Nations Unies

CED/C/SEN/Q/1/Add.1

Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées

Distr. générale

20 février 2017

Original : français

Anglais, espagnol et français seulement

Comité des disparitions forcées

Douzième session

6-17 mars 2017

Point 6 de l’ordre du jour provisoire

Examen des rapports des États parties à la Convention

Liste de points concernant le rapport soumis par le Sénégal en application du paragraphe 1 de l’article 29 de la Convention

Additif

Réponses du Sénégal à la liste de points *

[Date de réception : 14 février 2017]

I.Renseignements d’ordre général

Réponse au paragraphe 1 de la liste de points

1.Le Sénégal soumettra à ses autorités cette question. Dans le cadre des réformes de ses textes, une bienveillante attention sera accordée à la reconnaissance de la compétence du Comité pour recevoir et examiner des communications individuelles ou inter étatiques.

Réponse au paragraphe 2 de la liste de points

2.Pour renforcer le Comité Sénégalais des droits de l’homme, l’État lui a octroyé depuis environ quatre ans maintenant, des locaux modernes à ses frais. Il a aussi augmenté son budget qui, de 36 millions, est passé à 50 millions. Le Comité a pu ainsi faire quelques recrutements pour renforcer ses ressources humaines.

3.Toutefois, la loi portant création de la Commission nationale des Droits de l’homme perçue comme devant renforcer davantage le comité pour le conformer aux Principes de Paris n’est pas encore adoptée. Elle le sera prochainement.

4.Le Comité dispose d’un mandat général en matière de promotion et de protection des droits de l’homme. Il est donc compétent pour se pencher sur des cas de disparition forcée, comme du reste, l’observateur national des lieux de privation de liberté. Celui-ci a obligation de dénoncer auprès des autorités toute disparition forcée qu’il aurait constatée à l’occasion de ses visites.

5.Pour l’Observatoire National des Lieux de privation de liberté, son budget a considérablement évolué au fil des années, depuis sa mise en place en 2012.

6.Pour garantir l’indépendance totale du Mécanisme national de Prévention de la torture (MNPT) par rapport au pouvoir exécutif, l’État du Sénégal, à travers la loi instituant l’Observateur national des Lieux de Privation de Liberté, a pris les mesures suivantes :

•Une autonomie budgétaire : selon l’article 12 du décret no2011-842 du 16 juin 2011 portant application de la loi no2009-13 du 2 mars 2009 instituant l’Observateur national des Lieux de Privation de Liberté, « Les ressources de l’Observateur national des Lieux de Privation de Liberté, prévues dans la loi de finance ainsi que les subventions des collectivités locales ou de toute autre personne physique ou morale, sont versées au compte de dépôt à vue ouvert dans les livres du trésor public ».

•Un mandat de cinq ans non renouvelable : il ne peut être mis fin à ses fonctions avant l’expiration de son mandat qu’en cas de démission ou d’empêchement (art. 2 alinéa 2 de la loi). Il bénéficie durant ce mandat d’immunités et de privilèges.

•Une indépendance par rapport aux autorités étatiques : Dans la limite de ses attributions, l’Observateur national ne reçoit instruction d’aucune autorité (art. 6 de la loi).

•Un pouvoir de recrutement des observateurs délégués et du personnel administratif (art. 3 de la loi).

7.Relativement aux relations entre le Comité Sénégalais des droits de l’homme et le Conseil consultatif national, il y a lieu de préciser que leurs missions sont différentes.

8.Le CSDH est notre institution nationale, régi par les Principes de Paris, alors que le Conseil consultatif national est une structure administrative, étatique chargée de coordonner la préparation des rapports périodiques du Sénégal et d’assurer le suivi des recommandations et décisions des organes des traités régionaux et internationaux. Il assure aussi auprès du Gouvernement, le rôle de conseil et de proposition dans le domaine des droits de l’homme, du droit international humanitaire et de l’action humanitaire.

9.Il assiste, en outre, le Garde des Sceaux, Ministre de la Justice et les Ministres intéressés, par ses avis sur toutes les questions relatives à la défense et la protection des droits de l’homme, le respect et la garantie de leur plein exercice et leur promotion.

10.Le Conseil consultatif national comprend la Primature et tous les Ministères du Sénégal. Il comprend aussi 8 organisations de la Société civile.

