. Protection de la vie et faits nouveaux concernant le droit pénal international24

a)Création de la Cour pénale internationale24

b)Coopération avec les tribunaux des Nations Unies24

c)Projet de code pénal international25

5. Poursuite par les juridictions pénales allemandes de crimes relevant du droit pénal international25

6. Initiatives tendant à abolir la peine capitale partout dans le monde27

Article 728

Interdiction de torture et des autres formes de traitements inhumains ou dégradants;expériences médicales28

1. Interdiction de la torture et des autres formes de traitements inhumains ou dégradants28

2. Expériences médicales30

3. Protection des personnes vivant dans des foyers de résidence de longue durée31

Article 832

Interdiction de l'esclavage et du travail forcé32

1. Travail forcé32

a)Observations générales32

b)Indemnisation des victimes du travail forcé sous le régime national socialiste 33

2. Traite d'esclaves34

Article 935

Garanties en cas de privation de liberté35

1. Observations fondamentales35

2. Détention provisoire36

3. Procédures devant des institutions internationales37

TABLE DES MATIÈRES ( suite )

Page

4. Internement et traitement38

Article 1040

Mesures de protection des personnes privées de liberté40

1. Mécanismes de contrôle40

2. Réadaptation à la vie sociale en prison41

a)Observations fondamentales41

b)Faits nouveaux intervenus pendant la période considérée42

3. Régime cellulaire43

Article 1144

Interdiction de l'emprisonnement pour incapacité d'exécuter une obligationcontractuelle44

Article 1245

Liberté de mouvement et droit de quitter tout pays45

1. Liberté de mouvement45

2. Droit de quitter tout pays46

Article 1347

Expulsion47

Article 1449

Droits en justice, notamment en cas de procédure pénale49

1. Accès aux tribunaux50

2. Publicité du procès50

3. Droits dans le contexte de procédures pénales51

a)Droit à un procès équitable, paragraphe 1 de l'article 1451

b)Garantie du droit de l'accusé d'interroger les témoins, paragraphe 3 e)l'article 1452

TABLE DES MATIÈRES ( suite )

Page

c)Droit d'être jugé dans des délais raisonnables, paragraphe 4 c) de l'article 1453

d)Droit à l'assistance gratuite d'un interprète, paragraphe 3 f) de l'article 1454

e)Reprise de la procédure, paragraphe 6 de l'article 1454

Article 15 54

Principe nulla poena54

Article 16 56

Reconnaissance de la personne au regard de la loi56

Article 1756

Protection de la vie privée56

1. Modification de l'article 13 de la Loi fondamentale et de l'article 100c ducode de procédure pénale56

2. Nouvelle jurisprudence relative à la procédure pénale57

3. Protection des données58

a)Nouvelle Loi fédérale de 2001 sur la protection des données (Bundesdatenschutzgesetz)58

b)Transfert de données à des États tiers59

Article 1859

Droit à la liberté de conscience et de religion59

1. Jurisprudence uniforme relative au droit à la liberté de conscience et de religion59

2. Formation continue des magistrats61

Article 1961

Liberté d'expression61

Article 2063

Interdiction de l'incitation et de la propagande de guerre63

TABLE DES MATIÈRES ( suite )

Page

Article 2165

Liberté de réunion65

Article 2267

Liberté d'association et droit de constituer des syndicats67

1. Liberté d'association67

a)Liberté d'association et droit de créer des partis politiques67

b)Interdiction d'associations extrémistes67

2. Droits syndicaux68

Article 2369

Protection du mariage et de la famille69

1. Protection du mariage et de la famille69

2. Protection des enfants contre la violence70

3. Séparation de corps et divorce70

4. Régime matrimonial71

5. Égalité de droit en ce qui concerne le nom71

6. Protection de la famille en droit fiscal72

Article 2472

Droits des enfants72

1. Nouvelle Loi sur les relations entre parents et enfants72

2. Principe de non-discrimination75

a)Enfants étrangers75

b)Protection spéciale des filles76

c)Égalité des enfants nés hors mariage77

TABLE DES MATIÈRES ( suite )

Page

Article 2578

Droits civils78

1. Mesures de la Fédération et des Länder concernant les nominations dans lafonction publique78

a)Groupes de certaines sectes religieuses78

b)Licenciement des fonctionnaires de la République démocratique allemande79

2. Accès de ressortissants de pays de l'Union européenne aux fonctions publiques81

3. Droit de vote des étrangers81

Article 2682

Protection contre la discrimination82

1. Initiatives contre la xénophobie82

a)Renforcement de la société civile et du courage civil82

b)Promotion de l'intégration83

c)Lutte contre les comportements xénophobes et leur environnement84

d)Éducation en matière des droits de l'homme85

1)Éducation en matière des droits de l'homme dans la police85

2)Éducation en matière des droits de l'homme dans les forces armées fédérales87

3)Enseignement des droits de l'homme parmi les élèves et les jeunes89

e)Autres mesures adoptées concernant les jeunes93

2. Loi civile contre la discrimination96

3. Partenariats déclarés pour couples du même sexe96

4. Réserves formulées lors de la ratification du Protocole facultatif97

Article 2797

Protection des minorités97

Liste des abréviations

Add. Additif

CE Communauté européenne

ETS Séries des Traités européens

HCR Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés

p. Page

par. Paragraphe

RDA République démocratique allemande

UE Union européenne

CINQUIÈME RAPPORT PÉRIODIQUE PRÉSENTÉ PAR LA RÉPUBLIQUE FÉDÉRALE D'ALLEMAGNE CONFORMÉMENT À L'ARTICLE 40 DU PACTE INTERNATIONAL RELATIF AUX DROITS CIVILS ET POLITIQUES

Période couverte par le rapport : septembre 1993-juillet 2002

A. Observations préliminaires

Le Gouvernement allemand soumet ci-après au Comité des droits de l'homme son cinquième rapport périodique, conformément à l'article 40 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Le rapport porte sur une période pendant laquelle la coopération internationale en matière des droits de l'homme a été marquée par plusieurs anniversaires. Ainsi, 1998 a marqué le cinquantième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme et, en novembre 2000, l'Europe a célébré le demi-siècle pendant lequel la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales a beaucoup encouragé le développement des droits de l'homme dans toute l'Europe et au-delà.

En outre, la Constitution fédérale, c'est-à-dire la Loi fondamentale (Grundgesetz) pour la République fédérale d'Allemagne, s'applique maintenant depuis 1949, c'est-à-dire depuis plus de cinq décennies. La Loi fondamentale énumère, parmi la liste des droits fondamentaux, les droits essentiels de la personne humaine. En outre, 2001 a été le cinquantième anniversaire du début des travaux de la Cour constitutionnelle fédérale, qui a beaucoup contribué, par l'uniformité de sa jurisprudence concernant les libertés fondamentales et les droits de l'homme, à faire en sorte que les droits de l'homme aient été respectés et soient devenus des droits vivants en République fédérale d'Allemagne. Il n'est pas rare que la Cour constitutionnelle fédérale fonde exclusivement ses arrêts sur les dispositions du Pacte.

Le cinquième rapport périodique – qui est en soi également un anniversaire mineur – montre que la République fédérale d'Allemagne est aujourd'hui un élément fiable de la coopération mondiale et régionale au sein de la communauté internationale, en particulier dans le domaine des droits de l'homme. Les libertés fondamentales et les droits de l'homme constituent la pierre angulaire du système du Gouvernement allemand. L'obligation de protéger la dignité de l'individu ainsi que les droits inviolables et inaliénables de l'être humain sont à la base de la Constitution allemande. Ainsi, le paragraphe 1 de l'article premier de la Loi fondamentale se lit comme suit :

"La dignité de l'être humain est intangible. Tous les pouvoirs publics ont l'obligation de la respecter et de la protéger."

Ce principe découle de l'article premier de la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948. Aux termes du paragraphe 2 de l'article premier de la Loi fondamentale "... le peuple allemand reconnaît à l'être humain des droits inviolables et inaliénables comme fondements de toute communauté humaine, de la paix et de la justice dans le monde".

La République fédérale d'Allemagne peut aujourd'hui se vanter de plus de dix ans de développement des droits de l'homme dans une Allemagne unifiée. L'appel en faveur des droits de l'homme et l'invocation des dispositions du Pacte n'ont pas été les moindres des éléments qui ont conforté les citoyens de la République démocratique allemande dans leur quête de liberté, de droits de l'homme et d'unité pour l'Allemagne. Des normes uniformes de protection des droits de l'homme s'appliquent désormais à l'ensemble du pays. Le quatrième rapport périodique de l'Allemagne a rendu compte en détail de tous ces faits nouveaux. Les dix dernières années ont également été une période d'enquête sur ce qu'il est convenu d'appeler la "criminalité d'État de la RDA". Les poursuites pénales entamées du chef des violations des droits de l'homme commises par la République démocratique allemande, en particulier, ont été fondées pour une très large part sur les travaux préparatoires du Pacte (voir à ce propos les informations fournies sous la rubrique de l'article 6 aux paragraphes 63 et suivants).

Tout récemment, la République fédérale d'Allemagne a mis l'accent sur des éléments nouveaux. Dans son accord de coalition de l'automne 1998, le Gouvernement fédéral a décidé de faire des droits de l'homme un aspect prioritaire de son activité. En Allemagne, la politique de protection des droits de l'homme est considérée comme une entreprise transversale, l'État devant tenir compte dans tous les domaines de son activité – tant au plan interne que dans son action extérieure – de l'objectif consistant à protéger et à promouvoir les droits de l'homme, comme prévu par la Constitution.

Une politique de protection efficace des droits de l'homme commence chez soi, de sorte que la République fédérale s'est employée à améliorer les moyens nationaux disponibles pour protéger et promouvoir les droits de l'homme. En 1998, au début de la quatorzième législature, le Parlement fédéral allemand a créé une "Commission indépendante des droits de l'homme", question qui relevait jadis seulement d'une Sous-Commission de la Commission des affaires étrangères. La Commission des droits de l'homme suit la situation des droits de l'homme en République fédérale et les problèmes qui se posent dans ce domaine à l'étranger.

Le Gouvernement fédéral soumet au Parlement fédéral, tous les deux ans, un rapport sur la situation des droits de l'homme et collabore aussi étroitement que possible avec le Parlement dans ce domaine. Le sixième rapport du Gouvernement fédéral sur les aspects concernant les droits de l'homme, de sa politique étrangère et de ses autres politiques, soumis en juin 2002, décrit de façon plus détaillée que les rapports antérieurs la situation des droits de l'homme en République fédérale.

Indépendamment du poste de Commissaire aux droits de l'homme créé en 1970 au sein du Ministère fédéral de la justice, le Gouvernement fédéral a créé en novembre 1998 un poste de Commissaire aux droits de l'homme et à l'aide humanitaire, relevant du Ministère des affaires étrangères. Comme toutes les autres institutions du Gouvernement fédéral, ces deux Commissaires s'emploient à resserrer et à améliorer la coopération avec les organisations non gouvernementales (ONG).

La création de l'Institut national des droits de l'homme, entité indépendante structurée conformément aux principes de Paris (A/52/469/Add.1) constitue un jalon majeur dans les efforts déployés par la République fédérale en faveur des droits de l'homme. Sa création a été rendue possible par une résolution adoptée par le Parlement fédéral et par la garantie d'un financement de base par la République fédérale. L'Institut a été fondé le 8 mars 2001 et ses différents organes ont maintenant été constitués et ont commencé à travailler.

L'Institut des droits de l'homme doit jouer un rôle central d'information et de documentation en matière de droits de l'homme, réaliser des programmes d'éducation sur les droits de l'homme et des recherches orientées vers l'action, donner des avis aux milieux politiques et aux organisations

non gouvernementales et promouvoir le dialogue et la coopération entre les institutions et organisations gouvernementales et non gouvernementales. L'Institut est une entité indépendante de droit privé et les représentants du gouvernement n'ont pas le droit de vote aux organes de l'Institut.

Un autre important domaine d'activité en matière de droits de l'homme est la mise en oeuvre d'une politique énergique visant à lutter contre la violence et les mouvements xénophobes et antisémites de l'extrême droite. L'"Alliance pour la démocratie et la tolérance", créée à Berlin le 23 mai 2000, rassemble plus de 900 groupes et individus et représente par conséquent l'une des forces les plus puissantes de la société allemande. Son activité est dirigée pour l'essentiel par un conseil consultatif de 20 membres auquel siègent des représentants du gouvernement et du Parlement, du Sénat de Berlin et des Commissaires fédéraux pour la défense des intérêts des étrangers ainsi que des représentants de l'industrie, des syndicats, des milieux universitaires, de la communauté juive et des organisations de la société civile. L'Alliance coordonne et appuie des plans et des projets en vue de lutter contre la xénophobie. Le Gouvernement fédéral a lancé d'autres initiatives pour réprimer efficacement l'extrémisme de droite. Ces initiatives sont décrites en détail dans le présent rapport sous la rubrique 26 du Pacte, aux paragraphes 326 et suivants. La République fédérale est résolue à prévenir toutes les formes de discrimination et de xénophobie dans le pays.

Indépendamment des efforts déployés dans le pays même, la République fédérale d'Allemagne oeuvre, aux échelons tant régional qu'international, au développement continu du système de droits de l'homme. Au plan européen, le Gouvernement allemand a pris de nombreuses initiatives dans le contexte de l'Union européenne et du Conseil de l'Europe. Il y a lieu de citer tout particulièrement la Charte européenne des droits fondamentaux qui a été proclamée lors du Sommet de l'Union européenne qui a eu lieu à Nice en décembre 2000, et à l'élaboration de laquelle la République fédérale a apporté tout son appui. La Convention qui a rédigé le texte était présidée par l'ancien Président de la République fédérale d'Allemagne et ancien Président de la Cour constitutionnelle fédérale, le Professeur Roman Herzog. Dans le contexte du Conseil de l'Europe, le Gouvernement fédéral s'attache tout particulièrement à poursuivre sa coopération constructive avec la Cour européenne des droits de l'homme et à promouvoir le respect et le développement de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme (par exemple en vue de l'abolition de la peine capitale en toutes circonstances, comme indiqué ci-dessous aux paragraphes 89 et suivants).

La République fédérale d'Allemagne s'emploie également à promouvoir le développement des régimes internationaux de protection des droits de l'homme. Elle a retiré la réserve qu'elle avait formulée au sujet du paragraphe 2 de l'article 7 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et, pendant l'été 2001, a soumis à l'Organisation des Nations Unies une déclaration par laquelle elle s'est soumise à la procédure de communication prévue à l'article 14 de la Convention des Nations Unies pour l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale en date du 7 mars 1966. En 2001 également, elle a présenté des déclarations conformément aux articles 21 et 22 de la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines et traitements cruels, inhumains ou dégradants admettant les communications présentées par des individus ou des États. En outre, la République fédérale s'est soumise pour la première fois, sans limitation de temps, aux procédures menées conformément à l'article 41 du Pacte (communication

présentée par des États). La République fédérale d'Allemagne a également reconnu la procédure de communications et la procédure d'enquête par ratification, le 15 janvier 2002, du Protocole facultatif à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes.

Tous ces éléments confirment la volonté de la République fédérale d'Allemagne de coopérer aux échelons, national, régional et international avec les organisations gouvernementales, supranationales et non gouvernementales pour appuyer efficacement la protection et la promotion des droits de l'homme. Le cinquième rapport périodique entend contribuer à cet effort mondial commun.

B. Observations finales du Comité des droits de l’homme

Après avoir, les 4 et 5 novembre (CCPR/C/SR.1551-1553), examiné le quatrième rapport périodique de l'Allemagne (CCPR/C/84/Add.5), le Comité des droits de l'homme de l'Organisation des Nations Unies a résumé ses constatations dans ses observations finales adoptées le 7 novembre 1996 (document CCPR/C/79/Add.73 en date du 18 novembre 1996). La République fédérale a accueilli ces observations avec un très vif intérêt et, lorsqu'elles reflétaient une critique, les a examinées et analysées soigneusement. Toutes les observations critiques seront discutées ci-après sous les rubriques appropriées (paragraphe 151 pour l'observation 11; paragraphes 326 à 366 et 340 et suivants relatifs à l'éducation en matière de droits de l'homme pour l'observation 12; paragraphes 373 et suivants pour l' observation 13; paragraphes 371 et suivants pour l'observation 14; paragraphes 157 et suivants pour l'observation 15; paragraphes 308 à 314 et 232 à 236 pour l'observation 16; paragraphes 307 et 308 et 314 et suivants pour l'observation 17; paragraphes 263 et 266 à 268 pour l'observation 18; paragraphes 264 et 284 et suivants pour l'observation 19).

C. Faits nouveaux concernant les droits de l'individu

Article premier

Droit des peuples à disposer d'eux-mêmes

La République fédérale d'Allemagne attache une importance considérable au droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, comme souligné dans les rapports antérieurs (voir notamment les paragraphes 47 à 52 du troisième rapport CCPR/C/52/Add.3 et les paragraphes 12 et 13 du quatrième rapport CCPR/C/84/Add.5).

Article 2

Application au plan national des droits reconnus dans le Pacte

La République fédérale d'Allemagne veille à ce que les droits consacrés dans le Pacte soient garantis, dans tous les domaines relevant de son pouvoir souverain, sans discrimination de quelque nature que ce soit. Le Pacte est directement applicable en droit allemand et, comme toutes autres lois, a été publié au Journal officiel fédéral (Bundesgesetzblatt 1973, Partie II, p. 1553). Tous peuvent par conséquent consulter le libellé intégral des définitions des droits reconnus par le Pacte. Le Pacte est également reproduit dans les recueils des lois publiés par des maisons d'édition privées. En outre, le Gouvernement fédéral a publié des brochures pour diffuser le texte du Pacte parmi les populations. Le Centre fédéral pour l'instruction civique de Bonn a fait paraître une publication intitulée "Les droits de l'homme" qui reproduit le texte de tous les principaux documents et déclarations liés à la protection internationale des droits de l'homme. Cette publication contient le texte du Pacte et de ses deux protocoles facultatifs et est vendue au public à un prix symbolique. Enfin, les principaux documents concernant la protection des droits de l'homme peuvent être consultés sur Internet à l'adresse http://www.auswaertiges-amt.de .

Tous les organes gouvernementaux sont liés par les droits reconnus par le Pacte et, en République fédérale, des juridictions indépendantes veillent au respect des droits de l'homme. Conformément au paragraphe 4 de l'article 19 de la Loi fondamentale, quiconque considère que ses droits ont été violés par une autorité publique peut saisir les tribunaux, et ce principe est appliqué dans tous les domaines du système juridique allemand. Toutes les personnes qui résident en République fédérale peuvent par conséquent attaquer devant les tribunaux, qui sont indépendants, toute violation des droits reconnus par le Pacte. En outre, quiconque peut soumettre des requêtes ou des plaintes écrites aux autorités et aux parlements de la Fédération et des Länder (article 17 de la Loi fondamentale). Après épuisement des recours légaux, quiconque peut également former un recours spécial devant la Cour constitutionnelle fédérale pour lui demander de statuer sur le point de savoir si un organisme investi de l'autorité publique a commis une violation des libertés fondamentales et des droits de l'homme.

La République fédérale d'Allemagne a également veillé à ce que toutes les personnes soumises à sa juridiction puissent saisir des organes internationaux pour faire en sorte que leurs droits fondamentaux soient respectés. L'Allemagne ayant signé le Protocole facultatif au Pacte, sept communications ont été présentées sur cette base au Comité des droits de l'homme pendant la période considérée. Cinq de ces communications ont été jugées irrecevables (communications K.V. et C.V., dossier no 568/1993; communication Maloney, dossier no 755/1997 : communication Rogl, dossier no 808/1998; communication Kehler, dossier no 834/1998; communication Nerenberg, dossier no 931/2001) et deux autres sont encore en suspens (communication Baumgarten, dossier no 960/2000; communication Lavelle, dossier no 1003/2001).

La soumission d'une requête à la Cour européenne des droits de l'homme par toute personne qui considère qu'un droit protégé par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales a été violé constitue un autre moyen important de protection des droits de l'homme. Pour l'essentiel, les droits garantis par la Convention européenne correspondent à ceux qui sont protégés par le Pacte.

En outre, la République fédérale d'Allemagne s'est reconnue liée par la procédure de communications prévue par la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale, la Convention contre la torture et les peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes (voir également le paragraphe 41 ci ‑dessous). L'Allemagne a ratifié le Protocole facultatif à cette dernière Convention le 15 janvier 2002.

La République fédérale se conforme aux décisions rendues par toute juridiction allemande ou internationale considérant que la République fédérale a commis une violation des droits de l'homme. À ce jour, aucun des comités ayant compétence pour connaître des procédures visées par les instruments relatifs aux droits de l'homme conclus sous les auspices de l'Organisation des Nations Unies n'a formulé de recommandation ou de décision condamnant la République fédérale. Celle-ci, néanmoins, est résolue à s'acquitter de toutes les obligations que lui imposent les lois internationales.

Le document de base (HRI/CORE/1/Add.75, paragraphes 58 à 61; les paragraphes 62 à 65 dans la nouvelle version soumise à l'Organisation des Nations Unies en même temps que le présent rapport) contient des informations touchant la structure et l'organisation du système juridique de la République fédérale d'Allemagne.

D'autres informations concernant l'article 2 du Pacte ont été communiquées dans les premier et deuxième rapports périodiques (CCPR/C/1/Add.18, p. 16 et CCPR/C/28/Add.6, paragraphes 17 à 20). En outre, le document de base de la République fédérale d'Allemagne (HRI/CORE/1/Add.75, paragraphes 73 et suivants; et paragraphes 80 et suivants dans la nouvelle version présentée à l'Organisation des Nations Unies en même temps que le présent rapport) contient dans sa section III.A une description de la situation en ce qui concerne le respect des droits de l'homme en Allemagne.

Article 3

Égalité de droits des femmes et des hommes

Le Gouvernement fédéral est fermement résolu à faire respecter les droits des femmes en tant que droits fondamentaux de la personne humaine. La protection des femmes contre la discrimination et les violations des droits de l'homme constitue l'un des piliers des politiques du Gouvernement fédéral concernant la promotion aussi bien de l'égalité que des droits de l'homme.

1. Faits récents concernant le droit constitutionnel

Pendant la période considérée, deux amendements ont été apportés aux dispositions de la Loi fondamentale relatives à l'égalité de droits des hommes et des femmes.

Aux termes de la Loi du 27 octobre 1994 (Journal officiel fédéral, Partie I, p. 3146), la phrase ci ‑après a été ajoutée au paragraphe 2 de l'article 3 de la Loi fondamentale, qui garantit l'égalité de droits des hommes et des femmes : "L'État appuie la réalisation effective de l'égalité des femmes et des hommes et s'emploie à éliminer les inégalités existantes". Le terme de cet amendement, qui a pour but de garantir le respect effectif, dans la pratique, du principe de l'égalité de droits, énonce l'un des objectifs de l'État et fait aux organismes étatiques l'obligation d'adopter des mesures pour garantir l'égalité effective de droits dans tous les domaines de l'action de l'État et de la société. Il ne s'agit pas seulement d'éliminer les privilèges ou situations désavantagées découlant des dispositions de la législation en vigueur, mais plutôt de rapprocher, dans la réalité, les conditions de vie des hommes et des femmes. Cela représente par conséquent un effort de solution non pas tant d'un problème juridique mais plutôt d'un problème social. Faire de ce principe l'un des objectifs de l'État indique donc clairement que nul ne peut prétendre à un traitement particulier de la part de l'État. Cette nouvelle disposition de la Constitution a pour but de mener au niveau de la Fédération, des Länder et des administrations locales une politique de promotion appropriée pour garantir effectivement l'égalité de droits entre les sexes.

En outre, la Loi du 19 décembre 2000 (Journal officiel fédéral, Partie I, p. 1755) a remanié la deuxième phrase du paragraphe 4 de l'article 12 a de la Loi fondamentale pour permettre aux femmes d'avoir accès à toutes les carrières dans les forces armées. Jusqu'alors, les femmes ne pouvaient être employées que dans le service médical des armées et dans les unités de musique militaire. Les femmes peuvent désormais se porter volontaires pour un service professionnel ou de carrière dans les forces armées ou pour des services spécifiques, comme des opérations en temps de paix et des opérations spéciales à l'étranger.

2. Politique en matière d'égalité

Dans le cadre du programme "Les femmes et le travail" adopté par le Gouvernement fédéral en juin 1999, il a été mis en oeuvre un train de mesures tendant à améliorer la situation sur le marché du travail, difficile pour beaucoup de femmes. Le programme est fondé sur le principe selon lequel la politique de promotion de l'égalité est une entreprise transversale tendant à intégrer des considérations sexospécifiques dans tous les domaines tout en menant une action délibérée de promotion de la situation des femmes.

Le programme a pour objectif d'améliorer les possibilités qui s'offrent aux femmes dans les domaines de la formation et du travail, en particulier dans les secteurs d'avenir de la société de l'information ainsi que dans la recherche et l'enseignement, d'éliminer la discrimination en matière de revenus et de salaires et les obstacles auxquels se heurtent les femmes qui cherchent à créer des affaires ainsi que de promouvoir des conditions permettant de concilier la vie familiale et le travail rémunéré. Dans ce contexte, le Gouvernement fédéral a amélioré le cadre législatif en réformant, avec effet à compter de 2001, le régime de prestations d'aide à l'enseignement et de congé de maternité et de paternité.

La problématique hommes-femmes est une question qui a été incorporée aux règlements communs des Ministères fédéraux, dont tous les organismes sont tenus d'intégrer une perspective hommes-femmes à toutes les mesures politiques, législatives et administratives appliquées par le Gouvernement fédéral.

3. Faits récents concernant la législation du travail

a) Fonction publique fédérale

La nouvelle Loi fédérale relative à l'égalité dans l'administration fédérale et les tribunaux fédéraux (Bundesgleichstellungsgesetz für die Bundesverwaltung und die Gerichte des Bundes), qui est entrée en vigueur le 5 décembre 2001 (Journal officiel fédéral, Partie I, p. 3234), met un accent plus marqué sur l'égalité entre les membres de la fonction publique fédérale. Cette loi remplace la Loi fédérale sur la promotion de la femme (Frauenfördergesetz des Bundes), en vigueur depuis 1994, qui n'avait pas eu l'effet escompté, ses dispositions n'étant pas suffisamment contraignantes. La nouvelle loi tend à promouvoir de façon décisive l'égalité effective des femmes et des hommes dans la fonction publique fédérale, conformément au mandat constitutionnel reflété dans la Loi fondamentale (deuxième phrase du paragraphe 2 de l'article 3, aux règles du Traité portant création de la CE (article 2, paragraphe 2 de l'article 3 et paragraphe 4 de l'article 141) et aux obligations découlant du droit international (article 11 de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes). Avec cette loi, l'État doit, en sa qualité d'employeur, jouer un rôle de modèle en matière d'égalité.

Les nouvelles dispositions et les définitions plus précises de cette nouvelle loi prévoient notamment ce qui suit :

À égalité de qualifications, la préférence est accordée aux femmes si elles sont sous ‑représentées dans le domaine dont il s'agit, compte tenu des circonstances individuelles concernant la formation, les nominations, le recrutement et les promotions (ce qu'il est convenu d'appeler le contingent de cas individuels).

Les dispositions précédemment en vigueur touchant les mesures à prendre pour permettre aux hommes comme aux femmes de concilier leur vie familiale et une activité rémunérée ont été améliorées.

Les plans de promotion de l'égalité ont été élargis de façon à devenir des outils efficaces et modernes de planification et de développement de la gestion des ressources humaines.

Les droits et obligations des responsables de l'égalité des autorités fédérales ont été renforcés et concrétisés et leur mandat a été élargi.

Le principe reconnu au plan international d'intégration de la problématique hommes-femmes, à savoir l'incorporation de considérations sexospécifiques dans tous les domaines des politiques publiques, a été consacré comme principe directeur de la fonction publique fédérale.

Toutes les dispositions législatives de la Fédération ainsi que la correspondance officielle écrite doivent désormais être rédigées en termes sexuellement neutres et la législation existante doit être revue du point de vue linguistique pour éliminer toutes les désignations de personnes au masculin.

b) Industrie privée

Avec la conclusion, le 2 juillet 2001, de l'accord tendant à promouvoir l'égalité des chances dans l'industrie privée, le Gouvernement fédéral et les organisations centrales de l'industrie allemande ont accompli un progrès considérable sur la voie de l'égalité des hommes et des femmes dans le secteur industriel. Lesdites organisations se sont engagées pour la première fois à mettre en oeuvre une politique dynamique de promotion de l'égalité.

L'accord prévoit que les entreprises devront adopter les mesures ci-après, entre autres :

faire de l'égalité des chances et de conditions de travail "amies de la famille" un élément de leur politique générale;

accroître la proportion de femmes à des postes de responsabilité;

offrir des incitations à un nombre accru de jeunes femmes pour les encourager à suivre une formation et des programmes d'études orientés vers l'avenir;

améliorer les possibilités, pour les mères et pour les pères, de concilier leur vie familiale et leur emploi rémunéré;

fixer des objectifs contraignants en vue de la réalisation de l'égalité des chances et de garantir la possibilité de concilier travail et famille et les documenter, en consultation avec le personnel.

Ce concept moderne de l'égalité entre hommes et femmes dans l'industrie privée est fondé sur l'initiative des entreprises elles-mêmes. Son application doit être suivie par un groupe de haut niveau composé de représentants des milieux politiques et des entreprises. Un premier examen des résultats obtenus doit avoir lieu en 2003, après quoi il sera établi un bilan périodique à intervalles de deux ans. Le groupe doit commencer par établir une analyse de référence.

La loi portant modification de la Loi sur les organismes du travail (Gesetz zur Reform des Betriebsverfassungsgesetzes), qui est entrée en vigueur le 28 juillet 2002, contient un grand nombre de dispositions fondées sur le principe de l'égalité entre les sexes et devrait par conséquent beaucoup contribuer à garantir l'égalité des hommes et des femmes et à améliorer les possibilités de concilier famille et travail. Ces principales dispositions tendent notamment à accroître la représentation des femmes aux conseils de travailleurs, à éliminer les obstacles auxquels se heurtent actuellement les travailleurs à temps partiel en particulier, à résoudre le problème des membres consultatives des conseils de travailleurs, qui doivent fréquemment travailler et participer à une formation en dehors de leurs heures de travail ainsi qu'à élargir les attributions et les droits des conseils de travailleurs dans le cadre de promotion de l'égalité des chances entre hommes et femmes. Ces droits comprennent notamment celui de proposer des plans de promotion des femmes dans le contexte de la planification des ressources humaines ainsi que de proposer des mesures pour permettre aux travailleurs de concilier famille et emploi. Les employeurs, pour leur part, doivent tenir compte dans la planification des ressources humaines de la nécessité de promouvoir et de garantir l'égalité effective des hommes et des femmes et doivent discuter de leurs idées à ce sujet avec les conseils des travailleurs, ainsi que faire rapports lors des assemblées de travailleurs et des réunions de travail sur la situation en ce qui concerne l'égalité entre hommes et femmes dans l'entreprise.

La Loi sur le travail à temps partiel et les contrats d'emploi de durée déterminée (Gesetz über Teilzeitarbeit und befristete Arbeitsverträge) est entrée en vigueur le 1 er janvier 2001. Celles de ses dispositions qui concernent le travail à temps partiel – et en particulier le droit de travailler à temps partiel – ont pour but de contribuer efficacement à renforcer la sécurité de l'emploi et à réduire le chômage en élargissant le travail à temps partiel. Cependant, ces nouvelles dispositions sont importantes non seulement du point de vue de la politique du travail mais aussi pour la famille et pour la politique en matière d'égalité. Elles tendent en effet à permettre aux hommes comme aux femmes de mieux concilier famille et travail et de mieux réaliser leurs plans individuels. Les dispositions de cette loi ont ainsi pour effet de promouvoir l'égalité des chances entre hommes et femmes et de permettre aux unes comme aux autres de mieux concilier vie professionnelle et vie familiale.

4. Activités internationales

Pendant la période considérée, l'Allemagne a présenté ses deuxième, troisième et quatrième rapports conformément à l'article 18 de la Convention des Nations Unies sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes. Ces rapports font suite au premier rapport de 1988 (CEDAW/C/5/Add.59 du 23 septembre 1988) et à son supplément de 1990 et décrivent les faits nouveaux qui ont eu lieu en Allemagne en matière d'égalité entre les sexes depuis 1990.

À l'occasion du vingtième anniversaire de l'adoption de la Convention, le Ministère fédéral des affaires familiales, personnes du troisième âge, des femmes et de la jeunesse a cofinancé l'organisation et la documentation d'une conférence du Centre pour les droits de l'homme de l'Université de Potsdam qui a eu lieu les 25 et 26 novembre 1999. À l'occasion de cet anniversaire, le texte de la Convention et du Protocole facultatif, dans leurs traductions officielles provisoires, ont été distribués sous forme de brochures au public allemand intéressé.

Au début de 1999, le Gouvernement fédéral s'est employé activement à mener à bien les négociations sur le Protocole facultatif à la Convention dans le contexte de sa Présidence du Conseil de l'UE et de sa Présidence de la Commission de la condition de la femme et, lorsque le Protocole facultatif a été ouvert à la signature le 10 décembre 1999, il l'a signé immédiatement. Le Protocole a été ratifié le 15 janvier 2002.

En outre, le Gouvernement fédéral a retiré sa réserve touchant l'article 7 de la Convention avec effet à compter du 10 décembre 2001 et a approuvé la modification du paragraphe 1 de l'article 20 de la Convention éliminant la disposition limitant à deux semaines seulement la durée de la réunion annuelle du Comité pour l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes.

Le Gouvernement fédéral a aidé le Comité à rédiger le règlement prévu par le Protocole facultatif. À son invitation, un groupe d'experts s'est réuni à Berlin du 27 au 30 novembre 2000, avec la participation de membres du Comité, en vue de rédiger ledit règlement.

Articles 4 et 5

La situation en ce qui concerne l'application des dispositions de ces articles est décrite dans les premier et deuxième rapports (CCPR/C/1/Add.18, p. 7 et 8; CCPR/C/28/Add.6, paragraphes 35 à 37). Aucun élément nouveau à ce sujet n'est à signaler pendant la période considérée.

Article 6

Droit à la vie

1. Observations fondamentales

Conformément à l'ordre constitutionnel de la République fédérale d'Allemagne, la vie humaine est une valeur suprême. La loi fondamentale reflète par conséquent la valeur que le Pacte international relatif aux droits civiques et politiques attache à la protection de la vie (voir l'observation générale 14 du Comité en date du 11 septembre 1984, no 1).

Il s'ensuit par conséquent que la première phrase du paragraphe 1 de l'article 2, lue avec la deuxième phrase du paragraphe 1 de l'article premier de la Loi fondamentale, fait à l'État, compte tenu de la valeur attachée à la vie humaine, l'obligation générale de protéger toutes les formes de vie humaine et de les mettre à l'abri de toutes atteintes illicites (voir sur ce point la jurisprudence uniforme de la Cour constitutionnelle fédérale : arrêt du 25 février 1975, dossier no BvF 1, 2, 3, 4, 5, 6/74, publié dans le recueil officiel BVerfGE 39, p. 1 et suivantes, 42; arrêt du 1 er août 1978, 2 BvR 1013, 1019, 1034/77, BVerfGE 49, p. 24 et suivantes, 53; arrêt du 28 mai  1993, dossier no 2 BvF 2/90 et 4, 5/92 -, BVerfGE 88, p. 203 et suivantes, 251).

Cette obligation constitutionnelle de protection a des incidences pour l'ensemble de l'ordre juridique allemand. Il est consacré directement dans les dispositions du droit pénal réprimant l'homicide et protégeant la vie contre toute atteinte illicite de tierces parties (articles 211 et 212 du Code pénal [Strafgesetzbuch]). Le principe est également reflété de multiples façons dans l'ordre juridique et social et la République fédérale d'Allemagne.

L'article 102 de la Loi fondamentale a aboli la peine capitale en Allemagne. Cette interdiction s'applique depuis la fondation de la République fédérale d'Allemagne, en 1949.

2. Protection de la vie humaine dans le système juridique : deux exemples

L'ordre juridique de la République fédérale d'Allemagne interdit toute atteinte à la vie humaine, et reflète par conséquent la deuxième phrase du paragraphe 2 de l'article 6 du Pacte. L'on peut en donner deux exemples, à savoir l'utilisation des armes à feu et la protection contre l'expulsion de quiconque dont la vie risque d'être menacée.

a) Utilisation d'armes à feu par la police

Une question importante, dans le contexte de l'article 6 du Pacte, est l'utilisation d'armes à feu par les personnes investies de l'autorité de l'État. Le Comité des droits de l'homme a souligné (observation générale 6 du 27 juillet  1982, paragraphe 3) que "la protection contre la privation arbitraire de la vie, qui est expressément requise dans la troisième phrase du paragraphe 1 de l'article 6, est d'une importance capitale. Le Comité considère que les États parties doivent prendre des mesures non seulement pour prévenir et réprimer celles qui entraînent la privation de la vie, mais également pour empêcher que leurs propres forces de sécurité ne tuent des individus de façon arbitraire. La législation doit donc réglementer et limiter strictement les cas dans lesquels une personne peut être privée de la vie par ces autorités". En République fédérale d'Allemagne, la loi définit de façon précise en quelle circonstance les armes à feu peuvent être utilisées – en dernier ressort – contre des êtres humains.

