NATIONS UNIES

CRC

Convention relative aux droits de l’enfant

Distr.GÉNÉRALE

CRC/C/MLI/CO/23 mai 2007

FRANÇAISOriginal: ANGLAIS

COMITÉ DES DROITS DE L’ENFANT

Quarante-quatrième session

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 44 DE LA CONVENTION

Observations finales: Mali

1.Le Comité a examiné le deuxième rapport périodique du Mali (CRC/C/MLI/2) à ses 1206e et 1207e séances (voir CRC/C/SR.1206 et 1207), le 18 janvier 2007, et il a adopté à sa 1228e séance, le 2 février 2007, les observations finales ci‑après.

A. Introduction

2.Le Comité se félicite de la présentation du deuxième rapport périodique de l’État partie, rédigé conformément aux directives du Comité, ce qui lui a permis d’avoir une idée claire de la situation des enfants dans le pays, ainsi que des réponses écrites détaillées qui ont été données à sa liste des points à traiter (CRC/C/MLI/Q/2). Par ailleurs, le Comité a apprécié le dialogue sincère, franc et fructueux qu’il a eu avec la délégation de haut niveau.

B. Mesures de suivi adoptées et progrès accomplis par l’État partie

3.Le Comité note avec satisfaction la promulgation de textes législatifs suivants:

a)Loi no 06-024 de 2006, qui établit la gratuité de l’enregistrement des naissances;

b)Décret no 06-117/P-RM portant création de la Commission nationale des droits de l’homme en 2006;

c)Décret no 05-147/P-RM de 2005, qui institue la gratuité des thérapies antirétrovirales;

d)Loi no 04-004 portant création du Centre national de documentation et d’information sur la femme et l’enfant en 2004;

e)Ordonnance no 02-062/P-RM de 2002 portant création du Code de protection de l’enfance;

f)Décrets nos 99-450 de 1999 et 02-067 de 2002, qui énoncent les conditions d’établissement et de fonctionnement de centres privés d’accueil, d’écoute, de conseils et d’hébergement pour les enfants;

g)Loi no 01-081 de 2001 relative à la responsabilité pénale des mineurs et à la création de tribunaux pour enfants;

h)Accords avec un certain nombre de pays, dont la Côte d’Ivoire (2000), le Burkina Faso (2004) et le Sénégal (2004), relatifs à la coopération dans la lutte contre la traite transfrontière des enfants.

4.Le Comité se félicite aussi de la ratification des instruments internationaux ci‑après relatifs aux droits de l’homme ou de l’adhésion à ces instruments:

a)Protocoles facultatifs à la Convention concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés et concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, en 2002;

b)Protocole facultatif à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, en 2005;

c)Convention de La Haye sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale, en 2006;

d)Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, en 2003;

e)Convention no 182 de l’Organisation internationale du Travail concernant l’interdiction des pires formes de travail des enfants et l’action immédiate en vue de leur élimination, en 2000;

f)Convention no 138 de l’Organisation internationale du Travail concernant l’âge minimum d’admission à l’emploi, en 2002;

g)Protocole visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, qui complète la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, en 2002;

h)Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif à la création d’une Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, en 2000;

i)Statut de Rome du Tribunal pénal international, en 2000.

C. Facteurs et difficultés qui s’opposent à la mise en œuvre de la Convention

5.Le Comité reconnaît les difficultés auxquelles l’État partie est confronté: pauvreté, problèmes sérieux d’accès, en particulier pour les habitants des zones désertiques étendues du pays, et présence de traditions et de coutumes qui peuvent faire obstacle à la pleine réalisation de tous les droits et libertés fondamentales des enfants.

D. Principaux sujets de préoccupation et recommandations

1. Mesures d’application générales (art. 4, 42 et 44, par. 6, de la Convention)

Recommandations antérieures du Comité

6.Le Comité constate que certaines des recommandations qu’il a formulées précédemment (CRC/C/15/Add.113) ont été appliquées mais il déplore que beaucoup d’autres n’aient pas été suffisamment prises en considération, notamment celles qui concernent les éléments suivants: enregistrement des naissances, châtiments corporels et mauvais traitements, négligence et sévices infligés aux enfants, mutilations génitales des femmes et mariages précoces ou forcés, exploitation économique, discrimination contre certains groupes d’enfants vulnérables et réforme de la justice pour mineurs. Le Comité renouvelle dans le présent document l’expression de ses préoccupations et ses recommandations.

7.Le Comité invite instamment l’État partie à mettre tout en œuvre pour appliquer les recommandations accompagnant les observations finales du rapport initial dont il n’a pas été tenu compte suffisamment et à lui fournir une information suffisante sur la suite donnée aux recommandations énoncées dans les présentes observations finales.

Réserves

8.Le Comité se félicite d’apprendre que la ratification des accords internationaux pertinents et la promulgation du Code de protection de l’enfance rendent caduque la réserve concernant l’article 16 et que cette réserve sera retirée.

9. Le Comité se réfère à ses précédentes recommandations et recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires à un retrait rapide de la réserve susmentionnée.

Législation

10.Le Comité note que la Convention l’emporte sur la législation nationale et que certaines mesures d’ordre législatif et réglementaire ont été prises pour donner effet à la Convention, telles que l’élaboration du Code de protection de l’enfance et du projet de code des personnes et de la famille. Toutefois, le Comité demeure préoccupé par le fait qu’un certain nombre d’autres mesures de nature à faciliter l’application intégrale de la Convention n’ont pas été prises.

11. Le Comité recommande à l’État partie d’intensifier ses efforts pour appliquer la Convention et de collaborer avec les différents cercles et régions pour faire en sorte que les lois et règlements soient pleinement conformes à la Convention. Le Comité recommande aussi à l’État partie d’adopter et d’appliquer sans restriction le Code de protection de l’enfance, notamment en nommant les délégués à la protection de l’enfance et les délégués à la liberté surveillée. Le Comité recommande aussi à l’État partie d’accélérer le plus possible l’adoption du projet de code des personnes et de la famille et de dégager des ressources suffisantes pour son application intégrale.

