NATIONS UNIES

CAT

Convention contre

la torture et autres peines

ou traitements cruels,

inhumains ou dégradants

Distr.GÉNÉRALE

CAT/C/67/Add.311 mai 2005

FRANÇAISOriginal: ANGLAIS

COMITÉ CONTRE LA TORTURE

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 19 DE LA CONVENTION

Quatrièmes rapports périodiques des États parties devant être soumis en 2000

Additif * **

ITALIE

[4 mai 2004]

*Pour le rapport initial de l’Italie, voir CAT/C/9/Add. 9; pour ce qui est de son examen, voir CAT/C/SR.109 et 110/Add. ainsi que les Documents officiels de l’Assemblée générale, quarante-septième session, supplément N° 44 (A/47/44), par. 310 à 338.

Pour le deuxième rapport périodique, voir CAT/C/25 Add. 4; pour ce qui est de son examen, voir CAT/C/SR.210, 215 et 215/Add. 1, ainsi que les Documents officiels de l’Assemblée générale, cinquantième session, supplément N° 44 (A/56/44), par. 146 à 158.

Pour le troisième rapport périodique, voir CAT/C/44/Add. 2; pour ce qui est de son examen, voir CAT/C/SR.374, 377 et 381, ainsi que les Documents officiels de l’Assemblée générale, cinquante-quatrième session, supplément N° 44 (A/54/44), par. 163 à 169.

**Les annexes peuvent être consultées dans le classeur du secrétariat.

GE. 05-41675 (EXT)

TABLE DES MATIÈRES

Paragraphes Page

Introduction 1 - 113

I.Changements apportés au système et aux institutions juridiques pour la mise en application de la Convention 12 - 3514

A.Le problème de l’introduction du crime de torture dans lesystème pénal italien 12 - 184

B.Nouvelles dispositions législatives concernant les étrangers 19 - 142 6

C.La situation dans les prisons 143 - 35128

II. Informations sur des situations et des cas individuels de mauvais traitements présumés. 352 - 44069

A.Prévention et enquêtes sur les comportements contraires aux principes de la Convention .352 - 35969

B.Affaires collectives 360 - 39570

C.Affaires individuelles 396 - 41577

D.Incidents en Somalie 416 - 44080

III.Respect des conclusions et des recommandations du Comité 44186

Liste des annexes87

INTRODUCTION

1.L’Italie a présenté son troisième rapport périodique sur l’application de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants en 1998 (CAT/C/44/Add. 2).

2.Á la suite de l’examen de ce rapport par le Comité créé à cette fin en vertu de la Convention les 3, 4 et 6 mai 1999 (voir CAT/C/SR.374, 377 et 381), l’Italie a été invitée à participer à la discussion qui a abouti à l’adoption des observations finales formulées par ledit Comité (A/54/44, par. 163-169).

3.Pour l’élaboration de son quatrième rapport, le Gouvernement italien a dûment tenu compte des préoccupations et des recommandations exprimées par le Comité. Cela a conduit à la rédaction du texte présentant le bilan des progrès réalisés par l’Italie afin de sauvegarder et de promouvoir les droits de l’homme en accentuant son attachement à lutter contre toutes les formes de torture ou de traitement inhumain et dégradant.

4.Cet attachement s’est manifesté, au plan international, par une accélération du processus de ratification du protocole facultatif à la Convention et, dans le cadre de l’Union européenne, par l’alignement de l’Italie sur les dispositions énoncées dans les Principes directeurs pour la prévention de la torture et des autres traitements inhumains et dégradants. Conformément aux dispositions de la Convention, les cas de violation évidente des droits de l’homme et des libertés fondamentales ont été signalés et ont donné lieu à des poursuites selon les procédures prévues par la législation italienne.

5.Au plan intérieur, l’Italie a fait le maximum, en plaçant l’accent sur la formation du personnel, pour favoriser l’adoption d’instruments législatifs appropriés afin de remédier aux aspects illégaux de l’immigration et de la situation dans les prisons. Notre pays est également en train de se doter d’un instrument législatif spécifique qui fait apparaître le crime de torture dans l’ordre juridique italien.

Le processus de ratification du Protocole facultatif à la Convention contre la torture

6.Au point où en sont les choses, l’Italie, en tant qu’État signataire du Protocole, a lancé la procédure de dépôt de l’instrument de ratification afin d’intégrer le Protocole dans son ordre juridique.

« La mise en application des Principes directeurs de l’Union européenne pour la prévention de la torture » pendant la présidence italienne de l’Union européenne (1 er juillet – 31 décembre 2003)

7.L’une des priorités de l’Italie pendant qu’elle a assuré la présidence du Conseil de l’Union européenne a été de faire avancer les discussions destinées à promouvoir l’application des Principes directeurs de l’Union européenne pour la prévention de la torture adoptés par l’Union européenne en 2001. Sur cette base, les chefs de mission de l’Union européenne sont invités, depuis décembre 2002, à établir des rapports sur la question de la torture et sur l’état des choses en ce domaine dans le pays qui les a accrédités.

8.La présidence italienne avait entrepris d’accélérer la rédaction et la remise de ces rapports afin d’élaborer, dans de brefs délais, une ligne de conduite en ce qui concerne l’application des principes directeurs. Alors même que les rapports des chefs de mission étaient encore en cours de transmission, le Gouvernement italien a cherché à promouvoir une discussion, au niveau européen, sur les propositions à faire (y compris la mise au point d’un plan d’action) pour que ces principes directeurs entrent rapidement en application.

9.Après nombre de réunions et d’échanges de vues, la présidence italienne a obtenu l’accord de ses partenaires de l’Union européenne pour un « plan d’action mondial » mis au point en collaboration avec le Secrétariat du Conseil de l’Union européenne et la Commission européenne. Sur la base de ce plan, la question de la torture, à partir de janvier 2004, sera soulevée dans toutes les réunions avec les pays tiers au sujet desquels il paraîtra pertinent de le faire, avec la perspective, lorsque ce sera possible, d’introduire des programmes de coopération technique permettant d’éradiquer ce phénomène.

10.Ce plan d’action comportera également la transmission d’informations par les bureaux régionaux de la Commission européenne (documents de stratégie des pays et programmes de l’Initiative européenne pour la démocratie et les droits de l’homme), et par les partenaires de l’Union européenne dans le cadre d’une coopération bilatérale ou de programmes financés par les Nations Unies. Ce plan d’action aura donc un double objectif : faire apparaître toutes les questions, problèmes et domaines ayant un rapport direct avec « la torture » (et, naturellement, qui concernent particulièrement l’Union européenne) et ouvrir la voie à des propositions concrètes de coopération.

11.Selon cette procédure, les chefs de mission de l’Union européenne devront mettre leurs rapports à jour, tandis que le groupe de travail droits de l’homme du Conseil (COHOM), qui se réunit une fois par mois à Bruxelles, devra suivre les actions de l’Union dans ce domaine et présenter un rapport annuel au Conseil, afin de permettre d’établir un cadre complet d’action pour l’Union européenne.

I. CHANGEMENTS APPORTÉS AU SYSTÈME ET AUX INSTITUTIONS JURIDIQUES ITALIENS EN VUE DE L’APPLICATION DE LA CONVENTION

A. Le problème de l’introduction du crime de torture dans le système pénal

12.L’introduction du crime de torture dans le système pénal italien a donné lieu, au sein des commissions de la justice de la Chambre des députés et du Sénat, à des débats complexes qui ont abouti à la rédaction et à la présentation d’un texte de synthèse (projet de loi N° A.C. 1483), lequel a été discuté le 2 décembre 2003 – date de la dernière séance de la Commission de la justice de la Chambre des députés chargée de présenter des conclusions – et reste susceptible d’être modifié.

13.Dans sa forme la plus récente, ce projet de loi commence par une définition large du crime de torture, à savoir un délit « commis par un agent public ou une personne en charge d’un service public » qui inflige « des souffrances physiques ou mentales à une personne placée sous son autorité afin d’obtenir d’elle ou d’une tierce personne des renseignements ou des aveux au sujet d’une action qu’elle-même ou une tierce personne a commise ou est soupçonnée d’avoir commise, ou bien afin de punir une personne pour des actions qu’elle a accomplies ou est soupçonnée d’avoir accomplies, ou bien encore pour des raisons de discrimination raciale, politique, religieuse ou sexuelle […] ». Ce délit est passible d’une peine d’emprisonnement de 10 ans, en cas de préjudice grave ou très grave, et du double s’il a causé le décès de la victime (art. 1).

14.L’un des aspects dont il a été tenu compte lors du stade initial de la rédaction du projet de loi est le cadre dans lequel il convient que figure ce délit : son inclusion dans le Code pénal revêt une signification particulière en rapport avec le champ d’application de la disposition qui en résulte, lequel devient encore plus étendu si l’interprétation donnée à la définition de ce crime est assez large pour inclure toute forme de pression non pas simplement physique, mais également psychologique, et comprend des actions accomplies au cours des poursuites judiciaires ou des enquêtes de police afin d’obtenir des renseignements ou des aveux.

15.Á cet égard, il a été proposé que la définition de l’action délictueuse comporte « des violences ou des menaces graves et répétées ». L’éventail des coupables potentiels a également été étendu, en plus des agents publics, aux « avocats, auxiliaires, enquêteurs privés agréés ou aux conseillers techniques figurant dans l’article 391 bis du Code de procédure pénale qui infligent … »

16.En ce qui concerne la gravité de l’infraction, la circonstance aggravante consistant à se rendre coupable de coups et blessures sur la personne de la victime a été jugée être d’une importance particulière. La question de savoir s’il convient de faire une distinction entre les peines a également été soulevée, ce qui a entraîné, seulement dans la dernière partie du texte, à prévoir aussi l’extension de la peine aux personnes jugées coupables d’une infraction assimilable à la torture pour des raisons de discrimination raciale, politique, religieuse ou sexuelle.

17.Si l’auteur de l’infraction est un citoyen étranger faisant l’objet de poursuites judiciaires ou d’une condamnation dans un autre pays ou de la part d’un tribunal international pour ce même délit, l’Italie ne lui accordera pas l’immunité diplomatique et procédera à son extradition (art. 1, par. 2 et 3).

18.Il est envisagé de créer un fonds d’indemnisation des victimes de torture d’un montant de 5,2 millions d’euros pour la période de trois ans 2002-2004, administré par un comité pour la réadaptation des victimes de torture agissant au sein du Ministère de la justice (art. 3). Cet article a été supprimé dans la dernière version du texte de synthèse. Il convient de signaler que le Comité du budget avait souligné la nécessité d’établir un rapport technique détaillé permettant de juger de la pertinence de la dépense en question; il s’agissait de savoir si cette estimation pouvait entraîner des obligations ultérieures susceptibles d’accroître les coûts (auquel cas il aurait fallu prévoir une clause de sauvegarde à cet égard) et de quelle manière le Fonds et la Commission devaient utiliser ces sommes en vue de la réadaptation des victimes de torture.

B. Nouvelles dispositions législatives concernant les étrangers

Le problème de l’immigration légale et illégale en Italie

19.L’Italie, en fait, est un pays d’immigration depuis la deuxième moitié des années 1970, mais ce phénomène n’a commencé à être régulé qu’au cours des années 1980. Depuis lors, l’immigration a augmenté progressivement pendant les années 1990.

20.L’expérience de ces dernières années confirme la théorie selon laquelle les écarts et les déséquilibres croissants enregistrés au niveau des taux de développement économique et démographique et l’état de pauvreté et de sous-développement dans lequel vivent encore les deux tiers de l’humanité sont les facteurs qui alimentent les flux migratoires.

21.Tirant parti de son expérience de pays d’émigration, l’Italie a compris que l’immigration était un phénomène structurel et non quelque chose d’exceptionnel qu’il convenait de régler par des mesures d’urgence. En même temps, toutefois, l’Italie considère qu’une immigration libre et incontrôlée serait plus néfaste que bénéfique : une telle éventualité ne serait pas seulement insoutenable pour le système socio-économique, qui ne serait pas en mesure de fournir des emplois à un nombre illimité d’individus, ainsi que pour le système de garanties sociales dont tous les pays avancés sont fiers à juste titre, mais elle est, en tout état de cause, exclue du fait des accords conclus avec ses partenaires européens. Seule une politique efficace de coopération et d’aide au développement des pays les plus touchés par l’émigration, coordonnée aux plans international et européen, peut agir sur les causes du sous-développement et, encore que ce ne soit envisageable qu’à moyen ou à long terme, peut contribuer à endiguer les mouvements migratoires.

Ces considérations sont à l’origine de la prise de conscience que l’Italie avait besoin d’un nouvel instrument législatif permettant d’organiser systématiquement et de réguler les flux migratoires, les pouvoirs publics étant fermement convaincus de pouvoir gérer un afflux structuré et programmé de travailleurs étrangers susceptibles d’être intégrés dans la société italienne. C’est cette nécessité qui a conduit à l’adoption de la nouvelle législation sur l’immigration, la loi N° 40 du 6 mars 1998, et au texte de synthèse sur l’immigration adopté par le décret législatif N° 286 du 25 juillet 1998.

23.L’Italie, qui, eu égard à sa situation géographique au cœur de la Méditerranée, constitue l’une des principales frontières extérieures de l’espace Schengen, est devenue peu à peu un pays de destination pour un flux de migrants attirés par les changements qui sont intervenus dans l’économie mondiale. Ces dernières années, ce flux s’est progressivement intensifié, non pas sur la base d’une programmation prudente des entrées, mais en grande partie en empruntant des voies non officielles.

24.Le texte de synthèse sur l’immigration a été modifié ultérieurement par la loi N° 189 du 30 juillet 2002, pour permettre de mieux faire face aux problèmes liés à cette dernière. Cette loi innovatrice aura un impact important sur deux aspects de ce phénomène dans la mesure où elle reconnaît la nécessité :

–d’adopter les mesures les plus fermes possibles pour lutter contre l’immigration illégale et clandestine et la criminalité qui lui est associée;

–d’encourager l’accueil sans réserve des citoyens étrangers qui ont l’intention de gagner honnêtement leur vie dans le pays et de s’intégrer à sa société, dans le cadre d’un afflux programmé, en Italie, de travailleurs originaires de pays non membres de l’Union européenne.

25.Cette loi prévoit aussi la possibilité de « régulariser » la situation des travailleurs déjà employés en Italie et dont les employeurs ont demandé la régularisation. En vertu de cette législation et de la loi N° 122 /2003, le processus de régularisation a été lancé (pour être terminé au 31 décembre) pour près de 700 000 travailleurs non communautaires et présents en Italie, soit un nombre considérablement plus élevé que prévu et beaucoup plus important qu’au terme des précédentes « amnisties » dont ont bénéficié les immigrants (244 000 immigrés non originaires de pays membres de l’Union européenne ont été « régularisés » en 1995 et 251 000 en 1998).

26.Ces amnisties périodiques sont devenues nécessaires pour régulariser la situation d’étrangers qui, faute de quoi, seraient condamnés à vivre perpétuellement dans l’illégalité. Réduire dans la mesure du possible cette zone d’illégalité était une condition préalable à l’instauration d’une politique d’immigration active fondée sur des quotas.

L’ordonnance de « programmation des flux migratoires »

27.Selon le rapport sur l’immigration illégale et la présence des étrangers en Italie, présenté au Parlement en mai 1998, le nombre d’immigrants clandestins est de l’ordre de 200 000 à 300 000.

28.Pour permettre cette régularisation, en se fondant sur les recommandations formulées dans le document de programmation, le gouvernement a pris une «ordonnance de programmation des flux migratoires » fixant un quota supplémentaire de 38 000 personnes pour 1998, plafond jusqu’auquel il était prévu de délivrer des permis de séjour pour raisons d’emploi salarié et d’activité indépendante aux citoyens de pays n’appartenant pas à l’Union européenne et résidant à l’extérieur ou bien déjà présents en Italie avant l’entrée en vigueur de la loi N° 40 /1998, à la condition qu’ils aient déposé leur demande le 15 décembre 1998 au plus tard. La demande devait être accompagnée des pièces nécessaires attestant que son auteur se trouvait en Italie avant le 27 mars 1998, occupait un emploi salarié ou un emploi sous contrat (stable) et disposait d’un logement convenable. La possibilité de régulariser la situation des immigrés clandestins faisant valoir leur droit à cela au motif de regroupement familial était aussi prévue.

29.Au 28 décembre 1999, 243 233 demandes de légalisation avaient été déposées pour raison d’emploi (dont 36 339 pour travail indépendant), dont 130 887 ont été acceptées et 11 879 rejetées; 7 337 demandes ont été faites pour raisons de regroupement familial, dont 5 368 ont été acceptées et seulement 166 rejetées.

30.Pour 2003, 79 500 personnes de plus ont été autorisées à entrer en Italie, dont 68 500 pour des travaux saisonniers. En ce qui concerne les procédures de régularisation de la situation des étrangers en situation irrégulière prévues par la loi N° 189 du 30 juillet 2002 et engagées le 12 novembre 2002 pour se terminer à la fin de l’année, plus de 73 % des demandes avaient déjà été déposées dans les bureaux des préfectures au 30 juin 2003 et avaient obtenu les autorisations nécessaires de la part de la questura (les bureaux chargés des forces de police, du maintien de l’ordre et des services administratifs connexes).

31.La procédure d’identification par les empreintes digitales prévue dans la disposition ci-dessus et mise en application à partir de septembre a permis l’enregistrement, jusqu’au 30 juin 2004, de 635 612 étrangers, dont environ 480 000 en vertu de la nouvelle législation sur l’immigration et l’asile politique. Ce système permet à la questura de vérifier en temps réel et avec la plus grande certitude les renseignements concernant les demandeurs de permis de séjour ou d’asile politique.

Surveillance des frontières et mesures de contrôle

32.Le phénomène de l’immigration clandestine en Italie, qui est caractérisé par le transit d’étrangers en route vers d’autres pays européens, a beaucoup évolué au fil du temps. Par exemple, alors que le flux des citoyens roumains qui traversent les frontières a considérablement augmenté, celui des migrants en provenance de l’espace méditerranéen est composé essentiellement de personnes venant des pays les plus pauvres de l’Afrique subsaharienne, occidentale et centrale. Ce dernier sous-groupe suit surtout les principales routes maritimes. Cependant, entre 2000 et 2002, on a constaté une diminution importante (de 11,5 %) du nombre d’immigrants clandestins débarquant sur les côtes du sud de l’Italie, ce qui est particulièrement évident dans le cas des Pouilles (18 990 en 2000 contre 3 372 en 2002) et de la Calabre (5 045 en 2000 contre 2 122 en 2002), soit une diminution de 82,2 % et 57,9 % respectivement, en contraste avec une augmentation du phénomène en Sicile (de 2 782 en 2000 à 18 225 en 2002). Cette tendance de l’immigration illégale est confirmée par les chiffres du premier trimestre de 2003 au cours duquel on a compté 7 888 entrées illégales d’étrangers (contre 12 272 au cours de la même période en 2002, soit une diminution de 35,7 %).

33.Á cet égard, deux lignes d’action ont été adoptées, qui peuvent être résumées comme suit. Du point de vue législatif, la loi N° 189 du 30 juillet 2002 a modifié de façon importante le cadre législatif précédent, les principales innovations étant fondées sur les principes suivants :

–renforcement des critères de suivi et de contrôle, y compris grâce aux empreintes digitales;

–définition d’infractions spécifiques en cas de falsification de papiers ou de documents nécessaires pour être autorisé à pénétrer sur le territoire italien;

–alourdissement des peines en cas d’incitation à l’immigration ou à l’émigration illégale;

–renforcement des contrôles aux frontières et de la coordination de l’aide d’urgence et des actions menées pour lutter contre l’immigration clandestine dans les eaux territoriales ou en haute mer;

–amélioration de l’efficacité des dispositions administratives relatives à l’expulsion;

–introduction de « contrats de séjour » à des fins d’emploi;

–renforcement de la coopération internationale pour prévenir les flux migratoires illégaux et lutter contre le crime organisé.

34.D’un point de vue opérationnel, le besoin est apparu d’effectuer une évaluation particulièrement rigoureuse du réseau local des structures de police chargées d’assurer la sécurité des frontières italiennes. Pour ce qui est du Département de la sécurité publique du Ministère de l’intérieur, la nouveauté la plus importante est la fusion de la police des frontières et des services de l’immigration, processus qui s’est soldé par la création du Service de l’immigration et de la police des frontières au sein de la Direction centrale de la police de la route, des chemins de fer, des frontières et des postes.

35.Des projets techniques spécifiques sont en cours d’élaboration pour améliorer les instruments de soutien technique aux postes frontières, eu égard, notamment, aux vérifications qui peuvent être faites par la Commission des frontières de Schengen sur la base de la décision prise le 16 septembre 1998 par le Comité exécutif de Schengen en vue de garantir le respect des procédures définies par la Convention. Ils prévoient la mise en place d’infrastructures et de technologies de pointe pour surveiller les frontières extérieures les plus exposées à l’immigration, telles celles du sud du pays, ainsi que le renforcement des moyens informatiques et de transport à chaque poste frontière.

36.La mise en œuvre de plans de surveillance coordonnés, en particulier dans les deux régions les plus exposées aux flux migratoires, les Pouilles et le Frioul -Vénétie Julienne, a donné un coup d’accélérateur aux opérations. Cette intensification de l’activité a contribué, au premier semestre de 1999, à améliorer considérablement le repérage des étrangers en situation irrégulière dans la zone frontalière entre l’Italie et la Slovénie par rapport à la même période de l’année précédente (2 212 contre 1 156, soit une augmentation de 53 %).

37.Dans le cas des Pouilles, les flux ont décru de manière très importante, passant de 28 458 individus en 1998 à 18 990 individus en 2000 (le chiffre de 46 481 pour 1999 doit être apprécié à la lumière du conflit du Kosovo). Cela a été suivi d’une nouvelle diminution en 2001, où l’on a repéré « seulement » 8 546 immigrants clandestins. Cette réduction caractérisée s’est confirmée en 2002 avec un chiffre de 3 372, et pendant les six premiers mois de 2003 qui ont été marquée par des débarquements comportant 81 étrangers clandestins de nationalité iraquienne, albanaise et pakistanaise.

Centres de séjour et d’assistance temporaires

38.Les centres de séjour et d’assistance temporaires, tels qu’ils sont prévus par l’article 14 du décret législatif N° 286 de 1998, sont l’instrument choisi pour permettre une application plus efficace des dispositions relatives au rapatriement des étrangers ayant pénétré illégalement en Italie. Á cet égard, ils constituent également l’un des moyens essentiels d’assurer le fonctionnement efficace des procédures d’expulsion qui, au regard du système envisagé par la réforme de 1998 et ensuite grâce à l’application de la loi N° 189/2002 portant modification de la législation relative à l’immigration et à l’asile politique, est une condition préalable à la mise en œuvre dans de bonnes conditions d’une politique de l’immigration fondée sur des quotas annuels.

39.Á l’instar de ce qui se passe dans d’autres cadres législatifs d’autres pays européens, le but des nouvelles dispositions est de désigner les structures spécifiques destinées à accueillir, sous le contrôle des autorités judiciaires, les étrangers faisant l’objet d’un arrêté d’expulsion ou dont l’entrée en Italie a été refusée. Cette rétention provisoire (pendant une période ne dépassant pas 60 jours) permet de surmonter tout obstacle à la bonne exécution de l’arrêté.

40.Pour ce qui est du choix des centres, la disposition concernée exige qu’il fasse l’objet d’un arrêté pris par le Ministre de l’intérieur en liaison avec le Ministre des affaires économiques et des finances et celui de l’emploi et des politiques sociales.

41.En 1999-2000, l’objectif des programmes d’action du gouvernement concernant les centres de séjour temporaire a été d’accroître la fonctionnalité des établissements existants et de faire en sorte qu’ils répondent à des critères d’habitabilité plus exigeants (Caltanissetta, Raguse, Trapani, Brindisi, Lecce, Catanzaro, Milan, Rome, Turin, Agrigente et Lampedusa). Á ce jour, 15 centres ont été agréés conformément à la loi N° 40/1998, dont 13 sont opérationnels, ce qui représente une capacité d’accueil totale de 1 939 places.

Tableau 1

Centres de séjour temporaire pour immigrants

Province

Lieu

Nom

Capacité

1

Agrigente

Agrigente

Contrada San Benedetto

110

2

Agrigente

Lampedusa

Airport zone

180

3

Bologne

Via E. Mattei

Ex Caserma Chiarini

95

4

Brindisi

Brindisi

Contrada Restingo

120

5

Caltanissetta

Loc. Pian del Lago

Contrada Niscima

90

6

Catanzaro

Lamezia Terme - Pian del Duca

Coop. “Malgrado Tutto”

100

7

Lecce

Melendugno – Loc. San Foca

“Regina Pacis”

230

8

Lecce

Otranto-Via Uggiano L. Chiesa

Centro Don Tonino Bello

200

9

Milan

Milan

Via Corelli

120

10

Modène

Modène – Loc. S. Anna

Viale Lamarmora

60

11

Raguse

Raguse Via Colajanni

Ex Somicem AGIP

60

12

Rome

Rome – Ponte Galeria

Ponte Galeria

300

13

Turin

Turin

Corso Brunelleschi

70

14

Trapani

Trapani, Via Segesta 3

Opera Pia Serraino Vulpitta

54

15

Crotone

Isola Capo Rizzato, ss 106

S. Anna

150

42.Le centre d’Agrigente-Lampedusa a pour fonction principale de fournir une assistance initiale et de servir d’organisme centralisateur des informations. Les travaux d’aménagement des centres de Crotone et de Raguse sont terminés et ils sont prêts à ouvrir dès que les services de sécurité nécessaires seront disponibles.

43.Suite au remaniement des textes qui est allé de pair avec l’adoption de la loi N° 189/2002 prévoyant le doublement (de 30 à 60 jours) de la période de rétention des étrangers présents illégalement sur le sol italien en attendant qu’un arrêté d’expulsion soit pris à leur encontre, des projets, de restructuration et de rénovation notamment, visant à augmenter le nombre de centres de rétention et de places disponibles ont été mis au point.

44.Afin d’atteindre les objectifs ci-dessus, des centres ont été ouverts à Bologne et à Modène, et la capacité d’accueil du centre de Rome-Ponte Galeria a été portée à 300 places. Des crédits ont également été dégagés pour la construction du Centre de séjour temporaire de Bari-Palese dont le schéma directeur a été approuvé par l’inspection régionale des travaux publics des Pouilles.

45.Non seulement le Département des libertés civiles et de l’immigration du Ministère de l’Intérieur s’engage à accroître le nombre de places disponibles dans les centres de rétention en fonction des besoins effectivement relevés par la police dans ce domaine pour permettre une bonne application des nouvelles dispositions législatives, mais il a aussi complètement réorganisé la gestion des centres en élaborant des directives à cette fin.

46.L’organisation de ces structures est fondée sur des paramètres normalisés et vérifiables en matière de qualité, de rentabilité et d’efficacité qui permettent d’assurer la plus grande transparence possible dans la gestion des établissements et les procédures de sélection de leurs organes d’administration.

47.L’adoption de ces directives permet, d’une part, d’harmoniser et de relever le niveau des services offerts et, d’autre part, d’adopter des critères objectifs aux fins de la sélection des organes d’administration qui sont tenus de formuler des offres transparentes quant aux améliorations des services et des rémunérations, de rationaliser les dépenses et de faire la chasse au gaspillage.

48.Il existe également 10 centres d’identification (ex-centres d’accueil) dont neuf sont déjà opérationnels, à savoir

–Bari-Palese (qui a rouvert après les débarquements des 2 et 3 juin 2003, avec 560 places);

–Crotone-Sant’Anna (d’une capacité de 1 500 places, dont 1 200 actuellement disponibles);

–Foggia-Ortanova (500 places);

–Lecce-Loc.La Badesa Centro Lorizzonte (fermé depuis le 30 mars 2003);

–Trapani-Pantelleria-Caserma Barone (100 places);

–Trapani-Salinagrande (230 places).

49.La première tranche du centre « Pian del Lago » de Caltanissetta est achevée et fonctionne depuis novembre 2003 (150 places).

50.Ces centres d’identification sont flanqués d’autres structures créées au cas par cas selon les besoins (Ancône Benincasa d’une capacité de 30 places; Come-Tavernola, d’une capacité de 200 places; Gorizia (ex- scuola S. Giuseppe) d’une capacité de 32 places). Il y a un centre d’accueil au poste frontière d’Imperia.

Expulsion des étrangers

51.Le chapitre II de la loi unifiée est entièrement consacré à la question des contrôles aux frontières ainsi qu’au refoulement et à l’expulsion des étrangers. La loi N° 189/2002 a introduit un nombre important d’amendements concernant les expulsions.

52.L’article 10 régit l’adoption des mesures de refoulement tant aux frontières qu’immédiatement après l’entrée en territoire italien d’étrangers qui ne répondent pas aux conditions d’admission. Ces dispositions ne s’appliquent pas aux demandeurs d’asile politique, ni aux personnes qui demandent le statut de réfugié, ni encore aux cas où des mesures de protection temporaires sont prises pour des raisons humanitaires.

53.L’article 13 régit l’expulsion administrative, qui est ordonnée par le Ministre de l’intérieur pour des raisons d’ordre public et de sûreté de l’État (par. 1). Toutefois, dans les cas où un étranger a pénétré en territoire italien en échappant au contrôle aux frontières, n’a pas fait de demande de délivrance ou de renouvellement d’un permis de séjour dans les délais prescrits, ou ne possède pas ce permis, ou encore représente un danger pour la sécurité publique selon les paramètres définis par les lois 1423/1956 et 575/1965, elle est ordonnée par le préfet.

54.La loi N° 189/2002 (portant amendement du paragraphe 3 de l’article 10) dispose que l’expulsion doit être prévue « dans tous les cas par le biais d’une ordonnance (motivée) exécutoire, même si elle est susceptible de recours ou d’appel de la part de la partie concernée ». Si cet étranger fait l’objet de poursuites pénales et n’a pas été placé en détention préventive, avant de procéder à l’expulsion, le questore (le fonctionnaire responsable des forces de police et de l’ordre public) demande l’autorisation de l’autorité judiciaire, qui ne peut la refuser que pour des raisons impératives de procédure. Dans ce cas, l’exécution de l’expulsion est suspendue jusqu’à ce que l’autorité judiciaire indique par voie de notification que ces raisons ne sont plus pertinentes. L’autorisation est aussi automatique si l’autorité judiciaire ne répond pas au plus tard 15 jours après le dépôt de la demande. Enfin, dans l’attente de la décision relative à la demande d’autorisation, le questore peut prendre les dispositions pour que l’étranger soit placé dans un centre de détention provisoire.

55.Dans les cas d’arrestation en flagrant délit, il est également prévu que le juge délivre l’autorisation au moment de la confirmation, sauf si l’intéressé est placé en détention préventive, dans d’autres cas prévus par le Code pénal, ou si l’autorisation ne peut être accordée en vertu du paragraphe 3. Ces dispositions peuvent également s’appliquer aux étrangers faisant l’objet de poursuites pénales, après la levée ou l’expiration de la mesure de détention préventive.

56.Lorsqu’est prononcée l’annulation ou la fin de la détention préventive, le juge prend également une décision concernant l’expulsion. Dans certains cas clairement définis, l’intéressé est immédiatement reconduit jusqu’à la frontière (expulsion ordonnée par le Ministre de l’intérieur, expulsion ordonnée mais non exécutée dans les délais imposés par l’ordonnance, etc.). La loi N° 189/2002 dispose que, dans le cas des étrangers qui « sont demeurés sur le territoire italien plus de 60 jours après l’expiration de leur permis de séjour et n’ont pas déposé de demande de renouvellement », l’arrêté d’expulsion doit comporter une injonction de quitter le territoire italien dans les quinze jours. Le questore doit prendre les dispositions nécessaires pour que l’étranger concerné soit immédiatement reconduit à la frontière si le préfet détecte un danger réel que ledit étranger cherche à se soustraire à l’exécution de cet arrêté.

57.Dans d’autres cas, l’intéressé reçoit notification de quitter le territoire italien sous quinzaine. Pour ce qui est des recours formés contre l’arrêté d’expulsion, la loi N° 189/2002 dispose que ces derniers « ne peuvent être déposés qu’auprès du tribunal à juge unique de la localité où réside l’autorité qui a pris l’arrêté. Ce tribunal doit accepter ou rejeter le recours, sa décision faisant l’objet d’une seule ordonnance qui doit être rendue au plus tard 20 jours après la date du dépôt du recours. Ce dernier peut être signé par l’intéressé ou bien être soumis par le truchement de la mission diplomatique ou consulaire italienne dans le pays de destination de la personne expulsée. La signature du recours apposée par l’intéressé doit être authentifiée par des fonctionnaires de la mission diplomatique ou consulaire qui la feront suivre à l’autorité judiciaire. L’étranger concerné a le droit d’être assisté par un avocat de son choix détenteur d’une procuration faite en présence d’un représentant de l’autorité consulaire. Il a également droit à une aide judiciaire gratuite financée par l’État et, s’il n’a pas d’avocat pour le défendre, il doit bénéficier de l’assistance d’un avocat commis par le juge ». Si, aux termes de l’arrêté d’expulsion, l’étranger doit être reconduit sur le champ à la frontière, un recours peut être déposé par le truchement de la mission diplomatique ou consulaire italienne se trouvant dans le pays de destination de l’intéressé. La compétence du juge administratif n’a été maintenue que dans les cas où l’expulsion a été décidée par le Ministre de l’intérieur, lequel jouit d’un pouvoir discrétionnaire de décision.