II.Définition et incrimination de la disparition forcée (art. 1er à 7)

Réponse au paragraphe 3 de la liste de points

11.En vue de mettre la loi pénale nationale en conformité avec les traités ratifiés par le Sénégal et de sanctionner des faits répréhensibles non encore pris en compte dans la loi actuelle en vigueur, le Sénégal est engagé depuis une décennie dans une réforme de son Code pénal et de son Code de procédure pénale. La Commission de révision a terminé ses travaux. Les deux projets de réforme largement partagés au plan technique, seront soumis aux autorités pour adoption au courant de l’année 2017.

12.Le nouveau code pénal qui sera voté incessamment comporte une sectionIII intitulée “Des disparitions forcées”. Et l’article 153 y relatif dans le nouveau texte dispose : « Constitue une disparition forcée, l’arrestation, la détention, l’enlèvement ou toute autre forme de privation de liberté par des agents de l’État ou par des personnes ou des groupes de personnes qui agissent avec l’autorisation, l’appui ou l’acquiescement de l’État suivi du déni de la reconnaissance de la privation de liberté ou de la dissimilation du sort réservé à la personne disparue ou du lieu où elle se trouve, la soustrayant à la protection de la loi. Toute personne qui ordonne, commandite ou participe à une disparition forcée est passible d’une peine de réclusion ou de détention criminelle de dix ans à vingt ans. Est puni des mêmes peines, le supérieur qui :

•Sachant que des subordonnés placés sous son autorité et son contrôle effectif commettent ou tentent de commettre un crime de disparition forcée;

•S’abstenant de tenir compte d’information qui l’indiquaient clairement;

•Exerçant sa responsabilité et son contrôle effectif sur les activités auxquelles le crime de disparition forcée était lié ;

•N’a pas pris toutes les mesures nécessaires et raisonnables qui étaient en son pouvoir pour empêcher ou réprimer la commission d’une disparition forcée ou pour en référer aux autorités compétentes aux fins d’enquête et de poursuite ;

•L’ordre ou l’instruction émanant d’une autorité publique civile, militaire ou autre ne peut être invoqué pour justifier la disparition forcée ».

13.L’État du Sénégal prend acte qu’il devra dans son projet de loi faire référence à l’article 7 de la Convention en prévoyant les circonstances aggravantes et atténuantes telles que prévues par ladite Convention.

14.Le paragraphe 97 du rapport du Sénégal contient une erreur et est surabondant car la responsabilité du supérieur hiérarchique est bien prise en compte par l’article 153 nouveau relatif à l’incrimination du crime de disparition forcée..

Réponse au paragraphe 4 de la liste de points

15.Dans le projet de réforme, il devra être prévu qu’il ne saurait être dérogé à l’interdiction de la disparition forcée. Qu’aucune circonstance exceptionnelle, quelle qu’elle soit, qu’il s’agisse de l’état de guerre ou de menace de guerre, d’instabilité politique intérieure ou de tout autre état d’exception, ne pourra être invoquée pour justifier la disparition forcée.

16.Le cadre constitutionnel et législatif d’exercice des droits et libertés au Sénégal est la traduction fidèle des principes et règles énoncés dans les conventions internationales relatives aux droits de l’homme, notamment le Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques adopté à New York le 16 décembre 1966 et ratifié en 1978. Par ailleurs, l’article 98 de la Constitution dispose que : «Les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son application par l’autre partie ». Par cette disposition essentielle, la Charte fondamentale sénégalaise consacre la supra légalité des traités dans l’ordonnancement juridique national et reflète conséquemment l’engagement du pays en faveur des droits de l’homme.

17.Cependant, à l’instar des autres pays, des restrictions à l’exercice des libertés publiques sont expressément fixées par la loi pour la sauvegarde de la sécurité nationale, de l’ordre public, de la santé ou de la moralité publique.

18.Par exemple, en matière de liberté d’expression, des limites sont prévues pour le respect des droits et la réputation d’autrui. Mais quoi qu’il en soit, toutes les restrictions sont appréciées souverainement par le pouvoir judiciaire et l’excès de pouvoir des autorités administratives est sanctionné par la Cour suprême qui fait office de juge administratif.