Les agents de la Fédération chargés de l'application des lois peuvent avoir recours à la force directe dans l'exercice légitime de leurs attributions. Par "force directe", l'on entend des actes de coercition physique exécutés au moyen d'aide ou d'armes pour obtenir un comportement déterminé de la personne visée. Les agents chargés de l'application de la loi doivent, s'ils ont recours à la force directe, se conformer au principe de proportionnalité et ainsi, parmi plusieurs mesures possibles et appropriées, opter pour celle qui porte le moins atteinte à l'individu et au public. En outre, le préjudice que peut causer le recours à la force directe ne peut pas être manifestement disproportionné avec le résultat recherché.

L'utilisation d'armes à feu contre des personnes ou des objets ne peut être envisagée comme mesure coercitive que dans des cas extrêmes. Il faut en effet auparavant que des mesures de force directe moins intrusives aient été appliquées en vain ou que, d'emblée, le recours à de telles mesures n'ait manifestement aucune perspective de succès.

L'utilisation d'armes à feu contre des personnes est autorisée dans les situations suivantes :

pour éviter une menace directe contre la vie ou la sécurité d'une personne;

pour empêcher qu'une infraction pénale grave ou moins grave soit commise au moyen d'armes à feu ou d'explosifs;

pour empêcher de fuir une personne soupçonnée d'une infraction pénale grave ou d'une infraction pénale moins grave s'il apparaît que celle-ci doit être commise avec une arme à feu ou des explosifs;

pour empêcher la fuite ou pour assurer la ré-appréhension d'une personne qui était en garde à vue :

sur la base d'un mandat d'arrêt délivré par les autorités judiciaires, ou

pour purger une peine de prison ou de détention provisoire, ou

soupçonnée d'être sur le point de commettre une infraction pénale grave, ou

soupçonnée d'être sur le point de commettre une infraction pénale moins grave mais avec une arme à feu ou des explosifs, et

pour empêcher que des moyens violents soient utilisés pour libérer un détenu.

En principe, une arme à feu ne peut être utilisée contre une personne que pour l'empêcher de commettre une agression ou de s'échapper. Les lois relatives à la police promulguées par la plupart des Länder de la République fédérale réglementent les conditions dans lesquelles l'usage d'une arme à feu risquant de façon presque certaine d'entraîner la mort afin d'éviter une menace directe contre la vie ou l'intégrité physique d'une personne. Le recours à une arme à feu n'est autorisé que si cela est le seul moyen d'éviter un tel risque. Si l'officier de police est conscient de ce que les passants risquent d'être mis en danger, il ne peut utiliser une arme à feu que pour éviter une menace directe contre la vie ou l'intégrité physique d'une personne.

Le recours à la force directe par les agents de la Fédération chargés de l'application de la loi est réglementé par la Loi sur les actes de coercition directe accomplis dans l'exercice de leurs fonctions par les agents de la Fédération chargés de l'application des lois (Gesetz über den unmittelbaren Zwang bei Ausübung öffentlicher Gewalt durch Vollzugsbeamte des Bundes [UZwG]). Les lois concernant la police des Länder contiennent pour le comportement de leurs agents des dispositions essentiellement semblables. En outre, les agents chargés de l'application des lois, comme toute autre personne, ont le droit de se défendre en cas d'urgence et, conformément à l'article 32 du Code pénal, ont le droit de prêter assistance en cas de besoin.

Le nombre de personnes tuées ou blessées en République fédérale d'Allemagne entre 1993 et 2000 à la suite de l'utilisation d'armes à feu est le suivant :

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

Morts

16

8

19

9

10

8

15

6

Blessés

66

59

52

43

37

42

33

30

b) Protection contre l'expulsion de toute personne dont la vie est menacée

Aucune mesure mettant fin à l'autorisation de séjourner à l'étranger ne peut être contraire aux dispositions de l'article 6 du Pacte et les dispositions de la loi applicable aux étrangers sont rédigées en conséquence.

La Loi relative à l'entrée et au séjour des étrangers sur le territoire fédéral (Gesetz über die Einreise und den Aufenthalt von Ausländern im Bundesgebiet (Loi sur les étrangers [Ausländergesetz]) du 9 juillet 1990, modifiée pour la dernière fois par la loi du 9 janvier 2002) reflète les dispositions de l'article 6 du Pacte, surtout en ce qui concerne les persécutions politiques : aucun étranger ne peut être expulsé vers un État où sa vie ou sa liberté serait menacée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social spécifique ou de ses convictions politiques (paragraphe 1 de l'article 51 de la Loi sur les étrangers).

Toutefois, le paragraphe 1 de l'article 51 de la Loi sur les étrangers n'est pas applicable si l'étranger doit être considéré comme mettant en danger la République fédérale d'Allemagne ou constitue un danger pour avoir fait l'objet d'une condamnation exécutoire à au moins trois ans de prison pour une infraction pénale ou particulièrement grave (première phrase du paragraphe 3 de l'article 51 de la Loi sur les étrangers). Il en va de même si l'intéressé est soupçonné d'avoir commis un crime contre l'humanité ou avoir commis un crime non politique grave hors d'Allemagne avant d'avoir été admis dans ce pays comme réfugié ou s'est rendu coupable d'actes contraires aux buts et principes de la Charge des Nations Unies (deuxième phrase du paragraphe 3 de l'article 51 de la Loi sur les étrangers). En pareils cas, toutefois, un étranger ne peut pas être extradé vers l'État requérant si la peine capitale peut être imposée du chef de l'infraction pénale qui lui est imputée (paragraphe 2 de l'article 53 de la Loi sur les étrangers) ou si l'intéressé risque spécifiquement de faire l'objet de tortures ou de peines ou traitements inhumains ou dégradants (paragraphes 1 et 4 de l'article 53 de la Loi sur les étrangers).

Dans chaque cas – c'est-à-dire pas seulement lorsqu'il s'agit de persécutions politiques – il est possible de refuser l'extradition d'un étranger vers un autre État s'il y a de bonnes raisons de penser que la vie, les idées personnelles ou la liberté de l'intéressé sont menacées dans ledit État (paragraphe 6 de l'article 53 de la Loi sur les étrangers). S'il s'agit d'un danger auquel est exposée la population ou le groupe de population auquel appartient l'étranger en général, les autorités suprêmes des Länder peuvent ordonner une interdiction générale de l'extradition de personnes appartenant à un tel groupe (deuxième phrase du paragraphe 6 de l'article 53 et article 54 de la Loi sur les étrangers).

L'application de ces dispositions relève du pouvoir discrétionnaire des autorités. Toutefois, la Constitution allemande exige, comme l'article 6 du Pacte, que l'exercice de ce pouvoir discrétionnaire soit subordonné au principe supérieur du droit à la protection de la vie. De ce fait, l'exercice de ce pouvoir doit être limité dans des cas particuliers, de sorte que seule la décision interdisant l'extradition est licite (voir le paragraphe 100 ci-dessous à propos de l'interdiction de l'expulsion de toute personne qui risque de faire l'objet d'actes de torture).

Lorsque la mesure d'expulsion ou d'extradition elle-même risquerait de mettre en danger la vie de l'étranger, par exemple si l'état de santé de celui-ci l'empêche de voyager, les autorités d'immigration compétentes doivent prendre ce fait en considération, et l'expulsion ou l'extradition est suspendue aussi longtemps qu'elle ne peut pas être exécutée pour des raisons de caractère juridique ou factuel (voir le paragraphe 2 de l'article 55 de la Loi sur les étrangers).

Poursuites pénales intentées du chef d'homicide réalisé en violation

des droits de l'homme à la frontière intra-allemande

La période considérée a été marquée par l'examen, au regard du droit pénal, de ce qu'il est convenu d'appeler la "criminalité d'État de la RDA". Dans le contexte de l'application de l'article 6 du Pacte, il s'agit essentiellement de la pratique suivie par les autorités de la République démocratique allemande consistant à utiliser du fil de fer barbelé, des mines et des armes à feu pour empêcher de se rendre en Occident sans approbation de l'État, par la frontière intra-allemande, quiconque se trouvait en République démocratique allemande. Les demandes de sortie étaient systématiquement rejetées – sauf pour les retraités et les handicapés – et entraînaient des représailles pour leurs auteurs. Nombreux étaient par conséquent ceux qui cherchaient à franchir la frontière sans autorisation. Selon les informations officielles fournies pour le Parquet de la République fédérale d'Allemagne, 264 personnes ont trouvé la mort alors qu'elles essayaient de franchir la frontière pendant la période qui s'est écoulée jusqu'à l'automne 1989. Selon les informations rassemblées par le "Groupe de travail du 13 août", ce nombre est encore beaucoup plus élevé et dépasserait 900. Ce prétendu régime frontalier avait été ordonné par les dirigeants de la République démocratique allemande et était appliqué par les gardes-frontière de la RDA.

Le Comité des droits de l'homme a discuté des pratiques suivies par la République démocratique allemande lorsque le rapport périodique de cette dernière a été présenté en juillet 1984 (voir Annuaire du Comité des droits de l'homme, 1983-1984, Volume I, p. 521 à 543). Même alors, indépendamment du droit à la liberté de déplacement garanti par l'article 12 (voir, à ce propos, le paragraphe 175 ci-dessous), le Comité avait critiqué les décès causés à la frontière intra-allemande comme étant contraires à l'article 6 du Pacte (voir à ce sujet les observations de Felix Fermacora, membre du Comité, loc. cit., p. 528, no. 16; voir également loc. cit., p. 533, no 12 et 13, ainsi que la déclaration de Sir Vincent Evans, membre du Comité, loc. cit. p. 529, no 22).

Conformément à l'évolution récente du droit international, les organes de l'Organisation des Nations Unies exigent, dans le cas d'atteintes extrajudiciaires au droit à la vie par des personnes ou entités investies d'un pouvoir souverain ("exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires") que des coupables soient châtiés, sans égard à la question de savoir si la législation interne peut avoir accordé des pouvoirs exorbitants du droit commun ou forces de sécurité responsables (voir les résolutions 2000/31 et 2001/45 de la Commission des droits de l'homme de l'Organisation des Nations Unies en dates des 20 avril 2000 et 23 avril 2001). Cette catégorie d'infractions englobe également les "morts causées par un recours à une force excessive de la part des agents chargés de l'application des lois" (voir le rapport du Rapporteur spécial, Asma Jahangir, 25 janvier 2000, E/CN.4/2000/3l, paragraphes 27 et 28).

Il n'a été possible de faire respecter ces principes en territoire allemand qu'après la fin de la séparation de l'Allemagne. Plusieurs poursuites pénales ont été entamées pendant la période considérée au sujet des décès survenus à la frontière entre la République démocratique allemande et la République fédérale. Indépendamment des gardes-frontière qui tiraient sur les personnes cherchant à s'échapper et des personnes qui donnaient directement les ordres sur les lieux de ces crimes, des personnalités de la RDA qui aidaient les agents politiques de celle-ci à prendre des décisions concernant le régime à appliquer à la frontière ont également été condamnées. Ces personnes ont été reconnues coupables de la mort des personnes cherchant à quitter la RDA pour franchir la frontière avec la République fédérale du chef d'incitation à l'homicide ou d'homicide commis par le biais d'un agent innocent.

En principe, ces poursuites sont menées conformément au droit pénal de la République démocratique allemande applicable à l'époque; conformément au paragraphe 3 de l'article 2 du Code pénal, c'est la loi pénale de la République fédérale qui s'applique si elle est plus favorable. La Cour fédérale de justice, qui est la plus haute juridiction allemande en matière pénale, a déclaré dans plusieurs arrêts que la pratique étatique de la République démocratique allemande, qui admettait le meurtre délibéré de fuyards au moyen d'armes à feu, de systèmes de tir automatique ou de mines pour les empêcher de quitter la République démocratique allemande ne peut pas être invoquée comme cause d'exonération de responsabilité des délinquants du fait de la violation évidente et inacceptable des principes élémentaires de justice et des droits de l'homme protégés par le droit international qu'elle représentait.

La Cour fédérale de justice a décidé dans son arrêt du 3 novembre  1992 (dossier no 5 StR 370/92, publié dans le recueil officiel BGHSt, Volume 39, p. 1 et suivantes et p. 15 et suivantes), qui a fait jurisprudence, que le régime appliqué à la frontière constituait une violation de l'article 6 du Pacte en particulier. À ce propos, la Cour s'est référée aux observations générales formulées en 1982 par le Comité des droits de l'homme de l'Organisation des Nations Unies (observation générale no 6 du 27 juillet 1982, voir ci ‑dessus, paragraphe 50). La Cour fédérale de justice a considéré que le fait de tuer des personnes cherchant à fuir à la frontière intra-allemande constituait un acte arbitraire au sens de la deuxième phrase du paragraphe 1 de l'article 6 du Pacte. Par la suite, la Cour a développé et consolidé cette jurisprudence dans bien d'autres arrêts (publiés dans le recueil officiel BGHSt, 39, p. 168 et suivantes, p. 183; 40, p. 218 et suivantes, p. 232; 40, p. 241 et suivantes et p. 244).

La Cour constitutionnelle fédérale a confirmé cette jurisprudence uniforme dans son arrêt fondamental du 24 octobre  1996 (2 BvR 1851, 1853, 1875, 1852/94, reproduit dans le recueil officiel BVerfGE, 95, p. 96 et suivantes).

Enfin, la Cour européenne des droits de l'homme a également eu à connaître des arrêts des juridictions allemandes et a confirmé que le régime appliqué à la frontière constituait une violation majeure du droit à la vie, qui est également protégé par l'article 2 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (arrêt rendu dans l'affaire Krenz et al./Allemagne du 22 mars 2001, requêtes no 34044/96, 35532/97 et 44801/98; arrêt rendu dans l'affaire K.-H. W./Allemagne du 22 mars 2001, requête no 37201/97; ces deux arrêts peuvent être consultés en français sur Internet à l'adresse http://hudoc.echr.coe.int; des traductions non officielles en allemand ont été publiées dans Europäische Grundrechte Zeitschrift 2001, p. 210 et 219).

4. Protection de la vie et faits nouveaux concernant le droit pénal international

La République fédérale d'Allemagne appuie de diverses façons les efforts entrepris récemment pour intégrer la protection du droit à la vie à la juridiction pénale internationale. Pendant la période considérée, l'Allemagne a développé et élargi sa coopération avec les organismes internationaux et a adopté un certain nombre d'initiatives.

a) Création de la Cour pénale internationale

D'emblée, la République fédérale d'Allemagne s'est engagée à oeuvrer en faveur de la création d'une Cour pénale internationale. Pendant l'été 1998, elle a apporté une contribution majeure à la Conférence diplomatique des Nations Unies qui, à Rome, a adopté le Statut de la Cour pénale internationale.

L'Allemagne a ratifié le Statut de Rome le 11 décembre 2000 après que la Loi fondamentale ait été modifiée de manière à permettre le transfèrement à la Cour de ressortissants allemands (deuxième phrase du paragraphe 2 de l'article 16 de la Loi fondamentale, ajouté par la Loi du 29 novembre 2000, Journal officiel fédéral, Partie I, p. 1633). La Loi portant application du Statut de Rome (Gesetz zur Umsetzung des Römischen Statuts), qui régit en détail la coopération entre la Cour et les autorités et juridictions allemandes, est entrée en vigueur pendant l'été 2002.

L'Allemagne fait le nécessaire pour que la Cour pénale internationale commence ses travaux et s'emploie, au sein du groupe d'États qui partagent sa position, à promouvoir l'établissement, aussi rapidement que faire se peut, d'une cour qui soit aussi efficace que possible. En outre, l'Allemagne appuie les efforts déployés par la Communauté des États et par les organisations non gouvernementales qui opèrent dans ce domaine pour diffuser des informations sur la Cour pénale internationale et promouvoir ainsi une ratification et une application aussi large que possible du Statut de Rome. Par ailleurs, l'Allemagne participe activement aux efforts déployés pour créer en vue de l'établissement de la Cour une solide base organisationnelle après l'entrée en vigueur du Statut, le 1 er juillet 2002. À cette fin, lors de la première assemblée des États parties, qui doit se tenir en septembre 2002, les dispositions pratiques rédigées par la Commission préparatoire qui doivent être incorporées au Statut (Accord sur les privilèges et immunités de la Cour, Règlement financier, etc.) doivent être acceptées et l'élection des juges et du procureur préparée.

b) Coopération avec les tribunaux des Nations Unies

Afin de garantir la poursuite des violations graves de la Convention de Genève de 1949, des violations des lois et coutumes de la guerre ainsi que du génocide et des crimes contre l'humanité, la République fédérale d'Allemagne coopère de manière inconditionnelle avec le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie et avec le Tribunal pénal international pour le Rwanda. Pour ce faire, elle a modifié son ordre juridique interne (Loi sur la coopération avec le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie [Gesetz über die Zusammenarbeit mit dem Internationalen Strafgerichtshof für das ehemalige Jugoslawien] du 10 avril 1995, Journal officiel fédéral, Partie I, p. 485; Loi sur la coopération avec le Tribunal pénal international pour le Rwanda [Gesetz über die Zusammenarbeit mit dem Internationalen Strafgerichtshof für Rwanda] du 4 mai 1998, Journal officiel fédéral, Partie I, p. 843).

Ces lois permettent, d'une part, d'arrêter des personnes à la demande des Tribunaux et de les transférer à ces derniers pour qu'elles soient jugées du chef d'une infraction pénale relevant de leur juridiction, ou d'exécuter une sanction imposée du fait d'une telle infraction. C'est ainsi que le Serbe bosniaque Dusko Tadiċ a été arrêté à Munich le 13 février 1994 et transféré au Tribunal le 24 avril 1995.

D'un autre côté, conformément à la Loi d'entraide internationale en matière pénale (Gesetz über die internationale Rechtshilfe in Strafsachen), beaucoup d'autres types d'entraide judiciaire sont fournis à la demande des Tribunaux à propos des infractions pénales relevant de leur juridiction. Le Gouvernement fédéral peut également exécuter une sentence rendue avec force de loi par les Tribunaux. Ainsi, Dusko Tadiċ, condamné par le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie, purge sa peine dans une prison allemande depuis le 31 octobre 2000.

Par ailleurs, les ressortissants de la Bosnie-Herzégovine et du Kosovo qui avaient fui en Allemagne et qui ont aujourd'hui l'obligation de quitter le pays se sont vu accorder un permis de séjour temporaire en Allemagne dans tous les cas où le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie avait besoin de leur témoignage. Si le Tribunal confirme que le retour dans leur pays de ces témoins les mettrait en danger, le permis de séjour des intéressés et de leurs proches est prolongé.

Le Gouvernement fédéral apporte un appui financier aux Tribunaux au moyen d'une contribution standard de plus de 15 millions de dollars, ce à quoi il faut ajouter des contributions en nature comme un soutien financier et l'hébergement des témoins en Allemagne.

c) Projet de code pénal international

Afin de se conformer encore plus fidèlement aux exigences du droit international, le Ministère fédéral de la justice a également rédigé un Code pénal international qui transpose en droit pénal allemand les dispositions réprimant les infractions pénales graves figurant dans le Statut de Rome et les dispositions du droit international réprimant plusieurs autres crimes. La plupart de ces infractions étaient déjà réprimées par le droit interne. Le nouveau Code, toutefois, crée une base uniforme qui a pour but de sanctionner de la façon appropriée le caractère particulièrement odieux de ces très graves infractions pénales. C'est ainsi, par exemple, qu'il contient des dispositions distinctes réprimant la torture dans le contexte des crimes contre l'humanité. Depuis l'adoption de ce Code pénal international, les tribunaux allemands peuvent sanctionner les infractions pénales les plus graves au regard du droit international sans nécessité de rattachement particulier (voir à ce sujet le paragraphe 83 ci-dessous). Le Code pénal international, qui a été adopté à l'unanimité par le Parlement fédéral et le Conseil fédéral, est entré en vigueur le 30 juin 2002, un jour avant le Statut de Rome de la Cour pénale internationale.

5. Poursuite par les juridictions pénales allemandes de crimes relevant

du droit pénal international

Conformément à l'article 220a du Code pénal allemand (StGB), le génocide est passible de l'emprisonnement à vie (de cinq ans d'emprisonnement au minimum dans les cas les moins graves, conformément au paragraphe 2 dudit article). Le Procureur de la Cour fédérale de justice est la seule autorité compétente en matière de poursuite du chef de génocide.

Bien que cette compétence n'ait presque jamais été invoquée jusqu'au début des années 90, le Procureur fédéral a, depuis 1993 mené des enquêtes sur plusieurs affaires de génocide en raison des événements en l'ex-Yougoslavie. Les enquêtes concernent pratiquement des Serbes soupçonnés d'avoir commis un crime de génocide contre les Musulmans et, dans des cas individuels, contre des Croates. Certaines enquêtes ont néanmoins été ouvertes aussi pour des affaires de génocide commises par des Musulmans contre des Serbes et par des Croates contre des Musulmans ou des Serbes. La plupart de ces crimes ont été commis en Bosnie-Herzégovine. À ce jour, le Procureur fédéral n'a encore été saisi d'aucune enquête au sujet des événements qui se sont produits au Kosovo.

Il y a lieu de souligner, à ce propos, que le droit pénal allemand ne s'applique pas aux actes de génocide commis à l'étranger par des étrangers contre des étrangers avant l'entrée en vigueur du Code pénal international. Pour que s'applique le principe dit d'universalité, qui était précédemment défini par le paragraphe 1 de l'article 6 du Code pénal dans le contexte des crimes de génocide commis à l'étranger, la jurisprudence uniforme des juridictions les plus élevées exigeait l'existence, pour chaque cas, d'un lien direct de rattachement pour que des poursuites pénales puissent être entamées. Ainsi, par exemple, le principe d'universalité était généralement applicable si l'accusé se trouvait en République fédérale. Conformément à l'article premier du Code des crimes réprimés par le droit international, le principe d'universalité s'applique désormais sans restriction au génocide et aux autres crimes réprimés par le droit international qui sont visés dans le Code.

Conformément au paragraphe 2 de l'article 9 du Statut de la Cour et à l'article 2 de la Loi sur la coopération avec le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (Gesetz über die Zusammenarbeit mìt dem Internationalen Strafgerichtshof für das ehemalige Jugoslawien), ce tribunal a le droit de se saisir des enquêtes et des poursuites pénales de sa propre initiative. À ce jour, le tribunal a invoqué ce droit une seule fois à l'égard de la République fédérale d'Allemagne.

Depuis 1993, il a été ouvert en Allemagne 125 séries d'enquêtes concernant 164 personnes inculpées dans le contexte des événements qui se sont produits dans l'ex-Yougoslavie (au 22 avril 2002). Les enquêtes sont généralement menées par la Police criminelle fédérale, laquelle a jusqu'à présent mené 100 séries d'enquêtes. La plupart de ces affaires ont été classées, faute de preuves. Le juge d'instruction de la Cour fédérale de justice a émis un mandat d'arrêt contre cinq inculpés, qui sont actuellement recherchés.

Cinq personnes ont été inculpées, toutes du chef d'infractions liées au conflit sur le territoire de l'ex ‑Yougoslavie. La première série d'enquêtes pénales de ce type concernant Dusko Tadiċ a été entreprise après sa mise en accusation par le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie, à La Haye. Tadiċ a été condamné par le Tribunal à 20 ans de prison le 14 juillet 1997.

La Cour régional de Düsseldorf a condamné un inculpé à l'emprisonnement à vie pour génocide et assassinat (jugement daté du 26 septembre 1997, dossier no IV-26/96 - 2 StE 8/96) et un autre à neuf ans de prison pour complicité de génocide et autres infractions pénales (jugement du 29 novembre 1999, dossier no IV-9/97 - 2 StE 6/97). La Haute Cour régionale de Bavière, à Munich, a condamné un autre inculpé à cinq ans de prison pour complicité d'assassinat (jugement du 23 mai 1997, dossier no 3 St 20/96) et un autre à la prison à vie pour complicité de génocide et

assassinat (jugement du 15 décembre 1999, dossier no 6 St 1/99 - 2 BJs 25/95 - 5 - 2 StE 5/99). Ces condamnations ont force de chose jugée. Comme indiqué ci ‑dessus (paragraphe 77), le jugement rendu par le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie à propos de Dusko Tadiċ est exécuté en République fédérale.

La Cour fédérale de justice a maintenant eu à connaître de telles actions. Dans plusieurs arrêts fondamentaux (par exemple l'arrêt du 30 avril  1999, dossier no 3 StR 215/98, publié dans le recueil officiel BGHSt 45, p. 64 et suivantes), elle a apporté des précisions sur d'importants points de droit relatifs à la poursuite d'infractions de ce type, ce qui a facilité les poursuites devant les juridictions allemandes. Saisie en appel d'un recours d'un condamné, la Cour fédérale constitutionnelle a déclaré dans un arrêt du 12 décembre 2000 (dossier no 2 BvR 1290/99, publié dans le Neue Juristische Wochenschrift 2001, p. 1848 à 1853) que de telles décisions ne peuvent pas être considérées comme ayant violé les droits fondamentaux de la personne condamnée.

6. Initiatives tendant à abolir la peine capitale partout dans le monde

La République fédérale d'Allemagne s'emploie tout particulièrement à oeuvrer en faveur de l'abolition de la peine capitale partout dans le monde, et c'est ce souci qui l'a poussée à prendre l'initiative d'un Protocole facultatif au Pacte international relatif aux droits civiques et politiques visant à l'abolition de la peine capitale, déjà mentionnée dans les rapports précédents. Quarante-sept États sont maintenant Parties au Protocole, dont 29 le sont devenus pendant la période considérée.

En sa qualité de membre du Conseil de l'Europe, l'Allemagne s'efforce tout particulièrement d'obtenir que les nouveaux membres soient tenus, lors de leur adhésion, de s'engager à ratifier sans tarder le Protocole no 6 concernant l'abolition de la peine capitale à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en date du 28 avril 1983. L'Allemagne appuie également le Protocole no 13 à ladite Convention, qui va plus loin que le Protocole no 6 en ce sens qu'il abolit la peine capitale dans toutes les circonstances, y compris en temps de guerre et en situations d'urgence et l'a signé immédiatement après son ouverture à la signature, le 3 mai 2002.

Même s'il n'existe pas encore de consensus au plan international sur l'abolition générale de la peine capitale, la République fédérale considère que la communauté internationale reconnaît aujourd'hui l'existence d'une règle du droit international général interdisant l'exécution des mineurs et des personnes souffrant de troubles mentaux, de sorte que toute obligation de la peine de mort contre ce type de personne constitue une violation du droit international. À plusieurs occasions, la République fédérale d'Allemagne et ses partenaires de l'UE ont défendu cet avis à Washington et ont présenté des interventions en tant qu' amicus curiae devant des tribunaux des États-Unis.

Dans l'affaire La Grand (République fédérale d'Allemagne contre États-Unis d'Amérique) dont a été saisie la Cour internationale de Justice de La Haye, la Cour a considéré que le paragraphe 1 de l'article 36 de la Convention de Vienne sur les relations consulaires garantit à tout individu détenu le droit d'être informé qu'il peut se mettre en rapport avec les autorités consulaires compétentes de l'État dont il a la nationalité et que le fait pour un État de ne pas autoriser la révision de jugement rendu sans que ce droit ait été respecté constitue une violation du paragraphe 2 de l'article 36 de la Convention de Vienne. Bien que cet arrêt ne concerne pas la peine capitale, il sera

désormais plus facile pour tous les États d'aider leurs nationaux menacés à l'étranger de la peine capitale s'ils ne sont pas informés sans tarder, après leur arrestation, de leur droit de se mettre en rapport avec les autorités consulaires de leur pays par les autorités de l'État sur le territoire duquel ils sont détenus.

Article 7

Interdiction de torture et des autres formes de traitements inhumains

ou dégradants; expériences médicales

Interdiction de la torture et des autres formes de traitements

inhumains ou dégradants

La t orture est interdite en République fédérale d'Allemagne et est considérée comme une violation des concepts élémentaires qui sont à la base de l'ordre constitutionnel allemand et ainsi une violation des articles premier et 2 de la Loi fondamentale. Toute forme de traitement ou de peine dégradant ou inhumain est interdite. Le paragraphe 1 de l'article 104 de la Loi fondamentale réaffirme ce principe pour les personnes détenues.

En République fédérale d'Allemagne, l'interdiction de la torture revêt de multiples formes. Les violations de cette interdiction sont réprimées par le droit pénal. Quiconque commet un acte de violence contre une autre personne, la prive de liberté, exerce à son endroit une coercition ou la menace est passible de sanctions (articles 223 et suivants, 239, 240 et 241 du Code pénal). La commission d'un tel fait par un agent public dans l'exercice de ses fonctions est passible de sanctions plus graves (article 340 du Code pénal). En outre, le Code pénal réprime également le fait d'obtenir des aveux de force, ce comportement de la part d'agents publics étant puni comme un crime (article 343 du Code pénal).

La sixième Loi portant réforme du droit pénal (Sechstes Gesetz zur Reform des Strafrechts), qui est entrée en vigueur le 1 er avril 1998, a apporté d'importants amendements aux dispositions du Code pénal relatives à ce type d'agissement. La gamme des sanctions prévues par le Code pénal a été harmonisée afin de donner à la protection d'intérêts supérieurs comme le droit à la vie, à l'intégrité physique et à la liberté un rang plus élevé que la défense d'intérêts juridiques comme le droit de propriété ou la sécurité des relations contractuelles. Cela a notamment conduit, pour les crimes comportant une atteinte à l'intégrité physique, à l'aggravation des peines dont sont passibles les actes de cette nature, conformément à l'article 224 du Code pénal et les graves atteintes à l'intégrité corporelle conformément à l'article 226 du Code. En outre, la tentative est maintenant généralement répréhensible aussi. En outre, l'article 340 du Code pénal (qui réprime les voies de fait commises par un agent public) a été modifié : la tentative de voie de fait est maintenant généralement répréhensible, et les sanctions prévues en cas de circonstances aggravantes par l'article 340 du Code pénal ont été alourdies. Le nouveau Code pénal international (voir le paragraphe 79 ci-dessus) réprime séparément la torture parmi les crimes contre l'humanité.

En outre, un grand nombre de garanties sont prévues par le Code de procédure pénale pour les personnes arrêtées et détenues (voir plus loin sous la rubrique des articles 9 et 10). Ces garanties ont également pour but de mettre les détenus à l'abri de traitements non autorisés.

La République fédérale d'Allemagne a ratifié les accords régionaux et internationaux contre la torture : la Convention européenne des droits de l'homme, dont l'article 3 interdit la torture; la Convention européenne sur la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants; et la Convention des Nations Unies contre la torture et les autres peines ou traitement cruels, inhumains ou dégradants. Ces instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme complètent par conséquent la protection contre les violations des droits de l'homme au plan national.

Depuis sa première visite, en 1991, le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants, organe chargé de surveiller la mise en oeuvre de la Convention européenne, s'est à nouveau rendu en Allemagne en 1996, 1998 et 2000. En 1998, le Comité, lors d'une visite ad hoc à l'aéroport de Francfort a rassemblé des informations concernant la situation des réfugiés se trouvant dans l'aéroport. Les rapports du Comité sur ses visites périodiques de 1996 et de 1998 ont été publiés et peuvent être consultés à l'adresse www.cpt.coe.int. En août 2001, le Comité a soumis au Gouvernement fédéral son rapport sur sa visite de décembre 2000. Le Gouvernement allemand a rédigé une déclaration qui doit être publiée par le Comité en même temps que son rapport.

Jusqu'à présent, l'Allemagne a présenté trois rapports au Comité contre la torture conformément à l'article 19 de la Convention des Nations Unies. En octobre  2001, le Gouvernement fédéral a présenté des déclarations conformément aux articles 21 et 22 de la Convention, et les trois mécanismes de suivi prévus par celle-ci sont maintenant applicables à l'Allemagne. La République fédérale participe également aux travaux entrepris sous l'égide de l'Organisation des Nations Unies en vue de rédiger un Protocole facultatif à la Convention afin de mettre en place un mécanisme de visites semblable à celui qui a été créé par la Convention européenne.

La République fédérale d'Allemagne s'acquitte également des obligations qui lui incombent en vertu de l'article 7 du Pacte touchant l'expulsion d'étrangers qui risquent d'être torturés. En l'occurrence, l'application de l'article 7 du Pacte est assurée par les paragraphes 1 et 4 de l'article 53 de la Loi sur les étrangers et par l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. En conséquence, un étranger ne peut pas être expulsé vers un État où il risque d'être soumis à la torture. Telle est également la pratique suivie par le Bureau fédéral d'accueil des réfugiés étrangers, qui doit indiquer, lorsqu'une demande d'asile est rejetée, si l'article 53 de la Loi sur les étrangers s'oppose à leur expulsion. En outre, le paragraphe 6 de l'article 53 de la Loi sur les étrangers et, à compter du 1 er janvier 2003, la version révisée de la première phrase du paragraphe 7 de l'article 60 de la Loi sur la résidence (Aufenthaltsgesetz) protégent également tout étranger contre l'expulsion si l'intéressé risque d'être torturé ou si sa vie, son intégrité personnelle ou sa liberté sont menacées (voir également à ce propos l'arrêt rendu par la Cour européenne des droits de l'homme dans l'affaire T.I. contre Royaume-Uni, du 7 mars 2000, dans laquelle la République fédérale d'Allemagne était également impliquée; requête no 43844/98, disponible en français sur Internet à l'adresse http://hudoc.echr.coe.int).

Dans plusieurs affaires, la Cour européenne des droits de l'homme a été appelée à statuer sur des allégations selon lesquelles les autorités allemandes n'auraient pas respecté l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (interdiction de la torture) dans le contexte d'expulsion d'étrangers. Les requêtes en question ont été jugées irrecevables (voir par exemple l'arrêt rendu dans l'affaire Besse Damla et al., du

26 octobre 2000, requête no 61479/00, l'arrêt rendu dans l'affaire Ahmed Duran Cagiar contre Allemagne, du 7 décembre 2000, requête no 62444/00, qui peuvent l'un et l'autre être consultés en français sur Internet à l'adresse http://hudoc.echr.coe.int ).

D'autres requêtes alléguant d'une violation de l'article 3 de la Convention européenne présentées devant la Cour européenne des droits de l'homme n'ont pas abouti non plus. Dans l'affaire Selahattin Erdem contre Allemagne (requête no 38321/97), le requérant s'était plaint d'avoir été détenu dans une cellule isolée. Cette partie de la requête a été jugée irrecevable par l'arrêt du 9 décembre 1999.

Il y aura lieu de se référer également, à ce sujet, aux informations fournies dans le contexte de l'article 10 (paragraphes 150 et suivants ci-dessous).

2. Expériences médicales

En Allemagne, l'application à titre expérimental de traitements médicaux sur des êtres humains est soumise à des dispositions légales rigoureuses tendant à protéger les droits à la vie privée et à la santé. Conformément aux articles 40 et 41 de la Loi sur les produits pharmaceutiques (Arzneimittelgesetz), les essais cliniques tendant à évaluer l'efficacité et l'innocuité des médicaments ne peuvent être réalisés que si les personnes auxquelles doivent être administrés ces médicaments ont été informées par un médecin de la nature, de la signification et de l'étendue des essais cliniques et ont consenti à y participer.

Des règles beaucoup plus strictes s'appliquent aux mineurs. En l'occurrence, l'autorisation du représentant légal de l'intéressé est nécessaire, et il doit avoir reçu d'un médecin les informations susmentionnées. Si le mineur peut comprendre la nature, la signification et l'étendue des essais cliniques et exprimer sa volonté en conséquence, son autorisation écrite est requise aussi. En outre, le médicament dont il s'agit doit être conçu de manière à diagnostiquer ou prévenir une maladie chez les mineurs. Si les essais cliniques réalisés sur des adultes ne permettent pas de prévoir comme il convient les résultats des essais, l'utilisation du médicament doit être indiquée pour diagnostiquer une maladie chez le mineur ou le protéger contre une telle maladie.

Si un adulte malade ne peut pas donner son autorisation, il ne peut être soumis à des essais cliniques qu'avec l'autorisation de son représentant légal, dûment informé par un médecin et seulement si l'administration du médicament dont il s'agit est indiquée pour sauver la vie du malade, le soigner ou atténuer ses souffrances. L'article 41 de la Loi sur les produits pharmaceutiques prévoit d'autres garanties de procédure. Ainsi, des recherches bénéficiant exclusivement à des tiers ne sont pas autorisées dans le cas d'adultes qui ne sont pas à même de donner leur consentement.

En outre, des essais cliniques ne peuvent être réalisés que si les risques que l'administration du médicament à essayer pour les participants sont justifiés en comparaison de l'importance que peut présenter le médicament pour la science médicale. Des règles strictes s'appliquent quant aux qualifications des médecins traitants et à la qualité de la planification et de la documentation de l'étude. Enfin, une étude clinique ne peut être entreprise, en principe, qu'après évaluation favorable du Comité d'éthique compétent et la présentation de la documentation nécessaire, y compris un plan d'essais, aux autorités fédérales supérieures compétentes.

