Nations Unies

CCPR/C/ALB/3

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

10 janvier 2023

Français

Original : anglais

Anglais, espagnol et français seulement

Comité des droits de l ’ homme

Troisième rapport périodique soumis par l’Albanie en application de l’article 40 du Pacte, selon la procédure facultative d’établissement des rapports, attendu en 2022 *

[Date de réception : 2 août 2022]

Introduction

1.La République d’Albanie a adhéré au Pacte international relatif aux droits civils et politiques par la loi nº 7510 du 8 août 1991. Elle a également adhéré au Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques le 4 octobre 2007, ainsi qu’au deuxième Protocole facultatif au moyen de la loi no 9726 du 7 mai 2007.

2.Le présent rapport périodique contient les réponses de l’Albanie à la liste de points adoptée par le Comité des droits de l’homme. La première partie contient des informations générales sur la situation des droits de l’homme dans le pays et la deuxième partie fournit des informations sur l’application des articles 1er à 27 du Pacte. Les informations fournies dans le rapport couvrent la période 2014-2022.

3.Conformément audécret no 112 du 5 mars 2014 du Premier Ministre portant création du groupe de travail interministériel chargé d’élaborer des rapports sur l’application des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme et de participer à leur examen, le Ministère de l’Europe et des affaires étrangères coordonne le processus d’établissement des rapports nationaux sur la mise en œuvre des conventions relatives aux droits de l’homme. Les réponses à la liste de points à traiter ont été élaborées sur la base des contributions des institutions centrales qui ont été dûment coordonnées et prises en compte.

A.Renseignements d’ordre général sur la situation des droits de l’homme dans le pays, y compris sur les nouvelles mesures et les faits nouveaux concernant la mise en œuvre du Pacte

4.En ce qui concerne la situation des droits de l’homme dans le pays, le cadre législatif a été adapté dans le but d’améliorer la situation du personnel de sécurité et le respect des droits des personnes détenues en application d’une décision de justice pénale. Dans ce cadre, le cadre législatif a été en partie adapté et modifié concernant certains points puis, en 2020, un tout nouveau cadre législatif a été mis en place pour remplacer celui existant par de nouvelles lois conformes à l’acquis communautaire de l’Union européenne (UE).

5.Trois nouvelles lois réglementant le système d’exécution des décisions pénales ont été approuvées en 2020, à savoir la loi no 80/2020 relative à la police pénitentiaire, la loi no 81/2020 relative aux droits et au traitement des détenus (condamnés et personnes en détention provisoire), la loi no 79/2020 relative à l’exécution des décisions pénales. Les règlements et actes normatifs adoptés dans les domaines ci-dessus ont également permis d’augmenter les salaires des personnels pénitentiaires.

6.La loi relative à la police pénitentiaire prévoit : le recrutement d’un personnel compétent, motivé et intègre, capable de garantir la sécurité dans les prisons et les autres lieux de détention ; l’amélioration des conditions économiques, financières et de travail des agents de la police pénitentiaire ; l’amélioration des procédures de recrutement, de formation et de promotion du personnel pénitentiaire, etc.

7.Le nouveau projet de loi relative aux droits et au traitement des détenus (condamnés et personnes en détention provisoire) prévoit plusieurs innovations, notamment :

La création d’un nouveau type d’institution pour l’exécution des décisions pénales en « milieu ouvert ». Ce système pluridisciplinaire vise à favoriser la réadaptation sociale et la réinsertion dans la vie familiale, sociale et économique des personnes condamnées en les plaçant dans des établissements ouverts. Le transfert dans ces établissements des détenus qui répondent aux critères légaux servira d’étape pour préparer leur mise en liberté. Le fait de préparer leur réinsertion en milieu ouvert facilite ensuite leur retour à la vie libre ;

Une commission d’évaluation de la dangerosité des détenus a été créée au sein de la Direction générale de l’administration pénitentiaire, avec pour tâche d’évaluer le risque d’évasion et de récidive des personnes condamnées et en détention provisoire, et les mesures de suivi des procédures lorsque des détenus bénéficient de permis de travail rémunéré ont été renforcées ;

Le projet de loi a été harmonisé avec la loi no 37/2017 relative au Code de justice pénale pour mineurs pour mieux protéger les droits des mineurs dans les prisons et de respecter les normes relatives à leur traitement conformément au Code de justice pénale pour les mineurs ;

La réadaptation sociale et la réinsertion dans la vie familiale, sociale et économique des adultes et des mineurs en détention provisoire et condamnés est garantie, en offrant à ces derniers des mesures d’incitation, conformément au principe de la protection de l’intérêt supérieur des mineurs, une assistance sociale, éducative, psychologique et physique, adaptée aux besoins individuels et conforme au groupe d’âge, au sexe et à la personnalité du mineur ;

Un soutien est apporté aux programmes d’évaluation et de recherche sur le fonctionnement du système pénitentiaire et son rôle dans la réinsertion des condamnés dans la société ;

Le rôle du Mécanisme national de prévention de la torture et des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants auprès du Médiateur, en tant que structure chargée de protéger les droits des personnes condamnées et détenues et de superviser la mise en œuvre du projet de loi, a été défini.

B.Renseignements sur la mise en œuvre des articles du Pacte relatif aux droits civils et politiques

Article 2 − Cadre juridique et constitutionnel de la mise en œuvre du Pacte

8.Les institutions chargées de la protection des droits de l’homme sont des acteurs étatiques importants dans toute société démocratique. À ce titre, l’Avocat du peuple (médiateur) joue un rôle irremplaçable en tant qu’indicateur du « degré de maturité » de la classe politique et de la mentalité de la société qui la met en place. Dans ce sens, l’établissement, le fonctionnement et le soutien de l’institution de l’Avocat du Peuple d’Albanie − une toute nouvelle institution et notion en Albanie − s’inscrivent dans la construction de l’état de droit, malgré l’absence de tradition institutionnelle en la matière.

9.La création de cette institution a été rendue possible par une disposition de la Constitution. Sur le modèle classique des médiateurs parlementaires, l’Assemblée albanaise a adopté en 1999 la loi organique relative au médiateur, par laquelle elle a consacré l’institution de l’Avocat du Peuple en tant que garantie constitutionnelle visant à protéger les droits, les libertés et les intérêts juridiques des personnes physiques, des citoyens albanais, des étrangers, qu’ils résident régulièrement ou non en Albanie, des réfugiés ainsi que des personnes apatrides vivant sur le territoire national, contre les actions ou inactions illégales et irrégulières des organes de l’administration publique. À ce titre, il a fait partie des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme sans pouvoir de décision qui peuvent émettre des avis et qui sont les garants de la démocratie et des droits de l’homme.

10.Le Médiateur de la République d’Albanie est à la fois l’institution nationale des droits de l’homme et un médiateur « classique », puisqu’il est chargé de suivre le respect de l’état de droit et des principes de bonne gouvernance. Le Médiateur est membre de l’Alliance mondiale des institutions nationales des droits de l’homme (GANHRI) et a obtenu l’accréditation au statut « A » au titre des Principes de Paris (pleinement conforme). Conformément aux Principes de Paris, le mandat dont le Médiateur est investi est large, établi sur la base des normes internationales en matière de droits de l’homme, pour promouvoir, prévenir les violations et protéger les droits de l’homme.

Articles 2 et 25 − Lutte contre la corruption

11.Une structure spécialisée comprenant des tribunaux spéciaux, le Parquet spécialisé et l’Unité spéciale d’enquête, a été mise en place afin de renforcer l’efficacité de la lutte contre la corruption et la criminalité organisée :

a)Les tribunaux spéciaux, conformément à la Constitution (art. 135, par. 2), sont compétents pour juger les délits de corruption et de criminalité organisée, ainsi que les affaires pénales impliquant le Président de la République, le Président de l’Assemblée, le Premier ministre, un membre du Conseil des ministres, un juge de la Cour constitutionnelle et de la Cour suprême, le Procureur général, l’Inspecteur général de la justice, un maire, un député, un Vice-Ministre, un membre du Conseil supérieur de la magistrature ou du Conseil supérieur du parquet, ainsi que les directeurs des institutions centrales ou indépendantes prévues par la Constitution ou par la loi, même après qu’ils ont quitté leur fonction ;

b)Le Parquet spécialisé et l’Unité spéciale d’enquête (Bureau national des enquêtes) enquêtent sur les infractions de corruption, sur la criminalité organisée et les affaires criminelles et engagent des poursuites, conformément à l’article 135 de la Constitution (par. 2). Le Parquet spécialisé est indépendant du Procureur général, mais le Bureau national des enquêtes est subordonné au Parquet spécialisé.

12.Le Parquet spécialisé engage les poursuites pénales et représente l’accusation devant les tribunaux spéciaux ainsi que devant la Cour suprême. Il est composé de 10 procureurs au minimum, tous nommés par le Conseil supérieur du parquet pour un mandat de neuf ans qui ne peut être reconduit. Conformément à la loi, son directeur est élu parmi les procureurs du Bureau à la majorité des membres du Conseil supérieur du parquet, pour un mandat de trois ans sans possibilité d’être réélu.

13.Avant leur nomination, le patrimoine et la réputation des candidats aux postes de procureur, d’enquêteur, d’agent administratif du Parquet spécialisé, du Bureau national des enquêtes, ainsi que de leurs proches, sont vérifiés, et ils doivent consentir à ce que leurs comptes bancaires et leurs communications personnellessoient contrôlés périodiquement, conformément à la loi.

14.Le Parquet spécialisé est né de la nécessité de disposer d’une structure spécialisée qui serait chargée d’enquêter efficacement dans les affaires complexes de corruption et de criminalité organisée, ainsi qu’en cas d’infractions commises par des hauts fonctionnaires, et de poursuivre leurs auteurs en toute indépendance et à l’abri de toute influence indue.

15.Les procureurs spéciaux mènent leurs enquêtes et engagent des poursuites en toute indépendance, y compris vis-à-vis du Procureur général et du directeur des poursuites spéciales, et des actions du Bureau national des enquêtes. Ils disposent de l’indépendance nécessaire pour prendre des décisions sans être influencés par des considérations illégales. Ils peuvent même instruire et poursuivre tout acte de leurs collègues ou de juges des tribunaux spéciaux chargés de la lutte contre la corruption et la criminalité organisée.

16.Plusieurs garanties protègent leurs mandants : les juges spéciaux sont nommés par le Conseil supérieur de la magistrature et les procureurs spéciaux par le Conseil supérieur du parquet, ils ne peuvent être révoqués qu’à la majorité des deux tiers des voix en cas d’infraction disciplinaire grave et peuvent saisir la Cour constitutionnelle pour contester la décision. En plus des garanties procédurales, les juges, les procureurs et les employés du Bureau national des enquêtes sont mieux payés que leurs collègues, et ce précisément pour garantir leur indépendance et leur impartialité.

17.Le Conseil supérieur de la magistrature, en tant qu’organe directeur du système judiciaire albanais, accorde une attention particulière à la justice pour mineurs. À cet égard, il a élaboré et approuvé l’instruction no 79 du 30 mai 2019, qui réglemente la nomination des juges des enfants. Aux termes de la loi, les tribunaux doivent promouvoir et faciliter la participation des juges aux programmes de formation continue dans le domaine de la justice pour mineurs, afin que ceux-ci approfondissent leurs connaissances en la matière. La loi oblige également les tribunaux de première instance et les cours d’appel de compétence générale à nommer trois juges au minimum dans les affaires pénales impliquant des enfants en conflit avec la loi ou victimes d’infractions.

18.Afin de garantir et de suivre la productivité et l’efficacité des tribunaux, le Conseil supérieur de la magistrature recueille des données statistiques sur le nombre d’affaires et la durée des procédures dans les affaires pénales impliquant des enfants en conflit avec la loi ou victimes d’infractions.

19.En 2021, les tribunaux de première instance ont enregistré 158 affaires impliquant des enfants en conflit avec la loi ou victimes d’infractions. En 2022, neuf juges ont suivi une formation sur des thèmes liés aux mineurs en conflit avec la loi et victimes d’infractions dispensée par l’École de la magistrature.

20.Le Conseil supérieur de la magistrature, dans sa décision no 288 du 18 décembre 2019, a approuvé la création de Tribunaux spécialisés en matière de lutte contre la corruption et la criminalité organisée, qui jugent les actions pénales engagées contre les auteurs d’infractions liées à la corruption et à la criminalité organisée, ainsi que celles engagées contre le Président de la République, le Président de l’Assemblée, le Premier Ministre, les membres du Conseil des ministres, les juges de la Cour constitutionnelle et de la Cour suprême, le Procureur général, l’Inspecteur général de la justice, un maire, un Vice-Ministre, des membres du Conseil supérieur de la magistrature et du Conseil supérieur du parquet,y compris après qu’ils ont quitté leur fonction.

21.Durant la période considérée, le Conseil supérieur de la magistrature a nommé cinq juges titulaires et deux juges suppléants, sur les 16 prévus par la loi no 95/2016, au Tribunal de première instance spécialisé en matière delutte contre la corruption et la criminalité organisée et huit juges, sur les 11 prévus, à la Cour d’appel spécialisée. Le processus de nomination se poursuit, mais il se heurte à de nombreuses difficultés liées au manque de candidatures, compte tenu du peu d’intérêt que suscitent les postes vacants dans ces juridictions.

22.Par ailleurs, le cadre juridique en vigueur a conféré au Conseil supérieur de la magistrature des compétences disciplinaires qui sont pleinement mises en œuvre en coopération avec l’Inspection générale de la justice, seul organe compétent pour engager une procédure disciplinaire contre un juge. La Haute inspection de la justice examine les demandes d’ouverture de procédures disciplinaires au regard des dispositions légales régissant les procédures disciplinaires contre des juges énoncées dans la loi no 96/2016 relative au statut des juges et des procureurs en République d’Albanie (modifiée).

23.Le Conseil supérieur de la magistrature a été saisi d’allégations ayant trait à des faits de corruption portées à sa connaissance et a décidé, après examen, de suspendre un juge du tribunal de district judiciaire de Durrës reconnu coupable d’avoir participé à la « corruption passive de juges, procureurs et autres fonctionnaires du pouvoir judiciaire » visée aux articles 319/ç et 25 du Code pénal ; de suspendre un magistrat du tribunal de district de Kruja, sur requête de l’Inspecteur général de la justice ; de faire suite à la demande de l’Inspecteur général de la justice concernant la révocation d’un juge de la Cour d’appel de Durrës, reconnu coupable de « corruption passive » visée à l’article 319/ç du Code pénal.

24.Le Parquet spécialisé compte actuellement 17 procureurs titulaires sur les 20 approuvés par l’Assemblée albanaise. Le Bureau national des enquêtes est subordonné au Parquet spécialisé en tant qu’unité spécialisée chargée d’enquêter de manière efficace sur les affaires de corruption, de criminalité organisée et les infractions commises par des hauts fonctionnaires, en toute indépendance et à l’abri de toute influence indue. Comme le Parquet spécialisé, il est totalement indépendant du Procureur général. Le directeur du Bureau national des enquêtes est nommé par le Conseil supérieur du parquet, sur proposition du procureur spécial. Le Bureau regroupe également les services de la police judiciaire, composés d’agents de la police judiciaire, de la police d’État et d’autres organes compétents, le but étant de favoriser la coopération et la communication entre le Bureau et d’autres organes, ainsi que de contribuer aux enquêtes du Parquet spécialisé confiées à d’autres organes. À l’issue de leur formation, les agents nommés au Bureau restent en fonction sept ans au minimum.

25.Tous les organes de l’État ont l’obligation de coopérer avec le Parquet spécialisé et le Bureau national des enquêtes dans le cadre de l’instruction des affaires pénales, conformément à la législation en vigueur. Le processus de sélection du directeur et des enquêteurs est défini dans la loi no 95/2016 relative à l’organisation et au fonctionnement des organes de lutte contre la corruption et la criminalité organisée.