19.Les personnes privées de liberté disposent de toutes les garanties juridiques pour leur défense.

20.Le principe de l’habeas corpus, règle de droit qui garantit à une personne arrêtée une présentation rapide devant un juge afin qu’il statue sur la validité de son arrestation est respecté au Sénégal. En effet, les articles 7 et 9 de la Constitution garantissent la sécurité et la liberté de la personne humaine, et consacrent le principe de la légalité des infractions. Toute atteinte aux libertés et toute entrave volontaire à l’exercice d’une liberté sont ainsi punies par la loi. La défense est également un droit absolu dans tous les états et à tous les degrés de la procédure.

21.En vertu de ces principes, la limitation de l’exercice de la liberté ne peut être ordonnée que par une autorité habilitée par la loi. Le Code de procédure pénale prévoit des mesures strictes concernant la garde à vue ordonnée par l’officier de police judiciaire et contrôlée par le procureur de la République. La détention relève de la compétence du Juge.

22.Au sens des dispositions combinées des articles 55 et suivants du Code de procédure pénale, s’il existe contre une personne des indices graves et concordants de nature à motiver son inculpation, l’officier de police judiciaire doit le conduire devant le procureur de la République ou son délégué dans un délai de 48 heures. Il doit également faire connaître à celle-ci les motifs de sa mise sous garde à vue (art. 55).

23.Le Procureur de la République ou son Délégué, peut s’il l’estime nécessaire, ou obligatoirement, à la demande de la personne gardée à vue ou de son conseil, faire examiner celle-ci par un médecin qu’il désigne (art. 56).

24.Le procès-verbal d’audition de toute personne gardée à vue, doit d’ailleurs mentionner le jour et l’heure à partir de laquelle elle a été placée dans cette position, les motifs de la mise sous garde à vue, la durée des interrogatoires, la durée des repos, ainsi que le jour et l’heure à partir desquels elle a été soit libérée, soit conduite devant le magistrat compétent (art. 57).

25.Dans la pratique, les autorités chargées de l’application des lois rappellent ces garanties aux personnes privées de liberté à toutes les étapes de la procédure. Des sanctions disciplinaires et pénales sont prévues en cas de violation de ces règles. Néanmoins, l’analphabétisme et la pauvreté affectent l’effectivité de ces droits.

26.Ainsi, pour renforcer les garanties juridiques de protection de la liberté, le Sénégal a entrepris deux projets de réforme du Code pénal et du Code de procédure pénale qui prévoient, entre autres mesures favorables à la protection des droits des personnes privées de liberté, la présence d’un avocat pendant les premières vingt-quatre heures de la garde à vue (d’ailleurs, pour anticiper l’adoption de toute la réforme, l’Assemblée nationale vient de voter le 28 octobre 2016, un projet de loi modifiant la loi no65-61 du 21 juillet 1965 portant Code de procédure pénale instituant la présence de l’avocat dès l’interpellation de la personne), l’interdiction totale de la pratique dite de « retour de parquet » ou sa réglementation, la suppression du pouvoir du juge d’instruction du tribunal d’Instance de décerner mandat de dépôt ou d’arrêt, l’aménagement d’une procédure de convocation sur procès-verbal par l’officier de police judiciaire, l’obligation pour le procureur de traduire la personne poursuivie en flagrant délit dans un délai précis sous peine de caducité du mandat de dépôt.

27.La réforme intervenue le 28 octobre 2016 abroge les articles 8 ancien alinéa 2 et 55 de la loi no65-61 du 21 juillet 1965 portant Code de procédure pénale et les remplace par les dispositions suivantes :

Article 55 :« Si, pour les nécessités de l’enquête, l’officier de police judiciaire est amené à garder à sa disposition une ou plusieurs personnes visées aux articles 53 et 54, il ne peut les retenir plus de 24 heures.

S’il existe contre une personne des indices graves et concordants, de nature à motiver son inculpation, l’officier de police judiciaire doit la conduire devant le Procureur de la République ou son délégué, sans pouvoir la garder à sa disposition plus de 48 heures. En cas de difficulté matérielle relative au transfèrement, le Procureur de la République doit être immédiatement averti des conditions et délai de transfèrement.

