Nations Unies

CERD/C/COL/FCO/17-19

Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale

Distr. générale

19 avril 2021

Français

Original : espagnol

Anglais, espagnol et français seulement

Comité pour l’élimination de la discrimination raciale

Renseignements reçus de la Colombie au sujet de la suite donnée aux observations finales concernant son rapport valant dix-septième à dix-neuvième rapports périodiques * , **

[Date de réception : 11 décembre 2020]

Table des matières

P age

Abréviations3

Introduction4

I.Recommandation sur les droits territoriaux et la restitution des terres, paragraphe 21 des observations finales concernant le rapport de la Colombie valant dix-septième à dix-neuvième rapports périodiques (CERD/C/COL/CO/17-19)5

A.État d’application de la loi no 70 et progrès accomplis en matière de droit à la propriété collective des personnes d’ascendance africaine5

B.Progrès réalisés en matière de restitution des terres aux peuples autochtoneset d’ascendance africaine7

C.Progrès réalisés en matière d’octroi de titres de propriété des territoires autochtoneset d’extension des resguardos9

D.Clarification sur les déclarations suivantes11

II.Recommandation sur les peuples autochtones menacés d’extinction, en situation d’isolement et de premier contact, paragraphe 23 des observations finales concernant le rapport de la Colombie valant dix-septième à dix-neuvième rapports périodiques 15

A.Progrès dans l’application des arrêts de la Cour constitutionnelle et des plans de sauvegarde ethnique en faveur des peuples autochtones reconnus comme étant en danger d’extinction physique et culturelle, en particulier les peuples awá et uitoto15

B.Mesures de protection des peuples autochtones en situation d’isolement volontaireou de premier contact, en particulier le peuple nukak-makú20

III.Conclusions.23

Abréviations

ANTAgence nationale des terres

CODHESComité consultatif pour les droits de l’homme et les déplacements

DANE Département administratif national de statistique

ENCPEspace national pour la consultation préalable

HCRHaut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés

IGACInstitut national géographique Agustín Codazzi

MADRMinistère de l’agriculture et du développement rural

NARPCommunautés noires, afro-colombiennes, raizales et palenqueras

ORIPBureau d’enregistrement des actes publics

RTDAFRegistre des terres confisquées et abandonnées de force

RUPTARegistre unique des terres et territoires abandonnés

UAE-GRTDUnité de gestion de la restitution des terres confisquées

UARIVUnité pour la prise en charge des victimes et la réparation intégrale

Introduction

1.L’État colombien soumet au Comité pour l’élimination de la discrimination raciale des informations sur la mise en œuvre des recommandations figurant aux paragraphes 21 (« Droits territoriaux et restitution des terres») et 23 (« Peuples autochtones menacés d’extinction, en situation d’isolement et de premier contact ») du document CERD/C/COL/CO/17-19 du 22 janvier 2020, qui contient les observations finales concernant le rapport de la Colombie valant dix-septième à dix-neuvième rapports périodiques. Ces observations sont en lien avec les articles 2, 4, 5 et 6 de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale.

2.Pour répondre aux questions relatives aux progrès accomplis dans la mise en œuvre des recommandations du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, les droits territoriaux et la restitution des terres seront abordés dans un premier temps, en particulier les points suivants :

État d’application de la loi no 70 et progrès accomplis en matière de droit à la propriété collective des personnes d’ascendance africaine ;

a)Progrès réalisés en matière de restitution des terres aux peuples autochtones et d’ascendance africaine ;

b)Progrès réalisés en matière d’octroi de titres de propriété des territoires autochtones et d’extension des resguardos ; et

d)Précisions sur les affirmations suivantes du Comité : « l’Unité chargée de la restitution des terres a rejeté 64 % des demandes de restitution de terres » et « le retard important que l’Agence foncière nationale a pris dans l’application des décisions de la Cour exigeant l’octroi de titres de propriété pour les territoires collectifs ».

3.La deuxième partie porte sur les peuples autochtones menacés d’extinction, en situation d’isolement et de premier contact. À cet égard, une réponse détaillée est apportée sur les points suivants :

a)Progrès accomplis dans l’application des arrêts de la Cour constitutionnelle et des plans sauvegarde ethnique pour les peuples qui ont été reconnus comme étant en danger d’extinction physique et culturelle, en particulier les peuples awá et uitoto ; et

b)Mesures de protection des peuples autochtones en situation d’isolement volontaire ou de premier contact, en particulier le peuple nukak-makú.