26.S’agissant de la lutte anticorruption au cours de la période considérée, le Bureau du Procureur général a diligenté des enquêtes dans le cadre de 91 procédures pénales ouvertes pour des délits de corruption en 2019, en coopération avec les forces de l’ordre. Dans ce cadre, les procureurs ont joué un rôle actif en finalisant les enquêtes qui ont abouti à l’arrestation en flagrant délit ou à la détention de 72 auteurs présumés d’infractions pénales (corruption, abus de fonction, etc.).

27.Selon les données statistiques de 2019, les procédures enregistrées pour des infractions de corruption qui relèvent de l’article 259 du Code pénal (Corruption passive de personnes exerçant des fonctions publiques) sont les plus nombreuses (33,5 %).

28.Concernant la corruption au plus haut niveau, nous avons retenu quelques cas emblématiques pour l’année 2019 : trois anciens juges de la cour d’appel ont plaidé coupables et ont été condamnés pour « corruption passive de juges, de procureurs et autres fonctionnaires de la justice » ; un ancien juge de première instance a plaidé coupable et a été condamné pour « corruption passive de juges, de procureurs et autres fonctionnaires de la justice » ; la déclaration de culpabilité et la condamnation d’un ancien Ministre de l’intérieur pour « abus de pouvoir » ; la déclaration de culpabilité et la condamnation d’un ancien Ministre de l’Intérieur, pour « abus de la fonction ».

29.En novembre et décembre 2019, à la veille de la création du Parquet spécialisé, leGroupe spécial pour la lutte contre la corruption et la criminalité organisée (SPAK), le Procureur général a approuvé l’instruction générale no 9/2019, par laquelle les affaires seraient transférées de manière unifiée au Parquet spécialisé dès qu’il serait opérationnel, de manière à garantir l’application du principe de légalité, le respect des droits et libertés des personnes faisant l’objet d’une enquête, des défendeurs et des victimes, le respect du secret de l’instruction et la continuité de l’exercice des poursuites pénales.

30.En 2020, les infractions pénales liées à la corruption ont été confiées au Parquet spécialisé, en coopération avec les nouvelles institutions de lutte contre la corruption et la criminalité organisée (SPAK) et d’autres organes répressifs spécialisés.

31.Selon les données statistiques pour 2020, les parquets généraux ont enregistré 25 procédures pénales pour des faits de corruption (17 accusés) ; trois procédures (trois accusés) ont été renvoyées devant le tribunal et 20 accusés ont été reconnus coupables.

32.Conformément aux articles 244, 245/1, 258 et 259 du Code pénal, le Parquet spécialisé était seul compétent en matière d’infractions pénales jusqu’en juin 2021. Depuis, le Code pénal a été modifié par la loi no 43/2021 et ses articles 244, 245/1, 258 et 259 ont été complétés. De même, conformément à l’article 39 de la loi no 41/2021 portant modification de l’article 75/a du Code de procédure pénale, entrée en vigueur le 1er juin 2021, les articles modifiés (244 (par. 1), 245 (par. 1 et 3), 258 (par. 1) et 259 (par. 1 et 3)) du Code pénal s’appliquent désormais aux poursuites engagées devant les juridictions de droit commun.

33.En conséquence, si l’on se réfère aux données statistiques en 2021, on observe une augmentation sensible des groupes d’infractions de corruption relevant de la compétence de la juridiction générale. Ainsi, 100 procédures (87 accusés) ont été enregistrées et 54 procédures (55 accusés) ont donné lieu à un procès.

34.Au cours des trois premiers mois de 2022, 48 procédures pour des infractions liées à la corruption ont été enregistrées ; 28 procédures (30 accusés) ont étérenvoyées en jugement.

35.En ce qui concerne la lutte contre la corruption, la Direction générale de l’administration pénitentiaire a constaté des irrégularités commises par des hauts fonctionnaires ou des membres du personnel des institutions du système pénitentiaire dans l’exercice de leurs fonctions et les a transmises aux organes de poursuites pénales. La Direction générale de l’administration pénitentiaire a rassemblé des informations sur les activités illégales de ces fonctionnaires et a engagé des poursuites à leur encontre pour falsification de documents de travail des détenus, abus de la fonction, introduction ou recel d’objets interdits dans l’Institution chargée de l’exécution des peines, influence illégale sur des personnes exerçant des fonctions publiques.

36.S’agissant de la mise en place de l’Inspection générale de la justice, du Conseil supérieur de la magistrature et du Conseil supérieur du parquet (et d’autres structures), la Direction générale de l’administration pénitentiaire a dénoncé, en les nommant, des juges et des procureurs pour leurs prises de décision en faveur des prisonniers, en contravention avec la loi, et a même signalé 14 magistrats à la SPAK.

37.La Direction générale de l’administration pénitentiaire a renforcé la coopération interinstitutionnelle avec d’autres organes répressifs, notamment la coopération et la coordination avec le Bureau du Procureur général, pour une exécution efficace des décisions pénales, des enquêtes approfondies sur les infractions commises dans les prisons ; l’accès à la base de données « Gestion des informations du système pénitentiaire » ; la coopération et la coordination avec la SPAK ; la coopération et la coordination avec le Service de renseignement de l’État (SHISH), etc.

Article 4 − État d’urgence

38.L’Albanie a adopté la loi no 15/2016 relative à la prévention et au combat contre les infections et les maladies infectieuses. L’article 7 (par. 3 et 4) est relativement conforme au Pacte, mais prévoit aussi des dérogations dans le contexte de la pandémie de COVID-19, notamment les mesures de confinement total pendant deux mois en 2020, le port obligatoire du masque dans les espaces ouverts et l’enseignement en ligne, dans le respect de l’article 7 (par. 4 et 5) de la loi et du document CCPR/C/128/2 concernant la stricte nécessité et la proportionnalité de toute mesure dérogatoire dans des situations d’urgence (portée géographique et matérielle des dispositions).

39.Face à la situation provoquée par la maladie à coronavirus, les autorités albanaises ont décrété l’état de catastrophe naturelle le 24 mars 2020. Le Gouvernement et les autorités sanitaires ont immédiatement pris des mesures sanitaires pour contenir l’épidémie ainsi que des mesures économiques.

40.Le Ministère de la santé et de la protection sociale a adopté une série de mesures visant à prévenir la propagation du virus et à apporter toute l’aide nécessaire aux groupes qui en avaient besoin. Tous les groupes marginalisés et vulnérables ont été testés et traités en priorité, avec la coopération des collectivités locales.

41.Parmi les mesures prises en faveur des communautés et de grands groupes de population, on peut citer les programmes de protection sociale suivants :

a)Grâce à la coopération entre le Gouvernement central et les collectivités locales, un Groupe de travail interinstitutionnel a pu être mis en place en application de la décision no 236 du 19 mars 2020 du Conseil des ministres relative aux mesures visant à fournir une aide au logement aux personnes dans le besoin pendant l’épidémie de COVID‑19. Dans les premiers jours de la pandémie, l’objectif premier a été d’aider les familles et les personnes retraitées démunies et les municipalités se sont largement mobilisées pour venir en aide à ces catégories sociales ;

b)Au total, 233 248 familles ont reçu une aide alimentaire et non alimentaire, sous la forme d’une aide au logement, y compris le paiement de prestations au titre du programme de protection sociale (WE et AKP) et de l’assurance sociale (travailleurs handicapés et retraités), de colis alimentaires et non alimentaires ou de médicaments remboursables, ainsi que d’une aide aux sans-abri et aux personnes qui avaient perdu leur logement dans le séisme qui a frappé l’Albanie en 2019 ;

c)Conformément à la décision no 254 du 27 mars 2020 du Conseil des ministres, les personnes et les familles bénéficiaires de l’aide économique ont reçu un complément sous la forme d’une aide financière unique (égale à deux fois le montant de l’aide économique) ; 63 508 familles bénéficiaires ont profité de cette mesure ;

d)Le Gouvernement a versé 16 000 ALL aux familles qui avaient demandé l’aide économique entre juillet 2019 et avril 2020, mais qui n’avaient pas pu bénéficier de l’aide économique ni du fonds conditionnel 6 %. Cette aide a été versée à 4 524 familles, conformément à la décision no 341 du 23 avril 2020 du Conseil des ministres modifiant et complétant la décision no 305 du 16 avril 2020 du Conseil des ministres sur les procédures, la documentation et la portée des prestations financières octroyées aux salariés en activité et aux salariés licenciés à cause de la COVID-19 ;

e)Afin de limiter le risque de propagation de l’épidémie pendant la catastrophe naturelle, les demandes d’aide économique ont été faites par courrier électronique ou postal. Les vérifications familiales et les déclarations des trois mois ont également été suspendues, conformément à l’ordonnance no 213 du 31 mars 2020 relative aux mesures de prévention de l’infection à la COVID-19 parmi les demandeurs de l’aide économique ;

f)Les commissions d’évaluation des personnes en situation de handicap et d’invalidité professionnelle ont suspendu leurs activités et des mesures ont été prises pour que le versement des indemnités et pensions d’invalidité ne soit pas supprimé jusqu’à nouvel ordre, conformément à l’arrêté no 226 du 2 avril 2020 du Ministre de la santé et de la protection sociale relatif à la suspension des activités des commissions d’évaluation des personnes en situation de handicap et d’invalidité professionnelle ;

g)Le Gouvernement a suspendu les visites au domicile des personnes âgées isolées et a mis en place un service fonctionnant 24 heures sur 24 dans les environnements urbains, imposé des mesures d’hygiène et demandé aux employés de ces services de se confiner dans les établissements qui les employaient ;

h)Les visites des familles, des amis et des proches des bénéficiaires ont été interdites dans tous les autres établissements publics et privés accueillant des enfants ou des personnes handicapées, de manière à éviter les contaminations à la COVID-19 ;

i)Les employés des institutions qui ont choisi de se confiner ont touché une prime, conformément à la décision no 371 du 6 mai 2020 du Conseil des ministres sur l’octroi d’une prime au personnel des institutions d’accueil placées sous la responsabilité administrative du Service social de l’État et des municipalités ;

j)Grâce à toutes ces mesures, aucune personne âgée ni aucun enfant placé dans nos institutions d’accueil n’ont été infectés par ce virus ;

k)Le décret no 290 du 4 mai 2020 sur l’approbation du protocole relatif au fonctionnement des établissements publics et privés qui offrent des services d’hébergement à long terme aux personnes âgées pendant la période de catastrophe naturelle due à l’épidémie de COVID-19 visait à protéger les plus vulnérables, à savoir les personnes âgées ;

l)Des contacts ont été établis avec les unités locales de soins de santé pour qu’elles surveillent l’état de santé des bénéficiaires et pour qu’elles appliquent les protocoles approuvés par le Ministère de la santé et de la protection sociale et l’Institut de santé publique en cas de suspicion d’infection ; ces protocoles ont été complétés par des mesures d’hygiène et de santé, en application de l’ordonnance no 157 du 10 mars 2020 du Ministre de la santé et de la protection sociale sur les mesures de prévention des risques d’infection à la COVID-19 parmi les bénéficiaires des services de soins sociaux (modifiée) ;

m)Le décret no 386 du 23 juin 2020 du Ministre de la santé et de la protection sociale a approuvé le Protocole relatif au fonctionnement des établissements sans hébergement, publics et privés, qui fournissent des services aux personnes handicapées, pendant et après la catastrophe naturelle, jusqu’à ce que les mesures de distanciation physique et sociale dues à l’épidémie de COVID-19 soient levées. Ce document d’orientation visait à permettre aux parents d’enfants et d’adolescents en situation de handicap de continuer à bénéficier d’un soutien psychosocial dans un contexte de stress accru dû à l’épidémie de COVID-19 et aux mesures d’austérité qui l’accompagnaient ;

n)En avril 2020, dans le cadre de la mise en œuvre du programme du Fonds social, le Ministère de la santé et de la protection sociale a débloqué 61 millions ALL au profit de 14 communes, en vue de soutenir financièrement la mise en place ou le développement de services, principalement des services de proximité, destinés à diverses catégories de bénéficiaires ;

o)Le Ministère de la santé et de la protection sociale, en coopération avec les bureaux de l’OMS et l’UNICEF en Albanie, a organisé un module de formation en ligne sur la santé mentale et le soutien psychosocial dans les situations de crise. Ces formations visaient à doter les professionnels de première ligne des notions de base et des outils nécessaires pour protéger et améliorer la santé mentale et le bien-être psychosocial des personnes dans les situations de crise ;

p)Enfin, concernant le soutien psychosocial dans le contexte de la pandémie de COVID-19, le Ministère de la santé et de la protection sociale a mis en place un numéro vert (0800 40 40) pour obtenir des conseils psychologiques gratuits en ligne (à partir de mai 2020).

42.Lutte contre la violence familiale et la violence contre les femmes : Malgré les difficultés dues à la pandémie de COVID-19, la lutte contre la violence à l’égard des femmes et des filles et contre la violence familiale a beaucoup progressé. Le cadre juridique et les politiques en la matière ont été améliorés, les capacités des membres des mécanismes d’orientation coordonnés ont été renforcées, le public a été sensibilisé, etc.

43.Pendant la période de restrictions et de confinement due à la COVID-19, le Ministère de l’éducation, de la culture, des sports et des sciences a pris toute une série de mesures pour informer les femmes, les jeunes, les filles et l’ensemble de la population sur l’importance du suivi et du maintien des services destinés aux victimes de la violence sexiste et intrafamiliale pendant toute la durée de l’état de catastrophe naturelle.

44.Le Ministère de la santé a également mené des actions conjointes avec les Ministères de tutelle et les collectivités locales pour mettre rapidement à l’abri les proches exposés à la violence et isolés du fait de la pandémie, ainsi que pour adapter et maintenir les services d’aide spécialisée.

45.Handicap : Le PNUD a aidé le Ministère de la santé et de la protection sociale à élaborer le Protocole relatif au fonctionnement des centres d’hébergement publics et privés, à la fourniture de services aux personnes handicapées, pendant et après les catastrophes naturelles, jusqu’à la levée des mesures de distanciation physique et sociale imposées par la pandémie de COVID-19 ; le protocole a été approuvé par l’arrêté no 381 du 23 juin 2020 du Ministère de la santé et de la protection sociale.

46.Le Ministère de la santé et de la protection sociale a collaboré avec le PNUD pour définir les domaines nécessitant une assistance d’urgence, le but étant de réduire les effets négatifs pour les groupes les plus pauvres et les plus vulnérables. Cela a permis d’activer le réseau de professionnels des centres de développement concernés pour qu’ils proposent des services sociaux spécialisés en ligne aux enfants handicapés.

47.Des subventions ont été accordées à l’Association nationale albanaise des sourds pour qu’elle puisse diffuser des informations fiables et actualisées sur la COVID-19 en langue des signes, et mettre en place une ligne d’assistance téléphonique ouverte 24 heures sur 24 pour informer et orienter les personnes malentendantes. Les communiqués de presse quotidiens du Ministère de la santé et de la protection sociale ont été traduits en langue des signes.

48.Mesures prises en faveur des communautés rom et égyptienne :

Électricité : Les intérêts et frais pour retard de paiement ont été supprimés sans condition pour les Roms et les familles égyptiennes ;

Loyers : Les loyers de 385 familles bénéficiant d’un logement social ont été pris en charge par la municipalité de Tirana en mars et avril 2020.

49.Mesures en faveur des enfants : Le Ministère de la santé et de la protection sociale a approuvé l’instruction no 253 du 10 avril 2020 sur la gestion des cas d’enfants ayant besoin de protection pendant la période de catastrophe naturelle due à la pandémie de COVID-19. Cette instruction définit les procédures que les structures de protection de l’enfance doivent respecter et les mesures concrètes qu’elles doivent prendre, en mettant notamment l’accent sur une coopération étroite entre les travailleurs du secteur. Le cas échéant, il appartient aux agents de santé et aux psychologues scolaires des municipalités et des unités administratives de mettre à jour les informations relatives à l’identification et au traitement des cas suspects de maladie à coronavirus (COVID-19) sur leur territoire, d’orienter les enfants qui ont besoin de protection, ainsi que les enfants privés de protection parentale parce que leurs parents ou tuteurs légaux ont été hospitalisés ou sont morts des suites de la COVID-19.

