Nations Unies

CMW/C/LSO/CO/1

Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille

Distr. générale

23 mai 2016

Français

Original : anglais

Comité pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille

Observations finales concernant le rapport initial du Lesotho *

Le Comité a examiné le rapport initial du Lesotho (CMW/C/LSO/1) à ses 310e et 311e séances (voir CMW/C/SR.310 et 311), tenues les 12 et 13 avril 2016. À sa 322e séance, le 20 avril 2016, il a adopté les présentes observations finales.

A.Introduction

Le Comité se félicite de la soumission du rapport initial de l’État partie, qui a été élaboré en réponse à la liste de points établie avant la soumission du rapport (CMW/C/LSO/QPR/1). Il se félicite également du dialogue franc et constructif qu’il a eu avec la délégation de haut niveau envoyée par l’État partie, qui était dirigée par le Ministre de l’intérieur, Lekhetho Rakuone, et était composée de représentants du Ministère de l’intérieur, du Ministère des affaires juridiques, des affaires constitutionnelles et des droits de l’homme, du Ministère des affaires étrangères et des relations internationales et de la Mission permanente du Lesotho auprès de l’Office des Nations Unies à Genève et des autres organisations internationales ayant leur siège à Genève. Le Comité accueille avec satisfaction les informations complémentaires que la délégation lui a communiquées oralement.

Le Comité note que certains des pays qui emploient des travailleurs migrants lesothans ne sont pas parties à la Convention, ce qui peut constituer un obstacle à l’exercice par ces travailleurs des droits que leur reconnaît la Convention.

B.Aspects positifs

Le Comité constate avec satisfaction que l’État partie a ratifié les instruments ci‑après ou y a adhéré :

a)La Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, le 6 décembre 2013 ;

b)La Convention relative aux droits des personnes handicapées, le 2 décembre 2008 ;

c)La Convention (no 182) de l’Organisation internationale du Travail sur les pires formes de travail des enfants, 1999, le 14 juin 2001 ;

d)La Convention (no 155) de l’OIT sur la sécurité et la santé des travailleurs, 1981, le 1er novembre 2001 ;

e)La Convention (no 138) de l’OIT sur l’âge minimum, 1973, le 14 juin 2001 ;

f)La Convention (no 105) de l’OIT sur l’abolition du travail forcé, 1957, le 14 juin 2001.

Le Comité salue l’adoption des mesures législatives suivantes :

a)La loi contre la traite des personnes (2011) et son règlement d’application (2015) ;

b)La loi sur la protection et le bien-être des enfants (2011).

En outre, le Comité se félicite des mesures de politique générale suivantes :

a)Le Programme d’action pour l’élimination du travail des enfants (2013‑2017) ;

b)Le Cadre stratégique national de lutte contre la traite des personnes et le plan d’action connexe pour la période 2014-2016.

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

1.Mesures d’application générales (art. 73 et 84)

Législation et application

Le Comité note que, dans l’État partie, la Convention ne peut prendre effet au niveau national qu’une fois approuvée par l’Assemblée nationale. Il juge préoccupant que les dispositions de la Convention n’aient pas été pleinement incorporées dans le droit interne malgré les efforts déployés pour revoir la législation en vigueur afin qu’elle leur soit conforme.

Le Comité demande instamment à l ’ État partie de prendre les mesures voulues pour incorporer pleinement les dispositions de la Convention dans le droit interne et faire en sorte que les lois et politiques nationales leur soient conformes.

Articles 76 et 77

Le Comité note que, bien qu’ayant indiqué qu’il envisageait de le faire, l’État partie n’a pas encore fait les déclarations prévues aux articles 76 et 77 de la Convention, par lesquelles il reconnaîtrait la compétence du Comité pour recevoir et examiner des communications d’États parties et de particuliers se rapportant à des violations des droits consacrés par la Convention.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ envisager de faire les déclarations prévues aux articles 76 et 77 de la Convention.