58.Aux fins de l’application effective des dispositions qui prévoient la reconduite à la frontière et l’expulsion, la loi dispose que l’étranger doit être retenu dans un centre de séjour et d’assistance temporaires. Ces mesures ne peuvent être appliquées que dans les cas spécifiquement prévus par la loi, c’est-à-dire lorsqu’il est nécessaire de fournir une assistance à l’étranger ou de procéder à des vérifications pour s’assurer de son identité ou de sa nationalité, ou dans d’autres cas particuliers où il n’est pas possible de procéder immédiatement à l’expulsion. En vertu de l’article 13 de la Constitution, la rétention dans ces centres doit être validée par un juge dans les 48 heures et ne peut en aucun cas être décidée pour une durée supérieure à 20 jours, prorogée éventuellement de 10 jours. Si les procédures n’ont pas été menées à leur terme dans ces délais, l’étranger est libéré.

59.La loi N° 189/2002 a porté modification d’un certain nombre de procédures relatives à l’exécution de l’arrêté d’expulsion, prévoyant la possibilité de décider d’un temps de détention plus long (60 jours au maximum) dans les centres de séjour temporaire : « La validation implique un temps global de rétention de 30 jours, qui peut être prorogé d’autant, à la demande du questore, si la vérification de l’identité ou de la nationalité ou bien l’obtention des titres de voyage se révèle être difficile. Avant même l’expiration de ce délai, le questore peut procéder à l’expulsion ou au refoulement de l’intéressé et en informer le juge sans délai. »

60.La loi N° 189/2002 dispose également que « s’il n’a pas été possible de placer l’étranger en rétention dans un centre de séjour temporaire, ou si le temps maximum de rétention est venu à expiration sans qu’il ait pu être procédé à l’expulsion, le questore doit ordonner à l’étranger de quitter le territoire italien dans les cinq jours. Cet ordre doit parvenir à l’intéressé sous forme écrite et indiquer quelles seront les conséquences pénales d’un refus d’obtempérer ». Tout étranger qui, ne respectant pas cet ordre, demeure sans justification sur le territoire italien, doit être arrêté et condamné à une peine de détention de six mois à un an. Tout étranger expulsé découvert sur le territoire italien doit être condamné à une peine d’emprisonnement de un à quatre ans.

61.Les articles 15 et 16 du décret législatif N° 286/1998 régissent les expulsions ordonnées par l’autorité judiciaire à titre de mesures de sécurité, en cas de condamnation pour l’une des infractions tombant sous le coup des articles 380 et 381 du Code pénal, ou en cas de transaction pénale si l’intéressé s’est vu imposer une peine autre que la détention, faisant déjà l’objet d’un arrêté d’expulsion en vertu de l’article 13.2, ou en cas de condamnation pour une infraction objective (non intentionnelle) passible d’une peine d’emprisonnement de deux ans au maximum.

62.Les mesures d’expulsion ne s’appliquent pas aux mineurs âgés de moins de 18 ans, aux femmes enceintes, ni aux étrangers titulaires d’un permis de séjour, à l’exception des cas prévus par l’article 9.5. Enfin, des dispositions à caractère humanitaire ont été introduites dans le chapitre III (articles 18, 19 et 20) pour la protection des ressortissants étrangers victimes d’exploitation de la part d’organisations criminelles. Ces derniers ont droit à un permis de séjour spécial qui leur permet d’échapper aux violences et aux pressions des criminels en question et de bénéficier de programmes d’aide et d’intégration sociale. Le programme leur permet aussi, le cas échéant, de coopérer avec les autorités pour lutter contre la criminalité en les aidant à identifier et à capturer les individus coupables des crimes et délits visés à l’article 3 de la loi N° 75/1958 relative à la lutte contre l’exploitation de la prostitution ou à l’article 380 du Code pénal.

63.Au plan opérationnel, au 31 octobre 1999, 60 724 étrangers avaient été rapatriés en application d’arrêtés d’expulsion, dont 31 079 refoulés à la frontière, 9 878 déboutés par le questore en application de l’article 10.2 de la loi unifiée, 9 168 expulsés effectivement, 463 expulsés sur décision judiciaire et 10 136 étrangers en situation irrégulière refoulés ou expulsés et rapatriés dans leur pays d’origine en vertu d’accords de réadmission. On s’est particulièrement intéressé à ce dernier chiffre pour déterminer si les accords de réadmission facilitaient l’application des décisions de rapatriement, même si cette procédure ne faisait pas l’objet d’une disposition distincte, puisque, en tout état de cause, elle exigeait au préalable l’adoption d’une décision d’expulsion ou de refoulement.

64.Au premier semestre de 2003, 28 671 ressortissants étrangers faisant l’objet d’un arrêté d’expulsion ont été effectivement expulsés d’Italie, soit environ 59,13 % de l’ensemble des étrangers qui, pendant la même période, ont été découverts en situation irrégulière sur le territoire italien. Ce chiffre est tout à fait comparable à ceux des années précédentes, qui traduisent une augmentation de 56 % en 2002 et de 53 % en 2001.

65.Cette tendance à la hausse des expulsions d’étrangers en situation irrégulière est confirmée par l’augmentation constatée en 2002 par rapport à 2001 (13,9 %) et encore plus marquée par rapport à 2000 (27,8 %). Afin d’accélérer et de rendre plus efficace la reconduite des étrangers jusqu’à leur pays d’origine, on a utilisé plus souvent des charters « spécialisés » ces dernières années. Cinq vols de ce type ont eu lieu en 2000 pour rapatrier 433 immigrants clandestins; en 2001, on a compté 13 vols pour un total de 1 700 étrangers, 26 vols en 2002 pour 2 294 étrangers, et 10 vols au premier semestre de 2003, qui ont rapatrié 712 étrangers.

66.En outre, au cours des six premiers mois de 2003, 42 personnes ont été arrêtées pour le transport d’immigrants clandestins, après avoir été interceptées lors de débarquements ou identifiées au terme d’enquêtes ciblées effectuées, y compris au plan international, en coopération avec des organisations étrangères; 76 bateaux utilisés pour le transport illégal de ces clandestins ont été saisis. En 2002, le nombre d’arrestations (277) a accusé une augmentation de 38,5 % par rapport à celui (200) de l’année précédente.

67.Ainsi, l’Italie a accordé une importance particulière aux accords de réadmission conclus avec 27 pays : quatre membres de l’Union européenne (Autriche, Grèce, France et Espagne), 17 États européens (Albanie, Bulgarie, Chypre, Croatie, Estonie, l’ex-République yougoslave de Macédoine, Lettonie, Lituanie, Malte, République de Moldova, Pologne, Roumanie, Serbie et Monténégro, Slovaquie, Slovénie, Suisse et Hongrie), quatre États africains (Algérie, Maroc, Nigeria et Tunisie) et deux États asiatiques (Géorgie et Sri Lanka).

68.Des initiatives ciblées ont également été prises pour renforcer la coopération avec les principaux pays d’origine et de transit des flux migratoires illégaux, dont il convient de noter les suivantes :

–Jamahiriyia arabe libyenne : accord opérationnel avec les autorités de la sécurité libyenne et la police des frontières pour intensifier l’effort de lutte contre les flux migratoires illégaux qui transitent par la Libye et se dirigent vers l’Italie par voie maritime;

–Albanie : Programmes d’assistance technique et de formation du personnel, et mesures conjointes de surveillance maritime qui prévoient aussi l’utilisation de bateaux italiens dans les eaux territoriales albanaises;

–Slovénie : Mise en œuvre, le long de la frontière commune, d’accords de surveillance et de contrôle conjoints;

–Turquie : Échange de renseignements stratégiques et provenant des enquêtes pour aider à lutter contre les organisations qui prêtent leur concours à l’immigration clandestine;

–Malte : Renforcement de la coopération dans les enquêtes visant à démanteler les associations de malfaiteurs responsables du transport maritime des immigrants clandestins de Malte vers la Sicile;

–Tunisie : Fourniture gratuite d’équipement et de matériel aux services de police engagés dans la lutte contre l’immigration clandestine;

–Chypre : Possibilité donnée aux unités de la marine italienne engagées dans des opérations de lutte contre l’immigration clandestine de recevoir une assistance technique et logistique de la part des structures portuaires chypriotes;

–Égypte : Dans le cadre des négociations en cours concernant la réadmission des migrants, organisation en novembre et décembre 2002, en accord avec les autorités égyptiennes, de deux vols charters permettant le rapatriement à Colombo de plus de 300 ressortissants Sri Lankais qui avaient été arrêtés par les autorités égyptiennes alors qu’ils tentaient d’atteindre illégalement l’Italie;

–République arabe syrienne et Liban : Propositions de programmes de formation de la police des frontières;

–Chine : Mission en Italie, pour une période de trois mois, de membres de la police chinoise pour coopérer à des vérifications de nationalité et d’identité d’individus présumés être citoyens chinois faisant l’objet de mesures d’expulsion, en vue de leur délivrer des titres de voyage.

69.Des relations de collaboration ont également été établies avec les services diplomatiques et consulaires des principaux pays d’origine des flux migratoires clandestins en direction de l’Italie, afin de simplifier les procédures de vérification de la nationalité en vue de la délivrance des titres de voyage nécessaires au rapatriement, à savoir les pays suivants : Nigeria, Maroc, Tunisie, Sri Lanka, Bangladesh, Roumanie et Albanie (eu égard à l’accord de coopération solidement établi, les autorités albanaises procèdent à la réadmission de leurs ressortissants, même sans papiers).

Ressortissants étrangers bénéficiant d’une protection temporaire

70.Les ressortissants étrangers bénéficiant d’une protection temporaire sont des personnes qui ont fui leur pays (personnes déplacées) en raison d’une guerre, d’une guerre civile, d’une agression extérieure, d’une violence généralisée ou de graves violations des libertés démocratiques, ou encore pour trouver refuge à la suite de catastrophes naturelles.

71.L’article 20 de la loi unifiée sur l’immigration comprend une disposition essentielle qui permet d’intervenir en cas d’urgence humanitaire causée par des événements exceptionnels tels que conflits, catastrophes naturelles ou autres événements particulièrement graves dans des pays qui ne sont pas membres de l’Union européenne.

72.En de telles circonstances, il est donc possible au gouvernement de décider, sur ordonnance prise par le Premier Ministre, de mesures de protection temporaires permettant de prendre en charge dans les meilleurs délais et de manière appropriée des personnes évacuées qui arriveraient en grand nombre en Italie.

Demandeurs d’asile et réfugiés

73.La loi N° 189/2002 a modifié sensiblement la législation antérieure. La Commission centrale pour la reconnaissance du statut de réfugié est maintenant devenue la Commission nationale pour le droit d’asile.

74.Cette commission, présidée par un préfet, est nommée par décret du Premier Ministre sur proposition conjointe des Ministres de l’intérieur et des affaires étrangères.

75.Elle se compose d’un haut fonctionnaire du Cabinet du Premier Ministre, d’un fonctionnaire du service des préfets basé au Département des libertés civiles et de l’immigration et d’un haut fonctionnaire du Département de la sécurité publique. Un représentant du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés en Italie prend également part aux réunions.

76.Cette commission a pour fonction de conseiller et de coordonner les commissions locales, de former et de recycler leurs membres et de recueillir des données statistiques; elle est habilitée à se prononcer sur le retrait ou la perte du statut de réfugié.

77.Cette loi a apporté des changements radicaux à la procédure antérieure et a décentralisé les procédures d’examen des demandes d’asile en portant création de commissions locales nommées par décret du Ministre de l’intérieur. Afin de décourager les demandes frauduleuses, une procédure accélérée permet de retenir les requérants dans des centres d’identification et d’accélérer les formalités, les garanties nécessaires étant dûment respectées.

78.Les personnes qui désirent obtenir le statut de réfugié en Italie sont tenues de déposer une demande exposant les raisons de leur démarche, y compris les persécutions dont elles ont été victimes ainsi que les mesures éventuelles de représailles qu’elles encourraient au cas où elles retourneraient dans leur pays. Les demandes doivent être accompagnées, si possible, de pièces justificatives.

79.Le requérant peut soumettre sa demande :

a)Á la police des frontières, à son arrivée à la frontière. Avant d’autoriser l’étranger à pénétrer en territoire italien, la police des frontières vérifie qu’il n’y a pas d’obstacle à son entrée. Dans le cas contraire, l’autorisation est refusée et le requérant est refoulé; toutefois, il est interdit de refouler vers leur pays des demandeurs qui risquent d’y être victimes de persécution. En l’absence d’obstacles, l’étranger est invité à choisir un lieu de domicile sur le territoire italien et à se rendre à la questura (le bureau chargé des forces de police, du maintien de l’ordre et des services administratifs connexes) de la région en question pour y engager les procédures requises pour l’obtention de la reconnaissance du statut de réfugié;

b)Á la questura, au plus tard huit jours après son entrée en Italie, si cet étranger se trouve déjà en Italie. Cependant, s’il y a des raisons justifiées, il peut déposer une demande alors même que ce délai est expiré. En vertu de l’article premier de la loi N° 39/1990, les personnes qui se proposent de demander le statut de réfugié sont refoulées à la frontière dans les cas ci-après :

–lorsque l’intéressé s’est déjà vu accorder le statut de réfugié dans un autre pays;

–lorsque, après avoir quitté son propre pays et avant de pénétrer en Italie, l’intéressé a résidé dans un autre pays signataire de la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés;

–si l’intéressé a commis des crimes de guerre ou des crimes contre l’humanité;

–si l’intéressé a été condamné en Italie pour avoir commis l’un des crimes entraînant l’arrestation en flagrant délit, s’il représente un danger pour la sûreté de l’État, ou bien s’il appartient à la mafia ou à toute autre organisation criminelle de même nature ou encore à des organisations impliquées dans le trafic de stupéfiants ou le terrorisme.

80.La questura doit alors :

–remplir le formulaire type permettant de déterminer l’État compétent pour examiner la demande d’asile; ce formulaire est envoyé à l’Unité de Dublin de la Direction centrale des services d’immigration et d’asile qui s’assure, à la lumière de la Convention de Dublin, que l’Italie est bien l’État compétent.

–dresser le procès verbal des déclarations du requérant, contenant les réponses à une série de questions types : renseignements personnels, date du départ et moyens de transports employés depuis le pays d’origine, périodes de séjour ou de transit dans d’autres pays, date et lieu de passage de la frontière en Italie, appartenance à des organisations (politiques, religieuses, sociales, etc.), adresse à laquelle le requérant a l’intention de recevoir son courrier et raisons qui l’ont poussé à quitter son pays d’origine et/ou pour lesquelles il n’a pas l’intention d’y retourner. Le droit du requérant au respect de la confidentialité est protégé conformément à la législation italienne et aux normes européennes. Les organisations humanitaires et de défense des droits de l’homme jouent un rôle important dans ce contexte; tout rapport émanant d’elles concernant des cas spécifiques est dûment pris en considération. Les ressources publiques et celles des associations sont mises en commun pour faciliter le règlement des cas qui méritent une attention particulière.

81.L’étranger est invité à déclarer dans le procès verbal s’il souhaite un entretien particulier avec la Commission centrale pour la reconnaissance du statut de réfugié afin d’exposer, avec l’aide d’un interprète si nécessaire, les raisons pour lesquelles il dépose sa demande. Le procès verbal et la demande sont envoyés à la Commission centrale pour la reconnaissance du statut de réfugié.

82.Le requérant reçoit un titre de séjour temporaire portant le libellé suivant : « Convention de Dublin du 15 juin 1990 », qui l’autorise à séjourner en Italie pour une période d’un mois. Ce permis peut être prolongé jusqu’à ce qu’il ait été statué sur la compétence de l’Italie à traiter la demande.

83.Lors du dépôt de la demande, l’étranger est tenu de remettre son passeport s’il en possède un. L’article 11 de la loi unifiée prévoit la mise en place de services d’accueil spéciaux aux principaux postes frontières pour les étrangers demandeurs d’asile ou de protection humanitaire ou bien qui ont l’intention d’entrer en Italie pour d’autres raisons, pour une période de plus de trois mois.

84.Ces services d’accueil comportent toutes les activités permettant de faciliter le séjour des étrangers en Italie (orientation, protection et renseignements juridiques, interprétariat, etc.). Neuf de ces centres sont actuellement en fonctionnement : Ancône-port, Gorizia-Casarossa, Rome-Fiumicino, Trapani-port, Varese-Malpensa,Venise-port, en vertu d’un accord avec le Centre italien des réfugiés; Côme-Ponte Chiasso, en vertu d’un accord avec l’ACLI (Association chrétienne des travailleurs italiens); et Imperia-Ventimiglia et Trieste-Farneti, en vertu d’un accord avec Caritas.

85.Le formulaire type est examiné par l’Unité de Dublin de la Direction centrale des services d’immigration et d’asile du Ministère de l’intérieur qui détermine l’État de l’Union européenne chargé d’examiner la demande. Á l’issue de cet examen préalable, l’Unité de Dublin :

–demande à un autre État membre de l’UE de prendre le requérant en charge s’il est reconnu compétent à cet effet sur la base de la Convention de Dublin;

–envoie le formulaire à la Commission centrale pour la reconnaissance du statut de réfugié pour décision si l’Italie est compétente pour traiter ce cas.

86.La Commission centrale, qui examine quant au fond toutes les demandes sur lesquelles l’Italie est appelée à se prononcer (voir données sommaires pour la période 1990-2000), évalue les demandes auxquelles la Commission de Dublin a donné le feu vert

87.La Commission interroge les requérants à leur demande (formulée lorsque le procès verbal de leur déclaration est dressé à la questura) ou si la Commission elle-même le décide pour obtenir des précisions sur les raisons pour lesquelles ils déposent une demande. Les requérants sont tenus de prendre en charge leurs frais de voyage et de logement.

88.La Commission motive la décision de faire droit à la demande ou de la rejeter. Cette décision est notifiée au requérant par le truchement de la questura de son lieu de résidence.

89.Le droit à une procédure équitable est garanti grâce aux conseils juridiques dispensés par des associations humanitaires et à la demande du requérant. Á leur arrivée, les requérants qui séjournent dans des centres d’accueil reçoivent aussi une assistance juridique : ils sont informés de leur droit de recours et des domaines de responsabilité de chaque institution concernée.

90.Les titres de séjour temporaires (Convention de Dublin du 15 juin 1990) et les titres de séjour provisoires pour demande d’asile habilitent leurs détenteurs sans moyens d’existence ni logement en Italie à toucher une aide financière des autorités locales et une allocation d’aide initiale de la Direction centrale des services d’immigration et d’asile.

91.L’allocation d’aide initiale s’élève à 17,56 euros par jour. La demande, soumise au commissariat du lieu de résidence choisi par le requérant, est adressée à la préfecture de la province en question, accompagnée d’une attestation selon laquelle le requérant répond aux conditions requises (c’est-à-dire qu’il a effectivement soumis une demande de reconnaissance du statut de réfugié et est démuni). Si la préfecture n’autorise pas le versement de la prestation, le requérant peut faire recours auprès du tribunal administratif régional dans les 60 jours qui suivent la notification ou au auprès du Président de la République dans les 120 jours.

92.Si la Commission centrale fait droit à la demande, elle adresse à la questura un certificat en vue de la délivrance d’un permis de séjour de deux ans et d’un titre de voyage spécial autorisant le requérant à se rendre à l’étranger, à l’exception de son pays d’origine. Les règles régissant les permis de séjour pour raisons d’asile sont similaires à celles qui sont applicables à d’autres permis de séjour; cependant, vu les conditions spéciales dans lesquelles se trouve le réfugié, ce permis ne peut normalement lui être retiré et doit être prorogé une fois venu à expiration, sauf en cas de perte du statut de réfugié ou d’expulsion.

93.Conformément à la Convention de Genève relative au statut des réfugiés, le réfugié jouit du même traitement que les citoyens italiens en ce qui concerne :

–la liberté de religion et la liberté d’instruction religieuse;

–l’éducation primaire;

–l’accès aux tribunaux et l’assistance judiciaire;

–la protection des biens industriels (marques, brevets, etc.), littéraires, artistiques et scientifiques;

–les soins médicaux et l’assistance financière;

–l’emploi et l’assurance sociale;

–les impôts.

94.Les réfugiés qui résident légalement en Italie ont aussi droit à un traitement qui ne soit pas moins favorable que celui réservé aux autres ressortissants étrangers qui résident légalement en Italie en ce qui concerne :

–l’achat de bien meubles et immeubles;

–l’activité non salariée;

–le statut professionnel;

–l’éducation autre que primaire;

–la liberté de circulation.

95.Les réfugiés jouissent aussi d’un traitement spécial en matière de service militaire, de regroupement familial et d’acquisition de la nationalité italienne par naturalisation. Dans certaines conditions, ils ont droit à des prestations financières au titre du programme de mesures de soutien arrêté chaque année par la Commission centrale pour la reconnaissance du statut de réfugié avec le Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés.

96.Le programme de mesures de soutien comporte :

–des initiatives visant à l’entretien des personnes ou des familles qui, pendant la période qui suit la reconnaissance du statut de réfugié, ont des besoins essentiels qui ne pourraient pas être satisfaits autrement au cours de la phase d’insertion;

–des initiatives en faveur des personnes socialement vulnérables (malades, handicapés, personnes âgées ou familles avec enfants à charge qui poursuivent des études, étudiants inscrits à l’université ou qui suivent une formation) ou des cas exceptionnels d’une gravité ou d’une urgence attestée;

–un soutien à l’insertion professionnelle en vue de renforcer les volets du programme qui encouragent l’autosuffisance sociale et économique des réfugiés;

–des mesures d’assistance élémentaire (90 jours) en faveur des réfugiés qui, après s’être vu reconnaître cette qualité, ont touché ou étaient en droit de toucher, la prestation d’aide initiale même s’ils ne l’ont pas effectivement perçue.

97.Les réfugiés sont tenus de déposer leur demande d’allocation à la préfecture de la province dans laquelle ils résident sur le formulaire approprié, accompagné des documents ci-après :

–copie du titre de séjour en cours de validité (chef et membres du ménage);

–copie du certificat de reconnaissance du statut de réfugié

98.La préfecture procède aux formalités préliminaires et adresse le dossier composé des pièces nécessaires à la Commission centrale pour la reconnaissance du statut de réfugié. Une commission mixte composée de fonctionnaires de la Direction générale et du HCR statue sur la demande.

99.La décision de rejet de la demande de reconnaissance du statut de réfugié est notifiée à l’étranger par le truchement de la questura. L’étranger est invité à quitter l’Italie dans les 15 jours qui suivent la notification. S’il ne donne pas suite, il est reconduit à la frontière. Si l’étranger ne peut être renvoyé dans son pays d’origine, où il risque d’être soumis à une discrimination mettant sa vie ou sa liberté personnelle en danger, la questura peut, si elle y est invitée, l’envoyer dans un pays tiers.

100.L’étranger peut cependant, si les conditions sont réunies, obtenir un permis de séjour pour d’autres raisons (par exemple pour regroupement familial et raisons professionnelles en attendant l’émigration). Les requérants déboutés peuvent former un recours devant un tribunal civil dans les 60 jours qui suivent la notification.

101.Les étrangers qui se sont vu accorder le statut de réfugié peuvent le perdre :

–lorsqu’ils demandent la restitution de leur passeport national, qu’ils déclarent ou non renoncer au statut de réfugié;

–lorsque surviennent certaines circonstances, notamment :

a)le réfugié jouit à nouveau et volontairement de la protection du pays dont il est ressortissant; ou

b)ayant perdu sa nationalité, il la recouvre volontairement;

c)il acquiert une nouvelle nationalité et jouit de la protection du pays qui la lui a accordée; ou

d)il regagne volontairement son pays d’origine qu’il avait quitté à cause ou par crainte de persécutions; ou

e)dans le pays d’origine, les raisons qui justifiaient l’octroi du statut de réfugié ont disparu (par exemple suite à un changement de régime).

102.Dans les cas a) à e), la perte du statut de réfugié n’est pas automatique, mais découle d’une décision expresse de la Commission pour la reconnaissance du statut de réfugié. Le statut de réfugié peut aussi se perdre si la Commission le supprime après avoir constaté que l’étranger a fait de fausses déclarations au sujet de son identité et de sa situation personnelle.

103.Les réfugiés qui résident légalement en Italie peuvent en être expulsés uniquement pour des raisons d’ordre public et de sécurité nationale, sur arrêté du Ministre de l’intérieur (article 11.1 de la loi N° 40/1998). L’étranger peut faire appel de cette décision auprès du tribunal administratif régional du Latium (art. 11.11 de la loi N° 40/1998).

104.Le réfugié ne peut, cependant, être expulsé vers un pays où il risque d’être soumis à des persécutions ou envoyé vers un autre pays où il ne serait pas à l’abri de persécutions (art. 17.1 de la loi N° 40/1998).

Projet de loi sur l’asile

105.En ce qui concerne l’introduction d’une législation systématique sur le droit d’asile, le Comité des affaires constitutionnelles de la Chambre des députés est actuellement saisi d’un projet de loi (A.C.5381) modifiant sensiblement la procédure de reconnaissance du statut de réfugié et qui applique l’article 10 de la Constitution italienne.

Problème des organisations criminelles étrangères

106.La position géographique de l’Italie favorise l’immigration et l’installation d’individus de cultures et de pays différents aux prises avec un processus de développement social, politique et économique difficile, laborieux et lent. Malheureusement, certains de ces individus s’adonnent à des activités criminelles. Il est difficile d’enrayer les migrations, avec la criminalité directe ou induite qu’elles entraînent, dont différents types de trafic illicite.

107.Ces types d’activités criminelles posent de sérieux problèmes aux enquêteurs pour les raisons suivantes : ils reposent sur une technique d’intimidation à l’égard des immigrés de la même origine ethnique, associée à des interventions directes depuis l’étranger; il est malaisé et difficile de repérer les immigrés clandestins; il n’est pas rare que les intéressés forment des alliances avec des groupes criminels locaux ou s’y associent; certains pays qui ne sont pas membres de l’UE marquent peu d’empressement à coopérer pour faciliter la synergie nécessaire entre forces de police et organes d’investigation.

108.Dans l’ensemble, la situation en ce qui concerne le comportement criminel des diverses organisations étrangères demeure inchangée. Un certain nombre de « nouvelles mafias », d’origine essentiellement russe et chinoise continuent d’opérer dans notre pays. La mafia russe est particulièrement active dans le secteur des produits et des biens en relation avec l’énergie et dans l’import-export. On a récemment signalé sa présence dans les investissements immobiliers et l’achat de centres commerciaux, le tourisme hôtelier, les petites et moyennes entreprises de prêt-à-porter et de produits blancs. La mafia chinoise, qui, sur le plan de son organisation, tend à reproduire les mêmes caractéristiques que dans la « mère patrie », est très présente dans la criminalité organisée type : trafics de stupéfiants, extorsion, jeux, prostitution, et, surtout, immigration clandestine de compatriotes. Eu égard au danger et à l’ampleur du trafic de migrants clandestins, l’Italie se doit de prêter de plus en plus d’attention à ce phénomène.

109.Une enquête complexe et rigoureusement ciblée, menée en coordination avec les bureaux des procureurs de Trente, Trieste, Rome et Lecce, a abouti à la découverte d’un vaste réseau turco-iranien impliqué dans l’immigration clandestine de Kurdes iraquiens. Il a alors été possible de frapper un grand coup contre une organisation criminelle dont le but est d’exploiter des migrants non communautaires socialement vulnérables en quête d’une nouvelle patrie, et de mettre au jour, en Turquie, un certain nombre d’agences spécialisées dans le recrutement de migrants turcs clandestins et leur transport par mer ou par terre vers l’Europe.

110.Sur ce point, un changement d’attitude positif s’opère dans les pays touchés par l’immigration clandestine : c’est un timide pas en avant qui ne devrait pas créer de fausses illusions, mais qui ouvre en même temps de nouvelles perspectives d’investigations.

111.Á cet égard, les procédés d’identification, qui laissaient souvent à désirer, ne manqueront pas de bénéficier de la mise au point des nouvelles techniques d’identification à l’aide de photos et de la prise d’empreintes. Il y a lieu de relever à ce sujet un projet qui vise à alimenter en éléments d’identification tirés des passeports un réseau informatique international. Ce projet pourrait contribuer à freiner la mise en circulation, par les organisations criminelles impliquées dans l’immigration illégale, de faux passeports ou de passeports volés ou perdus.

112.La législation s’est avérée jusqu’ici largement inefficace pour éradiquer ce phénomène, encore que la faculté d’accorder des permis de séjour pour raisons de protection sociale, qui va dans le sens des efforts déployés pour arracher les victimes des mains des organisations criminelles et permet à leurs titulaires de faire des déclarations et de coopérer ainsi aux enquêtes, fasse pratiquement l’unanimité.

113.Au point où en sont les choses à l’heure actuelle, étant donné la complexité extrême du phénomène à l’examen et le peu de temps écoulé depuis qu’elle est entrée en vigueur, il n’est pas possible de faire des projections ni de procéder à l’évaluation de la loi 189/2002.

114.En conclusion, si l’on compare les données actuelles à celles du rapport précédent (CAT/C/44/Add. 2), on constate que les pouvoirs publics s’efforcent maintenant de maîtriser et de combattre ce type de criminalité plus énergiquement et plus efficacement. La création dans de nombreux bureaux de procureurs de groupes de travail spécialisés, le renforcement de la coopération entre bureaux d’enquête italiens et de la coopération avec les institutions d’autres pays européens sont autant de facteurs qui y ont contribué. Malheureusement, le fait est qu’en Italie les organisations criminelles étrangères demeurent l’une des principales sources de criminalité.

115.Les opérations de grande portée ci-après réalisées pour lutter contre la criminalité, dans le cadre de la coordination d’ensemble d’EUROPOL, méritent d’être signalées :

L’opération « GIRASOLE 2 », une initiative italienne au départ, suscitée par une enquête sur un réseau criminel qui se livrait à la traite de jeunes femmes d’Europe de l’Est à des fins d’exploitation sexuelle en liaison avec des membres d’organisations de type mafieux. Les enquêtes ont permis aux autorités judiciaires italiennes de délivrer 89 mandats d’arrêt exécutés en Italie et dans d’autres pays d’Europe, dont l’Allemagne et l’Ukraine, avec l’aide d’un centre de coordination effectuant le lien entre les différentes unités opérationnelles des différents pays concernés. Ce centre avait été établi dans les locaux d’EUROPOL pour coordonner les actions et en assurer la simultanéité;

L’opération « LEDA » concernant, en particulier, la prostitution des femmes des pays d’Europe de l’Est et d’autres régions. La partie italienne de cette opération concernait les provinces de Turin et de Caserta, où 55 personnes ont été arrêtées et 98 autres mises en examen mais remises en liberté sous caution, 242 immigrants clandestins ayant été reconduits à la frontière et expulsés. L’activité déployée par les bureaux de liaison a revêtu une grande importance dans la lutte contre la criminalité transfrontalière, en particulier ceux d’Albanie, de Grèce et de Roumanie;

L’opération « PUNA », lancée en août 2002 en Albanie, et plus particulièrement dans la région de Valona, mérite d’être notée. Planifiée par le bureau de liaison italien de Tirana, elle a mobilisé toutes les unités navales du service des finances présentes dans les eaux territoriales, ainsi que la totalité de l’effectif du bureau de liaison en Albanie pour les opérations terrestres, et a donné les résultats importants suivants :

–arrestation en flagrant délit de 14 personnes à bord de bateaux chargés d’immigrants;

–saisie de neuf canots pneumatiques de haute mer;

–dénonciation aux autorités judiciaires de 10 personnes en fuite impliquées dans les activités criminelles faisant l’objet de l’opération;

–de trois ateliers;

L’opération « RIO IV », qui s’est achevée en mai 2003 et dont le but était de surveiller l’immigration clandestine par voie maritime et d’en évaluer le risque; elle a impliqué huit États membres de l’UE (Allemagne, Finlande, France, Italie, Pays-Bas, Portugal, Espagne et Royaume-Uni);

L’arrestation au Liban, en avril 2002, de 21 personnes appartenant à une organisation criminelle qui aidait et encourageait l’émigration clandestine, à partir des côtes du sud du Liban, de réfugiés iraquiens et syriens en direction de l’Italie et d’autres pays européens. Le succès de cette enquête a été le fruit d’une collaboration étroite, par le biais d’INTERPOL, entre l’Italie, l’Allemagne et la Libye, sur la base d’indices fournis par l’Italie;

L’opération « PASTÈQUE », lancée au début de 2003 par la questura de Brindisi et encore en cours, dont le but est de démanteler un réseau de criminels à l’échelle européenne impliqué dans l’immigration illégale d’Iraquiens en Europe.

