Nations Unies

CCPR/C/119/D/2586/2015

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

18 mai 2017

Français

Original : anglais

Comité des droits de l’homme

Constatations adoptées par le Comité au titre de l’article 5 (par. 4) du Protocole facultatif, concernant la communication no 2586/2015 * , **

Communication présentée par :

Ulyana Zakharenko et Elena Zakharenko (représentées par un conseil, Raisa Mikhailovskaya, directrice du Centre de documentation bélarussien, Lituanie)

Au nom de :

Les auteures et Yuri Zakharenko (décédé)

État partie :

Bélarus

Date de la communication:

27 mars 2014 (date de la lettre initiale)

Références :

Décision prise en application de l’article97 durèglement intérieur du Comité, communiquée à l’État partie le 11 mars 2015 (non publiée sous forme de document)

Date des constatations :

17 mars 2017

Objet :

Disparition forcée ; droit à la vie ; torture, peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ; privation de liberté ; recours utile

Question ( s ) de procédure :

Présentation de la communication par un tiers ; épuisement des recours internes

Question ( s ) de fond :

Privation arbitraire de la vie ; torture et mauvais traitements ; privation arbitraire de liberté ; absence d’enquête diligente

Article(s) du Pacte:

2 (par. 3), 6, 7, 9, 10 et 26

Article (s) du Protocole facultatif:

5 (par. 2 b))

1.Les auteures de la communication sont Ulyana Zakharenko, de nationalité bélarussienne, née en 1924, et Elena Zakharenko, de nationalité allemande, née en 1975. Elles présentent la communication en leur nom et au nom de Yuri Zakharenko, de nationalité bélarussienne, né en 1953. Elles allèguent une violation par le Bélarus des articles 6, 7, 9, 10 et 26 du Pacte, lus conjointement avec le paragraphe 1 de l’article 2, à l’égard de M. Zakharenko, et une violation des droits qu’elles-mêmes tiennent de l’article 7 du Pacte. Les auteures sont représentées par Raisa Mikhailovskaya, directrice du Centre de documentation bélarussien, en Lituanie. Le Protocole facultatif est entré en vigueur pour le Bélarus le 30 décembre 1992.

Rappel des faits présentés par les auteures

2.1M. Zakharenko, ancien Ministre de l’intérieur, était un opposant farouche au Président Loukachenko. Au deuxième trimestre de 1999, le Département des affaires intérieures de Gomel a ouvert une enquête pénale contre lui. Les auteures affirment que M. Zakharenko a été placé sous surveillance policière, que son téléphone a été mis sur écoute et que ses appels ont été enregistrés.

2.2Le 7 mai 1999, vers 21 h 30, M. Zakharenko a été enlevé par des personnes non identifiées alors qu’il rentrait chez lui à Minsk. D’après les auteures, on l’a fait monter de force dans une voiture et conduit vers une destination inconnue.

2.3Le 8 mai 1999, Elena Zakharenko a signalé la disparition de son père au Département des affaires intérieures du district Oktyabrsky de Minsk. Les 12 et 19 mai 1999 respectivement, le Vice-Ministre de l’intérieur et le Chef de la police criminelle du Ministère de l’intérieur ont saisi le Procureur général afin qu’il ouvre une enquête pénale sur la disparition de M. Zakharenko. Le bureau du Procureur de Minsk a ouvert une enquête pénale au titre de l’article 101 du Code pénal (meurtre) le 17 septembre 1999, soit plus de quatre mois après le signalement initial de la disparition de M. Zakharenko et après la disparition d’autres opposants politiques, à savoir, MM. Gonchar et Krasovsky, le 16 septembre 1999.

2.4Pour les auteures, la disparition forcée de M. Zakharenko était motivée par des considérations politiques. D’après une lettre manuscrite du Chef de la police criminelle du Bélarus, le Secrétaire du Conseil de sécurité du Bélarus avait ordonné à une équipe spéciale, dirigée par un certain colonel P., d’éliminer Yuri Zakharenko avec l’assistance du Ministre de l’intérieur de l’époque, Yuri Sivakov. Ce dernier a procuré au colonel P. un pistolet, emprunté dans un centre de détention provisoire. D’après M. A., ancien Directeur du centre de détention provisoire no 1 (SIZO-1) de Minsk, ce pistolet a été remis à M. K. et à M. D., collaborateurs de M. Sivakov, respectivement le 30 avril et le 16 septembre 1999. Selon les auteures, MM. Gonchar et Krasovsky ont disparu et ont été assassinés, tout comme l’a été M. Zakharenko, et le pistolet utilisé comme arme du crime a ensuite été remis au centre de détention provisoire.