Ratification des instruments pertinents

Le Comité félicite l’État partie d’avoir ratifié tous les principaux instruments relatifs aux droits de l’homme ou d’avoir adhéré à ceux-ci, et d’avoir fait de même en ce qui concerne un certain nombre des instruments de l’OIT. Il note toutefois que l’État partie n’a pas encore ratifié les instruments suivants : le Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels ; le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant établissant une procédure de présentation de communications ; le Protocole facultatif se rapportant à la Convention relative aux droits des personnes handicapées ; la Convention (no 131) de l’OIT sur la fixation des salaires minima, 1970 ; la Convention (no 181) de l’OIT sur les agences d’emploi privées, 1997 ; la Convention (no 189) de l’OIT sur les travailleuses et travailleurs domestiques, 2011 ; et la Convention (no 143) de l’OIT sur les travailleurs migrants (dispositions complémentaires), 1975.

Le Comité encourage vivement l ’ État partie à envisager de ratifier les instruments susmentionnés ou d ’ y adhérer, et ce, dès que possible.

Politique et stratégie globales

Le Comité regrette, en ce qui concerne les mesures concrètes prises pour mettre en œuvre la Convention, que l’État partie n’ait pas fourni suffisamment d’informations, en particulier au sujet de la Politique nationale sur la migration et le développement de 2013.

Le Comité prie instamment l ’ État partie d ’ inclure, dans son prochain rapport périodique, des informations à jour, étayées par des statistiques, sur les mesures concrètes prises pour mettre en œuvre les droits des travailleurs migrants tels que consacrés par la Convention.

Coordination

Le Comité juge préoccupantes les informations figurant dans le rapport de l’État partie et indiquant que la coordination intergouvernementale de la mise en œuvre de la Convention n’est pas confiée à un seul ministère ou organisme public.

Le Comité engage instamment l ’ État partie à mettre en place, au niveau interministériel, un organe approprié, doté d ’ un mandat clair et investi de pouvoirs suffisants, qui sera chargé de coordonner l ’ ensemble des activités liées à la mise en œuvre de la Convention entre les différents secteurs, sur les plans national, régional et local. L ’ État partie devrait veiller à ce que cet organe de coordination soit doté des ressources humaines, techniques et financières nécessaires à son bon fonctionnement.

Collecte de données

Le Comité salue l’adoption d’un cadre de collecte de données sur la migration et se félicite des efforts que l’État partie déploie pour mettre en place le système de collecte de données sur les flux migratoires proposé dans la Politique nationale sur la migration et le développement de 2013. Il est toutefois préoccupé par le manque de données statistiques ventilées par sexe, âge et nationalité concernant les travailleurs migrants en situation irrégulière et les cas d’expulsion. Le Comité s’inquiète particulièrement de ce que le Département de l’immigration de l’État partie ne tienne pas d’archives complètes sur les flux migratoires.

Le Comité recommande à l ’ État partie de mettre en place d ’ urgence un système complet de collecte de données sur la migration englobant tous les aspects visés dans la Convention, en particulier s ’ agissant des travailleurs migrants en situation irrégulière, y compris les cas d ’ expulsion. Le Comité encourage l ’ État partie à recueillir des informations et des données statistiques, ventilées par sexe, âge, nationalité et statut migratoire, qui soient conformes à l ’ objectif de développement durable 17.18 , afin de faciliter l ’ adoption de mesures visant à donner effet aux dispositions de la Convention.

Contrôle indépendant

Le Comité prend note de la mise en place d’une Unité des droits de l’homme en 1995, ainsi que de la sixième modification de la Constitution, qui prévoit la création d’une institution nationale des droits de l’homme. Il constate toutefois avec inquiétude que le projet de loi sur la Commission des droits de l’homme (2015), qui rendra cette institution nationale opérationnelle, n’a pas encore été adopté.

Le Comité prie l ’ État partie :

a) D ’ adopter dès que possible le projet de loi sur la Commission des droits de l ’ homme et de mettre en place une institution nationale des droits de l ’ homme en veillant à ce qu ’ elle soit expressément chargée de protéger et de promouvoir les droits de l ’ homme, y compris les droits des travailleurs migrants et des membres de leur famille tels que consacrés par la Convention, conformément aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l ’ homme (Principes de Paris) ;

b) De veiller à ce que la Commission des droits de l ’ homme dispose de ressources financières et humaines suffisantes pour s ’ acquitter efficacement de son mandat.