4.Il faut préciser que les informations sont fournies dans le cadre du mandat du Ministère de l’intérieur, de l’Agence nationale des terres (ci-après ANT) et de l’Unité de gestion de la restitution des terres confisquées (ci-après UAE-GRTD).

I.Recommandation sur les droits territoriaux et la restitution des terres, paragraphe 21 des observations finales concernant le rapport de la Colombie valant dix-septième à dix-neuvième rapports périodiques (CERD/C/COL/CO/17-19)

A. État d’application de la loi no 70 et progrès accomplis en matière de droit à la propriété collective des personnes d’ascendance africaine

5.Le Ministère de l’intérieur détaille les progrès accomplis, selon les institutions nationales chargées de l’application de la loi no 70 de 1993 portant précision de l’article transitoire 55 de la Constitution politique, dans les domaines suivants : i) participation ; ii) utilisation des terres et protection des ressources naturelles ; iii) ressources minières ; iv) développement des droits à l’identité culturelle ; et v) planification et promotion du développement économique et social.

1.Participation

6.S’agissant des éléments de l’article 45 de la loi no 70 de 1993 relatifs à la participation, les mesures suivantes ont été prises :

•Le 20 juillet 2017, le Ministère de l’intérieur a lancé une consultation préalable sur le projet de décret d’application et a défini la feuille de route méthodologique ;

•Le 2 juillet 2018, lors d’une session de l’Espace national pour la consultation préalable (ci-après ENCP) des communautés noires, afro-colombiennes, raizales et palenqueras, le projet de décret d’application a été formellement adopté.

•Le 1er novembre 2018, la Commission consultative de haut niveau a été créée ;

•En 2019, des révisions ont été apportées au texte formellement adopté par le Bureau du conseil juridique du Ministère de l’intérieur et la Direction des affaires relatives aux communautés noires, afro-colombiennes, raizales et palenqueras. Après avoir pris l’engagement de publier le projet de décret lors de la session plénière de l’ENCP en mars 2020 à Santiago de Cali, le Bureau du conseil juridique du Ministère de l’intérieur a présenté en juillet ce projet au Secrétariat juridique de la Présidence de la République pour qu’il l’examine et soumette ses commentaires. De même, lors de la XVe séance plénière de l’ENCP qui s’est tenue en août, les communautés noires, afro-colombiennes, raizales et palenqueras ont nommé une sous-commission pour accompagner l’examen des commentaires et des modifications apportés au projet de décret, qui a finalement été présenté pour approbation le 6 octobre 2020.

7.À ce jour, le décret n’a pas encore été publié, conformément au délai de quinze jours prévu à l’article 2.1.2.1.14 du décret no 1081 de 2015 portant adoption du décret d’application unique du secteur de la présidence de la République, et les sous-comités de l’ENCP et de la Commission consultative de haut niveau doivent être convoqués pour formuler leurs recommandations et adopter formellement le décret.

2.Utilisation des terres et protection des ressources naturelles

8.S’agissant du projet de décret d’application du chapitre IV de la loi no 70 de 1993, relatif à l’utilisation des terres et à la protection des ressources naturelles et de l’environnement, il convient d’indiquer que le 20 juillet 2017, le Ministère de l’environnement et du développement durable a lancé la consultation préalable sur le projet de décret et a défini la feuille de route méthodologique. Ce projet a également été soumis aux entités compétentes pour recueillir leurs commentaires respectifs. À l’heure actuelle, aucune suite n’a été donnée à la proposition du Ministère de l’environnement et du développement durable, qui a fait l’objet de modifications ou de suggestions de modifications par les autres entités.

3.Ressources minières

9.Le 20 juillet 2017, en vue de mettre en œuvre le chapitre V de la loi no 70 de 1993 relative aux ressources minières, le Ministère des mines et de l’énergie a lancé la consultation préalable sur le projet de décret et a défini la feuille de route méthodologique. Après avoir fait le nécessaire pour recueillir les commentaires du Ministère de l’intérieur, l’institution attend désormais l’avis de son Bureau du conseil juridique. Lorsqu’elle l’aura obtenu, une réunion intersectorielle sera organisée pour décider conjointement du texte. Celui-ci devra être soumis à la fois à l’ENCP, qui devra réviser la feuille de route méthodologique de la consultation préalable, et à la Commission consultative de haut niveau, qui formulera des recommandations.