50.Services de soutien psychologique à distance :

a)Création d’un tout nouveau service de soutien psychologique gratuit pour tous les citoyens et les enfants qui en ont besoin en cas de pandémie, sur le site Internet du Ministère de la santé et de la protection sociale et d’un numéro vert (0884040) accessible tous les jours de 8 heures à 22 heures ;

b)Un numéro national gratuit (ALO 116 111) conseille les enfants ;

c)La plateforme www.nukjevetm.al propose des conseils (messages) ou une thérapie individuelle (service de chat) en ligne ;

d)L’Ordre des psychologues (Psychologues albanais en ligne) a publié sur son site officiel la liste des psychologues disponibles (https://arsimi.gov.al/kontakto-psikologun/).

Articles 2, 20 et 26 − Non-discrimination : recours judiciaires efficaces en cas de violation des droits

51.La Constitution albanaise consacre le principe de l’égalité des citoyens devant la loi et de l’interdiction de la discrimination déloyale fondée sur le sexe, la race, la religion, l’ethnie, la langue, les convictions politiques, religieuses ou philosophiques, la condition économique, le niveau d’instruction, la condition sociale ou la filiation (art. 18). La Constitution et les cadres juridique, institutionnel et politique applicables reposent sur le principe de la non-discrimination fondée sur les motifs prévus également dans le Pacte, ainsi que sur l’adoption de mesures juridiques ou d’autres mesures nécessaires à la réalisation des droits civils et politiques.

52.Le Parlement (Assemblée de la République d’Albanie) a approuvé la loi no 10221 du 4 février 2010 sur la protection contre la discrimination (modifiée) qui est entrée en vigueur le 13 mars 2010. Cette loi garantit à tous les citoyens le droit à l’égalité devant la loi et à l’égale protection de la loi, à l’égalité des chances et à l’égalité dans l’exercice des droits et des libertés ainsi qu’une protection efficace contre la discrimination.

53.Les modifications apportées à la loi sur la protection contre la discrimination ont été approuvées par la loi no 124/2020 du 15 octobre 2020 complétant et modifiant la loi no 10221 du 4 février 2010 sur la protection contre la discrimination. Elles peuvent être résumées comme suit :

De nouveaux motifs (nationalité, genre, VIH/sida et apparence physique) ont été ajoutés à l’article premier de la loi sur la protection contre la discrimination ;

De nouvelles formes de discrimination (discrimination multiple, discrimination intersectionnelle, discours de haine, ségrégation, harcèlement sexuel, discrimination structurelle, incitation à la discrimination et complicité, et intention manifeste de discriminer) ont été ajoutées, conformément à la pratique internationale et pour tenir compte de l’évolution de la société. Certaines formes de discrimination ont aussi été reformulées, comme la notion de « victimisation » (art. 3) ;

Les formes graves de discrimination font l’objet d’une disposition spéciale, applicable en cas de comportement discriminatoire fondé sur plusieurs motifs, répété plus d’une fois, pendant une période prolongée ou ayant eu des conséquences particulièrement préjudiciables pour la victime. Dans ce cas, les sanctions sont doublées, conformément à la loi (art. 3/1 et 33) ;

Les agents de la fonction publique doivent promouvoir l’égalité et prévenir la discrimination dans l’exercice de leurs fonctions (art. 7, par. 3) ;

Des conditions d’éligibilité à la fonction de Commissaire à la protection contre la discrimination ont été ajoutées et d’autres reformulées. Le candidat doit notamment justifier d’une grande intégrité morale et se distinguer par son engagement dans la communauté, être titulaire d’un diplôme universitaire de deuxième cycle ou d’un diplôme équivalent, conformément aux règles relatives à l’équivalence des diplômes prévues par la législation en vigueur, ou justifier d’une expérience professionnelle de cinq ans au minimum dans le domaine des libertés et des droits de l’homme et dans le domaine juridique (art. 24, al. a, b et c) ;

La loi confère au Commissaire à la protection contre la discrimination de nouveaux pouvoirs et en modifie d’autres, parmi lesquels celui d’examiner les plaintes déposées par des personnes ou des groupes de personnes qui affirment avoir été victimes de la discrimination, comme prévu dans la loi sur la protection contre la discrimination et dans la loi sur l’égalité des genres dans la société. De par la loi, le Commissaire est désormais compétent pour suivre la mise en œuvre de la loi et pour examiner les plaintes émanant d’organisations qui ont un intérêt légitime à agir au nom et avec le consentement écrit de personnes ou de groupes de personnes qui font valoir une discrimination, ou en leur nom dans le cadre de questions d’intérêt collectif. Il convient de souligner que le droit d’engager des poursuites, au nom du principe d’égalité et de non-discrimination, dans des affaires présentant un intérêt général a été ajouté dans la loi, ainsi que le droit de saisir la Cour constitutionnelle si, dans le cadre de ses fonctions, il estime que la loi ou l’acte normatif viole les libertés fondamentales et les droits des personnes (art. 32) ;

L’obligation faite à toutes les institutions publiques et entités privées d’apporter leur soutien au Commissaire en lui communiquant les informations dont il a besoin et en lui garantissant l’accès à l’information dans l’exercice de ses fonctions, conformément à la législation régissant le droit et la protection de l’information, a été étendue aux données à caractère personnel (art. 32) ;

Afin d’encourager les membres de la communauté LGBTI, ainsi que les personnes qui veulent dénoncer des cas de harcèlement sexuel au travail, la loi précédente a abrogé la disposition selon laquelle le Commissaire n’examinait pas les plaintes anonymes, de sorte que les personnes susmentionnées peuvent désormais porter plainte de manière anonyme (art. 33) ;

Une nouvelle modification apportée à la loi élargit les possibilités de saisir le Commissaire à la protection contre la discrimination, puisque le délai fixé pour le dépôt d’une plainte a été porté d’un à deux ans ;

Conformément aux nouvelles dispositions légales, les organisations ayant des intérêts légitimes peuvent désormais saisir directement l’institution d’une plainte au nom d’un intérêt collectif ou présenter des informations crédibles en vue de déclencher une enquête, principalement par l’intermédiaire du Commissaire. Les organisations de la société civile peuvent engager des poursuites pour discrimination et agir en justice afin d’assurer directement la défense d’un intérêt collectif (art. 33 et art. 34) ;

Le « renversement de la charge de la preuve » est l’une des innovations de la loi, qui transfère la charge de la preuve à l’auteur présumé du comportement discriminatoire (art. 33) ;

La loi prévoit la possibilité de faire appel à des experts dans le cadre de l’instruction, selon la complexité du domaine concerné par l’enquête (avis professionnel) ;

La procédure de recouvrement des amendes et d’exécution des décisions du Commissaire fait désormais l’objet d’une disposition à part, selon laquelle les décisions du Commissaire d’imposer des amendes qui n’ont pas fait l’objet d’un recours dans le délai prévu par la loi deviennent exécutoires et sont obligatoirement exécutées par le bureau d’exécution des décisions, à la demande du Commissaire (art. 33, par. 1).

54.La loi no 10221/2010 sur la protection contre la discrimination confère de larges pouvoirs au Commissaire en ce qui concerne la participation de son institution au procès. Ses décisions peuvent être contestées devant les tribunaux. Si l’entité reconnue coupable de violation conteste la décision du Commissaire en justice, celui-ci est cité à comparaître en qualité de défendeur.

55.Conformément à la loi, le tribunal informe le Commissaire de chaque plainte pour discrimination (art. 36, par. 3) et peut lui demander, à tout moment de la procédure, de lui soumettre un avis écrit, les résultats de son enquête, le cas échéant, ou toute autre information pertinente (art. 36, par. 4 et art. 32, par. 1, al. gj). Dans ce cas, le Commissaire est entendu par le tribunal en qualité de tierce opposition.

56.Le Commissaire peut aussi comparaître en tant que requérant, pour obtenir du tribunal des ordres d’exécution des amendes qu’il a imposées. Si le tribunal accède à sa requête, le Commissariat à la protection contre la discrimination exécute l’ordonnance d’injonction de payer.

57.Pendant la période 2013-2021, le Commissaire à la protection contre la discrimination a été cité à comparaître dans 537 affaires. Dans 254 affaires, il a été appelé en qualité de défendeur, les entités reconnues coupables de violation de la loi sur la protection contre la discrimination (modifiée) demandant l’annulation ou la nullité de ses décisions. Il a été appelé en tant que tierce opposition dans 220 affaires de discrimination et d’indemnisation portées devant les tribunaux. Dans ce genre d’affaires, il participe au procès en tant que tierce partie et soumet un avis écrit au tribunal compétent. Il a comparu en tant que requérant dans 63 affaires, pour obtenir des ordonnances d’injonction de payer les amendes qu’il avait imposées.

58.Au cours de la période considérée, les principes de l’égalité et de l’interdiction de toute forme de discrimination prévus par la Constitution albanaise ainsi que par l’article 2 (par. 1) du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, ont été inclus dans divers instruments juridiques, comme suit :

59.La loi no 93/2014 relative à l’inclusion et à l’accessibilité des personnes handicapées vise : a) à promouvoir et protéger les droits des personnes handicapées de manière à leur permettre de participer pleinement et efficacement dans la société, en leur fournissant une assistance et un soutien ; et b) à déterminer la responsabilité de toutes les structures publiques et non publiques dans l’application des principes d’inclusion et d’accessibilité.

60.Dans son Rapport d’évaluation du Plan pour les personnes LGBTI+ (2016-2020), l’Albanie relève que la reconnaissance des droits des personnes LGBTI+ a sensiblement progressé ces dernières années, qu’elles forment une communauté solide et active qui défend leurs droits et que les mesures de sensibilisation du public ont été poursuivies. Il est également indiqué dans le Rapport que des progrès restent à faire en ce qui concerne la sensibilisation de la société, l’offre de services d’aide et l’harmonisation de la législation.

61.Les principes d’égalité et de non-discrimination sont inscrits dans le Code de procédure administrative (approuvé par la loi no 44/2015). Dans le cadre de leurs activités, les organismes publics doivent éviter toute forme de discrimination fondée sur les motifs tels que spécifiés.

62.La loi no 121/2016 relative aux services de santé en République d’Albanie établit le principe de la non-discrimination dans les principes de base de la fourniture des services. La loi prévoit la fourniture de services spécialisés pour les femmes et les filles victimes de la violence ou de la traite, pour les femmes et les filles enceintes ou les parents isolés d’enfants âgés de moins d’un an, etc.

63.La loi no 65/2016 relative aux entreprises sociales en République d’Albanie vise, en particulier, à promouvoir l’emploi des personnes défavorisées sur le marché du travail, notamment les bénéficiaires d’une aide économique, les personnes handicapées, les orphelins, les femmes victimes de la violence et de la traite, etc.

64.La loi no 97/2016 relative à l’organisation et au fonctionnement des parquets en République d’Albanie améliore l’accès des victimes à l’information par le biais d’un coordinateur des relations publiques nommé dans chaque parquet et chargé d’informer les victimes.

65.L’égalité et la non-discrimination figurent dans les principes de base de la loi no 18/2017 relative aux droits et à la protection de l’enfant, qui définit la notion de protection de l’enfance ainsi que les « mesures de protection » contre la violence, les abus, la négligence ou l’exploitation. La loi aborde pour la première fois la question de la protection des enfants en situation de rue qui sont contraints de travailler ou sont exploités par le travail, et traite des différentes formes de violence contre les enfants, notamment le harcèlement, la violence à l’école, la violence intrafamiliale, les abus sexuels, l’exploitation économique, la sécurité des enfants sur Internet, les enfants non accompagnés, les victimes de la traite, etc.

66.La loi no 37/2017 relative au Code de justice pénale pour mineurs affirme le principe de non-discrimination et établit le cadre de la justice pénale pour mineurs. Elle vise à promouvoir la réinsertion des mineurs en conflit avec la loi, à protéger les droits des mineurs victimes ou témoins d’une infraction pénale et à prévenir une nouvelle victimisation et la victimisation secondaire des enfants qui ont déjà été victimes d’une infraction pénale.

67.La loi no 111/2017 sur l’assistance juridique garantie par l’État repose sur le principe de l’égalité et de la non-discrimination en ce qui concerne le droit à l’assistance juridique et le professionnalisme quant aux services fournis en la matière. Elle garantit la fourniture d’une assistance juridique gratuite aux catégories de personnes suivantes : les victimes de la violence domestique, d’abus sexuels et de la traite, les mineurs en conflit avec la loi, les enfants placés dans des institutions de protection sociale, les personnes dont les droits ont été violés par une action ou une inaction constitutive d’une discrimination, etc.

68.La loi no 96/2017 relative à la protection des minorités nationales en République d’Albanie vise à garantir la non-discrimination et la pleine égalité devant la loi.

69.Toutes les stratégies et tous les plans d’action approuvés par le Gouvernement en 2021 − Stratégie nationale pour l’égalité des genres (2021-2030), Plan pour l’égalité, l’inclusion et la participation des Roms et des Égyptiens (2021-2025), Plan national pour les personnes handicapées (2021-2025), Programme relatif aux droits de l’enfant (2021-2026), Plan d’action national pour les personnes LGBTI+ (2021-2027), etc. − visent à mettre en œuvre des mesures et des activités qui contribueront à créer une société fondée sur la justice et l’égalité et à permettre à tous les citoyens d’exercer les mêmes droits et d’avoir les mêmes chances dans tous les domaines de la vie, une société qui ne laisse personne de côté et qui est fondée sur le principe de la tolérance zéro vis-à-vis de toutes les formes de violence, ycompris les discours de haine.

70.Le Rapport d’évaluation du Plan d’action national pour les personnes LGBTI+ (2016‑2020) a livré quelques conclusions qui montrent que, ces dernières années, des progrès sensibles ont été accomplis en ce qui concerne la reconnaissance de leurs droits, qu’elles forment une communauté solide et active qui défend leurs droits et que les mesures de sensibilisation du public ont été poursuivies. Il est également indiqué dans le Rapport que des progrès restent à faire en ce qui concerne la sensibilisation de la société, l’offre de services d’aide et l’harmonisation de la législation.

71.Par sa décision no 700 du 18 novembre 2021, le Conseil des ministres a approuvé le Plan d’action national pour les personnes LGBTI+ (2021-2027), qui met l’accent sur les mesures visant à lutter contre les discours de haine et les propos discriminatoires à l’encontre des LGBTI+.

72.Roms et Égyptiens : Le Plan pour l’égalité, l’inclusion et la participation des Roms et des Égyptiens (2021-2025) définit des priorités dans les domaines suivants : accès à la justice, éducation et culture, emploi, logement, protection sociale et lutte contre l’antitsiganisme par le respect des principes de l’égalité et de la non-discrimination, conformément aux normes internationales, et dans le cadre de la mise en œuvre des conventions et du cadre juridique relatifs au respect des droits de l’homme et des minorités.

73.L’Albanie a récemment organisé le Cinquième séminaire Albanie-UE consacré à l’inclusion des Roms et des Égyptiens et s’apprête à approuver des recommandations communes.

74.Le Ministère de la santé et de la protection sociale s’associe aux collectivités locales pour élaborer des plans sociaux qui prennent en compte tous les groupes défavorisés. Le Conseil de l’Europe a lancé des plans locaux dans 10 communes.

75.Les Roms et les Égyptiens ont bénéficié de l’assouplissement des procédures relatives à la mise en œuvre du régime d’aide économique et de la revalorisation de 100 % des prestations pendant la pandémie ; 2 344 familles roms et égyptiennes ont bénéficié du régime d’aide économique en 2019, 3 068 familles en 2020 et 3 339 familles en 2021.