Dans les deux cas, l’officier de police judiciaire doit immédiatement informer le Procureur de la République, son délégué ou le cas échéant le Président du tribunal d’instance investi des pouvoirs du Procureur de la République de la mesure dont il a l’initiative et faire connaître à la personne retenue les motifs de sa mise sous garde à vue.

Lorsque la personne gardée à vue est un mineur de 13 à 18 ans, l’officier de police judiciaire doit la retenir dans un local spécial isolé des détenus majeurs.

La mesure de garde à vue s’applique sous le contrôle effectif du Procureur de la République, de son délégué ou le cas échéant du Président du tribunal d’instance investi des pouvoirs du Procureur de la République.

Dans tous les lieux où elle s’applique, les officiers de police judiciaire sont astreints à la tenue d’un registre de garde à vue côté et paraphé par le parquet qui est présent à toutes réquisitions des magistrats chargés du contrôle de la mesure.

Le délai prévu à l’alinéa 2 du présent article peut être prorogé d’un nouveau délai de 48 heures par autorisation du procureur de la République, de son délégué ou du juge d’instruction, confirmé par écrit.

Les délais prévus au présent article sont doublés en ce qui concerne les crimes et délits contre la sûreté de l’État ; ils sont également doublés pour tous les crimes et délits en période d’état de siège, d’état d’urgence ou d’application de l’article 52 de la Constitution sans que ces deux causes de doublement puissent se cumuler.

En cas de prolongation de la garde à vue, l’officier de police judiciaire informe la personne gardée à vue des motifs de la prorogation en lui donnant connaissance des dispositions de l’article 56 du présent code.

L’officier de police judiciaire, notifie à la personne gardée à vue, dès la prise de la mesure, son droit de constituer conseil parmi les avocats inscrits au tableau ou admis en stage, Mention de cette formalité est faite obligatoirement sur le procès-verbal d’audition à peine de nullité. Les avocats assistent leurs clients dès leur interpellation, durant l’enquête préliminaire dans les locaux de la police, de la gendarmerie, ou devant le parquet.

A ce stade, aucune lettre de constitution ne peut être exigée de l’Avocat.

L’avocat désigné est contacté par la personne gardée à vue ou toute autre personne par elle désignée ou à défaut, par l’officier de police judiciaire. L’avocat peut communiquer, y compris par téléphone ou par tous autres moyens de communication, s’il ne peut se déplacer dans les meilleurs délais, avec la personne gardée à vue dans des conditions qui garantissent la confidentialité de l’entretien.

Si l’avocat choisi ne peut être contacté, l’officier de police judiciaire en fait la mention au procès-verbal d’audition de la personne gardée à vue.

L’avocat est informé par l’officier de police judiciaire ou, sous le contrôle de celui-ci, par un agent de police judiciaire de la nature de l’infraction recherchée.

A l’issue de l’entretien, l’avocat présente, le cas échéant, des observations écrites qui sont jointes à la procédure.

L’avocat ne peut faire état de cet entretien auprès de quiconque pendant la durée de la garde à vue.

Le Procureur de la République est, dans les meilleurs délais, informé par l’officier de police judiciaire des diligences effectuées dans le cadre de l’application du présent article».

28.À titre illustratif, les nouveaux articles 66 et 67 du projet de réforme du Code de procédure pénale renforcent les garanties relativement aux libertés individuelles.

Article 66 : «L’officier de police judiciaire mentionne au procès-verbal d’audition de toute personne gardée à vue les informations données et les demandes faites en application de l’article précédent, ainsi que la suite qui leur a été réservée.

Les parties du procès-verbal dans lesquelles sont consignées les indications visées à l’alinéa précédent doivent être spécialement émargées par la personne intéressée et, en cas de refus, il en est fait mention.

Ces formalités sont prescrites à peine de nullité du procès-verbal».

Article 67 : «Si le procureur de la République ou son délégué l’estime nécessaire, il peut faire examiner la personne gardée à vue par un médecin qu’il désigne, à n’importe quel moment de la garde à vue.

Il peut également être saisi aux mêmes fins et à n’importe quel moment par la personne gardée à vue sous le couvert de l’officier de police judiciaire par toute personne ou par son conseil ; dans ce cas, il doit ordonner l’examen médical demandé.