12. Le Comité recommande à l’État partie de faire en sorte, en prenant des dispositions juridiques et réglementaires appropriées, que tous les enfants victimes et/ou témoins d’actes criminels tels que sévices, violence familiale, exploitation sexuelle ou économique, enlèvement ou traite bénéficient de la protection prévue par la Convention; il recommande à l’État partie de tenir compte pleinement, pour ce faire, des Lignes directrices des Nations Unies en matière de justice dans les affaires impliquant des enfants victimes et témoins d’actes criminels (annexées à la résolution 2005/20 du Conseil économique et social datée du 22 juillet 2005).

Plan d’action national

13.Le Comité prend note du Plan stratégique national 2002‑2006 du Ministère de la promotion de la femme, de l’enfant et de la famille, qui comprend un plan secondaire de protection de l’enfance et de la famille. Toutefois, le Comité regrette que le Plan d’action national pour la survie, le développement et la protection de l’enfant (1992‑2000) n’ait pas été reconduit et il déplore l’absence d’un plan d’action complet en faveur de l’enfance qui engloberait tous les aspects de la Convention.

14. Le Comité recommande à l’État partie d’élaborer un plan d’action national complet et axé sur les droits, englobant tous les aspects de la Convention et tenant compte des buts et objectifs visés dans le document intitulé «Un monde digne des enfants», que l’Assemblée générale a adopté à sa session extraordinaire de 2002 consacrée aux enfants, ainsi que des objectifs du Millénaire pour le développement. À cet égard, le Comité invite instamment l’État partie à affecter des ressources humaines et financières suffisantes pour la mise en œuvre du plan.

Coordination

15.Le Comité prend note de la création d’un comité interministériel qui est apparemment le successeur de l’ancien comité national d’évaluation et de surveillance. Toutefois, il ne voit pas bien si ce nouvel organe a un rôle de coordination.

16. Le Comité recommande à l’État partie de renforcer la capacité du Comité interministériel, qui devrait être doté d’un rôle de coordination, en définissant avec précision son mandat, son rôle et sa composition, et de le doter de ressources humaines et financières suffisantes pour s’acquitter de sa tâche. À ce sujet, le Comité renvoie l’État partie à son Observation générale n o  5 relative aux mesures d’application générales de la Convention relative aux droits de l’enfant (CRC/GC/2003/5).

Mécanisme indépendant de surveillance

17.Le Comité se félicite de la création en 2006 d’un organisme national de défense des droits de l’homme, la Commission nationale des droits de l’homme, et de différents mécanismes de suivi sectoriels. En revanche, il déplore que cet organisme n’ait pas été doté de ressources humaines et financières suffisantes et il relève l’absence d’information sur la mesure dans laquelle cet organisme pourra traiter les plaintes déposées par des enfants ou pour le compte des enfants.

18. Le Comité recommande à l’État partie d’attribuer les ressources financières et humaines nécessaires à l’organisme national de défense des droits de l’homme créé récemment, afin de lui permettre d’exercer convenablement les activités ressortissant à son mandat. Il recommande aussi à l’État partie de faire en sorte que cet organisme soit accessible aux enfants, en créant un service à cet effet, et de lui donner les moyens, notamment en personnel qualifié, d’instruire les plaintes présentées par les enfants ou pour leur compte, d’une manière qui respecte la sensibilité de l’enfant et qui soit pleinement conforme à la Convention. Dans toutes ces actions, l’État partie devrait tenir compte pleinement de l’Observation générale n o  2 du Comité relative au rôle des institutions nationales indépendantes de protection et de promotion des droits de l’enfant. Le Comité recommande à l’État partie de demander l’aide, entre autres, du Haut ‑Commissariat aux droits de l’homme et du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF).

Ressources consacrées aux enfants

19.Le Comité est préoccupé par le fait que les budgets affectés à l’enfance représentent un très faible pourcentage du produit intérieur brut (PIB) et que l’on ne voit pas bien dans quelle mesure des crédits budgétaires sont éventuellement prévus pour les enfants appartenant à des groupes vulnérables et/ou habitant dans des zones rurales et reculées. Le Comité est préoccupé aussi par la minceur du budget alloué au Ministère de la promotion de la femme, de l’enfant et de la famille et à la protection sociale.

20. Le Comité recommande à l’État partie de renforcer d’urgence son action pour étoffer les budgets affectés à la mise en œuvre de la Convention, en particulier pour la défense des droits économiques, sociaux et culturels des enfants (par exemple en matière d’enseignement et de santé), dans toute la mesure des ressources disponibles, tout en s’attachant à prévoir des crédits suffisants pour la protection des droits des enfants appartenant à des groupes vulnérables ou défavorisés, y compris des enfants infectés par le VIH et/ou touchés par le VIH/sida, des orphelins, des enfants vivant dans la pauvreté et des enfants habitant des zones rurales et reculées. En outre, le Comité recommande à l’État partie d’augmenter le budget du Ministère de la promotion de la femme, de l’enfant et de la famille, pour lui permettre de mener convenablement les activités prévues dans son mandat, particulièrement celles qui intéressent les enfants.

Collecte de données

21.Le Comité prend note des progrès réalisés par l’État partie en matière de statistique. Toutefois, il est préoccupé par le fait que le mécanisme actuel de collecte des données est insuffisant pour assurer la collecte systématique et complète de données quantitatives et qualitatives désagrégées pour tous les secteurs visés par la Convention et pour tous les groupes d’enfants, afin de suivre et d’évaluer les progrès réalisés et d’évaluer l’impact des politiques adoptées en faveur des enfants.

22.Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures pour améliorer son système de collecte de données statistiques et autres dans tous les domaines visés par la Convention et sur la base d’indicateurs appropriés, aux échelons national, régional et local, en y affectant des ressources financières et humaines appropriées. Ce système devrait englober tous les groupes d’enfants, et tout particulièrement ceux qui appartiennent aux populations les plus vulnérables, c’est ‑à ‑dire les enfants qui vivent dans la pauvreté, les enfants handicapés, les enfants des rues et les garibous.

