Nations Unies

C ED/C/SEN/Q/1

Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées

Distr. générale

16 novembre 2016

Original: français

Anglais, espagnol et français seulement

Comité des disparitions forcées

Liste de points concernant le rapport soumis par le Sénégal en application du paragraphe 1 de l’article 29 de la Convention *

I.Renseignements d’ordre général

1.Indiquer si l’État partie envisage de déclarer, conformément aux dispositions des articles 31 et 32 de la Convention, qu’il reconnaît la compétence du Comité pour recevoir et examiner des communications individuelles ou interétatiques.

2.Donner des informations sur le mandat du Comité sénégalais des droits de l’homme ainsi que sur les mesures prises pour le mettre en pleine conformité avec les Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris). Indiquer au Comité quels sont le rôle, les compétences et les modalités d’intervention en matière de disparitions forcées du Comité sénégalais des droits de l’homme et de l’Observateur national des lieux de privation de liberté. Indiquer si des mesures ont été prises afin que ces deux institutions disposent de ressources suffisantes et d’un cadre normatif adéquat pour assurer leur indépendance. Expliquer également quelles sont les relations entre le Comité sénégalais des droits de l’homme et le Conseil national consultatif.

II.Définition et criminalisation de la disparition forcée (art. 1er à 7)

3.Fournir au Comité des renseignements à jour sur l’état d’avancement de la révision du Code pénal, invoquée aux paragraphes 21 et 24 du rapport (CED/C/SEN/1), qui prévoit notamment d’incriminer de manière autonome l’acte de disparition forcée. Fournir également des renseignements sur le contenu de ce projet de révision, notamment en ce qui concerne les mesures visées à l’article 3 de la Convention, les circonstances aggravantes et atténuantes spécifiques, et les peines telles que prévues par l’article 7 de la Convention. Clarifier l’apparente contradiction entre le projet de loi modifiant le Code pénal qui prévoit des dispositions sur la responsabilité du supérieur hiérarchique et le paragraphe 97 du rapport de l’État partie qui indique : « Ériger la responsabilité pénale du supérieur hiérarchique en un mode de responsabilité distinct n’est ni nécessaire ni souhaitable. Associer au crime de disparition forcée (ou aux infractions connexes) l’énumération réalisée par la Convention des modes de responsabilité compromettrait la cohérence du droit pénal sénégalais » (art. 1, 2, 4, 6 et 7).

4.Concernant les informations données aux paragraphes 35 et 36 du rapport, préciser les dispositions de droit interne garantissant qu’il ne peut être dérogé à l’interdiction de la disparition forcée, de sorte qu’aucune circonstance exceptionnelle, quelle qu’elle soit, qu’il s’agisse de l’état de guerre ou de menace de guerre, d’instabilité politique intérieure ou de tout autre état d’exception, ne puisse être invoquée pour justifier la disparition forcée. Donner des indications précises sur les limites prévues par la Constitution en application desquelles les droits de l’homme et les libertés peuvent être restreints, ainsi que sur les circonstances dans lesquelles ils peuvent l’être et sur la durée d’application des restrictions. Fournir également des informations sur les garanties juridiques des personnes privées de liberté et préciser leurs droits indérogeables. Donner à cet égard les dispositions détaillées de droit interne qui consacrent la garantie d’habeas corpus comme indiqué au paragraphe 1 du rapport (art. 1, 17, 18 et 20).

5.Eu égard aux informations faisant état de l’enlèvement, en juillet 2015 dans la région de Sédhiou, de douze hommes par un groupe armé non identifié et de leur libération quatre jours plus tard après le paiement d’une rançon, ainsi que d’enlèvements commis par des groupes armés dans le contexte du conflit en Casamance, donner des renseignements sur les efforts déployés pour enquêter sur les agissements définis à l’article 2 de la Convention qui sont l’œuvre de personnes ou de groupes de personnes agissant sans l’autorisation, l’appui ou l’acquiescement de l’État, et pour traduire les responsables en justice (art. 3).

6.Indiquer comment les termes de l’article 431-2 (6) du Code pénal sénégalais « la pratique massive et systématique d’exécutions sommaires, d’enlèvement de personnes suivi de leur disparition » sont conformes aux éléments constitutifs du crime de disparition forcée comme crime contre l’humanité conformément aux règles de droit international applicable (art. 5).