Cet examen médical est pratiqué sur les lieux mêmes où la personne est gardée à vue et, lorsqu’il n’est pas demandé d’office par le procureur de la République, aux frais consignés préalablement par la partie requérante. Dans ce dernier cas, l’acte de désignation porte mention de l’existence de cette consignation».

Réponse au paragraphe 5 de la liste de points

29.Concernant l’enlèvement en juillet 2015, dans la région de Sédhiou, de douze (12) hommes démineurs par des groupes armés, cette affaire a été dénouée par de bonnes volontés.

30.Il va de soi que si les agissements similaires étaient portés à la connaissance des autorités, des enquêtes et des poursuites seraient engagées pour traduire les responsables en justice.

Réponse au paragraphe 6 de la liste de points

31.L’article 5 de la Convention dispose : « La pratique généralisée ou systématique de la disparition forcée constitue un crime contre l’humanité, tel qu’il est défini dans le droit international applicable, et entraîne les conséquences prévues par ce droit ».

32.De son côté, l’article 431-2 du Code pénal sénégalais prévoit entre autres que constitue un crime contre l’humanité « la réduction en esclavage ou la pratique massive et systématique d’exécutions sommaires, d’enlèvement de personnes suivi de leur disparition».

33.Il est bien clair que l’article 431-2 (6) du Code pénal sénégalais contient les éléments constitutifs du crime de disparition forcée comme crime contre l’humanité conformément aux règles de droit international applicable, plus précisément, l’article 5 de la Convention.

Réponse au paragraphe 7 de la liste de points

34.Dans le projet de réforme, conformément à l‘article 6 de la Convention, le droit pénal sénégalais tiendra pénalement responsable quiconque commet, ordonne ou commandite une disparition forcée. Du reste, cela est clairement indiqué à la page 7 de notre rapport.

35.En l’état actuel, l’article 106 du code pénal prend en charge ces faits répréhensibles.

36.L’article 6-2 de la Convention prévoit : « Aucun ordre ou instruction émanant d’une autorité publique, civile, militaire ou autre, ne peut être invoqué pour justifier un crime de disparition forcée ». Cet article parait être en contradiction avec l’article 106 du code pénal sur les attentats à la liberté qui prévoient qu’une exemption de peines pour le subordonné qui aura obéit à sa hiérarchie. Il sera tenu compte de cette contradiction et cet article devra être modifié pour prendre en charge le cas spécifique visé par l’article 6-2 de la Convention.

III.Procédure judiciaire et coopération dans les affaires pénales (art. 8 à 15)

Réponse au paragraphe 8 de la liste de points

37.Le parquet veille particulièrement à ce qu’aucune interprétation ne puisse avoir un effet négatif sur la reconnaissance du caractère continu de la disparition forcée.

38.Comme toutes les infractions, un délai de prescription sera indiqué mais le caractère continu du crime est une cause de suspension ou d’interruption du délai de computation. Les actions civiles ou administratives, d’une manière générale, se prescrivent à dix (10) ans et parfois à cinq (5) ans. Il faut distinguer si elles sont introduites ou non en même temps que l’action publique.

Réponse au paragraphe 9 de la liste de points

39.Il est envisagé d’adopter une disposition expresse pour tous les autres cas de disparition forcée conformément à l’article 11 de la Convention.

40.L’article 669 du code de procédure pénale résultant de la loi no2007-5 du 12 février 2007 dispose : « Tout étranger qui, hors du territoire de la république s’est vu reproché d’être l’auteur ou le complice d’un des crimes visés aux articles 431-1 à 431-5 du code pénal [crimes du statut de Rome ], d’un crime ou délit d’attentat à la sûreté de l’État ou de contrefaçon du sceau de l’État, de monnaies nationales ayant cours ou d’actes visés aux articles 279-1 à 279-3, 295-1 du code pénal peut être poursuivi et jugé d’après les dispositions des lois sénégalaises ou applicables au Sénégal, s’il est arrêté au Sénégal ou si une victime réside sur le territoire de la république du Sénégal, ou si le gouvernement obtient son extradition».

41.Cette loi introduit dans le corpus législatif les principes de la compétence universelle et l’imprescriptibilité des crimes du statut de Rome. Il introduit aussi le principe de personnalité selon lequel le droit et les tribunaux sénégalais sont compétents dès lors que l’auteur (personnalité active) ou la victime (personnalité passive) de l’infraction est de nationalité sénégalaise, dans les crimes du statut de Rome et les actes de torture.