Traite des êtres humains

116.L’Italie a été le premier pays à se doter d’une législation spécifique et systématique relative à la traite des êtres humains.

117.L’article 18 de la loi unifiée sur l’immigration est un exemple particulièrement novateur de ce qui peut être fait pour prévenir et combattre la traite et faciliter, à des fins humanitaires, la réadaptation complète des victimes. Il prévoit la délivrance de permis de séjour spéciaux, pour raisons de protection sociale, d’une durée de six mois (renouvelables) aux personnes qui cherchent à échapper à l’exploitation et au traitement dont elles sont victimes de la part des organisations criminelles opérant dans ce secteur. Il prévoit également la mise en place de mesures permettant aux victimes de bénéficier – pendant la période de validité du permis en question – de programmes spéciaux d’assistance et d’intégration.

118.Afin de fournir les ressources financières nécessaires à l’établissement, au niveau local, des services chargés de la mise en œuvre de ces programmes d’assistance, le décret N° 286/1998 porte création d’un fonds spécial géré par le Département de l’égalité des chances (qui relève du Cabinet du Premier Ministre).

119.L’action novatrice lancée en 1998 par le Gouvernement italien contre la traite des êtres humains aux fins d’exploitation a bénéficié récemment d’un nouvel élan grâce à l’adoption de la loi N° 228 du 11 août 2003 qui complète et renforce les dispositions de l’article 18 de la loi unifiée sur l’immigration.

120.Cette nouvelle loi, qui met en application les recommandations contenues dans le Protocole des Nations Unies visant à prévenir, réprimer et punir le trafic de personnes, en particulier des femmes et des enfants, signé à la Conférence de Palerme le 10 décembre 2000, comporte une description plus spécifique et plus précise du crime consistant à réduire une personne à un état d’esclavage ou de servitude ou à l’y maintenir et à se livrer à la traite des êtres humains. Plus spécifiquement, la loi N° 228 propose une nouvelle formulation de l’article 601 du Code pénal en définissant d’une manière plus précise l’infraction de « traite de personnes », en alourdissant en même temps la peine minimale qui passe de cinq à huit ans d’emprisonnement et en prévoyant, avec un programme d’aide spéciale aux victimes des crimes visés par les articles 600 et 601 du Code pénal (le fait de réduire une personne à un état d’esclavage ou de servitude et de se livrer à la traite d’êtres humains), des actions préventives spécifiques pouvant être financées par un fonds spécial destiné aux mesures de lutte contre la traite.

121.Si l’on considère la dimension transnationale du phénomène et l’importance que revêt la coopération internationale pour accroître l’efficacité des actions préventives, l’article 14 de la loi engage le Département de l’égalité des chances et le Ministère des affaires étrangères à promouvoir des réunions et des campagnes d’information, y compris dans les pays d’origine des victimes de ce trafic. Á la lumière des objectifs ainsi fixés, cette disposition prévoit également que le Département de l’égalité des chances organise, avec le Ministère de la justice et celui de l’emploi et des politiques sociales, des stages de formation à l’intention du personnel qui participe à la lutte contre la traite d’êtres humains. Ces initiatives seront intégrées au programme dudit Ministère pour les trois années à venir.

122.Afin de mettre en œuvre des mesures visant non seulement à apporter un soutien réel à la répression de cette activité criminelle, mais également à mener des actions préventives et à apporter une aide aux victimes de la traite, le Ministère de l’intérieur – qui, dès 1995, a conçu et promu l’article 18 en songeant aux initiatives à prendre pour motiver, encourager et protéger les personnes qui s’efforcent de s’évader du cycle infernal de la prostitution « forcée » et de l’esclavage – a lancé un certain nombre de projets novateurs ces dernières années.

123.Ces projets visent, d’abord, à faciliter le retour volontaire dans leur pays d’origine des victimes de la traite qui, en se libérant de l’état d’exploitation auquel elles avaient été réduites, collaborent avec la police pour aider à identifier et à capturer ceux qui les exploitaient. Leur deuxième objectif est de contribuer – en coopération avec les autorités des pays d’origine et, plus particulièrement, dans le but de fournir des renseignements précis et ciblés permettant de prévenir les risques inhérents à l’immigration clandestine – à la mise en place, dans ces pays, des conditions nécessaires à la protection des victimes potentielles. Les dispositions législatives conçues pour apporter une protection et une aide sociales aux victimes de la traite de personnes revêtent donc une importance particulière. Pour leur permettre d’échapper à la situation d’exploitation dans laquelle elles se trouvent, il est vital de leur apporter d’autres formes de soutien, d’information et de conseils.

124.Á cette fin, la loi N° 228/2003 a porté création, au sein du Cabinet du Premier Ministre, d’un fonds destiné aux mesures de lutte contre la traite des êtres humains. Ce fonds est alimenté par des sommes allouées en vertu de l’article 18 de la loi unifiée sur l’immigration ainsi que par le produit des saisies ordonnées dans le prononcé de la condamnation ou lors de l’application de la peine à la demande des parties et sert à financer les programmes d’insertion sociale et d’aide aux victimes de la traite, ainsi que les autres mesures de protection prévues par l’article 18.

125.Une commission interministérielle créée en 1999 au Département de l’égalité des chances a été chargée d’affecter, contrôler et programmer les ressources qui ont maintenant convergé vers ce nouveau fonds destiné à la mise en œuvre des projets. Par arrêté en date du 23 décembre 1999, le Ministre de l’égalité des chances a identifié deux types de programmes pouvant être financés :

des programmes de protection sociale instaurant des filières d’assistance et de protection pour les victimes de traite;

des dispositifs conçus pour soutenir les programmes de protection par le biais d’initiatives de sensibilisation, d’enquêtes et de recherches sur la progression de ce phénomène, d’activités de formation à l’intention du personnel, d’activités d’assistance technique et de suivi des projets.

126.Le projet coordonné par le Ministère de la justice pour effectuer le suivi au niveau national des activités menées par le Bureau du Procureur général et des résultats obtenus au terme des enquêtes effectuées fait partie des divers dispositifs qui ont déjà été dotés de fonds par le Département de l’égalité des chances

Projet de rapatriement assisté

127.Le projet national d’aide au rapatriement volontaire assisté et à la réinsertion dans le pays d’origine des victimes de la traite des êtres humains est entré dans sa deuxième année. La première année de financement, qui s’est terminée en septembre 2002, a permis de procéder au rapatriement assisté de 80 victimes. La deuxième année de financement, qui a débuté en avril dernier, s’achèvera en avril 2004. Elle permettra le rapatriement de 80 autres victimes selon les mêmes critères que pour le premier groupe.

128.Le projet se poursuit moyennant un financement prévu par l’article 18 de la loi unifiée sur l’immigration (décret législatif N° 286/1988) et les règlements d’application qui ont suivi (art. 25 du décret présidentiel N° 394 du 31 août 1999). Ces crédits ont été ouverts par la commission interministérielle pour la mise en œuvre de l’article 18 créée au sein du Département de l’égalité des chances du cabinet du Premier Ministre.

129.Cette initiative est menée en coopération avec l’OIM (l’Organisation internationale pour les migrations) et ses 70 centres de liaison établis dans les pays les plus touchés par la traite des êtres humains. La procédure de prise en charge des victimes et d’aide au rapatriement est la suivante :

–L’OIM reçoit des services qui opèrent sur place (questura, police, services publics locaux, associations à but non lucratif) notification du nom des victimes qui ont opté pour un retour volontaire et assisté dans leur pays d’origine. Après s’être assuré que les conditions du retour sont réunies, elle soumet une « proposition de programme de rapatriement » au chef de projet au Ministère de l’intérieur et demande l’autorisation;

–Une fois l’autorisation accordée, l’OIM engage la procédure de rapatriement, qui consiste à organiser le voyage de retour, préparer les papiers nécessaires, payer les frais de voyage, fournir une aide aux aéroports de départ et d’arrivée et, si nécessaire, accompagner les victimes jusqu’à leur destination finale, ainsi qu’à leur verser une somme de 561 euros à titre d’« allocation initiale de réinstallation »;

–Lorsque les rapatriés arrivent dans leur pays d’origine commence le processus d’insertion sociale, professionnelle et familiale. Si la réinsertion familiale s’avère impossible, l’OIM cherche et organise d’autres formes d’assistance. Elle verse aux victimes deux allocations pour l’emploi de 516 euros chacune en deux versements effectués à plusieurs mois d’intervalle pour leur permettre de suivre des stages de formation professionnelle ou d’accéder au marché de l’emploi ou à une activité indépendante.

130.Les victimes bénéficient d’une assistance dans leur pays d’origine à des fins de réinsertion pendant une période d’au moins six mois.

131.Par l’intermédiaire de son centre de liaison local, l’OIM présente au Ministère de l’intérieur un rapport de situation sur le processus de réinsertion sociale, professionnelle et familiale, dont le but est de démontrer que la victime a échappé à des organisations criminelles impliquées dans la traite des êtres humains. Il s’agit là d’une condition préalable à l’octroi des deux allocations pour l’emploi.

132.Pour bénéficier du programme, les victimes doivent aussi répondre à une autre condition préalable, à savoir coopérer avec la police et les autorités judiciaires pour lutter contre les individus qui se livrent à la traite et à l’exploitation des êtres humains en déposant officiellement plainte ou en fournissant des informations sur ce qui s’est passé et sur les trafiquants/exploitants.

133.Une fois que le projet sera parvenu à son terme, une conférence nationale donnera l’occasion de présenter les résultats obtenus grâce à cette initiative.

134.Il est une autre initiative qui s’est révélée utile pour mettre les victimes de ce terrible « marché » en contact plus étroit avec les institutions, à savoir un service d’appel téléphonique gratuit – qui restera actif pendant les trois années à venir – composé d’un centre national et de 14 centres locaux. Avec les projets de protection sociale, ces centres, répartis dans différentes grandes zones régionales et interrégionales, constituent un réseau de services coordonnés unique pour agir au niveau local.

135.Les divers projets de protection sociale qui sont actuellement en place constituent un réseau efficace pour mener des actions et donnent aux victimes de la traite des possibilités réelles de recouvrer leur liberté et de s’intégrer à la société italienne. Les services en question sont divers mais forment un ensemble cohérent : unités mobiles; bureaux d’information et de conseil en matières sanitaire, juridique, sociale et psychologique; et tout un ensemble de services d’accueil.

136.Il convient de souligner ici que la victime étrangère n’est pas obligée de coopérer avec les enquêteurs ou de porter officiellement plainte pour obtenir un permis de séjour et bénéficier du programme qui en dépend; le fait qu’elle tente d’échapper au pouvoir de l’organisation criminelle est estimé suffisant, en soi, pour l’y autoriser.

137.Le choix fait par le législateur à cet égard ne fait pas que permettre aux victimes de bénéficier d’une protection réelle et complète, mais contribue également à la lutte contre le crime organisé, car on considère que les individus en cours de réinsertion sociale peuvent constituer un ensemble de sources de renseignements utile pour les enquêtes.

138.Pour ce qui est de ses propres activités à part entière, le Département de l’égalité des chances a l’intention de poursuivre dans la même voie en promouvant d’autres initiatives telles que :

un suivi plus rigoureux des programmes et des dispositifs déjà en cours;

la création de possibilités systématiques de dialogue avec les autorités judiciaires et les forces de police en Italie et à l’étranger;

l’examen des possibilités de combiner les sources de financement nationales et européennes;

le renforcement de la coopération avec les pays d’origine, non pas simplement pour promouvoir des campagnes d’information sur les risques liés à une immigration non contrôlée, mais aussi pour faciliter des initiatives de développement local propre à agir sur les causes de ce type d’activité criminelle.

Projet pour la prévention de la traite des êtres humains

139.Le Projet pour la prévention de la traite des êtres humains est financé conformément à la loi N° 212 du 26 février 1992 qui encourage « la coopération avec les pays d’Europe centrale et orientale »; des crédits d’un montant de 206 582 euros ont été dégagés à cet effet.

140.Actuellement, quatre pays d’Europe centrale et orientale particulièrement touchés par la traite des êtres humains à des fins d’exploitation participent à la mise en œuvre de ce projet : ce sont l’Albanie, la Roumanie, la République de Moldova et l’Ukraine.

141.Trois organisations du secteur social privé qui travaillent dans le domaine spécifique de l’immigration collaborent à la mise en œuvre du projet, à savoir l’Organisation internationale pour les migrations pour la mise en œuvre du projet en Albanie et en Roumanie, l’organisation italienne Caritas pour l’Ukraine et la Fondation Regina Pacis pour la République de Moldova. Le projet prévoit les activités suivantes :

–l’organisation de rencontres avec les responsables et le personnel des missions diplomatiques dans les pays concernés, de l’administration publique et des institutions locales et des ONG qui luttent contre la traite des êtres humains et protègent les victimes. Le but de ces rencontres est d’expliquer le projet et ses objectifs et de solliciter la coopération des intéressés pour recenser les mesures les mieux appropriées à mettre en œuvre afin de porter assistance aux victimes et d’encourager leur insertion sociale. Ces rencontres sont aussi censées les informer des mesures de protection et d’insertion sociale en faveur des victimes prévues en Italie et dans les pays d’origine et appeler l’attention de la population locale sur les problèmes relatifs à la traite des êtres humains dans un but de prévention;

–l’organisation de conférences, de séminaires et de campagnes d’information locales visant à prévenir la traite des êtres humains;

–la production et la diffusion de matériel d’information, par exemple d’une vidéo montrant des victimes qui racontent directement leur expérience; cette vidéo peut servir d’instrument pédagogique et d’information pour les émissions de la radio et de la télévision locales dont on pense qu’elles pourraient contribuer utilement à la campagne d’information et de sensibilisation.

142.Une fois le projet terminé, une conférence de clôture sera organisée pour présenter les résultats obtenus dans chacun des quatre pays ayant participé au programme pilote.

C. Situation dans les prisons

1. Formation des membres des forces de police

143.La formation des membres des forces de police (Polizia, Carabinieri) est l’un des objectifs prioritaires des mesures appropriées mises en œuvre pour prévenir les actions qui peuvent être considérées comme relevant de la torture ou du traitement inhumain ou dégradant des prisonniers, en particulier étrangers.

Forces de police

144.Le Département de la sécurité publique est, depuis quelque temps, particulièrement attentif aux problèmes liés au racisme et à l’intolérance à caractère xénophobe. Depuis le milieu des années 1990, ces questions sont abordées directement au cours des stages de formation des fonctionnaires de police de chaque secteur de ce service, et en particulier en ce qui concerne la protection et la promotion des droits de l’homme, l’accent étant mis constamment sur les bonnes méthodes de travail qu’il convient d’adopter dans une société de plus en plus multiculturelle, tout en respectant la dignité de l’individu, qu’il soit citoyen italien, étranger ou membre d’une minorité ethnique ou religieuse.

145.Á cette fin, des stages et des séminaires de recyclage ont été organisés à l’intention du personnel d’encadrement investi de responsabilités de formation dans les instituts pédagogique du département. Ce groupe de formateurs a donc suivi des stages de spécialisation en matière de problèmes liés au multiculturalisme organisés en vue d’améliorer l’action des forces de police dans ce milieu social nouveau et plus divers conformément aux principes et aux valeurs dictés par le respect de l’individu, quelles que soient son origine et sa « différence » à caractère social et culturel.

146.Plus particulièrement, on a prévu du temps, au cours des stages destinés au personnel d’encadrement et de direction travaillant dans les services opérationnels pour traiter des droits de l’homme ainsi que de la prévention et de la gestion des situations de discrimination raciale. Des représentants d’autres forces de police européennes (britanniques, autrichiennes et allemandes) ont également suivi ces stages. Dans le cadre de ces dernières initiatives de formation, le Département de la sécurité publique a collaboré avec la COSPE (coopération pour le développement des pays émergeants), une ONG qui a toujours été active dans la lutte contre la discrimination « raciale, ethnique et religieuse » et participe à un projet transnational organisé avec l’aide de l’Union européenne, dont le but est d’améliorer les activités de la police et de les adapter à la société italienne qui devient rapidement de plus en plus multiculturelle et multiethnique.

147.Cette initiative est à considérer dans le cadre d’un effort plus large de sensibilisation visant le personnel de police que le Département de la sécurité publique a encouragé par le biais de séminaires et de conférences à l’occasion du cinquantième anniversaire de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

148.C’est dans ce contexte que, à l’initiative du chef de la police et du président de la COSPE, il a été décidé de promouvoir la traduction et la diffusion de la Charte de Rotterdam, dont le grand mérite est de présenter à la fois les principes généraux et les lignes d’action concrète pouvant être adaptées à chaque pays en matière de partenariat entre la police, les ONG et les organes d’administration locale.

149.Ce projet, baptisé « Ouvrir la voie à l’article 13 du Traité d’Amsterdam », consiste en une série de stages spécifiques sur le racisme à l’intention du personnel qui travaille dans les services opérationnels et les instituts pédagogiques. Les problèmes en question ne sont jamais perdus de vue au cours des programmes de recyclage mis en œuvre sur le lieu de travail. On peut signaler plus particulièrement ceci:

–en 2001, a été introduit le sujet « droits de l’homme et multiculturalisme »;

–en 2002, a été incluse une analyse de la « Charte des droits fondamentaux » de l’Union européenne centrée plus spécialement sur l’activité policière.

150.La question de la déontologie des fonctionnaires de police a également fait partie des sujets traités en 2003. Dans le cadre de la mise en œuvre des directives et des initiatives concernant l’adaptation des compétences du personnel de police aux besoins du service en matières culturelle et opérationnelle, l’acquisition de nouvelles compétences linguistiques et l’amélioration des compétences existantes ont fait partie des principaux objectifs.

151.Différentes approches ont été mobilisées à cet égard. D’abord, les cours de français et d’allemand ont été poursuivis pour les fonctionnaires qui travaillent dans des régions officiellement bilingues. Ensuite, tous les programmes de formation de base, par exemple pour les stages donnant la possibilité d’entrer dans la carrière ou d’y faire son chemin, comportent l’enseignement de l’anglais à deux niveaux, selon le niveau initial de compétence de l’intéressé, les critères d’évaluation utilisés étant reconnus au plan européen. L’enseignement de l’anglais est également prévu pour tous les stages assez longs pour que ce soit à la fois faisable et approprié. Au niveau local, la questura, en particulier dans les localités qui présentent le plus grand intérêt en matière de patrimoine culturel et de tourisme, a mis en place des stages de langue dans des laboratoires de langue locaux à destination des personnels qui ont déjà des connaissances de base ou un bon niveau.

152.Pour la formation linguistique du personnel, le Département de la sécurité publique utilise le Centre de formation linguistique de la police situé à Milan, qui organise des stages avec résidence sur place. Il convient de signaler en particulier les stages de chinois et d’arabe. En arabe, trois stages pour débutants ont été mis sur pied à titre expérimental à partir de mars 2001, dont le but est de faciliter les relations et la communication avec les communautés ethniques arabophones. Un accord a été conclu avec l’Université Bourghiba de Tunis à cette fin. En tout, 45 fonctionnaires de police travaillant dans 24 des provinces les plus touchées par les flux migratoires ont reçu un diplôme pour leur compétence en arabe.

153.En raison de la menace que fait planer le terrorisme international d’inspiration islamique depuis les événements tragiques du 11 septembre 2001, les objectifs de la formation linguistique ont été redéfinis et les méthodes réadaptées, en partie en fonction des besoins qui sont apparus dans le cadre des activités de renseignement et d’investigation. De nouveaux stages de formation en culture et en langue arabe ont été mis au point de manière à proposer une série croissante de niveaux de compétence en arabe moderne unifié.

154.Le programme d’enseignement actuel comporte environ six mois de formation intensive à chaque niveau, avec des variantes, selon qu’il s’agit de jeunes élèves ayant une expérience limitée du service actif ou de fonctionnaires expérimentés ayant acquis des compétences techniques très importantes. La sélection des participants, tous volontaires, se fait en fonction de l’âge, du niveau d’instruction générale et de l’aptitude à l’étude de la langue en question.

155.Le Centre de formation linguistique organise aussi des cours d’italien à l’intention des fonctionnaires de police d’autres pays européens. Les 2 et 3 décembre 2002, par exemple, un stage de courte durée a été mis sur pied pour des fonctionnaires de police français et, toujours dans le cadre de la coopération internationale, un certain nombre de fonctionnaires de la Police de l’État sont allés suivre des stages de langue dans des écoles de police étrangères.

Les carabiniers

156.Eu égard aux activités spécifiques qu’ils sont appelés à exercer, les carabiniers ont toujours accordé une place très importante à l’étude des droits de l’homme et du droit humanitaire dans les programmes suivis au sein de tous leurs instituts pédagogiques.

157.Dans l’exercice de leurs fonctions, les carabiniers sont tenus d’opérer tous les jours en contact étroit avec les citoyens et, dans certains cas, de prendre des décisions qui les affectent tant au plan juridique qu’au plan personnel, ce qui veut dire qu’ils doivent absolument connaître à fond tout ce qui touche aux droits de l’homme. L’introduction récente de l’étude de la victimologie dans les instituts pédagogiques est une autre preuve de l’attention prioritaire dont bénéficient les citoyens. Cela entraîne une nouvelle conception du crime, qui n’envisage plus le seul point de vue du délinquant mais tient également compte des besoins de la victime.

158.Pour faire en sorte que les fonctionnaires de police aient une meilleure connaissance des questions qui nous occupent, des filières très spécifiques de formation et de spécialisation ont été mises au point pour l’ensemble du personnel, en interaction avec les universités.

159.Les carabiniers étudient également les droits de l’homme de manière plus approfondie, en rapport avec les diverses missions de maintien de la paix auxquelles ils participent de manière indépendante ou conjointement avec les autres forces armées. Á cet égard, l’institut pédagogique encourage l’étude du droit humanitaire international en organisant des cours spéciaux en coopération avec d’autres organismes, et reconnaît les cours organisés par la Croix Rouge italienne qui sont suivis à titre privé par beaucoup de membres des forces de police.

Activités de formation générale

1. Scuola Ufficiali dei Carabinieri

160.L’Institut d’études professionnelles et judiciaires appliquées au droit militaire a été créé le 1er septembre 2000 à la Scuola Ufficiali (l’école des officiers), les droits de l’homme y faisant partie du cours sur le droit militaire international. L’enseignement vise à donner aux élèves une connaissance approfondie des dispositions du droit international et du droit italien applicables aux situations de conflits armés, de manière à ce qu’ils puissent reconnaître à coup sûr, dans la pratique, un comportement légal et un comportement illégal, et être en mesure de remplir leurs fonctions de police militaire et de police judiciaire militaire.

161.Les programmes comportent également l’étude de la Déclaration universelle des droits de l’homme et des principales conventions et accords qui régissent les droits de l’homme, en accordant une attention particulière aux pactes des Nations Unies, à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, à la Convention internationale pour la prévention et la répression du crime de génocide et à la Convention européenne sur l’imprescriptibilité des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre.

2. Scuola allievi Marescialli e Carabinieri effettivi

162.L’étude des droits de l’homme est aussi un élément essentiel de la formation dispensée à la Scuola allievi marescialli e carabinieri effetivi (l’institut de formation des élèves sous-officiers et des carabiniers). Cette matière est enseignée par des intervenants qualifiés, civils et officiers des forces de police, et comprend le programme suivant :

–évolution des droits de l’homme : aspects historiques et sources culturelles;

–racisme et fondamentalisme, deux des principaux dangers qui menacent « la vie, la sécurité et la liberté »;

–perspectives juridiques, de fond et procédurales : la Cour européenne des droits de l’homme de Strasbourg et la Cour criminelle internationale;

–la législation de l’UE régissant la lutte internationale contre le terrorisme en tenant dûment compte des droits de l’homme (les fonctions du Ministère des affaires étrangères);

–le nouvel ordre mondial : anciennes et nouvelles urgences. Conflits et missions de maintien de la paix : sauvegarder la dignité de ceux qui souffrent.

3. Scuola allievi Carabinieri ausiliari

163.Le programme de formation des carabinieri ausiliari (carabiniers auxiliaires faisant leur service militaire) s’est révélée être un excellent moyen de faire comprendre les principes fondamentaux qui constituent la base des droits de l’homme, entraînant des effets appelés à se prolonger après l’achèvement de la période de service militaire et des retombées qui se feront sentir à tous les niveaux de la société italienne.

164.Cette matière est enseignée par des officiers qualifiés faisant fonction d’autorités en la matière et présents dans chaque école, dans le cadre d’une version similaire simplifiée du programme utilisé pour les carabiniers professionnels.

Activité de formation spécialisée

1. Istituto Superiore Stato Maggiore Interforze

165.Á l’Istituto Superiore Maggiore Interforze (Institut interforces du personnel), qui est fréquenté par des officiers supérieurs, un stage interforces a été institué à l’intention des « conseillers juridiques des force armées pour l’application du droit humanitaire dans les conflits armés ». Le programme de formation dure deux semaines et revêt la forme d’une série de cours et de conférences donnés par des enseignants universitaires et des officiers ayant des compétences dans ce secteur, sur des questions relatives aux droits de l’homme et au droit humanitaire. Ce stage donne aux participants les aptitudes nécessaires pour assurer les fonctions de conseillers juridiques auprès des chefs militaires en opération à l’étranger.

2. Istituto Internazionale di Diritto Umanitario di Sanremo

166.Un certain nombre d’officiers participent chaque année à un stage sur le droit humanitaire à l’Istituto Internazionale di Diritto Umanitario di Sanremo (Institut international de droit humanitaire de Sanremo). Les sujets traités concernent l’application du droit humanitaire ou du droit de la guerre en rapport avec l’organisation et l’utilisation des forces, y compris pour ce qui est de l’engagement du personnel dans des missions à l’étranger.

3. Ispettorato superiore del corpo militare della cri (Inspection supérieure du corps militaire de la Croix Rouge italienne)

167.La Croix Rouge italienne a la responsabilité légale de la diffusion des dispositions du droit humanitaire international au sein des forces armées et des institutions et organismes publics concernés. Dans le cas des forces armées, elle exerce cette activité :

–au niveau central, dans les instituts pédagogiques, au moyen de stages pour le personnel sur l’application du droit humanitaire international dans les conflits armés, conformément à la loi N° 762 du 11 décembre 1985.

–au niveau local, dans les principaux quartiers généraux de commandement local, au moyen de courts séminaires d’introduction au droit humanitaire international dans les conflits armés.

4. Scuola Superiore Sant’Anna di Pisa

168.Le commandement général des carabiniers a conclu un accord avec la Scuola Superiore Sant’Anna di Pisa en vue de renforcer et de rendre plus efficace leur coopération mutuelle pour la formation du personnel affecté à divers types de missions internationales (opérations de maintien de la paix, consolidation de la paix, surveillance des droits de l’homme, aide humanitaire, surveillance électorale).

169.Aux termes de cet accord, prévu pour une durée de deux ans renouvelable, d’autres membres de la force peuvent demander à participer à ces stages par la voie habituelle ouverte à tous ceux qui sont susceptibles d’être intéressés (les conditions fondamentales sont : savoir l’anglais et avoir une expérience précise des missions internationales).

5. Personnel affecté à des missions de maintien de la paix

170.En plus de la formation de base sur le droit humanitaire dans les instituts de formation ou de la participation à l’un des stages susmentionnés, qui donnent la possibilité d’obtenir des qualifications particulières permettant d’être sélectionné, l’ensemble du personnel militaire choisi pour être affecté à des missions à l’étranger suit un stage spécifique d’une semaine qui couvre :

–l’étude de l’ordre de mission;

–la situation sur le lieu de la mission et les origines du conflit;

–le droit humanitaire international;

171.Ce stage, qui est conçu pour faire comprendre les principaux éléments du droit international, se caractérise par une approche éminemment pratique et vise à passer en revue :

–les procédures à suivre pour appliquer les conventions qui ont été violées;

–les règles de conduite que doivent respecter les forces armées engagées dans des opérations internationales;

–les principales publications sur ce sujet, y compris le Manuale di Diritto Umanitario,publié par lepersonnel de la défense.

Activités d’information

172.Un certain nombre de publications de l’Institut traitent de la protection des droits de l’homme et du respect de l’individu. Un chapitre entier du Regolamento Generale dell’Arma, qui constitue le règlement de base des carabiniers, est consacré aux règles de conduite qu’ils doivent respecter et, en particulier, au sang froid qu’ils doivent manifester dans l’exercice de leurs fonctions.

173.Les directives publiées périodiquement par le commandement général, qu’elles concernent particulièrement cet aspect des choses ou, plus généralement, « l’éthique et le professionnalisme », contribuent largement à faire en sorte que le personnel demeure informé des dernières mises au point dans ce secteur. Pour compléter cette vue d’ensemble, il convient de remarquer la grande diversité des actions d’information dont rendent compte les publications destinées aux carabiniers (La Rassegna et Il Carabiniere), qui comportent de nombreux articles sur ce sujet. Parmi ces actions on note la distribution, dans les instituts de formation et les services locaux, des documents suivants :

–la Déclaration universelle des droits de l’homme;

–la Convention européenne relative aux droits de l’homme;

–le Système européen de protection des droits de l’homme dans le cadre des activités de maintien de l’ordre.

Police financière

174.Á l’heure actuelle, la formation concernant les droits de l’homme se fait sous forme de stages organisés dans les départements de la formation du Service des finances. En outre, dans le cadre des activités de formation professionnelle, de formation à la gestion et à la surveillance effectuées par les chefs de postes de commandements subalternes, l’attention du personnel est constamment attirée sur l’importance que revêt le respect absolu et inconditionnel des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans l’accomplissement de ses tâches et de ses devoirs.

175.Le commandement général de la police financière a adressé aux départements subalternes des recommandations établies par le Comité rappelant l’impératif de respecter les directives actuellement en vigueur et visant à faire en sorte que les personnes faisant l’objet de mesures qui restreignent leur liberté individuelle ou les en privent soient assurées d’être respectées. Ce rappel soulignait la nécessité :

–d’indiquer clairement au personnel qu’il est interdit de maltraiter les prisonniers, sous peine de sanctions sévères;

–d’éviter, au moment de l’arrestation, tout recours injustifié et/ou disproportionné à la force.

176.Les commandements de la police financière ont tous donné l’assurance que ces dispositions sont respectées.

2. Formation du personnel médical

177.La loi N° 419, qui a été promulguée le 30 novembre 1998, concerne la réorganisation du Système national de santé, et, dans son article 5, prévoit la réforme du service sanitaire des prisons. Le transfert des compétences auprès du Ministère de la santé répond à une fin bien précise : garantir l’application du principe selon lequel les soins de santé doivent être les mêmes dans les prisons qu’à l’extérieur. La vérification de la qualité de l’assistance sanitaire dans les prisons sera assurée à deux niveaux : au niveau local, par des services opérationnels de contrôle de l’assistance sanitaire dans les Services sanitaires locaux; et au niveau régional, par l’Unité opérationnelle pénitentiaire de la santé, qui va être créée dans toutes les inspections régionales et aura compétence pour vérifier que les détenus ne font pas l’objet d’une discrimination en matière d’assistance sanitaire par rapport à l’ensemble de la population.

178.Cette approche a également été discutée récemment lors d’une table ronde à laquelle ont participé les Ministres de la justice et de la santé, ainsi que des représentants des pouvoirs régionaux et locaux. Ces discussions avaient pour but d’examiner un nombre important d’aspects des soins médicaux dans les prisons (formation des agents pénitentiaires ainsi que du personnel et des bénévoles des collectivités locales; directives concernant la médiation pénale en prison pour les enfants et les adultes; examen des instruments législatifs actuellement en vigueur dans ce domaine et renouvellement du protocole d’entente entre le Ministère de la justice et les pouvoirs régionaux).

179.Pour ce qui est de la déclaration selon laquelle la médecine pénitentiaire ne participera pas à la prise de décisions concernant les sanctions disciplinaires à l’encontre des détenus afin de préserver les relations entre médecin et patient, il convient de remarquer quelle est contraire à l’article 39 du régime disciplinaire en vigueur, qui dispose que le médecin fait partie du Conseil de discipline (l’organe chargé d’imposer les sanctions disciplinaires les plus lourdes).

180.Le gouvernement a édicté les mesures les plus importantes pour mettre en œuvre la réforme prévue par le décret législatif N° 230/1990, en particulier :

–Le décret du Président de la République du 20 avril 2000 – Progetto obiettivo tutela della salute in ambito penitenziaro » (projet cible pour la défense de la santé dans les établissements pénitentiaires), qui établit les directives et les priorités à respecter lors de la réorganisation du système de santé dans les prisons, les objectifs à atteindre et les services à dispenser, et comporte l’ébauche d’un nouveau modèle d’organisation pour la médecine pénitentiaire; ce projet publié, avec ses objectifs, dans le Bulletin officiel du 25 mai 2000, met en évidence les domaines d’action prioritaires : prévention, assistance sanitaire de médecins généralistes, urgences, maladies psychiatriques, toxicomanie, problèmes des détenus immigrants, maladies infectieuses, assistance aux enfants, activités de rééducation et de réinsertion. La structure départementale a été définie comme étant le modèle qui convient le mieux pour atteindre les objectifs fixés en termes d’efficacité et d’économie;

–Le décret ministériel du 20 avril 2000, qui définit les trois régions suivantes – Toscane, Latium et Pouilles – où s’effectue la gestion expérimentale prévue dans le cadre du décret législatif susmentionné et qui prévoit que les soins de santé pénitentiaires relèvent désormais de la responsabilité de l’administration régionale.