Formation à la Convention et diffusion d’informations sur celle-ci

Le Comité prend note du fait, mentionné dans le rapport de l’État partie, que l’Unité des droits de l’homme de l’État partie organise des activités de formation aux droits de l’homme, notamment des campagnes d’information sur l’interdiction du travail des enfants, à l’intention des agents des forces de l’ordre, des membres du Parlement et de l’appareil judiciaire et des enseignants. En outre, le Comité relève que la délégation a indiqué que l’État partie dispensait des formations à l’intention des juges au sujet de l’application générale des traités et s’employait à faire participer les médias à la diffusion d’informations sur la Convention. Cependant, le Comité est préoccupé par le peu de programmes de formation à la Convention spécialement axés sur la migration et destinés aux parties intéressées comme les juges, les agents de l’immigration et les autres responsables de l’application des lois. Il est également préoccupé par les difficultés rencontrées pour diffuser plus largement des informations sur la Convention.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De veiller à ce que des programmes complets de formation aux droits de l ’ homme spécialement axés sur la migration soient disponibles pour tous les agents de l ’ État qui travaillent dans le domaine de la migration, en particulier pour les agents de l ’ immigration et les agents des forces de l ’ ordre, ainsi que pour les juges, les procureurs, les agents consulaires concernés, les fonctionnaires, les responsables locaux et les travailleurs sociaux ;

b) De redoubler d ’ efforts pour faire en sorte que les travailleurs migrants aient accès à l ’ information et aux conseils concernant leurs droits au titre de la Convention dans toutes les langues communément utilisées dans le pays, en particulier par le biais de cours d ’ initiation ou de séminaires préalables au recrutement ou au départ ;

c) De collaborer étroitement avec les organisations de la société civile et les médias afin de diffuser davantage d ’ informations sur la Convention.

2.Principes généraux (art. 7 et 83)

Non-discrimination

Le Comité note que, selon l’État partie, la législation nationale n’opère pas de distinction entre les travailleurs nationaux et les travailleurs migrants, sauf aux fins du « contrôle des étrangers ». Il est cependant préoccupé par le manque d’informations concernant la pratique réelle et d’exemples qui permettraient d’évaluer la mise en œuvre du droit à la non-discrimination consacré par la Convention.

Le Comité recommande à l ’ État partie de veiller à ce que tous les travailleurs migrants et les membres de leur famille qui se trouvent sur son territoire ou sous sa juridiction jouissent sans discrimination des droits consacrés par la Conve ntion, conformément à l ’ article  7 de celle-ci. Le Comité recommande également à l ’ État partie de faire figurer, dans son prochain rapport périodique, des informations sur la pratique à cet égard, en donnant des exemples pertinents.

Droit à un recours utile

Le Comité prend note de l’information communiquée par l’État partie selon laquelle toute personne, quelle que soit sa nationalité, a accès aux tribunaux et jouit de la protection des droits garantis par la loi. Il constate toutefois avec préoccupation qu’aucune information ne lui a été fournie au sujet du nombre d’affaires et/ou de procédures portées devant les tribunaux par des travailleurs migrants ou des membres de leur famille, y compris ceux qui sont en situation irrégulière, ce qui peut laisser penser que ceux-ci ne connaissent pas bien les voies de recours qui leur sont ouvertes.

Le Comité recommande à l ’ État partie de veiller à ce que, en droit et dans la pratique, les travailleurs migrants et les membres de leur famille, y compris ceux qui sont en situation irrégulière, aient la même possibilité que les nationaux de porter plainte et d ’ obtenir réparation devant les tribunaux lorsque les droits qui leur sont reconnus par la Convention ont été violés. Le Comité recommande également à l ’ État partie de prendre des mesures supplémentaires pour informer les travailleurs migrants et les membres de leur famille, y compris ceux qui sont en situation irrégulière, des recours judiciaires et autres qui leur sont ouverts en cas de violation de leurs droits au titre de la Convention.