42.Mais l’article 669 ne prend pas spécifiquement le crime de disparition forcée s’il n’est pas constitutif de crime contre l’humanité. En conséquence, il faudra bien revoir cet article 669 après l’incrimination du crime de disparition forcée dans les réformes.

43.Dans le projet de réforme du code de procédure pénale, il est prévu un nouvel article715 ainsi libellé : « Tout citoyen sénégalais qui hors du territoire sénégalais, est victime d’un crime ou délit peut saisir les juridictions sénégalaises si les faits n’ont pas donné lieu à une décision définitive ».

44.Cette nouvelle disposition permettra aux juridictions sénégalaises de mener des enquêtes si un sénégalais est victime de disparition forcée à l’étranger.

Réponse au paragraphe 10 de la liste de points

45.En matière d’allégation de disparition forcée, la procédure est la même que pour les autres crimes et délits. Le parquet se saisit de toute infraction à la loi pénale.

46.Les Forces armées, comme indiqué dans le rapport, disposent de mécanismes d’enquête concernant les infractions commises par les militaires.

Réponse au paragraphe 11 de la liste de points

47.Le droit interne sénégalais prévoit la protection contre l’intégrité physique des personnes, que celles-ci soient victimes de disparition forcée ou de toute autre infraction.

48.Le droit interne sénégalais prévoit la suspension avant la traduction devant le conseil de discipline de tout fonctionnaire impliqué dans une infraction, y compris les agents des forces de sécurité. C’est une mesure conservatoire applicable devant toutes les instances disciplinaires.

Réponse au paragraphe 12 de la liste de points

49.L’article 4 de la loi 71-77 du 28 décembre 1971 relative à l’extradition prévoit que « les faits qui peuvent donner lieu à l’extradition sont tous les faits punis des peines criminelles par la loi de l’État référant, les faits punis de peines correctionnelles quand le maximum de la peine encourue est de deux ans ou au-dessus.... »

50.Une fois la disparition forcée incriminée par notre législation, ce crime entrera dans les cas visés par l’article 4 de la loi 71-77 du 28 décembre 1971. Il n’y a nullement besoin alors de réviser cette loi afin d’ériger le crime de disparition forcée au nombre des infractions donnant lieu à extradition dans tout traité conclu avec d’autres États.

51.Conformément à l’article 13-2 de la Convention que dispose : « Le crime de disparition forcée est de plein droit compris au nombre des infractions donnant lieu à extradition dans tout traité d’extradition conclu entre des États parties avant l’entrée en vigueur de la présente Convention ».

52.Dans le même ordre d’idée, l’article 13-4-5 prévoit : « - Tout État partie qui assujettit l’extradition à l’existence d’un traité peut, s’il reçoit une demande d’extradition d’un autre État partie auquel il n’est pas lié par un traité, considérer la présente Convention comme la base juridique de l’extradition en ce qui concerne l’infraction de disparition forcée ; les États parties qui n’assujettissent pas l’extradition à l’existence d’un traité reconnaissent le crime de disparition forcée comme susceptible d’extradition entre eux ».

53.La chambre d’accusation compétente en matière d’extradition, une fois, que le crime de disparition forcée sera incriminé veillera certainement, à ce que la disparition forcée ne soit jamais considérée, aux fins de l’extradition comme une infraction politique ou une infraction inspirée par des mobiles politiques. Cette même chambre d’accusation, en l’espace d’un traité d’extradition, considérera la Convention comme le fondement juridique de l’extradition.

IV.Mesures de prévention des disparitions forcées (art. 16 à 23)

Réponse au paragraphe 13 de la liste de points

54.Il est possible de faire appel d’une décision d’expulsion ou de refoulement devant la Cour suprême. Au Sénégal, il est expressément interdit d’extrader une personne lorsqu’il y a des motifs sérieux de croire qu’elle risque la peine de mort ou d’être victime d’actes de torture.

55.Après l’incrimination du crime de disparition forcée, il y aura lieu d’inscrire expressément l’interdiction.