181.Conformément à la législation susmentionnée et sans décret de transfert des ressources et du personnel, le Ministère de la justice, en coopération avec le Ministère de la santé, a diffusé la circulaire N° 578455/14 du 21 janvier 2000 qui ne prévoit que le transfert des fonctions de prévention, de diagnostic et d’application des thérapies de dépendance du Département de l’administration pénitentiaire (DAP) aux services sanitaires locaux (il s’agit, en d’autres termes, d’une mutation fonctionnelle de personnel du service de toxicomanie au Ser. T. (services locaux pour les toxicomanes), le DAP ayant conservé ses compétences en matière financière.

182.La circulaire N° 3510/5960 permet déjà depuis le 1er janvier 2000 au DAP de donner des instructions pour la mise en pratique de ce transfert au Service national de santé tant des fonctions sanitaires de prévention et d’assistance exercées par l’administration pénitentiaire auprès des détenus et des détenus toxicomanes, que du système d’autorisation et d’accès aux prisons pour le personnel du Service national de santé.

183.La circulaire N° 591263/14 du 14 juillet 2000 a expliqué à tous les « Provveditorati » (Directions régionales de l’administration pénitentiaire) que le transfert d’autres fonctions sanitaires ne dépendra que des résultats des expériences effectuées dans les trois régions concernées, qui s’achèveront le 20 juillet 2002. En outre, les « Provveditorati » ont été invitées à faire état de tous les problèmes ayant donné lieu à vérification au cours des six premiers mois d’application du décret législatif N° 230/1999, en particulier en ce qui concerne l’assistance aux détenus toxicomanes et la prévention.

184.Il faut dire que de nombreux directeurs de prison ont été très sceptiques quant aux résultats obtenus par les Ser. T. en termes d’efficacité et d’économie. En fait, dans de nombreux cas, rien n’a changé dans l’activité des Ser. T. interrompue en fin de premier semestre. D’une manière générale, les Services sanitaires locaux n’ont pas accru leur personnel et ils emploient celui qui travaillait dans le Service de toxicomanie : médecins, psychologues et infirmières.

185.L’utilisation de la méthadone est très critiquée : en fait, le personnel des Ser. T. est le seul à être autorisé à administrer cette substance, mais il n’est pas présent dans les prisons tous les jours, surtout pendant les vacances et en cas d’absence justifiée; il ne peut donc assurer une continuité thérapeutique que grâce à la coopération des médecins du Service de toxicomanie et du Service de coordination de l’assistance sanitaire, qui n’est pas autorisé à utiliser de la méthadone, sauf en cas d’urgence.

186.Toutes les régions concernées par l’expérience ont choisi d’effectuer une étude préliminaire sur les aspects essentiels du transfert des compétences médicales de cette administration au Service national de santé.

187.L’une des premières vérifications effectuées a concerné l’application de la législation concernant l’exonération des soins de santé pour les détenus, qui ne pose aucun problème. Au contraire, la vérification concernant les personnes et les moyens a été plus complexes : elle est préalable au transfert de ces ressources du Ministère de la justice aux régions.

188.La circulaire N° 3516/5966 du 16 mars 2000 adressée aux directeurs de prison a expressément prévu que les indications relatives à l’application de la circulaire N° 3476/5926 du 2 juin 1998 doivent être suivies d’effets même si le contrôle du médecin porte sur des lésions lorsqu’il va voir le détenu dans la prison. Afin d’éliminer toute possibilité d’erreur dans le « Registre des visites, des observations et des propositions des médecins – modèle 99 », ce qui représente un réel problème souligné par le Comité, en dépit de certains cas et de certaines indications appliquées jusqu’à présent, le DAP a fait remarquer aux directeurs de prison qu’il est nécessaire de vérifier que les médecins qui travaillent dans la même structure respectent rigoureusement et sans exception les dispositions relatives au bon établissement du « Modèle 99 » décrites dans la circulaire N° 3476/5926 du 2 juin 1998.

189.Cette circulaire rappelle surtout que, toutes les fois que le médecin va voir un détenu pour la première fois et procède à un constat concernant des lésions, il doit faire figurer dans le registre, non seulement ce qui ressort de sa visite, mais également les déclarations du détenu sur les violences en question et sur les auteurs de ces violences – réelles ou supposées – et juger (en indiquant son opinion dans les cases réservées à cet effet) de la compatibilité ou de l’incompatibilité entre ces lésions et les causes qui en ont été déclarées par le détenu. Il convient de signaler, en l’occurrence, qu’il est fait la même obligation au médecin lorsqu’il procède à un examen de lésions sur la personne d’un détenu lors d’une visite ultérieure.

190.Les directeurs des prisons de Bologne et de Naples/Poggioreale ont reçu des indications précises sur la manière dont les médecins doivent utiliser et rédiger leurs rapports dans ce registre. La législation en vigueur et la circulaire N° 3476/5926 du 2 juin 1998 ainsi que la circulaire connexe N° 3516/5966 susmentionnée, font obligation au médecin, chaque fois qu’il constate, sur la personne d’un détenu, des marques de violences ayant pu être causées par des mauvais traitements de la part de l’administration de la prison, d’en informer l’autorité judiciaire compétente.

191.La circulaire N° 3526/5976 du 11 juillet 2000 comporte des dispositions précises à l’intention des directeurs de prison concernant le service sanitaire. Elle dispose :

a)Pendant la visite d’un médecin auprès d’un détenu, et sauf demande contraire motivée de la part dudit médecin ou indication contraire pour raisons de sécurité, seuls peuvent être présents des membres du personnel médical ou paramédical, et, en cas de présence desdits membres, il convient de prendre toutes les mesures possibles pour assurer la confidentialité fondamentale à laquelle le détenu a droit;

b)Il faut prendre toutes les mesures nécessaires, également, pour faire en sorte qu’aucune autre personne ne puisse avoir accès aux dossiers médicaux et aux dossiers cliniques des détenus à l’exception de celles qui doivent les examiner pour des raisons officielles. Ces principes s’appliquent à tous les détenus, y compris ceux qui relèvent du régime de l’article 41 bis.

192.En ce qui concerne particulièrement les prisons visitées, la Direction générale des prisons de Bologne, ainsi que celles de Spoleto et de Naples/Poggioreale, ont confirmé que ces établissements respectent rigoureusement la circulaire susmentionnée.

Propagation des maladies

193.Le problème de la propagation des maladies transmissibles dans le système pénitentiaire italien fait l’objet d’une attention particulière de la part de l’administration, qui a mobilisé de nombreuses ressources dans ce domaine dans les années 1980. Certaines directives ont déjà été publiées aux fins de la formation continue et d’une information mise à jour du personnel et des détenus pour pouvoir contrôler la propagation de la tuberculose dans les prisons, et un système de surveillance de cette dernière a été créé, en plus de celui mis en place en 1990 pour le VIH.

194.La circulaire N° 3513/5963 du 20 janvier 2000 a ordonné la diffusion de directives précises pour limiter la propagation de l’hépatite virale, et les détenus se sont vu remettre des brochures en différentes langues, qui comportent des indications utiles destinées à prévenir la transmission des maladies des parents aux enfants.

VIH/SIDA

195.L’administration pénitentiaire n’a jamais procédé à un isolement discriminatoire des détenus infectés par le VIH. En ce qui concerne en particulier la prison de Naples/Poggioreale, elle a indiqué quelques éléments. Il y a des détenus infectés par le VIH dans les divisions de Rome et de Florence. La division de Rome n’est pas située à l’écart des autres : elle est à côté d’autres divisions où des détenus infectés par le VIH sont dans des cellules situées au même étage que des cellules dans lesquelles se trouvent des toxicomanes, des transsexuels et des homosexuels et juste à côté d’elles. Les détenus infectés par le VIH ne sont pas « marginalisés ». Ils sont bien intégrés, peuvent communiquer et sont en relation avec tous les autres, et participent à toutes les activités de réinsertion et de resocialisation de cette division depuis des années (groupes d’études, catéchisme, élaboration de magazines, ateliers de peinture, cours de musique, etc.). Les soins relationnels sont assurés par six psychologues qui interviennent à tour de rôle pendant la semaine, et tout le personnel répond à leurs besoins régulièrement. Il y a un médecin qui assure un service tous les jours dans la division de Rome, deux médecins qui assurent une permanence dans le service des toxicomanes, un médecin spécialiste des maladies infectieuses, deux infirmières dans le service des toxicomanes. En outre, le personnel des Ser. T. (médecins et psychologues) est présent trois jours par semaine et fait œuvre de prévention et d’assistance auprès des détenus toxicomanes et de ceux qui sont infectés par le VIH, avec les autres membres du personnel. Ces personnes jouent également le rôle de formateurs et d’intermédiaires pour les détenus qui choisissent d’aller dans une communauté de réinsertion.

196.La prison de Spoleto est, elle aussi, exempte de discrimination, aussi bien pour ce qui est de l’insertion des détenus infectés par le VIH dans la vie courante que pour les activités de traitement telles que le travail, l’éducation et la formation professionnelle.

Toxicomanie

197.Depuis la réforme du service sanitaire pénitentiaire, la gestion dans les prisons du phénomène de toxicomanie, qui est très important -- au point que les détenus toxicomanes représentent 30 % de la population carcérale – et la définition des stratégies pour les actions à mener relèvent de la compétence des Ser. T., qui font partie des A.S.L. (Entreprise sanitaires locales).

198.Le Département de l’administration pénitentiaire est chargé de s’assurer que les détenus jouissent de la même garantie d’efficacité de la part des Ser. T. que le reste de la population.

199.En règle générale, l’administration pénitentiaire a toujours accordé une attention particulière au problème des détenus toxicomanes et ne leur a jamais appliqué un traitement pharmaceutique, mais s’est toujours efforcée de recourir à une approche globale et à la psychothérapie; en 1991, elle a créé à cet effet les « équipes de toxicomanie » composées de médecins, de psychologues et d’infirmières qui appuient les Ser. T. et les remplacent dans les prisons en cas d’absence.

200.En même temps, elle a essayé de les faire bénéficier d’un grand éventail de possibilités de traitement en leur permettant de participer aux activités organisées par les détenus et en proposant différentes initiatives prévues à l’intention de cette catégorie de personnes. De plus, elle s’est efforcée de donner, dans certaines limites, une formation spécifique au personnel qui travaille en contact direct avec les détenus toxicomanes

201.En ce qui concerne particulièrement la prison de Naples/Poggioreale, il convient de préciser que les détenus toxicomanes ne sont pas regroupés dans une seule unité : en décembre 2001, ils étaient 385, dont 152 se trouvaient dans la division de Rome et d’autres divisions (Avellino, Naples, Florence, Gênes, Livourne). En outre, le programme d’intervention dont ils bénéficient n’est pas seulement à caractère pharmaceutique, mais essentiellement psychologique. En d’autres termes, il y a un psychologue pour chaque division, qui s’occupe exclusivement des détenus toxicomanes et alcooliques et qui collabore avec celui qui est chargé des détenus n’ayant aucun problème de toxicomanie ni d’alcoolisme. Il faut ajouter, également, 62 bénévoles qui travaillent constamment en appui à cette structure, dont 32 pour les seuls détenus toxicomanes, sans compter l’activité constante et attentive des éducateurs et employés de ces établissements et sans oublier de souligner le doigté et l’attention dont fait preuve le personnel de police depuis des année passées à s’occuper des toxicomanes et des personnes infectées par le VIH, jouant un rôle actif d’intermédiaire, avec d’autres, pour résoudre leurs problèmes.

202.De nombreux policiers, mais également des éducateurs et des employés ont suivi les stages organisés par le DAP, ces dernières années, pour améliorer leurs compétences dans l’exercice de leurs tâches auprès de ce type de détenus. Le personnel pénitentiaire a suivi, de décembre 1999 à décembre 2000, un stage diplômant de formation dans ce domaine, organisé à l’intérieur de cette structure et comportant de nombreuses heures consacrées à la communication avec ce type de détenus. Les détenus toxicomanes se sont vu proposer des activités concrètes (stages de poterie, stages de réparation d’antennes terrestres et d’antennes satellite, de sérigraphie, de jardinage, de langues vivantes, en particulier français et anglais, ateliers de peintures, composition de magazines, travail de bibliothèque, cours de catéchisme).

203.Pour ce qui est de la prison de Spoleto, il faut préciser qu’elle comporte un service permanent d’observation, d’information et de coordination pour tous les problèmes généraux ou individuels concernant les toxicomanes ou les alcooliques. Les détenus sont très bien informés, surtout, qu’ils peuvent accepter de se soumettre au test volontaire : en fait, tous se soumettent à des contrôles sanitaires périodiques. Des activités précises, telles que stages de formation de base à l’informatique, composition et projection de photos et débats sur des films sont proposées aux détenus, qui peuvent participer à ces activités de traitement en compagnie d’autres détenus. Enfin, le personnel pénitentiaire, ainsi que tous ceux qui assument, professionnellement, une responsabilité dans cette structure en rapport avec la toxicomanie, peuvent bénéficier d’une formation spécifique dans ce domaine.

204.Soulignons, par ailleurs, que la présidence du Conseil des ministres a récemment approuvé le financement de quelques projets présentés par le Département d’administration pénitentiaire (DAP), ce qui représente une charge pour le Fonds national contre les drogues.

205.Le premier projet prévoit l’organisation de stages de formation spécifiques à l’intention des détenus toxicomanes pour leur permettre de travailler dans des ateliers d’artisanat ou de stages de formation professionnelle pour leur donner accès à des activités rurales. Le second projet prévoit l’organisation d’activités culturelles, récréatives et sportives, ainsi que l’élaboration d’initiatives d’information sur les problèmes du monde du travail et de la réglementation du travail.

206.Le troisième projet prévoit une intermédiation culturelle dans le domaine des activités culturelles, récréatives et sportives en coopération avec des associations, des organisations de bénévoles et/ou des médiateurs culturels individuels et la mise au point d’initiatives d’information sur les problèmes du monde du travail et de la législation du travail.

207.Le quatrième projet, qui a pour titre « Double diagnostic et diagnostic caché : accueil et consommation de drogues dans les prisons », est centré sur les souffrances psychiatriques et la toxicomanie en prison, et en particulier le développement des situations pathologiques dans les composantes biologiques, personnelles et sociales de chaque individu. Á ce sujet, les conditions de vie particulières aux prisons rendent possible toute situation d’urgence et/ou évolution éventuelle de problèmes psychiatriques qui doivent être suivis lors de l’interruption de l’usage de drogues.

208.Ce qu’on espère, c’est pouvoir recueillir des données sur l’incidence des problèmes psychiatriques chez les détenus toxicomanes, sous forme d’un possible diagnostic caché, en d’autres termes, un masque pour l’usage de drogues : en rapport avec les données recueillies, il est proposé d’accueillir en prison, avec circonspection et compétence, des personnes en but à ces problèmes, à titre expérimental et avec la participation active du personnel pénitentiaire, en vue de pouvoir les faire bénéficier d’un ensemble de services nationaux complets de protection sanitaire .

209.C’est pourquoi, la principale stratégie consiste à ouvrir de nouvelles prisons afin d’accroître la capacité d’accueil de ce système et à adopter des mesures visant à faire diminuer la population carcérale. Les prisons de Rossano et de Milan/Bollate ont ouvert en 2000. Celles de Pérouse, Caltagirone et Reggio Calabria sont en construction, alors que celles d’Ancône et de S. Angelo sont terminées et vont ouvrir.

210.Il est clair que l’augmentation globale de la capacité d’accueil grâce à l’ouverture des prisons susmentionnées ne suffit pas pour résoudre le problème de la surpopulation carcérale. Il y aura une augmentation du nombre de places lorsque toutes les restaurations en cours, qui réduisent la capacité d’accueil de détenus, seront terminées (par exemple à Naples et à San Vittore).

211.L’administration de la sécurité publique a rappelé les dispositions diffusées par le truchement de ses départements, en particulier les suivantes :

–l’obligation de vérifier que les locaux utilisés comme cellules de sécurité renforcée dans les bâtiments principaux soient conformes aux normes fixées par le Comité pour la prévention de la torture du Conseil de l’Europe;

–l’interdiction d’utiliser des cellules de sécurité renforcée qui ne répondent pas aux normes minimales susmentionnées;

–la nécessité que la détention dans les cellules de sécurité renforcée soit respectueuse des besoins fondamentaux des personnes.

3. Traitement des prisonniers

Situation des établissements pénitentiaires

212.Les pouvoirs publics ont évalué à 41 602 places la capacité globale des prisons italiennes – pour que les règlements et les objectifs de réhabilitation soient respectés et que l’on permette au personnel pénitentiaire de s’acquitter de ses fonctions au titre de la sécurité et de maîtriser pleinement la situation. Dans le même temps, le nombre maximum de places nécessaires était fixé à 60 000 au vu des besoins.

213.L’écart entre ces deux chiffres est préoccupant et difficile à accepter puisque, de façon générale, il ne saurait être question de « comprimer » les droits des prisonniers ni d’amoindrir le respect dû à leur dignité. Cela dit, il ne faudrait pas perdre de vue que le premier chiffre a été calculé sur la base des critères de surface minimum habitable par personne utilisés dans le secteur du logement.

214.Quoi qu’il en soit, au 30 juin 2002, le nombre des prisonniers était de 56 271 (dont 22 135, soit 39,3 % en détention préventive). C’est là une augmentation de 900 personnes par rapport au chiffre du 30 juin 2001 (une légère baisse a été enregistrée les mois suivants pour atteindre le chiffre de 56 032 au 14 novembre 2002). Il reste qu’on s’approche aujourd’hui du niveau de saturation de la « capacité nécessaire ».

215.Il faut tenir compte, par ailleurs, du fait que le surpeuplement carcéral ne se répartit pas équitablement; il y a des cas où, comme à Massa, la capacité réglementaire est de 82 places pour un chiffre effectif de 237; à Naples, Palerme et Reggio Calabria aussi, la situation est grave. La population carcérale souffre de problèmes particuliers causés par la toxicomanie (qui touche 28 % des détenus) et la présence d’un grand nombre de personnes atteintes d’hépatite, du syndrome d’immunodéficience ou de troubles psychologiques. En outre, le nombre d’étrangers, de musulmans en particulier, est élevé (30 %), avec tout ce que cela entraîne de coutumes alimentaires et religieuses.

216.La stratégie opérationnelle a récemment pris beaucoup d’ampleur, comme il apparaît dans la création, en juillet 2003, d’une entreprise publique, Dike Aedifica SpA, qui est chargée de mettre en œuvre les programmes de construction de prisons du Ministère de la justice, et au réexamen du programme ordinaire de construction de prisons faisant l’objet de l’arrêté ministériel du 2 octobre 2003. Le but de ce réexamen est de faire exécuter des travaux dans les établissements existants en vertu de la loi N° 259 du 14 novembre 2002, laquelle prévoit des baux permettant d’acquérir de nouveaux établissements pénitentiaires et des procédures pour se défaire des vieilles prisons qui ne sont plus utilisées ou plus adaptées. Le produit de ces ventes sera affecté à l’accroissement du nombre d’établissements pénitentiaires et à l’amélioration de leurs installations. Le financement de ces programmes est régi par la loi N° 289 du 27 décembre 2002.

217.Parmi les autres initiatives de modernisation des bâtiments pénitentiaires il faut signaler : le projet de rénovation de la prison « Nuove » de Turin dont l’appel d’offre sera publié en janvier 2004, et qui doit être achevée à la fin de 2006 pour un coût estimé entre 30 et 35 millions d’euros, dont 20 millions en provenance du Ministère de la justice, ou encore des essais de rénovation de « logements sociaux » pour les anciens détenus ou les personnes bénéficiant de programmes de « semi-liberté » ou encore qui relèvent des services sociaux; ces essais se déroulent à Côme et à Busto Arsizio et consistent en un travail de rénovation de logements dans le voisinage de prisons gérées par la région de Lombardie, laquelle apporte un financement d’environ 350 000 euros.

Garanties contre la maltraitance

218.Selon l’article 104 du Code de procédure pénale, tout accusé arrêté en flagrant délit et placé en détention préventive a le droit de parler à son avocat dès le début de l’application de cette mesure; il a aussi le droit de s’entretenir avec son avocat immédiatement après son arrestation.

219.L’autorité judiciaire peut retarder l’exercice de ce droit de cinq jours au maximum en application d’un arrêté motivé, pour des raisons précises et exceptionnelles. En vertu de ce règlement, le DAP a souvent rappelé aux administrations des prisons, par circulaire spéciale :

a)que lesdites directions sont tenues de garantir aux personnes arrêtées en flagrant délit ou placées en détention préventive le droit de s’entretenir avec leur avocat dès leur arrivée à la prison, sauf si l’autorité judiciaire compétente en a ordonné le report à une date ultérieure pour les raisons indiquées plus bas;

b)que le nombre d’entretiens que l’accusé placé en détention préventive peut avoir avec son avocat est illimité;

c)que la confidentialité de ces entretiens doit être rigoureusement assurée.

L’interdiction d’utiliser un système d’écoute pour surveiller les conversations des détenus, imposée d’une manière générale par l’article 182 du règlement des établissements pénitentiaires, est particulièrement pertinente dans le cas des entretiens du détenu avec son avocat. Si elle n’était pas respectée, il s’agirait, en l’occurrence, de la violation d’une interdiction relative au droit non seulement à la confidentialité mais également à la défense. Il est clair que le personnel de garde doit toujours assurer une surveillance visuelle.

221.Toute personne arrêtée par la police peut avoir une conversation privée avec un avocat. Il est fait obligation à la police judiciaire, immédiatement après l’application d’une mesure de privation de liberté, d’informer la personne placée en état d’arrestation de son droit de choisir un avocat, lequel doit alors être informé que cette dernière a été arrêtée ou a été placée en garde à vue. Si l’intéressé ne choisit pas un avocat, le ministère public en commet un d’office, qui a le droit de s’entretenir immédiatement avec son client, sauf si, au cours de l’enquête préliminaire, des raisons précises et exceptionnelles sont évoquées permettant au juge de reporter cet entretien de cinq jours au maximum à la demande du ministère public et en application d’un arrêté motivé (article 104 du Code de procédure pénale).

222.Dans les postes de carabiniers, il n’y a pas de lieu réservé aux entretiens des détenus avec leurs avocats, en raison de la courte durée de leur détention dans la cellule de garde-à-vue (24 heures au plus) et peu d’espace libre. Néanmoins, il est possible de répondre à ce besoin en utilisant d’autres endroits que les chefs de service jugent convenables.

223.Le règlement des établissements pénitentiaires dispose que tous les détenus doivent passer une visite médicale à leur entrée en prison et, en tous cas, le lendemain. Ceci dit, ils peuvent également consulter un médecin à n’importe quel moment moyennant finance.

224.Le directeur donne son autorisation, sauf aux prévenus qui attendent d’être jugés en première instance : cette autorisation, en l’occurrence, dépend de l’autorité judiciaire. Aucun article précis du Code de procédure pénale ne prévoit le droit d’accès aux cellules pour les médecins, mais il convient de remarquer que, dans la Constitution italienne, figurent des articles qui garantissent la liberté des personnes (art. 13) et protègent la santé en tant que droit fondamental de l’individu et objet d’intérêt collectif (art. 32).

225.Le principe selon lequel la santé doit toujours être protégée découle de l’article 177 du Code de procédure italien (« protection des droits des personnes emprisonnées ») qui dispose que les procédures relatives aux mesures restreignant la liberté individuelle doivent protéger les droits des intéressés. En outre, selon le système juridictionnel italien, les fonctionnaires de police sont responsables, non seulement au niveau disciplinaire, mais également au niveau pénal, des préjudices causés à toute personne emprisonnée ou interrogée à qui ont été refusés, ou pour qui ont été retardés, les soins médicaux dont elle avait besoin.

226.C’est pour cette raison que les fonctionnaires de police sont tenus de garantir aux personnes emprisonnées l’assistance médicale dont elles ont besoin. Cette dernière est fournie à toute personne détenue ou arrêtée qui a besoin d’un traitement médical ou qui le demande expressément.

227.Lors de l’interrogatoire ou de l’arrestation, la police judiciaire est tenue d’informer l’intéressé de ses droits, selon la législation en vigueur. Elle doit indiquer au détenu ce que la loi lui permet : il peut choisir un avocat sur le champ, informer sa famille de son interrogatoire ou de son arrestation, décider de ne pas répondre aux questions qui lui sont posées, et il doit lui être notifié que, même s’il refuse de répondre, la procédure se poursuit.

228.L’article 64 du Code de procédure pénale italien dispose que l’intéressé, même s’il est placé en détention, doit être interrogé sans contrainte physique, et il est interdit, même s’il a donné son consentement, de recourir à des méthodes pouvant affecter sa capacité de jugement ou d’évaluation. Le ministère public peut être appuyé, lors de l’interrogatoire, par la police judiciaire (art. 370 du Code de procédure pénal italien) et exercer un contrôle rigoureux en l’occurrence.

229.Toute personne soumise à un interrogatoire par la police judiciaire doit l’être en présence de son avocat (art. 350, par. 1 du Code de procédure pénale italien), si elle n’est pas placée en garde-à-vue par un fonctionnaire de police, auquel cas, et seulement au moment d’une arrestation en flagrant délit ou immédiatement après, il est possible d’obtenir des informations utiles à la poursuite de l’enquête, ces informations ne pouvant pas être utilisées au cours du procès, car elles ont été obtenues en l’absence d’un avocat.

230.La police judiciaire, lors de l’arrestation ou du contrôle d’une personne, doit l’informer de ses droits, selon la législation en vigueur. Dans les commissariats où les personnes interrogées sont placées en garde à vue, l’heure d’entrée et de sortie doit être enregistrée dans un dossier avec les noms des fonctionnaires de police et la liste des effets personnels déposés et récupérés par l’intéressé. Les instructions à l’intention des fonctionnaires de police doivent figurer dans un registre spécial.

231.Il est précisé à l’article 62 du nouveau règlement que, même s’il est placé en détention, qu’il vienne de perdre sa liberté ou de faire l’objet d’un transfert, les fonctionnaires de l’administration pénitentiaire doivent demander à l’intéressé s’il désire en informer un parent ou une personne spécialement désignée. Les fonctionnaires de police sont également tenus d’établir un rapport à ce sujet.

232.Cette information est immédiatement transmise par la police, aux frais de l’intéressé, à moins qu’il ne soit insolvable, auquel cas c’est l’administration qui supportera ces frais. Si l’intéressé est un étranger, les autorités diplomatiques compétentes doivent être informées de son placement en détention selon le droit international.

233.Cette mesure n’est pas appelable, car la législation actuelle ne prévoit pas qu’une telle mesure soit notifiée. Par ailleurs, elle fait partie des mesures qui ne restreignent pas la liberté individuelle et qui sont appelables devant la Cour suprême, selon l’article 568, paragraphe 2 du Code de procédure pénale italien.

234.La police judiciaire est tenue, entre autres, d’informer sans délai la famille de toute personne placée en détention ou faisant l’objet d’une instruction après avoir pris les mesures restrictives de liberté (art. 387 du Code de procédure pénale), et cela seulement avec le consentement de l’intéressé. L’article 386 du Code pénal dispose que l’autorité judiciaire doit être informée par les fonctionnaires de police concernés de l’arrestation ou de l’enquête en cours.

235.La loi italienne comportant les « Règles concernant l’immigration et le statut des étrangers » dispose que les étrangers en attente d’expulsion doivent être hébergés, dans le respect des principes de la dignité humaine, dans des centres d’assistance temporaire spéciaux pendant une période de 20 à 30 jours au plus.

236.La loi dispose aussi que les centres de la police des frontières peuvent expulser les étrangers qui n’ont pas le droit de pénétrer en territoire italien. Ce n’est que si l’intéressé est agressif ou violent qu’il est soumis à des mesures de surveillance sévères (étant, par exemple reconduit sous escorte jusqu’à l’aéroport) appliquées dans des conditions de sécurité pour éviter les ennuis et l’empêcher de mettre autrui en danger.

Torture et autres traitements inhumains et dégradants

237.Le personnel pénitentiaire, qui a suivi une formation professionnelle, sait parfaitement que les traitements physiques inhumains ou dégradants et les insultes sont interdits dans les prisons et sont passibles de poursuites aux niveaux pénal et disciplinaire.

238.En outre, un document du Ministère de la justice en date du 29 août 2000 confirme qu’il convient d’éviter tout traitement inhumain ou dégradant dans les prisons et que tout le personnel pénitentiaire doit coopérer immédiatement et sans réserve aux enquêtes menées à ce sujet. Il est également important de souligner que le Ministère de la justice a toujours poursuivi avec fermeté ceux qui s’en rendaient coupables, considérant qu’un tel comportement, très rare dans le système pénitentiaire italien, est inacceptable.

Prison de Bologne

239.Le nombre croissant de détenus étrangers dans les prisons italiennes a fait naître de nouveaux problèmes face à de nouvelles situations. Il faut, en particulier, élaborer de nouvelles règles et de nouveaux modes de vie en commun afin d’éviter les conflits et de donner aux étrangers une possibilité équitable de jouir des mêmes droits que les autres. Actuellement, l’administration pénitentiaire s’occupe de promouvoir des cours et des stages de langues, ouvre des bureaux d’information spéciaux et conclut des accords précis avec des ONG spécialisées dans ce domaine. De plus, la prison de Bologne, grâce à un projet financé par l’administration régionale de l’Émilie-Romagne, bénéficie des services de nombreux intermédiaires culturels qui s’occupent des prisonniers étrangers.

241.De nombreuses activités sont organisées dans la prison de Bologne, telles que :

a)un enseignement de l’italien;

b)des cours sur l’éthique pour 33 détenus étrangers et une approche comparée des cultures orientale et occidentale;

c)des ateliers musicaux composés de 10 détenus étrangers.

242.Aucun cas d’insultes ni de violence à l’égard des détenus étrangers n’a été relevé de la part du personnel de cette prison.

Prison de Naples (Poggioreale)

243.Il convient de souligner que l’habitude qu’ont les prisonniers de marcher en double file avec les mains dans le dos ne fait pas l’objet d’une instruction de police, mais est un comportement traditionnel des détenus qu’il est difficile de faire changer. Au contraire, l’ambiance y est calme et aucun cas d’incompatibilité entre personnel pénitentiaire et détenus n’a été signalé depuis longtemps.

Prisonniers relevant de l’article 41 bis de la loi sur les établissements pénitentiaires

244.La présence en Italie d’éléments dangereux du crime organisé, dont l’importance croissante constitue un danger pour la sécurité non seulement en Italie, mais en Europe d’une manière générale, rend nécessaire l’établissement d’un système pénitentiaire spécial, comme celui qui figure à l’article 41 bis de la loi sur les établissements pénitentiaires. Il doit avoir un caractère structurel et être en vigueur jusqu’à ce que les contrôles juridictionnels montrent que le danger a décru. Ces considérations sont dictées par plusieurs années d’expérience et d’application de l’article 41 bis, qui ont amené les législateurs italiens à concevoir la loi N° 279 du 23 décembre 2002, laquelle prévoit, d’une part, des mesures restrictives plus sévères à l’égard des prisonniers les plus dangereux et, d’autre part, l’établissement de conditions minimales de légitimité constitutionnelle.

245.Á l’heure actuelle, on compte 12 prisons qui ont des sections « 41 bis » : Cuneo, L’Aquila, Marino del Tronto (Ascoli Piceno), Novara, Parme, Rome Rebibbia (pour les femmes), Rome Rebibbia (pour les hommes), Secondigliano (Naples), Spoleto, Terni, Tolmezzo (Udine) et Viterbe. Une section de cinq cellules a été créée dans le Centre de diagnostic thérapeutique de la prison de Pise pour y loger les détenus malades assignés au régime dur.

246.Le détenu assigné au régime dur ne peut recevoir qu’une visite, ou bien un appel téléphonique, par mois de sa famille. Lors de la visite, la conversation a lieu à travers une vitre et, habituellement, par téléphone. Les visites de tiers sont interdites et les prisonniers n’ont pas le droit de recevoir de l’argent en plus d’une somme précise fixée chaque année par l’administration de la prison, ni d’en envoyer à l’étranger, sauf pour payer les frais d’avocat.

247.Afin de leur permettre d’assister aux procédures engagées à leur encontre, les prisonniers qui relèvent de l’article 41 bis peuvent recourir, à titre exceptionnel et temporaire, à la « participation à distance », prévue par la loi N° 11 du 7 janvier 1998 et prorogée jusqu’au 31 décembre 2003. Le procès à distance est un pas de plus en direction de la création d’une discipline autonome et spécifique au terme de poursuites relatives à certaines infractions, et a été également motivé par la nécessité d’éviter les déplacements fatigants et coûteux des magistrats qui doivent interroger ceux qu’on appelle les « collaborateurs de la justice » sans les exposer au danger de vendettas directes ou indirectes de la part de leur association criminelle « d’origine ».