7.En l’état actuel du droit sénégalais, clarifier si, conformément à l’article 6 de la Convention, l’État partie tient pénalement responsable quiconque commet, ordonne ou commandite une disparition forcée, compte tenu de la disposition 106 du Code pénal qui prescrit une peine de dégradation civique « [l]orsqu’un fonctionnaire public, un agent, un préposé ou un membre du Gouvernement aura ordonné ou fait quelque acte arbitraire, ou attentatoire soit à la liberté individuelle, soit aux droits civiques d’un ou de plusieurs citoyens, soit à la Constitution » et qui prévoit une exemption s’il « justifie qu’il a agi par ordre de ses supérieurs » (art. 6).

III.Procédure judiciaire et coopération dans les affaires pénales (art. 8 à 15)

8.Il est indiqué au paragraphe 124 du rapport que la nature continue d’une infraction n’est jamais précisée expressément dans les textes législatifs et qu’il revient aux juridictions de se prononcer sur ce point. À cet égard, indiquer comment il est veillé à ce qu’aucune interprétation ne puisse avoir un effet négatif sur la reconnaissance du caractère continu de la disparition forcée. Concernant les informations données par l’État partie au paragraphe 125 de son rapport sur la révision du Code pénal en cours, préciser, au cas où ce délit ferait l’objet d’un délai de prescription, si l’extrême gravité ainsi que le caractère continu du crime de disparition forcée seront pris en considération. Préciser également quelles sont les garanties pour que la prescription ne s’applique pas aux actions pénales, civiles ou administratives engagées par les victimes dans le cadre du droit à un recours effectif (art. 8).

9.Aux paragraphes 134 et 142 de son rapport, l’État partie invoque le régime de la compétence extraterritoriale prévue à l’article 669 du Code de procédure pénale dans les cas de disparition forcée en tant que crime contre l’humanité. Indiquer s’il est envisagé d’adopter une disposition expresse similaire pour tous les autres cas de disparition forcée conformément à l’article 11 de la Convention. Au regard de cette même disposition nationale, préciser si l’État partie est compétent lorsque la victime est l’un de ses ressortissants mais ne réside pas sur le territoire du Sénégal (art. 9 et 11).

10.S’agissant du paragraphe 154 du rapport, fournir de plus amples informations sur la procédure et les mesures mises en place pour examiner rapidement et impartialement les allégations de disparition forcée, enquêter de manière approfondie et impartiale, et déterminer le sort des personnes disparues. Indiquer quelles sont les autorités en charge des enquêtes portant sur des cas de disparition forcée, y compris ceux commis par le personnel des forces armées dans le cadre de l’exercice de leur fonction, notamment lorsqu’ils sont perpétrés contre d’autres militaires. Préciser également s’il existe la possibilité d’ouvrir des enquêtes d’office, dans l’affirmative expliquer la procédure prévue et préciser quelles sont les personnes en charge. Eu égard aux informations reçues par le Comité sur l’amnistie prononcée pour toutes les infractions commises lors du conflit en Casamance, préciser si celle-ci entrave l’ouverture d’enquêtes et de poursuites, l’imposition de sanctions à l’encontre des responsables et la réparation des victimes de disparitions forcées commises tant par les forces gouvernementales que par des groupes armés non étatiques (art. 2, 3, 11, 12 et 24).

11.Au regard des paragraphes 168 et 169 du rapport, préciser quelles dispositions de droit interne prévoient des mécanismes pour assurer la protection efficace du plaignant, des témoins, des proches de la personne disparue, et de leurs défenseurs, ainsi que de ceux qui participent à l’enquête pour disparition forcée, contre tout mauvais traitement ou toute intimidation en raison de la plainte déposée ou de toute déposition faite. Donner des renseignements détaillés à ce sujet. Compte tenu des renseignements fournis aux paragraphes 173 à 177 du rapport, indiquer si, dans le cas où la personne soupçonnée d’avoir commis une infraction de disparition forcée ou d’avoir été impliquée dans une telle infraction est un agent de l’État, le droit interne prévoit la suspension de l’intéressé de ses fonctions officielles pendant toute la durée de l’enquête. Expliquer les mécanismes procéduraux qui ont été mis en place pour permettre d’écarter de l’enquête sur une disparition forcée toute force civile ou militaire chargée d’assurer la sécurité ou le maintien de l’ordre en cas d’implication d’un ou de plusieurs de ses membres dans l’affaire (art. 12).