3.Droits de l’homme de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille (art. 8 à 35)

Exploitation par le travail et autres formes de mauvais traitements

Le Comité juge préoccupant le manque, dans le rapport de l’État partie, de renseignements sur les cas d’exploitation dans l’État partie de travailleurs migrants, y compris de travailleurs migrants en situation irrégulière. Malgré les informations fournies par la délégation, à l’occasion du dialogue, au sujet des cas de xénophobie, de mauvais traitements et de violence à l’égard de travailleurs migrants chinois et de membres de leur famille survenus dans le passé, le Comité demeure préoccupé par les informations faisant état d’attitudes négatives à l’égard des travailleurs migrants d’origine asiatique et par le manque de mesures globales visant à lutter contre la xénophobie dans l’État partie.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ accroître le nombre des inspections du travail et de poursuivre et sanctionner les personnes ou les groupes qui exploitent les travailleurs migrants ou les soumettent au travail forcé et à d ’ autres abus, en particulier dans le secteur informel, conformément à l ’ objectif de développement durable 8.8 ;

b) De faire figurer, dans son prochain rapport périodique, des renseignements sur l ’ exploitation des travailleurs migrants, y compris ceux qui sont en situation irrégulière ;

c) De fournir des données, ventilées par âge, sexe et nationalité, sur les cas de xénophobie, de mauvais traitements et de violence à l ’ égard des travailleurs migrants et des membres de leur famille, en particulier les travailleurs migrants d ’ origine asiatique ;

d) De redoubler d ’ efforts pour lutter contre la xénophobie, y compris en poursuivant les auteurs et en menant des campagnes de sensibilisation, et d ’ apporter une assistance aux victimes.

Régularité de la procédure, détention et égalité devant les tribunaux

Le Comité prend note des informations communiquées par l’État partie au sujet des mesures visant à garantir que, dans le cadre des procédures pénales et administratives, y compris des procédures d’expulsion, les travailleurs migrants et les membres de leur famille, en particulier ceux qui sont en situation irrégulière, aient accès à l’assistance consulaire, et que l’équité de ces procédures soit assurée. Il constate toutefois avec préoccupation que les travailleurs migrants en situation irrégulière qui sont en attente d’expulsion sont placés en détention, et ce, souvent dans des lieux de détention de la police ou de l’administration pénitentiaire où sont également détenus des condamnés ou des prévenus.

Compte tenu de son observation générale n o 2 (2013) sur les droits des travailleurs migrants en situation irrégulière et des membres de leur famille, le Comité rappelle que la détention administrative ne doit être utilisée qu ’ en dernier ressort, et il recommande à l ’ État partie d ’ envisager des mesures de substitution à la détention administrative. Il lui recommande également :

a) De faire figurer, dans son deuxième rapport périodique, des informations détaillées et ventilées sur le nombre de travailleurs migrants détenus pour des infractions à la législation relative à l ’ immigration, ainsi que sur le lieu, la durée moyenne et les conditions de leur détention ;

b) De veiller à ce que les travailleurs migrants détenus pour des infractions à la loi relative à l ’ immigration ne soient pas détenus avec des personnes accusées ou reconnues coupables d ’ un crime ;

c) De veiller à ce que les garanties minimales énoncées dans la Convention soient respectées en ce qui concerne les procédures pénales ou administratives engagées contre des travailleurs migrants et des membres de leur famille.

Assistance consulaire

Le Comité prend note de l’assistance consulaire et diplomatique offerte par l’État partie aux travailleurs migrants, en particulier à ceux qui travaillent en Afrique du Sud, mais est préoccupé de ne pas avoir reçu suffisamment d’informations concrètes sur l’assistance spécifique offerte aux travailleurs migrants et aux membres de leur famille pour protéger leurs droits.