Diffusion de la Convention

23.Le Comité félicité l’État partie de l’action menée pour sensibiliser le public aux droits des enfants et pour diffuser la Convention, par exemple par la traduction de son texte dans les différentes langues nationales, et par la distribution de brochures. Toutefois, le Comité demeure préoccupé par le fait qu’une grande partie de la population et des professionnels qui travaillent auprès des enfants et pour les enfants ne connaissent pas encore l’existence de la Convention et des principes qui y sont énoncés.

24. Le Comité recommande à l’État partie de poursuivre et renforcer les campagnes de sensibilisation visant à faire mieux comprendre les dispositions et les principes de la Convention, en particulier en travaillant étroitement avec les notables locaux et les chefs religieux. Il recommande aussi à l’État partie de diffuser la Convention auprès des enfants, de leurs parents et des autres personnes qui s’occupent d’enfants, des professionnels qui travaillent auprès des enfants et pour les enfants, y compris les professions judiciaires et juridiques, et auprès du grand public, particulièrement auprès des personnes qui vivent dans des zones rurales et reculées. En outre, le Comité encourage l’État partie à promouvoir l’inscription de cours sur la Convention dans les programmes de formation des professionnels qui travaillent auprès des enfants et pour les enfants.

Coopération avec la société civile

25.Le Comité prend note des mesures prises par l’État partie pour coopérer avec la société civile à la promotion des droits de l’enfant, particulièrement dans l’élaboration du rapport de l’État partie et la diffusion de la Convention.

26. Le Comité recommande à l’État partie de renforcer et d’institutionnaliser la collaboration avec la société civile, y compris les organisations non gouvernementales (ONG) et les notables locaux et chefs religieux, pour la promotion des droits de l’enfant, le suivi des observations finales du Comité, par une action de sensibilisation et par la diffusion d’informations. À ce sujet, le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures pour renforcer la capacité d’organisation et la mobilisation de la société civile.

Coopération internationale

27.Le Comité note que l’État partie est l’un des pays pauvres lourdement endettés les plus touchés par la pauvreté et il se félicite d’apprendre qu’il reçoit une aide sous des formes diverses grâce à la coopération internationale. Toutefois, il s’inquiète de l’absence d’information sur la coordination et la gestion de l’aide étrangère, de la mesure dans laquelle les enfants profitent de cette aide et du fait que l’État partie n’a pas encore atteint l’objectif de l’initiative 20/20.

28. Le Comité recommande à l’État partie de faire en sorte que l’utilisation de l’aide étrangère se fasse d’une manière rationnelle, transparente et coordonnée et que les enfants en profitent véritablement. Le Comite recommande aussi à l’État partie de prendre les mesures nécessaires pour atteindre l’objectif de l’initiative 20/20.

2. Définition de l’enfant (art. premier de la Convention)

29.Le Comité se félicite que le projet de code des personnes et de la famille fixe l’âge du mariage à 18 ans pour les garçons comme pour les filles.

30. Le Comité invite instamment l’État partie à faire tout son possible pour accélérer le processus de réforme législative afin d’assurer l’égalité entre les filles et les garçons quant à l’âge du mariage.

3. Principes généraux (art. 2, 3, 6 et 12 de la Convention)

Non ‑discrimination

31.Le Comité relève que la Constitution et le Code de protection de l’enfance interdisent la discrimination motivée par l’origine sociale, la couleur, la langue, la race, le sexe, la religion ou l’opinion politique, mais il est préoccupé par le fait qu’une discrimination contre les filles et certains groupes d’enfants subsiste dans la pratique, particulièrement à l’égard des enfants handicapés, des enfants nés hors mariage, des enfants de famille défavorisée et des enfants des rues, y compris les garibous.

32. Le Comité invite instamment l’État partie à prendre les mesures appropriées, y compris d’ordre législatif, ainsi qu’une stratégie d’ensemble, afin de combattre la discrimination pour quelque motif que ce soit et contre tous les groupes vulnérables d’enfants, y compris par des campagnes d’éducation du public visant à corriger les préjugés sociaux.

Respect des opinions de l’enfant

33.Le Comité prend note avec satisfaction des efforts déployés par l’État partie pour mettre en œuvre le principe du respect des opinions de l’enfant par des campagnes de sensibilisation et par la création du Parlement des enfants, mais il demeure préoccupé par les traditions et les préjugés sociaux qui font que l’enfant ne peut pas exprimer librement ses opinions dans la famille, à l’école, dans son milieu, dans les tribunaux et dans d’autres institutions.

34. Le Comité recommande à l’État partie de renforcer ses efforts pour faire en sorte que les opinions de l’enfant soient prises en considération comme il convient dans la famille, à l’école, dans son milieu, dans les tribunaux et l’administration et dans la société en général. Concernant l’application de l’article 12, le Comité recommande à l’État partie de poursuivre ses campagnes de sensibilisation du public et il l’invite instamment à incorporer les communautés traditionnelles dans ces campagnes et à y associer les chefs religieux. Le Comité recommande à l’État partie de tenir compte des recommandations adoptées en septembre 2006, au cours du débat général relatif au droit pour l’enfant d’être entendu.

4. Libertés et droits civils (art. 7, 8, 13 à 17 et 37 a) de la Convention)

Nationalité

35.Le Comité s’inquiète de ce que, d’après la législation en vigueur, la nationalité ne puisse pas être transmise par la mère.

36. Par souci de non ‑discrimination et dans l’intérêt supérieur de l’enfant, le Comité recommande à l’État partie de prendre les mesures législatives nécessaires pour que la nationalité puisse être transmise non seulement par le père, mais aussi par la mère.

Enregistrement des naissances

37.Le Comité note avec satisfaction les initiatives prises par l’État partie pour encourager l’enregistrement des naissances, par exemple les campagnes menées à l’occasion de la Journée de l’enfant africain en 2003, le Plan d’action 2004‑2008 de la Mission d’appui à la consolidation de l’état civil et l’adoption en 2006 de la loi no 06‑024 qui régit l’état civil et assure la gratuité de l’enregistrement des naissances. Toutefois, le Comité est préoccupé par le fait que cet enregistrement est un processus compliqué, qu’un grand nombre d’enfants ne sont enregistrés ni à la naissance ni ultérieurement, et qu’il existe de grandes disparités à cet égard entre zones urbaines et zones rurales et reculées.