76.Les familles roms et égyptiennes bénéficient de programmes tels que l’allocation de naissance ; 35 000 mères en ont profité en 2019 et 36 161 en 2020. En 2021, ce sont 43 159 mères qui ont bénéficié de cette politique sociale qui a un effet positif sur les mères et les familles roms et égyptiennes.

Articles 3, 25 et 26 − Égalité des sexes

77.La loi no 9970/2008 relative à l’égalité des sexes en Albanie (art. 15, par. 1 a)) dispose que la parité femmes-hommes dans tous les organes du pouvoir législatif, exécutif et judiciaire et dans les autres institutions publiques est atteinte lorsque : « chaque sexe est représenté à hauteur de 30 %, y compris au sein de leurs organes directeurs ».

78.En avril 2015, des modifications au Code électoral ont été adoptées ; elles prévoient un quota de 50 % de candidats et de 50 % de candidates sur les listes électorales locales. Ces modifications tiennent compte de la nouvelle division administrative territoriale et de la recommandation de l’OSCE/BIDDH de promouvoir la participation des femmes en portant à 50 % le quota de femmes sur les listes de candidats aux conseils municipaux, les listes devant être composées alternativement d’un candidat de chaque sexe.

79.Conformément à la loi no 101/2020 modifiant et complétant la loi no 10019 du 29 décembre 2008, le Code électoral consacre le principe de l’égalité des sexes, tel qu’il est défini dans les lois en vigueur. L’obligation de respecter le principe de l’égalité des sexes incombe aux candidats, à l’administration électorale et aux tribunaux. La Commission électorale centrale peut intervenir en cas de non-respect de ce principe et, en cas d’inaction, elle peut agir pour rétablir l’égalité des sexes. Le droit électoral promeut l’égalité des sexes dans les organes élus et dans l’administration électorale en imposant un quota de 30 % au moins du sexe sous-représenté à l’Assemblée d’Albanie, dans les organes de base des collectivités locales et à tous les échelons de l’administration électorale.

80.Ces cinq dernières années, de nombreux succès ont été enregistrés dans le domaine de l’autonomisation des femmes, de l’égalité des sexes, de la réduction de la violence fondée sur le genre et de la violence domestique.

81.L’Albanie a pleinement mis en œuvre 80 % de la Stratégie nationale pour l’égalité des genres (2016-2020) (SKBGJ 2016-2020).

82.Concrètement, 75,5 % de l’objectif stratégique 2 (Garantir une participation et un engagement de fait et sur un pied d’égalité des femmes dans la prise de décision politique et publique) ont été atteints. Il est recommandé d’inscrire les résultats positifs obtenus dans le long terme et la durabilité, et de les étendre à la prise de décision publique et aux collectivités territoriales autonomes. Ces recommandations ont été traduites en mesures et actions concrètes dans la nouvelle Stratégie nationale pour l’égalité des genres (2021-2030).

83.Selon le Rapport mondial sur l’écart entre les femmes et les hommes (Global Gender Gap Report 2021) du Forum économique mondial, l’Albanie se classe 25e, sur 156 pays, avec des progrès notables en matière d’émancipation politique des femmes.

84.Selon l’Indice d’égalité de genre, publié pour la première fois en 2020 et mesuré selon la méthodologie européenne établie, l’Albanie fait mieux que la moyenne des pays membres de l’UE dans le domaine du pouvoir ; avec un score de 60,4 dans le domaine de l’égalité femmes-hommes, elle n’est qu’à sept points de la moyenne des pays de l’Union européenne.

85.L’instauration de quotas pour chaque sexe a entraîné une augmentation notable de la représentation des femmes dans la vie politique et la prise de décision :

Dans la Xe législature (2021-2025) (élections législatives d’avril 2021), 50 mandats sur 140 (35,7 %) sont confiés à des femmes, soit une augmentation de 3,2 % (11 mandats) par rapport à la législature précédente (2017-2021). En 2021, 732 femmes sur 1 871 candidats (39 %) se sont présentées aux élections législatives ;

La présidence de l’Assemblée d’Albanie est assurée par une femme et l’un des vice‑présidents est une femme ; 4 des 8 commissions parlementaires permanentes sont dirigées par des femmes ;

Le Gouvernement albanais est composé de 16 ministres, dont 12 femmes ;

Collectivités locales : Les résultats des élections locales de 2019 se répartissent comme suit : 8 municipalités sur 61 ont une femme à leur tête (13 %) et 44 % des conseillers municipaux sont des femmes ;

Police : Le nombre de femmes est très faible et la situation n’a guère évolué ces cinq dernières années. En 2020, 14,4 % des 10 849 agents de police, classés par grade et par sexe, sont des femmes ;

Forces armées : Les femmes représentent 20 % des effectifs en 2020. La situation n’a guère évolué pendant la période 2016-2020 ;

Prise de décision et milieu de l’entreprise : En 2020, la proportion de femmes propriétaires ou administratrices d’entreprises actives est de 25,5 %, soit un taux supérieur à celui de 2019.

Articles 2, 3, 6 à 8, 24 et 26 − Violence contre les femmes

86.Les modifications apportées au Code pénal ont érigé la violence domestique en infraction pénale distincte. Les sanctions ont été durcies et les auteurs sont poursuivis pénalement et sanctionnés même si la victime se rétracte.

87.La violence domestique est définie à l’article 130/a du Code pénal :

Quiconque frappe ou se livre à un autre quelconque acte de violence physique ou psychologique sur son conjoint ou ex-conjoint, concubin ou ex-concubin, un proche parent, y compris par alliance, un proche qui entretient ou a entretenu une relation intime avec l’auteur de l’infraction, dans le but de porter atteinte à son intégrité physique, psychosociale et économique, encourt une peine d’emprisonnement maximale de trois ans ;

Quiconque fait peser une menace grave de meurtre ou de blessure grave sur son conjoint ou ex-conjoint, concubin ou ex-concubin, un proche parent, y compris par alliance, un proche qui entretient ou a entretenu une relation intime avec l’auteur de l’infraction, dans le but de porter atteinte à son intégrité physique, psychosociale et économique, encourt une peine d’emprisonnement maximale de quatre ans ;

Quiconque blesse intentionnellement son conjoint ou ex-conjoint, concubin ou ex‑concubin, un proche parent, y compris par alliance, un proche qui entretient ou a entretenu une relation intime avec l’auteur de l’infraction, si cette atteinte entraîne une incapacité temporaire de travail de plus de neuf jours, encourt une peine d’emprisonnement maximale de cinq ans ;

Si ces infractions sont commises de manière répétée ou en présence d’enfants, la peine d’emprisonnement est majorée d’un à cinq ans.

88.L’article 102 du Code pénal prévoit également ce qui suit : « Les rapports sexuels avec violence entre adultes ou entre époux ou concubins sans le consentement de l’un des partenaires sont punis d’un emprisonnement de trois à dix ans. En cas de rapports sexuels avec violence en réunion ou répétés, ou en cas d’atteintes graves à la santé de la victime, la peine encourue est de cinq à quinze ans d’emprisonnement. En cas de décès ou de suicide de la victime, la peine est de dix à vingt ans d’emprisonnement ».

89.Mesures prises pour prévenir et combattre la violence domestique et la violence de genre :

a)Amélioration du cadre juridique existant et renforcement des capacités pour ce faire :

Approbation de la loi no 35 du 16 avril 2020 complétant et modifiant la loi no 7895 du 27 janvier 1995 sur le Code pénal de la République d’Albanie (modifié). La principale modification apportée au Code pénal porte sur la criminalisation de la violence psychologique, la protection des personnes qui entretiennent ou ont entretenu une relation intime avec l’auteur de l’infraction pénale, etc., de sorte que le contenu de l’article 130/a est désormais harmonisé avec l’article 3 de la Convention d’Istanbul et les modifications apportées à la loi sur la violence domestique ;

Approbation de la loi no 125 du 15 octobre 2020 complétant et modifiant la loi no 9669 du 18 décembre 2006 sur les mesures de lutte contre la violence intrafamiliale (modifiée). Les femmes, les filles, les enfants, les personnes âgées et les personnes handicapées font l’objet d’une attention particulière ; le tribunal peut prendre une mesure de protection en ordonnant à l’auteur des violences de quitter immédiatement le logement pour une durée déterminée si la victime et l’auteur des faits vivent sous le même toit ; un article sur la réadaptation des auteurs d’infractions a été ajouté ; des mesures conservatoires de protection immédiate ordonnant à l’auteur des violences de quitter immédiatement le logement, si la victime et l’auteur des violences vivent sous le même toit − sauf si l’auteur est mineur, âgé ou handicapé − jusqu’à ce que le juge délivre l’ordonnance de protection immédiate ou de protection ; etc. ;

En ce qui concerne les modifications de la loi no 9669/2006 sur les mesures contre la violence dans les relations familiales telle que modifiée par la loi no 125/2020, le Ministère de l’éducation, avec l’assistance de partenaires internationaux (PNUD), a organisé des sessions de formation avec les coordinateurs locaux de la lutte contre la violence domestique dans les municipalités et les mécanismes d’orientation coordonnés ;

Élaboration et approbation de la décision no 327 du 2 juin 2021 du Conseil des ministres sur le Mécanisme de coordination des activités des autorités compétentes concernant l’orientation des cas de violence intrafamiliale, y compris les procédures, le soutien et la réadaptation des victimes de la violence ;

Approbation des consignes générales dans le domaine des services de soins de santé et d’aide sociale concernant le traitement des cas de violence domestique et des cas d’urgence civile, approuvées par les arrêtés nos 100, 101 et 102 du Ministre de la santé et de la protection sociale ;

Élaboration par des membres des Mécanismes d’orientation coordonnés de trois protocoles communs pour soutenir les Mécanismes − Protocole de gestion des cas de violence domestique, Protocole de gestion des cas de violence sexuelle chez les adultes/adultes, Protocole de gestion des cas de violence domestique dans les situations d’urgence. Parallèlement, les coordinateurs locaux ainsi que les membres des Mécanismes d’orientation coordonnés (avec le soutien du PNUD) ont été formés à l’application de ces protocoles.

b)Approbation et mise en œuvre des politiques d’égalité des genres :

Approbation de la Stratégie nationale pour l’égalité des genres (2021-2030). La SKBGJ 2021-2030 est la quatrième du genre et, comme les précédentes, elle atteste de la priorité et de l’attention que le Gouvernement albanais accorde à la réalisation de l’égalité femmes-hommes et à la réduction de la violence de genre et de la violence domestique, considérant que le développement durable passe par une prise en charge adaptée de ces questions ;

En ce qui concerne la violence à l’égard des femmes et la violence intrafamiliale, l’objectif stratégique III de la Stratégie prévoit une série d’objectifs, de mesures et d’actions qui visent spécifiquement à réduire la violence au sein de la famille et toutes les formes de violence de genre. D’un point de vue financier, cet objectif stratégique est aussi celui qui pèse le plus lourd sur la mise en œuvre de la stratégie (63,8 % du budget).

c)Services de lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique :

La République d’Albanie a mis en place plusieurs services d’aide spécialisés qui s’adressent aux personnes exposées à la violence de genre ou à la violence familiale. Il s’agit de centres d’hébergement à court terme (d’urgence) et à long terme, de centres de conseil pour les femmes et les filles, victimes ou victimes potentielles de la violence familiale ou de la traite, qui sont gérés par des structures publiques et des ONG ;

Les entités prévues par la loi gèrent 27 services opérationnels − logement, santé, services juridiques, aide psychosociale, protection, sécurité, lutte contre la traite, éducation, garde d’enfants et conseils téléphoniques −, dont 18 centres d’hébergement, 5 lignes de conseil et 1 centre spécialisé dans la prise en charge des cas de violence sexuelle ;

Sept des 18 centres d’hébergement offrent un accueil à long terme et 11 un accueil à court terme. Les centres d’hébergement, centres de conseil et de formation de jour répartis sur l’ensemble du territoire sont gérés comme suit : 14 relèvent de la compétence d’entités étatiques et 13 de la compétence d’ONG.

90.Le service Conseil pour les femmes et filles 116-117 est une ligne téléphonique ouverte 24 heures sur 24 qui est conforme aux normes de la Convention d’Istanbul et qui offre des services de soutien psychologique, d’assistance juridique primaire et secondaire, d’orientation et de conseils. En 2021, le service a reçu 3 469 appels de tout le pays et a organisé 827 consultations en face à face. La majorité des appelants étaient des habitants du district de Tirana. Au cours de la période considérée, les appelants ont surtout fait état de violences psychologiques (56 %), physiques (48 %), économiques (33 %) et sexuelles (8 cas).

Le Centre national de prise en charge des victimes de la violence domestique et le Centre national pour les victimes de la traite sont chargés de l’intégration et de la réinsertion des femmes et des filles rescapées de la violence familiale ou de la traite ;

Le Centre national de prise en charge des victimes de la violence domestique (qui relève de la juridiction des Services sociaux de l’État) est un centre d’accueil résidentiel à long terme. En 2020, 60 personnes ont été prises en charge, dont 23 femmes et 37 enfants. En 2021, 85 personnes ont été prises en charge, dont 38 femmes et 47 enfants (28 filles et 19 garçons). Durant la période allant du 1er janvier au 1er juin 2022, le Centre national de prise en charge des victimes de la violence domestique a accueilli 48 personnes, dont 19 femmes et 29 enfants (26 filles et 13 garçons). Trente et une personnes ont intégré le programme du centre, dont 14 femmes et 17 enfants (9 filles et 8 garçons) et 34 personnes, dont 14 femmes et 20 enfants (11 filles et 9 garçons) ont terminé le programme ; 34 (14 femmes et 20 enfants) ont quitté le programme ;

Le Centre LILIUM, premier centre spécialisé dans la prise en charge des victimes de violences sexuelles, continue d’accompagner les victimes, à qui il propose des services complets spécialisés. De décembre 2019 au 31 mai 2022, 106 victimes ont été prises en charge, dont plus de 80 % d’enfants et plus de 90 % de femmes/filles. De janvier à mai 2022, 14 victimes, uniquement des filles âgées de moins de 18 ans, ont été suivies par le centre ;

Le Fonds social est une importante source de financement qui permet de financer ou de cofinancer des services et des projets dans le domaine de la violence à l’égard des femmes et de la violence familiale. En 2021, il a permis de financer des services destinés aux victimes de violence domestique et en danger dans quatre municipalités (Gjirokastra, Berat, Kukës et Maliq) pour un montant de 11 258 165 ALL. En 2021, ces services ont traité 125 cas de violence familiale et proposé des services de prévention, sous la forme d’activités de sensibilisation et de conseil permanent aux groupes à risque et à la communauté. Le Fonds a continué à soutenir la stabilité de ces services en 2022, pour un montant de 7 126 725 ALL ;

En 2021, le Ministère de la santé et de la protection sociale a soutenu financièrement la fourniture de services communautaires multifonctionnels, axés principalement sur la prévention des problèmes qui favorisent la violence domestique, dans trois municipalités − Durrës, Elbasan, Pogradec − pour un montant de 11 035 627 ALL, et a pris en charge le soutien psychosocial et l’autonomisation de 158 filles et femmes vulnérables ;

Les aides ont permis de garantir la pérennité de ces services en 2022, notamment quatre services multifonctionnels et un nouveau service multifonctionnel à Saranda et à Devoll, pour un montant de 16 179 731 ALL ;

Soutien du régime d’aide économique aux victimes de la violence domestique : Les victimes en bénéficient conformément à la législation en vigueur. Le montant de l’aide économique accordée aux victimes (y compris les femmes et les filles) bénéficiant d’une ordonnance de protection jusqu’à la fin du mois de décembre 2021 était de 3 000 ALL. En 2021, 694 victimes en ont bénéficié ;

En décembre 2021, la décision no 898 du 29 décembre 2021 du Conseil des ministres complétant et modifiant la décision no 597 du 4 septembre 2019 du Conseil des ministres a revalorisé le montant de l’aide économique pour certaines catégories de victimes. Elle a été multipliée par trois pour les victimes de la violence domestique, qui percevront de 9 000 ALL à partir de janvier 2022. Pour la période janvier-mars 2022, elle a été accordée à 835 victimes bénéficiant d’une ordonnance de protection.