12.Préciser si l’État partie compte réviser la loi no 71-77 du 28 décembre 1971 relative à l’extradition des étrangers applicable au Sénégal afin d’ériger le crime de disparition forcée, tel que défini à l’article 2 de la Convention, au nombre des infractions donnant lieu à extradition dans tout traité conclu avec d’autres États. Dans la mesure où le paragraphe 1 de l’article 5 de ladite loi précise que l’extradition n’est pas accordée lorsque l’infraction a un caractère politique ou lorsqu’il résulte des circonstances que l’extradition est demandée dans un but politique, indiquer quelle dispositions l’État partie prendra pour que la disparition forcée ne soit jamais considérée, aux fins de l’extradition, comme une infraction politique ou une infraction inspirée par des mobiles politiques. Expliquer si, en l’absence d’un traité d’extradition, la Convention est considérée comme le fondement juridique de l’extradition (art. 13).

IV.Mesures de prévention des disparitions forcées (art. 16 à 23)

13.Fournir des informations supplémentaires sur les mécanismes et les critères appliqués dans le cadre des procédures d’expulsion, de refoulement, de reconduite ou d’extradition, destinés à évaluer et à vérifier le risque qu’une personne court d’être victime d’une disparition forcée. Indiquer s’il est possible de faire appel d’une décision d’expulsion ou de refoulement. Enfin, indiquer si l’État partie envisage d’inscrire expressément dans sa législation interne l’interdiction d’expulser, de refouler, de remettre ou d’extrader une personne lorsqu’il y a des motifs sérieux de croire qu’elle risque d’être victime d’une disparition forcée (art.16).

14.Concernant les informations fournies au paragraphe 221 du rapport, préciser quelles dispositions du droit sénégalais garantissent que « toute privation de liberté s’effectue dans des lieux officiellement reconnus, réglementés et contrôlés ». Eu égard aux informations fournies aux paragraphes 245 à 251 du rapport, préciser si tous les lieux de privation de liberté, y compris ceux qui dépendent de l’armée, font l’objet de visites inopinées par les autorités et institutions compétentes habilitées par la loi. Préciser si les organisations nongouvernementales sont habilitées à visiter les lieux de privation de liberté. Préciser également si les autorités consulaires sont habilitées à visiter les lieux de privation de liberté, le rapport ne comportant pas d’informations à ce sujet (art.17).

15.Concernant les informations fournies aux paragraphes 148 et 224 du rapport, indiquer quelles sont les mesures mises en place dans le cadre de la révision du Code pénal et du Code de procédure pénale pour garantir à toutes les personnes placées en garde à vue l’accès à un avocat dès la privation de liberté ainsi que pour ramener à quarante-huit heures maximum la durée de la garde à vue. Indiquer également l’état d’avancement de ces réformes. Eu égard à la garantie d’entretenir des contacts avec l’extérieur, expliquer en détail les dispositions légales ou réglementaires qui confèrent à toute personne privée de liberté le droit de communiquer et de recevoir des visites de sa famille, son conseil ou toute autre personne de son choix. Eu égard aux informations fournies au paragraphe 141 du rapport, indiquer s’il est prévu de consacrer le droit des détenus étrangers de communiquer avec leurs autorités consulaires(art.11 et 17).

16.Préciser si tous les éléments mentionnés au paragraphe 3 de l’article 17 de la Convention figurent dans les registres officiels de détention quels que soient la nature et l’emplacement du lieu de privation de liberté. Donner des exemples sur les cas de mauvaise tenue des registres officiels et les suites disciplinaires et/ou judiciaires qui ont été données. À ce titre, indiquer s’il y a eu des plaintes concernant le non-enregistrement d’une privation de liberté ou de toute autre information pertinente dans les registres de privation de liberté et, dans l’affirmative, donner des informations sur les procédures engagées et, le cas échéant, sur les sanctions imposées ainsi que sur les mesures prises pour éviter que de tels faits ne se reproduisent, en indiquant notamment si une formation en la matière a été donnée au personnel concerné (art.17 et 22).