2.5Pendant l’enquête, le Ministre de l’intérieur, M. Sivakov, et ses collaborateurs, M. K. et M. D., n’ont donné aucune explication plausible quant à la manière dont l’arme a été « empruntée ». Le 22 novembre 1999, le colonel P. a été arrêté. Le mandat d’arrêt était signé par le Président de la Commission de la sûreté de l’État du Bélarus, M. M., et visé par le Procureur général. Le colonel P. a cependant été rapidement libéré, probablement sur ordre direct du Président.

2.6L’ancien Procureur général du Bélarus, M. B., a sollicité du Procureur général de la Fédération de Russie la mise à disposition d’équipements spéciaux pour retrouver les corps enterrés. La demande a toutefois été retirée par le nouveau Procureur général du Bélarus, M. Sh., et aucune recherche n’a jamais été entreprise. L’équipe d’enquête, qui comptait les agents les plus expérimentés du parquet, du Ministère de l’intérieur et de la Commission de la sûreté de l’État, a été dessaisie de l’affaire après que M. B. et M. M ont été démis de leurs fonctions. Depuis novembre 2000, aucune enquête digne de ce nom n’a été menée dans l’affaire Zakharenko.

2.7En juin 2002, l’épouse de M. Zakharenko a saisi le tribunal du district Oktyabrsky de Minsk pour qu’il déclare M. Zakharenko décédé à compter du jour de son enlèvement, le 7 mai 1999. Le 9 septembre 2002, le tribunal a renoncé à examiner cette requête au motif que l’enquête préliminaire pénale sur la disparition de M. Zakharenko n’était pas close. Les recours intentés par les auteures contre cette décision ont été rejetés.

2.8Le 22 janvier 2004, les auteures et les proches d’autres hommes politiques disparus ont présenté une demande tendant à ce qu’une nouvelle procédure pénale soit engagée sur le fondement de l’article 128 du Code pénal (crimes contre [la sécurité de] l’humanité), sans toutefois parvenir à leurs fins.

2.9Aucune des allégations soumises aux enquêteurs par les auteures n’a donné lieu à une enquête et toutes les requêtes adressées par ces dernières au bureau du Procureur sont restées sans suite. Pour les auteures, si l’enquête n’a donné aucun résultat en quinze ans, c’est parce qu’elle est placée sous le contrôle d’autorités politiques qui y sont opposées. Tous les trois ou quatre mois, les auteures reçoivent une lettre confirmant la poursuite de l’enquête, mais rien ne prouve qu’un travail d’investigation soit effectivement accompli.

2.10À l’appui de leurs déclarations, les auteures renvoient à un mémorandum élaboré par Christos Pourgourides à l’intention de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (le mémorandum de l’APCE). Ce mémorandum conclut que les autorités bélarussiennes compétentes n’ont pas mené d’enquête adéquate sur quatre disparitions, dont celle de M. Zakharenko. Il apparaît au contraire que les plus hautes autorités gouvernementales sont intervenues pour étouffer ces disparitions et que les autorités bélarussiennes pourraient y être impliquées.

2.11Les auteures affirment que tous les recours internes disponibles ont été épuisés, même s’ils se sont prolongés au-delà des délais raisonnables. La disparition de M. Zakharenko a été signalée au Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires. Les auteures considèrent néanmoins que la procédure devant le Groupe de travail ne s’apparente pas à une procédure internationale d’enquête ou de règlement au sens de l’alinéa a) du paragraphe 2 de l’article 5 du Protocole facultatif.

Teneur de la plainte

3.1Se référant à la jurisprudence du Comité ainsi qu’au paragraphe 4 de son observation générale no 6 (1982) sur le droit à la vie, les auteures affirment que l’État partie a commis une violation du paragraphe 1 de l’article 6 du Pacte en ne protégeant pas la vie de M. Zakharenko, qui a très probablement été victime d’une exécution extrajudiciaire perpétrée par des agents de l’État.