4.Mécanismes de protection et de développement des droits à l’identité culturelle

10.Concernant les mécanismes de protection et de développement des droits à l’identité culturelle, prévus au chapitre VI de la loi no 70 de 1993, il convient d’indiquer que des décrets d’application ont été pris pour les articles suivants :

•Article 39 : décret no 1122 de 1998 portant approbation des normes qui régissent le développement de la Chaire d’études afro-colombiennes dans tous les établissements d’enseignement formel du pays et énonçant d’autres dispositions ;

•Article 40 : décret no 1627 de 1997 portant règlement d’application de l’article 40 de la loi no 70 de 1993 ;

•Article 42 : décret no 2249 de 1995 portant création de la Commission pédagogique des communautés noires, visée à l’article 42 de la loi no 70 de 1993 ;

•Article 45 : décret no 3770 de 2008 (en cours de modification) portant règlement d’application de la Commission consultative de haut niveau des communautés noires, afro‑colombiennes, raizales et palenqueras, fixant les critères d’enregistrement des conseils et organisations communautaires et énonçant d’autres dispositions.

11.En outre, dans son arrêt C-666 de 2016, la Cour constitutionnelle a ordonné au Ministère de l’éducation nationale de procéder à une consultation préalable sur le statut de professionnalisation de l’enseignant pour les communautés noires, afro-colombiennes, raizales et palenqueras. Cette consultation est en cours. À ce jour, une réunion avec la IVe Commission de l’ENCP doit toujours se tenir, et le statut n’a pas encore été formellement adopté.

12.En ce qui concerne l’article 41 de la loi no 70 de 1993, aux termes duquel « en allouant les ressources nécessaires, l’État soutient les modes d’organisation mis en œuvre par les communautés noires pour récupérer, préserver et développer leur identité culturelle », le Ministère de l’intérieur a convié le Ministère de la culture à une réunion le 1er juillet 2020 afin de présenter la proposition de décret d’application et d’indiquer si cet article est directement applicable et quelles mesures peuvent être prises pour le mettre en œuvre.

13.Ces deux entités sont actuellement en discussion pour progresser dans cette voie. Par ailleurs, la consultation préalable sur le projet de loi sur le statut de l’ethno‑éducation n’est pas terminée.

5.Planification et promotion du développement économique et social

14.S’agissant du chapitre VII de la loi susmentionnée, relatif à la planification et à la promotion du développement économique et social de ces communautés, les articles suivants ont été mis en application sur le plan normatif :

•Article 48 : décret no 2284 de 1995 portant règlement d’application partiel des articles 9 et 11 de la loi organique no 152 de 1994 relative au plan national de développement ;

•Article 56 : décret no 1523 de 2003 portant règlement d’application de la procédure d’élection du représentant et du représentant suppléant des communautés noires aux conseils d’administration des corporations autonomes régionales, et énonçant d’autres dispositions ;

•Article 57 : décret no 3050 de 2002 portant règlement d’application de l’article 57 de la loi no 70 de 1993.

15.Comme l’ont demandé les communautés noires, afro-colombiennes, raizales et palenqueras de l’ENCP en février 2018, lors de la consultation préalable sur le projet de décret qui a été lancée le 20 juillet 2017 par le Ministère de l’agriculture et du développement rural, les entités suivantes ont également été associées aux débats : Ministère des finances et du crédit public ; Ministère du commerce, de l’industrie et du tourisme ; Ministère des affaires étrangères ; Ministère de l’environnement et du développement durable ; Ministère des technologies de l’information et des communications ; Ministère de la culture ; Ministère de la santé et de la protection sociale ; Ministère de la défense ; Ministère de l’éducation nationale et Département national de planification.

16.Par ailleurs, pour aider la IIe Commission de l’ENCP à rédiger une contre-proposition de réglementation d’application, il a été convenu d’engager cinq conseillers et trois assistants pour une période de deux mois. Pour l’heure, il reste à réviser la feuille de route de la consultation préalable et à désigner les entités qui financeraient ces conseillers, et la Commission consultative de haut niveau doit encore formuler ses recommandations.

B.Progrès réalisés en matière de restitution des terres aux peuples autochtones et d’ascendance africaine

17.Le rapport fourni par l’UAE-GRTD sur cette question est présenté ci-après, selon trois axes : le contexte général, les aspects relatifs aux cas particuliers des communautés ethniques telles que les populations autochtones et d’ascendance africaine, et les étapes de la procédure de restitution aux groupes ethniques.

1.Cas généraux

18.Conformément à la loi no 1448 de 2011 portant adoption de mesures de prise en charge, d’assistance et de réparation intégrale en faveur des victimes du conflit armé interne et énonçant d’autres dispositions, une procédure administrative spéciale à caractère mixte a été établie pour parvenir à restituer les terres confisquées et abandonnées de force et à délivrer les titres de propriété correspondants. Cette procédure se compose de deux (2) phases.