Réponse au paragraphe 14 de la liste de points

56.Le mandat de l’Observateur national des lieux de privation de liberté s’étend aux dépendances de l’armée.

57.Sur autorisation, les organisations non-gouvernementales sont habilitées à visiter des lieux de privation de liberté.

58.De même les autorités consulaires, si leurs ressortissants sont mis en cause dans des procédures pénales.

Réponse au paragraphe 15 de la liste de points

59.La réforme intervenue le 28 octobre 2016 prévoit la présence de l’avocat dès le début de la garde à vue. Cependant, le délai de la garde à vue est fixé à 48 heures, renouvelable sur autorisation du procureur de la République.

60.Les registres de garde à vue sont côtés et paraphés par le procureur de la République et celui-ci les contrôle périodiquement. Ces registres contiennent l’essentiel des indications prescrites par l’article 17 de la Convention.

61.À notre connaissance nous ne notons pas de plaintes concernant le non-enregistrement d’une privation de liberté.

Réponse au paragraphe 16 de la liste de points

62.Les éléments mentionnés au paragraphe 3 de l’article 17 de la Convention figurent pour l’essentiel dans les registres officiels de détention quels que soient la nature et l’emplacement des lieux de privation de liberté. Nous ne disposons pas d’exemples sur les cas de mauvaise tenue de registres officiels

Réponse au paragraphe 17 de la liste de points

63.Les éléments mentionnés au paragraphe 3 de l’article 17 de la Convention figurent pour l’essentiel dans les registres officiels de détention quels que soient la nature et l’emplacement des lieux de privation de liberté. Nous ne disposons pas d’exemples sur les cas de mauvaise tenue de registres officiels

Réponse au paragraphe 18 de la liste de points

64.Le projet de loi sur la création d’une banque des empreintes génétiques poursuit son chemin et certainement dans l’avenir il sera voté.

Réponse au paragraphe 19 de la liste de points

65.Le personnel militaire ou civil chargé de l’application des lois reçoit une formation en droit de l’homme. Nous prenons acte des dispositions de l’article 23 de la Convention et après l’incrimination du crime de disparition forcée, l’État envisage à ce que la formation soit prise en compte.

V.Mesures de réparation et de protection des enfants contre ladisparition forcée (art. 24 et 25)

Réponse au paragraphe 20 de la liste de points

66.L’article 2 du code de procédure pénale prévoit que « l’action civile en réparation de dommage causé par toute infraction appartient à tous ceux qui ont personnellement souffert du dommage directement causé par l’infraction ».

67.L’article 3 du même code prévoit que « l’action civile est recevable pour tous chefs de dommages aussi bien matériels que corporels ou moraux, qui découlent des faits, objet de la poursuite. La partie lésée peut poursuivre devant la juridiction répressive, outre la réparation du dommage découlant du fait poursuivi, celle de tous autres dommages résultant directement de la faute de l’auteur de l’infraction ».

68.Le concept de victime en droit sénégalais est conforme avec la définition de l’article24 de la Convention.

Réponse au paragraphe 21 de la liste de points

69.Le Sénégal attend l’incrimination dans son droit du crime de disparition forcée pour se pencher sur la nécessité ou non de créer un fonds spécial d’aide aux victimes.

70.Pour le moment, même en l’absence d’incrimination formelle, l’infraction de disparition forcée peut être poursuivie sous d’autres qualifications et il est possible d’engager une procédure pénale pour obtenir une indemnisation ou une réparation, soit de l’État ou de toute autre personne responsable.

Réponse au paragraphe 22 de la liste de points

71.Qu’il y ait déclaration d’absence ou de décès ou non, l’État a l’obligation de poursuivre ses investigations jusqu’à ce que le sort de la personne disparue ait été établi.

Réponse au paragraphe 23 de la liste de points

72.Nous prenons acte de ces suggestions pour intégrer à l’avenir dans notre législation des mesures pour rechercher et identifier les enfants disparus et pour les restituer à leur famille. En tout état de cause, les autorités de poursuite ont l’obligation de rechercher tout enfant disparu après en avoir été informées.

73.L’annulation de l’adoption d’un enfant ou son placement lorsque cette mesure est le résultat d’une disparition forcée, est prononcée de plein droit par les tribunaux selon le principe général de droit : « la fraude corrompt tout ».