Le Comité recommande à l ’ État partie de faire en sorte que tous les travailleurs migrants et les membres de leur famille puissent bénéficier de l ’ appui consulaire pour faire protéger les droits énoncés dans la Convention. Le Comité recommande également à l ’ État partie de veiller à ce que le personnel de ses ambassades et de ses consulats ait une connaissance suffisante des lois et procédures en vigueur dans les pays d ’ emploi des t ravailleurs migrants lesothans.

Rémunération et conditions de travail

Le Comité constate que les travailleurs migrants, dans l’État partie, bénéficient de la protection assurée par le principe d’une rémunération égale pour un travail de valeur égale. Il prend également note des efforts que déploie l’État partie pour mener régulièrement des inspections du travail à cet égard. Le Comité est toutefois préoccupé par le manque de données sur les cas avérés de non-respect du principe de la rémunération égale pour un travail de valeur égale par les employeurs de travailleurs migrants et sur les conditions de travail de ces travailleurs.

Le Comité prie instamment l ’ État partie :

a) De collecter des données sur les cas de non-respect du principe de la rémunération égale pour un travail de valeur égale, y compris sur les sanctions infligées aux employeurs contrevenants ;

b) De veiller à ce que les travailleurs migrants bénéficient d ’ un traitement qui ne soit pas moins favorable que celui réservé aux nationaux en matière de rémunération et à ce que ce principe soit strictement respecté en s ’ assurant que l ’ inspection du travail procède à des visites régulières et inopinées dans les secteurs d ’ activité qui emploient des migrants, conformément à l ’ objectif de développement durable 8.8.

Sécurité sociale

Le Comité est préoccupé par le fait que l’État partie et l’Afrique du Sud n’ont pas conclu d’accords au sujet de la sécurité sociale et, plus particulièrement, du régime des pensions, malgré le grand nombre de Lesothans travaillant en Afrique du Sud. Il prend néanmoins note de l’information communiquée par la délégation selon laquelle les deux États négocient actuellement des solutions à ce problème.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ accélérer les négociations en cours avec l ’ Afrique du Sud sur l ’ introduction de solutions concernant la sécurité sociale, pour que ses ressortissants travaillant en Afrique du Sud aient droit à l ’ égalité de traitement avec les nationaux de l ’ Afrique du Sud, pour autant qu ’ ils remplissent les conditions requises par la législation de cet État en tant qu ’ État d ’ emploi, conformément à l ’ article 27 de la Convention.

Enregistrement des naissances et nationalité

Le Comité salue la signature, par l’État partie et l’Afrique du Sud, d’une déclaration d’intention pour l’instauration d’un permis spécial visant à régulariser la situation des travailleurs migrants lesothans non qualifiés en Afrique du Sud. Il est néanmoins préoccupé par le fait que, comme les travailleurs lesothans qui émigrent en Afrique du Sud sont de plus en plus nombreux, leurs enfants courent le risque de l’apatridie, car il n’y a pas de mécanisme garantissant l’enregistrement systématique des naissances dans les consulats.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De s ’ employer davantage, notamment dans le contexte du régime du permis spécial pour le Lesotho et de la fourniture de services consulaires, à ce que tous les enfants de travailleurs migrants lesothans vivant à l ’ étranger, particulièrement en Afrique du Sud, soient enregistrés et reçoivent des documents d ’ identité, conformément à l ’ objectif de développement durable 16.9 ;

b) De veiller à ce que ses services consulaires en Afrique du Sud sensibilisent les travailleurs migrants lesothans et les membres de leur famille, en particulier ceux en situation irrégulière, au fait qu ’ il est important de faire procéder à l ’ enregistrement à la naissance ;

c) De mieux faire appliquer la Convention de 1954 relative au statut des apatrides et la Convention de 1961 sur la réduction des cas d ’ apatridie.

Éducation

Le Comité note que la loi de 2010 relative à l’éducation prévoit que l’éducation primaire est gratuite et obligatoire pour tous les enfants d’âge scolaire, y compris les enfants des travailleurs migrants. Il regrette toutefois le manque d’informations sur la situation générale en matière d’accès à l’éducation des enfants de travailleurs migrants dans l’État partie.