38. Le Comité recommande à l’État partie de poursuivre son effort d’enregistrement systématique des enfants nés sur le territoire national, entre autres choses en assurant une procédure simplifiée et gratuite et en agrandissant le rayon d’action des unités mobiles, surtout dans les zones rurales et reculées, afin d’atteindre les populations les plus défavorisées. Le Comité invite instamment l’État partie à faire enregistrer la naissance des enfants qui ne sont pas encore inscrits à l’état civil et à leur permettre d’accéder, entre autres choses, à l’enseignement et aux soins de santé.

Châtiments corporels

39.Le Comité apprécie l’action menée par l’État partie pour lutter contre les châtiments corporels par des mesures législatives, administratives, sociales et éducationnelles. Toutefois, il demeure préoccupé par le fait que les châtiments corporels sont autorisés et pratiqués dans les familles, les écoles coraniques et les établissements assurant une protection de remplacement et qu’ils ne sont pas expressément interdits dans les institutions pénales.

40. Le Comité invite instamment l’État partie à tenir compte de son Observation générale n o 1 relative aux buts de l’éducation (CRC/GC/2001/1) et de son Observation générale n o 8 relative au droit de l’enfant à une protection contre les châtiments corporels et les autres formes cruelles ou dégradantes de châtiments (CRC/GC/2006/8) et, pour ce faire:

a) D’interdire expressément les châtiments corporels dans les foyers, dans tous les établissements assurant une protection de remplacement et dans les institutions pénales;

b) De continuer de sensibiliser et d’informer les parents, les tuteurs et les professionnels qui travaillent auprès des enfants ou pour les enfants, par des campagnes d’information sur les effets néfastes des châtiments corporels;

c) De continuer d’encourager des formes rationnelles et non violentes de discipline pour remplacer les châtiments corporels;

d) De demander l’aide, entre autres, de l’UNICEF et le l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

5. Milieu familial et protection de remplacement (art. 5, 18 (par. 1 et 2), 9 à 11, 19 à 21, 25, 27 (par. 4) et 39 de la Convention)

Protection de remplacement

41.Le Comité note qu’il y a dans l’État partie de nombreux orphelins et autres enfants vulnérables qui ont besoin de soins et de protection. Le Comité prend note des efforts déployés pour élaborer des normes gouvernant les soins en institution mais il est préoccupé par l’absence d’une politique d’ensemble concernant la protection de remplacement. En outre, il relève que les jeunes garçons qui ont besoin d’une protection de remplacement et les jeunes garçons qui sont en conflit avec la loi sont parfois placés dans les mêmes centres, par exemple à Bollé.

42. Le Comité recommande à l’État partie, lorsqu’il tiendra compte des recommandations formulées à la suite du débat général de septembre 2005 consacré aux enfants privés de protection parentale (CRC/C/135), d’élaborer et d’appliquer une politique nationale de grande envergure concernant les soins et la protection à accorder aux orphelins et aux autres enfants vulnérables; cette politique devrait comprendre des mesures visant:

a) À fournir aux familles une aide suffisante afin qu’il ne soit pas nécessaire de placer des enfants dans des établissements ou des familles offrant une protection de remplacement;

b) À fournir une aide suffisante, financière ou autre, à la famille élargie et aux familles d’accueil qui s’occupent des enfants;

c) À faire en sorte que le placement en établissement soit une solution de dernier recours et que la qualité des soins dans ces établissements soit pleinement conforme aux principes et aux dispositions de la Convention; à ce sujet, à mener à bien l’action de normalisation et à veiller, notamment par des inspections bien menées, à la bonne application de ces normes;

d) À prendre toute mesure nécessaire pour empêcher que les jeunes garçons nécessitant une protection de remplacement soient placés dans les mêmes institutions que les garçons qui sont en conflit avec la loi;

e) À faire en sorte que des ressources humaines et financières suffisantes soient dégagées pour assurer le bon fonctionnement et la surveillance de ces centres.

Adoption

43.Le Comité se félicite de l’adhésion par l’État partie, en 2006, à la Convention de La Haye sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale, des réformes opérées dans l’adoption, de la création d’un organisme central qui s’occupe de l’adoption ainsi que de la collaboration avec les pays voisins dans ce domaine. Toutefois, le Comité demeure préoccupé par le fait que l’adoption internationale n’est pas encore assez bien réglementée ou contrôlée par des mesures ou politiques législatives. Le Comité est préoccupé aussi par le fait que l’ensemble de la population n’est pas au courant des réformes et que des enfants continuent à quitter le pays à l’insu de l’autorité compétente.

44. Le Comité renouvelle sa précédente observation finale et recommande à l’État partie:

a) D’instaurer des bonnes procédures de surveillance tant de l’adoption dans le pays que de l’adoption internationale;

b) De dispenser une formation aux magistrats;

c) De prendre toutes les mesures nécessaires, notamment d’ordre juridique et administratif, pour réglementer l’adoption internationale;

d) De renforcer le service central responsable de l’adoption et de faire bien connaître son fonctionnement au grand public;

e) De prendre toutes les mesures nécessaires pour que l’intérêt supérieur de l’enfant soit prioritaire à tous les stades de la procédure d’adoption;

f) De poursuivre et de renforcer les campagnes d’information et les mesures de soutien pour que la nouvelle réglementation en matière d’adoption soit pleinement respectée.

Sévices et négligence

45.Le Comité prend note des activités menées par l’État partie pour mettre en place des lois et règlements visant à combattre les sévices et la négligence dont sont victimes les enfants, mais il s’inquiète de ce que le droit malien ne prévienne ni ne sanctionne ces actes. En outre, il est préoccupé par l’absence de soutien psychosocial, d’aide juridique et matérielle aux victimes et de statistique sur les sévices et la négligence dont sont victimes les enfants.