Les recherches médicales sur des délinquants condamnés sont interdites, même si ces derniers y consentent. En fait, il est douteux qu'une situation de privation de liberté permette en fait de prendre une décision volontaire concernant la participation à des essais médicaux, car l'on risque que les détenus pensent que leur participation sera considérée comme un élément positif par les autorités pénitentiaires, qui pourront ainsi être amenées à, par exemple, assouplir les conditions de détention. Il n'est réalisé aucune expérience médicale dans les prisons précisément pour éviter l'apparence même d'une telle corrélation et le risque que cela pourrait susciter. Ce principe s'applique également aux autres personnes placées en établissements sur ordonnance judiciaire.

3. Protection des personnes vivant dans des foyers de résidence de longue durée

L'article 7, qui interdit toute forme de traitement dégradant et, d'une manière générale, toute participation involontaire à des expériences médicales ou scientifiques, peut être important pour les personnes qui vivent dans des foyers. Indépendamment des dispositions pertinentes du Code pénal (voir les paragraphes 94 et suivant ci-dessus), la Loi sur les foyers (Heimgesetz) contient des dispositions visant à protéger les résidents des foyers. Cette loi a été totalement remaniée sur l'initiative du Gouvernement fédéral, et sa version révisée est entrée en vigueur le 1 er janvier 2002.

Le paragraphe 1 de l'article 2 de la nouvelle loi précise son objectif, qui est de protéger la dignité, les intérêts et les besoins des résidents des foyers, y compris contre tous types de traitement dégradant.

L'article 11 de la loi concrétise la protection à laquelle ont droit les résidents des foyers. Ainsi, un foyer ne peut être administré que si l'organisation responsable et la direction non seulement protègent la dignité humaine mais aussi sauvegardent et encouragent l'indépendance, l'autonomie et la responsabilité personnelle des résidents et garantissent un niveau de soins appropriés conformément aux règles généralement reconnues de la médecine et des soins, y compris pour ce qui est des soins médicaux et des soins de santé.

Les autorités compétentes des Länder peuvent procéder à tout moment à des contrôles des foyers, avec ou sans préavis. Les sanctions dont sont passibles les violations des dispositions de la Loi sur les foyers sont notamment, après consultation des résidents et des organisations responsables, des amendes pouvant atteindre 25 000 euros et, finalement, la fermeture du foyer.

Grâce aux plus de 7 000 contrôles de la qualité qui ont été effectués depuis qu'a été mis en place en 1995/96, le régime d'assurance-maladie de longue durée, la Caisse d'assurance-maladie connaît bien la situation des établissements de soins. Ainsi, la Caisse a identifié certaines défaillances dans la qualité des soins fournis par les foyers. Par exemple, le concept de traitement intégré n'était parfois pas appliqué et les dossiers concernant les traitements étaient insuffisants. Beaucoup d'établissements, plutôt que d'appliquer l'approche d'autonomisation encouragée par l'État, appliquaient un traitement passif qui ne correspondait pas aux ressources ni au potentiel des patients. En outre, il arrivait souvent que les compétences et la spécialisation du personnel de traitement laissent beaucoup à désirer. D'autres problèmes particuliers étaient également des traitements grabataires, même en cas d'incontinence, l'administration de divers médicaments et le manque de connaissances concernant l'administration d'aliments et de liquides.

Tous les intéressés s'accordent à reconnaître qu'il importe de s'employer à remédier à ces insuffisances, étant entendu que celles-ci ne doivent cependant pas faire oublier les efforts que déploient beaucoup de foyers et d'organismes de traitements de longue durée pour fournir des soins de haute qualité aux personnes qui leur ont été confiées.

Les carences qui caractérisent les traitements de longue durée ont de multiples causes, par exemple des erreurs de la direction ou le niveau de qualification du personnel traitant. En outre, les qualifications du personnel et le profil des résidents ont une influence majeure sur la qualité des soins. Simultanément, il est clair que les organisations responsables des établissements ne peuvent pas toujours prévaloir dans leurs négociations avec les organismes de financement quant au montant des paiements dus eu égard aux services fournis. À cela vient s'ajouter le fait que, dans certains cas, les organismes de tutelle ne peuvent pas toujours contrôler et surveiller comme il le faudrait les établissements. Tout cela montre que l'on ne peut pas comparer la situation existante à celle qui résulterait de l'application de mesures coercitives ou de mesures faisant intervenir le recours à la force physique de la part de l'État.

Quoi qu'il en soit, il est incontestable qu'il importe de remédier d'urgence aux carences qui caractérisent les soins. Pour en améliorer la qualité, il a été promulgué une loi sur l'assurance qualité des soins qui est entrée en vigueur le 1 er janvier 2002. Les mesures ci-après devraient en particulier avoir un impact positif sur les soins :

a) amélioration des services fournis grâce au suivi et à la surveillance de la qualité des traitements à long terme (vérification à l'improviste, gestion interne de la qualité, vérifications de la qualité par des experts indépendants);

b) renforcement des systèmes d'autoréglementation des services de soins au moyen de nouveaux outils contractuels (accords de performances et de qualité, accords de rémunération fondée sur les résultats du personnel);

c) resserrement de la coopération entre les services d'inspection des foyers des Länder et l'organe d'autoréglementation du secteur des soins (Caisse d'assurance-maladie); et

d) renforcement de la protection du consommateur (participation aux consultations locales, listes de prix et de services, contrats de soins à long terme, obligation de remboursement en cas de services de mauvaise qualité, renforcement des obligations contractuelles).

Article 8

Interdiction de l'esclavage et du travail forcé

1. Travail forcé

a) Observations générales

Aux termes du paragraphe 2 de l'article 12 de la Loi fondamentale, nul ne peut être forcé d'exécuter un travail spécifique si ce n'est dans le contexte des obligations générales traditionnelles de service public applicables à tous. Aux termes du paragraphe 3 du même article, un travail

obligatoire n'est autorisé en République fédérale d'Allemagne que dans le cas d'une mesure privative de liberté ordonnée par un tribunal. Le droit constitutionnel allemand est par conséquent conforme au paragraphe 3 de l'article 8 du Pacte.

Dans son quatrième rapport périodique, la République fédérale d'Allemagne a indiqué que, souvent, des condamnés ont allégué qu'ils recevaient une rémunération insuffisante pour le travail accompli pendant leur détention et étaient "exploités comme des esclaves". Dans un arrêt du 1 er  juillet 1998 (dossier no 2 BvR 441/90, 2 BvR 493/90, 2 BvR 618/92, 2 BvR 212/93, 2 BvL 17/94, publiés dans le recueil officiel BVerfGE 98, p. 169 à 218), la Cour constitutionnelle fédérale a déclaré que la réglementation légale applicable à l'époque à l'amélioration des détenus était inconstitutionnelle car elle n'était pas conforme au principe de réinsertion sociale consacré dans la Loi fondamentale. En conséquence, le travail confié aux détenus, qui est obligatoire pour ces derniers, doit être rémunéré comme il convient, et la rémunération doit être suffisante pour convaincre les détenus de la valeur du travail en montrant les avantages concrets qu'ils pourront retirer à l'avenir d'un comportement respectueux de la loi alors qu'ils assumeront la responsabilité personnelle de leurs actes.

À compter du 1 er janvier 2001, conformément aux instructions de la Cour constitutionnelle fédérale, la cinquième Loi portant modification de la Loi sur la prison (Gesetz zur Änderung des Strafvolizugsgesetzes), a révisé les règles applicables à la rémunération des détenus. La rémunération a été portée de 5 à 9% du montant de référence selon l'article 18 du Titre IV du Code social. Ce montant de référence est la rémunération moyenne de tous les affiliés au régime des pensions des salariés pendant la pénultième année civile. Les détenus touchent actuellement environ 400 DM par mois, contre 220 auparavant.

Afin de mieux récompenser encore le travail accompli, la nouvelle loi prévoit un jour de congé pour deux mois consécutifs de travail. Ces jours de congé peuvent être pris par les détenus pendant leur détention ou peuvent être accumulés en vue d'une libération anticipée s'ils remplissent les conditions requises. Toutefois, les détenus ne peuvent accumuler que six jours de congé par an au maximum pour avancer la date de leur libération.

b) Indemnisation des victimes du travail forcé sous le régime national socialiste

Sous le régime national socialiste et pendant la seconde guerre mondiale, environ 8 millions de personnes ont été affectées à des travaux forcés dans le Reich allemand et les territoires occupés par l'Allemagne, souvent dans des conditions extrêmement inhumaines. Souvent, les persécutés ont également été dépouillés de leurs biens. Immédiatement après la fin de la guerre, la République fédérale d'Allemagne a mis sur pied un certain nombre de programmes de réconciliation. Les biens disponibles qui avaient été expropriés ont été restitués à leurs propriétaires et, s'ils n'étaient plus disponibles, il a été versé une indemnisation, dont le total a atteint environ 4 milliards de DM. D'autres indemnités ont été versées pour les blessures causées, le préjudice professionnel subi et des privations de liberté, y compris le travail forcé dans des conditions de détention, le total de ces indemnités se monte à ce jour à bien plus de 100 milliards de DM, ce à quoi il faut ajouter environ 150 000 pensions dont la valeur représente 1,5 milliard de DM par an.

Si le travail forcé devait être fourni non pas dans le cadre de persécutions spécifiques du régime national socialiste mais dans le contexte d'événements de guerre, l'indemnisation a revêtu la forme de mesures de réparation, l'État recevant ces dernières devant les utiliser pour payer les indemnisations individuelles.

Indépendamment de ces programmes généraux, l'industrie et l'État allemands ont décidé, à la suite des négociations internationales menées en 1999 et 2000, de créer la Fondation "Souvenir, responsabilité et avenir", par laquelle les entreprises allemandes et la République fédérale d'Allemagne entendent démontrer leur responsabilité historique et morale de ces événements et compléter des indemnisations versées précédemment. La Fondation a pour but de fournir une assistance aux victimes du travail forcé et aux autres victimes du National socialisme sans paperasserie et, surtout, rapidement.

La loi portant création de cette Fondation (Gesetz zur Errichtung einer Stiftung "Erinnerung, Verantwortung und Zukunft") est entrée en vigueur le 12 août 2000. Elle prévoit, entre autres, le versement d'une indemnité pouvant atteindre 15 000 DM aux victimes du National socialisme maintenues dans des camps de concentration, ghettos ou centres de détention comparables et obligées de fournir un travail forcé. Les déportés sur le territoire du Reich allemand ou un territoire occupé par ce dernier obligés d'accomplir un travail forcé dans une entreprise commerciale ou un service public et soumis à des conditions assimilables à une détention peuvent également prétendre à une indemnisation pouvant atteindre 5 000 DM.

Enfin, cette loi prévoit le paiement d'indemnisations aux personnes ayant subi un préjudice patrimonial du fait de persécutions racistes, au sens de la législation sur la réconciliation, par suite d'actes directs d'entreprises allemandes n'ayant pas pu obtenir réparation.

La Fondation a également pour tâche de diffuser des informations et d'organiser des manifestations pour entretenir le souvenir de l'holocauste et des autres crimes commis par le régime national socialiste afin de contribuer à éviter la réapparition d'un système totalitaire. La République fédérale d'Allemagne et les entreprises représentées par l'Association des industries allemandes pour la Fondation ont contribué à parts égales à la dotation de la Fondation, d'un montant de 10 milliards de DM. Sur ce chiffre, 8,1 milliards de DM sont destinés aux indemnisations à verser aux victimes du travail forcé, 1 milliard de DM à l'indemnisation des préjudices patrimoniaux, 700 millions de DM au Fonds pour l'avenir et 200 millions de DM aux frais généraux d'administration.

2. Traite d'esclaves

Pendant la période considérée, il a été adopté de nombreuses initiatives pour éliminer les formes modernes de traite d'esclaves en Europe.

Les premières normes minimales tendant à éliminer la traite d'esclaves ont été établies par l'Union européenne par l'Action commune du 27 février 1997 concernant les mesures à prendre pour combattre la traite d'êtres humains et l'exploitation sexuelle des enfants et les sanctions et modalités de coopération connexes. Plus récemment, d'autres mesures ont été adoptées au plan international pour harmoniser les dispositions juridiques dans ce domaine. À ce propos, il y a lieu de souligner les mesures ci-après :

a) Le Protocole visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, a été signé par l'Allemagne dans la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée lors de la Conférence de signature qui a eu lieu à Palerme en décembre 2000. Les formalités de ratification de cet instrument et leur transposition en droit interne sont en cours.

b) Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l'enfant concernant la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants a été signé par l'Allemagne à New York à l'occasion du Sommet du Millénaire en septembre 2000. Les formalités de ratification de cet instrument et leur transposition en droit interne sont en cours.

c) Le 19 mai 2000, le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe a accepté la recommandation no R(2000)11 sur la lutte contre la traite des êtres humains aux fins d'exploitation sexuelle.

d) Le 31 octobre 2001, le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe a accepté la recommandation tendant à renforcer la protection des enfants contre l'exploitation sexuelle.

e) Le Conseil de l'Union européenne doit bientôt adopter la décision-cadre sur la lutte contre la traite d'êtres humains, qui fixe les normes pénales minimales applicables dans tous les États membres.

Article 9

Garanties en cas de privation de liberté

1. Observations fondamentales

La première phrase du paragraphe 1 de l'article 104 de la Loi fondamentale stipule que la liberté individuelle ne peut faire l'objet de restrictions que sur la base d'une loi formelle, et seulement dans le plein respect des conditions qui y sont prescrites. La première phrase du paragraphe 2 de ce même article dispose que seul un juge peut décider de la régularité ou du maintien d'une mesure privative de liberté. Si la privation de liberté n'est pas fondée sur une ordonnance judiciaire, une décision à ce sujet doit être obtenue sans tarder (deuxième phrase du paragraphe 2 de l'article 104 de la Loi fondamentale). Il est interdit à la police de maintenir de son propre chef une mesure de garde à vue au-delà de la fin de la journée suivant l'appréhension de l'intéressé (troisième phrase du paragraphe 2 de l'article 104 de la Loi fondamentale). Quiconque fait l'objet d'une détention provisoire pour être soupçonné d'avoir commis une infraction doit comparaître devant un magistrat au plus tard le lendemain de son arrestation. Le juge doit informer l'intéressé des raisons de sa détention, l'interroger et lui donner la possibilité de formuler des objections (première phrase du paragraphe 3 de l'article 104). Aux termes du paragraphe 4 de ce même article, un membre de la famille de la personne détenue ou une personne jouissant de sa confiance doit être informé sans tarder de toute décision judiciaire ordonnant ou prolongeant une mesure privative de liberté.

En outre, la jurisprudence uniforme de la Cour constitutionnelle fédérale a confirmé que tout accusé a droit à un procès équitable, ce qui signifie également le droit d'être assisté par un avocat à toutes les étapes de la procédure.

Ces règles constitutionnelles ont été reflétées dans les lois de la Fédération et des Länder . Si, par exemple, une personne est détenue du chef d'une infraction pénale, elle doit être informée, au début du premier interrogatoire, de l'infraction dont elle est accusée et des dispositions pénales applicables. Elle doit être informée en outre qu'aux termes de la loi, elle est libre de commenter ou de ne pas commenter l'accusation. Simultanément, elle doit être informée qu'elle a le droit à tout moment de consulter un conseil de son choix, y compris avant l'interrogatoire (article 136 du Code de procédure pénale [Strafprozessordnung]). Si l'inculpé demande â être assisté par un conseil, l'interrogatoire doit être ajourné ou interrompu jusqu'à ce qu'il ait pu s'entretenir avec ledit conseil.

2. Détention provisoire

La détention provisoire ne peut être ordonnée que conformément aux dispositions du Code de procédure pénale, si l'accusé est soupçonné d'être sur le point de commettre une infraction et si une telle mesure est justifiée. Une détention provisoire peut être ordonnée en cas de risque de fuite ou de manipulation des preuves. Ces conditions, ainsi que le principe de proportionnalité, qui doit être respecté dans toute procédure pénale, font que la privation de liberté d'une personne non condamnée n'est pas la règle mais plutôt l'exception dans les procédures pénales menées en Allemagne.

En outre, la règle de procédure prévue par le paragraphe 2 de l'article 9 du Pacte est reflétée dans le Code de procédure pénale allemand. Dès son arrestation, l'accusé doit être informé du contenu du mandat d'arrestation ou, si ce n'est pas possible, de l'infraction qu'il est soupçonné d'avoir commise. Dans ce dernier cas, le mandat d'arrêt doit lui être communiqué sans tarder. La personne provisoirement détenue sur la base d'un mandat d'arrestation doit comparaître devant le juge compétent, qui doit interroger l'intéressé sans tarder après sa comparution, au plus tard le lendemain. Après trois mois de détention provisoire, l'opportunité de cette mesure doit être revue d'office si l'inculpé ou son avocat n'a pas demandé la révision ou l'annulation de cette mesure (paragraphe 5 de l'article 117 du Code de procédure pénale). La détention provisoire ne peut être maintenue au-delà de six mois que si la complexité ou l'ampleur exceptionnelle de l'enquête ou une autre raison importante ne permet pas encore de prononcer un jugement et justifie le maintien de la détention. L'inculpé faisant l'objet d'une mesure de détention provisoire sur la base d'un mandat d'arrestation peut présenter un recours devant les tribunaux pour obtenir la révision ou l'annulation de cette mesure.

La mesure dans laquelle la procédure pénale allemande reflète la gravité d'une mesure comme la détention provisoire ressort également de l'arrêt rendu par la Cour constitutionnelle fédérale le 11 juillet 1994 (dossier no 2 BvR 777/94, publié dans le Neue Juristische

Wochenschrift 1994, p. 3219). Selon la Cour, le droit de l'accusé à un procès équitable mené conformément à une procédure régulière et son droit d'être entendu par un tribunal signifie que l'avocat de l'inculpé a le droit de consulter les dossiers de l'enquête dans toute la mesure où il a besoin des informations qui y figurent pour pouvoir influencer efficacement la décision du tribunal concernant la mesure de détention.

En outre, le Gouvernement fédéral a déposé un projet de loi réglementant l'exécution des mesures de détention provisoire afin de les réviser à nouveau. Un des principaux éléments de ce projet de loi tend précisément à définir les lois et les obligations des intéressés, dans le plein respect de la présomption d'innocence, ainsi qu'à améliorer la situation juridique des personnes faisant

l'objet d'une détention provisoire. Le principe est qu'une telle mesure doit affecter le moins possible les intérêts juridiques des détenus. Enfin, le projet de loi tend à élargir la gamme d'activités offertes en prison pour permettre aux détenus d'utiliser judicieusement leur temps et d'éviter l'apparition d'une sous-culture.

En 2000, 36 683 personnes faisaient l'objet d'une mesure de détention provisoire. Sur ce chiffre, la durée de la détention était la suivante :

moins d'un mois 13 049 cas

un à trois mois 8 531 cas

trois à six mois 8 206 cas

six mois à un an 5 310 cas

plus d'un an 1 587 cas.

Le nombre de personnes en détention provisoire a diminué par rapport à la période 1997 ‑1999. En 2000, il a été mené 908 261 poursuites pénales, ce qui montre que la détention provisoire est l'exception et non pas la règle.

3. Procédures devant des institutions internationales

La Cour européenne des droits de l'homme et la Commission européenne des droits de l'homme ont été saisies de plusieurs affaires dans lesquelles il était allégué que les autorités judiciaires et les tribunaux allemands n'avaient pas respecté l'article 5 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Cet article énonce des droits semblables à ceux qui sont visés à l'article 9 du Pacte. Toutes les requêtes alléguant une violation du paragraphe 1 de l'article 5 de la Convention européenne ont été rejetées. La Commission des droits de l'homme, par exemple, a jugé irrecevables les requêtes présentées par plusieurs individus qui avaient été condamnés pour espionnage pour le compte de l'ancienne République démocratique allemande (arrêts rendus dans les affaires Sdrenka contre Allemagne – requête no 29791/96 et Gast, Popp et Tischler contre Allemagne – requête no 29357/95 du 24 juin 1996). La requête de l'ancien Ministre de la sécurité de l'État de la République démocratique allemande, Mielke, contre sa condamnation du chef d'un homicide commis en 1931, a été rejetée aussi (arrêt rendu dans l'affaire Mielke contre Allemagne le 25 novembre 1996, requête no 30047/96).

La plupart des requêtes fondées sur une allégation de violation du paragraphe 3 de l'article 5 de la Convention européenne en raison de la durée excessive de la détention provisoire ont été rejetées (voir les arrêts du 13 octobre 1993 dans l'affaire B.H. contre Allemagne concernant une détention provisoire de 20 mois – requête no 19791/92; du 6 septembre 1994 dans l'affaire Nells contre Allemagne pour une détention provisoire de 23 mois – requête no 20695/92; du 28 février 1996 dans l'affaire Löhr contre Allemagne pour une détention provisoire de 16 mois – requête no 28397/95). Une condamnation a cependant été prononcée du fait d'une violation du paragraphe 3 de l'article 5 de la Convention européenne à la suite d'une affaire dans laquelle l'accusé avait été emprisonné six ans après avoir été l'objet d'une détention provisoire de 5 ans et 11 mois (arrêt du 5 juillet 2001 rendu dans l'affaire Erdem contre Allemagne – requête no 38321/97). Cet arrêt – comme tous les autres – a été publié en allemand et transmis à l'administration judiciaire du Land en question.

Pendant la période considérée, la Cour européenne des droits de l'homme a rendu trois jugements contre la République fédérale d'Allemagne du chef d'une violation du paragraphe 4 de l'article 5 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. La Cour a considéré qu'en dépit du paragraphe 2 de l'article 147 du Code de procédure pénale, aux termes duquel le conseil de la défense peut se voir refuser l'accès au dossier avant la fin de l'enquête si cela peut compromettre celle ‑ci, le conseil devait pouvoir obtenir toutes les informations disponibles afin d'avoir une possibilité égale de défendre l'inculpé. Tel est particulièrement le cas des dépositions des témoins à charge et des autres éléments de preuve importants pour évaluer la licéité de la détention provisoire (arrêts rendus dans les affaires Garcia Alva contre Allemagne – requête no 23541/94, Lietzow contre Allemagne – requête no 24479/94 et Schöps contre Allemagne – requête no 25116/94, en date du 13 février 2001). Dans une de ces affaires, l'inculpé avait déclaré que, même après consultation du dossier, celui-ci contenait des éléments pertinents, et la Cour a considéré que les autorités judiciaires auraient dû donner à l'intéressé la possibilité de consulter le dossier avant la convocation d'une nouvelle audience pour revoir la mesure de mise en détention, alors même qu'aucune autre requête n'avait été formulée (arrêt du 13 février 2001 rendu dans l'affaire Schöps contre Allemagne – requête no 25116/94).

4. Internement et traitement

L'internement sans l'autorisation ou contre la volonté de la personne intéressée constitue un empiètement sur les droits fondamentaux qui n'est autorisé, conformément au principe de proportionnalité, que s'il est impossible de trouver une solution au moyen de mesures moins coercitives. En outre, une telle mesure ne peut être exécutée que si elle est basée sur un fondement juridique, et seul un juge peut l'ordonner. En cas d'urgence, si une personne est internée en l'absence d'ordonnance judiciaire, cette mesure doit ultérieurement être approuvée par un juge.

Les articles 70 et suivants de la Loi sur les procédures non contentieuses (Gesetz über die Angelegenheiten der freiwilligen Gerichtsbarkeit ‑ FGG), qui est applicable sur l'ensemble du territoire national, réglemente depuis 1992 les actions en justice relatives au prononcé ou à l'approbation de mesures d'internement en cas de maladies mentales ou de handicap mental ou affectif. Il existe en droit positif trois catégories d'internement :

a) Internement de droit civil par un représentant légal (tuteur, parents, gardien) et, depuis 1999, par un agent (articles 1906 et 1631b du Code civil [Bürgerliches Gesetzbuch ‑ BGB]). Cette mesure doit être justifiée par le risque que l'intéressé se blesse lui-même ou par les exigences du traitement (comme examens médicaux, traitements et interventions chirurgicales). Conformément à l'article 1896 du Code civil, cette mesure s'applique non seulement aux personnes souffrant de maladies mentales mais aussi aux handicapés mentaux, émotifs ou physiques.

b) Internement de droit public conformément aux dispositions de la législation des Länder , lorsqu'il existe le risque que l'intéressé se blesse lui-même mais aussi – le libellé des lois varie sur ce point d'un Land à l'autre – s'il existe un risque pour autrui.

c) Internement de droit pénal, qui peut être ordonné par un tribunal comme mesure de sûreté et de réadaptation si l'intéressé n'est pas pénalement responsable d'une infraction du fait d'une maladie ou d'un trouble mental. Une telle mesure est appliquée pour protéger le public et est régie dans certaines Länder par les dispositions applicables aux mesures de détention et dans d'autres par diverses dispositions des lois concernant les malades mentaux ou l'internement. Le fondement de ces mesures est l'article 63 du Code pénal concernant l'internement en hôpital psychiatrique, l'article 64 concernant l'internement dans un établissement de désintoxication et l'article 126a du Code de procédure pénale concernant l'internement temporaire. La Loi sur les prisons régit l'exécution des peines d'emprisonnement et des mesures de sûreté et de réadaptation accompagnées d'une privation de liberté : article 136 (internement en hôpital psychiatrique), article 137 (internement dans un établissement de désintoxication) et article 138 (application des autres dispositions).

La Loi sur les soins (Betreuungsgesetz), qui est entrée en vigueur vers la fin de la période couverte par le rapport précédent, a renforcé la protection de la vie privée et de la liberté des adultes dont le soin a été confié à un gardien ou à un tuteur. Cette loi a été révisée une fois de plus par la Loi du 25 janvier 1998 (Betreuungsrechtsänderungsgesetz), qui est entrée en vigueur le 1 er  janvier 1999 (Journal officiel fédéral, Partie I, p. 1580).

Avant l'entrée en vigueur de la nouvelle loi, il a été possible de placer une personne sous le contrôle d'un gardien et la priver ainsi, automatiquement et sans exception, de la capacité juridique. La disposition à cet effet a été supprimée sans être remplacée, ce qui a éliminé la stigmatisation que cela entraînait pour l'intéressé. Désormais, c'est le principe de nécessité qui s'applique. En conséquence, il n'est nommé de gardien que si la personne intéressée ne veut pas gérer elle-même ses propres affaires ou en ayant recours à un agent ou à une autre forme d'assistance (paragraphe 2 de l'article 1896 du Code civil). Le gardien ne peut ainsi accomplir que les tâches pour lesquelles l'intéressé a besoin d'aide et la durée de la garde ne peut pas dépasser la période pendant laquelle elle est nécessaire. La nomination d'un gardien doit être revue à intervalles de cinq ans au maximum (paragraphe 1 de l'article 69 de la Loi sur les procédures non contentieuses).

La situation juridique de la personne intéressée a été renforcée dans les dispositions concernant aussi bien la garde que l'internement : sa capacité d'ester en justice est désormais indépendante de sa capacité juridique (articles 66 et 70a de la Loi sur les procédures non contentieuses, qui s'applique, en ce qui concerne l'internement, à partir de l'âge de 14 ans) de sorte que la personne assistée n'est plus simplement l'objet mais le sujet de la procédure. Lorsque cela est nécessaire pour défendre ses intérêts, l'intéressé doit être assisté par un tuteur pendant la procédure (paragraphe 1 de l'article 67 et paragraphe 1 de l'article 70b de la Loi sur les procédures non contentieuses).

En principe, l'intéressé doit être entendu en personne avant la désignation d'un gardien. Il en va de même en cas d'internement (articles 68 et 70c de la Loi sur les procédures non contentieuses). Le tribunal a l'obligation, avant de prendre une décision, de se faire personnellement une impression directe de l'intéressé.

La désignation d'un gardien n'affecte pas la capacité juridique existante de la personne assistée. Le gardien est tenu d'assurer le bien-être de la personne assistée (première phrase du paragraphe 2 de l'article 1901 du Code civil). Les personnes assistées doivent pouvoir, dans toute la mesure où elles sont capables de le faire, mener leur vie comme elles l'entendent (deuxième phrase de la même disposition). Le gardien doit se conformer aux souhaits exprimés par la personne assistée si cela n'est pas contraire au bien ‑être de cette dernière et s'il peut le faire (première phrase du paragraphe 3 du même article). En outre, le gardien doit discuter des questions importantes avec la personne assistée (troisième phrase de la même disposition).

L'internement forcé de droit public et le traitement des malades mentaux se distinguent de l'internement de droit civil et sont des mesures qui doivent être appliquées par la police pour éviter un danger pour la sécurité et l'ordre publics. En République fédérale d'Allemagne, ce sont les Länder qui ont compétence pour légiférer dans ce domaine. Dans beaucoup de Länder , les anciennes lois sur la privation de liberté, qui ne tenaient compte qu'en passant des besoins particuliers des malades mentaux, ont maintenant été remplacées par des lois sur les troubles psychiques (Psychisch ‑Kranken ‑Gesetze [PsychKG]). La plupart de ces lois prévoient que les malades mentaux doivent recevoir une assistance spéciale sous forme de mesures de précaution et d'appui à long terme. Afin d'appliquer lesdites mesures, les services de santé ont mis en place des services psychosociaux indépendants, généralement placés sous la direction d'un médecin spécialisé. Les mesures de précaution tendent, dans toute la mesure possible, à éviter un internement forcé des malades mentaux.

La nouvelle Loi sur les soins, entrée en vigueur le 1 er janvier 1992, a également donné l'occasion aux Länder de réformer les lois existantes. Tous les nouveaux Länder de la République fédérale et la plupart des anciens ont maintenant réformé leurs législations et, dans certains cas, les ont totalement remaniées.

Article 10

Mesures de protection des personnes privées de liberté

1. Mécanismes de contrôle

Un traitement humain des personnes privées de liberté est pour l'État une obligation constitutionnelle (articles premier et 2 de la Loi fondamentale). Comme il ressort des informations fournies à propos des articles 7, 8 et 9, des dispositions détaillées – de caractère aussi bien national qu'international – garantissent le respect de ce principe dans tous les cas où des personnes sont privées de liberté. Les rapports du Comité européen pour la prévention de la torture et les déclarations du Gouvernement fédéral (voir ci-dessus le paragraphe 98) montrent que la République fédérale entretient un dialogue continu avec les organes internationaux compétents qui peuvent visiter sans préavis (et d'ailleurs le font régulièrement) tous les établissements où se trouvent des détenus. Les nombreuses suggestions et informations fournies par le Comité se sont traduites par une amélioration des établissements de ce type. La coopération qui existe depuis l'adoption de la Convention européenne contre la torture a apporté la preuve de son utilité.

La mise en place sur l'ensemble du territoire national d'organes indépendants d'enquêtes sur les questions de mauvais traitements aux mains de la police locale – que le Comité des droits de l'homme a eu raison de suggérer dans son observation no 11 concernant le quatrième rapport périodique de l'Allemagne (CCPR/C/79/Add.73) – ne paraît pas absolument nécessaire étant donné qu'il existe déjà bien d'autres mécanismes. Indépendamment du système établi conformément à la Convention contre la torture, les précautions traditionnelles prises au plan national garantissent une prévention suffisante dans ce domaine.

Les mauvais traitements à l'égard de détenus constituent une infraction pénale (voir ci-dessus les paragraphes 94 et suivants concernant l'application de l'article 7). Conformément au principe des poursuites obligatoires (paragraphe 3 de l'article 152 du Code de procédure pénale – StPO), le Parquet est tenu d'intervenir pour poursuivre toutes les infractions dès lors qu'il existe des indices factuels suffisants. Le Parquet doit ouvrir une enquête dès qu'il a connaissance d'une infraction pénale, que ce soit à la suite d'une plainte ou de toute autre façon (paragraphe 1 de l'article 160 du Code de procédure pénale). Si des indices de comportement répréhensible de la part d'agents de police apparaissent, une enquête neutre et impartiale est réalisée par le Parquet et, lorsqu'il y a lieu, l'affaire est portée devant les tribunaux. Conformément au principe des poursuites obligatoires, les membres du Parquet ne sont pas soumis au droit de leurs supérieurs hiérarchiques de donner les instructions prévues à l'article 146 de la Loi sur le fonctionnement des tribunaux (Gerichtsverfassungsgesetz) et ne sont donc pas tenus non plus par l'exécution de l'exécutif. Les tribunaux appelés à connaître de l'affaire après la formulation d'un chef d'inculpation par le Parquet sont indépendants et ne sont soumis qu'à la loi (paragraphe 1 de l'article 97 de la Loi fondamentale). En outre, le principe de la séparation des pouvoirs (paragraphe 2 de l'article 20 de la Loi fondamentale) garantit l'indépendance de la magistrature en ce qui concerne la surveillance du respect des droits de l'homme.

Indépendamment des procédures pénales, les agents de police – comme les autres fonctionnaires – sont soumis à la supervision de leurs supérieurs hiérarchiques et des ministères compétents. En outre, conformément aux lois sur la procédure disciplinaire dans la fonction publique de la Fédération et des Länder (Beamtengesetze), des sanctions disciplinaires sévères peuvent être imposées en cas d'infraction ne relevant pas du droit pénal mais aussi en sus d'un jugement pénal.

2. Réadaptation à la vie sociale en prison

a) Observations fondamentales

Conformément à l'article 2 de la Loi sur les prisons, l'objectif de l'emprisonnement est de permettre aux détenus de vivre après leur libération une vie socialement responsable exempte de délinquance. La Loi sur les prisons constitue ainsi le reflet du principe constitutionnel selon lequel l'emprisonnement doit être orienté vers la réadaptation sociale. Comme indiqué ci-dessus (paragraphe 118 concernant l'article 8), la Cour constitutionnelle fédérale a rendu le 1 er juillet 1998 un arrêt relatif à la rémunération des détenus sur la base duquel il a été rédigé un nouveau règlement à ce sujet (voir ci-dessus le paragraphe 119). Dans cet arrêt, la Cour constitutionnelle a déclaré ce qui suit en ce qui concerne le principe de réadaptation sociale :

"Aux termes de la Constitution, l'emprisonnement doit avoir pour objectif de promouvoir la réinsertion sociale des détenus. Ces derniers ont le droit fondamental, conformément au paragraphe 1 de l'article, lu dans le contexte du paragraphe 1 de l'article premier de la Loi fondamentale, de voir cet objectif réalisé par les mesures qui les affectent. Le principe de réinsertion sociale est très important dans le contexte de l'emprisonnement, situation dans laquelle c'est pour l'essentiel l'État qui dicte les conditions de vie d'un individu. La Cour constitutionnelle fédérale a développé ce principe à la lumière de la reconnaissance par les milieux juridiques de ce que leur valeur repose principalement sur l'obligation de promouvoir la dignité humaine et d'appliquer le principe selon lequel l'État a le devoir de protéger le bien-être social. Il faut par conséquence convaincre les détenus, en leur enseignant comment le faire, de mener une vie responsable de sorte qu'ils puissent à l'avenir s'intégrer à une société libre sans enfreindre la loi et assumer leurs propres risques. La réinsertion sociale est également une façon de protéger la société elle-même. Celle-ci a en effet intérêt à ce que les délinquants ne récidivent pas et causent à nouveau un préjudice à ses concitoyens et à la communauté (voir BVerfGE 35, p. 202 et 235 et suivantes ‑ Lebach). Cet objectif de réinsertion sociale consacré dans la Constitution définit l'ensemble du système pénitentiaire et s'applique également à l'exécution des peines de prison à vie. Ces détenus doivent eux aussi se voir offrir des conditions dans lesquelles ils puissent s'épanouir et apprendre à faire face à la vie. Il importe de lutter contre les effets de la privation de liberté qui peuvent nuire à la personnalité et en particulier la déformer (voir BVerfGE 45, 187, p. 238 et suivantes), et il doit en aller de même de la détention provisoire. Les personnes placées en détention provisoire peuvent également recouvrer leur liberté dès lors qu'elles ne sont plus dangereuses (paragraphes 2 et 3 de l'article 67d du Code pénal).

Cet objectif constitutionnel de réinsertion sociale lie tous les pouvoirs de l'État, et en premier lieu le législateur, appelé à rédiger les normes applicables au système pénitentiaire (voir BVerfGE 33, 1, p. 10 et suivantes). Il fait au Parlement l'obligation d'élaborer un concept efficace de réinsertion sociale qui puisse servir de base au système pénitentiaire. Le principe est important aussi pour l'administration et la magistrature, spécialement lorsqu'il s'agit d'interpréter des termes juridiques ou des clauses générales non définis ou si le Parlement a accordé aux autorités chargées de l'application de la loi un pouvoir discrétionnaire pour ce qui est de ses conséquences juridiques."

b) Faits nouveaux intervenus pendant la période considérée

La Loi du 26 janvier 1998 tendant à réprimer les délits sexuels et autres infractions pénales dangereuses (Gesetz zur Bekämpfung von Sexualdelikten und anderen gefährlichen Straftaten), le Parlement fédéral a adopté un ton nouveau envers les délinquants sexuels. Beaucoup d'études réalisées aussi bien en Allemagne qu'à l'étranger montrent que, dans le cas d'infractions sexuelles, le risque de récidivisme peut souvent être atténué si le délinquant reçoit des soins thérapeutiques plus intensifs. Cependant, une telle thérapie ne peut réussir que si les détenus qui s'y prêtent commencent à subir un traitement dès que possible. Aux termes de la loi applicable jusqu'en janvier 1998, les délinquants sexuels qui se prêtaient à une thérapie étaient envoyés en prison pour y purger leur peine et, souvent, ne recevaient pas de soins thérapeutiques suffisants. C'étaient les autorités pénitentiaires qui décidaient des mesures de traitement qui s'imposaient et s'il fallait orienter les délinquants vers un traitement plus intensif dans un établissement de thérapie sociale. Même dans les cas où un tel transfert était jugé nécessaire, cela n'était possible que si aussi bien le détenu que le directeur de l'établissement obtenaient son accord. En outre, les établissements de thérapie sociale des Länder ne comportaient pas assez de place pour pouvoir accueillir tous les détenus ayant besoin d'un traitement.