3.2Les auteures affirment en outre qu’il y a eu violation de l’article 7 du Pacte à l’égard de M. Zakharenko ainsi qu’à leur égard. Se référant à la jurisprudence du Comité mentionnée ci-dessus, elles affirment que la disparition forcée est un traitement cruel et dégradant non seulement pour la victime mais aussi pour ses proches en raison du stress émotionnel et de la souffrance psychologique qu’il entraîne.

3.3Les auteures affirment également que l’article 9 du Pacte a été violé étant donné que la disparition forcée de M. Zakharenko constitue une arrestation arbitraire et illégale par des agents de l’État partie. Elles indiquent par ailleurs que M. Zakharenko n’a jamais été présenté à un juge et qu’il n’a pas pu engager de procédure judiciaire.

3.4Les auteures affirment en outre qu’il y a eu violation de l’article 10 du Pacte, car, loin de traiter M. Zakharenko avec humanité et de respecter sa dignité, les agents de l’État partie l’ont vraisemblablement tué quand il était entre leurs mains.

3.5De surcroît, les auteures soutiennent qu’il y a eu violation de l’article 26 du Pacte en ce que la disparition forcée de M. Zakharenko − qui n’a pas bénéficié d’une protection égale et efficace contre la discrimination fondée sur des motifs politiques − était liée à ses opinions politiques.

3.6Les auteures avancent que toutes les violations susmentionnées font également naître des griefs au regard du paragraphe 1 de l’article 2 du Pacte. Le Comité estime que la présente communication soulève en réalité des questions au regard du paragraphe 3 de l’article 2.

Observations de l’État partie sur la recevabilité

4.1Le 7 mai 2015, l’État partie a contesté la recevabilité de la communication au motif que celle-ci, contrairement aux dispositions de l’article premier du Protocole facultatif, avait été présentée au Comité par un tiers et non par l’intéressé lui‑même. Il considère que le Comité n’est pas compétent pour examiner les communications présentées par des tiers.

4.2L’État partie fait valoir également que la communication est irrecevable pour non‑épuisement des recours internes, en vertu de l’alinéa b) du paragraphe 2 de l’article 5 du Protocole facultatif, sans préciser quels recours n’ont pas été épuisés par les auteures. Dans ces conditions, l’État partie déclare qu’il entend « suspendre l’examen » de la communication.

Commentaires des auteures sur les observations de l’État partie concernant la recevabilité

5.1Le 10 août 2015, les auteures ont contesté l’argument de l’État partie selon lequel la communication avait été soumise par un tiers, parce que M. Zakharenko était porté disparu depuis seize ans, devait être considéré comme décédé sur le plan juridique et n’était donc pas en mesure de présenter lui-même une communication. Les auteures relèvent en outre qu’aucune disposition du Protocole facultatif ne les empêche d’habiliter un tiers à les représenter devant le Comité.

5.2Les auteures réaffirment avoir épuisé tous les recours internes disponibles pour ce qui est des droits que M. Yuri Zakharenko tient des articles 6, 7, 9, 10 et 26 du Pacte et des droits qu’elles-mêmes tiennent de l’article 7 du Pacte. Elles réaffirment également que tous les recours internes disponibles qu’elles ont épuisés excédaient de toute manière des délais raisonnables. La disparition de M. Zakharenko a été signalée au Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires. Les auteures relèvent que l’enquête et les poursuites relatives à la disparition de M. Zakharenko n’ont donné aucun résultat en seize ans.

Délibérations du Comité

Examen de la recevabilité

6.1Avant d’examiner toute plainte formulée dans une communication, le Comité doit, conformément à l’article 93 de son règlement intérieur, déterminer si la communication est recevable au regard du Protocole facultatif.