Mise en place d’un garant des droits des personnes privées de liberté (Conseil municipal de Rome, Conseil municipal de Florence, région du Latium)

248.Grâce à la récente mise en place de ce garant par les conseils municipaux de Rome, de Florence et par la région du Latium, il est possible de renforcer les instruments de protection des droits des personnes privées de liberté (résolutions N° 90 du 14 mai 2003 et N° 666 du 9 octobre 2003; loi régionale N° 31 du 6 octobre 2003). Ces initiatives, prises par des conseils municipaux et une région à population carcérale relativement forte, sont très importantes en ce qu’elles confirment l’intérêt fort et positif manifesté à ce sujet par les autorités locales chargées, en vertu décret présidentiel N° 616/1977 et la loi N° 328/2000, de la planification et de la gestion des politiques d’appui aux anciens détenus et à leur famille, ainsi que de leur réinsertion sociale.

249.Comme les personnes entièrement ou partiellement privées de liberté sont indéniablement, en raison de cette situation même, vulnérables et exclues du plein exercice des droits ci-dessus et qu’elles n’ont aucune possibilité de profiter des promotions humaines ou sociales que le conseil municipal offre, à titre institutionnel, à tous ceux qui, citoyens ou non, résident ou sont seulement domiciliés dans la commune, y compris par le biais de diverses formes de participation à la vie de la commune et de la fourniture de services, et comme « la coordination avec l’État , lequel a la responsabilité des fonctions administratives relatives à la police et à l’application des peines, n’est que l’un des devoirs institutionnels des pouvoirs locaux en vertu du principe constitutionnel de subsidiarité, il est également essentiel, pour que les intérêts publics soient protégés aussi bien que possible », de mettre en place un garant des droits des personnes privées de liberté dans les municipalités susmentionnées.

250.Le Garant est nommé par arrêté du maire après avoir été choisi parmi les « personnes de prestige et de renom incontestés dans le domaine de la loi, des droits de l’homme ou des initiatives sociales dans les prisons et les services sociaux ». Le Garant est titulaire d’un mandat de cinq ans renouvelable une fois seulement. Il lui incombe, pour l’essentiel, les

tâches ci-après :

« a)aider, à la fois en observant la situation et en exerçant une surveillance indirecte, les personnes privées pour quelque raison que ce soit de liberté ou dont la liberté de circulation a été restreinte et qui sont domiciliées, résident ou vivent sur le territoire de la municipalité (de Rome ou de Florence), à exercer leur droit et à profiter de leurs possibilités de participer à la vie civile, ainsi que d’utiliser les services municipaux, en particulier en ce qui concerne l’emploi, la formation, la culture, l’assistance, les soins de santé et la pratique des sports et tout ce qui relève du conseil lui-même, compte tenu des restrictions dont ils font l’objet;

b)promouvoir des actions et des initiatives de sensibilisation du public en ce qui concerne les droits de l’homme des personnes privées de liberté et l’ « humanisation » des peines de prison;

c)promouvoir des initiatives conjointes ou coordonnées avec d’autres acteurs du secteur public, en particulier l’Organe de défense des droits fondamentaux de la ville, qui ont compétence, dans le secteur, pour accomplir les tâches énoncées à l’alinéa a);

d)s’il reçoit des rapports, même informels, sur des violations des droits, garanties et prérogatives de personnes privées de liberté, s’adresser aux autorités compétentes pour complément d’information, signaler le non-respect ou le respect inadéquat de ces droits et tenir constamment les autorités en question au courant des conditions faites aux prisonniers dans les centres de détention, particulièrement en ce qui concerne l’exercice de droits reconnus mais mal protégés et dont les garanties de l’application sont, en pratique, suspendues, controversées ou différées;

e)promouvoir, avec les départements en question, des protocoles d’accord pouvant l’aider à remplir ses fonctions, y compris des visites de prisons et d’autres centres de détention  »

251.Le Garant travaille également en contact direct avec tous les organes du Conseil municipal (pour le Garant du Conseil municipal de Rome, les organes concernés sont le Comité des questions pénitentiaires, l’Office des prisonniers et le comité de coordination du Plan de réglementation sociale, avec lequel il doit se réunir tous les mois), établit des rapports sur ses activités et préconise des initiatives et des actions à entreprendre. Le Garant de la ville de Rome présente également des comptes rendus au Comité sur les problèmes pénitentiaires, ainsi qu’aux principales associations de prisonniers. Lors de l’adoption du budget pour 2003-2005, le Conseil municipal de Rome a adopté un amendement mettant un fonds spécial à la disposition du Garant dans le cadre du Programme du Département 14 (politiques relatives au développement local, à la formation et à l’emploi), ce dernier étant chargé d’appuyer le Garant de la manière suivante :

–en appuyant son action pour « aider, à la fois en observant la situation et en exerçant une surveillance indirecte, les personnes privées pour quelque raison que ce soit de liberté ou dont la liberté de circulation a été restreinte », et qui sont domiciliées, résident ou vivent sur le territoire de la municipalité de Rome, « à exercer leur droit et à profiter de leurs possibilités de participer à la vie civile ainsi que d’utiliser les services municipaux », en particulier en ce qui concerne l’emploi, la formation, la culture, l’assistance, les soins de santé et le sport.

–en l’aidant à promouvoir des actions et des initiatives de sensibilisation du public en ce qui concerne les droits de l’homme des personnes privées de liberté et l’ « humanisation » des peines de prison, ainsi qu’à prendre les mesures appropriées selon les rapports présentés, mêmes informels, faisant état de violations des droits, garanties et prérogatives de personnes privées de liberté. En pareil cas, le Garant s’adresse aux autorités compétentes pour complément d’information; il signale le non-respect ou le respect inadéquat de ces droits et tient les autorités en question constamment au courant des conditions faites aux prisonniers dans les centres de détention, particulièrement en ce qui concerne l’exercice de droits reconnus mais mal protégés et dont les garanties de l’application sont, en pratique, suspendues, contestées ou différées.

252.Par arrêté du Maire en date du 13 octobre 2003, le Professeur Luigi Manconi a été nommé Garant des droits des personnes privées de liberté pour la ville de Rome.

253.Pour ce qui est de la région du Latium, la loi régionale N° 31 du 6 octobre 2003 prévoit d’abord et avant tout la composition du Bureau du Garant, qui fonctionne au sein du Conseil régional : il est composé d’un président et de deux membres élus par le Conseil régional à la majorité absolue pour un mandat de cinq ans renouvelable une seule fois. Ce bureau remplit ses fonctions conformément à des règles précises qu’il adopte et présente un rapport annuel d’activité. Ses fonctions principales sont les suivantes :

–Prendre « toute initiative relative à la prestation de services concernant le droit à la santé, à l’amélioration de la qualité de la vie, à l’éducation et à la formation professionnelle, et à tout autre service concernant la réinsertion ou le rétablissement social et l’insertion dans le monde du travail » des personnes privées de liberté;

–Signaler aux organes régionaux compétents tout « facteur de risque ou de préjudice pour les personnes [privées de liberté] porté à son attention par les individus concernés ou par des associations et des ONG qui travaillent dans ce domaine;

–Collaborer avec les structures administratives régionales concernées en cas d’omission ou de lacune constatée dans les services que ces structures sont tenues de fournir aux personnes privées de liberté.

–En particulier, inviter la commission spéciale du Conseil pour la sécurité, l’insertion sociale et la lutte contre la criminalité « à effectuer une visite conformément à l’article 67.1.d) de la loi N° 354 du 26 juillet 1975 (Dispositions relatives au système pénitentiaire et à l’application des mesures de privation ou de restriction de liberté) et aux amendements ultérieurs, dans les cas où [le Bureau] est informé ou considère qu’il y a eu violation des droits de personnes faisant l’objet de mesures restreignant leur liberté dans des établissements pénitentiaires;

–Proposer à tous les organes régionaux de prendre des mesures législatives et administratives, ainsi que des initiatives en matière d’information et de promotion culturelle concernant les droits et garanties des personnes privées de liberté.

254.Pour remplir les fonctions décrites ci-dessus, le Bureau du Garant de la région du Latium dispose d’un financement de 200 000 euros pour chacune des années 2003, 2004 et 2005. Indépendamment de l’efficacité et des résultats de ces initiatives locales, l’accent est indubitablement placé sur la création d’instruments destinés à protéger les droits des détenus.

255.Á cet égard, les administrations de prisons ont lancé une étude, qui est actuellement en cours, afin de savoir si le moment est opportun pour mettre en place un garant au niveau national. Cette étude a conduit à la présentation, en juin 2001, d’un projet de loi visant à la création d’un Organe de défense des droits fondamentaux pour les personnes privées de liberté, qui est encore en examen devant le Comité des affaires constitutionnelles de la Chambre des députés.

256.Selon le projet de loi, il s’agit d’un organe composé de cinq membres nommés par le président de la Chambre des députés et celui du Sénat pour une période de quatre ans non renouvelable (art. 2). Le projet de loi propose aussi qu’il travaille en relation directe avec les garants locaux correspondants de la protection des droits des détenus (art. 3) et que, étant entendu qu’il aurait accès « même sans préavis à tous les établissements pénitentiaires, les hôpitaux psychiatriques pénitentiaires, les établissements correctionnels pour les jeunes, les centres de séjour et d’assistance temporaires pour les étrangers, les locaux des carabiniers et de la police financière, et les commissariat dotés d’installations de détention », ses fonctions principales soient les suivantes :

–inspecter librement les lieux de détention;

–consulter, avec le consentement de l’intéressé, son dossier personnel ou son dossier médical sans autorisation préalable de l’autorité judiciaire (même lorsque l’intéressé est en attente de jugement);

–demander tous les renseignements utiles à l’administration de la prison et, en cas d’échec ou de refus, avoir accès à tous les bureaux de ladite administration avec le droit de voir et de photocopier les documents utiles sans se voir opposer une clause de confidentialité, et pouvoir ensuite convoquer le directeur de toute prison dans laquelle le droit d’un détenu a été violé (art. 4).

257.Ayant constaté une atteinte de cette nature, l’Organe de défense des droits fondamentaux aurait pour mission d’inviter le fonctionnaire ou l’organe compétent de l’administration concernée à « a) prendre les mesures appropriées indiquées par l’Organe de défense des droits fondamentaux; b) notifier son désaccord en le justifiant ». En outre, « en cas de refus persistant d’obtempérer, il devrait rendre publique une déclaration de censure qui pourrait également être diffusée par les média … Dans les cas les plus graves, il pourrait demander à l’autorité compétente d’engager une procédure disciplinaire dont le résultat devrait lui être communiqué » (art. 7).

258.L’Organe de défense des droits fondamentaux serait tenu de présenter au Parlement un rapport annuel d’activité (art.8) qui serait aussi envoyé à tous les départements ministériels concernés, au Comité contre la torture et au Comité pour la prévention de la torture du Conseil de l’Europe.

259.Le chemin menant à la mise en place de cet organe a été jalonné d’avancées importantes : la Commission des affaires constitutionnelles de la Chambre des députés a adopté le texte de base à la fin de janvier 2004.

260.L’Organe de défense des droits fondamentaux, ou « Garant des droits des détenus », est une autorité indépendante à laquelle les détenus peuvent s’adresser sans aucune restriction formelle. Selon le texte de base, cette autorité devrait être composée de quatre membres (deux étant élus par la Chambre des députés et deux par le Sénat; les décisions de ces membres étant prises à la majorité absolue au terme d’un scrutin limité). Cette instance a à sa tête un président élu avec l’accord du Président de la Chambre des députés et du Président du Sénat.

261.Ses membres ne doivent avoir fait l’objet d’aucune condamnation pénale et devraient justifier des qualifications suivantes :

a)une longue expérience (au moins 20 ans) dans le domaine des droits de l’homme des détenus;

b)une formation spécifique dans le domaine des juridictions et des droits de l’homme.

262.Pendant quatre ans, l’Organe de défense des droits fondamentaux devrait vérifier avec le juge chargé du contrôle de l’exécution des peines que la détention des prisonniers s’effectue selon les règles et les principes énoncés dans la Constitution italienne et dans le respect du droit relatif aux droits de l’homme et des pactes internationaux ratifiés par le Gouvernement italien.

263.Dans l’accomplissement de ses tâches, l’Organe de défense des droits fondamentaux pourra demander aux administrations compétentes tous les renseignements et les documents jugés nécessaires. Sans réponse dans un délai de 30 jours, il pourra obtenir de la cour d’exécution des peines une ordonnance faisant obligation de produire les documents demandés. Il pourra également visiter sans autorisation ni préavis les établissements pénitentiaires, les hôpitaux psychiatriques et les établissements pénitentiaires secondaires, ayant accès sans aucune restriction à toute partie de ces lieux et pouvant s’entretenir avec toute personne s’il le juge nécessaire.

264.Au contraire, pour visiter les centres de séjour temporaire et les commissariats de police, l’Organe de défense des droits fondamentaux, même sans autorisation, a besoin d’une notification adéquate. Le Garant des droits des détenus doit remettre un rapport à l’instance juridictionnelle compétente lorsque sont portés à sa connaissance des faits pouvant être considérés comme des infractions pénales. Il doit également présenter un rapport annuel d’activité au Parlement.

265.Ce rapport doit ensuite être transmis au Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants, au Comité des Nations Unies contre la torture, au Président du Conseil des ministres italien, au Ministère de la santé, au Ministère de la justice et au Ministère du travail.

266.En outre, le texte a également prévu des programmes de formation sur le Garant des droits des détenus dans toutes les écoles de police.

Le «secteur éducatif » dans les établissements pénitentiaires

267.Une dizaine d’années après la parution de la circulaire N° 3337/5787 du 7 février 1992, qui établit un certain nombre de secteurs dans les prisons, dont ceux de l’éducation ou du traitement, le besoin se fait sentir de faire le bilan des ressources existantes et de procéder à une redéfinition d’ensemble de leur organisation et de leur fonctionnement.

268.La circulaire N° 3554/6004 de mai 2001 a incité à réactiver ou établir un secteur éducatif, car on observait que, dans certaines prisons, il n’existait pas encore ou manquait d’efficacité. Quand il existait, son activité faisait rarement l’objet d’une planification d’ensemble, reposant le plus souvent sur des initiatives improvisées et sur le professionnalisme de certains éducateurs.

269.Il convient également de noter que le secteur éducatif, dans les prisons, a été soumis à un processus constant et progressif de bureaucratisation, avec une codification de procédures et d’activités qui, quelquefois, tiennent plus du « rituel » que d’une conception d’ensemble. En pratique, cela met en cause la prépondérance du principe clef qu’est l’individualisation de la surveillance et du traitement en mettant l’accent sur la lettre plutôt que sur l’esprit des règles.

270.Le récent contrôle effectué en coopération avec les organes d’inspection a mis au jour un ensemble de situations très diverses. Excepté quelques cas qui peuvent être considérés comme des centres d’excellence et d’autres qui présentent des défauts particulièrement graves, le secteur de l’éducation dans les prisons est en proie, d’une manière générale, à de nombreuses difficultés, tant du point de vue organisationnel que du point de vue technique et professionnel. Il y a à cela de nombreuses raisons, toutes importantes.

271.D’abord, il faut se souvenir qu’au cours des dix dernières années des changements radicaux sont intervenus dans les prisons, à une allure telle que, souvent, l’organisation n’a pas pu suivre. Le type de prisonniers a changé et le nombre s’est accru pour atteindre environ 56 000. Comme nous le savons, le pourcentage de détenus issus des couches défavorisées de la population (les « nouveaux pauvres »), a augmenté, tout comme celui des étrangers (environ 30 % de l’ensemble), des toxicomanes, des personnes ayant des problèmes psychologiques et des membres d’organisations criminelles détenus dans des locaux spéciaux (informateurs de la police « 41 bis », A.S. et détenus de l’unité « Z »). Ces changements ont été accompagnés d’une réduction ou d’une stagnation du nombre d’éducateurs (563 au 31 décembre 2002) par rapport au niveau fixé par l’arrêté du Premier Ministre d’octobre 2000 (qui prévoyait 1 376 éducateurs dans le secteur C, ce qui représente un déficit de 813 postes). Et si l’on rapporte le nombre d’éducateurs réellement présents dans les établissements aujourd’hui (474) à celui des détenus au 10 septembre 2003 (55 682), il apparaît clairement qu’il est tout à fait insuffisant (annexe 1).

272.Au Département de l’administration pénitentiaire du Ministère de la justice on est très conscient qu’il est nécessaire d’étoffer le personnel du secteur éducatif et – en dépit du fait que la loi N° 289 du 27 décembre 2002, la loi de finance, ne permet pas aux départements ministériels de recruter du personnel nouveau – une solution à moyen terme a été trouvée, qui consiste à appliquer les procédures de requalification des contrats d’emplois publics prévues par l’article 15.a), ce qui devrait permettre de pourvoir 300 postes d’éducateurs C1.

273.Toute description du « secteur éducatif » devrait signaler de manière extrêmement explicite l’augmentation du nombre des intervenants des pouvoirs locaux et des acteurs individuels présents dans les prisons, ainsi que des institutions et des associations publiques et privées qui participent aux activités de rééducation conformément à l’article 17 du Code des prisons et à l’article 68 du règlement d’application, qui redisent combien il est important que le monde extérieur participe aux activités de rééducation sur la base de la programmation périodique des initiatives. Au 31 décembre 2002, 320 associations de solidarité sociale et coopératives travaillaient dans les prisons.

274.Le nombre d’assistants bénévoles conformément à l’article 78 du Code des prisons et à l’article 120 du règlement d’application est aussi de plus en plus important. Ils exercent leur activité dans des domaines précisés par des agréments individuels (en 2003, 1 459 bénévoles ont été agréés, dont 1 394 pour travailler dans des prisons). Beaucoup d’entre eux appartiennent à des associations bénévoles qui bénéficient d’un agrément adéquat.

275.La présence du secteur des associations bénévoles et des entreprises publiques et privées, prévue par l’article 47 du règlement d’application, a entraîné une nouvelle augmentation du nombre d’intervenants qui – en différentes capacités – coopèrent avec l’administration pour permettre de mener le traitement des détenus à bien (à titre d’exemple, 41 entreprises et 69 coopératives on recruté des détenus de type « loi Smuraglia » entre le 1er juillet 2000 etdécembre 2002).

276.Les difficultés bien réelles auxquelles sont confrontées les prisons d’une part, et les entités extérieures qui coopèrent avec elles d’autre part, sont les deux points de référence qu’il convient de prendre en compte avec réalisme dans le projet de relancement du traitement carcéral. C’est particulièrement vrai si nous ne perdons pas de vue le fait que, si les prisons doivent fonctionner conformément à la loi, il est nécessaire que tout ce qui a trait tant au traitement qu’à la sécurité soit fait correctement. Il s’agit là, après tout, des domaines clefs pour les prisons, qui ne peuvent être dissociés en aucun cas; pour atteindre les objectifs de cette institution, ils doivent, plutôt, être traités comme un tout cohérent. Les différents secteurs, y compris le secteur éducatif, sont en cours de revitalisation dans la mesure où ils retrouvent un potentiel opérationnel, conformément aux dispositions du Code des prisons, comme le confirme le nouveau règlement d’application.

277.Il convient, à cet égard, d’ajouter un certain nombre de réflexions. Tout d’abord, il faut expliquer que, dans la plupart des cas, les nombreuses activités qu’implique le fonctionnement du secteur éducatif se réduisent à une seule, à savoir la réunion officielle du groupe (ou de l’équipe) présidé par le directeur de l’établissement et composé de membres du personnel administratif ainsi que, comme il est de rigueur, d’autres professionnels conformément à l’article 80 (art. 28 du règlement d’application). Aux termes de l’article 29, cette équipe établit un compte-rendu récapitulatif et formule des propositions pour l’organisation des activités éducatives avec des ressources internes ou externes.

278.En d’autres termes, nous avons tendance à parler de plus en plus d’équipes plutôt que de « secteurs » et de l’une des activités du secteur, c’est-à-dire de la partie plutôt que du tout. Or, si l’administration a comme objectif institutionnel la rééducation de chaque détenu en vue de sa réinsertion sociale, on ne peut que reconnaître la complexité des actions que l’établissement doit mettre en place avant, pendant et après l’observation et l’élaboration d’un plan de traitement individualisé, des actions qui, en général, ne sont pas très visibles. Ajoutons que les « activités de traitement » – ainsi qu’on les appelle – qui se déroulent dans les établissements (professionnelles, éducatives, culturelles, récréatives et sportives) ne font souvent pas partie d’un programme de traitement systématique, mais tendent plutôt à être sans rapport les unes avec les autres, improvisées, et sont surtout liées aux possibilités d’investissement personnel des intervenants de l’établissement.

279.De plus, dans la plupart des cas, c’est le secteur associatif, ou, plus généralement, la communauté non carcérale qui contribue à donner une impulsion à ces activités. Toutefois, cette aide est souvent acceptée sans vérification préalable pour savoir si les projets en question sont véritablement compatibles et coordonnés avec d’autres initiatives, et ces activités ne sont pas pleinement intégrées à celles qui sont organisées par les intervenants de l’établissement conformément aux articles 68 et 120 du règlement d’application. Faute de vérifications préalables et d’une coordination efficace, toute évaluation des résultats de la collaboration de tiers au traitement, ainsi que de ceux qui ont été ou pourraient être atteints par les détenus à titre individuel, demeure peu probable ou difficilement réalisable.

280.Dans de nombreux cas, en l’absence d’un projet éducatif propre à l’établissement en question, les activités mises en place dans son secteur éducatif sont plus ou plus moins parallèles à celles du monde extérieur. Dans la pratique, cela n’a souvent fait que compenser le manque d’effectif et de ressources de ce secteur, plutôt que de créer une synergie constructive.

281.Á cet égard, on peut signaler un exemple récent de promotion des activités de traitement mises en place par la société civile : à savoir l’officialisation du concours du secteur associatif, avec la signature d’un protocole d’entente entre le Département de l’administration pénitentiaire du Ministère de la justice et la Conférence nationale du secteur associatif dans le domaine de la justice en juillet 2003. Cet accord a pour but de favoriser la réalisation de projets d’insertion sociale des détenus jugés aptes à bénéficier de « mesures de remplacement ».

282.Ce qui est proposé, pour l’essentiel, est « la planification et la mise en œuvre par les inspections régionales, l’administration pénitentiaire et la Conférence régionale du secteur associatif, de stages conjoints de formation et de recyclage à l’intention des agents de l’administration pénitentiaire, des collectivités locales et des associations bénévoles, d’initiatives précises, parfois au niveau national, destinées à mettre à profit l’expérience acquise dans ce domaine et élaborer des méthodes et des modèles pour l’organisation du traitement des détenus en placement extérieur ». Un projet initial de mise en œuvre du protocole a été exécuté à Bologne en décembre 2003.

283.La dernière réflexion concerne le sens du traitement, à savoir la conviction que, lorsque l’on s’attache moins à individualiser les activités de rééducation, l’accent, dans de nombreux cas, est placé uniquement sur une série d’activités organisées pour l’ensemble de la population carcérale et qui relèvent souvent de la « distraction ».

284.La différence entre les activités de distraction et le traitement individualisé est que les premières – qui revêtent un intérêt et une pertinence indéniables pour gérer la complexité du monde carcéral – servent surtout à meubler des périodes qui, sans cela, seraient vides, à calmer les tensions, à occuper un temps d’oisiveté et à instaurer des créneaux de socialisation, ce qui a donc aussi, vraisemblablement, des effets positifs pour chaque détenu.

285.Le traitement, pierre angulaire de la réforme des prisons de 1975, qui a pour but la rééducation et la réinsertion sociale du délinquant, suppose, par ailleurs, la conception – en fonction des observations – de filières individualisées, dont la condition préalable est la participation éclairée et responsable du détenu.

286.Dans le cadre de la rééducation, chaque détenu doit être prêt à changer et prendre conscience du caractère illicite de sa conduite antérieure, ainsi que des conséquences de son infraction, y compris du préjudice subi par sa victime.

287.Parler de « revitalisation » à propos du traitement signifie donc – conformément à la loi – permettre à chaque détenu de retrouver son identité dans le monde carcéral et, plus généralement, dans le cadre de l’exécution de la peine. On y arrive en « mettant à sa disposition des moyens et des méthodes de traitement » (article premier du règlement d’application) qui lui permettent de retrouver ou d’acquérir – grâce au travail qualifié des intervenants et plus spécialement de ceux du secteur éducatif – la capacité de participer à la vie commune et de s’entendre avec les autres, ainsi que la volonté de souscrire à un « pacte de traitement » qui ne devrait pas être implicite, mais accepté en connaissance de cause et avoir caractère officiel. Le détenu doit être disposé à adopter derechef des valeurs socialement admissibles et à respecter à nouveau le pacte de citoyenneté qu’il a rompu en commettant son infraction.

288.Au terme de ces réflexions préliminaires, qu’on peut considérer comme un bilan encore incomplet des activités du secteur éducatif à l’heure actuelle, il nous paraît utile de redéfinir les structures, l’organisation et le fonctionnement du secteur lui-même. Cela peut également permettre d’obtenir quelques suggestions de départ à caractère méthodologique, sachant que beaucoup de ces indications figurent déjà dans les circulaires de 1992 et 2001 et que ce qui importe réellement est d’appliquer le règlement en question.

289.En particulier, pour la présentation des lignes directrices, il nous paraît bon – dans la perspective d’une nouvelle planification – d’envisager les trois niveaux suivants :

–le niveau de la planification (gestion de l’établissement),

–le niveau de l’organisation et de la coordination des opérations (gestion/éducation et secteur éducatif respectivement);

–le niveau du fonctionnement du traitement individualisé (éducateur – groupe d’observation et de traitement – équipe)

Le niveau de la planification

290.Le premier niveau à mettre en œuvre est indéniablement celui de la planification des actions et des activités, tâche qui relève des directeurs de prison, lesquels, ainsi qu’il est précisé par l’article 3 du règlement d’application, « ont compétence pour organiser, coordonner et surveiller les activités de l’établissement . . ., décider des mesures propres à garantir que les programmes de l’établissement ainsi que les initiatives extérieures soient exécutés, donner des instructions aux intervenants, y compris ceux qui n’appartiennent pas à l’administration publique », et assurer – avec l’aide du personnel pénitentiaire – la sécurité de l’institution, condition sine qua non pour que les objectifs du traitement soient atteints.

291.Á ces fins, les directeurs établissent chaque année un « plan d’éducation » pour l’établissement, faisant état des activités de traitement à mettre sur pied ainsi que des programmes et projets à mettre en œuvre avec le monde extérieur, ce pour quoi ils agissent en coordination et en harmonie avec le directeur du centre de services sociaux concerné, conformément à l’article 4.2 du règlement d’application.

292.Le projet d’éducation doit comporter une indication des ressources (humaines et matérielles) de l’établissement ainsi que des institutions publiques ou privées et, plus généralement, du monde extérieur, qui collaborent aux activités permettant d’atteindre les objectifs fixés. Les lois nationales et régionales et les règlements auxquels peut renvoyer la planification du projet doivent également être considérés comme des moyens, en particulier en ce qui concerne l’inclusion et l’élaboration d’initiatives en faveur des « usagers » des prisons, dans le cadre des plans de zone dont il est question dans la loi N° 328 du 8 novembre 2000.

293.Le projet doit également faire mention des initiatives, activités et projets à harmoniser ou mettre au point pour l’année en question pour chaque volet du traitement, et en particulier :

a)Les fins et l’organisation de ces initiatives et autres projets ainsi que l’activité des commissions d’emploi visées dans l’article 20.8 du Code des prisons. Les « tableaux des intervenants » devraient être mis à jour chaque année pour approbation par l’inspection, conformément à l’article 47.10 du règlement d’application. Il convient d’indiquer également quels sont l’état actuel et les perspectives d’extension des accords conclus avec les entreprises publiques et privées ou les coopératives qui gèrent des projets relatifs à l’emploi et recrutent des détenus dans l’établissement ou en vertu de l’article 21, ainsi que les mesures à mettre en place pour attirer l’attention du monde du travail sur les problèmes inhérents aux prisons, que ce soit pour que les entreprises et les coopératives investissent davantage dans les prisons ou pour que les entreprises publiques ou privées passent plus de commandes. Il faudrait aussi mentionner toute forme de coopération mise en place avec les autorités compétentes pour que les détenus puissent être affectés à des travaux à l’extérieur, ainsi qu’il est prévu par l’article 48.8 du règlement d’application;

b)L’organisation de cours, tant au titre de la scolarité obligatoire – auquel cas il s’agit du projet d’éducation annuel ou pluriannuel établi par la Commission de l’éducation en vertu de l’article 41.6 du règlement d’application – que de l’enseignement secondaire de deuxième cycle visé par l’article 43 dudit règlement, ou encore de la formation professionnelle, en prenant bien soin de favoriser l’élaboration de modèles de fonctionnement permettant de créer un réseau qui relie entre eux les divers acteurs, institutionnels ou autres, ayant compétence dans ce domaine. Il faut également veiller à appliquer ou à renforcer les accords conclus avec les autorités concernées pour permettre aux détenus d’entreprendre des études supérieures;

c)Les activités culturelles, récréatives et sportives planifiées par la Commission, conformément à l’article 27 du Code des prisons, organisées grâce aux ressources de l’établissement et avec la coopération du monde extérieur, que les manifestations en question soient des occasions de se divertir pour l’ensemble de la population carcérale ou des initiatives spécifiques auxquelles le détenu participe dans le cadre de son plan de traitement individualisé. Il convient d’insister à nouveau sur la fonction de la bibliothèque et sur les initiatives et projets qui encouragent ou aident les détenus – à titre individuel ou en groupes – à utiliser les espaces de socialisation et à porter un regard critique sur le comportement déviant qui a été le leur. Le théâtre, la musique et autres activités similaires, qui sont des aspects appréciables de la vie carcérale, revêtent une importance particulière dans le cadre du processus de rééducation;

d)Les relations des détenus avec leur famille, dont l’entretien ou la reprise est vital pour la rééducation et la réinsertion sociale, et restent donc fortement présents à l’esprit des intervenants qui s’occupent de l’observation et du traitement de chaque détenu. Le centre de services sociaux concerné a manifestement un rôle fondamental à jouer pour concevoir une nouvelle approche de ce domaine. Ce rôle comprend, en particulier, l’élaboration de projets visant à aider les détenus (ou des groupes de détenus) à jouer à nouveau leur rôle de parent en tant qu’élément clef du projet de changement, grâce à une réflexion critique sur les conséquences de leur méfait pour leur famille.

294.En plus des aspects descriptif et organisationnel, le projet éducatif devrait aussi comporter des suggestions méthodologiques, un délai fixé pour atteindre les objectifs établis et la ventilation du financement nécessaire pour chaque rubrique du bilan. Il faut aussi prévoir le délai et les dispositions nécessaires pour l’évaluation des résultats du projet. L’avant-projet devrait être préparé, sous le contrôle du responsable du secteur éducatif, pour la fin de novembre, puis soumis au directeur qui, sous réserve d’accord – en fonction des compétences, bien entendu – avec le directeur des centres de services sociaux pour adultes, doit convoquer une réunion spéciale du service avant la fin de décembre afin d’expliquer le projet à tous les chefs de secteurs de l’établissement et au directeur du centre, ou à une personne mandatée par lui, de manière à s’assurer qu’il est réalisable pour ce qui est des tâches à accomplir dans les autres secteurs. Cette approche conjointe est une condition essentielle pour que le projet éducatif lui-même réussisse.

295.La version finale du projet éducatif devrait être envoyée à l’inspecteur régional. Il faudrait également porter ce projet à la connaissance de tous les acteurs qui – comme il est prévu par la loi – travaillent avec l’établissement et dont les initiatives et les propositions devraient faire l’objet d’une évaluation, afin d’obtenir les autorisations nécessaires, lesquelles sont données en fonction de critères de qualité et de complémentarité aux fins de l’harmonisation effective des diverses activités du projet lui-même.

296.Le chef du secteur éducatif a la responsabilité de l’exécution des projets, en raison de quoi il s’occupe de l’organisation, de la coordination et du suivi. Il rend compte régulièrement à l’administrateur de gestion de l’avancement du projet, de tous les problèmes et de toutes les modifications nécessaires en cours d’exécution, ainsi que des contrôles intermédiaires nécessaires dans les autres secteurs, avant d’établir un rapport final d’évaluation.

297.Les inspecteurs doivent réceptionner les projets éducatifs des établissements qui relèvent de leur domaine de responsabilité et les envoyer à la Direction générale des détenus et des traitements, avec leur propre évaluation, au plus tard en janvier, chaque année.

La coordination de l’organisation et du fonctionnement du secteur éducatif

298.Le projet éducatif de l’établissement est donc l’instrument qui indique le sens de chaque activité et de chaque projet envisagé en fonction des éléments du traitement. Il indique également quels intervenants, intérieurs et extérieurs à l’établissement, doivent contribuer à atteindre les objectifs fixés, la nature de l’accord et le degré de coordination et d’harmonisation opérationnelle à prévoir entre les entreprises, les coopératives, les associations, les pouvoirs locaux et les intervenants, qui relèvent du secteur. Il précise les moyens et les possibilités de traitements pouvant être mis en œuvre dans l’établissement en ce qui concerne l’ensemble de la population carcérale et chaque détenu dans le cadre de la filière individualisée à mettre au point.