Le Comité recommande à l ’ État partie de procéder à une étude nationale et de donner, dans son prochain rapport périodique, des renseignements sur la situation générale en matière d ’ accès à l ’ éducation des enfants des travailleurs migrants dans l ’ État partie.

4.Autres droits des travailleurs migrants et des membres de leur famille qui sont pourvus de documents ou qui sont en situation régulière (art. 36 à 56)

Droit de voter et d’être élu dans l’État d’origine

Le Comité est préoccupé par le manque d’informations sur les mécanismes mis en place pour que les travailleurs migrants lesothans vivant à l’étranger puissent voter et être élus dans l’État partie.

Le Comité recommande à l ’ État partie de donner, dans son prochain rapport périodique, des renseignements sur l ’ exercice, par les travailleurs migrants lesothans vivant à l ’ étranger, de leur droit de voter et d ’ être élus dans l ’ État partie.

Regroupement familial

Le Comité note que les articles 6.3 et 7.2 de la loi de 1966 relative au contrôle des étrangers prévoit le regroupement familial, mais constate avec préoccupation que la faculté d’ordonner le regroupement familial est largement laissée à la discrétion du ministre responsable de l’application de ladite loi.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ introduire, dans le cadre de la révision de la loi de 1966 relative au contrôle des étrangers, les mesures voulues pour faciliter le regroupement familial des travailleurs migrants avec les membres de leur famille, conformément à l ’ article 44 de la Convention.

Droit de transférer ses gains et ses économies

Le Comité prend note des renseignements qui figurent dans le rapport de l’État partie concernant l’importance des envois de fonds des travailleurs migrants lesothans vers l’État partie. Il prend également note des informations communiquées par l’État partie sur les services permettant d’envoyer des fonds vers l’État partie et l’assistance fournie par le Bureau de l’emploi de l’Afrique aux mineurs travaillant en Afrique du Sud. Il est toutefois préoccupé par les coûts de transfert exorbitants, qui s’élèvent à 5 % du montant transféré. Il constate aussi avec inquiétude le manque d’informations sur les flux d’envois de fonds par les travailleurs migrants vivant dans l’État partie vers leur pays d’origine, tout comme sur les coûts de transfert auxquels font face ces derniers.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De prendre des mesures pour réduire le coût des envois de fonds à moins de 3 %, conformément à l ’ objectif de développement durable 10 c), et de faciliter les envois de fonds des travailleurs migrants se trouvant au Lesotho et des travailleurs migrants lesothans à l ’ étranger, notamment par des accords bilatéraux avec les pays concernés ;

b) De donner des renseignements détaillés sur le flux des envois de fonds de travailleurs migrants dans l ’ État partie vers leur pays d ’ origine.

Promotion de conditions saines, équitables, dignes et légales en ce qui concerne les migrations internationales des travailleurs migrants et des membres de leur famille (art. 64 à 71)

Enfants laissés au pays

Le Comité note les mesures telles que l’octroi de bourses d’études que met en œuvre l’État partie pour garantir le bien-être des enfants de migrants lesothans qui sont laissés au pays. Il est toutefois préoccupé par le nombre limité de ces mesures et par le nombre d’enfants qui se retrouvent chef de ménage en raison des migrations et du fléau du VIH/sida. Il est également préoccupé par le manque de clarté des mesures prises pour faciliter la réinstallation et la réinsertion des travailleurs migrants lesothans à leur retour, notamment en ce qui concerne le regroupement avec leurs enfants restés au pays.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De mener une étude à l ’ échelle nationale sur les enfants qui sont laissés au pays par les travailleurs migrants lesothans, afin d ’ établir un profil démographique de cette population et de pouvoir élaborer les politiques et programmes voulus ;

b) D ’ adopter une stratégie globale visant à promouvoir et à protéger les droits des enfants et des membres de la famille de travailleurs migrants lesothans, qui sont laissés au pays, assortie notamment de programmes dans les domaines de l ’ éducation, de l ’ entrepreneuriat, de la formation et de l ’ action sociale ;

c) De donner, dans son prochain rapport périodique, des renseignements sur les mesures qui auront été prises sur la réinstallation et la réinsertion des travailleurs migrants lesothans à leur retour, y compris le regroupement avec leurs enfants laissés au pays.