46. Le Comité recommande à l’État partie:

a) D’adopter un cadre juridique global et axé sur les droits traitant des sévices et de la négligence dont sont victimes les enfants;

b) De mettre sur pied des campagnes de sensibilisation, en y associant les enfants, afin de prévenir et de combattre les sévices et la négligence;

c) D’installer une permanence téléphonique nationale avec un numéro à trois chiffres gratuit, fonctionnant vingt-quatre heures sur vingt-quatre, à l’intention des enfants;

d) De fournir une aide psychologique et juridique aux enfants qui sont victimes de sévices ou de négligence;

e) De mettre en place un service efficace chargé de recevoir, surveiller et instruire les déclarations faisant état de violence ou de maltraitance sexuelle, d’une manière qui respecte la sensibilité de l’enfant et en veillant à ce que la vie privée des victimes soit protégée et à ce que les responsables soient traduits en justice;

f) De faire des études sur les sévices et la négligence dont sont victimes les enfants, y compris les violences sexuelles, afin d’évaluer la fréquence, la portée et la nature de ces pratiques.

47. Concernant l’étude des Nations Unies sur la violence à l’encontre des enfants, le Comité recommande à l’État partie:

a) De prendre toutes les mesures nécessaires pour la mise en œuvre des recommandations d’importance primordiale et concrètes énoncées dans le rapport de l’Expert indépendant des Nations Unies chargé de l’étude sur la violence à l’encontre des enfants (A/61/299), en tenant compte des résultats et des recommandations des consultations régionales pour l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale qui se sont déroulées dans l’État partie, à Bamako, du 23 au 25 mai 2005;

b) De se servir de ces recommandations comme moyens d’action pour faire en sorte, en partenariat avec la société civile et, notamment, avec la participation des enfants, que tous les enfants soient protégés contre toute forme de violence physique, sexuelle ou morale, et pour favoriser l’adoption de mesures concrètes, assorties le cas échéant de délais, afin de prévenir ces violences et sévices et d’y répondre;

c) De demander l’assistance technique de l’UNICEF, du HCDH et de l’OMS à cet effet.

6. Santé et bien-être (art. 6, 18 (par. 3), 23, 24, 26 et 27 (par. 1 à 3) de la Convention)

Enfants handicapés

48.Le Comité prend note de l’élaboration et de la multiplication des programmes et cours de formation concernant les enfants handicapés, ainsi que de l’inclusion de ces derniers dans le système éducatif ordinaire, mais il est préoccupé par le manque d’informations et de statistiques sur la condition des enfants handicapés. Le Comité est en outre préoccupé par les informations selon lesquelles les services destinés aux enfants handicapés pourraient être insuffisants et seraient en train d’être réduits, les lieux publics ne seraient pas accessibles aux enfants handicapés et le cadre juridique qui permettrait de pourvoir aux besoins spécifiques de ces enfants ferait défaut.

49. Le Comité recommande à l’État partie, compte tenu des Règles pour l’égalisation des chances des handicapés (résolution 48/96 de l’Assemblée générale) et de l’Observation générale n o  9 du Comité relative aux droits des enfants handicapés, de prendre les mesures voulues pour:

a) Continuer d’encourager l’inclusion des enfants handicapés dans le système éducatif ordinaire et dans la société, notamment en accordant plus d’attention à la formation spéciale des enseignants et en faisant en sorte que l’environnement physique − notamment les écoles, les installations de sport et de loisirs et tous les autres lieux publics − soit accessible aux enfants handicapés;

b) Adopter un cadre juridique intégrateur et axé sur les droits propre à pourvoir aux besoins spécifiques des enfants handicapés;

c) Appliquer toutes les dispositions pertinentes des lois en vigueur relatives aux enfants handicapés;

d) Mener des campagnes de sensibilisation faisant intervenir les enfants et axées sur les enfants handicapés;

e) Signer et ratifier la Convention relative aux droits des personnes handicapées et le Protocole facultatif s’y rapportant lorsqu’il sera ouvert à la ratification.

Santé et services de santé

50.Le Comité prend acte des efforts faits par l’État partie pour améliorer les services de santé, s’agissant en particulier de la vaccination, de la lutte contre le paludisme et de la promotion de l’allaitement au sein, mais il demeure préoccupé par la modicité de la part du PIB allouée à la santé, le nombre limité de médecins et de centres de santé, en particulier dans les zones rurales et reculées, les forts taux de mortalité maternelle et infantile, le fort taux de malnutrition des enfants, les taux d’allaitement au sein toujours faibles et la prévalence du paludisme.

51. Le Comité recommande à l’État partie de:

a) Redoubler d’efforts pour assurer l’accès de tous aux services et installations de santé maternelle et infantile, en particulier dans les zones rurales et reculées, notamment en allouant à cet effet davantage de ressources financières et humaines;

b) Redoubler d’efforts pour faire en sorte que tous les enfants aient accès aux soins de santé de base, dans les zones urbaines comme dans les zones rurales et reculées;

c) Renforcer les mesures de prévention de la malnutrition et du paludisme et accroître le taux de couverture vaccinale pour toucher le plus grand nombre possible d’enfants et de mères;

d) Renforcer les mesures visant à promouvoir et encourager l’allaitement exclusif au sein pour les six premiers mois et adopter le Code international de commercialisation des substituts du lait maternel.

Pratiques traditionnelles préjudiciables

52.Le Comité se félicite de la création du programme national que l’État partie a mis en œuvre en coopération avec les ONG pour lutter contre les mutilations génitales féminines et des actions menées pour sensibiliser la population au danger que représentent d’autres pratiques préjudiciables. Toutefois, le Comité est profondément préoccupé par l’absence d’interdiction juridique spécifique de la pratique des mutilations génitales féminines. Il est également particulièrement préoccupé par la persistance des mariages précoces et forcés et autres pratiques traditionnelles préjudiciables énumérées dans le rapport de l’État partie.

53. Le Comité demande instamment à l’État partie de:

a) Mettre en œuvre les mesures législatives relatives à l’interdiction des mutilations génitales féminines et à l’interdiction des pratiques traditionnelles en matière de mariage, notamment les mariages précoces et forcés, qui sont préjudiciables aux enfants, et veiller à ce que les auteurs de ces pratiques soient traduits en justice;

b) Poursuivre et accentuer les campagnes de sensibilisation visant à lutter contre les mutilations génitales féminines et renforcer les programmes de sensibilisation à l’intention des tenants de ces pratiques et du grand public afin d’encourager l’évolution des attitudes traditionnelles en s’adressant à la famille élargie ainsi qu’aux dirigeants traditionnels et religieux;

c) Prendre des mesures en vue de dispenser aux personnes qui pratiquent les mutilations génitales féminines la formation nécessaire pour qu’ils puissent trouver d’autres sources de revenus;

d) Prendre les mesures appropriées pour éliminer les mutilations génitales féminines et autres pratiques traditionnelles préjudiciables à la santé, à la survie et au développement des enfants, des filles en particulier.