299.Le fonctionnement du secteur éducatif a donc deux volets : la mise au point d’activités et de projets de traitement, ainsi que de la coordination imposée par les interventions provenant du monde extérieur, d’une part, et l’observation et le traitement individualisé d’autre part.

300.L’ensemble du projet ainsi que l’organisation, la gestion et la surveillance exercée par le personnel professionnel pour les deux volets sont placés sous la responsabilité du chef de secteur, qui l’assume de façon totalement autonome tant pour le fonctionnement que pour les prises de décisions, assure la coordination de l’activité de tous les intervenants internes du secteur et de tous les intervenant extérieurs qui participent, dans l’établissement, au traitement des détenus.

Personnel affecté au secteur

301.Le chef de secteur est un éducateur de catégorie C3 dont le contrat d’emploi national exige les qualifications suivantes : des connaissances approfondies, une expérience et un savoir-faire solides, la capacité d’assumer la responsabilité directe de la gestion et du contrôle des services réguliers, y compris celle des résultats, ainsi que des relations extérieures (voir les articles des contrats nationaux concernant les secteurs). Ces qualifications requises pour l’emploi figurent dans l’article 24 de l’avenant au contrat qui, au sujet du profil de ce poste, indique que l’éducateur de catégorie C3 « doit assumer la responsabilité de la gestion du service et coopérer directement avec le directeur de l’établissement pour formuler et faire appliquer les recommandations, ainsi que pour fixer et atteindre les objectifs du traitement dans le cadre de l’exécution des peines ».

302.Aux termes du contrat, le chef de secteur administre et coordonne les secteurs et les structures à un niveau non directorial, assume les fonctions directoriales en l’absence du fonctionnaire titulaire du poste et assume de façon autonome les responsabilités de fonctionnement et de prise de décision que cela implique. Au cas où il y ait plus d’un éducateur C3 dans un établissement, il sera nécessaire d’effectuer un choix en fonction de critères totalement transparents.

303.Il est hors de question que des agents occupent ce poste à tour de rôle, possibilité prévue par la circulaire de 1992, parce que, toutes les fois que cela s’est passé, il s’en est suivi une fragmentation des actions et un défaut de continuité dans le travail du secteur.

304.Il convient de remarquer que l’un des critères clefs de la sélection de ce responsable devrait être le temps de service dans la catégorie C3 plutôt que le temps de service dans les fonctions d’éducateur d’un point de vue général. Il faut également tenir compte de qualités telles que le crédit professionnel dont l’éducateur de catégorie C3 jouit auprès du personnel du secteur et de l’autorité qu’il manifeste, éléments indispensables au bon fonctionnement du service d’organisation.

305.S’il y a un grand nombre d’éducateurs de catégorie C3 dans le même secteur, ils doivent tous bénéficier des mêmes possibilités d’exercer des fonctions appropriées, auquel cas le chef de secteur devra confier à ses collègues C3, en plus de l’observation et du traitement des détenus, la responsabilité d’un domaine (tel que l’enseignement scolaire et la formation professionnelle, ou les activités culturelles, récréatives et sportives …), d’une équipe de projet, ou de toute tâche pertinente dont ils auront le pouvoir et le devoir d’assurer le suivi et d’assumer la responsabilité.

306.Inversement, en l’absence d’éducateurs C3, les fonctions de chef de secteur seront exercées par un éducateur C2 choisi selon des critères similaires à ceux qui ont été décrits plus haut.

307.Les éducateurs. Il est de la plus grande importance qu’un nombre suffisant d’éducateurs C1, C2 et C3 soient nommés dans le secteur éducatif. La situation telle qu’elle apparaît à travers les graphiques joints n’est pas satisfaisante du tout : il y a un éducateur pour 252 détenus dans la Provveditorato Regionale dell’ammnistrazione penitenziara (PRAP -- Inspection régionale de l’administration pénitentiaire) de Milan et un éducateur pour 77 détenus dans la PRAP de Pérouse. Il faut bien reconnaître que l’écart entre le nombre de détenus et celui des intervenants est encore aujourd’hui (et depuis de nombreuses années) absolument inacceptable. En outre, il convient de prêter attention non seulement à ce rapport purement quantitatif, mais également à la complexité de ce type d’établissement et à la diversité des catégories de détenus dans chacun d’eux, c’est-à-dire des variables qui ont indubitablement des répercussions sur l’efficacité du fonctionnement de ce secteur.

308.Les experts (psychologues et criminologues) qui exercent leur activité professionnelle au titre de l’article 80 du Code des prisons constituent une autre ressource essentielle et apportent une participation nécessaire à l’observation des détenus (294 psychologues et 57 criminologues) ou bien remplissent des tâches liées au service des « nouveaux arrivants » (90 psychologues et 11 criminologues).

309.Le nombre de ces professionnels est, toutefois, assez bas eu égard aux besoins réels, en raison, nous le savons, du financement limité disponible au titre de l’article pertinent du budget. Il faut néanmoins veiller soigneusement à leur faire jouer un rôle plus important en tenant compte des compétences particulières et du savoir-faire de chacun. L’objectif, en l’occurrence, serait de mettre à profit les compétences de chacun et d’éviter toute uniformisation des actions, comme il est arrivé quelquefois dans le passé, ou bien d’avoir une conception à caractère purement général de leur utilisation entraînant le risque de voir se perdre des énergies précieuses.

310.Le recrutement récent d’un certain nombre de psychologues permet de se demander s’il serait opportun, vu la grande complexité du travail du secteur éducatif en raison de la diversité des utilisateurs et des objectifs, d’y créer un service ad hoc à l’intention des détenus souffrant de troubles psychologiques et psychiatriques, pour permettre de réduire le risque d’automutilation ou d’agression.

311.Ainsi qu’il est apparu dans la dernière opération de surveillance, environ 50 % des établissements ont étoffé le personnel d’exécution dans le secteur éducatif, comme l’a recommandé la circulaire de 2001 : résultat positif mais non encore suffisant en termes quantitatifs. Dans ce cas également, les inspecteurs régionaux sont invités à pousser les établissements à prévoir un personnel administratif suffisant en nombre.

312.Il faut dire que dans certains établissements des surveillants ont été affectés au secteur éducatif, souvent pour accomplir des tâches administratives. Dans certains cas – rares – ces surveillants effectuent un travail directement lié au traitement individualisé, mais ils s’occupent plus souvent de s’assurer que les détenus participent à l’ensemble des activités de traitement, en accompagnant ceux qui se rendent au travail, aux stages éducatifs ou aux entretiens avec les différents intervenants de l’établissement.

313.Toutefois, dans de nombreuses prisons, ces surveillants sont chargés d’autres services. En tous cas, les surveillants – dans l’exercice de leurs fonctions de maintien de la sécurité et de surveillance de la détention – garantissent l’existence des conditions nécessaires pour que les objectifs du traitement soient atteints. C’est pourquoi les inspecteurs régionaux sont invités à pousser la direction des établissements à supprimer tout ce qui fait obstacle à l’exercice immédiat des compétences reconnues par la loi aux surveillants en matière de traitement et à les encourager à participer aux actions du secteur éducatif.

314.Il n’est en aucun cas superflu de souligner à quel point il est important de donner un élan et un sens nouveaux au rôle joué par les surveillants dans la gestion des établissements pénitentiaires, en ce qui concerne non seulement l’ordre et la discipline, mais également l’observation et le traitement, tous aspects qui font partie intégrante de la vie carcérale.

315.Á cet égard, voici quels sont les éléments clefs de la législation :

–L’article 5.2 de la loi N° 395/1990, qui inclut dans les devoirs institutionnels des surveillants la participation – y compris au sein de groupes de travail – à l’observation et à la rééducation des détenus;

–L’article 23.2 du décret législatif N° 443 du 30 octobre 1992, qui dispose que « les inspecteurs sont tenus de participer aux réunions de groupes conformément aux articles 28 et 29 du décret présidentiel N° 431 du 29 avril 1976 » (maintenant le décret présidentiel N° 230/2000);

–L’article 15.2 du décret présidentiel N° 82 du 15 février 1999, qui dispose que « dans l’exercice de leurs fonctions institutionnelles, les membres du corps des gardiens de prison doivent adopter les principes de traitement et de rééducation définis par le Code des prisons et le règlement d’application y afférent, et traiter les détenus de façon impartiale dans le respect de la dignité de la personne »;

–L’article 24.2.8 du même décret présidentiel, qui dispose que les surveillants doivent « contribuer utilement à l’observation des détenus et des personnes internées, y compris en participant à des réunions de groupes conformément aux articles 28 et 29 du règlement d’application », et qui, au point 9 précise que ces fonctionnaires « doivent tenir compte, dans l’exercice de leurs fonctions, des indications figurant dans les programmes de traitement de rééducation individualisé »;

–L’article 31.5 du même décret présidentiel, qui prévoit que le commandant de division « doit participer aux réunions conformément aux articles 28 et 29 du décret présidentiel N° 431/1976 (maintenant décret présidentiel N° 230/2000), y compris en utilisant les notes d’observation réunies par le personnel aux fins mentionnées dans les points 8) et 9) de l’article 24.2 ».

316.Il ne s’agit donc pas de définir de nouvelles compétences, mais d’exploiter au maximum les possibilités offertes par la législation susmentionnée, en actualisant ses dispositions et, plus particulièrement, en encourageant et en incitant les responsables à utiliser les surveillants non pas seulement dans le cadre des activités et initiatives de traitement en général, mais également de façon à ce qu’ils s’intéressent de plus en plus à l’observation et au traitement individualisés des détenus. C’est ainsi que le Groupe d’observation et de traitement pourra tirer parti des connaissances essentielles que seuls les surveillants peuvent acquérir au cours de leurs contacts et de leurs dialogues journaliers avec la population carcérale et grâce aux observations qu’ils peuvent faire quotidiennement.

317.Á partir des initiatives déjà en cours dans certaines prisons, il faudrait continuer à intégrer vraiment et de manière importante les surveillants aux activités et aux actions du secteur éducatif en faisant en sorte que le chef de secteur joue à fond son rôle de coordinateur et que tous les intervenants du secteur harmonisent leur méthode de travail, y compris grâce à des stages de formation et de recyclage appropriés.

L’organisation et la coordination du fonctionnement du secteur

318.Le secteur est structuré autour de deux axes essentiels qui se rejoignent et dispose d’un secrétariat pour l’administration et le travail de bureau. Le premier axe concerne la définition, la gestion, la coordination et le suivi du projet éducatif de l’établissement, ainsi qu’il a été expliqué plus haut. La responsabilité en est assumée par le chef de secteur, qui peut faire appel à d’autres éducateurs et à tous les autres intervenants affectés à ce secteur, en veillant, comme il se doit, à améliorer les compétences et à respecter l’autonomie de chaque poste, ce dont il répond directement à l’administrateur de gestion du programme.

319.Outre ses responsabilités concernant les employés de l’établissement en tant que tels, le chef de secteur est également chargé de coordonner l’activité de tous les autres intervenants (individus ou groupes) qui participent au traitement au titre des articles 17 et 19 du Code des prisons, à savoir le monde extérieur au sens le plus large. Il doit aussi encourager la création de réseaux et la bonne intégration des autres intervenants institutionnels qui gèrent certaines activités de traitement, comme les enseignants qui donnent des cours d’instruction générale ou interviennent dans les stages de formation professionnelle, et les intervenants des institutions sanitaires locales. Non content de s’occuper des réunions des commissions prévues par la loi (commission des activités récréatives, sportives et culturelles, commission de l’éducation, commission de l’emploi), le chef de secteur doit aussi organiser des réunions régulières avec d’autres intervenants du service pénitentiaire et d’autres organisations, aux fins suivantes :

–entretenir un courant de communication et un échange de connaissances entre tous les intervenants, encourager l’intégration et la mise en commun des méthodes, des techniques et des stratégies opérationnelles;

–s’assurer que les différentes activités de traitement de l’établissement sont bonnes;

–effectuer le suivi des projets lancés avec la coopération du monde extérieur, identifier tous les problèmes qui se posent et évaluer l’efficacité des mesures prises par les intervenants du secteur et le monde extérieur en ce qui concerne la gestion des activités de traitement et des programmes de traitement individualisé;

–voir où en est l’application des accords conclus avec des tiers (entreprises et coopératives) afin de mettre au point ou d’examiner une méthode de travail permettant aux différents intervenants de travailler ensemble de manière cohérente et d’obtenir des résultats probants à la fois pour l’établissement et pour chacun des détenus;

–mettre en place et coordonner lui-même des équipes de projet, ou bien demander à d’autres collègues C3 – s’ils sont disponibles – de s’en charger, pour ce qui est des projets les mieux structurés;

–évaluer tous les nouveaux projets qui ne font pas partie du Projet éducatif, y compris sur proposition venant du monde extérieur, et rassembler les propositions de projets concernant des utilisateurs précis (particuliers ou groupes). Le chef de secteur doit rendre compte régulièrement à l’administrateur de gestion de tous les problèmes identifiés et proposer des solutions possibles, ainsi que tout changement ou modification éventuellement approprié(e) pour certains projets (y compris leur suspension si nécessaire). Il doit apporter sa contribution à la direction en fonction de ses propres compétences en matière d’éducation, en concertation avec les chefs des secteurs de la santé et de la sécurité, lorsqu’il s’agit de gérer des situations mettant en cause, en particulier, l’état physique et psychologique des détenus;

–enfin, après consultation de tous les autres intervenants du secteur, le chef de secteur établit un rapport annuel ainsi que le nouveau Projet éducatif.

320.Le deuxième axe concerne l’organisation et la coordination des activités d’observation et de traitement individualisé, qui, en vertu de l’article 28 du règlement d’application « sont exercées sous la responsabilité du directeur de l’établissement, lequel est également chargé de les coordonner ». Le chef de secteur est donc mandaté, pour s’occuper de l’organisation et de la coordination, par l’administrateur de gestion du projet dont il dépend directement.

321.Conformément au règlement susmentionné, il est prévu d’observer tous les détenus et les internés depuis le début de l’exécution de leur peine. L’observation doit se poursuivre pendant tout le temps de la peine en tant que démarche préliminaire à la définition, et à toute actualisation éventuellement nécessaire, du programme de traitement individualisé à appliquer en fonction de la situation particulière de l’intéressé. Le chef de secteur doit, en conséquence, confier les cas « bien définis » à la responsabilité de ses collègues éducateurs, selon des critères de répartition tenant compte du type de l’établissement et de la catégorie à laquelle appartiennent les détenus, de manière à équilibrer les charges de travail.

322.Il procédera à la répartition des personnes accusées et mises en détention provisoire pour permettre de prendre à leur égard des mesures allant dans le sens de leurs intérêts aux plans humain, culturel et professionnel. Il doit s’assurer que toutes les demandes d’entretien/d’intervention exprimées par les détenus qui relèvent des attributions des services sociaux sont transmises au CSSA. Le chef de secteur doit aussi s’assurer que les juges chargés du contrôle de l’exécution des peines répondent aux demandes de prestations soumises par les détenus dans les délais appropriés.

Le secrétariat du secteur

323.Le secteur est doté d’un secrétariat avec un personnel qui lui appartient en propre pour s’occuper de toutes les procédures administratives afférentes à son activité même. Ce personnel doit également assurer la liaison entre le secrétariat et le greffe. En raison de la bureaucratisation excessive et de la prolifération des procédures, on considère qu’il conviendrait de simplifier certaines procédures administratives et de les normaliser au niveau national, en conséquence de quoi un groupe de travail a récemment été mis sur pied au sein de la Direction générale avec pour mission d’analyser les différentes situations et d’établir un document à partir duquel seront élaborées les recommandations et les dispositions nécessaires avant d’être diffusées dans les établissements.

Le fonctionnement du traitement individualisé

324.Le traitement, pierre angulaire de la réforme des prisons de 1975 et dont l’objectif est la rééducation et la réinsertion sociale du délinquant, suppose, par ailleurs, la conception – soumise à une observation initiale – de filières individualisées, la condition préalable étant que le détenu y participe en toute connaissance de cause et de façon responsable.

325.Il est une mesure préliminaire capitale du point de vue de l’observation et du traitement, à savoir que chaque détenu se livre – avec l’appui des intervenants – à une réflexion critique « sur son comportement illicite, sur les raisons de ce comportement et ses conséquences négatives pour l’auteur lui-même, ainsi que sur ce qu’il peut faire pour réparer ses torts, y compris à titre du dédommagement de la victime ». Aux fins de cette démarche, qui fait l’objet de l’article 27 du nouveau règlement d’application, les détenus, dans chaque prison, doivent avoir la possibilité de mener une réflexion.

326.Toujours de manière à redonner un sens à la législation susmentionnée, pour l’évaluation des propositions relatives au plan de traitement individualisé, il convient de tenir compte de tous les éléments du traitement et de toutes les initiatives mises en œuvre par l’établissement dans le cadre du projet, le détenu ayant officiellement convenu de participer. Il est, en conséquence, invité à signer un « pacte de traitement ».

327.Dans le plan de traitement ne figureront donc pas des propositions générales mais des engagements et des objectifs précis, auxquels le détenu a souscrit en connaissance de cause et en fonction desquels il sera possible d’évaluer à tout moment son comportement, sa capacité de respecter le « pacte », ainsi que les aménagements de circonstance et les modifications devant être apportés.

328.Si le plan de traitement des détenu ou des personnes internées est mené à bien, cela ne peut que contribuer à faire diminuer le nombre de récidives et à instaurer un climat général de sécurité. L’éducateur, responsable de chaque cas, est chargé de tâches bien précises qui lui sont exclusivement affectées, relevant de ses propres compétences et de son savoir-faire; il est aussi le rouage clef pour toutes les activités liées à l’observation et à la réalisation des projets de traitement individualisé. Á cette fin, et grâce à des techniques et à des méthodes de spécialiste, il établit un dialogue avec chaque détenu, pour l’inciter, en le motivant, à participer à un projet de traitement et, d’une manière plus générale, à un processus de resocialisation.

329.Il convient de souligner combien il est important de s’écarter d’une perspective dans laquelle l’action de l’éducateur réside simplement dans l’utilisation d’un seul instrument (l’entretien), alors que la masse de renseignements et d’évaluations que cet intervenant peut accumuler sur le détenu provient également de l’utilisation d’autres instruments tels que :

–l’observation participative, c’est-à-dire l’attention portée au comportement du détenu dans la vie quotidienne, pendant le temps réservé à la socialisation, lors de sa participation aux diverses activités de l’établissement, et pendant ses conversations avec sa famille;

–les rencontres avec le détenu dans des situations moins formelles que les entretiens dans le bureau de l’éducateur;

–les réunions avec des groupes de détenus.

330.L’éducateur n’est pas, ne doit pas être, et ne saurait être, si l’on veut être sérieux, la seule source de renseignements sur le détenu; c’est, en fait, en rassemblant les informations fournies par les autres acteurs institutionnels, en comparant et en faisant la synthèse des évaluations effectuées par chacun d’eux qu’on peut obtenir le résultat complet de l’observation et du traitement de l’intéressé.

331.C’est pourquoi, si l’éducateur – un expert en matière de comportement – a le contrôle exclusif du cas et mène personnellement une série d’actions hautement spécialisées, il faut à nouveau insister sur l’importance de la disposition législative qui permet de lui confier ce cas avec l’assistance du secrétariat technique du Groupe d’observation et de traitement. C’est à ce groupe plus large qu’appartiennent toutes les personnes qui ont des relations avec le détenu ou collaborent à son traitement, ou auquel il peut leur être demandé de se joindre, et l’éducateur doit s’occuper de la coordination des contributions de tous ses membres, qu’ils appartiennent ou non à l’établissement (gardiens de prison, travailleurs sociaux nommés par le directeur du centre, experts, enseignants dans le cadre de l’instruction générale ou de la formation professionnelle, travailleurs bénévoles, médecins, directeurs d’entreprises travaillant au titre d’un arrangement contractuel avec l’établissement). La circulaire du 1er août 1979 fait référence à cette tâche dans les termes suivants : «maintenir des liens entre les membres de l’équipe favorisant le travail en commun ». 

332.Dans le cadre de ses fonctions en tant que secrétaire technique, l’éducateur doit donc :

1.s’occuper de l’ouverture et de la mise à jour du dossier relatif à l’observation du détenu ou de la personne internée d’un point de vue technique et veiller, en engageant sa responsabilité, à ce que les délais officiels soient tenus;

2.s’assurer que le lancement de l’observation a été notifié aux intervenants du secteur, en particulier ceux du Centre de services sociaux pour adultes (CSSA) pour ce qui est de l’accomplissement des tâches relevant des compétences de ces services, et aux experts si nécessaire;

3.faire participer activement les intervenants extérieurs à l’administration en veillant à ce qu’ils soient bien intégrés pour bien collaborer, en prenant soin d’éviter toute redondance dans les actions menées et toute incohérence dans le modèle éducatif;

4.encourager les échanges entre tous les intervenants des services pénitentiaires et d’autres acteurs mentionnés au point 2, afin d’obtenir toutes les évaluations disponibles, planifier avec le groupe élargi toutes les actions et/ou tous les types d’approches qui s’imposent pour chaque détenu à chaque moment de sa peine de prison, convenir des propositions qui peuvent être mises en œuvre et voir si elles sont applicables à la fois du point subjectif (du détenu) et objectif (concernant les moyens dont dispose l’établissement).

5.à cette fin, s’occuper de faire tenir des réunions avant d’établir le rapport de synthèse officiel et le plan de traitement, ainsi que des réunions régulières pour procéder à toutes les vérifications et les mises à jour nécessaires.

333.Il sera procédé au renforcement de l’activité de supervision des groupes de travail de l’OTG (Groupe d’observation et de traitement) en prenant note des résultats et des évaluations des essais déjà effectués ou près d’être terminés dans le cadre du projet PANDORA et en tenant compte du modèle du secteur éducatif décrit ici.

334.Afin de distinguer le groupe élargi d’observation et de traitement du groupe plus restreint, présidé, conformément à l’article 29 du règlement d’application, par le directeur et composé d’intervenants (dans les prisons) et de l’expert, le deuxième groupe sera dénommé l’équipe. Il ne fonctionne officiellement que dans le cas où – le travail préliminaire de l’OTG étant considéré comme terminé – il faut rédiger les documents relatifs aux interventions extérieures, les comptes-rendus succincts ou les mises à jours d’observation, ou les propositions de traitement sur place ou à l’extérieur pour les soumettre au juge chargé du contrôle de l’exécution des peines compétent pour approbation /ratification, ou bien où il faut soumettre des rapports comportant des informations à l’intention dudit juge concernant les demandes de prestations.

Initiatives récentes

335.Les initiatives ci-après ont été récemment élaborée et mises en œuvre dans les secteurs éducatifs :

–la mise au point et le lancement du Projet « Argo », un programme d’essai dans le cadre duquel certains établissements mettront sur pied et gèreront un chenil, en vue de permettre au détenus d’acquérir de nouvelles compétences et donc de bénéficier de nouvelles possibilités d’emploi;

–un « pacte de solidarité » signé par le Département de l’administration pénitentiaire et l’UNICEF, pour la mise en œuvre d’initiatives locales destinées à préserver et à développer les relations de parentalité entre les détenus et leurs enfants. Également en coopération avec l’UNICEF, on a recueilli des signatures – de membres du personnel et de détenus – à titre de participation à la campagne « Infanzia rubata, infanzia violata » (« Enfance volée, enfance violée ») dont la promotion a été assurée par l’émission radiophonique « Zapping »;

–un Programme d’action destiné à accroître le nombre d’options spéciales de détention pour les toxicomanes. Dans le cadre de ce programme, il a été procédé à un exercice de surveillance des établissements et des sections de détention « douce » qui fonctionnent actuellement pour les toxicomanes. Le plan prévoit également l’extension du système de détention spéciale à certains types de délinquants « ordinaires » à titre expérimental.

Surveillance et collecte d’informations au niveau local

336.On travaille actuellement à réorganiser la collecte de données et d’informations au niveau local en élaborant des applications informatiques qui simplifient et « guident » la collecte de données et leur transmission aux directions et aux inspections régionales en appliquant les critères adaptés aux activités de direction, de coordination et de vérification exercées par cet office central. Des mesures ont été prises en conséquence pour permettre de :

–recueillir des données concernant la dotation en éducateurs de catégorie C1, C2 et C3 après recyclage, et plus particulièrement leur répartition entre les établissements afin de pouvoir quantifier les besoins en personnel;

–créer des logiciels permettant de conserver la trace du recrutement des détenus, conformément à la loi N°193/2000, à la fois pour permettre de s’assurer de l’efficacité de cette mesure législative et pour servir aux versements que cette administration est tenue de faire à l’Office des recettes et à l’INPS (l’organisme de sécurité sociale).

–mettre au point une application destinée à la collecte d’informations concernant les cours d’enseignement général, professionnel et universitaire organisés dans les prisons, ainsi que des données relatives aux caractéristiques de ceux qui les suivent et au taux d’abandon;

–élaborer un modèle de projet tenant compte de la nécessité de procéder à une évaluation de la qualité des actions et des projets mis en œuvre;

–mettre en place une structure commune, en ce qui concerne les questions qui relèvent de l’Office central, pour la mise au point des rapports annuels des établissement et des rapports semestriels des inspections régionales.

Système intégré d’enseignement général et de formation professionnelle

337.Pour ce qui est de la mise au point d’un système intégré d’enseignement général et de formation professionnelle, ce département a établi une collaboration permanente avec le Ministère de l’éducation pour mettre au point un modèle dans lequel les compétences des services impliqués aux différents niveaux sont clairement définies.

338.L’objectif de ce modèle est de permettre d’organiser l’enseignement intégré assuré dans le cadre des différents systèmes impliqués pour faire en sorte que ces activités d’enseignement et de formation répondent aux besoins de la population carcérale et mettent les détenus en mesure d’acquérir un ensemble de compétences qui soit un atout pour leur future réinsertion sociale. Des mesures ont donc été prises aux fins ci-après :

–commencer par établir des lignes directrices en vue de la création des commissions de l’éducation conformément à l’article 41.6 du décret présidentiel N° 230/2000, lesquelles sont des instruments uniques pour promouvoir une organisation de l’enseignement coordonnée avec les autres systèmes publics/privés impliqués dans ce secteur;

–mettre en place une collaboration avec le Ministère de l’éducation pour pouvoir coordonner les activités des différents acteurs qui participent au système d’enseignement et de formation professionnelle : régions, collectivités, organes publics et privés qui travaillent dans ce domaine, Ministère de l’emploi, Département des tribunaux pour enfants;

–mettre au point un Plan d’action pour 2003, avec l’accord du Ministre, pour assurer le fonctionnement efficace des commissions d’éducation prévues par l’article 41 du règlement d’application et la promotion des filières intégrées d’enseignement et de formation professionnelle.

339.Parmi les premiers effets de la mise en œuvre de ce système, on peut citer l’organisation, en novembre 2003, de 27 stages d’orientation et de formation professionnelles, d’une durée de 6 à 36 mois dans les établissements pénitentiaires administrés par la région de Lombardie. L’administration régionale a approuvé le principe d’une dotation de 1,7 million d’euros, qui couvre 75 % du coût global.

Enseignement universitaire

340.Dans ce domaine, le Bureau 4 a encouragé les inspections régionales de l’administration pénitentiaire à nouer des contacts avec des représentants d’universités et d’organes régionaux pour voir dans quelle mesure il serait possible d’établir des protocoles d’entente pour la création de centres universitaires destinés à la population carcérale, sur le modèle de ceux qui existent déjà au Piémont et en Toscane. Les inspections régionales de Trivineto, de Sicile, de Calabre et de Campanie ont également établi des contacts en vue de la création de centres universitaires de cette nature.

Bibliothèques

341.Convaincu que les bibliothèques des prisons devraient être utilisées comme lieux de dialogue libre, de rencontres et comme instruments de traitement permettant d’ouvrir les détenus aux valeurs, aux modèles et aux possibilités que le traitement est censé leur inculquer ou leur faire comprendre grâce à la participation indispensable du monde extérieur, l’Office a favorisé une nouvelle conception de la fonction des bibliothèques dans les prisons par le biais d’un projet qui prévoit :

–le « recentrage » du rôle du secteur du traitement en tant qu’élément moteur du projet de traitement conforme à la politique définie dans chaque établissement pénitentiaire;

–l’insertion progressive des bibliothèques de prisons dans le réseau d’ensemble des bibliothèques de leur localité, en tirant parti des expériences déjà en cours dans ce sens;

–le renforcement du rôle et de la fonction de la bibliothèque dans l’établissement;

–le renforcement du rôle d’appui à l’enseignement et à la formation professionnelle joué par les bibliothèques, non seulement par la mise à disposition de livres, mais également de produits multimédia et de cours d’enseignement à distance;

–la mise en œuvre de recherches ciblées dans ce domaine en coopération avec les universités et le Ministère de la culture, projet qui aura pour but non pas seulement de mener une enquête sur les services de bibliothèque actuellement offerts, mais aussi de définir les meilleures modalités et les meilleurs arrangements à prévoir pour harmoniser les éléments intérieurs et extérieurs aux établissements et organiser efficacement ce type de service dans les prisons.

Emploi et prisons

342.Pour ce qui est de l’emploi et des prisons, cet office a mis l’accent sur la création d’un réseau permanent de relations et d’initiatives prises en collaboration avec les acteurs institutionnels et les entrepreneurs privés pour confirmer et mettre en œuvre les processus existants qui font en sorte que le travail dans les prisons est conforme aux critères novateurs de faisabilité des entreprises, et permet d’accroître le nombre d’emplois pour les détenus. Á cet égard, il n’est pas sans intérêt de noter les initiatives ci-après prises par cette direction en 2002 et 2003 :

–relations avec le Ministère de l’emploi : la direction a récemment entrepris de collaborer étroitement avec le Ministère de l’emploi en vue de définir des synergies pouvant aider à la réinsertion sociale de la population carcérale. Les deux ministères ont reconnu qu’il devenait nécessaire de s’attacher avec une ardeur exceptionnelle à développer le secteur de l’emploi et des politiques de formation professionnelle, avec, comme objectif, d’accroître les possibilités d’emploi pour la population carcérale et de faire en sorte que le nombre de demandes d’emploi de détenus corresponde à celui des offres d’emploi de la part des entreprises et des coopératives sociales qui souhaitent les recruter. Un organe permanent a donc été créé, composé de responsables et de fonctionnaires des deux ministères, qui, à ce jour, s’est préoccupé des points suivants :

–mettre à jour et étendre le protocole d’entente existant à la lumière de la nouvelle situation économique et politique; le texte révisé a déjà été approuvé par le chef de département pour être ensuite transmis au ministre;

–conseiller – pour ce qui relève de ses compétences – le Ministre de l’emploi et des politiques sociales pour l’élaboration du « Plan d’action national de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale (2003-2005) »;

–affiner et remodeler les trois projets suivants lancés et financés par le Ministère de l’emploi dans les domaines qui relèvent de sa compétence :

–celui qui consiste à lui « confier l’automatisation des procédures de gestion de la base de données sur les caractéristiques des détenus en vue de l’emploi », financé dans le cadre du Programme opérationnel national de l’Objectif 3. Ce projet a pour objectif principal d’informatiser les CV des détenus, et il sera lancé à titre expérimental dans deux régions (Vénétie et Lombardie) choisies en raison de leur volonté de participation signalée au Ministère de l’emploi par leurs conseillers en matière d’emploi et de formation. La mise au point des CV sera effectuée par les commissions de l’emploi des prisons pilotes suivant les recommandations qui leur seront faites à une date ultérieure. Ce projet permettra d’obtenir des renseignements plus fiables (à la fois en quantité et en qualité) sur les compétences et l’expérience professionnelle des détenus que ceux qui sont disponibles actuellement; comme il sera établi conformément aux règles actuelles régissant l’emploi, il sera également applicable au monde « extérieur ».

–celui qui consiste à lui « confier les activités de consultation à l’appui des services publics de l’emploi pour favoriser la réinsertion professionnelle des détenus ». Cela implique en fait deux projets, l’un étant financé dans le cadre du Programme opérationnel national de l’Objectif 1 et l’autre dans le cadre du Programme opérationnel national de l’Objectif 3, qui visent à encourager l’emploi de détenus en promouvant des actions précises à l’intention tant des particuliers (accueil, orientation, accompagnement, aide à la réinsertion externe et encadrement des détenus) que des entreprises (information, conseils, études et recherches). En particulier, un système de liaison sera mis en place entre le détenu, l’administration pénitentiaire et le monde du travail. Pour ce qui est des programmes pilotes prévus, les régions qui ont été choisies pour faire partie de l’Objectif 1 (Cooperativa Centro Servizi di Matera) sont les Pouilles, la Basilicate et la Campanie, tandis que le Piémont, la Vénétie et la Toscane relèveront de l’Objectif 3 (Consorzio CGM);

–celui qui consiste à évaluer et promouvoir la loi N° 193/2000, la « loi Smuraglia ». L’Office est en train de procéder à une analyse des problèmes qui sont apparus, et dont beaucoup proviennent d’un manque de connaissance des possibilités offertes par la loi, pour lesquelles on est en train de mettre au point des solutions, y compris dans la version révisée des dispositions d’application qui sont en cours d’élaboration avec le Bureau des affaires juridiques du Ministère de la justice.