Pour remédier à cet état de choses, la Loi sur la répression des délits sexuels et des autres infractions pénales dangereuses a prescrit le transfert obligatoire des délinquants sexuels traitables ayant besoin d'un traitement dans un établissement de thérapie sociale dès lors qu'ils sont condamnés à plus de deux ans d'emprisonnement. La nécessité de ce transfert est évaluée sur la base d'un examen de la personnalité et des antécédents des détenus. Ce nouveau régime doit entrer en vigueur le 1 er janvier 2003. Cependant, les autorités pénitentiaires sont d'ores et déjà tenues de

déterminer, lors de l'examen qui doit être procédé au début du traitement, si un transfert s'impose et de prendre la décision appropriée sur ce point et, s'il est décidé qu'un transfert n'est pas requis, cette évaluation doit être répétée à intervalles périodiques compte tenu du comportement du détenu en prison.

3. Régime cellulaire

Dans ses observations concernant le quatrième rapport périodique de l'Allemagne, le Comité des droits de l'homme a désapprouvé que le régime cellulaire puisse être imposé pour une durée pouvant aller jusqu'à trois mois et puisse être prolongé (CCPR/C/79/Add.73, observation no 15).

Le régime cellulaire est une mesure exceptionnelle parce que l'isolement et l'atténuation des incitations de l'entourage qu'il entraîne peuvent se traduire par un amenuisement des aptitudes interpersonnelles. Cette réalité se reflète également dans les conditions auxquelles la loi subordonne ce régime, lequel ne peut être imposé que si des conditions préalables rigoureuses sont remplies. En outre, elle est intégralement soumise à l'appréciation du tribunal (voir également l'arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme mentionné au paragraphe 102).

Le régime cellulaire ne peut être imposé que si cela est indispensable pour des raisons résultant de la personnalité du détenu (article 89 de la Loi sur les prisons ‑ StVollzG). Ce que peuvent être ces raisons est défini de façon limitative au paragraphe 1 de l'article 88 de la Loi sur les prisons. Ainsi, il faut que le comportement ou l'état mental du détenu créent un risque considérable de fuite ou d'actes de violence contre des personnes ou des biens ou de suicide ou d'automutilation. L'existence de ces risques doit être démontrée par des manifestations concrètes du comportement du détenu, de simples craintes ne suffisant pas. Pour évaluer le danger de fuite, par exemple, il ne suffit pas de prendre seulement en considération le comportement passé, comme de précédentes tentatives : des indications spécifiques doivent permettre d'établir qu'il existe un risque substantiel imminent.

En outre, l'application du régime cellulaire doit être indispensable, l'expression "indispensable", qui n'est pas définie juridiquement, relève intégralement de l'appréciation du tribunal. Cela signifie que les autorités pénitentiaires doivent d'abord appliquer tous les autres moyens possibles pour prévenir l'imposition d'une mesure de régime cellulaire ou remédier à sa nécessité, et qu'une telle mesure ne peut être appliquée que si des mesures moins coercitives ne suffisent pas. Les autres mesures pouvant être envisagées sont notamment une assistance médicale, psychiatrique ou psychologique.

Dans la pratique, le régime cellulaire est une mesure exceptionnelle qui n'est pas appliquée pour des périodes de longue durée. En cas de danger permanent, l'on évite un régime cellulaire de plus longue durée en transférant le détenu dans un établissement où les mesures de sécurité sont plus strictes.

Étant donné les conditions préalables rigoureuses qui doivent être remplies pour que le régime cellulaire puisse être ordonné, la République fédérale d'Allemagne souhaiterait maintenir les dispositions existantes.

Article 11

Interdiction de l'emprisonnement pour incapacité

d'exécuter une obligation contractuelle

L'Allemagne respecte l'obligation prévue à l'article 11 du Pacte et nul n'est emprisonné simplement parce qu'il ne peut pas exécuter une obligation contractuelle.

Le droit allemand concernant les mesures d'exécution contient différentes dispositions prévoyant qu'un débiteur peut faire l'objet d'une mesure d'emprisonnement, par exemple s'il refuse d'exécuter un acte qui ne peut pas l'être par un représentant (par exemple fournir des informations) ou s'il n'est pas possible de recouvrer l'amende qui lui est imposée (article 888 du Code de procédure civile). Tel est également le cas si le débiteur qui doit fournir une déclaration tenant lieu de serment ne comparaît pas à l'audience ou refuse, sans raison justifiée, de faire cette déclaration. En pareil cas, le tribunal peut ordonner sa détention pour obliger l'intéressé à faire la déclaration en question (article 901 du Code de procédure civile). Ces dispositions sont considérées comme constitutionnelles car la sanction, qui a un caractère coercitif pour le débiteur, peut être évitée à tout moment. La loi établit des liens entre l'emprisonnement mais non la capacité de payer mais l'inobservation d'obligations dont l'intéressé peut s'acquitter sans difficulté.

Des faits aussi divers sont sans rapport avec l'article 11 du Pacte, lequel a simplement pour but de mettre un débiteur à l'abri de l'emprisonnement si l'inexécution d'une obligation contractuelle est motivée exclusivement par une incapacité de sa part. Tel n'est manifestement pas le cas, par exemple, dans le contexte de l'article 901 du Code de procédure civile étant donné que le débiteur peut éviter sa détention ou y mettre fin en faisant une déclaration tenant lieu de serment. En outre, l'interdiction de l'emprisonnement pour dette est expressément limitée aux obligations contractuelles. Le devoir de faire une déclaration tenant lieu de serment dans le contexte des mesures d'exécution, en revanche, concerne une obligation légale à l'égard de l'État.

Il en va de même du nouveau Décret sur l'insolvabilité (Insolvenzordnung) du 5 octobre 1994 (Journal officiel fédéral, Partie I, p. 2866), dans lequel le Parlement fédéral a promulgué les dispositions applicables à l'insolvabilité et dont l'article 17 stipule que, d'une manière générale, l'ouverture d'une procédure d'insolvabilité est motivée par l'incapacité de payer. Lorsqu'une telle procédure est demandée, l'emprisonnement du débiteur peut être ordonné même avant l'ouverture de la procédure si aucune autre moyen ne permet d'éviter que les biens du débiteur échappent aux créanciers (première phrase du paragraphe 2 de l'article 21 du Décret). La détention peut également être ordonnée, à ce stade de la procédure, si le débiteur ne se conforme pas à son application de fournir des informations (emprisonnement pour outrage à la justice). De même, après l'ouverture de la procédure, le tribunal peut ordonner la détention du débiteur pour obliger celui-ci à fournir des informations ou pour sauvegarder ses biens (paragraphes 2 et 3 de l'article 98 du Décret).

En pareil cas, la détention n'est pas ordonnée parce que l'intéressé ne peut pas s'acquitter d'obligations contractuelles et a simplement pour but de mettre les créanciers à l'abri de débiteurs malhonnêtes. La détention ordonnée pour obtenir des informations ne l'est que si l'intéressé est effectivement à même de les fournir.

Article 12

Liberté de mouvement et droit de quitter tout pays

1. Liberté de mouvement

L'article 11 de la Loi fondamentale, qui protège le droit de se trouver et de résider en tout lieu du territoire fédéral, garantit la liberté de mouvement sur ce territoire (voir l'arrêt récent du 20 juillet 1999 de la Cour constitutionnelle fédérale, dossier no 1 BvQ 10/99, publié dans le Neue JuristischeWochenschrift  1999, p. 3477 et 3478, l'arrêt du 15 août 1996, dossier no 2 BvR 1075/96, publié dans le Neue Juristische Wochenschrift 1996, p. 3145 et 3146, ainsi que les informations figurant dans le troisième rapport périodique (CCPR/C/52/Add.3, paragraphe 84) concernant la restriction imposée à ce droit fondamental dans le cas des personnes astreintes au service militaire conformément au paragraphe 1 de l'article 11 de la Loi fondamentale.

L'article 11 de la Loi fondamentale garantit uniquement la liberté de mouvement des Allemands. Toutefois, les étrangers peuvent, si leur liberté de mouvement fait l'objet de restrictions sur le territoire fédéral, invoquer non seulement l'article 12 du Pacte mais aussi le droit fondamental au libre développement de leur personnalité reconnu au paragraphe 1 de l'article 2 de la Loi fondamentale. Cette dernière disposition garantit, d'une manière générale, la liberté d'agir au sens large du terme mais est subordonnée à la réserve d'ordre constitutionnel à laquelle sont soumises toutes les lois de forme et de fond. Si la restriction imposée par la loi au libre développement de la personnalité n'affecte pas un aspect inaliénable de la vie privée, chacun doit accepter les mesures adoptées par l'État, dans le respect du principe de proportionnalité, afin de protéger les intérêts publics supérieurs (arrêt de la Cour constitutionnelle fédérale du 10 avril 1997, dossier no 2 BvL 45/92, publié dans le recueil officiel BVerfGE 96, p. 10 et suivantes et p. 21).

La liberté de mouvement et le droit de quitter le pays des demandeurs d'asile sont limités par l'article 56 de la Loi relative à la procédure en matière d'asile (Asylverfahrensgesetz ‑ AsylVfG), qui stipule que le droit de résidence accordé aux demandeurs d'asile est géographiquement limité à la zone relevant des autorités d'immigration habilitées à accorder l'asile. Aux termes du paragraphe 2 de l'article 58 de cette loi, tous demandeurs d'asile doivent être autorisés à quitter le lieu de résidence qui leur est assigné pour se rendre à des rendez ‑vous avec des représentants du Haut Commissariat des Nations Unies pour les droits de l'homme et d'organisations d'aide aux réfugiés. Aux termes du paragraphe 3 de la même disposition, aucune autorisation n'est requise pour une comparution personnelle devant les autorités ou les tribunaux.

Il ne faut pas perdre de vue que dans le contexte de la restriction géographique imposée au droit de résidence des demandeurs d'asile (en application de l'article 55 de la loi susmentionnée) ledit droit est spécifiquement lié à l'asile et à la procédure correspondante et ne constitue pas un permis de séjour au sens de l'article 5 de la Loi sur les étrangers, ce droit constituant, tout au moins pendant la durée de la procédure d'asile, une autorisation de séjour au sens du paragraphe 1 de l'article 12 du Pacte. Tant que la procédure d'asile n'est pas achevée, le demandeur doit être disponible à tout moment en un lieu spécifique aux fins de la procédure de sorte que les autorités n'aient pas à mener des recherches pour se mettre en rapport avec lui. Il ne s'agit pas là d'une restriction disproportionnée du droit au libre développement de la personnalité. La Cour constitutionnelle fédérale a été appelée à se prononcer sur la constitutionnalité des dispositions relatives à la restriction géographique du droit de résidence accordé aux demandeurs d'asile et, dans son arrêt du 10 avril 1997 (dossier no 2 BvL 45/92, voir le paragraphe 169) a déclaré que cette mesure était conforme à la Constitution. Cette restriction géographique disparaît dès lors que le droit d'asile est reconnu aux demandeurs.

Dans le cas des étrangers qui arrivent par avion et demandent asile aux autorités frontalières, la procédure d'asile doit être appliquée avant que ne soit prise une décision à leur sujet s'ils proviennent d'un pays considéré comme sûr ou ne sont pas munis d'un passeport valable et peuvent être accueillis dans la zone de transit (voir l'article 18a de la Loi relative à la procédure d'asile). Cette procédure, dite "d'aéroport", est une procédure accélérée. Par exemple, le Bureau fédéral pour l'accueil des réfugiés étrangers doit statuer dans les deux jours suivant le dépôt de la demande d'asile, et la décision ainsi adoptée d'accorder une protection temporaire de la loi doit être revue par un tribunal dans un délai de 14 jours. Si ces délais ne peuvent pas être respectés ou si la demande d'asile n'apparaît pas comme manifestement dépourvue de fondement, l'entrée est autorisée pour que la procédure normale d'asile puisse être menée dans le pays.

2. Droit de quitter tout pays

Le droit de quitter son propre pays – paragraphe 2 de l'article 12 du Pacte – est également garanti en République fédérale d'Allemagne. Ce droit et ses fondements juridiques ont été expliqués dans les premier, deuxième et troisième rapports périodiques (CCPR/C/1/Add.18, CCPR/C/28/Add.6, CCPR/C/52/Add.3).

Pendant la période considérée, les poursuites pénales menées à propos des crimes d'État de la RDA ont constitué un événement majeur. Les poursuites intentées contre les responsables des actes qui ont fait tant de morts à la frontière intra-allemande (pour plus amples détails sur ce point, voir ci-dessus les paragraphes 63 à 70 relatifs à l'article 6) constituent également une contribution à la protection garantie par le paragraphe 2 de l'article 12. La République démocratique allemande a violé le paragraphe 2 de l'article 12 du Pacte à grande échelle en empêchant ses citoyens de quitter son propre territoire.

Il y a lieu de rappeler à ce propos que cette pratique de la RDA a également été discutée et critiquée en juillet 1984 par le Comité des droits de l'homme (voir Annuaire du Comité des droits de l'homme, 1983 ‑1984, Volume I, p. 531 ‑553; voir également sur ce point le paragraphe 64 ci-dessus). Un membre du Comité, se référant à cette question, a déclaré qu'il n'était :

"pas sûr que la République démocratique allemande respecte strictement les dispositions de l'article 12 du Pacte. Chacun a la liberté fondamentale de quitter son pays; le paragraphe 3 de l'article 12 prévoit certaines restrictions, mais pour trois motifs seulement. Or, le principe fondamental qui permet de décider si telle ou telle personne peut quitter la RDA est l'incidence de son départ sur les droits et les intérêts de son pays; cela semble bien large au regard des dispositions du paragraphe 3 de l'article 12" (p. 548, paragraphe 15).

Roger Errera (loc. cit., p. 547, paragraphes 7 à 11) et Christian Tomuschat (loc. cit., p. 543, paragraphe 18), membres du Comité, ont également critiqué cette restriction arbitraire de la liberté de quitter tout pays. Cette attitude a été celle non seulement des membres occidentaux du Comité, mais aussi des représentants du tiers monde. C'est ainsi que Birame Ndiaye (Sénégal), membre du Comité, a déclaré qu'il semblait que :

"le Gouvernement de la République démocratique allemande envisage de restreindre la liberté de circulation pour d'autres motifs que ceux que prévoit l'article 12 du Pacte " (loc. cit., p. 548, paragraphe 17).

La République démocratique allemande a été critiquée non seulement parce qu'elle limitait la liberté de quitter tout pays conformément au Pacte, mais aussi parce qu'elle ne respectait pas son obligation générale de garantir les droits de l'homme, comme vu au paragraphe 3 de l'article 1 et aux paragraphes 55 et 56 de la Charte des Nations Unies. En 1970, dans sa résolution 1503 (XL VIII), le Conseil économique et social a mis en place une procédure pour examen des communications de particuliers adressées au Comité des droits de l'homme, par l'entremise de sa Sous-Commission de lutte contre les mesures discriminatoires et de la protection des minorités, concernant des violations des droits de l'homme reflétant "l'existence d'un ensemble de violations flagrantes et systématiques des droits de l'homme". Selon cette procédure, dont les premières étapes étaient confidentielles, n'étaient examinées que les violations exceptionnellement graves des droits de l'homme. Chaque année, une dizaine de pays faisaient l'objet d'un tel examen. De tous les pays du bloc oriental, seules la République démocratique allemande et l'Albanie ont figuré sur cette liste entre 1981 et 1983 du fait du régime qu'elles appliquaient à la frontière (voir P. Alston, Commission des droits de l'homme, The United Nations and Human Rights: a Critical Appraisal, Oxford, Clarendon Press, 1992, p. 126 [151 Fn. 89]; F. Newman/D. Weissbrodt, International Human Rights, Cincinnati, Anderson Publishing Co., 1990, p. 122). En gros, un "ensemble de violations flagrantes et systématiques" était présumé dès lors qu'il était reçu 50 plaintes concernant la même restriction. La République démocratique allemande a finalement été biffée de cette liste lorsqu'elle a autorisé plusieurs requérants à quitter le pays, ce qui a fait baisser le nombre total de plaintes en suspens à moins de 50.

Ces questions ont fait l'objet d'une jurisprudence uniforme des décisions pénales de la Cour constitutionnelle fédérale et de la Cour européenne des droits de l'homme, qui ont également eu à connaître de ces procédures pénales (voir les paragraphes 68 à 70 ci-dessus). Les condamnations prononcées par les tribunaux allemands depuis 1993 à l'égard des personnes alors à des postes de responsabilité contribuent par conséquent beaucoup à protéger les droits garantis par le paragraphe 2 de l'article 12 du Pacte.

Article 13

Expulsion

La législation allemande concernant les étrangers est conforme aux dispositions du Pacte international relatif aux droits civiques et politiques et à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Un étranger peut être expulsé dans les conditions visées aux articles 45 à 48 de la Loi sur les étrangers si son séjour en République fédérale d'Allemagne constitue une menace pour la sécurité et l'ordre public ou d'autres intérêts supérieurs du pays. L'expulsion est décrétée par arrêté administratif après que l'intéressé a été entendu. Si, à cette occasion, l'étranger soulève une objection ou introduit un recours en justice, l'application de l'arrêté est suspendue. Dans des cas exceptionnels, l'exécution immédiate de l'arrêté d'expulsion peut être ordonnée, mais la décision doit être dûment motivée par écrit. L'expulsion, une fois ordonnée, entraîne, entre autres, la nullité du permis de séjour éventuellement délivré. L'intéressé ne peut plus revenir sur le territoire fédéral et y séjourner et il ne lui est plus délivré de permis de séjour même s'il remplit les conditions requises à cette fin (première et deuxième phrases du paragraphe 2 de l'article 8 de la Loi sur les étrangers). En règle générale, si l'intéressé en fait la demande, ces conséquences juridiques sont limitées dans le temps (troisième phrase du paragraphe 2 de l'article 8).

Aux termes de l'article 46 de la Loi sur les étrangers, un étranger peut être expulsé, en particulier s'il :

a fourni des informations inexactes dans toute procédure menée en application de la Loi sur les étrangers ou pour obtenir un visa standard conformément à la Convention de Schengen afin d'obtenir un permis de séjour ou une suspension temporaire de l'exécution d'un arrêté d'expulsion ou, alors qu’il était légalement tenu de le faire, n'a pas coopéré à l'application de mesures prises par les autorités compétentes responsables dans le pays et à l'étranger de l'application de la Loi sur les étrangers (l'étranger ne peut être expulsé pour ce motif que s'il a été expressément informé, avant d'être interrogé, des conséquences juridiques d'une fausse déclaration);

a commis une infraction autre que mineure ou isolée de dispositions légales ou de décisions ou arrêtés judiciaires ou officiels ou a commis à l'étranger une infraction pénale considérée en Allemagne comme une infraction pénale intentionnelle.

L'article 46 de la Loi sur les étrangers n'exige pas que l'intéressé ait été condamné du chef des infractions dont il est accusé. Dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire, l'autorité qui décrète l'expulsion doit tenir compte de la durée de la résidence licite en Allemagne de l'étranger, des liens que celui-ci a avec l'Allemagne et qui doivent être protégés, des conséquences de l'expulsion pour les membres de la famille qui font partie du ménage à l'étranger qui réside légalement en Allemagne et des dispositions du paragraphe 2 de l'article 55 de la Loi sur les étrangers relatives à la suspension temporaire de l'exécution de l'arrêté d'expulsion.

Conformément au paragraphe 2 de l'article 47 de la Loi sur les étrangers, un étranger est généralement expulsé s'il a, par exemple :

fait l'objet d'une condamnation ayant force de chose jugée du chef d'une ou plusieurs infractions pénales intentionnelles et condamné à deux ans au moins de maison de correction ou d'emprisonnement sans sursis; ou

a, lors d'une réunion publique ou manifestation interdite ou dissoute, participé à la commission d'un délit ou à des actes de violence dirigés contre des personnes ou des biens commis avec la force combinée de la foule d'une manière constituant un danger pour la sécurité publique.

Aux termes du paragraphe 1 de l'article 47 de la Loi sur les étrangers, un ressortissant étranger est expulsé s'il constitue un risque particulier, notamment :

- s'il a été condamné du fait d'une infraction pénale intentionnelle à la loi sur les stupéfiants, d'une atteinte à la tranquillité publique dans les conditions visées à la deuxième phrase de l'article 125a du Code pénal ou d'une atteinte à la tranquillité publique commise lors d'une réunion ou manifestation publique interdite, en application de l'article 125 du Code pénal, à au moins deux ans de maison de détention ou de prison sans sursis.

Les groupes d'étrangers visés à l'article 48 de la Loi sur les étrangers bénéficient d'une protection spéciale contre l'expulsion. Ainsi, un étranger ayant un permis de résidence permanente en République fédérale, qui a parmi son ménage un membre de la famille de nationalité allemande, est marié ou vit en union libre avec un étranger ayant un permis de résidence permanent en Allemagne ou reconnu comme ayant le statut de réfugié ou d'admis au droit d'asile ne peut être expulsé que pour de graves raisons liées à la sécurité et à l'ordre public. Le système "normal" et "facultatif" d'expulsion est appliqué de telle sorte qu'en règle générale, seules les personnes qui

répondent aux conditions visées au paragraphe 1 de l'article 47 de la Loi sur les étrangers relatives à l'expulsion obligatoire sont effectivement expulsées, tandis que les personnes qui répondent aux conditions du paragraphe 2 de l'article 47 relatives à l'expulsion "normale" ne sont expulsées que sur une base "facultative".

De plus, les paragraphes 2 et 3 de l'article 48 de la Loi sur les étrangers accordent une protection spéciale contre l'expulsion aux étrangers mineurs dont les deux parents ou celui des deux qui est investi de l'autorité parentale se trouvent légalement en Allemagne ou ont été admis à bénéficier du droit d'asile.

Tout étranger qui est obligé de quitter le pays est expulsé conformément à l'article 49 de la Loi sur les étrangers s'il semble que le départ ne sera pas volontaire ou s'il apparaît nécessaire de superviser la sortie de l'intéressé du territoire national pour des raisons liées à la sécurité et à l'ordre public. Tout étranger est obligé de quitter le territoire national dès lors que sont réunies les conditions préalables visées à l'article 42 de la Loi sur les étrangers s'il n'a pas ou n'a plus un permis de séjour valable (par exemple s'il a été décrété un arrêté d'expulsion) dès lors que l'acte administratif d'expulsion est exécutoire. Dans tous les cas, les autorités doivent respecter l'interdiction d'expulsion visée à l'article 51 de la Loi sur les étrangers et tenir compte de tous obstacles à l'expulsion ainsi que des circonstances qui entraînent une suspension temporaire de l'expulsion prévus aux articles 53 et 55 de la Loi sur les étrangers (voir les paragraphes 56 à 60 concernant l'application des articles 51 et suivants de la Loi sur les étrangers et les paragraphes 100 et 101 relatifs à l'interdiction de l'expulsion si l'intéressé est menacé de torture en cas d'expulsion).

Article 14

Droits en justice, notamment en cas de procédure pénale

La primauté du droit et le droit de recours devant les tribunaux sont des principes essentiels de la Loi fondamentale. Les dispositions reflétant ces principes ont été rédigées à la lumière de l'article 14 du Pacte et elles sont appliquées conformément aux règles nationales de procédure. Ces dernières ont été expliquées en détail dans les premier et deuxième rapports périodiques (CCPR/C/1/Add.18, CCPR/C/28/Add.6). Les faits nouveaux intervenus à cet égard sont exposés ci-dessous.

1. Accès aux tribunaux

Aux termes du paragraphe 1 de l'article 103 de la Loi fondamentale, chacun a le droit d'être entendu conformément à la loi. Si ce droit est violé par un jugement qui ne peut pas être attaqué au moyen de recours ordinaires, l'intéressé peut présenter un recours en inconstitutionnalité devant la Cour constitutionnelle fédérale. La Loi du 27 juillet 2001 portant réforme de la procédure civile (Gesetz zur Reform des Zivilprozesses) (Journal officiel fédéral, Partie I, p. 1887), qui est entrée en vigueur le 1 er janvier 2002, a désormais créé un nouveau recours en appel, qui est un recours en violation du droit d'être entendu conformément à la loi. Un tel recours peut être formé si la décision rendue en première instance par le tribunal civil ou une juridiction du travail ne peut pas être attaquée au moyen d'un appel portant sur des points de droit ou de fait. À l'avenir, par conséquent, il ne sera plus nécessaire de former des recours en inconstitutionnalité. L'application du droit à un procès équitable consacré par la première phrase du paragraphe 1 de l'article 14 du Pacte sera donc désormais plus rapide et encore plus efficace.

Le droit à une assistance juridique permet à quiconque d'avoir accès aux tribunaux, qu'il ait ou non les moyens de prendre en charge le coût d'une procédure judiciaire. La jurisprudence a élargi la portée de cette institution en invoquant le paragraphe 1 de l'article 3 de la loi fondamentale, qui garantit l'égalité de tous devant la loi. La première Chambre du premier Sénat de la Cour constitutionnelle fédérale a déclaré, le 23 juin 1999, que la partie perdante dépourvue de moyens est exonérée du paiement des dépens, qu'elle ait été demanderesse ou défenderesse (arrêt publié dans le Neue Juristische Wochenschrift 1999, p. 3186). Désormais, ce n'est pas seulement le demandeur ayant droit à une assistance juridique qui est exonéré du versement de la cautio judicatum solvi et du paiement des dépens s'il est débouté. En outre, le défendeur, s'il a droit à une assistance juridique, n'a pas à rembourser au demandeur les frais de justice que celui-ci a payés s'il est donné, le remboursement étant effectué par l'État.

2. Publicité du procès

Conformément à la législation allemande relative au fonctionnement des tribunaux, les audiences devant les tribunaux, y compris le prononcé des jugements et des décisions, sont publiques. Par conséquent, quiconque peut assister à l'audience en personne, qui est appelé l'accès public direct. Le principe d'accès public direct s'applique également aux représentants de la presse qui rendent compte de l'affaire. En revanche, un accès public dit indirect, par le biais d'enregistrements filmés ou de retransmission par radio ou par télévision n'est pas autorisé.

La Cour constitutionnelle fédérale a eu maintes fois à connaître de l'exclusion des enregistrements pour la télévision et la radio et un arrêt le plus récent à ce sujet est celui du 24 janvier 2001 (dossier no 1 BvR 2623/95 et 1 BvR 622/99, publiés dans le recueil officiel BVerfGE 103, p. 44). Ce jugement porte sur deux recours en inconstitutionnalité formés par une agence de presse privée à laquelle les juges d'un tribunal pénal et d'un tribunal administratif avaient interdit d'enregistrer les débats à l'audience. Cette agence de presse considérait que l'interdiction faite aux stations de radio et de télévision d'enregistrer les débats n'était pas compatible avec la liberté de l'information et de la diffusion de nouvelles garantie dans la Constitution (paragraphe 1 de l'article 5 de la Loi fondamentale).

La Cour constitutionnelle fédérale a rejeté ces recours en inconstitutionnalité en faisant valoir que le Parlement, alors qu'il l'avait défini le droit d'accès du public aux tribunaux, avait tenu compte du rôle joué par le principe de publicité des débats et des intérêts différents des parties à l'instance. Les dispositions adoptées conciliaient l'objectif qu'était la supervision des procédures judiciaires et la nécessité de garantir l'accès du public à l'information. La Cour a ajouté que le principe d'accès à l'information indispensable à la formation d'une opinion publique dans une démocratie n'exigeait pas un accès du public autrement qu'à l'audience proprement dite. En particulier, les dispositions légales préservaient la vie privée, répondaient aux exigences d'une procédure régulière et permettaient de savoir la vérité sur l'administration de la justice. Elles protégeaient le droit de toute personne de contrôler la diffusion d'informations la concernant car elles empêchaient que la teneur des témoignages soit manipulée par des moyens techniques lors de la production d'un programme de télévision. En outre, le Parlement n'était pas tenu d'autoriser des dérogations pour des séries spécifiques d'action ou de procédure car il existait dans tous les cas un risque d'atteinte à la vie privée.

3. Droits dans le contexte de procédures pénales

a) Droit à un procès équitable, paragraphe 1 de l'article 14

En Allemagne, le droit à un procès équitable en matière pénale découle des garanties de procédure visant à ce que la justice soit rendue conformément à la loi. La Cour constitutionnelle fédérale a conféré à ce principe un rang constitutionnel sur la base du paragraphe 1 de l'article 2, dans le contexte du paragraphe 3 de l'article 20 de la Loi fondamentale (voir les arrêts de la Cour constitutionnelle fédérale du 26 mai 1981, dossier no 2 BvR 215/81, publié dans le recueil officiel BVerfGE 57, p. 250 et 274 et suivantes; du 28 mars 1984, dossier no 2 BvR 275/83, BVerfGE 66, p. 313 et 318; et du 22 septembre 1993, dossier no 2 BvR 1732/32, BVerfGE 89, p. 120 et 129). Il y a d'innombrables exemples d'expressions plus concrètes du principe d'équité dans la jurisprudence. C'est ainsi par exemple que les juridictions pénales allemandes ont, en vertu du principe d'équité dans la procédure, des obligations spécifiques en matière d'information pour permettre à l'accusé d'exercer efficacement son droit de se défendre.

La régularité de la procédure est assurée également au moyen des dispositions légales régissant les enquêtes en matière pénale prévues par le Code de procédure pénale. Le Parlement est lié par le principe d'équité du procès, comme en témoignent de nombreuses dispositions du Code de procédure pénale. Par exemple, l'article 136a du Code dénonce un certain nombre de conditions qui doivent être respectées lors de l'interrogatoire d'un suspect. Les mesures de coercition, tromperies, menaces ou moyens semblables d'influer sur la décision et le libre arbitre du suspect sont par conséquent interdits et les informations ainsi obtenues sont par la suite irrecevables même si l'inculpé consent à ce qu'elles soient produites.

Le principe d'équité lors du procès n'autorise même les informateurs de la police à encourager un suspect à commettre une infraction pénale que dans des limites rigoureuses. Tel est le cas en particulier des enquêtes sur le trafic de drogue, qui ne peuvent souvent aboutir que grâce à l'action d'agents infiltrés. Conformément à la juridiction des juridictions les plus élevées, un agent infiltré ne peut provoquer la commission d'une infraction que dans le but de faire la lumière sur une infraction pénale d'importance considérable lorsque d'autres méthodes d'enquête seraient beaucoup plus difficiles ou auraient beaucoup moins de chances d'aboutir. L'infraction encouragée devrait être proportionnelle à l'infraction dont son auteur est déjà soupçonné. Encourager l'intéressé à commettre une infraction plus grave que celle dont il est soupçonné constituerait une violation du principe d'équité. C'est ainsi par exemple que la Cour fédérale de justice, dans l'application du principe d'équité de la procédure consacrée par la première phrase du paragraphe 1 de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, tel qu'il a été interprété par la Cour européenne des droits de l'homme dans le cas de l'utilisation d'un agent infiltré en violation de la Convention, a considéré qu'une telle violation doit être identifiée dans l'exposé des motifs du jugement et doit être dûment prise en considération pour en déterminer les conséquences juridiques (arrêt du 18 novembre 1999, dossier no 1 StR 221/99, publié dans le recueil officiel BGHSt, 45, p. 321 et suivantes; arrêt du 30 mai 2001, dossier no 1 StR 42/01, publié dans le Neue Juristische Wochenschrift 2001, p. 2981 à 2983).

Dans des cas exceptionnels rigoureusement limités, le Code de procédure pénale autorise la tenue d'une audience en l'absence de l'inculpé, par exemple en application de l'article 231a du Code de procédure pénale, si l'accusé s'est délibérément mis hors d'état de comparaître. Dans ce cas également, le principe d'équité intervient. Dans son arrêt du 22 septembre 1993, la Cour constitutionnelle fédérale a considéré que l'application desdites dispositions ne pouvait pas être étendue à un accusé qui refuse de subir un traitement médical pour guérir une incapacité de comparaître qu'il n'avait pas causée. Elle a considéré qu'une telle interprétation large desdites dispositions allait à l'encontre du droit de l'inculpé à un procès équitable, au moins si le traitement médical n'est pas acceptable (dossier no 2 BvR 1732/93, publié dans le recueil officiel BVerfGE 89, p. 120 à 131).

b) Garantie du droit de l'accusé d'interroger les témoins, paragraphe 3 e) de l'article 14

Aux termes du paragraphe 3 (d) de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui correspond au Pacte sur ce point, dispose que le droit d'interroger les témoins est un aspect particulier du droit à un procès équitable, ce qui a conduit, dans l'affaire ci-après, à modifier la législation allemande sur un point majeur.

Dans l'affaire dont la Cour fédérale de justice était saisie, le juge d'instruction avait, lors de l'enquête, interrogé le témoin à charge, lequel, en sa qualité de fille de l'inculpé, avait le droit de refuser de déposer. L'inculpé, qui n'avait alors pas encore d'avocat, avait été exclu de l'interrogatoire car cela aurait compromis l'enquête. Lors de l'audience, la fille de l'inculpé avait refusé de déposer. Son témoignage avait néanmoins été produit à l'audience par le biais du juge d'instruction, à la suite de quoi l'inculpé a été condamné. Ce dernier a introduit un recours, alléguant une violation des droits que lui reconnaissait le paragraphe 3 (d) de l'article 6 de la Convention européenne.

Dans un premier temps, la Cour fédérale de justice a considéré que le droit de l'accusé d'être présent lorsque le témoin est interrogé pendant l'instruction ne pouvait pas être dérivé de cette disposition. Dans le contexte de l'interprétation des règles de procédure pénale allemandes, cependant, la Convention européenne exigeait apparemment que le principe fondamental garantissant le droit d'interroger les témoins soit également pris en compte à l'étape de l'enquête. Pour cette raison, il faudrait déterminer si, en l'occurrence, un avocat aurait dû être désigné pour l'inculpé (l'avocat ayant en principe le droit d'assister à l'interrogatoire mené par un juge). S'il s'agissait d'interroger le principal témoin à charge, lequel avait déjà été interrogé par le juge d'instruction pour obtenir les éléments de preuve requis mais qui refuserait par la suite de déposer, un avocat devait être désigné pour assister l'inculpé. Autrement, le droit qu'avait l'inculpé d'interroger les témoins n'était pas appliqué et ne pouvait plus être garanti aux étapes ultérieures de la procédure. En pareil cas, la valeur probante du témoignage produit à l'audience par le juge d'instruction serait amoindrie (arrêt du 25 juillet 2000 de la Cour fédérale de justice, dossier no 1 StR 169/00, publié dans le recueil officiel BGHSt 46, p. 93 à 106).

Le droit d'interroger les témoins est également affecté lorsqu'une condamnation pénale est prononcée sur la base d'éléments de preuve indirects ne provenant pas du témoin lui-même. Bien que le droit à un procès équitable entraîne en principe le droit d'avoir accès aux sources directes d'établissement des faits (“materielle Beweisteilhabe”), de tels éléments de preuve indirects ne sont pas à écarter d'emblée. En pareil cas, toutefois, les conditions plus rigoureuses s'appliquent pour évaluer leur force probante (arrêt de la Cour constitutionnelle fédérale du 20 décembre 2000, dossier no 2 BvR 591/00, publié dans le Neue Juristische Wochenschrift 2001, p. 2245 à 2247). Ainsi, la déposition d'un témoin qui produit à l'audience des renseignements provenant d'un informateur n'a généralement pas une valeur probante suffisante pour justifier une condamnation si elle n'est pas confirmée par d'autres déclarations et indices qui sont tout important aux yeux du tribunal. Ce dernier doit toujours être conscient des limites à l'intérieur desquelles il doit se former une conviction, les respecter et en outre les indiquer dans l'exposé des motifs. Il faut faire particulièrement attention si des informateurs de la police ou des services de renseignement ne

peuvent pas être entendus comme témoins parce que l'autorité compétente refuse de relever leur identité ou d'approuver leur déposition. En l'occurrence, c'est par conséquent l'exécutif qui empêche de faire toute la lumière sur les faits et d'évaluer la crédibilité personnelle d'informateurs qui restent anonymes.

c) Droit d'être jugé dans des délais raisonnables, paragraphe 4 (c) de l'article 14

Pendant la période considérée, la Cour constitutionnelle fédérale a également eu l'occasion de se prononcer sur le droit d'être jugé sans retard injustifié consacré en droit interne et fondé sur le droit essentiel à un procès équitable conformément à la loi. Selon la jurisprudence de la Cour constitutionnelle fédérale concernant l'exigence d'une procédure rapide visée à la première phrase du paragraphe 1 de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, toutefois, les retards évitables qui se sont produits dans la procédure doivent également être expressément pris en considération dans le jugement pénal, et il doit y être remédié au moyen d'une réduction de la peine.