6.2Le Comité s’est assuré, comme il est tenu de le faire conformément à l’alinéa a) du paragraphe 2 de l’article 5 du Protocole facultatif, que la même question n’était pas déjà en cours d’examen devant une autre instance internationale d’enquête ou de règlement. Il note que la disparition de M. Zakharenko a été signalée au Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires. Il rappelle toutefois que les procédures ou mécanismes extraconventionnels mis en place par la Commission des droits de l’homme ou par le Conseil des droits de l’homme et dont le mandat consiste à examiner la situation des droits de l’homme dans tel ou tel pays ou territoire, ou des cas de violation massive des droits de l’homme dans le monde, et d’établir des rapports publics à ce sujet, ne relèvent généralement pas d’une procédure internationale d’enquête ou de règlement au sens de l’alinéa a) du paragraphe 2 de l’article 5 du Protocole facultatif. En conséquence, le Comité estime que l’examen du cas de M. Zakharenko par le Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires ne rend pas la communication irrecevable en vertu de cette disposition.

6.3En ce qui concerne l’argument de l’État partie selon lequel le Comité ne peut pas examiner des communications qui lui sont soumises par un tiers, le Comité note que rien dans le Protocole facultatif n’empêche les auteurs de communication de désigner un tiers pour recevoir la correspondance du Comité en leur nom. Il note en outre que, conformément à la pratique établie de longue date, les auteurs ont désigné un représentant de leur choix, non seulement pour recevoir leur correspondance, mais aussi pour les représenter devant le Comité. De la même manière, selon la pratique établie du Comité, les proches de victimes décédées, disparues ou qui sont, pour d’autres raisons, dans l’incapacité de présenter une communication ou de désigner un représentant, peuvent engager une procédure. Ces deux modes de représentation sont prévus à l’article 96 b) du règlement intérieur. En l’espèce, les auteures ont présenté un pouvoir dûment signé habilitant leur conseil à les représenter elles-mêmes et à représenter M. Zakharenko − leur fils et père − devant le Comité. Le Comité considère par conséquent qu’aux fins de l’article premier du Protocole facultatif, la communication a été présentée par les victimes présumées par l’intermédiaire de leur représentant dûment désigné. Les dispositions de l’article premier du Protocole facultatif ne font donc pas obstacle à l’examen de la présente communication.

6.4En ce qui concerne l’argument de l’État partie selon lequel les auteures n’ont pas épuisé les recours internes disponibles, le Comité note que ces dernières disent avoir déposé un certain nombre de plaintes relativement à la disparition de M. Zakharenko et que l’enquête, en cours depuis 1999, n’a donné aucun résultat, les investigations menées par le bureau du Procureur étant inefficaces. À cet égard, le Comité note que les auteures ont déposé plainte le 26 janvier et le 2 août 2004, le 12 janvier 2005, les 1er et 6 février 2009, le 9 juin et le 16 décembre 2010, à une date non précisée en février 2011, le 30 avril 2013 et à d’autres dates auprès du Procureur de Minsk, de l’Enquêteur chargé des crimes graves au bureau du Procureur de Minsk et du Procureur général. Le Comité note également que l’État partie n’a pas fourni de détails sur l’état d’avancement de l’enquête et qu’il n’a pas démontré que celle-ci se poursuivait effectivement, malgré l’absence manifeste de progrès depuis de nombreuses années et le caractère particulièrement grave des allégations. Un État partie ne peut pas s’abstenir d’examiner une communication en se bornant à invoquer l’existence d’une enquête en cours si cette enquête est extrêmement longue et ne donne manifestement aucun résultat. Dans ces circonstances, le Comité estime que les recours internes ont excédé des délais raisonnables et qu’ils sont inutiles. En conséquence, il conclut que l’alinéa b) du paragraphe 2 de l’article 5 du Protocole facultatif ne l’empêche pas d’examiner la communication.

6.5Le Comité considère que les allégations des auteures sont suffisamment étayées aux fins de la recevabilité et procède donc à leur examen au fond.

Examen au fond

7.1Conformément au paragraphe 1 de l’article 5 du Protocole facultatif, le Comité a examiné la présente communication en tenant compte de toutes les informations que lui ont communiquées les parties.

7.2Le Comité note le grief des auteures qui affirment qu’il y a eu violation des articles 6, 7, 9, 10 et 26 du Pacte du fait de la disparition forcée de M. Zakharenko et qu’il est fort probable qu’il a été victime d’une exécution extrajudiciaire perpétrée par des agents de l’État. Il relève que l’État partie n’a soumis aucune information pour réfuter les allégations détaillées des auteures concernant l’heure de l’enlèvement et du meurtre présumé, l’arme utilisée, l’identité du meurtrier présumé et la participation d’agents de l’État à cet acte. Dans ces circonstances, il y a lieu d’accorder à ces allégations le crédit voulu et de présumer que les faits se sont déroulés comme les auteures l’ont décrit. En conséquence, le Comité conclut à une violation par l’État partie des droits de M. Zakharenko au titre des articles 6, 7 et 9 du Pacte.