343.L’office a également mis en route, avec la participation des inspections régionales et des directions des prisons, un suivi local – encore en cours – en vue de recueillir des informations sur les entreprises et les coopératives qui recrutent des détenus ou des personnes relevant de l’article 21 du Code des prisons et sur le nombre d’usagers des services pénitentiaires qui ont été intégrés dans la vie professionnelle ou dans des programmes de formation professionnelle grâce aux prestations prévues par la loi N° 193/2000.

344.Á ce sujet, les données ci-après méritent d’être notées : entre le 1er juillet 2000 et le 31 décembre 2002, 422 détenus ont été recrutés grâce aux prestations prévues par la loi N° 193/2000, alors qu’entre le 1er janvier et le 31 mars 2003, ils étaient déjà 290. Á ce propos, cette administration est en train de mettre en place – en collaboration avec le Ministère des affaires économiques et des finances et l’INPS, comme prévu par l’article 6.2 du décret interministériel N° 87/2002 – les procédures nécessaires pour le contrôle des crédits d’impôts accordés, afin de s’assurer que les initiatives restent dans les limites des ressources économiques disponibles.

345.On a choisi une méthode d’enregistrement des données capable de garder trace des détenus embauchés par les entreprises et/ou les coopératives. En même temps, les directives nécessaires ont été diffusées auprès des bureaux locaux pour qu’ils puissent soumettre tous les trois mois à cette direction un choix de renseignements sur les détenus recrutés et les employeurs afin de rendre possible une évaluation des compétences requises par le monde des affaires selon les dispositions de l’article 5.3 de la loi susmentionnée.

346.Les inspections régionales ont également été invitées à soumettre des projets relatifs au travail dans les prisons elles-mêmes, en tenant compte à la fois du potentiel des établissements de leur district et de l’économie locale.

Programmes d’action

347.Les actions conçues pour encourager le monde des affaires à participer à l’organisation du travail dans les établissements sont des éléments clefs des deux programmes d’action présentés par la Direction générale pour 2003 et approuvés par le Ministère de la justice. Le premier, le N° 14, « Confier le service de préparation des repas dans les établissements pénitentiaires à des tiers », a déjà fait l’objet d’un financement et d’accords avec trois entreprises pour les prisons de Trani, Raguse et Rome Rebibbia Reclusione, tandis que, pour deux autres établissements, Turin Le Vallette et Rome Rebibbia Circondariale, des accords devraient être mis au point dans un avenir proche.

348.Le second, le N° 15, prévoit « la création d’un réseau permanent de communication entre des structures décentralisées de l’administration pénitentiaire et des Chambres de commerce pour la diffusion des informations sur les prestations prévues par la loi Smuraglia et la loi N° 381/1991 ». En l’occurrence, il s’agit de mettre à profit le travail actuellement effectué dans les prisons et d’encourager les entreprises à recruter des détenus. Á cette fin, une réunion a déjà eu lieu avec des représentants de l’UNIONCAMERE (l’organisation nationale des Chambres de commerce) en vue de mettre au point un accord facilitant et simplifiant les relations entre les structures décentralisées de l’administration et les Chambres de Commerce locales.

349.Á côté de ces programmes, quelques exemples récents d’actions conçues pour faciliter l’emploi de détenus méritent d’être signalés. Le nouveau centre d’appels du service d’annuaire « Info 12 » de Telecom Italia, le premier projet de télétravail pénitentiaire en Europe, fonctionne dans la prison San Vittore depuis le 25 novembre 2003. Quelque 30 personnes participent à ce projet (quatre surveillants et 26 détenus opérateurs). Dans les prisons de Florence, San Gimignano, Massa et Porto Azzuro, 63 détenus participent, depuis novembre 2003, au projet « Chance », un essai d’un an financé à hauteur de 558 000 euros par la région de Toscane dans le cadre du Fonds social européen, qui vise à faire bénéficier les détenus d’une formation adaptée à leurs aptitudes, à leurs aspirations et à leur future réinsertion sur le marché du travail du monde « extérieur ». On peut citer un dernier exemple, à savoir la prison Le Vallette de Turin, dans laquelle la région du Piémont et la Fondation de la Banque San Paolo, en collaboration avec le Gruppo Abele et la coopérative d’Arcobaleno, ont investi 650 000 euros pour la mise en route de deux usines de traitement de déchets hospitaliers dans lesquelles travaillent 20 détenus.

Protocoles d’entente

350.Un protocole d’entente a été mis au point entre l’administration pénitentiaire et Cisco Systems Italia, visant à inclure les prisons dans son programme de formation professionnelle pour la conception, la réalisation et le développement de réseaux informatiques. Ce projet expérimental prévoit le recrutement pour l’emploi des détenus issus de cette formation qui réussissent l’examen et obtiennent le diplôme correspondant.

Problèmes comptables

351.Le présent exercice financier a vu l’adoption d’une stratégie de dotation budgétaire anticipée en vue de tirer le meilleur parti des ressources économiques et de stimuler les activités de contrôle de la gestion exercées par les inspections locales, et mettre à profit les initiatives particulièrement novatrices. En conséquence, les inspections régionales ont perçu une dotation budgétaire initiale à laquelle des réductions ont été appliquées pour les établissements qui n’ont pas utilisé la totalité des fonds affectés à l’emploi pénitentiaire au cours du dernier exercice financier, ce qui a permis de faire des économies sur les postes qui étaient débiteurs.

II. INFORMATIONS SUR LES SITUATIONS ET LES CAS INDIVIDUELS DE SÉVICES PRÉSUMÉS

A. Prévention et investigation des comportements contraires aux principes de la Convention

352.L’opinion publique nationale et internationale a eu vent de quelques cas de mauvais traitements infligés aux détenus, tant à titre collectif qu’individuel, grâce à un rapport établi par les soins des principaux organes et associations travaillant dans le cadre de la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales au niveau mondial.

353.Les sections ci-dessous présentent une analyse de certains de ces incidents renvoyant aux prisons dans lesquelles ils se sont passés. Il ne faut pas perdre de vue que, dans l’état actuel des choses, toutes les informations nécessaires ne peuvent pas être disponibles, car les procédures auxquelles participent la police et la population carcérale sont encore en cours.

Secondigliano

354.Des poursuites pénales ont été engagées en 1993 pour des faits de mauvais traitements qui auraient été infligés à des détenus de la prison Secondigliano de Naples et ont abouti à l’acquittement de 60 surveillants. Des poursuites, engagées la même année à l’encontre de six autres surveillants accusés de diverses infractions, y compris d’avoir falsifié des dossiers et incité d’autres surveillants à commettre des infractions, n’étaient apparemment pas encore closes. En 1997, des avocats de Catane s’étaient plaints de ce que des détenus de la prison de Bicocca faisaient régulièrement l’objet de mauvais traitements de la part de surveillants et se disaient préoccupés par le fait que, parmi eux, se trouvaient des fonctionnaires qui avaient été mutés de Secondigliano où une enquête était déjà ouverte à leur sujet pour des faits allégués de mauvais traitements. En octobre, à la suite d’une enquête criminelle concernant d’autres allégations de mauvais traitements à l’égard de détenus de Secondigliano entre juin 1995 et février 1999, 20 surveillants sont passés en jugement en 2000.

Bolzano

355.Á la suite de plaintes déposées auprès des autorités judiciaires par des détenus de la prison de Bolzano, une enquête a été ouverte en 2001 concernant 25 surveillants et un médecin au sujet d’allégations selon lesquelles, entre 1994 et 1999, des détenus étaient régulièrement placés en cellule d’isolement et roués de coups. L’enquête n’est pas terminée.

Sassari

356.Á la fin de mars 2000, les détenus de l’établissement pénitentiaire régional de Sassari ont organisé une manifestation de protestation contre le manque de nourriture pendant une grève de la direction de la prison, à la suite de quoi certains d’entre eux ont provoqué des troubles et quelques uns se sont révoltés; en raison de cela, et du fait que la prison était surpeuplée, beaucoup ont été transférés dans d’autres prisons régionales.

357.Au cours de cette opération et, selon l’arrêté décrétant le placement de la direction en détention préventive, certains comportements sont apparus déraisonnables et contraires à la déontologie pénitentiaire. Il a donc été décidé de ne plus transférer de détenus à la prison de Sassari, au motif que, selon les déclarations de certains détenus, ces mesures seraient considérées comme des mesures de rétorsion. Les capacités d’accueil à peine suffisantes des prisons sardes obligeraient les autorités à transférer les détenus hors de cette région.

358.Tout cela a entraîné l’ouverture de deux enquêtes parallèles, l’une pénale et l’autre administrative. Á la suite des inspections, les pouvoirs publics ont décidé, quelques jours après les événements en question, d’appliquer les mesures adoptées, à savoir démettre les principaux responsables de leurs fonctions dans cet établissement et ouvrir des enquêtes disciplinaire et judiciaire. Il convient de signaler que, lorsqu’elles ont été closes, les fonctionnaires qui ont été rétablis dans leurs fonctions ont été nommés à de nouveaux postes pour leur éviter tout contact avec les détenus impliqués dans les événements.

Pistoia

359.En mars 2002, cinq jeunes, dont trois Albanais, ont porté plainte contre des fonctionnaires de police de Pistoia et un « videur » d’une discothèque, alléguant qu’à la suite d’une dispute verbale avec le videur, ils avaient été arrêtés par les policiers à l’extérieur de la discothèque, et emmenés au commissariat où au moins cinq policiers et le videur se sont livrés à des voies de fait sur eux. L’un des détenus a dû être hospitalisé et traité pour une fracture du nez, un tympan éclaté et une lésion à un testicule. Les policiers, de leur côté, avaient porté plainte contre les jeunes, pour injures et coups et blessures à agents de la force publique. Ils ont déclaré avoir arrêté les jeunes à l’intérieur de la discothèque et être intervenus pour mettre fin à une bagarre entre eux et le videur au commissariat. Cinq policiers ont été ultérieurement accusés de coups et blessures, falsification de preuves et diffamation, à quoi s’est ajouté, à l’encontre de l’un d’entre eux, insultes et arrestation illégale. En décembre, après négociations entre le parquet et les avocats, trois des policiers ont été condamnés à des peines d’emprisonnement de 11 à 14 mois, tandis que les deux autres étaient renvoyés devant une juridiction de jugement.

B. Affaires collectives

Les « événements de Naples »

360.Les 15, 16 et 17 mars 2001, Naples a accueilli le « Troisième forum mondial » organisé par le Gouvernement italien en coopération avec l’Organisation des Nations Unies, l’OCDE, l’Union européenne et plusieurs fondations et centres universitaires italiens et internationaux. Le 17 mars a eu lieu la manifestation nationale de clôture, à laquelle ont participé environ 7 000 personnes.

361.Dès le début, plusieurs incidents caractéristiques d’un climat d’intolérance ont éclaté. Le plus grave s’est produit sur la place Municipio où la police s’était massée et où un groupe d’émeutiers s’est mis à lancer quantité de pierres et d’objets contondants divers. Soucieuse de maintenir les manifestants sous contrôle, la police a chargé à plusieurs reprises et permis ainsi à la situation de revenir lentement à la normale.

362.La police a arrêté un certain nombre de manifestants et pris les mesures nécessaires en vue de leur inculpation et de leur placement en détention. Á ce jour, plusieurs procédures criminelles sont toujours pendantes devant le bureau du procureur de Naples, y compris contre des fonctionnaires de la Polizia di Stato (police de l’État) soupçonnés d’avoir molesté des manifestants. Le 26 mai 2003, le bureau du procureur de Naples a demandé que les personnes inculpées passent en jugement.

363.Il convient aussi de noter que, sur mandat d’assignation à domicile délivré par le magistrat instructeur du tribunal de Naples, les policiers mis en cause ont été suspendus à titre de précaution à compter du 26 avril 2002, conformément à l’article 9.1 du décret présidentiel N° 737/1981. Par une disposition du 11 mai 2002 qui faisait suite à l’annulation, le même jour, du mandat d’assignation à domicile par la chambre d’appel du tribunal, ces mêmes policiers ont été rétablis dans leurs fonctions, conformément à l’article 9.3 du décret présidentiel N° 737/1981, dès le lendemain de leur libération.

364.Les procédures criminelles sont toujours en instance au bureau du procureur du tribunal de Naples, les auditions préliminaires ayant été fixées par les magistrats instructeurs au18 novembre 2003.

Les « événements de Gênes »

365.Les 19, 20 et 21 juillet, Gênes a abrité le Sommet du G8. Des événements particulièrement graves se sont produits au cours des manifestations organisées à cette occasion. Les extraits suivants du rapport final de l’enquête menée par la Commission mixte (qui a tenu ses délibérations dans le cadre de la première commission permanente du Sénat) à laquelle ont été transmis les résultats de l’enquête administrative diligentée par le Ministre, retracent bien ce qui s’est passé.

366.L’enquête préliminaire ouverte pour déterminer si des membres de la police s’étaient rendus pénalement responsables de violences à l’encontre des manifestants est toujours en cours au bureau du procureur de Gênes. Le 12 septembre 2003, le même tribunal a prononcé la clôture de l’enquête préliminaire.

19 juillet

367.Au plan de l’ordre public, aucun incident majeur ne s’est produit le 19 juillet : le défilé des « Migrante » organisé par le Forum social de Gênes s’est dispersé pacifiquement et sans incident. Cet événement, qui avait attiré de nombreux manifestants, s’est déroulé dans une atmosphère sereine et selon les prévisions, en même temps que la manifestation des femmes iraniennes. Plusieurs incidents violents ont éclaté le soir : le siège provincial des carabiniers du Forte San Giuliano a été la cible de jets de pierres et d’actes de vandalisme.

20 juillet

368.Les 20 et 21 juillet, l’intention de faire preuve de mansuétude en matière de maintien de l’ordre s’est heurtée à des provocations massives, résultat de la fusion – que les organisateurs n’avaient pas empêchée – d’une foule d’environ 10 000 manifestants avec les marcheurs pacifiques. Il s’est avéré impossible de séparer les manifestants violents des non violents. Les violences ont aussi été provoquées par des groupes de casseurs en noir (le « bloc noir ») qui s’étaient infiltrés parmi les manifestants pacifiques. Selon les déclarations de représentants de la police, ces infiltrations ont eu lieu pendant la manifestation et ont en partie dégénéré en échauffourées de rue et sous forme de tentatives, de la part de certains manifestants, de renverser les barricades érigées pour protéger la « zone rouge ».

369.La police a commencé à charger contre les manifestants alors qu’ils traversaient une zone non interdite (le carrefour de la rue Tolemaide et du Corso Torino), mais qui se trouve à proximité de la place Verdi , où le défilé devait se disperser selon les instructions prises le 19 juillet par le questore.

370.Il ressort du rapport officiel établi par l’officier de police responsable du quartier et de la déclaration faite par le questore, M. Colucci, à l’audience, que les unités de police arrivées rue Tolemaide suite à un rapport de la salle de radio les informant d’échauffourées avant même l’arrivée de la manifestation , ont été victimes d’un déluge de cocktails Molotov et de pierres, et que les premiers rangs des manifestants, pour la plupart des intrus munis de moyens de protection divers, mettaient le feu à des pneus et à des véhicules. Les incidents avaient éclaté avant même que le défilé n’atteigne la place Verdi dans l’intention manifeste de forcer le passage des limites établies. Lors de son audition, le Ministre Scajola a informé la Commission d’une enquête administrative menée par le ministère lui-même pour faire la lumière sur le déroulement précis des événements décrits plus haut.

371.Les événements dramatiques de la place Alimonda, où Carlo Giuliani a trouvé la mort, se sont déroulés dans ce climat d’échauffourées entre groupes de manifestants violents et policiers au cours de l’après-midi du 20 juillet.

372.Un contingent d’une centaine de carabiniers, qui était intervenu rue Caffa pour aider d’autres unités déjà engagées dans le quartier, s’est trouvé encerclé par des groupes de manifestants et contraint de battre en retraite dans le désordre en direction de la place Alimonda. Sur la place, deux jeeps de carabiniers qui devaient apporter un soutien logistique aux unités ont été isolées par le groupe de manifestants et attaquées. Un véhicule a réussi à s’échapper alors que l’autre se trouvait bloqué et était la cible d’une violente attaque. L’un des carabiniers à bord du véhicule, assiégé par des douzaines de manifestants, a fait feu sur un des manifestants, Carlo Giuliani, et l’a tué. Ce dernier était sur le point de lancer un extincteur sur le carabinier qui avait reçu un coup violent à la tête, asséné par un autre manifestant armé d’une barre de fer. S’agissant de cet épisode particulier, et étant donné que l’affaire est toujours pendante devant le tribunal qui devra se prononcer sur les responsabilités individuelles des personnes en cause, la Commission mixte a axé son attention sur l’ensemble des circonstances qui ont abouti à ce tragique événement.

21 juillet

373.Le 21 juillet, des accrochages, accompagnés de dommages aux immeubles privés, aux commerces, aux véhicules et au mobilier de rue, ont à nouveau mis aux prises manifestants et policiers. Les plus fortes tensions se sont produites quand la tête du cortège a rencontré un groupe d’une centaine de personnes qui affrontaient la police, provoquant des incidents, l’utilisation de gaz lacrymogène et des charges de la part de la police. Au cours de la manifestation, la police a fouillé plusieurs fourgonnettes soupçonnées de contenir des objets susceptibles de servir d’armes et, dans certains cas, a confisqué le matériel et procédé à des arrestations.

374.Après le défilé final du Forum social de Gênes, en raison des affrontements violents qui avaient eu lieu, le questore de Gênes a pris des dispositions pour que des patrouilles aient lieu dans la zone considérée.

375.Sur la base des informations qui parvenaient, il a été convenu que la DIGOS (Division d’investigations générales et d’opérations spéciales) et la brigade mobile, avec le concours d’une unité chargée de la sécurité des locaux en question, procéderaient à une perquisition dans l’école Pertini (anciennement Diaz) rue Battisti. L’opération a débuté vers 23h30-minuit. Différentes versions ont été données de la descente de police en ce qui concerne la succession des faits et les lieux effectivement fouillés. En même temps, des agents de la police de l’État ont effectué une descente dans les locaux de l’école Pascoli-Diaz qui abritait le centre de presse et le siège du Forum social de Gênes, ainsi que la salle des premiers secours pour les personnes blessées lors des manifestations, située en face du bâtiment qui était fouillé. Au dire du président de la Fédération de la presse italienne, Serventi Longhi, la police a touché au matériel qui se trouvait dans ces locaux et l’a endommagé.

376.Á la suite de cette perquisition, des armes, des objets qui pouvaient servir d’armes et du matériel que, selon le rapport d’enquête, on pouvait attribuer aux groupes marginaux les plus violents responsables des graves incidents qui avaient eu lieu à Gênes lors du Sommet du G8, ont été saisis.

377.Au terme de cette opération, 93 personnes ont été arrêtées, dont trois journalistes. Au cours de l’opération menée à l’école Pertini-Diaz, bon nombre de personnes présentes dans le bâtiment et 17 agents de police, dont 15 de la brigade mobile, ont été blessés; 62 personnes ont été arrêtées. Cet épisode est peut-être celui qui illustre le mieux les défaillances de l’organisation et les carences opérationnelles apparues au cours d’un événement international de cette ampleur.

378.Lors de sa réunion du 12 juin 2000, la Commission provinciale pour l’ordre public et la sécurité, qui devait décider des modalités selon lesquelles la police procéderait pour héberger les individus arrêtés au cas où des désordres se produiraient pendant le Sommet, avait décidé d’installer à Gênes des centres d’enregistrement et de soins médicaux dans des locaux situés à une certaine distance des endroits où devaient avoir lieu les manifestations, les détenus devant être transférés ultérieurement vers des prisons hors de la ville.

379.Cette décision s’expliquait par la nécessité d’éviter de faire appel aux prisons génoises, situées en pleine ville, où plusieurs manifestations étaient prévues. Il avait également été décidé de mettre en place deux autres centres, l’un dans la caserne des carabiniers de Forte San Giuliano, pour les individus arrêtés par les carabiniers, et l’autre dans la caserne de Bolzaneto de la brigade mobile de la police de l’État, pour ceux arrêtés par les autres forces de police. L’un et l’autre ont été qualifiés, dans une ordonnance du Ministre de la justice du 12 juillet 2001, de « sites utilisés à des fins de détention comme annexes des centres d’enregistrement et de soins médicaux des case circondariali (maisons d’arrêt hébergeant des personnes en attente de jugement ou condamnées à de courtes peines) de Pavie, Voghera, Vercelli et Alessandria et la prison d’Alessandria ». Cette ordonnance précise que « la gestion administrative des activités relevant de la compétence du service pénitentiaire dans les structures susmentionnées est à la charge de la direction de la prison de Gênes-Pontedecimo, comme prévu par le directeur du bureau de coordination du G8 de l’administration pénitentiaire ».

380.Pendant le temps où il a été en service, le centre de Bolzaneto a hébergé 222 personnes au total. Des équipes détachées de la brigade mobile sont venues renforcer le personnel pénitentiaire, mais uniquement en dehors des bâtiments utilisés pour loger les détenus et prêter main forte à leurs collègues pour transférer les détenus vers les prisons. Après le 24 juillet, cette structure n’a plus servi à des fins de détention comme annexe des centres d’enregistrement et de soins médicaux. Á partir du 26 juillet, les quotidiens ont commencé à publier des témoignages de première main sur les violences et les incidents dont les détenus avaient été victimes dans ce centre. En conséquence, le Ministre de la justice et le chef de la police ont ordonné l’ouverture d’une enquête. Le 30 juillet et le 4 septembre, deux rapports ont été remis respectivement au chef de la police et au Ministre de la justice. Le deuxième rapport a été établi par la commission d’inspection créée le 2 août pour enquêter sur « les actes de violence physique et psychologique que des agents de l’administration pénitentiaire auraient commis auraient commis à l’encontre d’individus écroués à la prison de Gênes-Bolzaneto. » Le premier projet de rapport retrace dans le détail le mode de fonctionnement de la prison et évoque 11 cas de violence dont la presse a fait état ou qui ont été rapportés par les détenus, ainsi que d’autres dont une infirmière en poste à Bolzaneto a été témoin.

Conclusions

381.Le rapport d’enquête dont on a reproduit ici plusieurs extraits conclut par une série de constatations de la Commission mixte. De façon générale, la Commission a souligné le succès du Sommet du G8 à Gênes. Le Sommet a atteint tous ses objectifs quant au fond, aux aspects administratifs et logistiques et à la sécurité et à l’ordre public, en dépit de certaines carences au plan de l’organisation que l’on pouvait attribuer au gouvernement précédent (formation du personnel de police et relations avec les mouvements anti-mondialisation).

382.Cette réussite était à mettre au compte de la décision du gouvernement Berlusconi de s’en tenir à l’ordre du jour dressé par le gouvernement Amato, tout en le développant et en le complétant. Le gouvernement a aussi suivi les recommandations du Président de la République et décidé de faire participer les pays pauvres de la planète aux initiatives conçues pour leur venir en aide, protéger les droits de l’homme et défendre l’environnement. Les pays qui ont participé au Sommet ont donné leur accord à ce choix, qui était au départ une proposition de travail italienne avant de déboucher sur les conclusions politiques du Sommet lui-même.

383.Il faudrait relever que, pour la première fois, les questions considérées comme méritant l’attention d’un sommet du G8 n’étaient pas très éloignées de celles qui inspirent les éléments vraiment pacifiques des groupes anti-mondialisation, fait qui suscite l’espoir d’un dialogue constructif à l’avenir. Á la lumière des différentes auditions, des informations et des données recueillies, la Commission mixte a souligné que le Forum social de Gênes est un mouvement composite comprenant :

–une aile pacifiste non violente, constituée principalement de mouvements inspirés par le christianisme et dont l’objectif est de donner la parole aux pauvres de la planète face aux processus de mondialisation de l’économie;

–une aile « politisées » qui adopte des positions allant de l’idée de fomenter des troubles en tant que violations symboliques au sabotage des processus de prise de décision (dans le cas de Gênes, les mots d’ordre étaient de « pénétrer dans la zone rouge »);

–une aile violente formée par un bon nombre d’éléments de l’aile politisée (par exemple les « tuniques blanches » et les groupes du centre social) qui se livrent à des agressions graves contre les représentants des institutions et cherchent à justifier ce comportement en instrumentalisant et en déformant la notion de désobéissance civile.

384.Á ces groupes, il faut en ajouter d’autres inspirés par la tactique de guérilla, dont la philosophie fondée sur le sabotage se traduit en attaques destinées à causer de vrais dommages, rechercher la confrontation directe et causer l’insurrection dans les rues (par exemple, les casseurs en noir). Dans une situation de cette nature, la ligne choisie par le gouvernement Berlusconi et les mesures prises par la police – selon la Commission mixte – étaient, du point de vue du maintien de l’ordre, indubitablement positives.

385.Le gouvernement Berlusconi s’est fixé l’objectif d’engager le dialogue avec le Forum social de Gênes pour permettre au Sommet du G8 de travailler sans problème et de sauvegarder pleinement le droit d’autrui d’exprimer et de manifester pacifiquement son désaccord. Dans cet esprit, des crédits ont été ouverts pour fournir des facilités au Forum social de Gênes et la police a reçu des instructions précises censées lui permettre de gérer les problèmes de maintien de l’ordre avec modération et fermeté. C’est ce qui a conduit également à l’engagement de défendre la « zone rouge » aussi efficacement que possible en déployant un grand nombre de policiers et en contrôlant la bonne marche des manifestations, lesquelles, lorsqu’elles se tenaient dans le calme, se sont déroulées comme prévu.

386.La police n’a pas ménagé ses efforts et, ce faisant, a payé un lourd tribut, notamment en ce qui concerne la sécurité physique de ses agents. On ne saurait nier les défaillances et la confusion en matière de coordination, mais il ne faut perdre de vue que la police à eu à faire à 6 000 à 9 000 individus violents (sur un total de 200 000 personnes (selon le Ministère de l’intérieur) ou de 300 000 (selon le Forum de Gênes)). Elle s’est trouvée face à l’explosion d’une véritable guérilla urbaine qui a pris des formes diverses et, vu sa radicalité et le fait qu’elle s’est développée au sein de manifestations de masse, aurait pu se solder par un bilan beaucoup plus lourd.

387.En fait, tout au long du Sommet du G8, l’aile violente et subversive des manifestants a profité de la tolérance dont faisait preuve le mouvement pacifique. Ce dernier n’a rien fait pour signaler, isoler ou expulser les éléments violents et subversifs, qui ont eu toute liberté pour se déplacer avec les défilés ou marcher à leur tête, ou encore, la plupart du temps, se dissimuler dans le corps du cortège.

388.Les forces de l’ordre, exposées à des attaques déloyales et empêchées d’intervenir, se sont retrouvées dans l’impossibilité de recourir aux techniques éprouvées qui sont les leurs pour contrôler les défilés, empêcher les troubles, isoler les éléments violents et protéger les manifestants pacifiques. L’instrumentalisation et la distorsion de la notion de désobéissance civile par des éléments violents ont fini par entraîner nombre des manifestants pacifiques dans des comportements qui ont incité la police à riposter, au détriment de l’esprit pacifique, profond et sincère des membres du mouvement vraiment non violents, très nombreux dans la zone disputée. Il faudrait aussi insister sur la nécessité, apparue lors de l’enquête, pour les forces de police, de mieux coordonner leur action à l’avenir, et, pour les institutions chargées de l’information et de la prévention dans les autres pays, de renforcer leur coopération, y compris par le biais de l’harmonisation des législations. La Commission mixte a ensuite analysé et mis en lumière les facteurs qui ressortaient de son enquête s’agissant de trois des incidents qui ont fait l’objet des débats les plus vifs.

389.En ce qui concerne les troubles survenus rue Tolemaide, on a constaté qu’ils avaient donné lieu à deux versions différentes. Selon la première, le défilé avait été refoulé parce qu’il s’était transformé en une manifestation violente après être entré en contact avec le barrage de police au bout de l’itinéraire autorisé, les manifestants s’en prenant à la police et essayant de forcer la barrage. Selon l’autre version, la police avait chargé les manifestants en l’absence de toute provocation violente.

390.Au fur et à mesure que les heures passaient, les manifestants ont eu un comportement qui a déclenché une série d’affrontements violents et désordonnés dans tout le quartier, débouchant notamment sur des attaques sur la place Alimonda et dans la rue Caffa. C’est dans ces conditions que, après avoir été isolée, la Land Rover a été attaquée et que les trois carabiniers qui étaient à bord se sont trouvés en danger. Placanica a sorti son arme de service et a tiré le coup qui a tué Carlo Giuliani juste au moment où ce dernier lançait un extincteur sur le policier. Voilà comment un événement qui n’aurait jamais dû se produire – la perte d’une vie humaine – est arrivé. Cet événement trouve sa cause fondamentale dans la violence aveugle de groupes d’extrémistes qui mettent en danger la vie des jeunes qui se trouvent mêlés à leurs agissements criminels. Le seul point positif à signaler dans cette succession malheureuse d’événements a été le rôle joué par le père de Giuliani qui, faisant preuve de civisme et d’un grand sens des responsabilités, a lancé un appel aux manifestants pour leur demander de se comporter raisonnablement et a tout fait pour rétablir le calme.

391.Pour ce qui est de l’épisode de l’école Pertini-Diaz, la Commission mixte a noté la légitimité de la décision d’effectuer une perquisition, même si elle n’avait pas en sa possession le document qui aurait pu l’établir officiellement. Elle a relevé plusieurs défaillances dans la coordination aux niveaux décisionnel et opérationnel (surtout au plan de la chaîne de commandement et de son modus operandi). Il semblait ressortir clairement des auditions et des informations obtenues par la Commission que la décision d’effectuer la perquisition reposait sur la conviction profonde que des armes avaient été cachées dans l’école. Il apparaissait aussi clairement que la décision de déployer une force opérationnelle suffisante pour faire face à une forte résistance à la fouille était fondée.

392.Cette résistance déterminée à la police, bien documentée, était telle qu’elle a exigé de recourir à un déploiement de force considérable pour affronter et dominer les occupants, afin d’assurer la sécurité du personnel et de réaliser les objectifs de l’opération de police. Il faut dire aussi qu’il est apparu des informations selon lesquelles certains excès auraient été commis par des policiers. Il appartient désormais à l’autorité judiciaire compétente, dans l’activité de laquelle la Commission mixte n’a pas pu et ne veut pas non plus s’immiscer, d’établir les faits.

393.En ce qui concerne les événements dont la prison de Bolzaneto a été le théâtre, la Commission a noté plusieurs choses. Premièrement, elle a constaté que la nécessité et la légitimité de la mise en place de cette structure (et d’une autre similaire dans la prison de San Giuliano) n’étaient pas en question, non plus que la légitimité évidente, notamment sur le plan administratif, de la gestion des événements par le personnel de la prison (police pénitentiaire). Plus précisément, du point de vue de l’administration et de la gestion, il est hors de doute que les règles et procédures applicables aux examens médicaux, fouilles, notamment fouilles au corps, des détenus et à leur traitement en attendant leur transfert en prison, l’objectif étant de maintenir, sans la moindre interruption, l’ordre parmi les détenus vu les relations difficiles entre les détenus eux-mêmes et entre eux et le personnel, ont été pleinement respectées.

394.La longueur du temps passé dans cette structure, qui a fait l’objet de plaintes, peut s’expliquer par le grand nombre de personnes arrêtées, le fait que des groupes nombreux sont arrivés en même temps et la décision inattendue de réduire de sept à deux le nombre de centres de détention provisoires. Pour ce qui est des prétendus actes de violence, sur lesquels une enquête judiciaire est en cours, on estime que, comme dans le cas de l’école Diaz-Pertini, il faudrait attendre les conclusions de l’autorité judiciaire. Le fait est que les incidents en question, s’ils se sont effectivement produits, sont très graves. La Commission a aussi pris acte des rapports de la questura (bureau chargé des services de police, du maintien de l’ordre et des services administratifs connexes) de Gênes, qui aurait obtenu la preuve, au moyen d’« écoutes », que certaines des personnes arrêtées s’étaient arrangées auparavant pour formuler des accusations sans fondement contre le personnel de la structure, encore que, pendant son audition, le questore n’ait pas précisé de quelle structure il s’agissait. Un autre point crucial semble être l’enquête diligentée par le Département de l’administration pénitentiaire, car un individu qui aurait pu être soumis à un examen dans le cadre de cette même enquête a été lui-même nommé à la commission créée à cet effet.