Une procédure excessivement longue constitue par conséquent une raison distincte en matière de réduction des peines, indépendamment de la réduction généralement appliquée lorsqu'il s'est écoulé une période considérable entre l'infraction et la condamnation. L'impact de cet état de choses sur la peine devant être prononcée doit être reflété dans le jugement pénal sous forme d'une réduction numérique de la peine (arrêt de la Cour constitutionnelle fédérale du 19 avril 1993, dossier 2 BvR 1487/90, publié dans le Neue Juristische Wochenschrift 1993, p. 3254 à 3256; arrêt du 7 mars 1997, dossier no 2 BvR 2173/96, publié dans le Neue Zeitschrift für Strafrecht 1997, p. 591), de sorte que l'étendue de la réparation accordée du fait de la violation de la Constitution puisse être examinée. Cette règle s'applique également aux retards de procédure intervenus seulement après le prononcé du jugement du tribunal juge du fait. Ces retards doivent également être pris en considération par la cour d'appel saisie de points de droit seulement, sans qu'une requête spéciale soit déposée (arrêt de la Cour fédérale de justice du 21 décembre 1994, dossier no 2 StR 415/94, publié dans le Neue Juristische Wochenschrift 1995, p. 1101 et 1102). Dans des circonstances spéciales, il peut également être mis fin à la procédure, notamment lorsque l'intérêt public représenté par les poursuites pénales a disparu du fait de la durée excessive de la procédure, de la violation du droit à un procès rapide et des conséquences considérables que la procédure a déjà eues sur l'inculpé (arrêt de la Cour fédérale de justice du 26 juin 1996, dossier no 3 StR 199/95, publié dans le Neue Juristische Wochenschrift 1996, p. 2739 et 2740).

Conformément à la procédure pénale allemande, par conséquent, il existe, lorsque la procédure pénale dure très longtemps, trois raisons distinctes à prendre en considération pour réduire la peine :

a) la période de temps considérable qui s'est écoulée entre l'infraction et le jugement,

b) le préjudice causé par la longue durée de la procédure, et

c) la violation du principe selon lequel chacun a le droit d'être jugé dans un délai raisonnable visé à la première phrase du paragraphe 1 de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme.

d) Droit à l'assistance gratuite d'un interprète, paragraphe 3 (f) de l'article 14

Dans un arrêt du 26 octobre 2000, la Cour fédérale de justice (dossier no 3 StR 6/00, publié dans le Neue Juristische Wochenschrift 2001, p. 309 à 312) a défini concrètement la signification et l'étendue du droit à l'assistance gratuite d'un interprète et a souligné le rôle qui incombe à celui-ci en ce qui concerne la garantie d'un procès équitable. Selon ce jugement, l'inculpé, s'il ne parle pas la langue du tribunal, a le droit, quels que soient ses moyens financiers, à l'assistance gratuite d'un interprète à toutes les étapes de la procédure pénale, c'est-à-dire aussi lors des discussions préparatoires avec son avocat. En outre, les discussions entre l'inculpé et son avocat concernant la préparation de la défense ont été considérées comme des déclarations couvertes par les règles de procédure pénale. Le statut de l'inculpé en tant que sujet de la procédure et celui de l'avocat en tant qu'entité indépendante d'administration de la justice ne justifiaient pas d'imposer le coût du service d'un interprète à l'inculpé pour ces discussions.

e) Reprise de la procédure, paragraphe 6 de l'article 14

La Loi du 9 juillet 1998 portant réforme des règles de droit pénal concernant la reprise de la procédure (Gesetz zur Reform des strafrechtlichen Wiederaufnahmerechts) a introduit un nouveau motif de reprise de l'action. Ainsi, une procédure pénale ayant fait l'objet d'une décision ayant force de chose jugée doit être reprise si la Cour européenne des droits de l'homme a constaté l'existence d'une violation de la Convention européenne ou de ses protocoles et si le jugement a été fondé sur cette violation. S'il n'a pas déjà été remédié à la violation de la Convention européenne en appel et si seule la Cour européenne l'a identifiée, la procédure pénale en Allemagne peut désormais être reprise sur cette base.

Article 15

Principe nulla poena

Les problèmes liés à la non rétroactivité des lois qui se sont posés lors des enquêtes menées au sujet des crimes d'État de la RDA et en particulier des tires dirigés contre les personnes cherchant à fuir le pays à la frontière intra-allemande et au Mur de Berlin ont été exposés dans le quatrième rapport périodique (CCPR/C/84/Add.5, paragraphes 83 à 87). Pendant la période considérée, les juridictions fédérales les plus élevées ont eu à connaître de ce problème. La Cour européenne des droits de l'homme s'est également prononcée à ce sujet.

De hautes personnalités de la République démocratique allemande, à savoir Fritz Streletz (Vice ‑Ministre de la défense), Heinz Kessler (Ministre de la défense) et Egon Krenz (Chef du Conseil d'État), ont maintenant été jugées coupables. Le Tribunal de la région de Berlin a également convoqué les trois inculpés pour le triple assassinat commis avec jonction des infractions et Krenz pour un autre assassinat encore. L'objet de la condamnation était l'assassinat de quatre personnes qui, non armées et sans mettre quiconque en danger, avaient cherché, entre 1984 et 1989, à franchir la frontière intra-allemande pour fuir la RDA. Ces condamnations ont été confirmées par la Cour fédérale de justice et par la Cour constitutionnelle fédérale comme étant constitutionnelles.

La Chambre plénière de la Cour européenne des droits de l'homme a, dans deux arrêts rendus le 22 mars 2001, considéré que l'Allemagne n'avait pas contrevenu au paragraphe 1 de l'article 7 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'hommes en condamnant de hauts fonctionnaires de la RDA (et, dans un autre arrêt, un garde-frontière de la RDA) pour homicide commis à la frontière entre les deux États allemands. En particulier, les requérants avaient allégué devant la Cour de Strasbourg que les actes en question n'étaient pas répréhensibles au regard de la loi de la RDA ni du droit international au moment où ils avaient été commis et que leur condamnation par les tribunaux allemands allait par conséquent à l'encontre du principe de non rétroactivité des lois spécifié au paragraphe 1 de l'article 7 de la Convention européenne. Les requérants avaient également invoqué l'article premier et le paragraphe 2 de l'article 2 de la Convention. Les juges de Strasbourg ont expressément rejeté cet avis. Le régime de la RDA avait manifestement violé le droit à la vie et à la liberté de déplacement de ses citoyens, ce qui était également contraire à la législation de la RDA en vigueur à l'époque, comme les tribunaux allemands l'avaient à juste titre souligné. De l'avis de la Cour, il est également légitime pour un État fondé sur la primauté du droit d'entamer des poursuites pénales contre des personnes reconnues coupables de crimes majeurs sous un régime précédent. En outre, il n'était pas possible d'attaquer les décisions rendues par les tribunaux de l'État successeur démocratique sur la base d'une interprétation et d'une application des dispositions légales en vigueur au moment de l'infraction à la lumière des principes généraux du droit.

La Cour a considéré que le fondement juridique de la condamnation était le droit pénal de la République démocratique allemande en vigueur à la date à laquelle les infractions avaient été commises. Même compte tenu du fait que la RDA avait pour politique de protéger la frontière entre les deux États allemands "à tout prix" pour garantir l'existence de la RDA, ce raisonnement aurait dû être limité par la Constitution et par les principes consacrés dans les dispositions légales en vigueur dans le pays. Comme la protection de la vie humaine était un principe consacré dans la Constitution, dans la Loi sur la police populaire (Volkspolizeigesetz) et dans la Loi sur les frontières (Grenzgesetz) de la République démocratique allemande, les requérants ne pouvaient pas invoquer une pratique des autorités de la RDA contraire à ces principes, d'autant que le droit à la vie était déjà un intérêt juridique suprême dans l'échelle des valeurs reflétées au plan international au moment de la commission des infractions. La Cour a souligné que l'article 7 de la Convention ne pouvait pas être invoqué pour justifier la pratique suivie par la RDA en ce qui concerne le régime

frontalier qui était une violation flagrante des droits fondamentaux et par dessus tout du droit à la vie. Une pratique contraire à la législation même du pays, qui devait en fait en constituer le fondement, ne pouvait pas être considérée comme faisant partie du "droit" au sens de l'article 7 de la Convention.

Article 16

Reconnaissance de la personne au regard de la loi

Il y a lieu, à ce propos, de se référer aux informations fournies dans les premier et quatrième rapports périodiques sous la rubrique de l'article 16 (CCPR/C/1/Add. 18 et CCPR/C/84/Add. 5, paragraphe 88). Aucun fait nouveau n'est à signaler à ce sujet. Pour ce qui est des questions concernant la garde et la tutelle, il y a lieu de se référer aux paragraphes 143 à 149 ci-dessus.

Article 17

Protection de la vie privée

Modification de l'article 13 de la Loi fondamentale et de l'article 100c

du Code de procédure pénale

La Loi du 26 mars 1998 portant modification de la Loi fondamentale (Journal officiel fédéral, Partie I, p. 610) a amendé l'article 13 de cette loi (droit fondamental à l'inviolabilité du domicile) dans le but de faciliter l'écoute des logements à des fins de répression et de conférer à cette pratique le statut de disposition constitutionnelle. Cette modification s'est avérée nécessaire pour combattre efficacement la criminalité organisée, qui constitue une menace de plus en plus sérieuse pour les citoyens et l'État de la République fédérale d'Allemagne.

Conscient de la signification particulière de l'inviolabilité du domicile, le Parlement a imposé des restrictions considérables et des conditions rigoureuses à l'écoute des logements. Ainsi, cette mesure doit être autorisée par un juge et, en principe, par un groupe de juges, ces autorisations n'ont qu'une durée limitée, cette mesure ne peut être appliquée que pour la poursuite d'infractions pénales particulièrement graves et l'autorisation de telles pratiques doit être notifiée pour pouvoir être contrôlée par le Parlement. En outre, la surveillance des logements – déjà autorisée aux termes des dispositions constitutionnelles antérieures – a été soumise à des restrictions constitutionnelles supplémentaires.

Pour l'essentiel, le régime légal applicable à l'écoute des logements, tel qu'ajouté au Code de procédure pénale en 1998, est le suivant : la surveillance au moyen de procédés techniques des propos tenus dans un logement et non en public ne peut être autorisée que s'il existe des indices d'une des infractions pénales énumérées dans une liste limitative (troisième alinéa du paragraphe 1 de l'article 100c du Code de procédure pénale). Cette mesure n'est autorisée que si l'enquête tendant à établir les faits ou rechercher le délinquant par d'autres moyens serait beaucoup plus difficile ou n'aurait guère de perspective d'aboutir. S'il y a lieu de surveiller un logement autre que celui de l'inculpé, l'écoute n'est autorisée que s'il y a lieu de penser, sur la base de faits spécifiques, que l'inculpé s'y trouve, qu'une enquête au domicile de l'inculpé ne permettrait pas d'établir les faits ou de déterminer où que se trouve l'intéressé et si une autre forme d'enquête serait plus difficile ou n'aurait guère de perspective d'aboutir.

En postulant que les autres formes d’enquête doivent être excessivement difficiles ou n’avoir aucune chance d’aboutir, le Parlement a entendu souligner le caractère rigoureusement subsidiaire de cette mesure. Il y a en outre d’autres mesures de sauvegarde. En principe, l'autorité habilitée à autoriser l'écoute d'un logement est la chambre dite "de protection de l'État" du tribunal régional, composée de trois juges professionnels. Lorsque les circonstances l'exigent, cette autorisation peut également être accordée par la président de cette chambre. Cependant, elle ne peut en aucun cas l'être par le Parquet ou par la police. En tout état de cause, cette mesure ne peut pas être autorisée si elle conduirait par la suite à enfreindre un droit spécifique de refuser de témoigner pour des raisons professionnelles. C'est ainsi par exemple que l'écoute de conversations entre l'accusé et son avocat ne peut être autorisée. Comme dans le cas des autres mesures, les personnes intéressées doivent être informées de l'application desdites mesures une fois que celles-ci ont atteint leur but.

Le Parquet est soumis, en cas d'écoute d'un logement, à de rigoureuses obligations de faire rapport au Ministère de la justice du Land (paragraphe 1 de l'article 100e du Code de procédure pénale). Le Gouvernement fédéral, quant à lui, est tenu par la loi d'informer le Parlement fédéral, sur la base des renseignements communiqués chaque année par les Länder , des mesures d'écoute appliquées (paragraphe 2 de la même disposition). Cette mesure, dont l'application est délicate au regard des droits fondamentaux, est par conséquent soumise au contrôle du Parlement.

Le Gouvernement fédéral a présenté le dernier rapport à ce sujet, qui porte sur l'année 2001, pendant l'été 2002 mais ledit rapport n'a pas encore été publié. Le rapport précédent, pour l'année 2000, a été publié comme document du Parlement fédéral (document du Parlement fédéral no 14/6778). L'on peut trouver dans ce rapport des informations plus détaillées sur les circonstances, la portée, la durée, les résultats et les coûts des mesures d'écoute appliquées. En outre, le 30 janvier 2002, le Gouvernement fédéral a présenté un rapport détaillé sur l'expérience tirée des opérations d'écoute des logements au moyen de procédés techniques (paragraphes 3 à 5 de l'article 13 de la Loi fondamentale et articles 100c à 100f du Code de procédure pénale), lequel contient également une évaluation des conséquences juridiques des mesures appliquées entre 1998 et 2000 ainsi qu'une évaluation de ces mesures au regard de l'ordre constitutionnel et de la politique pénale du pays. Ce rapport permet au Parlement d'évaluer les conséquences des lois promulguées et ainsi de mieux contrôler les mesures qui peuvent porter atteinte aux droits fondamentaux (document du Parlement fédéral no 14/8155).

2. Nouvelle jurisprudence relative à la procédure pénale

Les droits garantis par l'article 17 du Pacte sont également pris en considération dans les arrêts relatifs à la procédure pénale. Le Code de procédure pénale garantit qu'aucune personne affectée par une enquête pénale ne peut voir ses droits fondamentaux faire l'objet d'une atteinte arbitraire. Indépendamment des éléments de la qualification écrite d'une infraction pouvant donner lieu à une enquête, le principe de proportionnalité doit être respecté pour que celle-ci soit licite. Ce principe, qui est dérivé de la règle de primauté du droit prévue au paragraphe 3 de l'article 20 de la Loi fondamentale et des libertés garanties par les droits fondamentaux, exige que toute mesure soit appropriée et requise pour parvenir au but recherché, compte tenu de toutes les circonstances personnelles et factuelles de l'espèce, et qu'une telle mesure n'est pas autorisée si un autre moyen moins intrusif suffirait. En outre, l'atteinte aux droits fondamentaux représentée par la mesure dont il s'agit ne peut pas être disproportionnée eu égard à l'importance de l'affaire ou à la solidité des soupçons existants.

Dans une ordonnance du 27 mai 1997 (dossier no 2 BvR 1992/92, publié dans le recueil officiel BVerfGE 96, p. 44 et suivantes), la Cour constitutionnelle fédérale a considéré par exemple qu'un juge ne peut ordonner une perquisition domiciliaire que s'il a acquis la conviction, à la suite d'un examen mené sous sa propre responsabilité, qu'une telle mesure est proportionnelle. L'ordonnance du juge doit justifier le fondement de la mesure autorisée et définir le contexte, les limites et l'objectif de la perquisition. Comme cela ne pourrait plus être présumé six mois après le prononcé de l'ordonnance, celle-ci ne pourrait plus justifier la perquisition.

Un autre exemple de la jurisprudence uniforme de la Cour constitutionnelle fédérale dans ce domaine est son arrêt du 30 avril 1997 (dossier no 2 BvR 817/90, 728/92. 802 et 1065/95, publiés dans le recueil officiel BVerfGE, Vol. 96, p. 27 et suivantes). Dans cette affaire, la Cour a déclaré qu'un recours contre une ordonnance judiciaire de perquisition ne peut pas être rejeté comme irrecevable simplement parce qu'il s'agit d'un fait accompli et que l'application de cette mesure est par conséquent terminée.

Dans son arrêt du 20 février 2001 (dossier no 2 BvR 1444/00, publié dans le recueil officiel BVerfGE 103, p. 142), la Cour constitutionnelle fédérale a eu à connaître d'un recours en inconstitutionnalité contre les décisions par lesquelles les tribunaux locaux et régionaux avaient confirmé la régularité d'une perquisition et a renvoyé l'affaire au tribunal local pour réexamen de l'affaire. La perquisition, étant urgente, n'avait pas été ordonnée par un juge. La Cour constitutionnelle fédérale, en revanche, a souligné qu'un mandat de perquisition, conformément au concept reflété au paragraphe 2 de l'article 13 de la Loi fondamentale, devait en principe être émis par un juge et que la possibilité pour le Parquet ou la police d'établir un mandat de perquisition lorsqu'un retard risque de compromettre l'enquête dans des circonstances exceptionnelles était soumise à des conditions préalables rigoureuses. Simultanément, elle a souligné la nécessité de prendre les précautions de fait et de droit nécessaires pour garantir la compétence judiciaire prévue par la Constitution en règle générale (par exemple dans le contexte d'un service d'urgence, de nuit ou pendant une fin de semaine) et a souligné que les tribunaux avaient un pouvoir d'appréciation illimité s'agissant d'interpréter l'expression "lorsqu'un retard risque de compromettre l'enquête) ("dans des circonstances exceptionnelles").

3. Protection des données

a) Nouvelle Loi fédérale de 2001 sur la protection des données (Bundesdatenschutzgesetz)

Des informations concernant la Loi fédérale du 20 décembre 1990 sur la protection des données ont déjà été fournies dans le quatrième rapport périodique (CCPR/C/84/Add. 5, paragraphes 94 à 97). La nouvelle Loi fédérale du 18 mai 2001, qui est entrée en vigueur le 23 mai de la même année (Journal officiel fédéral, Partie I, p. 904), a essentiellement pour objet de mettre en oeuvre la directive du Parlement et du Conseil CE/95/46 du 24 octobre 1995 relative à la protection des données personnelles et au libre mouvement de ces données (Journal officiel de la Communauté européenne, no L 281, p. 31).

La loi contient d'autres éléments de modernisation. Par exemple, le principe de la confidentialité et d'économie dans l'utilisation des données a été reflété à l'article 3a de la loi, tandis que son article 9a contient une disposition prévoyant des audits des systèmes de protection des données. Ainsi, les fournisseurs de systèmes et de programmes de traitement des données ainsi que les organismes de traitement des données doivent faire vérifier et évaluer leur régime et leurs moyens techniques de protection des données par des experts indépendants agréés et peuvent publier les résultats de cette évaluation. Une autre loi doit réglementer plus en détail les contrôles et les évaluations, les procédures ainsi que la sélection et l'agrément des experts. D'autres éléments de modernisation sont les dispositions concernant la surveillance vidéo et le traitement des données sur puces. Dans un deuxième temps, le Gouvernement fédéral a l'intention de publier une version totalement révisée de Loi sur la protection des données.

b) Transfert de données à des États tiers

Indépendamment de la transmission de données au sein de l'Union européenne, la transmission de données vers des États tiers joue un rôle toujours croissant. Juridiquement, le transfert de données personnelles des pays tiers est régi par le Chapitre IV de la Directive CE sur la protection des données, qui a été reflété aux articles 4b et 4c de la Loi fédérale sur la protection des données. Aux termes de l'article 25 de la directive et des paragraphes 2 et 3 de l'article 4b de la Loi fédérale, le transfert de données personnelles à des pays tiers n'est autorisé que si ces derniers assurent une protection adéquate des données.

En outre, le Gouvernement fédéral s'emploie activement à rédiger et à élaborer des systèmes de protection des données applicables au plan international. Par exemple, il a été possible, après de longues controverses, de s'entendre sur des dispositions régissant le transfert de données personnelles aux États ‑Unis d'Amérique par les États Membres de l'UE. Le Parlement européen a approuvé en juillet 2000 le résultat des négociations menées par la Commission européenne avec la participation des États Membres, les "principes de la sphère de sécurité". Selon cet arrangement, le Ministère du commerce des États-Unis doit tenir une liste des entreprises américaines s'étant publiquement engagées à respecter ces principes pour pouvoir bénéficier des avantages du système (voir web.ita.doc.gou/safeharbor/SHList.hsf/WebPages/Safe+Harbor+List). Cette liste comporte actuellement près de 200 entreprises. Les entreprises qui adhèrent au système de la ¨sphère de sécurité" aux États-Unis savent que leurs échanges de données ne feront l'objet d'aucune restriction, tandis que les entreprises européennes, de leur côté, sont informées, dans l'intérêt des citoyens de l'Union, des entreprises américaines auxquelles des données peuvent être transférées sans exiger de garanties supplémentaires.

Article 18

Droit à la liberté de conscience et de religion

Jurisprudence uniforme relative au droit à la liberté de conscience

et de religion

La liberté de religion, de conscience et de confession est garantie par l'article 4 de la Loi fondamentale. Pendant la période considérée, la Cour constitutionnelle fédérale a rendu deux importants arrêts à ce sujet.

Dans son arrêt du 19 décembre 2000, la Cour constitutionnelle fédérale a statué sur une action en inconstitutionnalité introduite par les Témoins de Jéhovah pour attaquer la décision par laquelle le Tribunal administratif fédéral avait refusé de leur accorder le statut de société de droit public. Dans cet arrêt, ayant reconnu la concevabilité et le bien-fondé de cette action, la Cour constitutionnelle a renvoyé l'affaire à la juridiction de première instance pour qu'elle prononce un nouveau jugement et, ce faisant, a défini les principes selon lesquels les communautés religieuses peuvent être admises au statut de sociétés de droit public (dossier no 2 BvR 1500/97, publié dans le recueil officiel BVerfGE, 102, p. 370 à 400).

Le statut de société de droit public accordé aux communautés religieuses conformément à l'article 140 de la Loi fondamentale et à la deuxième phrase du paragraphe 5 de l'article 137 de la Constitution de Weimar (Weimarer Reichsverfassung) est un moyen de renforcer la liberté de religion. Aux termes desdites dispositions, une communauté religieuse peut, à sa demande, obtenir les droits découlant du statut de société de droit public s'il apparaît, au vu de ses structures et du nombre de ses membres, que sa pérennité est probable. Le statut de société donne aux communautés religieuses des pouvoirs souverains spécifiques. Ces pouvoirs, et d'autres avantages aussi, leur permettent de structurer leurs organisations et leur travail conformément aux principes religieux auxquels elles sont attachées et d'obtenir les ressources nécessaires à cette fin, par exemple en mobilisant des fonds.

Conformément à la jurisprudence établie, toute communauté religieuse qui demande à bénéficier du statut de société de droit public doit s'engager à respecter la législation en vigueur et en particulier à n'exercer les pouvoirs souverains qui lui sont confiés que conformément à ses obligations constitutionnelles et à ses autres obligations légales. Conformément à cet arrêt de la Cour constitutionnelle fédérale, cependant, aucune loyauté envers l'État ne peut être exigée si ce n'est dans la mesure exigée par la législation existante. La jurisprudence considère que cela découle du fait que le requérant, qui visait à constituer une association pour exercer et promouvoir une confession religieuse et proclamer la foi de ses membres, bénéficiait du droit fondamental à la liberté de religion conformément aux paragraphes 1 et 2 de l'article 4 de la Loi fondamentale. La décision sur le point de savoir si une communauté religieuse devait ou non bénéficier du statut de société de droit public devait être fondée non pas sur les convictions de cette communauté mais sur son comportement. Le principe de neutralité religieuse et philosophique interdisait à l'État d'évaluer les convictions et les enseignements d'une communauté religieuse en tant que tels (loc. cit., p. 394).

Dans un arrêt du 16 mai 1995, la Cour constitutionnelle fédérale a déclaré inconstitutionnelle une disposition du Règlement scolaire de Bavière (bayerische Schulordnung) stipulant qu'un crucifix devait être fixé au mur dans chaque salle de classe (dossier no 1 BvR 1087/91, publié dans le recueil officiel BVerfGE 93, p. 1 et suivantes). La Cour a déclaré que le fait d'apposer un crucifix dans les salles de classe d'une école publique obligatoire qui n'est pas une école confessionnelle est contraire au paragraphe 1 de l'article 4 de la Loi fondamentale, lequel laissait à l'individu le soin de décider des symboles religieux qu'il entendait reconnaître et révérer ou au contraire rejeter. L'État ne peut pas créer une situation telle que l'individu ne puisse pas éviter d'être soumis à l'influence d'une confession spécifique, des actes par lesquels celle-ci manifeste et des symboles au moyen desquels elle se représente. La liberté de religion garantie au paragraphe 1 de l'article 4 de la Loi fondamentale avait pour corollaire le principe de neutralité de l'État à l'égard des différentes religions et confessions (loc. cit., p. 15 et suivantes).

Enfin, le paragraphe 3 de l'article 4 de la Loi fondamentale garantit le droit de refuser de fournir un service militaire pour des raisons de conscience. Cette disposition a été décrite dans le quatrième rapport périodique (CCPR/C/84/Add.5; paragraphe 106 f).

2. Formation continue des magistrats

Dans ses observations finales concernant le quatrième rapport périodique, le Comité des droits de l'homme a exprimé la crainte qu'en République fédérale d'Allemagne, les juges ne soient influencés par l'État dans leur attitude à l'égard de groupes religieux spécifiques (CCPR/C/79/Add.73, paragraphe 16 : "Le Comité recommande à l'État partie de mettre un terme aux séances de 'sensibilisation' des juges contre les pratiques de certaines sectes particulières.").

La formation juridique a pour but de dispenser les connaissances scientifiques nécessaires pour pratiquer la profession de magistrat, et une éducation continue est indispensable si l'on veut que les magistrats puissent s'acquitter comme il convient de leurs fonctions. La nature de cette formation est une question qui relève des magistrats eux-mêmes. En République fédérale d'Allemagne, les magistrats n'ont pas l'obligation de suivre des programmes spécifiques de recyclage ou de formation continue.

L'Académie judiciaire allemande offre une grande diversité de programmes de formation continue aux magistrats de toutes les juridictions ainsi qu'aux membres du Ministère public. L' Académie est financée conjointement par la Fédération et par les Länder . Indépendamment des programmes consacrés à des branches particulières du droit, l'Académie organise également des programmes comportementaux ou interdisciplinaires visant à faciliter le travail de tous les jours, des conférences consacrées, dans une perspective historique, aux tendances actuelles de la société ou

des programmes de perfectionnement des compétences sociales. Ainsi, il est organisé une fois par an une conférence sur ce qu'il est convenu d'appeler les sectes et autres manifestations du psychomarché et des pratiques ésotériques, avec toutes leurs incidences psychologiques, sociologiques et juridiques.

Les participants aux différentes conférences, qui y assistent sur la base de demandes individuelles et volontaires, sont sélectionnés par leurs employeurs et la participation à toutes les activités est volontaire. Dans le cas des magistrats, cette conférence n'est qu'une possibilité parmi bien d'autres de se renseigner sur les caractéristiques, circonstances et conséquences de telle ou telle tendance sociale. Cette conférence est une instance de discussion et non un cours de formation systématique ni d'ailleurs un "programme de sensibilisation".

En République fédérale d'Allemagne, les juges sont indépendants. La conséquence de cette indépendance est que les juges sont les seuls à décider d'accepter ou de rejeter, avec l'interprétation qu'ils entendent leur donner, les observations faites par des experts ou spécialistes lors de telles conférences. L'État ne peut pas prescrire une interprétation spécifique à un juge. L'on ne peut donc pas dire que la République fédérale d'Allemagne donne un portrait spécifique de groupe déterminé.

Article 19

Liberté d'expression

Le paragraphe 1 de l'article 5 de la Loi fondamentale garantit une protection totale de la liberté d'expression, qu'elle englobe la liberté d'opinion ainsi que la liberté de la presse, de la radio et du cinéma. Conformément à la jurisprudence uniforme de la Cour constitutionnelle fédérale, la liberté d'exprimer des opinions et l'un des "droits de l'homme les plus élevés" de tous, dans la mesure où elle facilite une discussion intellectuelle constante et constitue par conséquent un élément indissociable d'une communauté démocratique (ce principe a été reconnu dès l'arrêt du 25 janvier 1958, dossier no 1 BvR 400/51, publié dans le recueil officiel BVerfGE 7, p. 198 et 208). La liberté de la presse et de la radio est essentielle à leur rôle, qui est de diffuser des informations complètes reflétant toute la gamme des opinions existantes et de se faire et d'affirmer une opinion elles-mêmes. La presse et la radio constituent par conséquent un élément d'importance majeure dans un État libre et un aspect indispensable à la démocratie moderne (voir l'arrêt rendu par la Cour constitutionnelle fédérale le 6 novembre 1979, dossier no 1 BvR 81/76, publié dans le recueil officiel BVerfGE 52, p. 283 et 296). Étant donné l'importance toute particulière que relevait la liberté d'expression, la Cour constitutionnelle fédérale a fréquemment été confrontée, pendant la période considérée, à la tâche difficile consistant à déterminer les limites que les droits autrui peuvent imposer à cette liberté. L'on peut en particulier citer deux arrêts.

Dans un arrêt rendu par la première Chambre du premier Sénat le 25 novembre 1999 (dossier no 1 BvR 755/98 et al., publié dans le Neue Juristische Wochenschrift 2000, p. 1859), la Cour constitutionnelle fédérale a accueilli le recours en inconstitutionnalité formé par la station de télévision SAT 1 contre l'interdiction qui lui avait été faite par un tribunal de diffuser un film sur les "soldats assassins de Lebach" comme suite à une demande présentée par l'un des délinquants. La raison donnée était que la liberté de programmation était au coeur de la liberté de diffusion et qu'interdire la diffusion d'un programme spécifique affectait par conséquent l'aspect fondamental de la liberté de diffusion. L'empiètement ne pouvait pas être justifié en soi par un souci de protéger le droit à la vie privée du délinquant, qui englobait le droit de réinsertion dans la société après avoir purgé sa peine. Les programmes projetés par une station de télévision assez longtemps après la commission d'une infraction sans avoir l'intention d'identifier le délinquant ne donnaient pas à ce dernier le droit de ne jamais être mis en face de son crime en public. La Cour constitutionnelle fédérale a ainsi apporté d'autres précisions à son arrêt de 1973 concernant la même affaire, par lequel elle avait empêché la diffusion d'un documentaire télévisé sur les "soldats assassins de Lebach" en invoquant le droit du requérant lors d'être réinséré dans la société, privilégiant maintenant la liberté de diffusion (dossier no 1 BvR 536/72, publié dans le recueil officiel BVerfGE 35, p. 202 à 245).

Dans son arrêt du 23 février 2000 (dossier no 1 BvR 1582/94, publié dans l'Europäische Gundrechtezeitschrift 2000, p. 242), la première Chambre du premier Sénat de la Cour constitutionnelle fédérale a refusé de connaître d'un recours en inconstitutionnalité présenté par l'association “Neues Forum” contre l'interdiction qui lui avait été faite par le tribunal de divulguer publiquement une liste du personnel non officiel (“Inoffizieller Mitarbeiter”) du Ministère de la sécurité de l'État (Ministerium für Staatssicherheit) de la République démocratique allemande, mais a fait observer néanmoins qu'en appel, le tribunal n'avait pas attaché assez de poids à l'intérêt que la publication de cette liste présentait pour le requérant et avait ainsi sous-estimé sa position au regard des droits fondamentaux. En particulier, et par opposition au droit à la vie privée d'une personne qui y était nommément désignée, le tribunal n'avait pas pris suffisamment en considération le fait que la publication de cette liste concernait une question affectant directement le public. Dans son arrêt, la Cour a réaffirmé sa jurisprudence antérieure, déclarant que l'importance de la liberté d'expression augmente, en comparaison des intérêts juridiques de tierces parties, lorsque l'expression d'une opinion concerne une question revêtant une signification considérable pour le public dans son ensemble.

La liberté de l'information visée au paragraphe 2 de l'article 19 du Pacte est garantie sur l'ensemble du territoire national par la deuxième moitié de la première phrase du paragraphe 1 de l'article 5 de la Loi fondamentale, et complète la liberté d'expression pour le destinataire de l'information. Le processus de communication est donc intégralement protégé dans l'intérêt d'une opinion publique librement et individuellement formée.

Pendant la période considérée, la Cour a également eu à se prononcer sur le droit à l'information des étrangers vivant en Allemagne. Dans son arrêt du 9 février 1994 (dossier no 1 BvR 1687/92, publié dans le recueil officiel BVerfGE 90, p. 27), la Cour constitutionnelle fédérale a confirmé sa jurisprudence antérieure concernant l'installation d'antennes paraboliques sur des biens loués. Elle a expressément étendu la protection de la liberté de l'information aux sources d'information étrangères et à l'acquisition et à l'utilisation du matériel technique nécessaire pour les recevoir. En outre, elle a fait observer qu'il faut tenir compte comme il convient, pour peser les intérêts des locataires et des bailleurs, même si ceux-ci fournissent une connexion par câble, des besoins d'information des étrangers qui ont leur résidence permanente en Allemagne. Étant donné le petit nombre de chaînes étrangères retransmises par le réseau câblé allemand, il n'était possible d'obtenir des informations suffisantes qu'en captant les émissions transmises par satellite.

Article 20

Interdiction de l'incitation et de la propagande de guerre

La transposition dans le Code pénal allemand de l'article 20 du Pacte a été évoquée dans les rapports périodiques précédents. Toute une série d'initiatives ont été prises pour lutter contre le racisme et la xénophobie au sens du paragraphe 2 de l'article 20 du Pacte.

Dans le contexte de l'action commune adoptée par le Conseil de l'Union européenne concernant l'action contre le racisme et la xénophobie (Journal officiel no L 185/5), la République fédérale d'Allemagne s'est employée à renforcer l'efficacité de l'entraide judiciaire concernant les infractions pénales moins graves relevant des types de comportements indiqués ci-dessous. En outre, si cela est nécessaire aux fins de la coopération, soit ce type de comportements doivent devenir passibles de sanction, soit il doit être dérogé au principe de double incrimination jusqu'à ce que les dispositions requises soient acceptées. Les comportements en question sont les suivants :

incitation publique à la discrimination, à la violence ou à la haine raciale,

défense publique, à des fins racistes ou xénophobes, de crimes contre l'humanité et de violations des droits de l'homme,

puni public des crimes définis à l'article 6 de la Charte du Tribunal militaire international jointe en annexe à l'Accord de Londres du 8 août 1945 s'agissant de comportements méprisants ou dégradants pour un groupe de personnes défini par des considérations de couleur, de race, de religion ou d'origine nationale ou ethnique,

diffusion ou distribution publique de tractes, affiches et autres matériaux contentant des expressions de racisme et de xénophobie, et

participation aux activités de groupes, organisations ou associations encourageant la discrimination, la violence ou la haine raciale, ethnique ou religieuse.

Les types de comportements susmentionnés sont passibles de sanctions en République fédérale d'Allemagne, et tel est notamment le cas de l'incitation publique conformément à l'article 130 du Code pénal, de la diffusion de moyens de propagande d'organisations inconstitutionnelles conformément à l'article 86 du Code pénal, de la diffusion de symboles d'organisations inconstitutionnelles conformément à l'article 86a du Code pénal et de la dénigration de confessions, de communautés religieuses et d'associations philosophiques conformément à l'article 166 du Code pénal.

Dans la déclaration publiée à l'issue du soixante-dix-septième Sommet franco-allemand, le 12 juin 2001, la République fédérale d'Allemagne et la France se sont également prononcées en faveur de l'inclusion de la prévention des infractions pénales commises par les groupes extrémistes de droite et groupes xénophobes dans le mandat du Réseau européen de prévention de la criminalité adopté par le Conseil de l'Union européenne (Justice et intérieur) en mars 2001.

L'incitation publique, qui est réprimée par l'article 130 du Code pénal, est une infraction commise de plus en plus souvent à l'aide d'internet. Le Gouvernement fédéral s'emploie donc activement à réprimer l'extrémisme de droite sur internet, et en particulier l'incitation à la haine raciale et à la xénophobie. Lorsqu'une page d'accueil, par exemple, contient des expressions ou des symboles d'organisations inconstitutionnelles incitant à la haine et à la violence, ce fait est répréhensible en application des articles 86, 86a et 130 du Code pénal. En pareil cas, le Parquet ouvre une enquête. Pour faciliter le travail des autorités responsables des poursuites pénales et des organismes responsables de la protection des droits garantis par la Constitution, il a été mis au point un outil de recherche sur internet appelé “INTERMIT” qui permettra de retrouver automatiquement ce type de sites. En outre, les autorités responsables de la sécurité publique se sont mises en rapport avec les prestataires de services internet et services en ligne pour les amener à interdire la publication de manifestations extrémistes de droite sur internet. En outre, elles collaborent étroitement avec les organisations non gouvernementales et appuient les efforts que celles-ci déploient pour influencer les exploitants et éditeurs de sites extrémistes de droite sur internet afin d'éliminer de la Toile tous les slogans qui incitent à la haine.