Agences de recrutement

Le Comité note que l’État partie s’est engagé à appliquer des principes éthiques de recrutement dans le cadre du Code du travail de 1992, qui régit les activités des agences privées de recrutement dans l’État partie. Il constate néanmoins avec préoccupation que certaines de ces agences travaillant au nom des employeurs ne signalent pas les accidents professionnels et refusent de rapatrier la dépouille des travailleurs décédés.

Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre les mesures suivantes :

a) Renforcer la réglementation applicable aux agences de recrutement privées, ainsi que le système d ’ octroi de licence à ces agences, dans le cadre de la révision en cours du Code du travail de 1992, afin de garantir les droits des travailleurs migrants conformément à la Convention ;

b) Intensifier les contrôles et les inspections portant sur les recrutements afin d ’ empêcher les agences de recrutement privées d ’ exploiter les travailleurs migrants et les membres de leur famille ;

c) Veiller à ce que les agences de recrutement privées fournissent des renseignements complets aux personnes qui cherchent un emploi à l ’ étranger, et garantissent le bénéfice effectif de toutes les prestations liées à l ’ emploi qui ont été convenues, en particulier les salaires ;

d) Mener des enquêtes sur les pratiques illégales des recruteurs et les réprimer, afin de dévoiler au grand jour les pratiques répréhensibles.

Mouvement et emploi illégaux ou clandestins de travailleurs migrants en situation irrégulière

Le Comité accueille avec satisfaction les importantes mesures législatives et réglementaires qu’a prises l’État partie pour lutter contre la traite des personnes, telles que la loi de 2011 contre la traite des personnes ou le Cadre stratégique de lutte contre la traite des personnes et le plan d’action connexe pour la période 2014-2016, qui visent à éliminer toute forme de traite des personnes dans l’État partie. Il salue également la création, en collaboration avec l’Afrique du Sud, d’une commission transfrontière chargée de lutter contre la traite, en particulier lorsqu’elle concerne les enfants non accompagnés. Le Comité est néanmoins préoccupé par :

a)L’absence d’études, d’analyses et de données ventilées qui permettraient d’évaluer l’ampleur de la traite dans l’État partie ;

b)Le fait que l’État partie n’a pas encore créé de centre ou foyer pour les victimes de la traite, comme le prescrit la loi ;

c)Le fait que le travail des enfants n’est pas signalé parce que les inspecteurs du travail sont trop peu nombreux, et le manque d’informations disponibles sur le financement du service de protection de l’enfant et de la femme ;

d)Le manque d’informations sur les mesures prises pour lutter contre l’exploitation sexuelle dans l’État partie.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De systématiser davantage la collecte de données ventilées par sexe, âge et origine pour lutter efficacement contre la traite des personnes et l ’ exploitation par la prostitution ;

b) D ’ intensifier les campagnes de prévention de la traite des travailleurs migrants et de les protéger contre l ’ exploitation par le travail ou l ’ exploitation sexuelle, conformément à l ’ objectif de développement durable 5.2 ;

c) De faire en sorte que les membres des forces de l ’ ordre, les gardes frontière , les juges, les procureurs, les inspecteurs du travail, les enseignants, les professionnels de la santé et le personnel des ambassades et consulats de l ’ État partie soient mieux formés à la lutte contre la traite des personnes ;

d) De renforcer les mécanismes d ’ enquête sur les affaires de travail des enfants et de traite des personnes, et de poursuivre et sanctionner les auteurs de tels actes ;

e) De fournir une assistance, une protection et des services de réadaptation à toutes les victimes de la traite des personnes, en particulier en mettant en place des foyers et en lançant des projets visant à leur réinsertion et à leur rapatriement ;

f) De coopérer davantage aux niveaux international, régional et bilatéral pour prévenir et combattre la traite des personnes.