91.Des Mécanismes d’orientation coordonnés ont déjà été mis en place dans les 61 municipalités du pays. Par ailleurs, des efforts continuent d’être faits pour renforcer leur efficacité et leur responsabilité dans le traitement des dossiers, ainsi que pour exécuter toutes les missions dans les domaines de la coordination, de la prévention et de l’information, de la formation et du renforcement des capacités des professionnels, de la collecte, du traitement et de l’analyse des données, ainsi que de la documentation.

92.Des formations accréditées par l’École albanaise d’administration publique (ASPA) et le FNUAP ont été organisées, avec le soutien du PNUD, pour renforcer les capacités des coordinateurs locaux chargés de combattre la violence familiale dans les domaines de l’application de la loi, de l’utilisation du système REVALB, de la gestion des cas pendant la pandémie et des protocoles relatifs à la violence domestique et à la violence sexuelle.

93.Ces deux dernières années, qui ont aussi été celles pendant lesquelles il a fallu gérer la pandémie de COVID-19, des avancées importantes ont été obtenues en matière de lutte contre la violence contre les femmes et les filles et contre la violence intrafamiliale, à savoir : l’amélioration du cadre juridique existant et l’adoption de documents stratégiques importants (notamment la nouvelle Stratégie nationale pour l’égalité des genres 2021-2030), le renforcement des capacités des coordinateurs locaux chargés de combattre la violence domestique et des membres des Mécanismes d’orientation coordonnés, la sensibilisation accrue du public, etc.

94.Pendant la période de restrictions et de confinement due à la COVID-19, le Ministère de la santé et de la protection sociale a mené une série d’activités visant à informer les femmes, les jeunes, les filles et l’ensemble de la population sur l’importance du soutien et du maintien des services destinés aux victimes de la violence à l’égard des femmes et de la violence domestique pendant toute la durée de l’état de catastrophe naturelle.

95.Le Ministère de l’éducation et le Ministère de la culture ont également mené des activités conjointes avec les ministères compétents et les collectivités locales pour mettre rapidement à l’abri les victimes potentielles de la violence intrafamiliale en raison de l’isolement dû à la pandémie, ainsi que pour adapter et maintenir les services d’aide spécialisés.

96.Dans toutes ses activités, le Ministère de la santé s’est appuyé sur des lignes directrices internationales et a pris soin de rendre compte aux principaux organismes qui étaient chargés de faire respecter les normes de service et de protéger les femmes et leur famille contre la violence. Toutes ces initiatives ou mesures ont été prises en étroite collaboration avec des institutions publiques centrales et locales, des institutions indépendantes, la société civile, les organisations internationales présentes en Albanie et actives dans le domaine de la protection des droits des femmes et des filles, etc.

97.Les principales actions ont été les suivantes :

Approbation des consignes générales dans le domaine des services de santé et d’assistance sociale pour réduire le risque de violences domestiques et de genre dans les situations d’urgence civile (arrêté no 102 du 21 février 2020 du Ministre de la santé et de la protection sociale) ;

Approbation du Protocole relatif au fonctionnement des centres d’hébergement publics et privés qui accueillent les victimes et les personnes rescapées de la violence domestique et de la traite pendant la pandémie de COVID-19 (arrêté no 254 du 10 avril 2020 du Ministre de la santé et de la protection sociale) ;

Approbation de l’instruction no 253 du 10 avril 2020 sur la gestion des cas impliquant des enfants ayant besoin de protection pendant la pandémie de COVID-19 ;

Conformément aux dispositions de l’acte normatif no 9 du 25 mars 2020 du Conseil des ministres sur les mesures spéciales relatives à l’activité judiciaire pendant l’épidémie de COVID-19, les délais prévus pour intenter des actions en justice, déposer des plaintes, ainsi que pour exécuter tout acte de procédure administrative, civile et pénale ont été suspendus. Ces dispositions ne s’appliquaient toutefois pas aux affaires de violence familiale, de garde d’enfants, de droits de l’enfant et d’adoption ou à d’autres affaires civiles et pénales ;

Le Ministère de l’éducation et de la culture a diffusé sur son site Web un numéro vert (08004040) que les personnes qui avaient peur, étaient en colère, étaient stressées, etc. à cause de la COVID-19 pouvaient appeler pour obtenir gratuitement des conseils et un soutien psychologique. La ligne était ouverte tous les jours de 8 heures à 22 heures et a également permis de détecter tous les cas potentiels de violence sexiste et de violence domestique ;

Le règlement intérieur du Centre LILIUM, spécialisé dans la prise en charge des victimes de violences sexuelles, a été élaboré. Ce document additionnel au protocole déjà adopté porte essentiellement sur les spécificités des services offerts par le Centre pendant la pandémie de COVID-19 ;

Afin de limiter les effets de la pandémie de COVID-19, et conformément à la décision no 85 du 10 février 2021 du Conseil des ministres complétant sa décision no 597 du 4 septembre 2019 relative à la définition des procédures, de la documentation et du montant mensuel de l’aide économique et à l’utilisation du fonds complétant le fonds conditionnel de l’aide économique, l’aide économique fournie aux groupes vulnérables, y compris les victimes de la violence domestique bénéficiant d’une mesure de protection, a été revalorisé de 100 % pendant une période de six mois, avec effet au 1er janvier 2021 ;

En 2021, le mécanisme de financement du Fonds social a permis de financer deux lignes de conseil et trois services dédiés à la prévention de la violence intrafamiliale, ainsi que la fourniture de services communautaires aux victimes ;

Des modifications et des améliorations ont été apportées au cadre juridique, notamment la loi sur la violence domestique, le Code pénal, la décision du Conseil des ministres sur les Mécanismes d’orientation coordonnés, etc.

Articles 3, 6 et 7 − Interruption volontaire de grossesse et droits en matière de sexualité et de procréation

98.Le Ministère de la santé et de la protection sociale a mis en œuvre le Plan d’action national pour la santé en matière de sexualité et de procréation (2017-2021) et le Plan d’action national pour les contraceptifs (2017-2021). Ils ont été évalués en 2021 et les nouveaux plans d’action sont en cours d’élaboration.

99.Dans le cadre de son programme de santé reproductive, le Ministère de la santé et de la protection sociale garantit des soins universels à toutes les femmes qui ont besoin d’avoir recours à l’avortement ou accès à la planification familiale, quelle que soit leur situation financière. Le service de planification familiale fournit des conseils et des contraceptifs. Tous les centres de santé primaire du pays proposent des méthodes contraceptives dans le cadre d’une planification familiale sûre. Toutes les activités du programme, y compris l’achat de contraceptifs, sont financées par le budget du Ministère. Le programme est coordonné par l’Institut de santé publique. Des gynécologues obstétriciens qualifiés pratiquent des avortements sécurisés dans des unités de soins spécifiques, dans tous les hôpitaux régionaux. L’Institut de santé publique est chargé de la surveillance des avortements au niveau national.

100.Le programme a été évalué en 2021 : l’évaluation a montré que la majorité des femmes qui y avaient recours étaient satisfaites des services de planification familiale et des autres services de soins de santé reproductive. Les trois principaux motifs de satisfaction étaient : a) la qualité des services fournis par des médecins ou des sages-femmes qualifiés ; b) la facilité d’accès ; et c) les contraceptifs gratuits.

101.Afin de sensibiliser davantage les jeunes à la santé sexuelle et reproductive et aux droits connexes et d’améliorer leurs connaissances en la matière, le Ministère de la santé et de la protection sociale a organisé des activités en collaboration avec le Ministère de l’éducation, les collectivités locales et le FNUAP. Des cours d’éducation sexuelle complets ont été intégrés dans les programmes de l’enseignement secondaire tandis que Tirana et plusieurs autres municipalités ont soutenu financièrement plusieurs réseaux de jeunes et plateformes participatives qui promeuvent la santé sexuelle et reproductive et les droits connexes.

102.Le nouveau Plan d’action national pour la santé en matière de sexualité et de procréation prévoit des activités visant à améliorer la formation continue du personnel de santé et l’éducation dans les communautés.

Articles 6 et 7 − Droit à la vie, interdiction de la torture et des autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

103.Plusieurs dispositions de la Constitution et de la législation albanaises disposent que nul ne peut être soumis à la torture, à une peine ou à un traitement cruel, inhumain ou dégradant, et prévoient la prévention des actes de torture ou des mauvais traitements.

104.Le Code pénal érige la torture en infraction pénale (art. 86 et 87). Plus précisément, tout acte par lequel une douleur ou des souffrances aiguës, physiques ou mentales, sont intentionnellement infligées à une personne aux fins notamment d’obtenir d’elle ou d’une tierce personne des renseignements ou des aveux, de la punir d’un acte qu’elle ou une tierce personne a commis ou est soupçonnée d’avoir commis, de l’intimider ou de faire pression sur elle ou d’intimider ou de faire pression sur une tierce personne, ou pour tout autre motif fondé sur une forme de discrimination quelle qu’elle soit, lorsqu’une telle douleur ou de telles souffrances sont infligées par un agent de la fonction publique ou toute autre personne agissant à titre officiel ou à son instigation ou avec son consentement exprès ou tacite est puni d’une peine d’emprisonnement de quatre à dix ans, conformément à la législation en vigueur.

105.Tout acte de torture ou traitement inhumain ayant entraîné la mutilation, la défiguration et toute atteinte permanente à la santé de la personne, ou son décès est puni d’une peine d’emprisonnement de dix à vingt ans.

106.L’article 5 du Code de procédure pénale dispose que nul ne peut être soumis à la torture, à une peine ou à un traitement humiliant et que les personnes condamnées à une peine d’emprisonnement doivent être traitées humainement et bénéficier de mesures de rééducation morale.

107.L’article 54 du Code de justice pénale pour mineurs prévoit une interdiction générale de l’emploi de la force, d’autres moyens de contrainte et des armes à feu. La force physique et les autres moyens de contrainte ne doivent en aucun cas être employés de manière dégradante ou humiliante et ne doivent pas constituer des actes de torture ou des mauvais traitements.

108.L’article 3 de la loi no 81/2020 relative aux droits et au traitement des détenus (condamnés et personnes en détention provisoire) définit la « torture » comme tout acte par lequel une douleur ou des souffrances aiguës, physiques ou mentales, sont intentionnellement infligées à une personne détenue, lorsqu’une telle douleur ou de telles souffrances sont infligées par le personnel de l’institution ou toute autre personne agissant à titre officiel ou à son instigation ou avec son consentement exprès ou tacite, à des fins énoncées dans la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. La loi vise à garantir aux personnes détenues avant ou après jugement un traitement digne, le respect de leurs droits et libertés fondamentales et à prévenir les comportements ou traitements cruels, inhumains, humiliants ou dégradants.

109.Depuis 2008, le Bureau de l’Avocat du peuple fait office de Mécanisme national de prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, en application d’une modification apportée à la loi no 8328 du 16 avril 1998 (modifiée) relative aux droits et au traitement des personnes condamnées.

Article 9 − Liberté et sécurité de la personne

110.L’article 27 de la Constitution dispose que nul ne peut être privé de sa liberté, sauf dans les cas prévus en droit et selon les voies légales. En particulier, la liberté d’une personne peut être limitée lorsqu’il y a des raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis une infraction ou qu’il y a des motifs raisonnables de croire à la nécessité de l’empêcher de commettre une infraction ou de s’enfuir après l’accomplissement de celle-ci. La personne doit être présentée dans un délai de quarante-huit heures au juge, qui se prononce sur sa détention ou sa mise en liberté au plus tard quarante-huit heures après avoir reçu les documents qui lui ont été transmis pour examen.

111.Selon l’article 28, toute personne privée de sa liberté doit être informée, dans le plus court délai et dans une langue qu’elle comprend, des raisons de son arrestation et de toute accusation portée contre elle ainsi que de son droit de garder le silence et de communiquer avec le conseil de son choix ; elle doit également avoir les moyens d’exercer ses droits. Toute personne détenue a le droit de contester la décision du juge. Toute personne privée de sa liberté en dehors de toute procédure judiciaire peut s’adresser à tout moment au juge, qui statue dans les quarante-huit heures sur la légalité de la mesure (art. 28, par. 4). Toute personne privée de sa liberté doit être traitée avec humanité et dans le respect de sa dignité (art. 28, par. 5).

112.L’article 30 de la Constitution dispose que « [t]oute personne accusée d’une infraction est présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été établie par une décision de justice définitive ». Selon l’article 31, « [a]u cours de la procédure pénale, toute personne accusée a le droit d’être informée, dans le plus court délai et dans le détail, de toute accusation portée contre elle ainsi que de ses droits ; elle doit pouvoir prévenir sa famille ou ses proches, disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense, se faire assister gratuitement d’un interprète, si elle ne parle ou ne comprend pas la langue albanaise, se défendre elle-même ou avec l’assistance d’un défenseur de son choix ; elle doit pouvoir communiquer librement et en privé avec lui et, si elle n’a pas les moyens de rémunérer un défenseur, elle doit pouvoir être assistée gratuitement par un avocat d’office, interroger les témoins présents et obtenir la convocation de témoins, d’experts et d’autres personnes qui pourraient préciser les faits. ».

113.Conformément à l’article 5 du Code de procédure pénale, la liberté d’une personne ne peut être limitée par des mesures de sûreté que dans les cas et selon les voies prévus en droit. Par ailleurs, l’article 6 dispose que l’accusé a le droit de se défendre lui-même ou d’être assisté d’un avocat ; s’il n’a pas les moyens de rémunérer un défenseur, il peut être assisté gratuitement par un avocat d’office dans les cas prévus par le Code. Conformément à l’article 38, l’accusé, même lorsqu’il est à l’isolement ou a été privé de sa liberté pour quelque motif que ce soit, est interrogé librement, sauf si des mesures doivent être prises pour prévenir tout risque d’évasion ou de violence. L’emploi de méthodes ou de techniques visant à influencer son libre arbitre ou d’agir à sa capacité à se souvenir et à évaluer les faits est interdit, même avec le consentement de l’accusé.

114.Selon l’article 8 du Code, la langue albanaise est utilisée à tous les stades de la procédure. Les personnes qui ne parlent pas albanais utilisent leur propre langue et peuvent s’exprimer et obtenir des informations sur les preuves et les faits, ainsi que sur le déroulement de la procédure,avec l’aide d’un interprète. Selon l’article 8/a, tous les moyens de preuve peuvent être utilisés pour établir les faits dans le cadre de la procédure pénale, à condition qu’ils ne portent pas atteinte aux droits de l’homme et aux libertés fondamentales, et que le Ministère public recueille et examine les éléments de preuve à charge et à décharge.

Articles 7 et 10 − Traitement des personnes privées de liberté

115.La loi no 81/2020 relative aux droits et au traitement des détenus (condamnés et personnes en détention provisoire) dispose que les personnes détenues doivent être traitées avec dignité et dans le respect de leurs droits fondamentaux, conformément aux lois en vigueur et aux traités internationaux auxquels la République d’Albanie est partie. Toutes les personnes détenues sont traitées de la même manière, sans parti pris et sans discrimination fondée sur les motifs prévus par le droit relatif à la protection contre la discrimination.

116.Le système pénitentiaire albanais a connu de profondes transformations ces dernières années, notamment en ce qui concerne l’aspect des bâtiments et les technologies, mais aussi et surtout les mentalités et la sécurité.

117.La Direction générale de l’administration pénitentiaire, qui est responsable de la sécurité, des droits et du traitement des détenus et a pour principale mission de « faire de la sanction pénale une perspective de rééducation », s’est attachée à renforcer la sécurité dans les centres de détention, à respecter les droits des détenus et à les traiter conformément à toutes les conventions internationales en vigueur, à fournir des services de santé efficaces, en particulier dans le domaine de la santé mentale.