En ce qui concerne les activités des groupes extrémistes de droite sur internet, une source particulière de difficulté est la tendance à afficher des pages par l'entremise de serveurs étrangers, surtout américains. Dans ce contexte, le Ministère fédéral de la justice, conjointement avec le Centre Simon Wiesenthal de Los Angeles et la Fondation Friedrich Ebert, a organisé une conférence internationale intitulée "Propagation de la haine sur internet" qui s'est tenue à Berlin les 26 et 27 juin 2000. La "Déclaration de Berlin" adoptée à l'issue de cette conférence tend à appeler l'attention sur ce problème de sorte que les milieux politiques, l'industrie et la société civile forment une alliance mondiale pour réprimer la propagation sur internet de la haine à l'égard des minorités. Il faut faire en sorte qu'à l'avenir, internet puisse apporter une contribution à la coexistence pacifique entre les peuples en tant que moyen de libre discussion entre toutes les cultures. Le but de ces efforts est de créer un consensus mondial de valeurs afin de pouvoir s'entendre au plan international sur au moins une liste minimum de dispositions pénales pour déterminer quels sont les actes répréhensibles et quels sont les abus de la liberté d'expression qui ne sont pas tolérables et qui doivent faire l'objet de poursuites conformément au droit pénal.

La Convention sur la cybercriminalité a été ouverte à la signature au Conseil de l'Europe le 23 novembre 2001 et signée par 30 États, dont l'Allemagne (Conventions du Conseil de l'Europe, ETS no 185). Le 25 avril 2002, un comité d'experts du Conseil de l'Europe a achevé son examen d'un premier Protocole facultatif à cette Convention qui a pour but de réprimer l'incitation à la haine raciale et la xénophobie sur internet et au moyen d'internet. Le Protocole facultatif doit être soumis à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe à l'automne 2002.

Dans un arrêt du 12 décembre 2000, la Cour fédérale de justice a déclaré qu'un fait tombant sous le coup du paragraphe 1 ou du paragraphe 3 de l'article 130 du Code pénal (répression pénale du fait de nier l'existence de l'holocauste) se produit en République fédérale d'Allemagne et donne par conséquent lieu à des poursuites par les autorités allemandes dès lors qu'un étranger affiche sur internet des observations de son crû au moyen d'un serveur étranger auquel ont accès les internautes allemands si les propos en question risquent particulièrement de perturber la tranquillité publique en Allemagne. Il y a risque de perturbation de la tranquillité publique si le délinquant crée un danger qui peut sérieusement perturber la coexistence pacifique entre les divers groupes de la population et ébranler le sentiment de sécurité de ceux groupes et leur confiance dans la stabilité du droit. En République fédérale d'Allemagne, ce risque est établi dès lors que tout internaute peut sans difficulté avoir accès en Allemagne à de telles publications, surtout si elles appartiennent au groupe visé. Cela peut découler, entre autres, d'un contenu consacré presque exclusivement à l'Allemagne (dossier no 1 StR 184/00, publié dans le recueil officiel BGHSt 46, p. 212 à 225, en particulier p. 219 et suivantes). En pareille situation, donc, la juridiction pénale allemande s'applique si quelqu'un diffuse de telles publications au moyen d'un serveur étranger.

Pour la Loi des finances de 2001 (Haushaltsgesetz), le Parlement fédéral allemand a approuvé l'ouverture de 10 millions de DM de crédit au bénéfice des victimes d'attaques de groupes extrémistes de droite. Cette indemnisation, qui est accordée ex gratia et qui ne constitue pas un droit acquis, entend être une manifestation de solidarité de l'État et des citoyens avec les victimes. Simultanément, il s'agit d'un clair désaveu de telles attaques. Les attaques des groupes extrémistes de droite sont des infractions pénales commises pour des motifs xénophobes ou antisémites. À la fin de 2001, il avait été versé pour 2,64 millions de DM d'indemnités, le montant de chacune variant entre 500 et 500 000 DM. Des crédits de 2,5 millions d'euros ont été ouverts pour 2002. (Des informations plus détaillées sur la répression des activités des groupes extrémistes de droite et des groupes xénophobes figurent dans les commentaires relatifs à l'article 26, paragraphes 326 et suivants).

Article 21

Liberté de réunion

La liberté de réunion est garantie en Allemagne par le paragraphe 1 de l'article 8 de la Loi fondamentale, aux termes duquel tous les Allemands ont le droit "de se réunir pacifiquement et sans armes sans notification ou autorisation préalable". Ce droit de réunion en plein air peut être limité par la loi conformément au paragraphe 2 de l'article 8. Les dispositions pertinentes figurent essentiellement dans la Loi sur l'exercice du droit de réunion (Versammlungsgesetz), dont la version initiale remonte à 1953.

L'interprétation de cette loi est régie par un arrêt de la Cour constitutionnelle fédérale de 1985 qui a fait jurisprudence. Cet arrêt concernait l'interprétation de cette loi, à la lumière de la Constitution, dans un différend relatif aux restrictions et interdictions imposées par la police à des réunions parfois violentes de manifestants opposés à la construction d'une centrale atomique à Brokdorf (arrêt du 14 mai 1985, dossier no 1 BvR 233, 341/81, publié dans le recueil officiel BVerfGE 69, p. 315 et suivantes). La jurisprudence de la Cour à cet égard est immuable et la situation juridique sur ce point est caractérisée par un degré élevé de continuité pour ce qui est aussi bien des fondements juridiques que de leur interprétation.

Ainsi, la liberté de réunion ne peut être limitée que par une loi afin de protéger d'autres intérêts juridiques équivalents, dans le strict respect du principe de proportionnalité. Les autorités compétentes peuvent interdire une réunion en plein air ou la soumettre à des restrictions ou conditions spécifiques touchant en organisation si, à la lumière des circonstances qui prévalent au moment considéré, la sécurité ou l'ordre publics "risquent d'être directement compromis par la réunion ou la manifestation".

Selon la jurisprudence uniforme de la Cour constitutionnelle fédérale, l'expression "sécurité publique" doit être entendue comme désignant "la protection d'intérêts juridiques fondamentaux comme la vie, la santé, la liberté, l'honneur, la propriété et les biens de l'individu" et "l'inviolabilité de l'ordre juridique" et " l'inviolabilité des institutions de l'État". L'inclusion de "l'inviolabilité de l'ordre juridique" dans le concept de sécurité publique revêt une importance particulière : la commission d'infractions pénales troublant la sécurité publique justifie ainsi l'intervention des autorités responsables de la réunion ou de la police. Dans cet arrêt qui a fait date, la Cour constitutionnelle fédérale a souligné qu'en pareille situation, l'action de la police doit en principe viser la ou les personnes fauteurs de troubles de sorte que l'action d'individus violents ne porte pas atteinte au droit de réunion de la majorité pacifique des participants.

Entre 1998 et 2001, le Gouvernement, le Parlement et le Conseil fédéraux se sont transférés de Bonn à Berlin, ce qui a conduit à remplacer l'ancienne Loi sur les arrondissements protégés (Bannmeilengesetz) concernant la protection spatiale du bon fonctionnement du Parlement et de plusieurs organismes fédéraux suprêmes par la Loi de 1999 sur les arrondissements protégés des organes constitutionnels de la Fédération (Gesetz über befriedete Bezirke für Verfassungsorgane des Bundes). Cette loi, qui a pour but de garantir des conditions propices au bon fonctionnement du Parlement, interdit aux manifestants de pénétrer à l'intérieur d'une zone se trouvant à l'intérieur d'un rayon déterminé autour des bâtiments du Parlement et du Conseil fédéral (rayon inférieur à celui qui s'appliquait précédemment à Bonn). Les réunions sont autorisées dans les arrondissements protégés s'il n'y a pas lieu de craindre qu'elles perturbent le fonctionnement du Parlement ou l'accès à ses bâtiments. À la différence de la loi antérieure, les réunions non autorisées ou interdites dans les arrondissements protégés ne constituent plus une infraction pénale mais seulement des infractions administratives.

Article 22

Liberté d'association et droit de constituer des syndicats

1. Liberté d'association

a) Liberté d'association et droit de créer des partis politiques

Conformément au paragraphe 1 de l'article 21 de la Loi fondamentale, les partis politiques participent à la création de la volonté politique du peuple. Leur création est libre et leurs structures internes doivent répondre aux principes démocratiques. Les partis qui, du fait de leurs objectifs ou du comportement de leurs adhérents, cherchent à altérer ou détruire l'ordre fondamental libre et démocratique ou à mettre en danger l'existence de la République fédérale d'Allemagne peuvent être interdits, conformément au paragraphe 2 de l'article 21 de la Loi fondamentale, qui consacre le principe d'une démocratie "défensive" qui est reflété dans plusieurs de ses dispositions. En effet, les forces démocratiques ne doivent pas être obligées d'adopter une attitude passive lorsque les opposants de la liberté et de la démocratie utilisent contre elles les aspects les plus libéraux et les plus tolérants de l'ordre constitutionnel. Néanmoins, aux termes de cette dernière disposition, seule la Cour constitutionnelle fédérale est habilitée à déterminer si un parti politique est ou non contraire à la Constitution. Aux termes du paragraphe 1 de l'article 43 de la Loi portant création de la Cour constitutionnelle fédérale, les recours en inconstitutionnalité sur ce point doivent émaner du Parlement fédéral, du Conseil fédéral ou du Gouvernement fédéral.

Le fait que le Parti national démocrate allemand (NPD) joue un rôle central dans la recrudescence des activités d'extrême droite enregistrée ces dernières années a conduit le Gouvernement fédéral à demander à la Cour constitutionnelle fédérale de déclarer le NPD contraire à la Constitution. Le NPD attire de plus en plus de partisans parmi les jeunes enclins à la violence, essaye de transformer les manifestations sociales en une inimitié fondamentale à l'égard de la démocratie et de la primauté du droit et diffuse, presque comme le faisaient les nationaux-socialistes, des concepts inconstitutionnels d'État et d'ordre social totalitaires. Ainsi, l'agitation raciste et antisémite trouve un cadre dans l'organisation d'un parti.

En outre, le Parlement fédéral et le Conseil fédéral ont également demandé que le NPD soit déclaré anticonstitutionnel. Ainsi, les trois organes habilités par la Constitution à former une telle requête ont montré clairement que les forces de la démocratie ne sont pas disposées à tolérer l'antisémitisme et le racisme organisés.

b) Interdiction d'associations extrémistes

À la fin de 2001, il existait dans la République fédérale d'Allemagne 141 organisations et associations d'extrême droite (144 en 2000) , 128 groupes d'extrême gauche (138 en 2000) et 65 organisations extrémistes étrangères représentées en Allemagne (66 en 2000). Le nombre

d'adhérents, en 2001, était d'environ 49 700 pour les groupes d'extrême droite (50 900 en 2000) , 32 900 pour les groupes d'extrême gauche (33 500 en 2000) et 59 100 pour les organisations extrémistes étrangères (58 800 en 2000).

Selon le paragraphe 2 de l'article 9 de la Loi fondamentale, les associations dont les objectifs ou les activités sont contraires à la législation pénale ou sont dirigés contre l'ordre constitutionnel ou le concept de compréhension internationale sont interdites. Aux termes de l'article 3 de la Loi sur les associations (Vereinsgesetz), c'est le Ministère fédéral de l'intérieur qui prononce l'interdiction dans le cas des associations opérant au plan national. La possibilité d'une telle interdiction constitue l'un des éléments de la démocratie dite "défensive" reflétés dans plusieurs dispositions de la Loi fondamentale.

Le Ministre fédéral de l'intérieur a, depuis septembre 1993, interdit neuf associations extrémistes, six organisations étrangères et trois associations d'extrême droite ou néonazies.

Si les activités d'une association ne concernent qu'un Land , c'est le Ministre de l'intérieur du Land qui prononce l'interdiction. Pendant la période considérée, le Gouvernement fédéral a été informé de 23 interdictions de ce type : 14 organisations extrémistes étrangères, 7 associations d'extrême droite ou néonazies et 2 associations criminelles de caractère général.

2. Droits syndicaux

Dans ses observations finales concernant le quatrième rapport périodique, le Comité des droits de l'homme a exprimé le voeu d'être informé de l'application du droit de créer des syndicats et de s'affilier aux syndicats de son choix et s'est inquiété "de l'interdiction absolue de faire grève imposée aux fonctionnaires qui n'exercent pas d'autorité au nom de l'État et qui ne sont pas affectés à des services essentiels" (CCPR/C/79/ Add. 73, paragraphes 18 et 19).

Le paragraphe 3 de l'article 9 de la Loi fondamentale, en reconnaissant le droit de créer des associations pour sauvegarder et améliorer les conditions de travail et les conditions économiques, garantit également celui de poursuivre cet objectif collectivement. Les intéressés peuvent décider eux-mêmes, sous leur propre responsabilité, à l'abri de l'influence de l'État. Ce droit comporte la liberté de créer une association, de s'y affilier et de la quitter ou d'y rester, et protège l'association en tant que telle et leurs droits de poursuivre les objectifs visés au paragraphe 3 de l'article 9. Ces objectifs sont notamment la conclusion de conventions collectives par lesquelles les syndicats déterminent sous leur propre responsabilité les salaires et les conditions de travail, essentiellement sans l'intervention de l'État, et même dans lequel l'État a pour l'essentiel renoncé à son rôle de réglementation.

Selon l'avis qui prévaut en Allemagne, le droit de grève des fonctionnaires irait à l'encontre de l'obligation spéciale de loyauté qu'impose la Loi sur la fonction publique. Des fonctionnaires de carrière sont les garants de l'exécution licite, efficace et objective des principales tâches de l'État. Une grève des fonctionnaires représenterait un fardeau inacceptable pour le public et ferait obstacle au libre fonctionnement des processus décisionnels des parlements. La carrière dans la fonction publique est régie exclusivement par les normes publiées par les parlements des Länder , lesquels sont par conséquent seuls compétents pour déterminer les droits et les obligations des fonctionnaires, y compris en matière de rémunération et de pension.

Les candidats à la fonction publique renoncent volontairement à certains droits. Cette concession, cependant, a pour pendant l'obligation spéciale de soutien de l'employeur, laquelle se manifeste notamment par un emploi à vie, qui garantit l'indépendance des fonctionnaires. Les relations juridiques entre les fonctionnaires et leurs employeurs doivent être structurées de manière cohérente, conformément aux normes constitutionnelles. Pour ce qui est de l'interdiction de la grève, aucune distinction ne peut être faite quant aux tâches spécifiques accomplies. Il n'est fait aucune distinction entre les tâches dont s'acquittent les fonctionnaires conformément à leurs attributions.

De plus, il n'est pas possible d'établir une distinction qui serait fondée sur la nature des activités, par exemple reflétant ou non l'exercice d'une autorité au nom de l'État, comme le suggère le Comité. Les fonctionnaires n'ont pas de droit acquis d'exécuter une tâche spécifique ou de demeurer affectés aux fonctions dont ils s'acquittent. Il appartient à l'employeur d'affecter les fonctionnaires d'autres tâches s'il y a lieu, autrement dit de procéder à des mutations. L'un des principaux éléments du régime appliqué à la fonction publique est par conséquent la mobilité des fonctionnaires. Cependant, la mobilité qui exige l'administration publique serait sérieusement compromise si les fonctionnaires avaient des statuts juridiques différents selon les tâches qui leur sont confiées. Cela rendrait les affectations, mutations et détachements difficiles car cela supposerait une modification des droits et des obligations des fonctionnaires, de sorte qu'il ne serait pas possible de confier facilement de nouvelles tâches aux fonctionnaires.

Article 23

Protection du mariage et de la famille

1. Protection du mariage et de la famille

Aux termes du paragraphe 1 de l'article 6 de la Loi fondamentale, le mariage et la famille sont placés sous la protection spéciale de l'État. Le droit de la famille, régi par le Code civil (articles 1297 à 1921) réglemente le mariage (conclusion et effets du mariage, régime matrimonial, divorce), la consanguinité (descendance, obligation alimentaire, garde parentale, reconnaissance de l'enfant) et la tutelle, la représentation légale et la curatelle.

Le mariage et la famille sont également protégés par d'autres dispositions légales. Ainsi, la famille est protégée en matière de succession. Par exemple, les conjoints - et également, à partir du 1 er août 2001, les partenaires du même sexe qui vivent dans une relation stable conformément à la Loi sur les partenariats déclarés [Lebenspartnerschaftsgesetz]) - et les membres de la famille sont considérés comme héritiers légaux (articles 1924 à 1931 du Code civil et paragraphes 1 et 2 de l'article 10 de la Loi sur les partenariats déclarés). S'ils sont déshérités, les enfants, les parents et le partenaire du même sexe reçoivent une part réservataire représentant au moins la moitié de la part légale (articles 2303 et suivants du Code civil et paragraphes 1 et 2 de l'article 10 de la Loi sur les partenariats déclarés). En outre, les dispositions légales relatives à la procédure autorisent les membres de la famille à refuser de témoigner.

2. Protection des enfants contre la violence

L'interdiction expresse des châtiments corporels, atteintes à l'émotivité et autres mesures pédagogiques inhumaines s'applique en Allemagne depuis novembre 2000. Les enfants ont le droit à une éducation non violente (paragraphe 2 de l'article 1631 de la nouvelle version du Code civil et Loi du 2 novembre 2000 interdisant la violence dans l'éducation et portant modification de la Loi relative à l'obligation alimentaire à l'égard des enfants (Gesetz zur Ächtung der Gewalt in der Erziehung und zur Änderung des Kindesunterhaltsrechts), Journal officiel fédéral, Partie I, p. 1479). Les services d'assistance à l'enfance et à la jeunesse, en outre, fournissent des conseils aux parents quant à la façon de résoudre de façon non violente les conflits familiaux.

3. Séparation de corps et divorce

Tout conjoint peut renoncer au mariage sans restrictions légales et vivre séparément. Pendant la séparation de corps, un conjoint peut exiger de l'autre une pension alimentaire correspondant au revenu et au patrimoine de ce dernier (article 1361 du Code civil).

Le mariage ne peut être dissout qu'au moyen d'un jugement rendu par le tribunal à la demande de l'un des conjoints ou des deux (première phrase du paragraphe 1 de l'article 1564 du Code civil) s'il a échoué. Il y a présomption irréfragable d'échec, aux termes du paragraphe 1 de l'article 1566 du Code civil, si les conjoints ont été séparés de corps pendant un an et le divorce est demandé par les deux ou si le défendeur accepte le divorce. Après une période de séparation de corps de trois ans, il y a présomption irréfragable d'échec sans que les parties à la procédure aient à présenter des déclarations quelconques (paragraphe 2 de l'article 1566 du Code civil). Même en cas d'échec, le mariage peut être maintenu si cela est nécessaire dans des cas exceptionnels dans l'intérêt des enfants mineurs issus du mariage ou si, du fait de circonstances inhabituelles, le divorce imposerait au défendeur qui le refuse une charge telle que la maintien du mariage apparaît nécessaire, même compte tenu des intérêts du demandeur (article 1566 du Code civil).

Si les conjoints vivent sous le régime matrimonial de la communauté réduite aux acquêts, le patrimoine acquis pendant le mariage doit être réparti entre les conjoints en cas de divorce (articles 1372 et suivants du Code civil). Il est fait exception à cette règle si une répartition à parts égales serait manifestement inéquitable, par exemple si le conjoint ayant le moins contribué aux acquêts a de façon injustifiée refusé d'assumer les obligations économiques découlant du mariage (article 1381 du Code civil) pendant une période plus longue. Il n'est pas tenu compte de la raison du divorce.

En ce qui concerne l'obligation alimentaire, la présomption est, qu'après le divorce, chaque conjoint doit subvenir lui-même à ses propres besoins et ce n'est que dans des cas particuliers que la loi prévoit la possibilité pour un conjoint de percevoir une pension alimentaire (articles 1570 à 1576 du Code civil).

Les raisons prévues aux articles 1570 et suivants du Code civil sont toutes liées à des besoins en rapport avec le mariage, et une pension peut être accordée :

pour subvenir aux besoins d'un enfant issu du mariage,

en cas d'aptitude réduite au travail ou de vieillesse,

en cas chômage, et

pendant la durée d'une formation.

Il peut également être accordé une pension pour des raisons générales d'équité, qui n'ouvrent toutefois droit à pension que si ces considérations s'appliquent au moment du divorce ou peu après. Un besoin qui surgirait plusieurs années après la dissolution du mariage, par exemple par suite de la perte d'un emploi, en revanche, n'ouvre pas droit à une pension alimentaire.

Comme le niveau de vie commun pendant la mariage doit être considéré comme le résultat de la contribution des deux conjoints, l'article 1578 du Code civil stipule qu'en principe, le montant de la pension alimentaire doit être calculé en fonction du niveau de vie atteint pendant le mariage pour ne pas forcer un conjoint à tomber dans le besoin du fait d'un divorce.

Lors du divorce, les droits à pension sont ajustés pour tenir compte de la disparition du droit du conjoint survivant à une pension de réversion et pour répartir équitablement les droits à une pension de vieillesse ou à une pension d'invalidité partielle acquis durant le mariage, l'idée étant que les droits à pension acquis pendant le mariage découlent du travail des deux partenaires et que les deux doivent pouvoir subvenir à leurs besoins à la fin de leur vie active. Le conjoint ayant acquis les moindres droits à pension pendant le mariage reçoit à titre de compensation à l'égard de l'autre la moitié de la différence de valeur entre les droits à pension déjà acquis de part et d'autre. L'ajustement des droits à pension profite surtout aux femmes qui ont élevé des enfants pendant le mariage ou ont travaillé à un autre titre au sein de la famille. Cet ajustement crée pour l'intéressé, à l'égard de la caisse de pension, un droit indépendant de celui de l'ancien partenaire.

4. Régime matrimonial

Le régime légal est la communauté réduite aux acquêts (article 1363 du Code civil). Conformément au paragraphe 2 de cet article, les avoirs de l'homme et de la femme ne deviennent pas les avoirs communs des conjoints. Afin de la communauté (par suite de décès, de divorce ou de dissolution du contrat de mariage), les apports des deux conjoints sont ajustés.

Les conjoints peuvent changer ce régime matrimonial par contrat (article 1408 du Code civil). L'une des formules offertes par la loi est la séparation de biens totale (article 1414 du Code civil), qui se distingue de la communauté légale, en particulier, par le fait qu'il n'y a pas d'ajustement des apports des deux conjoints. Un autre régime est celui de la communauté de biens, auquel cas les avoirs de l'homme et ceux de la femme deviennent des avoirs communs (article 1416 du Code civil). Toutefois, ce régime matrimonial est rare à l'heure actuelle. Depuis le 1 er août 2001, il existe des possibilités semblables pour les partenaires de même sexe.

5. Égalité de droit en ce qui concerne le nom

Le principe de l'égalité de droit entre conjoints (première phrase du paragraphe 2 de l'article 3 de la Loi fondamentale) a également été appliqué en ce qui concerne le nom de la femme mariée par la Loi du 16 décembre 1993 relative aux noms de famille (Familiennamensrechtsgesetz).

Cette loi a éliminé l'obligation qu'avaient les conjoints d'avoir le même nom de famille ainsi que la règle, déclarée inconstitutionnelle par la Cour constitutionnelle fédérale dans son arrêt du 5 mars 1991, selon laquelle, faute d'accord entre les conjoints, le nom de la femme mariée était le nom de famille de l'homme.

6. Protection de la famille en droit fiscal

La protection que l'État doit à la famille se reflète également dans le régime d'imposition

des parents découlant du plan de péréquation des avantages familiaux appliqué depuis le 1 er janvier 1996. Ainsi, la proportion du revenu que les parents doivent dépenser pour garantir à leurs enfants un niveau de vie minimum est exonérée d'impôt par le biais soit de l'allocation mensuelle pour enfant à charge payée sous forme de remboursement d'impôt, soit par un abattement sur l'assiette de l'impôt. Cependant, alors que seule la partie du revenu des parents utilisée pour garantir un niveau de vie minimum aux enfants était précédemment exonérée d'impôt, l'exonération englobe également, depuis le 1 er janvier 2000, les soins aux enfants et, depuis le 1 er janvier 2002, leur éducation et leur formation. Depuis 2002, l'abattement au titre du niveau de vie minimum est de 3 648 euros (7 134 DM) et 2 160 euros (4 224 DM) au titre des soins et de l'éducation. Parallèlement, l'allocation mensuelle pour le premier et le deuxième enfants a été relevée plusieurs fois depuis 1996 et portée de 200 DM initialement à 154 euros (301,20 DM) par enfant au 1 er  janvier 2002. Depuis lors, l'allocation au titre des trois premiers enfants est de 154 euros (301,20 DM) pour chaque enfant et, à partir du quatrième enfant, de 179 euros (350 DM) pour chaque enfant. D'autres dispositions du droit fiscal protègent également la famille. C'est ainsi qu'à compter de 2002, les dépenses consacrées aux soins des enfants de moins de 14 ans, jusqu'à concurrence de 1 500 euros par enfant, sont déductibles aux fins de l'impôt s'ils sont employés ou malades dès lors que le coût des soins dépasse 1 548 euros par enfant. En outre, les parents peuvent bénéficier d'un abattement fiscal de 924 euros par an pour chaque enfant majeur qui vit hors du foyer à des fins de formation.

Article 24

Droits des enfants

En République fédérale d'Allemagne, une importance considérable est accordée aux droits des enfants, en particulier sous l'effet de la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant. Lorsqu'elle a ratifié la Convention, en 1992, l'Allemagne a assumé l'obligation de faire respecter dans le pays les droits qui y sont reconnus au moyen de "toutes les mesures législatives, administratives et autres appropriées". La protection des droits de l'enfant prévue par la Constitution et par la loi, déjà élevée, a encore été renforcée, surtout ces dernières années.

1. Nouvelle Loi sur les relations entre parents et enfants

La Loi sur les relations entre parents et enfants, qui régit en particulier les droits des descendants et les relations juridiques entre les enfants mineurs et leurs parents, a été largement réformée et modernisée pendant la période considérée. La Loi du 16 décembre 1997 portant réforme de la Loi sur les relations entre parents et enfants (Gesetz zur Reform des Kindschaftsrechts, Journal officiel fédéral, Partie I, p. 2942) est entrée en vigueur le 1 er juillet 1998.

La nouvelle loi a pour l'essentiel éliminé les différences qui caractérisaient jusqu'alors le statut juridique des enfants légitimes et des enfants naturels. Les règles relatives au droit des enfants à l'égard de leurs parents ont été réformées et les expressions "enfant légitime" et "enfant naturel" ont disparu. Les dispositions relatives au droit des enfants nés hors mariage et à la légitimation des enfants naturels ont été éliminées. Eu égard aux progrès accomplis par la médecine en matière de santé génésique, il a été ajusté pour la première fois une disposition relative au droit de l'enfant à

l'égard de la mère. L'article 1591 du Code civil définit la mère comme étant la femme ayant donné naissance à l'enfant. Cette disposition a pour but de décourager la maternité de substitution, qui est dans tout état de cause interdite par la législation allemande.

En ce qui concerne les rapports d'ascendance entre l'enfant et le père, la disposition qui impute la paternité au conjoint de la mère a été conservée en principe (paragraphe 1 de l'article 1592 du Code civil) mais l'on peut désormais plus facilement éliminer cette présomption de la paternité dans le cas des enfants nés après l'introduction d'une procédure de divorce.

Conformément au paragraphe 1 de l'article 18 de la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant du 20 novembre 2000, la nouvelle Loi sur les relations entre parents et enfants renforce le principe selon lequel les deux parents sont responsables de l'éducation et de l’épanouissement de l'enfant. Ce principe s'applique sans égard à la question de savoir si les parents de l'enfant sont mariés. La nouvelle Loi sur les relations entre parents et enfants permet aux parents qui ne sont pas mariés ensemble d'assumer la garde parentale conjointe de l'enfant lors de la naissance, soit en présentant une déclaration commune de responsabilité parentale (premier alinéa du paragraphe 1 de l'article 1626a du Code civil) ou en contractant mariage par la suite (même alinéa de la même disposition). Lesdites déclarations peuvent être présentées avant la naissance de l'enfant (paragraphe 2 de l'article 1626b du Code civil). En l'absence d'une déclaration et si les parents ne contractent pas mariage, c'est la mère qui a la responsabilité parentale exclusive (paragraphe 2 de l'article 1626a du Code civil).

Les parents qui sont mariés lors de la naissance de l'enfant sont en tout état de cause investis de la responsabilité parentale commune. En cas de séparation ou de divorce des parents exerçant une responsabilité parentale commune sur la base du mariage ou de déclaration à cet effet, l'article 1671 du Code civil permet aux parents de continuer d'exercer cette responsabilité commune même après la séparation ou le divorce. Aux termes de l'article 1687 du Code civil, les pouvoirs de décision sont alors répartis comme suit : l'accord des deux parents est requis pour toutes les questions qui revêtent une importance considérable pour l'enfant (première phrase du paragraphe 1) et le parent avec lequel l'enfant vit généralement avec l'accord de l'autre ou sur la base d'une décision judiciaire a le pouvoir de décider seul pour les questions de tous les jours (deuxième phrase de la même disposition). Aussi longtemps que l'enfant vit avec lui avec l'accord de l'autre ou sur la base d'une décision judiciaire - par exemple en ce qui concerne le droit de visite – ce parent est habilité à décider seul pour toutes les questions concernant l'entretien de l'enfant.

Depuis la réforme de la Loi sur les relations entre parents et enfants, il est conseillé mais pas imposé aux parents qui ont la responsabilité parentale conjointe de la conserver après leur séparation ou leur divorce. Sur demande, le tribunal transfère la responsabilité parentale exclusive aux parents qui la demandent si l'autre y consent (à moins que l'enfant en question ait plus de 14 ans et soulève une objection) ou s'il y a lieu de penser que le retrait de la responsabilité conjointe et son

transfert au demandeur répondent à l'intérêt supérieur de l'enfant. Si tel n'est pas le cas, ou si les parents ne demandent pas à être investis de la responsabilité parentale exclusive, la responsabilité conjointe est maintenue.

En ce qui concerne le droit de visite, la nouvelle loi tient compte aussi de l'importance des contacts entre l'enfant et ses deux parents. Contrairement à la situation qui prévalait avant la réforme, le droit de visite des parents est réglementé de façon uniforme que ces derniers soient ou non mariés. En outre, il a été créé un droit de visite pour les grands-parents, les frères et soeurs et autres personnes habituellement proches de l'enfant (article 1685 du Code civil). Pour la première fois, le droit de visite a été réglementé non seulement en tant que droit des parents mais aussi en tant que droit de l'enfant. Le droit de visite ne peut être limité ou écarté que si cela est nécessaire dans les intérêts supérieurs de l'enfant. Le tribunal de la famille ne peut pas prendre de décision limitant ou écartant le droit de visite pendant un certain temps que si, autrement, les intérêts supérieurs de l'enfant seraient compromis (paragraphe 4 de l'article 1684 du Code civil).

Pour que l'enfant puisse suivre dans un environnement aussi exempt de violence que possible, il a été promulgué une Loi le 2 novembre 2000, entrée en vigueur le même mois, la Loi interdisant la violence dans l'éducation et portant modification de la Loi relative à l'obligation alimentaire à l'égard des enfants (Gesetz zur Ächtung der Gewalt in der Erziehung und zur Änderung des Kinderunterhaltsrechts, Journal officiel fédéral, Partie I, p. 1479, voir paragraphe 270 ci-dessus). Avec l'entrée en vigueur, le 12 avril 2002, de la Loi tendant à renforcer les droits des enfants (Gesetz zur weiteren Verbesserung von Kinderrechten, Journal officiel fédéral, Partie I, p. 1239) il est plus facile pour les tribunaux d'écarter les personnes qui sont coupables d'actes de violence sur un enfant ou qui menacent sérieusement les intérêts supérieurs d'un enfant ou de son voisinage immédiat. En particulier, les tribunaux sont expressément habilités à expulser une telle personne du logement où vit également l'enfant, de sorte que celui-ci puisse rester dans un environnement et avec les proches auxquels il est habitué sans être soumis à une influence perturbatrice. Précédemment, l'enfant était généralement, lorsque de tels incidents se produisaient, retiré de la famille et placé dans un foyer ou une famille d'accueil.

Les droits et le statut de l'enfant en tant qu'être doté d'une personnalité juridique distincte sont également reflétés dans la jurisprudence des tribunaux concernant la responsabilité parentale et le droit de visite. Avant de prendre une décision dans ce domaine, le tribunal doit en principe entendre personnellement l'enfant. S'il y a un conflit d'intérêt entre celui-ci et ses représentants légaux, le tribunal de la famille peut, et dans certains cas doit, désigner une personne chargée de représenter spécialement les intérêts de l'enfant (article 50 de la Loi sur les questions liées aux procédures non-contentieuses ‑ FGG). En matière de responsabilité parentale et de droits de visite, l'enfant qui a atteint l'âge de 14 ans peut présenter un recours contre les décisions du tribunal de la famille de façon indépendante et sans la participation de son représentant légal (article 59 de la loi susmentionnée). Ces droits de procédure reflètent les droits de l'enfant consacrés dans la Convention européenne du 25 janvier 1996, que l'Allemagne a ratifiée en avril 2002 et qui s'applique à l'Allemagne depuis le 1 er août 2002.

En outre, l'on s'est particulièrement attaché à améliorer les services de conseils fournis aux enfants et aux parents en cas de séparation et de divorce de ces derniers. Les parents et les enfants, ainsi que toute autre personne pouvant rendre visite à ces derniers, ont légalement le droit aux

services de conseils du Bureau pour la protection de la jeunesse ou aux organisations indépendantes d'aide aux jeunes. Aussi bien les tribunaux que les organisations de protection de la jeunesse s'efforcent de promouvoir un règlement à l'amiable.

2. Principe de non-discrimination

Le principe de l'égalité de traitement consacré à l'article 3 de la Loi fondamentale interdit toute forme de discrimination, y compris à l'égard des enfants.

Quelques Länder ont promulgué des dispositions concernant expressément la non-discrimination. Par exemple, la Loi du Land de Berlin portant application du Titre huit du Code social (Ausführungsgesetz des Landes Berlin zum Sozialgesetzbuch Achtes Buch ‑ SGB VIII)

stipule que les organismes de protection de la jeunesse doivent s'efforcer de réaliser l'égalité de droits entre hommes et femmes et promouvoir, entre autres, la tolérance à l'égard des personnes d'orientation homosexuelle.

a) Enfants étrangers

En Allemagne, les enfants étrangers ne peuvent faire l'objet d'aucune discrimination et

eux-mêmes et leurs parents se voient donner la possibilité nécessaire de préserver leur identité culturelle. Le droit de libre développement de la personnalité de l'individu et la liberté de religion (paragraphe 1 de l'article 2 et paragraphes 1 et 2 de l'article 4 de la Loi fondamentale) protège le droit de chacun de sauvegarder sa vie culturelle propre, d'utiliser sa propre langue et de professer sa propre religion.

Le Gouvernement fédéral à pour politique de promouvoir la pleine intégration sociale et professionnelle des jeunes étrangers qui résident légalement en Allemagne. L'intégration est encouragée au moyen d'une série de lois qui, en donnant aux jeunes des garanties de sécurité en matière de résidence et de travail, leur permettent d'organiser plus facilement leur vie. Par exemple, les étrangers de 16 à 23 ans avaient jusqu'à la fin de 1999 le droit d'acquérir par naturalisation la nationalité allemande s'ils avaient perdu leur nationalité précédente ou y avaient renoncé, avaient résidé légalement en Allemagne depuis huit ans, avaient fréquenté l'école en Allemagne pendant six ans et n'avaient été condamnés d'aucune infraction pénale. Le 1 er janvier 2000, ces dispositions ont été remplacées (voir sur ce point les paragraphes 378 et suivants et le paragraphe 332 ci-dessous) par la Loi du 15 juillet 1999 portant réforme de la Loi sur la nationalité (Gesetz zur Reform des Staatsangehörigkeitsrechts), qui a créé un régime moderne à cet égard, conformément à l'objectif central de la politique d'intégration du nouveau Gouvernement fédéral. Outre que cette loi, d'une manière générale, a facilité le processus de naturalisation, elle a introduit le jus soli aux côtés du jus sanguinis , de sorte que les enfants nés de parents étrangers après le 1 er janvier 2000 acquièrent maintenant la nationalité allemande à la naissance si un parent a eu sa résidence habituelle légale en Allemagne depuis huit ans et a un statut stable à cet égard (paragraphe 3 de l'article 4 de la Loi sur la nationalité [Staatsangehörigkeitsgesetz]). C'est ce qu'il est convenu d'appeler la formule de l'option : tout enfant de parents étrangers né en Allemagne qui acquiert ainsi la nationalité allemande tout en acquérant une nationalité étrangère par son ascendance, devra choisir entre les deux à l'âge de sa majorité. S'il choisit la nationalité allemande, il devra porter la preuve qu'il a perdu sa nationalité étrangère ou y a renoncé avant d'atteindre l'âge de 23 ans (article 29 de la Loi sur la nationalité).