Santé des adolescents

54.Le Comité est préoccupé par le fait que les problèmes de santé des adolescents, en ce qui concerne notamment le développement, la santé mentale et la santé en matière de procréation ainsi que l’abus de drogues, d’alcool et de tabac, ne bénéficient pas d’une attention suffisante. Il s’inquiète également du taux élevé de grossesses d’adolescentes et de l’absence de services suffisants et accessibles de santé en matière de sexualité et de procréation.

55. Le Comité recommande à l’État partie de:

a) Développer des services de conseil en matière de santé mentale qui soient sensibles aux problèmes des adolescents et faire en sorte que ces services soient connus et accessibles à ces derniers;

b) Prendre des mesures pour prévenir et réduire l’abus d’alcool et de drogues parmi les adolescents et soutenir les programmes de réadaptation et de réinsertion sociale à l’intention des enfants victimes de toxicomanie et d’alcoolisme, notamment en recherchant une coopération technique, avec l’OMS et l’UNICEF par exemple;

c) Renforcer l’éducation des adolescents à la santé en matière de sexualité et de procréation, en particulier dans les écoles, afin de réduire l’incidence des grossesses d’adolescentes et de faire en sorte que les adolescents bénéficient de l’aide et de l’accès nécessaires aux soins de santé et à l’éducation;

d) Prendre en compte l’Observation générale n o  4 relative à la santé et au développement de l’adolescent dans le contexte de la Convention relative aux droits de l’enfant (CRC/GC/2003/4) de 2003.

VIH/sida

56.Le Comité se félicite des efforts faits par l’État partie pour lutter contre le VIH/sida, par exemple la création d’un haut conseil national pour la lutte contre le VIH/sida et la décision de fournir gratuitement des antirétroviraux. Le Comité demeure néanmoins préoccupé par le nombre élevé d’enfants infectés par le VIH et/ou touchés par le VIH/sida, l’absence de mesures préventives, l’insuffisance de l’aide apportée aux orphelins du sida et le manque de données.

57. Le Comité recommande à l’État partie, compte tenu de l’Observation générale n o  3 (2003) du Comité relative au VIH/sida et aux droits de l’enfant et des Directives internationales concernant le VIH/sida et les droits de l’homme:

a) De faire en sorte que les antirétroviraux soient gratuits et accessibles à tous;

b) D’associer les enfants au programme de lutte contre le VIH/sida, en veillant en particulier à ce qu’une attention accrue soit accordée à la question des enfants et du VIH/sida;

c) De poursuivre et renforcer ses efforts visant à prévenir la transmission mère ‑enfant du VIH;

d) De redoubler d’efforts dans la lutte contre le VIH/sida, notamment en veillant à ce que les contraceptifs soient disponibles dans tout le pays et en organisant des campagnes de sensibilisation;

e) D’améliorer le soutien aux orphelins du sida sur le plan de la protection et de la prévention;

f) De continuer de prévenir la discrimination contre les enfants infectés par le VIH et/ou touchés par le VIH/sida;

g) De prendre des mesures afin de collecter des données ventilées sur la prévalence du VIH/sida dans l’État partie, notamment parmi les enfants, qui puissent servir à élaborer, mettre en œuvre et contrôler des politiques et programmes en faveur des enfants séropositifs.

Niveau de vie

58.Le Comité note certes l’adoption en 2002 du Cadre stratégique de lutte contre la pauvreté, qui prend en compte la protection de l’enfant, mais il demeure préoccupé par le grand nombre d’enfants qui, avec leur famille, vivent en dessous du seuil de pauvreté, ainsi que par le nombre élevé, et croissant, d’enfants vivant et/ou travaillant dans la rue.

59. Le Comité recommande à l’État partie de continuer de renforcer son cadre stratégique de lutte contre la pauvreté en lui allouant des ressources financières et humaines suffisantes et en accordant une attention particulière aux besoins des groupes d’enfants les plus vulnérables.

7. Éducation, loisirs et activités culturelles (art. 28, 29 et 31 de la Convention)

60.Le Comité prend acte des efforts faits par l’État partie pour améliorer l’accès à l’éducation, y compris celui des enfants handicapés et des enfants nomades, accroître les taux de fréquentation scolaire et lutter contre les disparités entre les sexes en réalisant l’objectif de l’éducation pour tous à l’horizon 2015. Il demeure toutefois profondément préoccupé par la persistance de faibles taux de scolarisation et, en particulier, par les disparités entre les sexes et entre les zones géographiques en ce qui concerne l’accès à l’éducation. Le Comité est également préoccupé par les forts taux d’analphabétisme parmi les enfants, le bas niveau de qualification et le faible nombre des enseignants, le grand nombre d’élèves par enseignant, le nombre insuffisant d’installations adéquates, les forts taux d’abandon et de redoublement scolaires, en particulier chez les filles, les frais de scolarité indirects, qui constituent un obstacle à l’éducation, le manque d’information sur la formation professionnelle et le type d’enseignement dispensé dans les écoles coraniques. Par ailleurs, le Comité note avec préoccupation que le budget de l’éducation a été réduit.