19.Phase 1 : de nature administrative, elle relève de l’UAE-GRTD. Elle se déroule selon les lignes directrices établies au chapitre III du titre IV de la loi précitée, ainsi que selon les dispositions des décrets no 1071 de 2015, no 440 de 2016 et no 1167 de 2018. Elle a pour objet de statuer sur les demandes d’inscription d’une parcelle au Registre des terres confisquées et abandonnées de force (ci-après RTDAF).

20.Il convient de préciser que trois (3) types de décisions sur le fond peuvent être prises à l’issue de cette phase : i) la demande n’est pas formellement examinée ; ii) la parcelle est inscrite au RTDAF, ce qui permet au requérant d’accéder à la deuxième étape de la procédure de restitution ; et iii) la parcelle n’est pas inscrite au registre susmentionné. En outre, afin de garantir la régularité de la procédure, les actes administratifs portant sur le fond sont susceptibles de recours en révision, conformément à l’article 2.15.1.6.6 du décret no 1071 de 2015, modifié par le décret no 440 de 2016.

21.Phase 2 : une fois que la parcelle est inscrite au RTDAF, le cas échéant, la demande de restitution est soumise aux juges spécialisés en restitution des terres, lors de l’étape judiciaire. Conformément aux dispositions de l’article 91 de la loi no 1448 de 2011, les magistrats des chambres civiles des tribunaux supérieurs de l’arrondissement judiciaire, spécialisés en restitution des terres, statuent en premier et dernier ressort sur la restitution des terres si des opposants sont identifiés au cours de la procédure. Si aucun opposant n’est identifié, ce sont les juges civils de la circonscription, spécialisés dans ce domaine, qui sont saisis et qui statuent en premier et dernier recours sur la restitution des terres et sur la délivrance de titres de propriété aux personnes dont les terres ont été confisquées et à celles qui les ont abandonnées de force.

22.Ainsi, la demande d’inscription de la parcelle au RTDAF se fait auprès de l’UAE‑GRTD, mais ce sont les juges ou magistrats civils spécialisés dans le domaine de la restitution qui se prononcent sur le droit à la restitution juridique et matérielle du bien. En outre, conformément aux dispositions du décret-loi no 4633 de 2011 portant adoption de mesures d’assistance, de prise en charge, de réparation intégrale et de restitution des droits territoriaux pour les communautés et groupes autochtones et du décret no 4635 de 2011 portant adoption de mesures d’assistance, de prise en charge, de réparation intégrale et de restitution des terres pour les victimes appartenant à des communautés noires, afro‑colombiennes, raizales et palenqueras, la restitution des droits territoriaux aux victimes appartenant à ces communautés est traitée administrativement par l’UAE-GRTD, et ce sont les juges ou les magistrats civils spécialisés dans le domaine de la restitution qui statuent sur le droit à la restitution territoriale.

23.D’autre part, il convient de noter que le Gouvernement colombien a ordonné le transfert de la gestion du système d’information relatif au Registre unique des terres et territoires abandonnés (RUPTA) de l’INCODER, en liquidation, à l’UAE-GRTD. Le RUPTA est un instrument qui permet aux personnes victimes de déplacement forcé à cause de la violence de bénéficier, au moyen d’une mesure administrative, de la protection des relations de propriété, de détention ou d’occupation des biens immobiliers qu’elles ont abandonnés. La procédure de demande d’inscription, de levée et d’annulation, à titre individuel et collectif, d’une mesure de protection RUPTA est réglementée par le décret no 640 de 2020, ainsi que par la quinzième partie du décret no 1071 de 2015.

24.Compte tenu de ce qui précède, et conformément aux décrets-lois nos 4633 et 4635 de 2011, précédemment cités, l’État colombien prévoit une procédure de restitution des droits territoriaux à caractère mixte, composé d’une étape administrative, prise en charge par l’UAE-GRTD, et d’une étape judiciaire, sous l’autorité des juges et magistrats spécialisés dans la restitution des terres.

2.Cas des communautés ethniques

25.Dans de tels cas, la procédure administrative prévue dans les décrets-lois nos 4633 et 4635 de 2011 commence par un examen préliminaire et par la caractérisation des incidences sur le territoire, pour aboutir à l’inscription du territoire ethnique au RTDAF. En cas de décision d’inscription, la demande de restitution est soumise aux juges et magistrats, qui doivent se prononcer sur le fond. Il faut noter qu’en matière de restitution des droits territoriaux, l’UAE-GRTD est responsable de la phase administrative, lors de laquelle elle exerce une représentation juridique si ce pouvoir lui est octroyé, et est également chargée de donner effet aux décisions des juges et magistrats civils spécialisés dans la restitution des terres sur lesquelles elle a compétence.