En vertu d'une disposition transitoire, les enfants étrangers de moins de dix ans qui avaient leur résidence habituelle en Allemagne le 1 er janvier 2000 et dont les parents avaient à leur naissance un permis de séjour permanent pouvaient acquérir par naturalisation la nationalité allemande. En principe, ces enfants devront également, au moment venu, exercer cette option. Dans les deux cas, l'acquisition de la nationalité marque le point de départ de l'intégration sociale. En outre, avec la modernisation de la loi sur la nationalité, le délai généralement applicable pour prétendre à la naturalisation a été ramené de 15 à 8 ans et, en vertu de la Loi sur les étrangers, le conjoint et les enfants mineurs peuvent également se faire naturaliser même s'ils n'ont pas régulièrement séjourné en Allemagne pendant huit ans.

b) Protection spéciale des filles

En Allemagne, conformément au paragraphe 2 de l'article 3 de la Loi fondamentale, les hommes et les femmes ont juridiquement les mêmes droits. Il subsiste néanmoins dans la réalité des inégalités entre garçons et filles qu'il importe d'éliminer.

Le Gouvernement fédéral s'est engagé à mettre en oeuvre le Programme d'action adopté à Beijing en 1995 par la quatrième Conférence mondiale sur les femmes. Les filles constituent l'une des douze cibles prioritaires du Programme d'action. En Allemagne, les intérêts des filles et des jeunes femmes sont pris en considération dans tous les domaines en vue de promouvoir l'égalité entre les sexes. Les politiques en faveur de l'enfance et de la jeunesse font une place spéciale aux intérêts des filles. Depuis la réforme de la Loi sur la protection de l'enfance et de la jeunesse, l'obligation de tenir compte des situations différentes des filles et des garçons, d'atténuer les différences entre eux et de promouvoir l'égalité de droit entre filles et garçons est consacrée pour la première fois par la législation fédérale.

Cela étant, il importe de mettre en oeuvre une approche différenciée par sexe dans tous les domaines de la protection de la jeunesse. C'est ainsi que, lors de leurs discussions nationales, les experts ont forgé l'expression "le travail avec les filles en tant que tâche intersectorielle", dont il ressort clairement que l'action en faveur des filles ne doit pas être considérée comme une activité spéciale ou supplémentaire des services de protection de l'enfance et de la jeunesse mais plutôt comme un élément faisant partie intégrante de leur mission. Il ne s'agit donc pas seulement de mettre en oeuvre une intervention ciblée sur les filles, mais surtout d'adopter une vision claire qui permet d'établir une différenciation entre les sexes à tous les égards. Des mesures s'imposent donc aussi pour mettre au point des formes adéquates de participation qui tiennent effectivement compte des intérêts des filles.

Pour le Gouvernement fédéral, la réalisation des tâches susmentionnées doit se faire au moyen du Plan de la Fédération en faveur de l'enfance et de la jeunesse, dans le cadre duquel la promotion des filles doit être considérée comme un objectif intersectoriel afin d'établir une différenciation entre les situations et les programmes de protection dans toutes les circonstances dans lesquelles des programmes différenciés s'imposent ou sont proposés.

Le Ministère fédéral de la famille, du troisième âge, des femmes et de la jeunesse a mis un accent particulier sur un programme pilote intitulé "Les filles et la protection de la jeunesse", qui en est actuellement à sa deuxième étape. Pendant la première phase du programme, de 1991 à 1996, il a été élaboré et mis à l'essai des mesures et des projets types ainsi que différents concepts, en particulier en faveur des filles socialement désavantagées, ce qui a beaucoup encouragé le travail avec les filles, spécialement dans les nouveaux Länder . La deuxième phase, qui a commencé en 1997, est axée sur le développement continu des structures existantes de la protection de la jeunesse. Sur les thèmes "La participation en tant que partage actif" et "L'intégration en tant qu'implication égale", il a été mis en oeuvre divers concepts particulièrement novateurs du travail social avec les filles, de l'éducation civique, de la planification de la protection de la jeunesse et du travail sexospécifique avec les garçons. Pendant la période qui s'est écoulée entre 1994 et 1999, le Ministère fédéral de la famille, du troisième âge, des femmes et de la jeunesse a alloué à ce programme pour près de 27 millions de DM de crédits.

La politique de l'éducation doit également garantir l'égalité de droit entre les sexes car l'éducation et la formation ouvrent la porte à un travail qualifié, de sorte qu'il faut dès le début offrir aux filles et aux jeunes femmes une large gamme d'options professionnelles. Dans le cadre des établissements mixtes, des mesures particulières d'encouragement devront être prises en faveur des filles en particulier dans les domaines des sciences naturelles et de la technique pour permettre aux filles de mieux développer leurs compétences dans ces spécialisations. Des mesures spéciales doivent être prises aussi pour assurer une plus large participation des jeunes femmes à la formation professionnelle et aux professions techniques.

c) Égalité des enfants nés hors mariage

Une application spécifique du principe de l'égalité de traitement garanti par la Constitution se trouve au paragraphe 5 de l'article 6 de la Loi fondamentale, aux termes duquel la loi doit garantir aux enfants légitimes et aux enfants nés hors mariage les mêmes possibilités de développement physique et émotif et le même statut dans la société.

La Loi sur le statut des enfants nés hors mariage au regard des droits de succession (Gesetz über die erbrechtliche Stellung des nichtehelichen Kindes (Loi sur l'égalité en matière successorale [Erbrechtsgleichstellungsgesetz] du 16 décembre 1997, Journal officiel fédéral, Partie I, p. 2968)), a supprimé les dispositions relatives au droit spécial de succession des enfants nés hors mariage et a accordé à ces derniers et aux enfants légitimes les mêmes droits en matière successorale. Une exception n'est faite que pour les personnes nées avant le 1 er juillet 1949, à moins que le père naturel ait eu sa résidence habituelle en République démocratique allemande le 2 octobre 1990. Cette disposition reflète l'évolution différente du droit dans les deux parties de l'Allemagne et accorde aux intéressés, dans chaque cas, la protection requise.

Article 25

Droits civils

Mesures de la Fédération et des Länder concernant les nominations

dans la fonction publique

Dans ses observations finales sur le quatrième rapport périodique, le Comité des droits de l'homme s'est dit préoccupé par la pratique suivie en Allemagne en matière de nominations dans la fonction publique à la lumière des articles 18 et 25 du Pacte (CCPR/C/79/Add.73, paragraphes 16 et 17). Le Gouvernement fédéral, tout en prenant très au sérieux les observations formulées par le Comité, ne peut pas, en dernière analyse, partager sa préoccupation.

Ne peuvent être nommées comme fonctionnaires de carrière que des personnes prêtes à soutenir à tout moment l'ordre fondamental libre et démocratique conformément à la Constitution. À cette fin, le comportement et les propos de tout candidat à un poste dans la fonction publique font l'objet d'une évaluation spécifique et chaque employeur statue lui-même dans les limites de ses compétences.

a) Groupes de certaines sectes religieuses

Le Comité des droits de l'homme a exprimé la crainte que l'appartenance à certaines sectes religieuses en tant que telles puisse être un motif de refus d'emploi dans la fonction publique dans certains Länder de la République fédérale d'Allemagne (Observations finales, paragraphe 16).

À la suite de l'enquête menée à la suite de ces observations, les Länder ont fait savoir que, conformément au paragraphe 2 de l'article 33 de la Loi fondamentale, les critères appliqués aux nominations dans la fonction publique sont les aptitudes, les qualifications et l'expérience professionnelle des candidats. La seule appartenance à une secte ("en tant que telle") ne peut pas être un motif de refus d'emploi dans la fonction publique.

Toutefois, le Land de Bavière a fait observer que l'appartenance à une association qui exige une discipline absolue et totale et la soumission de ses membres à ses objectifs peut permettre de douter de l'aptitude du candidat. La soumission à une telle organisation risque en effet de susciter un conflit avec les attributions officielles d'un fonctionnaire ou d'un agent public. Les candidats à une nomination dans la fonction publique bavaroise doivent par conséquent remplir un questionnaire tendant à élucider leurs relations éventuelles avec l'organisation de la scientologie. Si les informations fournies suscitent un doute quant à l'aptitude d'un candidat, ce dernier se voit offrir la possibilité de le dissiper. En 2001, une personne s'est vu refuser un emploi par suite d'une absence d'aptitude motivée par son appartenance à l'organisation de la scientologie.

La pratique suivie par les Länder consistant à se fonder sur les critères susmentionnés (aptitudes, qualifications et expérience professionnelle) pour décider des candidats à nommer dans la fonction publique n'est pas contestable au regard de l'alinéa (c) de l'article 25 du Pacte. De l'avis de la République fédérale d'Allemagne, une violation de l'article 18 du Pacte (liberté de religion) n'est pas à craindre non plus dans le cas des membres de l'organisation de la scientologie. Cette association - comme cela a déjà été expliqué à plusieurs reprises à l'Organisation des Nations Unies - n'est pas une communauté religieuse ou philosophique mais une organisation qui cherche à réaliser un profit économique et à acquérir du pouvoir (voir la Note verbale adressée au Haut Commissariat des Nations Unies pour les droits de l'homme par le représentant permanent de la République fédérale d'Allemagne auprès de l'Organisation des Nations Unies à Genève, en date du 21 juillet 1999, Ref. : Pol 383.25/2.4, Note no 240/99, renvoyant à la déclaration de la République fédérale d'Allemagne en date du 22 avril 1994, p. 13 et suivantes; voir également la déclaration de la République fédérale d'Allemagne concernant la lettre du Rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme sur l'intolérance religieuse en date du 20 octobre 1994, p. 3, C/ SO 214(36 ‑8)). Toutefois, même si l'on devait présumer que la protection prévue par l'article 18 s'applique, le paragraphe 3 de l'article 18 du Pacte permettrait de prendre en considération l'appartenance à une telle organisation dans le contexte des aptitudes d'un candidat à la fonction publique. Cela serait nécessaire afin de garantir le bon fonctionnement de la fonction publique et par conséquent la sauvegarde de la sécurité et de l'ordre publique.

Il y a lieu de rappeler en outre que toutes les procédures intentées contre l'Allemagne par l'organisation de la scientologie conformément à la résolution 1503 du Conseil économique et social ont été rejetées (voir, tout dernièrement encore, la communication du Haut Commissaire des Nations Unies pour les droits de l'homme en date du 24 septembre 1999 relative aux délibérations du Groupe de travail des communications de la Sous-Commission de la promotion et de la protection des droits de l'homme qui ont eu lieu du 19 au 30 juillet 1999 (Ref. : G/SO 215/13)).

b) Licenciement des fonctionnaires de la République démocratique allemande

Par ailleurs, le Comité des droits de l'homme a manifesté sa préoccupation concernant les critères appliqués pour décider de maintenir en fonction ou de renvoyer les fonctionnaires de la République démocratique allemande après l'unification des deux États allemands et suggéré de formuler ces critères avec plus de précision (observations finales, paragraphe 17).

La République fédérale d'Allemagne tient à faire observer que les dispositions spéciales du Traité d'unification concernant le licenciement normal des travailleurs et le renvoi des fonctionnaires mis à l'épreuve (en particulier du fait qu'ils avaient travaillé pour le Ministère de la sécurité de l'État de la République démocratique allemande) ne sont plus en vigueur, les premières depuis le 1 er janvier 1994 et les secondes depuis le 1 er janvier 1997. À l'heure actuelle, le renvoi de fonctionnaires motivé par leur conduite au service de la République démocratique allemande (par exemple par leur travail au Ministère de la sécurité de l'État) n'est possible que conformément aux dispositions générales de la Loi sur la fonction publique applicable à tous les fonctionnaires s'il n'existe plus, en l'occurrence, la Loi spéciale applicable aux personnes ayant travaillé pour la République démocratique allemande.

Les salariés peuvent encore faire l'objet d'un licenciement exceptionnel conformément à la disposition figurant à l'Annexe I, Chapitre XIX, Titre A, Section III no 1, du Traité d'unification, qui se réfère expressément au Pacte et se lit comme suit :

“Un employé peut faire l'objet d'un licenciement exceptionnel pour une raison importante, et notamment si l'intéressé :

1. a violé les principes d'humanité ou les principes généraux du droit, en particulier les

droits de l'homme garantis par le Pacte international relatifs aux droits civils et politiques du 19 décembre 1966 ou les principes consacrés par la Déclaration universelle des droits de l'homme du 10 décembre 1948, ou

2. a travaillé pour l'ancien Ministère de la sécurité de l'État/Bureau de la sécurité nationale de sorte que son maintien en fonction apparaît comme inacceptable.”

Le but du Traité d'unification était d'intégrer la plupart des employés de la fonction publique de la RDA à celle de la République fédérale d'Allemagne et de les maintenir en fonction à moins que leurs aptitudes ne soient insuffisantes, comme déterminé dans chaque cas particulier comme prévu au paragraphe 2 de l'article 33 de la Loi fondamentale. Le Parlement a inclus parmi les raisons justifiant un licenciement exceptionnel le fait qu'en principe, un fonctionnaire ayant travaillé pour le Ministère de la sécurité de l'État (MfS) ne réunit pas les conditions fixées par le paragraphe 2 de l'article 33 de la Loi fondamentale en ce qui concerne l'emploi dans la fonction publique de la République fédérale. Ce Ministère était un élément central de l'appareil totalitaire de la RDA et était un moyen de contrôle politique et de répression de la population. Sa fonction était en particulier d'identifier, de dissuader et d'éliminer tous ceux qui n'étaient pas d'accord avec la politique du régime et ceux qui souhaitaient quitter le pays. Cette action constituait une violation des droits à la liberté qui sont à la base d'une démocratie. L'on est en droit de présumer un manque d'aptitude, au sens du paragraphe 2 de l'article 33 de la Loi fondamentale, de la part de quiconque à soutenir activement l'appareil de répression utilisé pour garantir la domination d'un système à partie unique étant donné que sa fiabilité et son respect inné des droits civils et du règne du droit sont douteux à long terme.

Néanmoins, avoir travaillé pour le Ministère de la sécurité de l'État n'est pas automatiquement une cause de renvoi, et il faut déterminer que le maintien en fonction est inacceptable. Le mot "inacceptable" est un terme juridique non défini dont l'application est pleinement soumise à la précision des tribunaux, qui lui ont maintenant donné une forme concrète par leur jurisprudence uniforme. L'important est donc de savoir si le travail précédemment accompli par l'employé - mais pas ses opinions politiques - y compris compte tenu du principe de proportionnalité, rend l'emploi à tel point difficile que des normes objectives doivent conduire à écarter un maintien en fonction. Il faut en l'occurrence évaluer les circonstances à la lumière des aptitudes individuelles et tenir compte non seulement des difficultés que l'emploi de l'intéressé peut représenter pour l'employeur mais aussi du degré d'implication de l'employé (Tribunal administratif fédéral, document du 13 décembre 1998, dossier no 2 C 26/97, publié dans le Neue Juristische Wochenzeitschrift 1999, p. 2536 et 2537; Cour constitutionnelle fédérale, arrêt du 8 juillet 1997, dossier no BvR 1934/93, publié dans le recueil officiel, BVerfGE 96, p. 189 et 198 et suivantes).

Ainsi, la Cour constitutionnelle fédérale a considéré que le renvoi d'employés qui, par exemple, avaient travaillé en tant que fonctionnaires à plein temps ou fonctionnaires de l'ancien SED, d'une organisation de masse ou d'une organisation sociale - qui représentait donc l'ancien régime inique - était en principe autorisé, compte tenu de toutes les circonstances de l'espèce (Cour constitutionnelle fédérale, arrêt du 21 février 1995, dossier no 13 Sa 31/ 93, publié dans le recueil officiel BVerfGE, Vol. 92, p. 140 et 152 et suivantes; arrêt du 8 juillet 1997, dossier no 1 BvR 1243, 1247/ 95 et 744/96, Vol. 96, p. 152 et 165 et suivantes). La Cour européenne des droits de l'homme a elle aussi rejeté les recours présentés contre la République fédérale d'Allemagne par d'anciens employés de la République démocratique allemande pour attaquer leur licenciement (Volkmer contre Allemagne, arrêt du 22 novembre 2001, requête no 39799/98; Knauth contre Allemagne, arrêt du 22 novembre 2001, requête no 41111/98; Bester contre Allemagne, arrêt du 22 novembre 2001, requête no 42358/98; Petersen contre Allemagne, arrêt du 22 novembre 2001, requête 39793/98; arrêts disponibles sur internet à l'adresse http://hudoc.echr.coe.int).

Cela étant, les critères appliqués paraissent se passer d'autres explications.

2. Accès de ressortissants de pays de l'Union européenne aux fonctions publiques

Depuis la promulgation de la dixième Loi portant modification de la Loi sur les services publics (Zehntes Gesetz zur Änderung dienstrechtlicher Vorschriften) du 20 décembre 1993, la République fédérale d'Allemagne accorde aux ressortissants des autres États Membres de l'Union européenne le même statut qu'aux Allemands en ce qui concerne les nominations de carrière dans la fonction publique. Le paragraphe 4 de l'article 48 du Traité de la CE a ainsi été transposé en droit allemand.

Seul l'accomplissement de tâches qui ne peuvent être réalisées que par des fonctionnaires appartenant eux-mêmes à la communauté d'État des intéressés est exclu du principe d'ouverture. Cette exception est délibérée eu égard à l'intégration croissante de l'Europe et au fait que la nationalité perd rapidement de son importance pour l'accomplissement des tâches de l'administration publique. La Fédération et les Länder sont convenus des critères à appliquer dans le contexte de cette exception d'emplois réservés, qui sont déjà moins rigoureux que ceux qu'autorise la jurisprudence de la Cour européenne du Luxembourg. Ainsi, par exemple, selon la jurisprudence de la Cour européenne, l'accomplissement de tâches de police dans leur ensemble relève du domaine réservé aux nationaux, tandis que, selon le critère convenu par la Fédération et les Länder , les seules tâches d'intervention administrative (ingérence dans les droits et libertés) qui font intervenir des décisions fondamentales touchant leur modalité d'exécution (comme c'est le cas par exemple du chef d'une équipe de policiers) sont réservées à des ressortissants allemands.

3. Droit de vote des étrangers

Le droit de voter et d'être élu lors des élections locales (voir pour plus amples détails le quatrième rapport périodique, CCPR/C/84/Add.5, paragraphes 164 et suivants) conformément au Traité de Maastricht et à la troisième phrase du paragraphe 1 de l'article 28 de la Loi fondamentale qui est reconnu aux ressortissants des États Membres de l'Union européenne (citoyens de l'Union) qui vivent en Allemagne a maintenant été consacré en droit interne par les lois électorales (Wahlgesetze) des divers Länder conformément à la directive du Conseil 94/80/EC du 19 décembre 1994. Les premières élections auxquelles ont participé des citoyens de l'Union ont été les élections aux assemblées municipales du Land de Berlin, le 22 octobre 1995. Depuis lors, les citoyens de l'Union ont participé à toutes les élections locales allemandes.

En outre, l'Accord de coalition du 20 octobre 1998 a également envisagé, pour promouvoir la politique d'intégration globale du Gouvernement fédéral, l'introduction d'un droit général de vote lors des élections locales, lequel - par dérogation à la troisième phrase du paragraphe 1 de l'article 28 de la Loi fondamentale - serait également accordé aux ressortissants d'États non membres de l'UE. L'Accord prévoit ce qui suit :

“Pour promouvoir l'intégration, les étrangers qui vivent en Allemagne, mais qui ne sont pas ressortissants d'un État Membre de l'UE auront également le droit de vote lors des élections de districts et des élections locales.”

Pour que ce projet puisse être mené à bien, la Loi fondamentale devra être modifiée. Aux termes du paragraphe 2 de l'article 79 de la Constitution, l'amendement de la Loi fondamentale doit être approuvé par les deux tiers des membres du Parlement fédéral et les deux tiers des membres du Conseil fédéral. Étant donné ces règles de majorité qualifiée, un tel projet ne peut être adopté que s'il existe un accord entre les différentes parties. Par conséquent, le gouvernement ne pourra pas entamer la procédure législative de réforme du droit de vote des étrangers aux élections locales tant qu'un large accord sur ce point n'apparaisse au Parlement et au Conseil fédéral.

Article 26

Protection contre la discrimination

1. Initiatives contre la xénophobie

La lutte contre la xénophobie - et en particulier contre les slogans et les attaques des extrémistes de droite - constitue une priorité pour le Gouvernement fédéral comme l'a recommandé le Comité des droits de l'homme dans ses observations finales sur le quatrième rapport périodique (CCPR/C/79/Add. 73, paragraphe 12). Pendant la période considérée, il a été élaboré un grand nombre de programmes de lutte contre l'extrémisme de droite, la xénophobie et l'intolérance, qui sont actuellement en cours. Le Gouvernement fédéral continuera sans relâche de poursuivre ses approches. Conscient de ce que ce phénomène est motivé par la multiplicité des liens de cause à effet, toute une série de mesures de prévention et de répression ont été adoptées à différents niveaux pour s'attaquer aux problèmes que sont l'extrémisme de droite et l'intolérance.

a) Renforcement de la société civile et du courage civil

En Allemagne, l'immense majorité des citoyens appuient la démocratie et la primauté du droit et s'opposent à la violence et à l'extrémisme, et il existe beaucoup d'associations de la société civile vouées à la réalisation de ces objectifs. Ces initiatives sont importantes et doivent être applaudies et appuyées. Toutefois, la propagation continue des idées extrémistes et la multiplication des attaques des groupes extrémistes de droite montrent que la lutte contre ce phénomène doit être menée sur un front toujours plus large.

Pour combattre l'extrémisme de droite et la xénophobie, il a été ouvert au budget fédéral de 2001 seulement 100 millions de DM de crédits supplémentaires : 30 millions de DM pour un programme devant être exploité dans le cadre du Plan de la Fédération pour l'enfance et la jeunesse intitulé "Mesures de lutte contre la violence et l'extrémisme de droite", 5 millions de DM pour la promotion de projets pilotes de services consultatifs, de formation et d'appui aux initiatives contre l'extrémisme de droite dans les nouveaux Länder , et 5 millions de DM pour la promotion de projets pilotes d'aide et de conseils aux victimes et aux victimes potentielles des actes criminels, des actes de violence commis par les groupes extrémistes de droite dans les nouveaux Länder . En outre, il a été constitué un fonds de 10 millions de DM pour indemniser les victimes et fournir une assistance d'urgence à la suite d'attaques extrémistes de droite. En 2002, le Gouvernement fédéral a alloué 10 millions d'euros pour l'exécution du programme intitulé "Entimon ‑ tous ensemble contre la violence et l'extrémisme de droite”, 10 millions d'euros pour le programme “CIVITAS ‑ initiative contre l'extrémisme de droite dans les nouveaux Länder ”, et 2,5 millions d'euros pour l'indemnisation des victimes de la violence des groupes extrémistes de droite.

Par ailleurs, le Gouvernement fédéral a, en juin 2001, doublé - pour le porter à 50 millions de DM - le montant des fonds alloués chaque année au titre du Fonds social européen pour le programme “XENOS ‑ vivre et travailler dans un environnement divers”, qui a pour but d'appuyer les projets tendant à renforcer la compréhension mutuelle entre les jeunes et les adultes allemands et étrangers ainsi qu'à les aider à apprendre et à travailler ensemble. Ces projets auront également pour objectif de renforcer les structures de la société civile et d'appuyer la coopération et les partenariats locaux. Sur une période de trois ans, le Gouvernement fédéral doit allouer environ 75 millions d'euros, au titre du Fonds social européen, pour la réalisation des projets relevant du programme “XENOS”. En principe, les Länder et les autorités locales font l'apport d'un co-financement équivalent (indépendamment des programmes mentionnés aux paragraphes 330 et 339, voir les paragraphes 362 et suivants).

Le Gouvernement fédéral, en coopération avec les organisations existantes, appuie les initiatives locales et l'action des particuliers résolus à éliminer toutes les formes d'extrémisme et de xénophobie et à lancer à cette fin au plan national une “Alliance pour la démocratie et la tolérance et contre l'extrémisme et la violence”. L'Alliance s'emploie à mobiliser une action pour s'attaquer, au moyen de différentes idées, à la violence motivée par la xénophobie, le racisme et l'antisémitisme, notamment en établissant des contacts et en encourageant les échanges d'informations et de données d'expérience. Depuis sa fondation officielle, le 23 mai 2000, avec pour devis “Regarder ‑ Agir ‑ Aider”, l'Alliance s'est gagnée un large appui. À ce jour, plus de 900 initiatives se sont jointes à l'Alliance. Les programmes Entimon, CIVITAS et XENOS ‑ regroupés dans le programme d'action “Les jeunes pour la tolérance et la démocratie et contre l'extrémisme de droite, la xénophobie et l'antisémitisme” ‑ font également partie de l'Alliance.

b) Promotion de l'intégration

Le Gouvernement allemand considère que promouvoir l'intégration de tous les immigrants qui ont légalement leur résidence permanente en Allemagne peut beaucoup contribuer à prévenir la xénophobie, le racisme et la discrimination. L'un des piliers de la politique d'intégration a été la réforme de la Loi sur la nationalité qui est entrée en vigueur le 1 er janvier 2000 (voir à ce sujet les paragraphes 379 et suivants ci-dessous, ainsi que les paragraphes 298 et suivants). La reconnaissance du jus soli , selon lequel, depuis le 1 er  janvier 2000, les enfants nés en Allemagne de parents étrangers acquièrent la nationalité allemande à la naissance pour autant que certaines conditions soient remplies, et les assouplissements apportés au régime de naturalisation par la réforme, comme le raccourcissement de la période de résidence requise, encouragent l'intégration des étrangers qui vivent régulièrement en Allemagne pour des périodes de longue durée. Cela est un intérêt public étant donné qu'aucun État démocratique ne peut admettre, à long terme, qu'une large part de sa population se voit refuser pendant des générations les droits et les obligations qui sont ceux d'un citoyen.

La Loi sur l'immigration (Zuwanderungsgesetz), qui doit entrer en vigueur le 1 er  janvier 2003, a établi pour la première fois le principe de l'intégration des étrangers qui ont légalement leur résidence en Allemagne et défini les mesures adoptées pour faciliter l'intégration

des étrangers. Dans ce contexte, la loi prévoit l'organisation d'un ensemble minimum de programmes d'intégration, qui revêtent notamment la forme de cours de langue et de cours consacrés à l'ordre juridique, à la culture et à l'histoire de l'Allemagne.

Pendant la période considérée, le Gouvernement fédéral a également appuyé différentes mesures, comme des programmes d'action tendant à améliorer les possibilités de formation pour les immigrants et ainsi améliorer de façon durable la formation de ces groupes cibles dans les écoles et les établissements de formation professionnelle de base et de recyclage et faciliter l'intégration des migrants en Allemagne en encourageant les initiatives de la société civile. En outre, le Gouvernement fédéral appuie différentes mesures de mise en oeuvre des dispositions légales tendant à encourager l'intégration et des mesures concernant la co-détermination politique des immigrants qui vivent légalement en Allemagne pour des périodes de longue durée.

Conformément à la directive de l'UE relative à l'application du principe d'égalité de traitement sans égard à la race ou à l'origine ethnique, la législation allemande contient des dispositions interdisant en particulier la discrimination fondée sur la race ou l'origine ethnique dans le domaine de l'emploi ou dans l'accès aux biens ou aux services publics, y compris les logements offerts au public. En outre, il est prévu de mettre en place un régime de sanction et d'indemnisation, d'alléger la charge de la preuve et de mettre en place des organismes indépendants pour aider les victimes d'actes de discrimination sans devoir recourir à la procédure de plainte. L'on envisage actuellement de mettre en oeuvre ces mesures au moyen d'une Loi civile contre la discrimination (Zivilrechtliches Antidiskriminierungsgesetz) et une Loi contre la discrimination en matière d'emploi (Arbeitsrechtliches Antidiskriminierungsgesetz).

c) Lutte contre les comportements xénophobes et leur environnement

Par ailleurs, il importe de mettre en oeuvre des approches de prévention et de répression pour influencer de façon décisive les personnes qui manifestent un comportement xénophobe et leur environnement. En particulier, les moyens que la loi a mis à la disposition de l'État doivent être utilisés systématiquement pour contrer la propagation d'idéologies extrémistes de droite dans un cadre organisationnel. Les mesures qui peuvent être utilisées pour interdire des associations et des partis et l'utilisation qui en a été faite ont déjà été décrites ci-dessus (voir les paragraphes 256 et suivants et 259 et suivants). La Fédération et les Länder ont maintes fois usé de leur faculté d'interdire des associations, en particulier dans le cadre d'organisations extrémistes de droite (voir sur ce point le paragraphe 261 ci-dessus).

Il faut s'attaquer activement au racisme et à la xénophobie dans tous les domaines de la société, y compris au sein de la famille et au travail, ainsi que dans le domaine de la formation et des carrières. La Loi portant réforme du Code de travail (Gesetz zur Reform des Betriebsverfassungsgesetzes), qui est entrée en vigueur le 28 juillet 2001, prévoit une combinaison de mesures afin de contribuer à l'intégration des travailleurs étrangers au niveau de l'entreprise et à éliminer les comportements xénophobes au travail. Ainsi, par exemple, l'employeur a le devoir de présenter des rapports sur l'intégration des travailleurs étrangers de l'entreprise, et les conseils de travailleurs ont le droit de demander l'application de mesures tendant à éliminer le racisme et la xénophobie. En outre, en cas de manifestations de xénophobie et de racisme, le conseil des travailleurs peut refuser d'approuver des mesures individuelles concernant le personnel, par exemple en matière de nomination et de promotion, et peut exiger le licenciement par l'entreprise de tout travailleur ayant un comportement xénophobe.

Par ailleurs, l'État est tenu de ne pas abandonner ceux qui ont été attirés par les mouvements extrémistes. Aussi le Ministère fédéral de l'intérieur a-t-il mis au point un "Programme d'abandon pour les extrémistes de droite" administré par le Bureau fédéral pour la protection de la Constitution. Ce programme, lancé à la mi-avril 2001, a pour but d'affaiblir et de saper les pouvoirs extrémistes de droite en "extirpant" leurs dirigeants et en encourageant ceux de leurs membres qui n'y sont pas appliqués à fond à les abandonner. Pendant la période active de ce programme qui est sur le point de commencer, le Bureau fédéral pour la protection de la Constitution a l'intention de se mettre en rapport avec les dirigeants et militants de ces mouvements dont il y a lieu de penser qu'ils pourraient se montrer disposés à les abandonner. En outre, le Bureau fédéral, dans le cadre de la partie dite passive du programme, a ouvert une ligne téléphonique que peuvent utiliser les extrémistes de droite qui souhaitent abandonner le mouvement ou les membres de leur famille. Le personnel spécialement formé du Bureau fédéral peut alors fournir une assistance, dans chaque cas spécifique, des conseils sur la façon d'abandonner l'environnement social précédent (“aides-toi et je t'aiderai”). À cette fin, une assistance peut être offerte par exemple, en coopération avec les services de l'emploi et de la protection sociale et les services sociaux, pour trouver un travail et un logement.

Les nouveaux médias, et en particulier internet, sont de plus en plus largement utilisés par les extrémistes de droite pour se faire connaître ainsi qu'à des fins de mobilisation et d'agitation. Alors que, selon les chiffres du Bureau fédéral pour la protection de la Constitution, il y avait en 1999 330 sites de mouvements extrémistes de droite, il y en avait à peu près 800 en 2000 et 1 300 à la fin de 2001. L'affichage d'un site qui contient des propos ou des symboles d'organisations inconstitutionnelles constituant une incitation à la haine est passible des sanctions prévues aux articles 86, 86a et 130 du Code pénal (voir ci-dessus les paragraphes 244 et suivants).

d) Éducation en matière des droits de l'homme

Lorsqu'il a examiné le quatrième rapport périodique, le Comité des droits de l'homme a considéré qu'il fallait continuer de développer l'éducation en matière des droits de l'homme et inclure des cours à ce sujet dans les écoles de police et de défense et les établissements scolaires (CCPR/C/79/Add.73, paragraphe 12). Pendant la période considérée, un grand nombre d'initiatives ont été prises dans ce domaine.

Éducation en matière des droits de l'homme dans la police

L'un des principaux objectifs de la formation qui leur est dispensée est de préparer le agents et officiers de police à respecter les droits de l'homme et les libertés fondamentales dans leurs rapports avec les citoyens et à réprimer les infractions pénales de caractère xénophobe. Comme il s'agit d'un système fédéral, il y a des différences entre les Länder et la Fédération, mais les programmes de formation et d'étude, aussi bien ceux de la Fédération que de tous les Länder , comportent un solide contenu théorique et pratique qui encourage les agents et officiers de police à promouvoir l'ordre fondamental libre et démocratique, le respect d'exercice des droits de l'homme et à traiter avec tolérance les citoyens allemands ou d'origine étrangère. L'éducation en matière des droits de l'homme est un élément essentiel faisant partie intégrante de beaucoup de matières, en particulier le droit constitutionnel, le droit de l'État et le droit administratif, l'éthique, les sciences sociales, la politique, la communication et la rhétorique et la psychologie.

Les matières ci-après, par exemple, sont obligatoires dans le plan de formation de la Rhénanie-Palatinat sous le thème d'examen du droit de l'État et du droit constitutionnel :

signification générale des libertés fondamentales et des droits de l'homme dans leur relation avec le monopole du pouvoir dont l'État est investi,

évolution historique des droits de l'homme et des libertés fondamentales,

statut et signification des libertés fondamentales et des droits de l'homme en droit national et en droit international.

Les sujets susmentionnés sont en principe parmi les matières obligatoires, et ce afin de faire en sorte que tous les agents et officiers de police reçoivent une formation appropriée, l'objectif étant de dispenser un enseignement complet sur ces questions d'actualité pour susciter une prise de conscience accrue de leur importance et faire en sorte que le travail de la police, surtout lorsqu'elle doit intervenir, soit strictement orienté vers le respect des droits de l'homme. À cette fin, l'on s'efforce de développer des habitudes comme assumer la responsabilité d'autrui, la coopération et le travail d'équipe, la compréhension, la tolérance des influences culturelles étrangères et l'éducation pour la paix.

L'enseignement théorique est complété par une formation spéciale en matière de communication et de comportement. Avec l'aide des services psychologiques, il est organisé de plus en plus de programmes comportementaux afin d'accroître les aptitudes à la communication sociale, c'est-à-dire aux relations avec les citoyens, et à la gestion du stress et des conflits. L'on apprend également aux agents et officiers de police de faire preuve de tolérance, du point de vue juridique, social et psychologique, dans leurs rapports avec des citoyens d'origine étrangère.

Depuis plusieurs années, la formation continue en cours d'emploi met l'accent sur les problèmes des minorités ethniques et la nécessité d'éliminer le racisme et la xénophobie. Par exemple, il est offert des séries de séminaires spéciaux sur des sujets comme "La police et les étrangers", "L'extrémisme politique", "La xénophobie" et "L'antisémitisme" pour enseigner en particulier des systèmes de valeurs et comportements d'autres cultures. Il est organisé pour compléter ces séminaires des visites sur le terrain et des échanges périodiques d'idée et de données d'expérience avec des représentants d'organisations de migrants et des conseils consultatifs étrangers. Le Land de Berlin, par exemple, offre un séminaire de formation intitulé "Les étrangers à Berlin" qu'ont suivi depuis 1994 plus de 4 000 agents de police. En Saxe ‑Anhalt, 2 800 agents de police ont, depuis 2001, suivi des programmes de formation sur le thème "La police et les étrangers" et "La police et les droits de l'homme".

Il y a lieu de souligner beaucoup d'autres initiatives, parmi lesquelles l'ont peut citer à titre d'exemple :

la publication d'une directive intitulée "La mission de la police dans une société démocratique : votre unité est-elle un défenseur des droits de l'homme ?”,

l'organisation d'une "Semaine des droits de l'homme", du 30 octobre au 3 novembre 2001, à l'occasion du cinquantième anniversaire de la signature de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, sur le thème "La police et les droits de l'homme",

des visites de groupes d'étudiants d'un collège administratif (spécialisé dans la formation de la police) de l'Organisation de la défense des droits de l'homme "Association pour la prévention de la torture" (Genève, 2001),

l'organisation de séminaires de formation et de réunions entre immigrants et la police dans le contexte du projet "La police dans une société pluriculturelle" réalisé sous l'égide de la Commission européenne, et

l'appui fourni au programme "La police et les droits de l'homme après l'an 2000" de la Direction générale pour les droits de l'homme du Conseil de l'Europe, qui a désigné un officier de police du Land de Hesse pour développer la formation de la police en matière des droits de l'homme.

Enfin, des étrangers sont nommés dans les services de police allemands pour que les agents et officiers de police apprennent à mieux connaître les autres cultures, et en particulier les cultures non européennes. Dans le Schleswig ‑Holstein, par exemple, les étrangers ont représenté 4,3% et 3,9% des nominations dans la police du Land en 2000 et 2001 respectivement.

2) Éducation en matière des droits de l'homme dans les forces armées fédérales

L'éducation en matière des droits de l'homme est intégrée au concept de gestion interne (Innere Führung), qui est à la base du système de gestion des forces armées fédérales. Ce concept est décrit dans les règlements de service applicables. Les quelque 70 écoles et académies des forces armées fédérales prennent cette tâche au sérieux et dispensent dans le cadre des programmes de formation une éducation détaillée concernant les droits de l'homme.