17.Eu égard aux informations fournies sous les articles 17 et 22 du rapport, préciser et détailler les dispositions garantissant les recours possibles pour les personnes privées de liberté et toute personne ayant un intérêt légitime pour contester la légalité de la privation de liberté, notamment des mécanismes confidentiels de plaintes, ainsi que le cas échéant les éventuelles restrictions à un tel droit. Indiquer quelles sont la nature et la durée des restrictions particulières qui s’opposeraient au droit de communiquer avec sa famille, son conseil ou toute autre personne et au droit d’accès à l’information sur les personnes privées de liberté par toute personne ayant un intérêt légitime pour cette information et, le cas échéant, les mesures envisagées pour les supprimer si elles contreviennent au droit international, aux normes applicables et aux objectifs de la Convention. Eu égard aux informations contenues aux paragraphes 319 à 321 du rapport précisant qu’il n’existe pas de recours judiciaire pour les personnes voulant obtenir des informations, préciser si l’Étatpartie envisage d’adopter de telles mesures et dans l’affirmative en préciser les modalités (art.17, 18, 20 et 22).

18.Indiquer où en est le projet de loi sur la création d’une banque des empreintes génétiques mentionné au paragraphe 312 du rapport et préciser s’il existe un calendrier d’adoption. Préciser également quel mécanisme sera mandaté pour superviser cette banque des empreintes génétiques et faire des recherches pour établir la vérité sur le sort des personnes disparues (art.12, 19 et 24).

19.Compte tenu des renseignements fournis aux paragraphes 331 à 335 du rapport, indiquer s’il est envisagé de fournir une formation spécifique, dans les termes énoncés à l’article 23 de la Convention, au personnel militaire ou civil chargé de l’application des lois, au personnel médical, aux agents de la fonction publique et à toute autre personne pouvant intervenir dans la garde ou le traitement de toute personne privée de liberté, notamment les juges et les procureurs (art.23).

V.Mesures de réparation et mesures de protection des enfants contre la disparition forcée (art. 24 et 25)

20.Donner des informations détaillées sur les dispositions du droit interne établissant que « [l]a victime s’entend [...] de toute personne, physique ou morale, qui a subi un préjudice résultant d’une infraction » (par. 340 du rapport). Expliquer si le concept de victime intégré dans le droit interne est considéré comme conforme à la définition de victime au sens large telle que prescrit au paragraphe 1 de l’article 24 de la Convention (art.24).

21.Donner des informations sur la création du « fonds spécial d’aide aux victimes » envisagé au paragraphe 344 du rapport. Préciser si le droit interne prévoit toutes les formes de réparation énoncées au paragraphe 5 de l’article 24 de la Convention pour les personnes physiques ayant subi un préjudice direct du fait d’une disparition forcée. Préciser également s’il est nécessaire d’engager une procédure pénale pour obtenir une indemnisation ou une réparation en cas de disparition forcée. Fournir des informations sur les indemnités et autres mesures de réparation prises dans les cas assimilables à des disparitions forcées (art.24).

22.Eu égard aux informations figurant au paragraphe 345 du rapport, le régime juridique du « disparu » ne remplit pas les conditions requises par le paragraphe 6 de l’article 24 de la Convention ; préciser quelle est la situation légale des proches d’une « personne dont l’absence s’est produite dans des circonstances mettant sa vie en danger, sans que son corps ait pu être retrouvé » et quels sont leurs droits afin de régler les questions financières et celles liées à la protection sociale, au droit de la famille et aux droits de propriété. Indiquer si la publication d’une déclaration d’absence ou de décès conforme aux dispositions du Code de la famille a un effet sur l’obligation qui incombe à l’État partie de poursuivre les investigations jusqu’à ce que le sort de la personne disparue ait été établi (art.24).

23.En ce qui concerne les renseignements donnés au paragraphe 358 du rapport, indiquer si l’État partie compte intégrer dans sa législation interne des mesures pour rechercher et identifier les enfants disparus et pour les restituer à leur famille ainsi que pour prévenir ou réprimer pénalement la falsification, la dissimulation ou la destruction de documents attestant la véritable identité des enfants visés au paragraphe 1, alinéa a, de l’article 25 de la Convention. Eu égard au paragraphe 373 du rapport, indiquer également s’il existe des procédures permettant de réviser et, si nécessaire, d’annuler l’adoption d’un enfant ou son placement, lorsque cette mesure est le résultat d’une disparition forcée.Indiquer également quelles sont les mesures actuelles permettant de détecter l’usage de faux documents relatifs à l’identité de ces enfants (art.25).