26.Ainsi, la restitution des droits territoriaux ethniques inclut la gestion de 265 territoires de communautés ethniques ; dont 76 % (202 territoires) correspondent à des communautés et/ou peuples autochtones et 24 % (63 territoires) à des communautés noires, afro‑colombiennes, raizales et palenqueras.

27.À cet égard, il convient de noter que :

49 657 familles ethniques ont une procédure de restitution de terres et/ou de protection préventive de leurs territoires collectifs en cours ;

435 813 hectares ont été inscrits au RTDAF par l’UAE-GRTD (procédure administrative terminée), dont 33 % se trouvent sur les territoires des communautés et/ou peuples autochtones et 67 % sur ceux des communautés noires.

3.Étapes de la procédure de restitution aux groupes ethniques

Étape administrative de la procédure de restitution des droits territoriaux ethniques

28.Pour l’étape administrative de la restitution des terres, 163 territoires sont en phase d’examen préliminaire et 45 autres en phase d’élaboration du rapport de caractérisation. Il convient de noter qu’à l’issue de la procédure administrative, 26 des territoires ayant fait l’objet d’une demande de restitution des droits territoriaux n’ont pas été pris en charge. Pour 13 d’entre eux, il a été recommandé que les incidences sur le territoire ne soient pas caractérisées. Cependant, des mesures ont été prises concernant le plan ethnique de protection des droits territoriaux pour les territoires des communautés et/ou des peuples autochtones, prévu à l’article 150 du décret no 4633 de 2011. En complément, des actions d’accompagnement et de suivi des recommandations formulées dans les actes administratifs d’adoption de l’examen préliminaire sont menées par l’UAE-GRTD.

Étape judiciaire de la procédure de restitution des droits territoriaux ethniques

29.S’agissant de la phase judiciaire, le tableau A des annexes montre que 31 demandes de restitution ethnique ont été déposées auprès des juges et magistrats civils spécialisés en restitution des terres. Ces requêtes, qui entrent dans le cadre des demandes de droits territoriaux, ont pour objectif de protéger les droits de 7 629 familles ethniques sur des terrains s’étendant sur 702 021 hectares.

Étape qui suit la décision relative à la procédure de restitution des droits territoriaux ethniques

30.Il convient de signaler que, pendant la période considérée, les juges et les magistrats civils spécialisés en restitution des terres n’ont pas rendu de décision de restitution des droits territoriaux ethniques.

C. Progrès réalisés en matière d’octroi de titres de propriété des territoires autochtones et d’extension des resguardos

31.En Colombie, le droit au territoire des communautés autochtones est reconnu comme un droit fondamental par le bloc de constitutionnalité. À cet égard, l’ANT, par l’intermédiaire de la Direction des affaires ethniques, a pour objectif d’allouer des terres aux communautés ethniques qui n’en ont pas ou qui n’en détiennent pas suffisamment pour assurer la survie physique et culturelle des peuples, en vertu du décret no 2363 de 2015. Les articles 25 et 26 du décret susmentionné décrivent précisément les missions confiées à l’ANT, en soulignant qu’elles permettent aux communautés de bénéficier de ce qu’on appelait alors l’utilisation des terres, afin de perpétuer les pratiques ancestrales.

32.Au cours de l’exercice actuel et compte tenu du budget disponible prévu à cet effet, après avoir traité ses différents engagements à la fin de 2019, la Sous-direction des affaires ethniques de l’entité exécute actuellement son plan de prise en charge 2020, qui comporte 358 procédures de délivrance de titres de propriété de territoires aux communautés autochtones et 159 procédures de délivrance de titres de propriété de territoires aux communautés noires, soit un total de 517 procédures actives.

33.Il convient de noter que les mécanismes constitutionnels et juridiques régissant l’utilisation, la jouissance de la terre et l’accès à celle-ci, qui constitue le facteur de production des communautés et assure la survie des peuples ethniques de Colombie, entrent dans le cadre de la législation décrite précédemment. Les procédures portant spécifiquement sur la délivrance de titres de propriété relèvent du décret no 1071 de 2015, à savoir, pour les communautés autochtones, les procédures régissant la constitution, l’assainissement et l’extension des resguardoset, pour les communautés noires, afro-colombiennes, raizales et palenqueras, la loi no 70 de 1993 et le décret no 1066 de 2015, avec l’octroi des titres fonciers collectifs des conseils communautaires.