Le concept de gestion interne tend à atténuer les tensions résultant d'une combinaison, d'une part, des droits individuels d'un citoyen libre, et des obligations militaires de l'autre. Il s'applique à la fois à l'enseignement des normes qui doivent régir le comportement des militaires et à l'organisation et à l'intégration des forces armées à l'État et à la société conformément à un ordre interne fondé sur la dignité humaine et le respect de l'ordre juridique. La formation du personnel de gestion des forces armées tend en particulier à inculquer les principes que doit respecter le citoyen en uniforme. L'on s'emploie en outre à enseigner aux militaires les droits de l'homme et les libertés fondamentales et leur validité dans le contexte du programme consacré aux droits inaliénables de la personne humaine et à la dignité humaine. Surtout dans un environnement militaire, il surgit de bien de façons, des questions touchant la place qui doit être réservée aux droits de l'homme et à la dignité humaine, de sorte que ces aspects sont traités de nombreuses façons différentes dans les programmes d'étude et les cours de formation continue.

En matière d'encadrement, les principes éthiques qui découlent des droits de l'homme et de la dignité humaine constituent la base de toute activité responsable de la part des militaires. Ce principes sont discutés en particulier dans le contexte de la formation du personnel militaire d'encadrement. Dans le contexte des programmes d'étude sur la gestion interne – caractérisés par des références fréquentes au droit – les questions liées aux droits de l'homme et à la dignité humaine sont enseignées et discutées par des maîtres de conférence et des professeurs de droit. Dans le contexte de la formation au droit international humanitaire, l'on peut enseigner le concept de protection de la dignité humaine et des droits de l'homme, qui doivent également être garantis en temps de guerre.

Le Centre de gestion interne fournit par ses études et son enseignement des services d'appui à l'ensemble des forces armées. L'on peut citer comme exemple les séminaires et cours de formation ci-après :

Le cours de formation intitulé "La formation politique" met l'accent sur la protection des droits de l'homme et de la dignité humaine en tant que l'un des principaux facteurs de motivation d'un service dans les forces armées.

La xénophobie et le problème des réfugiés sont traités dans des jeux de gestion.

Les violations des droits de l'homme commises par la Wehrmacht pendant la Seconde guerre mondiale sont discutées dans le cours de formation intitulé "Formation politique et historique".

Les cours de formation intitulés "Les droits de l'homme et l'éducation politique du personnel enseignant" et "Les qualités de chefs/jeunes officiers" sont axés sur les principes que doivent guider l'activité responsable des militaires et enseignent les valeurs et les normes découlant des droits fondamentaux de la personne humaine.

Les droits de l'homme sont l'un des principaux thèmes traités dans le cours de formation intitulé "La politique sécuritaire et le droit international".

La dignité humaine est une matière expliquée de façon concrète dans d'autres cours de formation pluridisciplinaire du Centre de la gestion interne. Ainsi, sont évoquées notamment les questions comme "Les femmes dans les forces armées", "La protection contre les harcèlements sexuels au travail", "Éducation et formation pour la tolérance" et "L'éducation interculturelle".

Une place particulière est faite également aux droits de l'homme à l'Académie de gestion des forces armées fédérales, qui est la principale école de formation des officiers d'État majeur. Ce sujet est enseigné, séparément ou dans le contexte de tous les cours de formation pertinents, et les cours offerts tendent également à renforcer les aptitudes à la communication des officiers et à enseigner à ces derniers la dimension éthique de leur mission. En outre, les participants aux cours de formation sont encouragés à se familiariser avec d'autres pays et cultures pour pouvoir mieux les comprendre, en particulier au moyen de réunions spécifiques. Ainsi, 70% des cours de formation et séminaires organisés par l'Académie de gestion des forces armées fédérales sont ouverts à des officiers étrangers. La proportion de participants étrangers est la plus élevée (30%) pour le cours national (pour les États de l'OTAN) des officiers d'État majeur de l'armée et de la marine et atteint près de 70% dans le cours international (États non membres de l'OTAN).

3) Enseignement des droits de l'homme parmi les élèves et les jeunes

Selon l'ordre constitutionnel de la République fédérale d'Allemagne, ce sont les Länder qui sont responsables des écoles. La Conférence des Ministres de la culture et de l'éducation des Länder a souligné à maintes reprises, dans le contexte de divers accords et recommandations, que l'éducation en matière des droits de l'homme est un aspect essentiel de la mission d'éducation des écoles. À ce propos, il y a lieu de citer en particulier "L'Europe pédagogue" (version du 7 décembre 1990 de l'arrêté du 8 juin 1978 de la Conférence des Ministres de la culture et de l'éducation), "Formation et éducation pluriculturelles dans les écoles" (arrêté du 25 octobre 1996) et "Un monde unique/le tiers monde dans l'enseignement et à l'école" (arrêté du 20 mars 1998). En 2000, la Conférence des Ministres de la culture et de l'éducation a remanié la "Recommandation visant à promouvoir l'éducation en matière des droits de l'homme dans les écoles" (version du 14 décembre 2000 de l'arrêté du 4 décembre 1980). Les arrêtés de la Conférence des Ministres de la culture et de l'éducation, qui sont adoptés à l'unanimité, reflètent l'engagement pris par chaque Land d'incorporer la matière dont il s'agit aux programmes d'études et de l'enseigner.

Dans la Recommandation visant à promouvoir l'éducation en matière des droits de l'homme, les Ministres de la culture et de l'éducation ont souligné que le respect des droits de l'homme dépend non seulement de l'action de l'État mais, plus directement, de l'attitude et de l'engagement individuels. Il s'agit là d'un objectif auquel les écoles doivent contribuer en formant comme il convient la personnalité des élèves. Les constitutions et les lois scolaires de tous les Länder stipulent que l'éducation en matière des droits de l'homme est l'un des objectifs suprêmes de l'éducation. Celle-ci intéresse par conséquent l'ensemble du système d'enseignement et du personnel enseignant. Les droits de l'homme doivent être enseignés dans tous les domaines de l'activité scolaire, et les matières concernant les sciences sociales ont une contribution particulière à apporter à cet égard.

L'éducation en matière des droits de l'homme a pour but d'enseigner et de faire comprendre :

l'évolution historique des droits de l'homme et leur signification actuelle;

la signification des libertés fondamentales et des droits de l'homme aussi bien pour l'individu que pour les principes régissant l'action de la communauté;

la corrélation entre les libertés et droits individuels et les droits sociaux fondamentaux consacrés dans la Loi fondamentale et dans les conventions internationales;

les idées différentes qui existent au sujet des droits de l'homme dans les divers systèmes politiques et cultures et la façon différente dont ils sont garantis;

la signification fondamentale des droits de l'homme pour le développement de l'État constitutionnel moderne;

la nécessité de tenir compte de la protection des droits individuels de la personne humaine en droit international;

l'importance de la coopération internationale pour la jouissance des droits de l'homme et l'instauration de la paix;

les raisons sociales, économiques et politiques des violations des droits de l'homme qui peuvent être constatées partout dans le monde et leur étendue.

L'éducation en matière des droits de l'homme a également pour but d'éveiller les élèves et de les former de manière que, plus tard, ils les défendent et s'opposent à leur violation dans leur appui personnel comme dans leur environnement politique. Il faut préparer les élèves à faire du respect des droits de l'homme un étalon important pour évaluer la situation politique dans leur propre pays et à l'étranger, ce qui suppose également une volonté de défendre les droits d'autrui. Par conséquent, l'éducation en matière des droits de l'homme ne consiste pas simplement en un enseignement et doit englober une dimension psychologique et active. Les élèves doivent apprendre par l'expérience à respecter tous les êtres humains dans leur comportement quotidien à l'école.

Ainsi, les projets et les activités réalisés tant en classe qu'à l'extérieur revêtent une importance croissante pour l'enseignement de la coexistence pacifique. À ce propos, l'on peut citer comme exemple les projets ci-après, dans le cadre desquels les élèves et les maîtres, ensemble et parfois en coopération avec les parents et la société civile ainsi qu'avec les institutions de protection de la jeunesse, découvrent ce que chacun peut faire pour défendre les droits de l'homme non seulement dans leur environnement personnel mais pour l'humanité tout entière. Ces projets et mesures sont des initiatives des Länder et sont financés conjointement par ces derniers et par la Fédération :

programmes d'action à long terme comme "L'école sans racisme", etc.;

projets comme "L'étranger donne l'exemple";

invitation par les ministères à organiser des journées et des semaines d'action à l'occasion d'anniversaires, commémorations, de manifestations d'actualité, etc.;

journées et semaines consacrées à des thèmes d'actualité;

programmes d'échanges internationaux de maîtres et d'élèves;

jumelages internationaux d'école;

promotion de concours et octroi de prix scolaires pour la paix;

renforcement des leçons d'intégration afin d'améliorer la situation des handicapés;

encouragement des contacts entre élèves ayant une langue maternelle différente;

renforcement du travail social dans les écoles;

enseignement de modèles de règlement des différends entre élèves;

distribution de guides pour les enseignants et de matériels pédagogiques pour les élèves;

création d'organismes périscolaires pour promouvoir le travail en faveur des élèves des écoles et des jeunes en général;

coopération avec différentes institutions et associations périscolaires.

Les activités du Ministère fédéral de l'éducation et de la recherche sont axées sur l'éducation en tant que moyen de promouvoir la démocratie et – par une approche de prévention primaire – sur l'élimination de l'extrémisme de droite, de la xénophobie et de l'antisémitisme. En outre, elles sont conçues de manière à combattre la violence en général et à enseigner les stratégies de règlement des conflits. Globalement, le ministère à, en 2002, alloué environ 4,2 millions d'euros aux huit programmes et aux différents projets réalisés dans ce domaine. Deux projets méritent d'être relevés en raison de leur caractère novateur et de l'ampleur du soutien financier apporté par la Fédération :

Le programme type BLK “Apprendre et vivre la démocratie” : Le programme pilote d'une durée de cinq ans, lancé en 2002 par la Commission fédérale ‑ Länder pour la planification de l'éducation et la promotion de la recherche, a pour but de relier systématiquement l'enseignement scolaire à la promotion d'une culture démocratique au quotidien par le biais des rapports sociaux entre les écoles et leurs élèves. Ce programme est fondé sur une approche de prévention primaire de l'extrémisme de droite, de la xénophobie et de la violence. En outre, le programme tend à rendre les données d'expérience déjà disponibles plus transparentes et plus accessibles, à rassembler en réseau les différentes initiatives et mesures adoptées, à faciliter la coopération, à mettre en place un système régional de conseils et d'appui et à appuyer les recherches sur son impact. Un montant de 12,8 millions d'euros, apporté à parts égales par la Fédération et les Länder , a été alloué pour les cinq années d'exécution du programme.

“Élaboration et mise à l'essai d'un nouveau programme de formation contre la violence, la xénophobie, l'extrémisme politique et l'antisémitisme” : Ce projet est axé sur des évaluations comparatives de la qualité de l'enseignement social dans les écoles et sur l'élaboration d'un cours par correspondance de 15 modules de formation de base et de formation continue scolaire et périscolaire. Il doit être réalisé une évaluation comparative, qui soit répétée après un intervalle de deux ans, de 150 à 175 écoles de dix Länder pour évaluer la qualité de leur enseignement social, notamment sur des points comme la lutte contre la xénophobie et l'extrémisme politique ou la tolérance de la violence et d'actes violents. Un autre programme modulaire de formation, composé d'un cours par correspondance et de séminaires ainsi que d'une formation en cours d'emploi des enseignants, doit être élaboré sur le thème "La qualité de l'enseignement social à l'école". Ces cours par correspondance constituent une possibilité de formation continue pour prévenir la violence et la xénophobie à long terme.

L'attachement aux valeurs démocratiques et humaines fondamentales, le respect des droits de l'homme, la solidarité et la tolérance, ainsi que le rejet de toute forme d'extrémisme et de xénophobie, sont naturellement aussi certains des principes de base du travail avec les jeunes et sont reflétés dans divers types de mesures, comme l'éducation civique classique, les services sociaux et des interventions concrètes dans le cadre de la politique sociale. C'est ainsi par exemple que, dans le contexte du plan en faveur de l'enfance et de la jeunesse de la Fédération, le Gouvernement fédéral alloue chaque année jusqu'à 10,9 millions d'euros pour appuyer le programme d'éducation civique.

La promotion de l'apprentissage interculturel et les efforts tendant à intégrer les jeunes étrangers qui vivent en Allemagne sont importants aussi et jouent depuis longtemps un rôle majeur dans les aspects pratiques quotidiens du travail avec les jeunes.

L'expérience acquise jusqu'à présent montre à quel point est important et nécessaire pour les autorités compétentes ainsi que les organisations indépendantes des Länder et les autorités locales de mettre au point et d'appliquer des approches de travail préventif avec les enfants et les jeunes pour renforcer à la fois les valeurs démocratiques de base et, concrètement, le sens civique des jeunes qui rejettent l'intolérance, la discrimination et les positions extrémistes et xénophobes et pour aider dans tous les domaines les jeunes de caractère difficile qui risquent d'acquérir un comportement xénophobe ou extrémiste ou qui ont déjà appelé l'attention.

Dans son programme d'action intitulé "Les jeunes pour la tolérance et la démocratie et contre l'extrémisme de droite, la xénophobie et l'antisémitisme", lancé en 2000, le Gouvernement fédéral a mis un accent particulier sur cet aspect. Ce programme vise en effet à renforcer durablement la culture démocratique chez les jeunes. La mise en réseau des différents projets et initiatives in situ , en coopération avec les écoles, joue un rôle de plus en plus important à cet égard.

Le programme d'action qui fait partie de l'"Alliance pour la démocratie et la tolérance et contre l'extrémisme et la violence" comporte trois sous-programmes : XENOS, ENTIMON, CIVITAS.

Avec le programme “XENOS – vivre et travailler dans un environnement divers”, le Gouvernement fédéral s'est orienté dans une direction nouvelle. Ce programme combine des mesures d'intégration au marché du travail et des activités contre la xénophobie et le racisme, l’idée étant que des caractéristiques comme la tolérance et le respect des étrangers constituent des qualifications importantes au travail. Le programme s'adresse aux entreprises et associations, aux syndicats, aux autorités locales et aux organisations et écoles de formation professionnelle. Son but est de lier les approches tendant à combattre l'exclusion et la discrimination sur le marché du travail et dans la société à des interventions contre la xénophobie, le racisme et l'intolérance. Ce programme est exécuté partout où les gens travaillent et apprennent ensemble. Il est fourni un appui aux projets locaux, constitué des équipes mobiles de conseillers et d'experts, créé des groupes d'initiative et organisé des tables rondes, et il est fourni en outre des services d'orientation professionnelle pour renforcer les structures de la société civile et le sens civique. Le programme, qui fait une large place à la prévention, est axé en particulier sur les jeunes et les personnes qui sont en contact avec les jeunes à l'école, dans les établissements de formation professionnelle ou au travail. Il appuie des mesures et projets visant à promouvoir un comportement démocratique et tolérant ainsi qu'un dialogue interculturel et à créer des expériences positives entre jeunes d'origines diverses. L'on s'efforce également d'encourager la mobilité et de contribuer ainsi à améliorer la compréhension mutuelle. Les jeunes sont incités à prendre clairement position, dans leur environnement, contre les opinions xénophobes et racistes et à développer leurs propres activités créatrices pour promouvoir la coexistence pacifique entre les différentes

cultures. Le Gouvernement fédéral a alloué au total approximativement 75 millions d'euros provenant du Fonds social européen au programme XENOS, ce à quoi il faut ajouter un co-financement national à peu près équivalent.

La section du programme intitulé “ENTIMON – ensemble contre la violence et l'extrémisme de droite”, met en relief, en particulier, l'importance considérable que revêt, parmi les principaux objectifs de l'éducation et de l'enseignement, le renforcement de la culture démocratique chez les

jeunes pour contribuer à l'élimination de l'extrémisme de droite, de la xénophobie et de l'antisémitisme. Les modalités d'exécution de cette section du programme sont principalement les suivantes :

réseaux locaux;

apprentissage interculturel;

éducation civique;

projets de recherche.

Une attention particulière est accordée à la création parmi les jeunes d'une nouvelle culture de la participation et en particulier au développement des services offerts au groupe cible, c'est-à-dire les élèves des écoles secondaires et des écoles de formation professionnelle, notamment en améliorant directement, sur place, l'éducation dispensée aux enfants et aux jeunes. Cette section du programme est exécutée en étroite coopération avec les Länder et les autorités locales, le Centre fédéral pour l'éducation civique, les organisations nationales centrales d'éducation des jeunes et les organisations qui ont l'expérience du travail avec les jeunes migrants. Jusqu'à présent, le Gouvernement fédéral a alloué 25 millions d'euros au programme ENTIMON.

Le troisième volet du programme d'action, intitulé “CIVITAS – initiative contre l'extrémisme de droits dans les nouveaux Länder ”, a été lancé avec un financement de 10 millions d'euros par an. Il tend à promouvoir des projets pilotes de conseils et de formation et à appuyer les initiatives dirigées contre l'extrémisme de droite, ainsi que des projets pilotes d'aide et de conseils aux victimes et victimes potentielles des infractions pénales imputables à des éléments extrémistes de droite afin de renforcer dans les nouveaux Länder une culture démocratique orientée vers la communauté. Ce volet du programme appuie les projets et initiatives en faveur des droits de l'homme et s'adresse particulièrement aux victimes et victimes potentielles de la violence extrémiste de droite. Il est axé sur la reconnaissance, la protection et le respect des minorités ethniques, culturelles et sociales. Le programme appuie les efforts d'auto-assistance de la société civile, dont dépend le succès, aujourd'hui comme à l'avenir, des initiatives de démocratisation locales. Le renforcement du professionnalisme des services de conseils visé par le programme CIVITAS et l'appui aux initiatives locales de la société civile peuvent beaucoup contribuer à consolider la culture démocratique et à combattre l'extrémisme de droite, la xénophobie et l'antisémitisme.

e) Autres mesures adoptées concernant les jeunes

Les projets de prévention de la criminalité jouent aussi un rôle important dans les efforts déployés pour réprimer les infractions pénales et actes de violence imputables à des sentiments extrémistes, xénophobes et antisémites. Ces projets tendent à s'attaquer aux causes de la délinquance et à réduire les possibilités d'infraction. Dans ce contexte, la Fondation intitulée "Forum allemand pour la prévention de la délinquance" (DFK) créée en juin 2000est appelée à jouer un rôle majeur dans la prévention de l'extrémisme de droite, la xénophobie, l'antisémitisme et la violence. La Fédération, les Länder , les autorités locales, communautés religieuses, les associations, des donateurs privés et d'autres forces sociales collaborent, sous l'égide du DFK, à tous les aspects de la prévention des infractions pénales. Cet organe est chargé de mettre au point des stratégies globales à assise communautaire pour s'attaquer aux causes de la délinquance, établir des contacts avec tous les acteurs intéressés et de promouvoir et d'entreprendre des activités de prévention. Le DFK sera l'organisme central de formation et de services de prévention de la délinquance en Allemagne et un point focal pour l'échange d'opinions et de données d'expérience au plan international. Le Gouvernement fédéral a chargé le DFK d'exécuter un projet intitulé “Prévention primaire de la violence contre les membres de groupes et les jeunes en particulier”, afin d'éliminer les crimes violents dirigés contre une personne ou un symbole exclusivement du fait de la race, de la religion, de l'origine ethnique, du sexe, de l'orientation politique ou sexuelle, de l'âge ou de l'incapacité mentale ou physique de la victime ou du détenteur du symbole en question (ce qu'il convient d'appeler la "criminalité de la haine"). Il est prévu d'élaborer une série de documents qui déboucheront sur la formulation de propositions d'activités de prévention.

En outre, pendant la période considérée, le Gouvernement fédéral a appuyé les plans et projets ci-après pour promouvoir le respect des droits de l'homme et la solidarité et la tolérance ainsi qu'éliminer les penchants extrémistes, racistes et xénophobes chez les jeunes :

Centre d'information, documentation et d'action contre la xénophobie (CIDA), qui appuie au plan national, les associations et initiatives de jeunes contre le racisme et la xénophobie.

Création de réseaux interculturels de travail social avec les jeunes, dans leur environnement, pour faciliter l'intégration des jeunes migrants.

Projets d'appui aux initiatives, projets et réseaux antiracistes afin d'éliminer l'extrémisme de droite, en particulier dans les Länder de l'est, et de promouvoir les initiatives de la société civile, comme le réseau de groupes de travail contre l'extrémisme de droite.

Projets tendant à renforcer par l'entremise des médias la compétence des jeunes afin de décourager les penchants extrémistes de droite (“Rock von Rechts” [le rocher de droite], “Kahlschlag” [démolition], “Verlorene Kinder” [les enfants perdus], Netgeneration, etc.).

Programme de formation des associations pour enseigner aux dirigeants des organisations de jeunesse, travailleurs sociaux et enseignants à combattre les activités extrémistes de droite et la xénophobie chez les jeunes.

Projets sélectionnés d'appui à la culture et à l'éducation comme "Le rap au service du courage", l'élaboration d'enregistrements vidéos consacrés aux préjugés et à la violence, "La violence est muette", exposition de livres et distribution de brochures.

Mesures ciblées au plan international, par exemple appui aux projets de solidarité avec les étrangers, organisation de voyages du souvenir dans les camps de concentration, tournées cyclistes sur le thème "Rien n'a été oublié – halte au racisme", publication de revues destinées à promouvoir la compréhension mutuelle comme "Comprendre l'inconnu", "Comprendre l'islam", "Comprendre le judaïsme" et "Comprendre le bouddhisme".

Activités périscolaires d'éducation antifasciste et antiraciste.

Activités interculturelles tendant à susciter un esprit cosmopolite et la tolérance afin de freiner le développement de la xénophobie et du racisme.

Promotion de projets de modification du comportement au moyen, par exemple, d'une formation à la médiation et à l'anti-agressivité.

Activités sportives (par exemple football de quartier pour promouvoir la tolérance).

Création d'un organisme chargé de coordonner les projets tendant à éliminer la violence parmi les jeunes à l'occasion des matches de football.

Recherche ciblée afin de compléter l'étude intitulée "Les attitudes des jeunes et des jeunes adultes" menée par l'Institut allemand pour la jeunesse dans le cadre du groupe de thème "L'extrémisme, la xénophobie et la violence".

Création d'un service chargé d'exécuter un projet intitulé "L'extrémisme de droite et la xénophobie : défis pour la politique de la jeunesse et l'enseignement", qui a pour but d'évaluer les approches conceptuelles préventives dans l'enseignement.

Participation au Programme d'action de l'UE intitulé "La jeunesse", qui a pour but de contribuer à renforcer la confiance mutuelle, à renforcer la démocratie et la tolérance, à encourager les jeunes à coopérer et à être solidaires les uns et les autres, programme qui aurait par conséquent une importance considérable pour la cohésion et le développement futur de l'Union. Ce programme d'action combine et élargit les antérieurs programmes de l'UE intitulés "La jeunesse pour l'Europe" et "Services volontaires européens". Il est officiellement opérationnel depuis sa publication, le 18 mai 2000. Il est axé sur les échanges européens de jeunes et les services volontaires européens. Dans ce contexte, la Commission et le Conseil de l'UE se sont expressément fixés pour objectif de promouvoir une contribution active des jeunes à l'intégration européenne grâce à leur participation à des programmes d'échanges internationaux au sein de la Communauté ou avec des pays tiers pour faire bien comprendre la diversité culturelle de l'Europe et ses valeurs fondamentales communes et encourager ainsi le respect des droits de l'homme et la lutte contre le racisme, l'antisémitisme et la xénophobie.

D ‑a ‑s ‑h : campagne dans toute l'Europe pour encourager les jeunes et associations de jeunes à utiliser internet pour se rassembler et constituer un forum d'action contre l'intolérance et la discrimination et pour la tolérance et la diversité.

2. Loi civile contre la discrimination

L'on s'efforce actuellement, en République fédérale d'Allemagne, à promulguer une Loi civile antidiscrimination pour prévenir les pratiques discriminatoires, y compris entre particuliers. Aux termes de la législation actuellement en vigueur, les dispositions du droit civil général peuvent être invoquées en cas de discrimination manifeste. Le Gouvernement fédéral a néanmoins décidé, conformément au point no IX.19 de l'Accord de coalition du 20 octobre 1998, de renforcer la protection contre la discrimination et de promulguer une loi de droit privé de plus large portée.

Une Loi sur la prévention de la discrimination en droit civil (Gesetz zur Verhinderung von Diskriminierungen im Zivilrecht) est actuellement en cours d'élaboration. Elle a principalement pour but de renforcer les dispositions du droit civil de manière à interdire de façon incontournable la discrimination sur la base de la race ou de l'origine ethnique dans toutes les transactions juridiques de caractère civil. Le projet comporte des dispositions expresses interdisant la discrimination et contient un certain nombre de mesures de droit civil qui permettront de faire en sorte que l'interdiction de la discrimination soit effectivement respectée à long terme. Il importe en effet de veiller à ce que nul ne soit passé dans des situations désavantagées, dans les transactions juridiques de caractère civil, du fait de sa race ou de son origine ethnique, par exemple pour ce qui est de l'accès aux biens et aux services publics, y compris le logement. Tel est notamment le cas pour la conclusion, la résiliation et l'élaboration des contrats d'achat, de location, de louage de services et de représentation et d'autres services offerts au public, pour les services médicaux et les services d'éducation ou dans le domaine de l'emploi.

Pour permettre aux intéressés de faire valoir plus facilement leurs droits, cette interdiction de la discrimination doit aller de pair avec une modification des règles concernant la charge de la preuve et l'établissement de recours de droit civil que puissent invoquer les associations qui ont pour vocation de défendre les intérêts de groupes de personnes pouvant faire l'objet d'une discrimination pour que le tribunal ordonne la cessation du comportement discriminatoire attaqué. Indépendamment de ces recours, chacun doit également avoir le droit d'être traité d'une façon qui ne soit pas inéquitable ou, si le traitement inéquitable ne peut pas être réparé par d'autres moyens, d'exiger une indemnisation pécuniaire appropriée. Le projet de loi tendant à prévenir la discrimination en matière civile donnera simultanément effet à la directive du Conseil 2000/43/EC du 29 juin 2000 sur l'application du principe de l'égalité de traitement entre les personnes, quelle que soit leur origine raciale ou ethnique.

3. Partenariats déclarés pour couples du même sexe

Depuis le 1 er août 2001, les couples du même sexe ont la possibilité de créer un "partenariat déclaré du même sexe". La Loi tendant à mettre fin à la discrimination contre les communautés du même sexe et les partenariats du même sexe (Gesetz zur Beendigung der Diskriminierung gleichgeschlechtlicher Gemeinschaften : Lebenspartnerschaften) datée du 16 février 2001 (Journal officiel fédéral, Partie I, p. 266) comporte un certain nombre de points majeurs :

création de partenariats du même sexe, en principe pour toute la vie;

possibilité de choisir un nom commun;

obligation alimentaire réciproque tant que subsiste le partenariat;

jouissance parentale commune, c'est-à-dire pouvoir de décision partagé pour toutes les questions concernant la vie quotidienne d'un enfant;

droit légal de succession du partenaire survivant du même sexe;

annulation d'un partenariat déclaré du même sexe par un tribunal de la famille;

conséquences de la séparation de partenaires du même sexe, par exemple en ce qui concerne l'obligation alimentaire.

Les partenariats déclarés du même sexe sont également reconnus dans d'autres domaines, comme l'assurance maladie ou le droit de refuser de témoigner.

4. Réserves formulées lors de la ratification du Protocole facultatif

Lorsqu'elle a ratifié le Protocole facultatif au Pacte international relatif aux droits civils et politiques (Journal officiel fédéral, 1994, Partie I, p. 311), la République fédérale d'Allemagne a formulé la réserve suivante :

“La République fédérale d'Allemagne formule une réserve concernant l'alinéa (a) du paragraphe 2 de l'article 5, à savoir que la compétence du Comité ne s'étendrait pas aux communications ... c) alléguant une violation de l'article 26 du Pacte si la violation en question porte sur des droits autres que ceux qui sont garantis par le Pacte.”

Dans ses observations finales du 8 novembre 1996 (CCPR/C/79/Add. 73, paragraphe 14), le Comité des droits de l'homme a regretté que l'Allemagne ait mis une réserve concernant l'alinéa (c). Le Gouvernement fédéral a pris acte de la suggestion du Comité et l'examinera lorsque le douzième Protocole facultatif à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui contient une interdiction générale de la discrimination, aura été ratifié.

Article 27

Protection des minorités

Le Gouvernement de la République fédérale d'Allemagne regrette qu'il ait été créé l'impression que les droits garantis par l'article 27 du Pacte ne sont accordés en Allemagne qu'à des minorités spécifiques (paragraphe 13 des observations finales, CCPR/C/79/ dd. 73). En Allemagne, la Loi fondamentale protège les droits visés à l'article 27 du Pacte de toutes les minorités ethniques, religieuses et linguistiques. Toutes les minorités, au sens de l'article 27, peuvent utiliser leur propre langue, promouvoir leur propre culture et pratiquer leur propre religion. L'Allemagne n'exerce aucune pression en vue de forcer une assimilation. Il existe par conséquent un grand nombre de groupes et d'associations organisés par les minorités ethniques, religieuses ou linguistiques qui

s'emploient à préserver leur identité culturelle, le libre exercice de leur confession, leurs coutumes et leur langue propre. Aucune entrave n'est mise aux activités de ces groupes ou associations, et l'État appuie financièrement nombre de leurs projets.

L'Allemagne fait des efforts considérables pour améliorer la vie des immigrants, et beaucoup de projets culturels en faveur des immigrants sont appuyés dans le cadre des mesures de promotion de la culture ou au moyen des fonds alloués à la politique d'intégration. De plus en plus, les écoles offrent un enseignement dans la langue du pays d'origine des élèves pour améliorer les résultats scolaires, l'intégration et l'égalité des chances (voir également les paragraphes 295 et suivants).

La politique concernant les étrangers a parmi ses principaux objectifs l'intégration des étrangers qui vivent légalement en Allemagne pour des périodes de longue durée. Le but de la politique d'intégration est de permettre aux étrangers qui résident en Allemagne de vivre dans l'égalité de droit et de permettre une participation aussi large que possible dans tous les domaines de la vie sociale. En ce qui concerne en particulier l'apprentissage de la langue, l'enseignement scolaire et la formation professionnelle ainsi que l'accès à l'emploi, la Fédération, les Länder et les autorités locales, ainsi que les organisations caritatives et les associations de jeunesse, appuient les mesures tendant à accroître la participation des étrangers et en particulier des jeunes étrangers.

En 2001, il a été ouvert au budget du Ministère fédéral du travail et des affaires sociales plus de 100 millions de DM (51,2 millions d'euros) pour promouvoir l'intégration linguistique, professionnelle et sociale des travailleurs étrangers et de leurs familles. Le ministère a dépensé depuis 1968 près de 1,9 milliard de DM aux mesures d'intégration qui sont venues compléter les mesures de formation professionnelle et d'intégration au marché du travail du Service fédéral de l'emploi, ainsi que les mesures d'intégration des autres ministères fédéraux, des Länder , des autorités locales et des organisations privées. L'on s'emploie en particulier à promouvoir la fourniture de services sociaux étrangers, d'organiser des cours d'allemand, de faciliter l'intégration professionnelle et en particulier celle des jeunes pendant la transition entre l'école et le travail, de promouvoir l'intégration sociale et professionnelle des étrangères, d'améliorer la coexistence entre les Allemands et les étrangers, de diffuser des informations et de former des agents multiplicateurs.

À l'heure actuelle, la politique de l'Allemagne concernant les étrangers traverse une période de profonde mutation (voir également les paragraphes 332 et 335). La majorité des Allemands considère aujourd'hui l'immigration comme un élément positif et l'accepte comme un facteur devant être tenu pour acquis. La contribution positive des immigrants au développement économique et social de l'Allemagne est au coeur du débat. Ce changement du climat social en général ne manquera pas d'avoir un impact positif sur la situation des immigrants en Allemagne. La Loi sur l'immigration, qui a été réformée à cet égard, doit entrer en vigueur le 1 er janvier 2003, et elle constituera le fondement juridique de la nouvelle vision de l'Allemagne en tant que pays d'immigration. Outre que les procédures ont été simplifiées et que les dispositions applicables à l'entrée et au séjour en Allemagne ont été précisées, cette loi a également mis en place un mécanisme coordonné d'intégration des immigrants. La Loi sur l'immigration peut être considérée comme le symbole de l'infléchissement de la politique allemande concernant les étrangers et l'immigration.

En tant que premier pas vers une politique plus moderne dans ce domaine, la Loi portant réforme de la Loi sur la nationalité (Gesetz zur Reform des Staatsangehörigkeitsrechts) a été promulguée le 23 juillet 1999. Ses principales dispositions, qui sont entrées en vigueur le 1 er  janvier 2000, ont introduit le principe territorial ( ius soli ) pour la première fois en droit allemand. Conformément à la nouvelle loi, les enfants de parents étrangers nés en Allemagne acquièrent la nationalité allemande à la naissance si l'un des parents a eu sa résidence habituelle en Allemagne sans interruption pendant huit ans au moins et a un permis de séjour de durée limitée ou l'a eu pendant trois ans. Une disposition transitoire d'une durée limitée à un an a été prévue pour les enfants de moins de 10 ans qui sont nés avant l'entrée en vigueur de la loi de réforme et qui remplissaient à la naissance les conditions requises pour acquérir la nationalité allemande par l'effet du jus soli . Si l'enfant acquiert également une nationalité autre que la nationalité allemande, et hormis les exceptions légales qui autorisent la double nationalité, il doit choisir avant 23 ans entre la nationalité allemande et la nationalité étrangère acquise par filiation de l'autre parent.

Les étrangers adultes peuvent désormais se faire naturaliser après avoir eu leur résidence habituelle légale en Allemagne pendant huit ans, contre quinze ans précédemment. Le principe selon lequel il y a lieu d'éviter la double nationalité est maintenu. Les exceptions à ce principe, cependant, sont élargies. C'est ainsi que la renonciation à la nationalité d'origine n'est pas requise en vue d'une naturalisation si cela entraînerait des inconvénients considérables, spécialement sur le plan économique ou patrimonial. Les victimes de persécutions politiques admises au statut de réfugié ne seront plus tenues, à l'avenir, de renoncer à leur nationalité précédente. En outre, dans le cas des personnes qui ont la nationalité d'un État membre de l'Union européenne, la naturalisation est autorisée tout en conservant la nationalité d'origine sur la base de la réciprocité, c'est-à-dire si l'État d'origine accepte la double nationalité dans le cas de naturalisation d'Allemands.

Indépendamment des droits consacrés à l'article 27 du Pacte pour toutes minorités ethniques, religieuses ou linguistiques (que l'Allemagne garantis à toutes les minorités), l'Allemagne a également assumé des obligations spéciales en matière de protection de ses minorités nationales. C'est dans ce but que l'Allemagne a ratifié la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales conclue en 1997 sous l'égide du Conseil de l'Europe. La Convention-cadre s'applique aux Danois ayant la nationalité allemande, aux Sorb ou aux Frisiens vivant en Allemagne ainsi qu'aux Sint et aux Roms. La Convention est entrée en vigueur à l'égard de l'Allemagne le 1 er février 1998. Si l'Allemagne ne considère ces groupes comme des minorités nationales que si, entre autres, ils sont installés dans une zone traditionnelle en République fédérale d'Allemagne et si leurs membres ont la nationalité allemande, ces conditions préalables sont conformes aux normes du droit international appliqué partout en Europe.

La Charte européenne des langues nationales ou minoritaires adoptée sous l'égide du Conseil de l'Europe, qui a pour but de protéger et de promouvoir les langues traditionnelles régionales ou minoritaires parlées dans un État contractant en tant qu'élément menacé du patrimoine culturel européen, a également été ratifiée par l'Allemagne en septembre 1998 et est entrée en vigueur à son égard le 1 er janvier 1999. Les langues minoritaires protégées sont notamment le danois, le haut et bas sorb, le frisien et le frisien de Saterland, le romani des Sints et des Roms allemands et le bas allemand en tant que langue régionale. L'alinéa (a) ii) de l'article premier de la Charte stipule expressément que les langues des immigrants ne relèvent pas de ce type de protection. Par conséquent, la République fédérale d'Allemagne est au nombre des 13 – sur 43 au total – États membres du Conseil d'Europe qui ont ratifié à la fois la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales et la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires.

La République fédérale d'Allemagne présume que l'article 27 du Pacte ne garantit pas le droit des minorités faisant l'objet d'autres mesures de protection d'être également reconnues comme minorités nationales. Il y a lieu de se référer à ce propos au rapport final sur les travaux préparatoires concernant le Pacte en date du 1 er juillet 1955 (A/2929), où l'on trouve le passage suivant :

“Les dispositions relatives aux droits des minorités ne devraient pas, a-t-on pensé, être appliquées de telle manière qu'elles puissent encourager la création de minorités nouvelles ou entraver le processus d'assimilation, car la chose risquait d'être dangereuse pour l'unité de l'État. Étant donné les éclaircissements donnés, il a été jugé superflu de spécifier dans l'article que 'ces droits ne peuvent être interprétés comme permettant à aucun groupe installé sur le territoire d'un État, notamment en vertu de ses lois d'immigration, de former au sein de cet État des communautés distinctes qui pourraient porter atteinte à son unité nationale ou à sa sécurité'" (A/2929, p. 63, paragraphe 186).

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