395.La Commission mixte a rappelé que la violence n’est pas et n’a pas à être employée comme instrument d’action politique et que, dans un pays démocratique, la légalité est une valeur fondamentale. Elle a souligné l’inviolabilité des principes constitutionnels de liberté d’expression et de respect de l’individu, même et peut-être surtout lorsqu’il est privé de liberté suite à une arrestation, ainsi que la nécessité de protéger la sécurité des citoyens et d’assurer le maintien de l’ordre. La Commission a exprimé l’espoir que, dans le cas d’actes criminels graves ou de manquements à la discipline, les autorités judiciaires et les organes administratifs identifieraient les responsables et veilleraient à ce que des peines appropriées leur soient appliquées.

C. Cas individuels de mauvais traitements présumés

396.Á la suite de rapports concernant des plaintes portant sur des faits de nature criminelle crimes et des sévices qui auraient été commis par des agents de l’administration pénitentiaire police pénitentiaire) contre des détenus, 52 et 138 procédures pénales ont été engagées en 1999 et 2000 respectivement, dont 145 sont encore pendantes; en ce qui concerne les affaires qui ont abouti à un acquittement ou à un non-lieu, les autorités ont renvoyé à l’inspecteur régional les cas d’infraction à caractère disciplinaire.

Acquaviva

397.Luigi Acquaviva est mort dans la prison sarde de Bad’e Carros en janvier 2000, moins de 24 heures après avoir pris un gardien en otage pendant quatre heures et lui avoir passé un nœud coulant autour du cou. Des enquêtes administrative et criminelle ont été ouvertes, concernant six surveillants et le directeur de la prison, à la suite d’allégations selon lesquelles son décès n’aurait pas été dû à un suicide, contrairement à ce qu’affirmait la direction de la prison. L’autopsie et les examens de laboratoire ont révélé que son corps, qui avait été retrouvé pendu dans sa cellule, présentait d’importantes lésions traumatiques subies avant le décès ainsi que des lésions au cou compatibles avec un suicide. Le procès des surveillants accusés d’être responsables de la mort d’Acquaviva s’est ouvert en décembre 2003.

Ahdidou

398.En septembre 2001, le bureau du procureur de Salerne a demandé qu’un caporal de carabiniers soit inculpé du meurtre de Mohammed Ahdidou, un Marocain âgé de 24 ans tué par balle en janvier alors qu’ils ne portait pas d’arme, et que six autres carabiniers soient inculpés de faux témoignage après avoir menti sur les circonstances de la fusillade. Les enquêtes sont toujours en cours.

Akpan

399.En octobre 2000, près de trois ans après l’inculpation de deux policiers, un tribunal de Catanzaro les a jugés coupables d’abus de pouvoir et de coups et blessures sur la personne de Grace Patrick Akpan en février 1996. Les policiers ont été mis à l’épreuve pendant deux mois avec obligation d’acquitter les frais de procédure. Les accusations qui pesaient sur Grace Patrick Akpan (refus de décliner son identité aux agents de police, insultes, refus d’obtempérer et coups et blessures sur la personne desdits agents) ont été levées.

C.A.

400.Il s’agit d’un homme (C.A.) surpris par les carabiniers en flagrant délit de vente de drogues et emprisonné sur ordre du tribunal de Bari le 17 septembre 1999. Après avoir examiné le détenu, conformément au règlement de la prison, le médecin de service, se doutant qu’il était blessé, a ordonné une radiographie de sa mâchoire, laquelle a confirmé ses soupçons, de sorte que le détenu a été envoyé sur le champ à l’Hôpital universitaire de Bari, tandis que les autorités judiciaires étaient informées de la chose.

401.Après trois jours, il a été renvoyé en prison et les magistrats ont ordonné qu’une enquête soit ouverte, le détenu ayant déclaré, pendant qu’il était à l’hôpital, que les carabiniers l’avaient frappé. Cette accusation de voies de fait ayant entraîné des lésions graves portée à l’encontre des carabiniers a motivé des enquêtes approfondies qui ont démontré que les lésions pouvaient avoir été causées avant la date déclarée officiellement, et qu’elle avait certainement été provoquée par un fort ressentiment à l’égard de plusieurs procès verbaux des carabiniers niant qu’ils se fussent rendus coupables des actes en question.

Koadjo

402.En 2001, le chef de la police de Palerme a présenté ses excuses à une Ivoirienne, Leontine Koadjo, pour la manière dont elle avait été traitée, en avril, au bureau des étrangers rattaché au quartier général de la police de Palerme. Des poursuites pénales et une procédure disciplinaire ont été engagées à l’encontre d’un fonctionnaire de police qui l’a physiquement agressée sans avoir été provoqué, après une demande de renseignements. Elle a dû être hospitalisée pour une fracture faciale.

Labita

403.En avril 2001, la Cour européenne des droits de l’homme a déclaré l’Italie coupable de n’avoir pas mené « une enquête approfondie et efficace suite aux allégations crédibles » de mauvais traitements dont se seraient rendus coupables des surveillants de la prison de Pianosa aux dires de Benedetto Labita en octobre 1993. Ce dernier avait prétendu que, en compagnie d’autres détenus, il avait régulièrement subi des sévices physiques et psychologiques, surtout entre juillet et septembre 1992.

Romeo

404.En 2001, le ministère public a demandé que 12 surveillants soient inculpés de meurtre et 12 autres d’incitation et d’aide au meurtre à la suite du décès de Francesco Romeo dans la prison de Reggio Calabria en 1997. L’autopsie et les examens de laboratoire ont permis de conclure que ses graves blessures n’étaient pas compatibles avec une chute du sommet du mur d’enceinte, ainsi que le prétendait l’administration de la prison, mais qu’il était mort d’une fracture du crâne causée par des coups de matraque. Il est clairement apparu que les comptes rendus de services établis au moment des incidents avaient été falsifiés.

Bouabib

405.En avril 2002, une enquête a été ouverte à l’encontre de trois officiers de carabiniers soupçonnés de meurtre. Des habitants de Ladispoli ont déclaré avoir vu, en mars, un immigré clandestin tunisien, Edine Imed Bouabib, monter dans un véhicule des carabiniers quelque 30 minutes avant que son cadavre ne soit découvert près d’une autoroute. L’autopsie et les examens de laboratoire ont apparemment permis d’établir qu’il était mort d’une fracture du crâne, après avoir reçu trois coups portés à l’aide d’un objet lourd.

Tbina Ama

406.En février 2002, 10 personnes, dont des surveillants et des membres du personnel médical de la prison de Potenza ont été mis en examen en vue d’une possible inculpation de coups et blessures graves et de falsification de certificats médicaux. Une enquête criminelle avait été ouverte en août 2000 après que Tbina Ama, détenu tunisien, était grimpé sur le toit de la prison pour protester contre des sévices qui, disait-il, lui avaient été infligés la veille par des membres du personnel pénitentiaire. L’examen de laboratoire effectué à la demande du ministère public avait permis de conclure que les lésions qu’il portait étaient compatibles avec ses allégations. Tbina Ama s’est suicidé en mai 2001.

Sa’id al-Sakhri

407.Muhammad Sa’id al-Sakhri et sa famille ont débarqué à l’aéroport de Milan le 23 novembre 2002, en provenance de Bagdad via Amman. La famille, qui vivait en exil à Bagdad depuis plus de 11 ans, a demandé l’asile politique à son arrivée en Italie. Au dire de son avocat, qui n’a pas reçu l’autorisation de la rencontrer, l’entretien relatif à la demande d’asile a été refusé par les autorités italiennes, qui ont opposé à cette demande une fin de non-recevoir. Cette famille a ensuite été déportée en Syrie le 28 novembre.

408.Selon les informations obtenues, Muhammad Sa’id al-Sakhri est mis en isolement dans une antenne des renseignements militaires à Alep dans le nord de la Syrie. Il fait peut-être l’objet de tortures ou de sévices en raison de son opposition au Gouvernement syrien. En 1982, selon les informations disponibles, il a été accusé par les autorités syriennes d’appartenir à une organisation interdite, les Frères musulmans, dont la faction armée a été impliquée dans de violents affrontements avec les forces de sécurité syriennes à la fin des années 1970 et au cours des années 1980. Les opposants syriens qui reviennent au pays de leur propre gré ou qui sont rapatriés de force par des gouvernements étrangers risquent fort d’être arrêtés, torturés ou victimes de sévices.

409.Muhammad Sa’id al-Sakhri a été libéré le 13 octobre et vit maintenant avec sa famille.

Amérique du Sud

410.Sept anciens membres des forces armées argentines ont été mis en accusation in absentia pour l’enlèvement et le meurtre de sept citoyens italiens et le rapt de l’enfant de l’un d’entre eux pendant les années de régime militaire en Argentine. Le procès, qui devait s’ouvrir à Rome en octobre, a été repoussé au mois de décembre, avant de l’être à nouveau à mars 2000 au terme de la première journée. Il résulte des investigations menées par les autorités judiciaires italiennes en 1983, à la suite de plaintes déposées par des parents des citoyens italiens « disparus ».

411.En juillet 2000, le Ministre de la justice a autorisé l’ouverture de poursuites pénales à l’encontre de cinq autres Argentins accusés du meurtre de trois citoyens italiens dans un centre de détention secret en Argentine. Sept autres procédures pénales étaient engagées depuis peu à la suite de plaintes relatives à d’autres violations des droits de l’homme commises à l’encontre de citoyens italiens par des membres des forces de sécurité argentines, résultant d’une ancienne collaboration entre les forces de sécurité de plusieurs pays d’Amérique du Sud.

412.En décembre 2000, la cour d’assises de Rome a condamné par contumace deux généraux argentins à la réclusion criminelle à perpétuité et cinq autres anciens membres des forces armées argentines à 24 ans d’emprisonnement pour l’enlèvement et le meurtre de sept citoyens italien et le rapt de l’enfant de l’un d’entre eux pendant les années de régime militaire en Argentine (1976-1983). Le procès a été motivé par des enquêtes ouvertes par les autorités judiciaires italiennes en 1983 à la suite de plaintes déposées par des parents des « disparus ».

413.En août 2001, l’ancien officier de l’armée argentine Jorge Oliveira a été arrêté à Rome en exécution d’un mandat d’arrêt international lancé en France pour l’enlèvement et la torture d’un citoyen français en Argentine en 1976. Toutefois, en septembre, alors que l’examen d’une demande d’extradition déposée par la France était en cours, la Cour d’appel de Rome a ordonné sa mise en liberté au motif que les crimes dont il était accusé étaient couverts par une loi de prescription. Il a regagné immédiatement l’Argentine. Le procureur général a fait appel de cette décision et le Ministre de la justice a annoncé l’ouverture d’une enquête disciplinaire concernant la conduite des juges de la cour d’appel, le procureur général, en ce qui le concerne, ouvrant une enquête sur les informations apparemment fausses communiquées à la cour par Jorge Oliveira.

414.En février 2002, la cour de cassation a cassé la décision de la cour d’appel de Rome de septembre 2000 ordonnant la mise en liberté de l’ancien officier de l’armée argentine Jorge Oliveira. Il avait été arrêté à Rome en août en exécution d’un mandat international lancé en France pour l’enlèvement et la torture d’un citoyen français en Argentine en 1976, au temps du régime militaire. L’examen de la demande d’extradition déposée par la France était en cours lorsque la cour d’appel a ordonné la mise en liberté de l’intéressé au motif que les crimes dont il était accusé étaient couverts par une loi de prescription. Jorge Oliveira a immédiatement regagné l’Argentine.

415.Cinq autres officiers argentins faisaient l’objet de poursuites pénales pour l’enlèvement et le meurtre de trois citoyens italiens dans un centre de détention secret en Argentine pendant les années de régime militaire. Les autorités judiciaires italiennes ont déposé une demande d’extradition de l’un des officiers à laquelle l’Argentine n’a pas donné suite. D’autres enquêtes pénales étaient en cours.

D. Les incidents de Somalie

416.En janvier 2001, en réponse à une demande d’Amnesty International en date de mars 1999, le Ministère de la justice a donné des informations sur l’évolution des poursuites pénales engagées pour des faits de violations des droits de l’homme qui auraient été commises par des membres des forces armées participant à une opération multinationale de maintien de la paix en Somalie en 1993 et 1994. Le Ministère a déclaré qu’une demande déposée par le procureur de Milan pour que l’enquête concernant le viol et le meurtre d’un jeune Somalien en mars 1994 soit close en l’état était en attente de la décision d’un magistrat instructeur chargé de l’enquête préliminaire.

417.Le Ministère a également indiqué que, bien qu’une enquête judiciaire ait établi qu’une femme somalienne a été victime d’un viol collectif au poste de contrôle de Demonio à Mogadishu, il n’avait pas été possible d’identifier les auteurs ni la victime, en conséquence de quoi le juge de Livourne chargé de l’enquête préliminaire avait ordonné l’arrêt des poursuites. Les poursuites engagées contre un officier accusé d’avoir violé une femme somalienne à l’intérieur de l’ancienne ambassade italienne à Mogadishu et celles qui avaient été engagées à la suite d’allégations selon lesquelles, en juin 1993, des soldats avaient illégalement tué par balle trois citoyens somaliens qui étaient à bord d’un véhicule ont également été closes faute de preuves concrètes. Le Ministère a déclaré qu’on était encore en attente des résultats de trois autres procédures, dont celle concernant Aden Abukar Ali, photographié alors que des soldats italiens étaient en train de fixer des électrodes sur son corps. En avril, le tribunal de Livourne a jugé et condamné un ancien parachutiste à 18 mois d’emprisonnement avec sursis pour abus de pouvoir et, dans l’attente de l’issue des poursuites civiles connexes, l’a astreint provisoirement à verser 30 millions de lires (14 000 dollars E. U.) à Aden Abukar Ali. Un autre officier a apparemment été condamné à une peine plus légère après transaction pénale.

418.Eu égard à ces événements, l’Italie a revu sa législation pénale militaire afin de rendre les opérations de maintien de la paix conformes au droit humanitaire international.

Mesures prises pour rendre la législation pénale militaire conforme au droit international

419.Les décrets lois sur la mission « Liberté durable » (décret-loi N° 421 du 1er décembre 2001, tel que confirmé et amendé par la loi N° 6 du 31 janvier 2002, et décret-loi N° 451 du 20 décembre 2001 tel que confirmé et amendé par la loi N° 15 du 27 février 2002) établissant le cadre pénal militaire pour l’opération multinationale en Afghanistan comportent des dispositions – telles que définies par les lois susmentionnées – concernant l’application du Code pénal militaire applicable en temps de guerre, qui sont considérées comme étant nécessaires non seulement pour protéger l’instrument militaire en cause, mais également et surtout pour assurer la défense des catégories de personnes vulnérables touchées (malades, blessés, réfugiés, prisonniers, etc.). Le Code pénal militaire italien applicable en temps de guerre, seul code de ce type au moment où il a été élaboré, comporte des dispositions importantes concernant « les crimes contre les lois et les pratiques de la guerre » (livre III, titre IV), y compris ceux qu’on appelle aujourd’hui « crimes de guerre » dans les procédures internationales.

420.Il est apparu nécessaire de procéder à des amendements à ce code à la suite de la décision d’appliquer cette législation au contingent engagé en Afghanistan. C’est pourquoi, après que le gouvernement a présenté un projet de loi spécifique (A.S. 915) devant le Parlement, il a été décidé d’intégrer les amendements proposés dans la loi confirmant le décret-loi N° 421/2001 (étant donné l’urgence due à la mission en Afghanistan, le Sénat a décidé, lors de sa séance du 22 janvier 2002, d’intégrer le projet de loi A.S. 915 au projet A.S. 914, ce qui a entraîné une modification du titre). Le processus a abouti à l’adoption de la loi N° 6 du 31 janvier 2002. Il convient de remarquer que cette loi comporte d’autres amendements d’importance au Code pénal militaire italien, en plus de ceux qui sont destinés à mettre la législation italienne en conformité avec le droit humanitaire international.

421.Une analyse de ces amendements peut amener à souligner que l’article 2.1.b de la loi modifie l’article 15 du code en remplaçant la notion d’ « État allié », qui signifie « État associé dans cette guerre », par celle d’ « État associé dans les opérations de guerre ou État prenant part à la même expédition ou campagne ». De cette manière, tous les crimes commis par les membres du personnel militaire italien contre des membres d’un personnel participant à la même opération multinationale peuvent être punis sur la base des dispositions du Code pénal militaire applicable en temps de guerre, sous réserve de réciprocité. Avant l’adoption de la loi N° 6/2002, le procureur militaire Bonagura avait souligné la nécessité de procéder à un amendement de cette nature en déclarant que, «dans l’intérêt des bonnes relations établies en pareil cas pour que soit respectée la discipline humanitaire, il paraîtrait opportun de prévoir que les règles relatives aux crimes contre la discipline militaire soient appliquées au personnel militaire italien, même quand les acteurs passifs sont des membres du personnel militaire d’une autre nationalité » (voir le rapport cité p. 9) 

422.La disposition dont il est question à l’article 2.1.c, dans laquelle la notion d’ « infraction militaire » prévue à l’article 47 du Code pénal militaire applicable en temps de guerre est élargie, a fait l’objet d’un débat animé au Parlement. Grâce à la nouvelle mesure, dans certaines conditions, un certain nombre d’infractions pénales (par exemple les crimes contre le gouvernement, contre l’ordre public, les biens, les personnes, etc.) tombent dans cette catégorie. Il est une disposition particulièrement remarquable, à savoir celle qui fait que les violations du droit pénal commises par des membres des forces armées, dans le cadre de l’armée ou en raison du service militaire, à l’encontre du service militaire ou de l’administration militaire ou d’un autre membre des forces armées ou d’un membre de la population civile se trouvant sur le territoire des opérations à l’étranger, doivent être considérées comme des infractions militaires. Cette disposition élargit considérablement la notion d’infraction militaire et, par conséquent, la compétence des tribunaux militaires, éventualité tout à fait prévue par l’article 103 de la Constitution. Enfin, le but de l’article 2.h était d’abroger certaines dispositions du Code pénal militaire applicable en temps de guerre dont la légitimité constitutionnelle était douteuse, telles que celles qui permettent au commandant suprême de publier des communiqués à l’étranger (articles 17-20), de déclarer un individu déserteur après une absence de 24 heures (art. 155) et, en même temps, de renoncer à poursuivre l’infraction de « dénigrement de guerre » prévue par l’article 87 (Code pénal militaire applicable en temps de guerre).

423.L’une des premières mesures prises pour mettre ce dernier en conformité avec le droit humanitaire international actuel a été d’abroger la totalité de l’article 165 dudit code (voir l’article 2.1.d de la loi N° 6/2002). En vertu cet article 165, certaines catégories d’infractions (actes illicites ou arbitraires d’hostilité, abus de moyens employés pour nuire à l’ennemi, frais, paiements ou réquisitions arbitraires) étaient punissables selon les instructions du commandant suprême, « et seulement dans la mesure où l’État ennemi garantit une protection pénale équivalente à l’État italien et à ses citoyens ». Cette provision, donc, comportait deux clauses visant expressément à sauvegarder le personnel militaire italien d’une manière trop large.

424.En premier lieu, cette disposition prévoyait une responsabilité non pénale pour certains actes de guerre illicites commis par des troupes italiennes, même en l’absence de violations similaires de la part de l’ennemi, dans la mesure où l’on pouvait établir que ces actes n’étaient pas sanctionnés dans le système pénal de l’autre État (selon les avis juridiques, pour qu’on puisse considérer que la clause de réciprocité était applicable, cette disposition exigeait également que, en plus d’autres dispositions similaires prévues dans l’ordre juridique de l’autre pays, un appareil répressif adéquat ait été mis en place, sans quoi on jugeait qu’il n’existait aucun motif pour poursuivre les membres du personnel militaire italien concernés). En outre, l’engagement d’une procédure était soumis à une autre restriction, à savoir que la responsabilité de l’intéressé ne pouvait être considérée comme engagée, en l’occurrence, que sur instruction du commandant suprême, qui était chargé d’apprécier s’il avait été satisfait à la clause de réciprocité, jugement susceptible d’être remis en cause ultérieurement par le juge.

425.Selon la nouvelle version de l’article 165 (du Code pénal militaire applicable en temps de guerre) due à son remplacement par l’article 2.1.d de la loi N° 6/2002, « les dispositions du titre ‘infractions contre les lois et les pratiques de la guerre’ devront s’appliquer à tous les cas de conflits armés, que la guerre ait été déclarée ou non ». La raison d’être de cette disposition est claire, car elle tend à élargir les conditions dans lesquelles peuvent être évoquées les circonstances tendant à prouver la culpabilité décrites dans le titre IV du livre III. En effet, dans la version originale du Code pénal militaire applicable en temps de guerre, sans préjudice des cas dans lesquels ces règles sont appliquées en temps de paix, comme dans le cas de l’article 9 (dudit code), ces dispositions ne pouvaient s’appliquer que si « l’état de guerre avait été déclaré » (art. 3 du Code).

426.Toutefois, à partir de l’article 2, qui est commun aux quatre Conventions de Genève du 12 août 1949 (« outre les dispositions qui doivent être appliquées en temps de paix, la présente Convention devra s’appliquer à tous les cas de guerre déclarée ou d’autres conflits armés pouvant se produire entre deux (ou plus) Hautes Parties Contractantes, même si l’état de guerre n’est pas reconnu par l’une d’elles »), à la reconnaissance de l’ « état de guerre » par les États belligérants, entendu comme étant la condition pour que s’applique le droit humanitaire, a été ajoutée la notion de « conflit armé » afin de sauvegarder pleinement les valeurs et les biens protégés par cet ensemble de règles, indépendamment de toute contrainte officielle.

427.Le nouvel article 165 du Code pénal militaire applicable en temps de guerre autorise l’application de ces dispositions « dans tous les cas de conflit armé ». Comme la terminologie employée ne restreint en aucune manière le sens de l’expression « conflit armé », cela suggère que les incriminatory circumstances prévues au titre II du livre III de ce code sont maintenant applicables à toute situation de conflit armé, y compris, outre les conflits internationaux, les cas de conflit armé interne.

428.Cet amendement a une portée importante, car il ne faut pas perdre de vue que, jusqu’à ce que ce nouvel article 165 soit introduit, le Code ne prévoyait pas la moindre répression pénale en cas de violation du droit humanitaire international commise lors de conflits internes, lacune qui remonte au moment où ce code a été élaboré. Ces dernières années, d’autre part, on a constaté que le champ d’application de la répression pénale pour les individus s’est étendu aux cas de violation du droit humanitaire international dans le cadre d’un conflit interne (pour bien comprendre l’effet novateur de ce changement, il faut se souvenir que les violations du droit humanitaire international commises au cours de conflits armés non internationaux ne sont classées parmi les crimes de guerre ni dans l’article 3 commun aux quatre Conventions de Genève de 1949, ni dans le protocole additionnel de 1977).

429.Il suffit de remarquer ici que ces modifications du droit au niveau international ont été inspirées par des cadres législatifs nationaux d’avant-garde et les travaux des tribunaux pénaux internationaux ad hoc (en ce qui concerne la compétence ratione materiae du Tribunal pénal international pour le Rwanda, l’article 4 de son statut le déclare compétent pour réprimer des violations graves de l’article 3 commun aux Conventions de Genève de 1949 et au Protocole II. Pour ce qui est du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie, voir l’Arrêt relatif à l’appel de la défense concernant l’exception préjudicielle d’incompétence dans l’affaireTadic, dans lequel il est établi que l’accusé est pénalement responsable de la violation de toute disposition fondamentale du droit humanitaire international, quelle que soit la nature du conflit dans lequel elle a eu lieu).

430D’autres amendements apportés par la loi 6/2002 ont permis de compléter la mise en conformité du droit interne italien avec le droit humanitaire international actuel. Par exemple, l’article 2.h porte abrogation de l’article 183 (du Code pénal militaire applicable en temps de guerre), qui permettait de condamner à une peine maximale d’un an d’emprisonnement tout chef militaire qui « hors les cas de danger imminent pour la sécurité des forces armées ou la défense militaire de l’État, ordonne, en l’absence de tout procès, l’exécution immédiate de toute personne surprise en flagrant délit d’espionnage ou de crime contre les lois et pratiques de la guerre ». Il est facile de voir à quelles dispositions du droit international cet article 183 s’oppose.

431.Mis à part le fait que la peine prévue est légère, il convient de souligner que cela n’aurait pas été applicable en cas de justification au titre de l’article 183. Cette éventualité était nettement contraire tant aux dispositions des conventions, qui reconnaissent le droit de tout accusé à bénéficier du respect des garanties juridiques fondamentales (en vertu des Conventions de Genève et du Protocole I, le fait de priver tout individu protégé par les traités « du droit à un procès équitable et régulier » est considéré comme « une violation grave » (voir les articles 130 de la Convention III, 147 de la Convention IV et 85 du Protocole I)), qu’à l’article 5 de la Convention IV, qui reconnaît expressément le droit des individus accusés d’espionnage à un procès équitable.

432.Dans l’article 2.e figure une nouvelle disposition (art. 184-bis) visant à ériger en crime toute prise d’otages (art. 184-bis (Prise d’otages)) : « Tout membre des forces armées qui viole l’interdiction de prendre des otages prévue par les dispositions relatives aux conflits armés internationaux doit être condamné à une peine de détention de deux à 10 ans dans une prison militaire. Sera passible de la même peine tout membre des forces armées qui menace de blesser ou de tuer une personne non armée ou dont le comportement n’est pas hostile, capturée ou arrêtée pour des raisons qui ne sont pas sans rapport avec la guerre, afin de faire pression pour que soient livrées des personnes ou des objets »).

433.Il a été jugé nécessaire d’introduire une disposition spécifique, car le texte original du Code pénal militaire applicable en temps de guerre autorisait implicitement cette pratique. En effet, l’article 219 (dudit code) disposait que « aux fins du droit pénal militaire, les otages seront assimilés aux prisonniers de guerre » (l’article 99.4 du droit de la guerre, adopté par le décret royal N° 141 S du 8 juillet 1938, comportait une expression similaire), ce qui revenait à la reconnaître.

434.Bien que cette pratique fût expressément interdite par le droit international (art. 34 de la Convention V et art. 75 du Protocole I) et que toute violation de cette interdiction fût classée dans les « infractions graves » (art. 147 de la Convention IV), l’absence de toute sanction pénale y afférente empêchait ces dispositions de prendre effet dans l’ordre juridique italien (il était même impossible d’invoquer, pour interdire cette pratique, la loi N° 718 du 26 novembre 1985 portant application de la Convention internationale contre la prise d’otages signée à New York le 18 décembre 1979. En fait, bien que l’article 3 de la loi N° 718/1995 rende passible d’une peine de 25 à 30 d’emprisonnement l’enlèvement de personnes « destiné à obliger … un État … à prendre toute mesure ou à l’en dissuader », l’article 12 de la Convention exclut expressément de son domaine d’application la prise d’otages au cours d’un conflit armé. Pour ledit article, « dans la mesure où les Conventions de Genève de 1949 relatives à la protection des victimes de guerre ou les protocoles additionnels à ces Conventions sont applicables à un type particulier de prise d’otages, … la présente Convention ne doit pas s’appliquer à une prise d’otages effectuée au cours de conflits armés… »).

435.En conséquence, bien que la loi N° 6/2001 ne prévoie pas explicitement l’abrogation de la législation interne en contradiction avec ces engagements internationaux, il convient de considérer ces dispositions comme étant abrogées eu égard à leur incompatibilité avec l’interdiction figurant à l’article 184-bis. Enfin, une autre disposition, l’article 185 bis, fait apparaître de nouvelles infractions dans la législation italienne afin de la mettre en conformité avec les interdictions imposées par les conventions internationales ratifiées après sa promulgation. Ainsi qu’il a déjà été dit, l’une des principales carences des dispositions du Code pénal militaire applicable en temps de guerre, dans le cadre des conflits internationaux, était le fait qu’elles ne prévoyaient pas de sanctions pénales à l’encontre de certaines violations graves du droit humanitaire (en vertu des Conventions de Genève et du Protocole I), n’ayant pas automatiquement force de loi.

436.Le nouvel article remédie à cette carence en prévoyant explicitement l’application d’une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à cinq ans à toute personne portant responsabilité des crimes de torture, traitement inhumain, déplacement illicite, expériences biologiques ou traitement médical injustifié, et en permettant dans tous les cas, par le biais de la référence à « d’autres types de comportement interdits par les conventions internationales », à la législation italienne de punir les infractions « contre les prisonniers de guerre ou les civils ou d’autres personnes protégées par les conventions internationales ». Grâce à cette dernière disposition, certaines violations graves, qui n’étaient pas prévues par l’ordre juridique antérieur, sont maintenant punissables, telles que la déportation ou la détention illégale d’une personne protégée, le retard injustifié du rapatriement des prisonniers de guerre ou des civils à la fin des hostilités ou les pratiques d’apartheid et les autres traitements inhumains ou dégradants fondés sur la discrimination raciale (il faut rappeler qu’en vertu de l’article 3 de la loi N° 15 du 27 février 2002 portant amendement de l’article 2.g de la loi N° 6/2002, la peine minimale pour les infractions de ce genre a été portée de un à deux ans d’emprisonnement).

437.Le 31 juillet 2003, le Conseil des ministres, sur proposition du Ministre de la défense, le Professeur Antonio Martino, a adopté un projet de loi donnant compétence au gouvernement pour revoir les codes militaires applicables en temps de guerre et en temps de paix et procéder ensuite à une modification du cadre juridique militaire. Cette initiative, qui fait suite à un engagement précis pris par le gouvernement devant le Parlement, confirme son intention de mettre la législation pénale militaire en conformité avec le droit humanitaire international, en complétant les mesures mises en œuvre en vertu des deux premiers décrets-lois relatifs à l’opération « Liberté durable ». Les missions internationales ont mis en lumière la nécessité d’accélérer la réforme des codes militaires et d’éviter d’avoir recours à l’article 9 du Code pénal militaire applicable en temps de guerre, ce qui aurait pu être source de lacunes, d’incohérences et d’incertitudes en raison de sa non application due à divers décrets-lois promulgués à la hâte depuis la première guerre du Golfe (1990) et qui a fait l’objet de nombreuses critiques de la part des juristes à cause de ses graves carences.

438.Dans le cadre des missions à l’étranger, le fait de ne recourir qu’au code applicable en temps de paix – qui est adapté aux conditions générales de l’entraînement plutôt qu’à un engagement dans une opération qui peut revêtir un degré élevé d’intensité – a eu pour conséquence que certaines situations et certains principes juridiques de très grande importance dans des contextes impliquant l’usage de la force n’ont pas pu être pris en compte : l’imputation à l’État d’actions effectuées par des membres du contingent engagé dans les opérations, la cohésion nécessaire des membres du contingent et le statut juridique des personnes capturées. Plus grave encore : les personnes vulnérables concernées (malades, blessés, population civile, prisonniers, etc.) ne bénéficiaient d’aucune protection pénale particulière.

439.Á la lumière des nécessités mentionnées plus haut, qui sont d’autant plus évidentes que les missions de paix sont indispensables, il est apparu tout à fait judicieux de ne pas déroger encore plus à l’application de ce code, sauf aux dispositions dépassées concernant « la justice de guerre ». Pour ce qui est du fond, outre les réflexions ci-dessus, il ne faut pas oublier que les crimes de guerre sont également couverts par le Statut de Rome de la Cour pénale internationale, ratifié et mis en application par la loi N° 232 du 12 juillet 1999.

440.Comme l’Italie, en signant le Statut de Rome, s’est engagée à l’appliquer – ce qui signifie, selon la doctrine internationale, qu’il doit être remédié à toute carence de la législation nationale concernant la répression des infractions équivalant à des délits internationaux prévus par le Statut – les dispositions susmentionnées du livre III, titre IV du Code pénal militaire applicable en temps de guerre concernant les crimes contre les lois et pratiques de la guerre seront complétées au terme de la réforme en cours de l’article 8 pour mettre cet article (sur les crimes de guerre) définitivement en pleine conformité avec le Statut et les autres conventions en vigueur dans le domaine du droit humanitaire.

III. OBSERVATION DES CONCLUSIONS ET DES RECOMMANDATIONS DU COMITÉ

441.En ce qui concerne les recommandations formulées par le Comité et notifiées à l’Italie après la discussion du deuxième rapport établi par le Gouvernement italien sur l’application de la Convention, prière de se reporter aux paragraphes I.A (Le problème de l’introduction du crime de torture dans l’ordre juridique italien), II.C (Cas individuels de mauvais traitements présumés), et II.D (Affaires collectives, avec référence particulière aux incidents de Somalie) du présent rapport.

Annexes*

1.Statistiques du Ministère de la justice :

-Situation des prisons italiennes au 30 juin 2003

–Entrée (janvier-juillet 2003)

–Statut juridique dans les prisons en juin 2003

-Nombre de détenus dans les prisons au 30 juin 2003 par durée de peine

-Infractions les plus fréquemment attribuées aux détenus au 30 juin 2003

i.Par pays d’origine des détenus

-Détenus étrangers par nationalité au 30 juin

–Détenus étrangers par pays ou aire géographique d’origine au 30 juin 2003

2.Enquête menée par le corps des carabiniers à la suite de plaintes relatives à des mauvais traitements (1994-2002).

* Les annexes peuvent être consultées dans les dossiers du Secrétariat.