61. Le Comité recommande à l’État partie:

a) De poursuivre son programme visant à réaliser l’éducation pour tous à l’horizon 2015 en accordant une attention particulière à l’augmentation du taux de scolarisation et à la parité entre garçons et filles dans ce domaine, ainsi qu’entre les zones urbaines et les zones rurales et reculées;

b) De prendre toutes les mesures voulues pour allouer des ressources financières accrues, suffisantes pour améliorer la situation de l’éducation, en accordant une attention particulière à la nécessité d’assurer un nombre suffisant d’installations scolaires;

c) D’améliorer la formation des enseignants et d’en recruter davantage, comme prévu, afin d’améliorer la qualité de l’éducation et, à cet égard, améliorer si nécessaire la qualité des programmes scolaires;

d) De mettre en œuvre des mesures propres à réduire les taux d’abandon et de redoublement scolaires;

e) D’éliminer les frais de scolarité indirects;

f) De promouvoir la mise en place d’une formation professionnelle et de fournir des renseignements détaillés à ce sujet dans son troisième rapport périodique;

g) De prendre les mesures voulues pour faire en sorte que les écoles coraniques respectent les programmes scolaires nationaux et les buts de l’éducation, conformément à l’article 29 de la Convention, et qu’elles soient placées sous l’autorité du Ministère de l’éducation;

h) Demander l’assistance technique de l’UNICEF et de l’UNESCO à cet égard.

8. Mesures de protection spéciales (art. 22, 38, 39, 40, 37 b) à d), 30 et 32 à 36 de la Convention)

Enfants des rues/enfants mendiants

62.Le Comité note les efforts faits par l’État partie pour réduire la mendicité infantile, en mettant en place notamment des programmes de formation professionnelle à leur intention, mais il demeure profondément préoccupé par le nombre élevé, et croissant, d’enfants vivant dans la rue ou s’adonnant à la mendicité. Le Comité note que ces enfants mendiants, appelés garibous, sont des élèves sous la garde de maîtres d’écoles coraniques appelés marabouts. Le Comité est préoccupé par leur vulnérabilité à l’égard, entre autres, de toutes les formes de violence, d’exploitation et de sévices sexuels ainsi que d’exploitation économique.

63. Le Comité recommande à l’État partie de continuer de se pencher sur le problème des enfants des rues et des enfants mendiants et de faciliter leur réinsertion dans la société et, à cet effet:

a) De procéder, comme il a été déclaré au Comité au cours du dialogue, à une étude et une évaluation de la situation de ces enfants afin d’avoir une idée précise de ses causes et de son ampleur, en associant les marabouts à ce programme;

b) D’élaborer et mettre en œuvre, avec la participation active des enfants concernés et des ONG, une politique globale qui, en s’attaquant aux causes profondes du phénomène, dissuaderait, préviendrait et réduirait la mendicité infantile et apporterait aux enfants des rues la protection nécessaire, des services de soins de santé adéquats, une éducation et d’autres services de réinsertion sociale;

c) De mettre sur pied des programmes d’appui aux familles, notamment des campagnes de sensibilisation en vue de la réinsertion des enfants des rues et des enfants mendiants dans la cellule familiale si tel est leur intérêt supérieur;

d) De demander l’assistance technique de l’UNICEF.

Exploitation économique, y compris le travail des enfants

64.Le Comité est préoccupé par le nombre élevé d’enfants qui travaillent dans l’État partie, notamment dans l’agriculture ou comme domestiques pouvant être victimes de violence, y compris de sévices sexuels.

65. Le Comité recommande à l’État partie de:

a) Redoubler d’efforts pour lutter contre le travail des enfants, en particulier en s’attaquant aux causes profondes de l’exploitation économique des enfants, par l’élimination de la pauvreté et l’accès à l’éducation;

b) Prendre des mesures propres à assurer la mise en œuvre effective des conventions de l’OIT n o  138 et n o  182, que l’État partie a ratifiées;

c) Mettre au point des mécanismes de dépôt et d’examen des plaintes et de protection, qui supposent aussi l’augmentation du nombre des inspecteurs et l’adoption de mesures juridiques de sanction des contrevenants;

d) Demander la coopération technique de l’OIT et de l’UNICEF.

Exploitation sexuelle et prostitution

66.Le Comité est préoccupé par l’absence d’informations concernant l’exploitation sexuelle et la prostitution des enfants dans l’État partie, s’agissant en particulier de l’absence des éléments suivants:

a)Une législation générale de prévention de l’exploitation sexuelle des enfants;

b)Une aide à la protection et/ou à la réadaptation des enfants victimes d’exploitation sexuelle et leur réinsertion sociale;

c)Des données sur l’ampleur et les caractéristiques de l’exploitation sexuelle et de la prostitution.

67. Le Comité recommande à l’État partie:

a) De prendre toutes les mesures voulues pour prévenir l’exploitation sexuelle et la prostitution des enfants;

b) De prendre les mesures juridiques appropriées pour protéger les enfants victimes d’exploitation sexuelle, y compris la traite et la prostitution d’enfants, et traduire en justice les auteurs d’actes d’exploitation et de sévices sexuels;

c) D’enseigner aux responsables de l’application des lois, en particulier à la brigade des mœurs et à la police, aux travailleurs sociaux, aux journalistes et aux procureurs, comment recueillir et suivre les plaintes et mener les enquêtes nécessaires en respectant la sensibilité de l’enfant et la confidentialité;

d) De mettre en œuvre les politiques et programmes appropriés de prévention, de réadaptation et de réinsertion sociale des enfants victimes, conformément à la Déclaration et Programme d’action et à l’Engagement mondial adoptés aux premier et deuxième congrès mondiaux contre l’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales tenus en 1996 et 2001 respectivement;

e) De considérer comme prioritaire l’aide à la réadaptation et veiller à ce que les victimes aient accès à l’éducation et à la formation et bénéficient d’une assistance et de conseils psychologiques.

Traite d’enfants

68.Le Comité se félicite des différents efforts faits par l’État partie pour lutter contre la traite des enfants, notamment en signant des accords de coopération avec les pays voisins. Le Comité demeure toutefois préoccupé par la traite transfrontière des enfants vers d’autres pays de la région et, en particulier la Côte d’Ivoire, le peu d’enquêtes ouvertes à ce sujet et le manque de données sur le nombre d’enfants victimes.