6.Suivi et diffusion

Suivi

Le Comité demande à l ’ État partie de faire figurer, dans son prochain rapport périodique, des renseignements détaillés sur les mesures adoptées pour donner suite aux recommandations énoncées dans les présentes observations finales. Il lui recommande de prendre toutes les mesures voulues pour faire en sorte que ces recommandations soient mises en œuvre, notamment en les soumettant aux membres des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire ainsi qu ’ aux autorités locales, pour examen et suite à donner.

Le Comité prie l ’ État partie d ’ associer plus étroitement les organisations de la société civile à la mise en œuvre des recommandations figurant dans les présentes observations finales.

Rapport de suivi

Le Comité invite l ’ État partie à lui fournir, dans les deux ans, c ’ est-à-dire le 1 er mai 2018 au plus tard, des renseignements écrits sur la mise en œuvre des recommandations formulées aux paragraphes 20, 36, 38 et 46 a) ci-dessus.

Diffusion

Le Comité demande à l ’ État partie de diffuser largement les présentes observations finales, notamment auprès des organismes publics, des pouvoirs législatif et judiciaire, des autorités locales concernées, des organisations non gouvernementales, des autres membres de la société civile et de la population, afin qu ’ elles soient mieux connues.

7.Assistance technique

Le Comité recommande à l ’ État partie de faire davantage appel à l ’ assistance internationale, notamment l ’ assistance technique, pour élaborer un programme global visant à mettre en œuvre les recommandations formulées aux paragraphes 20, 36, 38 et 46 a) ci-dessus et la Convention dans son ensemble. Il l ’ engage également à poursuivre sa coopération avec les institutions spécialisées et les programmes du système des Nations Unies, notamment le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l ’ homme, dans le domaine de l ’ assistance technique et du renforcement des capacités en matiè re de présentation de rapports.

8.Prochain rapport périodique

Le Comité invite l ’ État partie à lui soumettre son deuxième rapport périodique le 1 er mai 2021 au plus tard, et à y faire figurer des renseignements concernant la mise en œuvre des présentes observations finales. L ’ État partie peut par ailleurs opter pour la procédure simplifiée de soumission de rapports, selon laquelle le Comité établit à l ’ intention de l ’ État partie une liste de points à traiter qui lui est communiquée avant la présentation de son rapport suivant. Les réponses de l ’ État partie à cette liste constituent son rapport aux fins de l ’ article 73 de la Convention.

Le Comité attire l ’ attention de l ’ État partie sur les directives pour l ’ établissement des rapports périodiques (CMW/C/2008/1) et lui rappelle que ceux-ci ne devraient pas excéder 21 200 mots, conformément auxdites directives (résolution 68/268 de l ’ Assemblée générale). Dans l ’ éventualité où un rapport dépasserait le nombre de mots prévus, l ’ État partie serait invité à le réduire conformément aux directives susmentionnées. Si l ’ État partie n ’ est pas en mesure de revoir son rapport et de le soumettre à nouveau, la traduction de celui-ci aux fins de son examen par les organes conventionnels ne saurait être garantie.

Le Comité prie l ’ État partie d ’ assurer une large participation de tous les ministères et des organismes publics à l ’ élaboration du prochain rapport périodique (ou des réponses à la liste de points à traiter, dans le cas de la procédure simplifiée d ’ établissement de rapports) et, parallèlement, de consulter largement toutes les parties prenantes, notamment la société civile et les organisations de travailleurs migrants et de défense des droits de l ’ homme.

Le Comité invite également l ’ État partie à lui soumettre un document de base commun, ne dépassant pas 42 400 mots, élaboré conformément aux critères figurant dans les directives harmonisées pour l ’ établissement de rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme, englobant le document de base commun et les rapports pour chaque instrument, approuvés à la cinquième réunion intercomités des organes conventionnels relatifs aux droits de l ’ homme en juin 2006 (HRI/MC/2006/3 et Corr.1).