34.Le décret no 1071 de 2015 constitue le cadre juridique de la procédure de légalisation de la propriété foncière des communautés autochtones. Il confère à l’ANT le pouvoir d’accorder à un territoire le statut officiel de resguardoautochtone. Il s’agit d’une procédure administrative particulière, de par la qualité juridique des personnes visées et de par sa nature. Ainsi, à ce jour, pour l’exercice 2020, les procédures relatives aux communautés autochtones qui ont été menées à bien sont les suivantes.

1. Délivrance d’un titre de propriété

Tableau 1 Source : Informations de l’ANT, 20 novembre 2020

Nombre total de resguardos autochtones créés (2020, à ce jour)

N o

Resguardo

Département

Municipalité

Peuple

Accord

Procédure

Familles

Terrains en friche (ha)

Fdt (Ha)

Parcelles privées (ha)

Superficie totale (ha)

1

Naexal Lajt

Meta

Mapiripán

Jiw

0075-25-10-2018

0099-30-10-2019

Création

226

1 733,1724

1 733,1724

2

Fiil Vits La Perdiz

Huila

San Agustín

Nasa

0102-28-11-2019

Création

28

495,6339

495,6339

3

El Águila

Caquetá

Belén de los Andaquíes

Misak

0098-28-10-2019

Création

15

406,6461

406,6461

4

Tamaquito II

La Guajira

Barrancas

Wayúu

0104-28-11-2019

Création

42

299,8368

299,8368

5

Puerta del Macizo

Cauca

La Sierra

Yanacona

0101-28-11-2019

Création

128

9,3775

9,3775

6

Puerto Claver

Antioquia

El Bagre

Senú

0103-28-11-2019

Création

87

7 215,3388

7 215,3388

7

Korodo Ite

Antioquia

Remedios

Embera Chamí

0100-28-10-2019

Création

19

75,1104

75,1104

8

Omagá

Antioquia

Cáceres

Senú

0110-20-12-2019

Création

39

27,7693

27,7693

9

Inkal Watzal

Putumayo

Orito

Awá

120-28-04-2020

Création

35

299,3410

47,8387

347,1797

5

Camaritagua

Amazonas

Zone non municipalisée de La Pedrera

Yucuna , Miraña , Ticuna, Letuama , Macuna , Matapí

114-28-01-2020

Extension

19

21 775,3422

21 775,3422

Total, familles bénéficiaires et hectares

638

29 771,7785

2 238,1838

375,4448

32 385,4071

2.Approuvés par le Conseil d’administration dans le cadre de la procédure d’inscription auprès du Bureau d’enregistrement des actes publics (ci-après ORIP)

Tableau 2 Source : Informations de l’ANT, 20 novembre 2020

Accords approuvés par le Conseil d’administration et en cours d’inscription auprès de l’ORIP

No

Resguardo

Département

Municipalité

Peuple

Accord

Procédure

Familles

Terrains en friche (ha)

Fdt (Ha)

Parcelles privées (ha)

Superficie totale (ha)

1

Inga de Santiago

Putumayo

Santiago

Inga

128-15-07-2020

Création

1 049

6 215,1921

137,879 0

6 353,0711

2

San Antonio 2

Antioquia

Zaragoza

Senú

127-015-07-2020

Création

26

63,0761

63,0761

3

Nukanchipa Alpa Amukunapa Wasi

Putumayo

Villagarzón

Inga

126-015-07-2020

Création

79

30 803,6248

30 803,6248

4

Kanalitojo

Vichada

Puerto Carreño

Sáliba Amorua

130-27-08-2020

Création

34

1 300,0640

1 300,0640

6

Estación Tálaga

Huila

Las Plata

Nasa

121-28-04-2020

Extension

124

81,902 9

92,3456

174,2485

7

La Concepción

Cauca

Santander de Quilichao

Nasa

124-11-06-2020

Extension

937

129,7858

129,7858

8

Kizgó

Cauca

Silvia

Kizgó

129-27-08-2020

Extension 2

1 634

717,9965

717,9965

9

La Reforma

Huila

La Plata

Misak

131-27-08-2020

Extension

47

46,2641

46,2641

Total, familles bénéficiaires et hectares

3 949

61 363,4731

3.Procédures approuvées par le Conseil d’administration pour signature, publication et inscription auprès de l’ORIP