118.La réadaptation et la réinsertion des détenus sont l’essence même de la mission du système pénitentiaire. Des mesures soutenues ont donc été prises pour mettre en place un programme d’activités allant dans ce sens :

Des activités religieuses sont organisées régulièrement dans des locaux spécialement aménagés ;

Des programmes de réadaptation sont élaborés pour chaque catégorie de détenus et visent à faire corriger les comportements et les réflexes criminels ;

Le réseau des Institutions chargées de l’exécution des peines où les détenus bénéficient d’un programme éducatif a pu être développé, en coopération avec le Ministère de l’éducation, des sports et de la jeunesse ;

Des formations professionnelles sont organisées dans plusieurs Institutions chargées de l’exécution des peines : Jordan Misja, Durrës, Korçë, Rrogozhinë, Kavajë, Vlorë, Fushë-Krujë, Berat, Ali Demi, Lushnjë et Fier ;

Les mineures condamnées sont encouragées à participer à des ateliers de pyrogravure, de peinture et d’artisanat d’art ;

Pour la première fois dans l’histoire du système pénitentiaire, un site Web (« Made in Prison Albania ») permet aux femmes condamnées d’exposer et de vendre leurs œuvres d’art ;

Des tables rondes ont été organisées avec des représentants du monde des affaires et des organisations de la société civile en vue d’encourager et de promouvoir l’emploi des personnes condamnées ;

Toutes les municipalités ont été officiellement contactées en vue de préparer au mieux la libération des détenus et leur réinsertion. La mise en place de mécanismes de coopération est en cours ;

Les Institutions chargées de l’exécution des peines organisent des activités sportives tous les jours ;

Dans chaque Institution, des installations spéciales ont été adaptées pour que les détenus puissent exprimer leurs talents artistiques et artisanaux.

Des activités religieuses sont organisées régulièrement dans des locaux particuliers.

119.Malgré ces mesures, le programme d’activités destinées aux détenus reste un défi pour notre système pénitentiaire, compte tenu du budget et de l’augmentation du nombre de détenus intéressés.

120.Le projet « Renforcement des droits de l’homme dans le système pénitentiaire albanais » est mis en œuvre dans le cadre de la Facilité horizontale II du Conseil de l’Europe. Les programmes de réadaptation et d’activités pour les détenus constituent un volet de ce projet. Les experts duConseil de l’Europe apportent leur expertise pour renforcer les capacités du système pénitentiaire à élaborer des politiques adaptées en matière d’éducation, de formation professionnelle et d’emploi des détenus.

121.Renforcement des mesures dans le contexte de la pandémie de COVID-19 :

Le protocole relatif au respect des mesures d’hygiène et de santé visant à prévenir la propagation des infections respiratoires aiguës, y compris la COVID-19, a été approuvé le 9 mars 2020 ; il a été suivi d’autres protocoles relatifs au respect des mesures d’hygiène et de santé visant à prévenir la propagation de la COVID-19 en milieu carcéral ;

Chaque Institution chargée de l’exécution des peines a été équipée d’applications de communication vidéo pour permettre aux détenus de communiquer avec leur famille ;

À compter de mars 2021, l’ensemble du personnel pénitentiaire et des détenus a été vacciné (l’opération se poursuit) ;

Le Conseil des ministres a approuvé l’Acte normatif no 7/2020 sur l’octroi d’une permission de sortie temporaire aux détenus condamnés, qui ont pu rester chez eux pendant trois mois ;

372 détenus ont bénéficié de cette mesure − uniquement des détenus reconnus non dangereux, âgés de 60 ans et plus, condamnés pour des infractions ne représentant pas un danger pour la société et souffrant de maladies chroniques (personnes à risque dans le contexte de l’épidémie de COVID-19) ;

Le personnel psychosocial est resté auprès des prisonniers, leur offrant l’assistance psychologique dont ils avaient besoin et des conseils pour gérer le stress causé par la COVID-19.

122.La surpopulation carcérale − l’un des défis majeurs du système pénitentiaire pendant des années − a été complètement résorbée et aujourd’hui les capacités d’accueil des prisons sont supérieures au nombre de détenus.

123.Le problème de la surpopulation carcérale a été résolu grâce à des mesures concrètes, en particulier des investissements (construction de nouvelles prisons à Shkodër et Fier financée par l’Union européenne et l’État albanais, construction de deux nouveaux bâtiments dans la prison de Jordan Misja, à Tirana, reconstruction des bâtiments 4 et 5 à Lezhë (adaptés à la prise en charge des détenus ayant besoin de soins médicaux) financées par l’État) et la réalisation au cas par cas d’une étude minutieuse sur la répartition et la prise en charge des détenus dans les Institutions chargées de l’exécution des peines.

124.Les détenus bénéficient gratuitement de tous les services fournis par le régime d’assurance maladie, conformément à la décision no 337 du 6 avril 2011 du Conseil des ministres sur l’intégration des personnes condamnées et en détention provisoire dans la catégorie des inactifs et au protocole de coopération signé par le Ministère de la justice et le Ministère de la santé.

125.Tous les nouveaux détenus sont examinés dans les vingt-quatre heures qui suivent leur admission. Le dépistage volontaire de la tuberculose, du VIH et de l’hépatite B et C par des médecins qualifiés a été mis en place cette année et continuera d’être systématiquement proposé. Tous les examens médicaux se déroulent dans une salle prévue à cet effet, à l’abri des regards et en la seule présence du personnel médical. Chaque Institution consigne tous les types de blessures constatés dans un registre. Le personnel soignant est légalement tenu de signaler toute blessure indiquant un mauvais traitement au procureur compétent, dans les quarante-huit heures suivant l’examen.

126.Les détenus souffrant de problèmes de santé aigus ou chroniques bénéficient des mêmes soins que ceux auxquels ils pourraient prétendre dans un établissement de santé public et reçoivent les soins préconisés par des médecins spécialisés. Un service de santé est assuré 24 heures sur 24 dans toutes les Institutions chargées de l’exécution des peines.

127.Des consultations avec des psychiatres sont prévues régulièrement. Les détenus et les condamnés de haute sécurité qui souffrent de problèmes de santé mentale rencontrent régulièrement des psychiatres de l’Institution et des hôpitaux régionaux, et sont traités conformément à leurs recommandations dans des unités de soins spéciaux (SKV) ou dans des salles isolées de l’Institution, où ils sont en petit nombre.

128.Dans le cadre des mesures prises pour améliorer l’offre de soins de santé en milieu carcéral, certains établissements équipés d’une unité de soins spéciaux se sont adjoint les services d’un psychiatre. Tous les établissements pénitentiaires qui accueillent des détenus souffrant de problèmes de santé mentale reçoivent des consignes sur la manière de les gérer et de les suivre, en coopération avec les structures régionales de santé mentale publique.

129.Les établissements pénitentiaires sont soumis à un cadre juridique qui énonce toutes les conditions qu’ils doivent respecter : utilisation des vêtements et effets personnels, hygiène, alimentation adaptée, possibilité de sortir à l’air libre pendant deux heures par jour au moins, etc.

130.La loi no 37/2017 relative au Code de justice pénale pour mineurs contient des dispositions spéciales sur la responsabilité pénale des mineurs, des règles de procédure en matière d’enquête, de poursuites pénales, de procédure judiciaire, d’exécution de la peine, de réadaptation ou de toute autre mesure applicable aux mineurs en conflit avec la loi, victimes et/ou témoins d’une infraction pénale. Le Code énonce également des règles pour les jeunes du groupe d’âge des 18 à 21 ans, conformément aux dispositions énoncées dans des articles distincts.

131.Le Centre pour mineurs de Kavaja est pleinement opérationnel depuis octobre 2009. Il accueille des mineurs âgés de 14 à 18 ans qui ont été condamnés. Un plan adapté aux besoins, aux préférences, aux capacités, à l’état psychologique et de santé de chaque mineur est mis en place afin de faciliter sa réinsertion dans la société, en lui donnant la possibilité de participer à des activités éducatives, à des formations professionnelles, à des activités culturelles et sportives, etc.

132.Les mineurs incarcérés bénéficient des programmes suivants : suivi individuel et réadaptation (« Introduction à la pensée critique » et « Compétences sociales ») ; enseignement obligatoire et secondaire ; formation professionnelle (cours professionnels et emploi) ; développement des compétences sociales et gestion de l’agressivité ; apprendre à réfléchir ; thérapie (art et sport) ; parentalité à distance pour renforcer les liens familiaux ; médiation et résolution des conflits, prévention de la violence ; prévention du radicalisme et de l’extrémisme violent.

133.Le personnel qui s’occupe des détenus mineurs est formé en permanence, avec le soutien d’organisations internationales présentes dans le pays, dont le Conseil de l’Europe, en vue d’offrir un traitement approprié aux mineurs condamnés et de les aider à se réinsérer une fois qu’ils auront purgé leur peine.

134.L’application du protocole du Mécanisme du système d’orientation favorise la réinsertion du mineur après sa libération. Le dossier de chaque mineur sur le point d’être libéré est envoyé au service de protection de l’enfance de la municipalité.

Articles 2, 7, 8, 24 et 26 − Élimination de l’esclavage, de la servitude et de la traite des personnes

135.Les principales modifications apportées au Code de procédure pénale concernent les compétences en matière d’enquête sur ces infractions et de poursuites de leurs auteurs, tout en garantissant aux victimes une participation plus active et davantage de droits dans la procédure pénale.

136.Les auteurs de telles infractions sont poursuivis par les bureaux des procureurs des juridictions générales et jugés par des tribunaux ordinaires. Conformément au Code pénal, le Parquet spécialisé est compétent pour enquêter sur les infractions pénales commises par un groupe criminel organisé ou par une organisation criminelle, et c’est le Tribunal contre la corruption et la criminalité organisée qui juge ces affaires.

137.L’organe de poursuite a été particulièrement attentif aux droits des victimes de la traite. Outre ce qui précède, il a pris en compte les éléments suivants pour que les victimes soient interrogées dans de bonnes conditions : présence d’un travailleur social ou d’un psychologue, accueil des victimes de la traite dans des foyers où elles sont logées et nourries et où elles ont accès à d’autres services gratuits, etc.

138.Selon les données statistiques, le parquet a enregistré 19 infractions de « traite de personnes adultes » visée à l’article 110/a du Code pénal et 2 affaires ont été portées devant la justice en 2019 ; 23 infractions ont été enregistrées et 1 affaire portée devant la justice en 2020 ; 8 infractions ont été enregistrées et 5 affaires portées devant la justice en 2021 ; 24 infractions ont été enregistrées et 2 affaires portées devant la justice durant les trois premiers mois de 2022.

139.Six infractions de « traite de personnes mineures » visée à l’article 128/b du Code pénal ont été enregistrées par le parquet et 1 affaire a été portée devant la justice en 2019 ; 5 infractions ont été enregistrées et 1 affaire portée devant la justice en 2020 ; 2 infractions ont été enregistrées et 25 affaires portées devant la justice en 2021 ; aucune infraction n’a été enregistrée durant les trois premiers mois de 2022.

140.En ce qui concerne les programmes de formation et de sensibilisation des procureurs et des membres de la police judiciaire à la traite, parallèlement à la formation dispensée par l’École de la magistrature pendant la période considérée, une série de formations a été élaborée avec le soutien de missions et de projets internationaux qui accompagnent le système de poursuites. Ces formations visent à renforcer les capacités institutionnelles et professionnelles du Ministère public et des services de détection et de répression, pour qu’ils luttent plus efficacement contre la traite et l’exploitation des personnes et qu’ils protègent mieux les victimes, en particulier les femmes et les enfants.

141.L’annexe II du mémorandum d’accord no 627 conclu entre le Bureau du Procureur général et le bureau albanais de l’OSCE, approuvé le 13 avril 2021 et intitulé « Coopération et coordination dans la mise en œuvre de projets et d’activités visant à soutenir l’efficacité du système de poursuites albanais », porte sur « la lutte contre la traite en Albanie », avec pour objectif global de faire reculer la traite dans le pays.

142.L’article 2 de la loi no 18/2017 sur les droits et la protection de l’enfant prévoit des mécanismes et un fonctionnement efficaces des institutions chargées de prendre des mesures concrètes pour promouvoir, faire respecter et protéger les droits de l’enfant, ainsi que la mise en place d’un système de protection de l’enfance intégré et fonctionnel pour prévenir et combattre efficacement toutes les formes de violence, d’abus, d’exploitation et de négligence. La loi est appliquée par l’Agence nationale pour la protection des droits de l’enfant. Parallèlement, le Conseil des ministres a adopté la décision no 129 du 13 mars 2019 sur les procédures d’identification, d’assistance immédiate et d’orientation des enfants victimes de l’exploitation économique, y compris les enfants en situation de rue.

Articles 7, 9, 12, 13 et 24 − Traitement des étrangers, y compris les immigrants, les réfugiés et les demandeurs d’asile

143.Demandeurs d’asile : La loi no 10/2021 sur l’asile en République d’Albanie a été alignée sur les normes internationales et le droit communautaire en matière de traitement, de gestion et d’intégration des réfugiés et des immigrants entrant sur le territoire albanais. La loi garantit aux personnes en quête d’asile l’accès à la procédure d’asile, fixe les modalités relatives au traitement de leur demande et prévoit des garanties supplémentaires pour les catégories de personnes vulnérables, en particulier les mineurs non accompagnés. La loi prévoit une procédure accélérée qui permet d’évaluer rapidement les demandes d’asile lorsque certaines conditions sont réunies. La loi dispose que « l’asile » est la forme de protection internationale accordée par la République d’Albanie aux réfugiés et aux personnes bénéficiant d’une protection subsidiaire.

144.La loi s’applique à tous les ressortissants étrangers et aux apatrides qui ont déclaré leur intention de déposer une demande de protection internationale sur le territoire albanais, sous réserve qu’ils aient été autorisés à y séjourner en qualité de demandeurs d’une protection internationale, et aux membres de leur famille.

145.L’article 3 de la loi précise que le principe de non-refoulement interdit d’expulser ou de renvoyer un ressortissant étranger ou une personne apatride de quelque manière que ce soit vers un pays où sa vie ou sa liberté est menacée pour des motifs fondés sur sa race, sa religion, sa nationalité, son appartenance à un groupe social ou ses convictions politiques.

146.Conformément au principe de non-refoulement (art. 11) : 1. Aucune personne en quête d’asile, réfugiée ou bénéficiant d’une protection subsidiaire ou temporaire ne peut être expulsée, renvoyée ou extradée : a) dans un pays où sa vie ou sa liberté sont menacées en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses convictions politiques ; b) dans un pays où il existe des motifs raisonnables de penser qu’elle risque d’être soumise à la torture ou à des peines ou traitements inhumains ou dégradants, conformément à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, telle qu’interprétée par la Cour européenne des droits de l’homme, et aux dispositions des accords et instruments internationaux auxquels la République d’Albanie est partie ; c) dans un pays où il existe des motifs raisonnables de penser qu’elle risque d’être soumise à une disparition forcée ; ç) dans son pays d’origine, dès lors qu’elle a obtenu une forme de protection en application des dispositions de la présente loi.

147.La loi no 108/2013 sur les étrangers (modifiée) définit dans quels cas et selon quelles modalités un ressortissant étranger peut être expulsé du territoire albanais. En vertu de l’article 126, la mission diplomatique ou consulaire du pays d’origine du détenu étranger est immédiatement informée de sa détention, ainsi que de la prolongation de sa détention, à la demande de l’intéressé ou, en cas d’accord bilatéral, par l’intermédiaire du Ministère des affaires étrangères. Si l’intéressé a demandé l’asile ou bénéficie du statut de réfugié ou d’une autre forme de protection accordée par la République d’Albanie, l’information n’est pas communiquée au représentant consulaire ou diplomatique de son pays.