69. Le Comité recommande à l’État partie de:

a) Prendre des mesures, y compris d’ordre législatif, de prévention et de protection des enfants contre la traite;

b) Mettre effectivement en œuvre une politique de lutte contre la traite des enfants, notamment en lui consacrant des ressources financières et humaines appropriées et en organisant des campagnes de sensibilisation;

c) Veiller à ce que toutes les affaires de traite d’enfants fassent l’objet d’enquêtes et que les auteurs de tels actes soient inculpés, condamnés et sanctionnés à l’issue d’une procédure régulière;

d) Veiller à l’application des accords de coopération pour la lutte contre la traite transfrontière;

e) Renforcer les unités de surveillance communautaire dans les zones frontalières de Sikasso, Ségou, Mopti et Koulikoro;

f) Veiller à ce que l’enfant soit ramené dans son pays et dans sa famille, si tel est l’intérêt supérieur de l’enfant;

g) Mettre en place des programmes adéquats d’assistance, de réadaptation et de réinsertion à l’intention des enfants victimes de la traite, qui doivent être considérés comme des victimes et non assimilés à des criminels ni pénalisés;

h) Demander la coopération, entre autres, de l’UNICEF et de l’Organisation internationale des migrations.

Justice pour mineurs

70.Le Comité se félicite du fait que des réformes juridiques sont en cours et que celles menées à bien dans le secteur de la justice ont intégré les dispositions des «Principes directeurs de Riyad» et des «Règles de Beijing». Le Comité demeure néanmoins préoccupé par le peu de progrès réalisés dans la mise en place d’un système de justice pour mineurs opérationnel sur l’ensemble du territoire. Le Comité est plus particulièrement préoccupé par le non‑recours systématique aux mesures de substitution (substituts de l’action judiciaire et justice réparatrice, par exemple), la détention de mineurs dans les mêmes établissements que les adultes, l’absence de tribunaux pour mineurs dans la plupart des régions, le nombre limité de juges pour mineurs spécialisés et qualifiés et l’insuffisance des équipements et programmes de réadaptation physique et psychologique et de réinsertion sociale des enfants.

71.Le Comité recommande à l’État partie d’assurer la pleine conformité du système de justice pour mineurs avec la Convention, en particulier les articles 37 b), 40 et 39, ainsi qu’avec d’autres normes des Nations Unies dans le domaine de la justice pour mineurs, dont l’Ensemble de règles minima des Nations Unies pour l’administration de la justice pour mineurs («Règles de Beijing»), les Principes directeurs des Nations Unies pour la prévention de la délinquance juvénile («Principes directeurs de Riyad»), les Règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté («Règles de La Havane»), les Directives relatives aux enfants dans le système de justice pénale («Directives de Vienne») et les recommandations formulées par le Comité lors de la journée de débat général qu’il a consacrée à la justice pour mineurs (CRC/C/46, par. 203 à 238). À cet égard, le Comité recommande à l’État partie:

a)D’accélérer le processus de réformes juridiques;

b)D’élaborer et mettre en œuvre des mesures de substitution telles que les substituts de l’action judiciaire et la justice réparatrice afin d’accroître les possibilités de traitement des affaires d’enfants en conflit avec la loi sans recours à des procédures judiciaires;

c)De veiller à ce que la privation de liberté ne soit utilisée qu’en dernier recours et pour la durée appropriée la plus courte;

d)Lorsque la privation de liberté est inévitable et qu’elle est utilisée en dernier recours, d’améliorer les conditions de détention et veiller à ce que les enfants soient détenus dans des installations distinctes de celles des adultes, en accordant une attention particulière à cet égard aux filles;

e)De veiller à ce que les enfants âgés de moins de 18 ans puissent accéder à une assistance juridique et à une défense appropriées ainsi qu’à un mécanisme d’examen des plaintes indépendant, sensible à la situation de l’enfant et efficace;

f)De dispenser une formation aux normes internationales pertinentes aux personnes responsables de l’administration du système de justice pour mineurs, notamment aux juges, aux autres magistrats et aux responsables de l’application des lois;

g)De veiller à ce que les personnes condamnées et libérées avant l’âge de 18 ans bénéficient de possibilités d’éducation, notamment de formation professionnelle et fonctionnelle, et de services de réadaptation et de réinsertion sociale;

h)De créer des tribunaux spécialisés pour mineurs dans les différentes régions du pays et nommer davantage de juges spécialisés dans les affaires de mineurs;

i)D’accélérer la nomination des agents de probation («Délégués à la liberté surveillée») et les doter de ressources suffisantes pour accomplir leur mission;

j)De demander une assistance technique au groupe interorganisations sur la justice pour mineurs qui regroupe l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), l’UNICEF, le HCR et des ONG.

9. Protocoles facultatifs à la Convention relative aux droits de l’enfant

72.Le Comité se félicite de la ratification par l’État partie du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants et de celui concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés.

73. Le Comité encourage l’État partie à présenter ses rapports initiaux au titre du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants et de celui concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés, qui étaient attendus pour juin 2004.

10. Suivi et diffusion

Suivi

74. Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures voulues pour assurer la pleine application des présentes recommandations, notamment en les communiquant aux membres du Conseil des ministres, au Parlement et aux gouverneurs des régions, ainsi qu’aux cercles et communes, afin qu’elles soient dûment examinées et suivies d’effet.

Diffusion

75. Le Comité recommande en outre que le deuxième rapport périodique et les réponses écrites présentées par l’État partie, ainsi que les recommandations du Comité s’y rapportant (observations finales), soient largement diffusés, dans les langues du pays, auprès du grand public, des organisations de la société civile, des mouvements de jeunes, des groupes professionnels et des enfants afin de susciter des débats et une prise de conscience à propos de la Convention, de sa mise en œuvre et de son suivi.

11. Prochain rapport

76.Le Comité invite l’État partie à présenter ses troisième, quatrième et cinquième rapports regroupés avant le 19 octobre 2012, date prévue pour le cinquième rapport périodique. Il s’agit là d’une mesure exceptionnelle qui s’explique par le grand nombre de rapports que le Comité reçoit chaque année. Ce rapport ne devrait pas dépasser 120 pages (CRC/C/118). Le Comité compte que l’État partie présentera par la suite un rapport tous les cinq ans comme prévu dans la Convention.

77.Le Comité invite également l’État partie à présenter un document de base actualisé conforme aux critères fixés pour les documents de base communs dans les Directives harmonisées pour l’établissement des rapports approuvées à la cinquième réunion intercomités des organes créés en vertu d’instruments relatifs aux droits de l’homme tenue en juin 2006 (HRI/MC/2006/3).

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