Tableau 3 Source : Informations de l’ANT, 20 novembre 2020

1

Embera Chamí Doquera

Meta

Lejanías

Embera Chamí

Approuvé par le Conseil d’administration A vril 2020

Création

30

144,4906

144,4906

2

Nuevo Horizonte

Cauca

Morales

Kizgó

Approuvé par le Conseil d’administration 27 septembre 2020

Création

184

34,2088

31,827 7

66,0365

3

Leonardo José Campanario

Antioquia

Cáceres

Senú

Approuvé par le Conseil d’administration 27 septembre 2020

Création

40

35,7994

44,847 9

80,6473

4

Zince La 18

Antioquia

Zaragoza

Senú

Approuvé par le Conseil d’administration 27 septembre 2020

Création

35

15,8605

15,8605

5

Altos del Tigre

Antioquia

Cáceres

Senú

Approuvé par le Conseil d’administration 27 septembre 2020

Extension

39

46,5646

46,5646

6

El Medano

Casanare

Orocue

Saliva

Approuvé par le Conseil d’administration 27 septembre 2020

Extension

46

200,6628

200,6628

Total, familles bénéficiaires et hectares

374

554,2623

35.Les tableaux 1, 2 et 3 montrent les progrès réalisés par l’ANT pour garantir la sécurité juridique des territoires collectifs en faveur des communautés et resguardosautochtones, malgré les restrictions des déplacements en raison de l’état d’urgence sanitaire déclaré par le Gouvernement colombien.

D.Clarification sur les déclarations suivantes

« l’Unité chargée de la restitution des terres a rejeté 64 % des demandes de restitution de terres »

36.Selon les informations fournies par l’UAE-GRTD, et comme mentionné précédemment, cette entité est notamment chargée des démarches administratives de restitution des terres à titre individuel, qui permettent de solliciter l’inscription d’une parcelle au RTDAF. Par conséquent, il faut absolument signaler que, dans le cadre de cette procédure individuelle, aucun refus n’a été prononcé, comme l’indique le Comité.

37.Conformément aux dispositions de la loi no 1448 de 2011, l’UAE-GRTD prend des décisions sur le fond telles que : i) ne pas lancer d’examen formel ; ii) ne pas inscrire la parcelle au RTDAF ; et (iii) prendre une ordonnance de rétractation. Ces décisions sont expliquées ci-après.

1.Ne pas lancer d’examen formel : conformément à l’article 2.15.1.3.5 du décret no 1071 de 2015, l’UAE-GRTD peut décider de ne pas lancer d’examen formel d’un dossier et par conséquent refuser l’inscription de la parcelle au RTDAF dans cinq circonstances. Ces circonstances sont les suivantes :

a)Lorsque les faits de confiscation ou d’abandon du bien faisant l’objet de l’inscription au registre ne correspondent pas aux critères prévus à l’article 3 de la loi no 1448 de 2011 sur la qualité de victime ;

b)Lorsque les conditions de l’article 75 de la loi no 1448 de 2011 ne sont pas respectées, à savoir, entre autres, les circonstances suivantes :

•L’existence de demandes d’inscription au Registre des terres confisquées et abandonnées de force qui concernent des terrains en friche situés dans les zones de réserve forestière de la loi no 2 de 1959, si des procédures de saisie de terres à des fins de restitution ont été engagées devant l’autorité environnementale compétente et que cette dernière a décidé de ne pas ordonner la saisie ;

•Si les demandes d’inscription au registre concernent des terrains en friche situés dans les zones du réseau de parcs naturels nationaux définies dans le décret no 2811 de 1974 et les règles qui le modifient ou l’abrogent ;

•Si les demandes d’inscription au registre concernent des terrains en friche situés dans les zones des parcs naturels régionaux, qui sont considérés comme inaliénables, imprescriptibles et insaisissables ;

c)Lorsqu’il est établi que les faits exposés par le requérant ne sont pas vrais, ou que celui-ci a délibérément modifié ou simulé les conditions requises pour obtenir l’inscription ;

d)En l’absence de lien de causalité nécessaire entre les faits préjudiciables relatés par le requérant et l’abandon et/ou la confiscation du terrain qui fait l’objet de la demande ;

e)Lorsque le requérant n’est pas légitime pour engager l’action de restitution, selon les critères définis à l’article 81 de la loi no 1448 de 2011.

2. Ne pas inscrire la parcelle au RTDAF : les motifs de non-inscription, énoncés à l’article 2.15.1.4.5 du décret no 1071 de 2015, sont les suivants

•Les conditions prévues aux articles 3, 75, 76 et 81 de la loi no 1448 de 2011 ne sont pas respectées ;

•Il n’est pas possible de localiser précisément le terrain faisant l’objet de la demande de création ;

•Il est établi que les faits relatés par le requérant ne sont pas vrais, ou que celui-ci a délibérément modifié ou simulé les conditions requises pour obtenir l’inscription.