148.L’article 127 dispose que tout ressortissant étranger placé et maintenu dans un centre fermé, en application d’autres dispositions du même chapitre de la loi, est informé, dans une langue qu’il comprend, ou tout au moins en anglais, de toute mesure prise par les autorités compétentes pour le retenir dans le centre, et est traité avec humanité. Tout ressortissant étranger a le droit d’informer le représentant consulaire de sa détention (art. 127, par. 3). En cas de violation de ses droits fondamentaux par le centre, il peut saisir le tribunal de district. En cas de réadmission, il est informé dans une langue qu’il comprend, ou tout au moins en anglais, des droits et obligations que lui reconnaît le droit albanais (art. 127, par. 5).

149.Le cas de Harun Çelik, de nationalité turque :

Harun Çelik a été arrêté en flagrant délit le 8 juillet 2019 et mis en examen pour « falsification de cartes d’identité, de passeports ou de visas », une infraction visée à l’article 189 (par. 2) du Code pénal ;

Dans son jugement no 2933 du 19 décembre 2020, le tribunal du district judiciaire de Tirana a déclaré Harun Çelik coupable et l’a condamné à une peine d’emprisonnement de huit mois et vingt jours ;

M. Çelik a fait appel et le tribunal du district judiciaire de Tirana a annulé la mesure d’emprisonnement (décision no 1016 du 1er janvier 2020) au motif que le défendeur avait commencé à purger sa peine le jour de son arrestation et a ordonné sa mise en liberté immédiate ;

Au moment de son arrestation, M. Çelik s’apprêtait à quitter le territoire albanais, une circonstance qui justifie son expulsion immédiate après qu’il a purgé sa peine, dans la mesure où le risque de récidive n’est pas exclu. Conformément à la loi no 108/2013 sur les étrangers, l’autorité locale chargée des frontières et des migrations de la police nationale a ordonné une mesure administrative d’expulsion, sur la base d’informations selon lesquelles M. Çelik transiterait par le territoire albanais pour se rendre illégalement dans un autre pays (le Canada), et a émis l’arrêté d’expulsion no 2125 en date du 1er janvier 2020 ;

Il a été immédiatement expulsé du territoire albanais, conformément à l’article 112 (par. 2) de la loi sur les étrangers, qui prévoit l’exécution immédiate de l’arrêté d’expulsion si la présence du ressortissant étranger représente une menace pour l’ordre public et la sécurité ;

Après avoir pris connaissance de l’ordre d’expulsion, M. Çelik l’a signé de son plein gré et ne s’est pas opposé à son exécution. Les services de l’immigration et de la police des frontières de l’aéroport de Rinas ont appliqué les mesures prévues dans les procédures standard d’éloignement ou d’expulsion des étrangers en situation irrégulière en Albanie.

150.Le cas de Selami Şimsek, de nationalité turque :

Selami Şimsek a été arrêté en flagrant délit le 8 juillet 2019 ; il a été placé en détention et mis en examen pour « falsification de passeports ou de visas », une infraction visée à l’article 189 (par. 2) du Code pénal (décision no 5245 du 9 juillet 2019) ;

Dans son jugement no 152 du 27 janvier 2020, le tribunal du district judiciaire de Tirana a déclaré M. Şimsek coupable d’avoir commis l’infraction de « falsification de passeports ou de visas » visée à l’article 189 (par. 2) du Code pénal et l’a condamné à une peine d’emprisonnement d’un an ;

Dans sa décision no 217 du 9 mars 2021, la cour d’appel de Tirana a annulé la mesure d’emprisonnement et ordonné la libération immédiate de l’intéressé, conformément aux dispositions de la loi no 108/213 sur les étrangers ;

Une fois sa libération ordonnée, M. Şimsek a déposé une demande de protection internationale en République d’Albanie auprès de la Direction des frontières et des migrations de Tirana, affirmant que s’il retournait dans son pays d’origine, la Türkiye, il serait persécuté en raison de ses convictions politiques ;

La Direction de l’asile et de la citoyenneté a rendu la décision no 8 du 9 mars 2020 par laquelle elle a rejeté la demande d’asile déposée par M. Şimsek et l’intéressé a été envoyé au Centre fermé pour étrangers, à Durrës ;

M. Şimsek a bénéficié des garanties d’une procédure régulière à tous les stades du procès et de son droit d’être assisté d’un avocat. À l’époque, les organes compétents n’ont pas donné suite à sa demande d’asile, car il ne s’était pas présenté en personne pour déposer sa demande, conformément aux exigences de la loi no 121/2014 sur l’asile en République d’Albanie ;

La demande d’asile de M. Şimsek, ayant été rejetée, celui-ci a introduit un recours auprès de la Commission nationale des demandeurs d’asile et des réfugiés ;

Dans sa décision no 18 du 10 octobre 2020, fondée sur l’article 47 (par. 2) de la loi no 121/2014 sur l’asile en République d’Albanie, la Commission nationale des demandeurs d’asile et des réfugiés, a rejeté le recours de l’intéressé et confirmé la décision de la Direction de l’asile et de la citoyenneté. Le requérant a été informé de la décision dans sa langue ;

Comme l’article 47 (par. 2) de la loi no 121/2014 sur l’asile en République d’Albanie l’y autorise, M. Şimsek a contesté la décision de la Commission nationale des demandeurs d’asile et des réfugiés devant le tribunal administratif de première instance, afin d’obtenir une mesure conservatoire et la suspension de l’exécution de la décision contestée ;

Le tribunal administratif de première instance de Tirana a rejeté la demande de mesure conservatoire de M Şimsek (décision no 31155-04825-80 du 9 novembre 2020) ;

Le tribunal administratif de première instance a rejeté la demande d’annulation des décisions de la Direction de l’asile et de la citoyenneté et de la Commission nationale des demandeurs d’asile et des réfugiés (décision no 3431 du 21 décembre 2020) ;

Dans sa décision no 127 du 25 février 2021, la cour d’appel administrative de Tirana a décidé ce qui suit : modification de la décision no 3431 du 21 décembre 2020 du tribunal administratif de première instance de Tirana ; acceptation partielle de la demande de M. Şimsek ; confirmation de la nullité absolue de la décision no 18 du 10 septembre 2020 de la Commission nationale des demandeurs d’asile et des réfugiés ; rejet des autres requêtes ; droit de recours devant la Cour suprême dans un délai de trente jours ;

Le 15 juin 2021, M. Selami Şimsek, assisté de son représentant légal, a indiqué librement qu’il renonçait à sa demande d’asile en République d’Albanie ;

Le 17 juin 2021, l’autorité responsable de l’asile et des réfugiés du Ministère de l’intérieur a suspendu l’examen de la demande de protection internationale de M. Şimsek et en a officiellement informé l’intéressé dans les délais légaux ;

Le 20 juin 2021, M. Şimsek a librement quitté le Centre national d’accueil des demandeurs d’asile, après avoir demandé la protection internationale dans un pays de l’UE ;

Par l’intermédiaire du Haut-Commissariat aux droits de l’homme et des mécanismes extraconventionnels des Nations Unies, M. Selami Şimsek a exercé son droit de demander l’asile dans un autre pays, en l’occurrence la Suède, conformément aux règles internationales, et s’est rendu dans ce pays courant juin 2021, accompagné de deux fonctionnaires suédois ;

Les autorités chargées de prendre des initiatives et des mesures concrètes pour traiter le cas de M. Şimsek ont agi conformément au droit interne, aux décisions judiciaires définitives ainsi qu’aux normes et conventions internationales relatives à la protection des droits de l’homme.

Article 14 − Accès à la justice, indépendance de la magistrature et procès équitable

151.En 2017, la loi no 111/2017 sur l’assistance juridique garantie par l’État a étendu le bénéfice de l’aide accordée aux personnes économiquement défavorisées à des catégories spéciales de personnes. Les victimes de la violence domestique, d’abus sexuels et de la traite ainsi que toutes les victimes mineures bénéficient de l’aide judiciaire, quels que soient leurs revenus ou leur patrimoine, ce qui permet d’élargir l’accès à la justice au plus grand nombre de catégories possible. Il existe deux types d’aide :

152.Assistance juridique primaire : Elle consiste à informer sur l’ordonnancement juridique, les actes normatifs en vigueur, les droits et obligations des sujets relevant de la juridiction albanaise et les moyens d’exercer ces droits dans le cadre des procédures judiciaires et extrajudiciaires, des conseils juridiques, des conseils sur les procédures de médiation et les modes alternatifs de règlement des conflits, une aide pour rédiger et réunir les documents nécessaires pour engager une procédure administrative ou pour demander à bénéficier d’une assistance juridique secondaire, pour se faire représenter devant les organes administratifs, ainsi que pour obtenir toute autre forme d’assistance juridique nécessaire ne relevant pas de l’assistance juridique secondaire. Ce type d’assistance est fourni par les Centres d’assistance juridique primaire dans les grandes villes, par les cliniques juridiques proches des facultés de droit, ainsi que par des ONG agréées. Dans le contexte de la pandémie (COVID-19), la plateforme juristionline.al propose une assistance juridique gratuite en ligne et les citoyens peuvent appeler un numéro vert gratuitement et à tout moment.

153.Assistance juridique secondaire : Elle consiste à rédiger les actes nécessaires pour saisir le tribunal, ainsi qu’à fournir des conseils, à représenter et à défendre le requérant devant un tribunal administratif, civil et pénal dans des affaires non couvertes par la protection obligatoire, conformément aux dispositions duCode de procédure pénale. Cette assistance est fournie par des avocats inscrits sur une liste approuvée par la Chambre des avocats albanais, à la demande du bénéficiaire de l’assistance juridique. En plus d’être représentés par un avocat, les citoyens peuvent être dispensés du paiement des honoraires et des frais de justice, ainsi que du prélèvement de la taxe d’exécution des décisions par le service judiciaire.

154.En 2016, plusieurs amendements à la Constitution visant à réformer en profondeur le système judiciaire, à restaurer la confiance du public dans la justice et à résoudre des problèmes liés à la corruption, au manque de professionnalisme, de responsabilité, de transparence et d’efficacité, ont été adoptés à l’unanimité. Ces modifications, qui portaient sur des problèmes majeurs qui compromettaient les principes d’indépendance et d’impartialité du pouvoir judiciaire, visent à résoudre ces problèmes en améliorant l’accès à la justice et l’efficacité de celle-ci grâce à une refonte du système, ainsi que le droit à un procès équitable.

155.Les principales modifications concernent les points suivants :

a)La réduction des pouvoirs du Président de la République et du Ministre de la justice, de manière à éviter toute influence politique dans le domaine de la justice ;

b)Les modalités de nomination et la responsabilité des juges de la Cour constitutionnelle et de la Cour suprême ;

c)Le rôle de la Cour constitutionnelle dans la protection des droits de l’homme est élargi et ne se limite pas à des questions liées à la violation du droit à une procédure judiciaire régulière ;

d)Le rôle de la Cour Suprême est limité à celui d’une juridiction dont les arrêts font jurisprudence ;

e)La création de nouveaux organes et le renforcement de l’autonomie de la justice et du Ministère public, avec la création du Conseil supérieur de la magistrature, du Conseil supérieur du parquet, le renforcement du statut des magistrats, la redéfinition du système et des procédures disciplinaires à l’encontre des magistrats, ainsi que la création des conditions nécessaires à l’avancement des magistrats par ordre de mérite ;

f)La mise en place de structures spéciales chargées d’enquêter sur les infractions pénales de corruption et de les juger ;

g)La mise en place d’un système temporaire spécial pour vérifier l’intégrité et le professionnalisme des magistrats (contrôle préalable).

156.Plusieurs changements ont été apportés à la Cour constitutionnelle, notamment en ce qui concerne :

Son indépendance et son efficacité : les règles et les critères de sélection des juges ont été revus ; 1/3 sont choisis par le Président de la République, 1/3 par l’Assemblée (à la majorité qualifiée des 3/5) et 1/3 par les magistrats de la Cour suprême (parmi les 3 candidats proposés par la Commission des nominations judiciaires) ;

Le fonctionnement collégial de la Cour constitutionnelle et la nécessité de limiter la durée des mandats des juges ;

Le respect de la durée et de l’inviolabilité du mandat constitutionnel (9 ans) ;

La définition de modalités et de délais précis concernant le traitement des questions ayant trait à la révocation et à la suspension des juges, ainsi qu’à leur responsabilité disciplinaire ;

La conception de mécanismes permettant de détecter précisément les problèmes liés à la compétence de la Cour constitutionnelle, afin d’éviter qu’elle ne devienne une juridiction de quatrième niveau pour des raisons d’économie et d’efficacité de la justice.

157.Un grand nombre de juges n’ayant pas été retenus au stade des contrôles préalables, la Cour constitutionnelle ne compte plus que huit membres ; l’élection d’un neuvième membre est prévue à une date ultérieure.

158.La compétence et la composition de la Cour suprême ont été modifiées. Désormais, les juges de la Cour suprême sont nommés par le Président de la République, sur proposition du Conseil supérieur de la magistrature, pour un mandat de neuf ans, non renouvelable. La Constitution prévoit qu’un cinquième des juges (4 sur 19) est choisi parmi d’éminents juristes ayant au moins quinze ans d’expérience. Suite au processus de réévaluation des juges, la Cour suprême compte actuellement 13 membres, sur les 19 prévus.

159.Le système judiciaire a été restructuré, avec notamment la création de nouveaux organes tels que le Conseil supérieur de la magistrature, le Conseil supérieur du parquet, l’Inspecteur général de la justice et la Commission des nominations judiciaires.

Article 18 − Liberté de religion et de conviction

160.La Constitution albanaise garantit le droit à la liberté de conviction, une séparation très claire entre les institutions étatiques et religieuses et l’indépendance de l’État vis-à-vis de la religion (art. 10 et 24).

161.Parallèlement, les lois adoptées dans ce domaine consolident ces droits et témoignent de leur réalisation dans la vie quotidienne. La diversité du paysage religieux dans notre pays en témoigne, où se côtoient différentes religions et traditions religieuses et où, outre les cinq communautés religieuses qui ont ratifié des accords avec le Gouvernement, des dizaines de fondations, d’organisations ou d’associations à caractère religieux ont vu le jour.

162.Les communautés religieuses suivantes ont signé des accords sur les relations mutuelles avec le Conseil des ministres : 1) Communauté musulmane d’Albanie, 2) Église orthodoxe autocéphale d’Albanie, 3) Église catholique d’Albanie, 4) Patriarcat bektashi mondial et 5) Fraternité évangélique d’Albanie. Le Parlement a ratifié ces accords en adoptant les lois sur les relations entre l’État et les communautés religieuses (lois nos 8902 du 23 mai 2002, 10056 du 22 janvier 2009, 10057 du 22 janvier 2009, 10058 du 22 janvier 2009 et 10394 du 10 mars 2011).

163.Quatre communautés (Communauté musulmane d’Albanie (KMSH), Église orthodoxe autocéphale d’Albanie (KOASH), Comité d’État pour les cultes (KKSH), Patriarcat bektashi mondial (KBB)) bénéficient depuis 2009 d’une aide financière de l’État albanais, conformément à la loi no 10140 du 15 mai 2009 sur le financement par le budget de l’État des communautés religieuses qui ont conclu un accord avec le Conseil des ministres. Ces accords n’ont pas été modifiés depuis leur signature.

164.Outre les communautés religieuses susmentionnées, les associations, organisations et fondations à caractère humanitaire ou religieux sont enregistrées auprès du tribunal de district judiciaire, conformément à la loi no 8788 du 7 mai 2001 sur les organisations à but non lucratif.

165.Le Comité d’État pour les cultes (KSHK) est une institution centrale placée sous l’autorité du Premier ministre, qui exerce son activité conformément à la décision no 459 du 23 septembre 1999 du Conseil des ministres (modifiée). Dans l’exercice de ses fonctions, le KSHK doit respecter le droit à la liberté de religion et de conviction consacré par la Constitution et les conventions internationales ratifiées par l’État albanais dans ce domaine. Sa fonction principale est de coordonner les relations entre l’État et les communautés religieuses et organisations à but non lucratif de toute nature qui poursuivent des objectifs religieux.