7.3Le Comité renvoie à son observation générale no 31 (2004) sur la nature de l’obligation juridique générale imposée aux États parties au Pacte, selon laquelle les États parties doivent mettre en place des mécanismes juridictionnels et administratifs appropriés pour examiner les plaintes faisant état de violations des droits (par. 15), et rappelle que l’ouverture d’une enquête pénale et l’engagement de poursuites judiciaires sont des mesures nécessaires en cas de violation des droits de l’homme tels que ceux que protègent les articles 6 et 7 du Pacte. En l’espèce, le Comité relève que les nombreuses plaintes déposées par les auteures n’ont abouti à aucune information précise sur le sort de M. Zakharenko et l’endroit où il se trouve, n’ont pas conduit à l’arrestation d’un seul responsable et n’ont pas donné lieu à des poursuites. Le Comité relève en outre que non seulement l’État n’a pas mené d’enquête appropriée mais aussi qu’il n’a pas expliqué à quel stade en était la procédure d’enquête, seize ans après la disparition de M. Zakharenko. En l’absence d’explications de l’État partie sur les raisons pour lesquelles l’enquête ne progresse pas, et compte tenu des informations dont il dispose, le Comité conclut que l’État partie a manqué aux obligations mises à sa charge par les articles 6, 7 et 9 du Pacte, lus conjointement avec le paragraphe 3 de l’article 2, en n’enquêtant pas comme il convient sur la disparition de M. Zakharenko et en ne prenant pas les mesures correctives nécessaires.

7.4.Le Comité accepte également le grief, qui n’a pas été contesté, des auteures selon lequel le fait que l’État partie n’a pas mené sans délai d’enquête effective sur la disparition de M. Zakharenko a sensiblement aggravé leur stress émotionnel et leur a causé une souffrance psychologique, entraînant une violation de leurs droits au titre de l’article 7 du Pacte.

7.5.Compte tenu de ces conclusions, le Comité décide de ne pas examiner séparément les griefs des auteures relatifs à la violation des droits que M. Zakharenko tient des articles 10 et 26 du Pacte.

8.Le Comité des droits de l’homme, agissant en vertu du paragraphe 4 de l’article 5 du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, constate que les faits qui lui ont été exposés font apparaître une violation par le Bélarus des droits que M. Zakharenko tient des articles 6, 7 et 9 du Pacte, lus seuls et conjointement avec le paragraphe 3 de l’article 2, et des droits que les auteures tiennent de l’article 7 du Pacte.

9.Conformément à l’alinéa a) du paragraphe 3 de l’article 2 du Pacte, l’État partie est tenu d’assurer aux auteures un recours utile. Cette obligation requiert de l’État partie qu’il accorde pleine réparation aux individus dont les droits protégés par le Pacte ont été violés. L’État partie est donc tenu, entre autres : a) de mener une enquête approfondie et efficace sur les allégations des auteures et de communiquer des informations utiles sur les résultats de ses enquêtes ; et, si ces allégations sont confirmées ; b) de poursuivre, juger et punir les responsables ; et c) d’accorder aux auteures une indemnisation appropriée pour les violations subies. L’État partie est en outre tenu de prendre toutes les mesures nécessaires pour éviter que des violations analogues ne se reproduisent.

10.Étant donné qu’en adhérant au Protocole facultatif, l’État partie a reconnu que le Comité a compétence pour déterminer s’il y a ou non violation du Pacte et que, conformément à l’article 2 du Pacte, il s’est engagé à garantir à tous les individus se trouvant sur son territoire et relevant de sa juridiction les droits reconnus dans le Pacte et à assurer un recours utile et une réparation exécutoire lorsqu’une violation a été établie, le Comité souhaite recevoir de l’État partie, dans un délai de cent quatre-vingts jours, des renseignements sur les mesures prises pour donner effet aux présentes constatations. L’État partie est en outre invité à rendre celles-ci publiques et à les faire largement diffuser en biélorusse et en russe dans le pays.