166.Face à l’extrémisme religieux violent, le Comité d’État pour les cultes, en tant qu’institution publique chargée de coordonner les relations avec les institutions religieuses en Albanie, apporte sa contribution en s’inscrivant dans la Stratégie nationale contre l’extrémisme violent (2015-2021 et 2021-2026) et accorde une attention particulière à la prévention, en veillant à ne pas porter atteinte au plein exercice de la liberté de conviction et en protégeant les droits de l’homme fondamentaux et l’état de droit.

Articles 19 et 20 − Liberté d’expression

167.La liberté d’expression est consacrée par l’article 22 de la Constitution, qui se lit comme suit : « La liberté d’expression est garantie. La liberté de la presse, de la radio et de la télévision est garantie. Toute censure des moyens de communication est interdite ».

168.La garantie de la liberté d’expression va de pair avec celle d’autres libertés et droits prévus par la Constitution, notamment la liberté de la presse, de la radio et de la télévision, ainsi que le droit à l’information (art. 23 de la Constitution).

169.Pour l’Albanie, la liberté de la presse est un pilier de la démocratie et elle s’engage à ce que tous les membres de la société puissent l’exercer pleinement et sans restriction.

170.L’Albanie est un membre actif du Groupe d’amis sur la sécurité des journalistes de l’ONU, du HRC, de l’UNESCO et de l’OSCE, et coopère étroitement avec des pays qui partagent les mêmes valeurs pour soutenir les journalistes qui informent le grand public au péril de leur vie et défendre la liberté, l’indépendance et le pluralisme de la presse.

171.La protection et la sécurité des journalistes, en particulier des femmes journalistes, restent une priorité de notre programme. Lorsqu’elle présidait l’OSCE (2020), l’Albanie a approuvé une décision du Conseil ministériel visant à mettre particulièrement l’accent sur l’accès à l’information dans le cadre des engagements de l’OSCE et à renforcer le rôle du Représentant de l’OSCE pour la liberté des médias.

172.En 2021, les parquets généraux ont enregistré trois plaintes de journalistes concernant des allégations d’agressions physiques dont ils auraient fait l’objet dans l’exercice de leurs fonctions. Dans une affaire, la procédure est au stade de l’enquête préliminaire, dans une autre, le parquet a décidé de ne pas engager la procédure pénale et dans la dernière, le dossier pénal a été transmis à la Cour pour demander la suspension de la procédure.

173.Au cours de la période janvier-mars 2022, une plainte a été déposée au parquet du tribunal de première instance de Tirana pour abus de pouvoir, une infraction visée à l’article 248 du Code pénal. Après vérification, le parquet a décidé de ne pas poursuivre, conformément aux dispositions légales du 22 février 2022.

174.En 2019, dans le cadre du programme conjoint Union européenne/Conseil de l’Europe « Facilité horizontale pour les Balkans occidentaux et la Turquie 2019-2020 », le médiateur a signé un accord de coopération pour la création de l’Alliance contre les discours haineux. En 2020, l’Alliance a poursuivi ses activités visant à alerter le public, à lui faire prendre conscience de la nécessité d’informer, de sensibiliser et de contribuer au dialogue sur la lutte contre le discours de haine, en particulier auprès des jeunes. Les déclarations et les positions communes de tous les membres de l’Alliance contre le discours de haine ont été publiées et diffusées à l’ensemble du public à chaque fois que des personnalités ont fait preuve d’attitudes sexistes ou ont utilisé un langage misogyne ou discriminatoire, que ce soit à la télévision, dans leurs écrits ou dans leurs discours aux médias. Dans le cadre de cette alliance, l’Avocat du peuple et les membres de son institution ont publié des spots de sensibilisation dans lesquels ils expliquent en quoi consiste le discours de haine et la législation qui protège les personnes contre ce type de discours, avec le soutien du Conseil de l’Europe.

175.Conformément à la mission qui lui est conférée par la Constitution, l’Avocat du Peuple a suivi les nombreux débats tenus au sein des organes étatiques albanais, ainsi que les recommandations et commentaires des groupes d’intérêt et des partenaires internationaux concernant la loi no 91/2019 modifiant et complétant la loi no 97/2013 sur les médias audiovisuels dans la République d’Albanie (modifiée).

Article 21 − Droit de réunion pacifique

176.Le droit de réunion et d’organisation pacifique est consacré par la Constitution, dont l’article 9 prévoit la création et l’organisation de partis politiques, comme suit :

Les partis politiques sont créés librement ; leur organisation doit respecter les principes démocratiques ;

Les partis politiques et les autres organisations dont les programmes et les activités reposent sur des méthodes totalitaires qui incitent à la haine raciale, religieuse, régionale ou ethnique et la cautionnent, qui recourent à la violence pour s’emparer du pouvoir ou pour influencer la politique de l’État, y compris les organisations secrètes, sont interdits par la loi.

177.L’article 47 de la Constitution, tel que modifié, garantit le droit de réunion et dispose en particulier que :

La liberté de réunion pacifique et non armée, ainsi que la liberté de participation à ces réunions, sont garanties ;

Les rassemblements pacifiques sur les places et dans les lieux de passage publics sont organisés dans le respect des procédures prévues dans la loi.

178.La police nationale joue un rôle particulièrement important car, en vertu des articles 5 et 6 de cette loi, elle reçoit les informations et prend les mesures d’organisation et de sécurité nécessaires pour garantir et protéger le droit de réunion.

179.Aux termes de la loi, les devoirs et responsabilités de la police en matière de rassemblements visent à garantir et à protéger le droit de toute personne d’organiser des rassemblements pacifiques et non armés et d’y participer, et à faire en sorte qu’elle ne procède à des arrestations ou à la dispersion d’un rassemblement que dans les cas prévus par la loi.

180.En vertu de l’article 47 de la Constitution, le droit de réunion et d’organisation pacifiques, comme d’autres droits, peut être limité sur la base de critères énoncés à l’article 17 de la Constitution, selon lequel les droits de l’homme ne peuvent être restreints que par la loi, dans l’intérêt public ou pour protéger les droits d’autrui.

181.En conséquence, conformément à la loi no 8773 du 23 avril 2001 sur les rassemblements, ce droit ne peut être limité que dans les cas suivants : menace pour la sécurité nationale ou la sécurité publique, atteinte à l’ordre public, prévention du crime, protection de la santé ou de la morale, protection des droits et libertés d’autrui. En soi, cette disposition permet de garantir la protection du droit de réunion pacifique et protège les organisations de la société civile, les organisations non gouvernementales, les organisations à but non lucratif et les autres mouvements sociaux, qu’ils soient organisés ou spontanés.

182.Le droit de réunion et d’organisation pacifique est protégé et garanti par le Code pénal. L’article 262 reconnaît le droit de se rassembler et de manifester dans les lieux de passage publics, conformément aux conditions et aux règles définies dans l’autorisation.

183.Le non-respect des conditions et règles définies dans l’autorisation de se rassembler ou de manifester est passible des sanctions pénales prévues dans le même article.

Articles 23, 24 et 26 − Droits de l’enfant

184.La loi no 18/2017 sur les droits et la protection de l’enfant définit les droits et la protection dont bénéficie chaque enfant, les mécanismes et les autorités qui garantissent l’exercice de ces droits, leur respect et leur promotion, ainsi que la protection spéciale accordée à l’enfant. Le texte énonce les obligations qui incombent à ces institutions, structures et mécanismes, et renforce leur rôle en tant que garants du respect des droits de l’enfant par la société, la famille et l’État. La loi élargit la portée des droits de l’enfant, tout en mettant l’accent sur le renforcement du système de protection contre la violence, les abus, l’exploitation et la négligence, en particulier au niveau local. Conformément à la loi, les services de protection de l’enfance et les services de protection sociale travaillent conjointement.

185.Le Code de justice pénale pour mineurs (loi no 37/2017) renforce le système judiciaire dans le respect d’autres normes et standards internationaux visant à protéger l’intérêt supérieur des enfants qui ont affaire à la justice. La Stratégie relative à la justice pour mineurs (2018-2021) et son Plan d’action ont contribué à promouvoir et à protéger efficacement les droits et les besoins des mineurs en conflit avec la loi, des mineurs victimes ou témoins d’infractions, ainsi que des mineurs trop jeunes pour être responsables pénalement et des mineurs impliqués dans des procédures judiciaires, principalement pénales, en appliquant les normes nationales et internationales en matière de droits de l’enfant dans le cadre des procédures judiciaires et d’autres solutions lorsqu’il en existe.

186.L’article 11 dispose ce qui suit : « Les droits découlant du présent Code sont garantis sans aucune forme de discrimination à tout mineur en conflit avec la loi, à tout mineur victime ou témoin, quels que soient son sexe, sa race, sa couleur, son appartenance ethnique, sa langue, son identité de genre, son orientation sexuelle, ses convictions politiques, religieuses ou philosophiques, son statut économique, éducatif ou social, sa grossesse, sa filiation, sa responsabilité parentale, sa situation familiale, sa résidence, son état de santé, ses prédispositions génétiques, son handicap, son appartenance à un groupe particulier et toute autre condition du mineur, de ses parents ou de ses représentants légaux. »

187.Le Programme national en faveur des droits de l’enfant (2017-2020) (AKDF) adopté en 2017 repose sur trois piliers stratégiques : i) l’application d’une bonne gouvernance pour la promotion, la réalisation et la protection des droits de l’enfant, en vue de renforcer le cadre réglementaire et institutionnel des droits et de la protection de l’enfant ; ii) l’élimination de toutes les formes de violence à l’égard des enfants ; iii) la mise en place de systèmes et de services adaptés aux enfants et aux adolescents en matière de développement et d’éducation, de justice, de santé et de nutrition, et de protection sociale. Ce Programme multisectoriel et intersectoriel englobe tous les autres plans d’action sectoriels dans le domaine de l’enfance.

188.Le Programme national en faveur des droits de l’enfant (2021-2026), approuvé par la décision no 659 du 3 novembre 2021 du Conseil des ministres, est un programme intersectoriel qui fixe des buts, des objectifs et des mesures visant : a) à changer la vie des enfants, en améliorant la qualité des services à tous les niveaux ; b) à promouvoir une culture des droits de l’enfant et à établir les bases d’une participation effective des enfants en Albanie ; c) à les protéger contre toutes formes de violence ; ç) à fournir des données de qualité en vue d’améliorer les politiques et les programmes en leur faveur ; d) à mener des activités de sensibilisation pour protéger les enfants en ligne, le but étant de préserver leur bien-être et de leur assurer un avenir meilleur.

189.Conformément à la décision no 636du 26 octobre 2018 du Conseil des ministres, l’Agence nationale pour les droits et la protection de l’enfance recueille et traite les données relatives à toutes les questions liées aux droits et à la protection de l’enfance. Le Ministère de la santé et de la protection sociale a entrepris d’améliorer certains des indicateurs relatifs aux enfants.

Articles 25 et 26 − Participation à la vie publique

190.La loi no 101/2020 du 23 juillet 2020 établit que les élections se déroulent librement, à bulletin secret, dans des conditions d’égalité et au suffrage direct, conformément aux règles énoncées dans le Code électoral. Les électeurs exercent librement leur droit de vote.

191.Tout citoyen albanais âgé de 18 ans révolusau plus tard le jour de l’élection, quels que soient sa race, son appartenance ethnique, son sexe, sa langue, ses convictions politiques, sa foi, ses capacités physiques ou sa situation économique, a le droit de voter et de se présenter à une élection, dans le respect des règles énoncées dans le Code.

192.Aucune institution de l’administration publique, quels que soient son niveau et son activité, ne doit intervenir dans le déroulement des élections. Le jour de l’élection, la Police nationale exerce ses fonctions en toute impartialité vis-à-vis des électeurs et conformément aux règles définies dans la loi et dans les règlements approuvés par la Commission électorale centrale.

193.La Commission électorale centrale (CEC) organise et gère les élections et les référendums. Elle dirige et supervise l’activité de l’administration électorale, observe le déroulement des élections, les activités des organes et institutions publics et des médias, et traite les demandes et les réclamations relatives aux démarches administratives dans le cadre du processus électoral.

194.Les organes directeurs de la CEC sont les suivants :

a)Le Commissaire d’État aux élections − exerce les pouvoirs exécutifs, gère les affaires administratives de la CEC et la représente vis-à-vis de tiers ;

b)La Commission de régulation − approuve les actes de nature normative dans le domaine des élections et établit les règles électorales ;

c)La Commission des recours et des sanctions (KAS) − examine les recours administratifs et impose des sanctions en cas de violation de la loi électorale.

195.La CEC est habilitée à examiner la possibilité d’utiliser des systèmes ou des équipements informatiques pour les élections, de tester et d’approuver leur utilisation, de traiter des aspects et procédures spécifiques du processus électoral, d’engager des consultants étrangers à cette fin, ainsi que de faire l’acquisition de systèmes ou d’équipements informatiques et même de leur système d’exploitation. La CEC doit tester leur utilisation sur 10 % au moins des électeurs à chaque étape de leur mise en œuvre, dans le cadre de projets pilotes.

196.La CEC est en droit d’installer des systèmes de surveillance vidéo dans les bureaux de vote, ainsi que lors du dépouillement manuel des bulletins, dans le but de contrôler et de garantir la régularité du processus. Les systèmes de surveillance vidéo installés dans les bureaux de vote ne doivent pas compromettre le scrutin à bulletin secret.

197.La CEC coordonne et supervise la mise en place des conditions et des mesures qui permettent aux Albanais de l’étranger qui sont régulièrement inscrits au Registre national de l’état civil et ont déclaré leur adresse de résidence permanente à l’étranger de participer aux élections législatives.

198.L’article 108 précise que tout électeur qui ne peut pas exercer lui-même son droit de vote du fait de son état physique peut demander l’aide d’un parent ou d’un autre électeur inscrit sur la liste électorale de sa circonscription. Dans ce cas, les deux électeurs doivent se présenter au bureau de vote.

199.Le cas échéant, le président de l’administration locale informe la CEC du nombre d’électeurs malvoyants et des bureaux de vote concernés. Conformément aux procédures et aux délais prévus pour la distribution du matériel électoral, la CEC équipe les commissions des bureaux de vote concernés d’outils de vote spéciaux permettant aux électeurs de lire ou de comprendre les bulletins de vote et de voter de manière autonome. La Commission électorale locale (KQV) informe l’électeur aveugle sur la manière d’utiliser ces outils spéciaux et, à sa demande, les lui fournit. À défaut, l’électeur vote conformément aux paragraphes 1 et 3 de l’article 108.

200.Des mesures ont été prises au cours de la période janvier-décembre 2021 pour que tous les électeurs puissent exercer leur droit de vote. La CEC a recueilli des données auprès des municipalités sur l’emplacement des bureaux de vote, le nombre d’électeurs handicapés et le type de handicap ainsi que le nombre d’électeurs aveugles dans l’unité d’autonomie locale.

201.Lors des élections législatives de 2021, chaque bureau de vote où étaient inscrits des électeurs malvoyants (aveugles) a reçu des spécimens en braille afin de leur permettre de lire les bulletins de vote de manière autonome. Aucune difficulté technique n’a été signalée quant à leur utilisation, les manuels approuvés par la CEC expliquant également comment utiliser cet alphabet. Des équipements en langue des signes ont été installés dans les bureaux de vote pour aider les personnes malentendantes à comprendre les procédures de vote.

202.La CEC a organisé des réunions avec les personnes malvoyantes et handicapées dans ses locaux, afin de discuter des conclusions de son rapport postélectoral et de la manière dont elle pourrait aider les participants à voter dans de bonnes conditions.

203.Lors des dernières élections, la CEC et les parties concernées ont fait un excellent travail en ce qui concerne les programmes d’éducation aux élections adaptés aux besoins des minorités nationales, des Roms et des Égyptiens. Le matériel électoral est publié dans les langues des minorités nationales, afin de les rendre plus accessibles et de faciliter le vote des minorités.