3.Retrait de la demande d’inscription au RTDAF : bien que la loi no 1448 de 2011 et le décret d’application no 1071 de 2015 omettent d’indiquer la possibilité de rétractation, afin de combler cette lacune, le contenu normatif visé à l’article 2.15.1.6.9 du décret no 1071 de 2015 est mis en œuvre. Celui-ci dispose : « […] pour les points non couverts par la norme transitoire spécifique, les normes ordinaires s’appliquent ». Ainsi, il convient de se référer au Code de procédure administrative et du contentieux administratif, qui dispose

« Article 18. Retrait exprès de la demande. Les intéressés peuvent retirer leur demande à tout moment, étant entendu qu’ils peuvent la soumettre à nouveau si elle satisfait à l’ensemble des conditions légales, mais les autorités peuvent poursuivre d’office la procédure si elles jugent que l’intérêt public l’exige ; dans ce cas, elles rendent une décision motivée. ».

38.De ce point de vue, il ne fait aucun doute que la demande d’inscription au RTDAF peut faire l’objet d’une rétractation. Il convient de noter que, dans le cadre de la justice transitionnelle, l’UAE-GRTD conserve le pouvoir de décider de manière informelle de poursuivre ou non la procédure, comme elle le juge nécessaire, en se fondant sur l’intérêt public et en respectant des critères d’harmonisation avec les droits individuels. Elle se conforme ainsi à l’avis de la Cour constitutionnelle qui, dans son arrêt C-053 de 2001, a établi :

« Pour faire prévaloir autant que possible l’intérêt général, il est indispensable que l’agent de l’appareil judiciaire analyse soigneusement les particularités de chaque cas, tente de concilier l’intérêt général et les droits des particuliers et, si cela n’est pas possible, l’examine en tenant compte de la hiérarchie des valeurs de la Constitution. ».

39.Par conséquent, pour qu’une rétractation expresse soit décrétée au stade administratif, il est essentiel que l’analyse de l’UAE-GRTD permette d’attester : a) que la déclaration de l’intéressé ne présente aucun manque de consentement ou de capacité ; b) que cette renonciation engage exclusivement les intérêts du requérant ; c) que la rétractation ne porte atteinte à aucun intérêt supérieur dans le cadre de la procédure de restitution des terres, tel que le droit à la vérité et à la justice.

40.Pour ce qui est de la rétractation tacite, l’article 17 du Code de procédure administrative et du contentieux administratif, remplacé par l’article premier de la loi no 1755 de 2015, relatif aux demandes incomplètes et à la rétractation tacite, dispose :

« […]

Article 17. Demandes incomplètes et rétractation tacite. En vertu du principe d’efficacité, lorsque l’autorité constate qu’une demande déjà déposée est incomplète ou que le requérant doit accomplir à ses frais des démarches afin d’obtenir une décision sur le fond, et que la procédure peut se poursuivre sans contrevenir à la loi, elle demande au requérant, dans un délai de dix (10) jours à compter de la date de dépôt de la demande, de la compléter dans un délai maximum d’un (1) mois.

À partir du lendemain de la présentation des documents ou rapports par l’intéressé, le délai de résolution de la demande est réactivé.

Le requérant est considéré avoir retiré sa demande ou renoncé à la procédure lorsqu’il ne donne pas suite à cette injonction, à moins que, avant l’expiration du délai accordé, il ne sollicite une prolongation correspondant au même délai.

À l’expiration des délais fixés dans le présent article, si le requérant ne s’est pas conformé à la demande qui lui a été faite, l’autorité prononce la rétractation et le classement du dossier, par un acte administratif motivé et notifié personnellement, uniquement susceptible de recours en révision. Il reste entendu que la demande en question peut être à nouveau déposée si les conditions prévues par la loi sont pleinement respectées.

[...] ».

41.L’application du concept de rétractation tacite est conforme aux dispositions constitutionnelles et aux principes de la fonction administrative tels que l’efficacité, l’économie et la célérité. Le requérant a ainsi pleine faculté pour fournir les documents et les informations nécessaires afin d’apporter une réponse sur le fond et cohérente. En outre, l’article susmentionné énonce les principes de transparence et de garantie d’une procédure régulière qui s’appliquent aux citoyens en général, en particulier aux victimes du conflit armé, en exigeant que l’acte administratif de rétractation tacite soit motivé et qu’il soit possible, pour garantir les droits de la défense, de former un recours en révision contre la décision prise concernant la demande.

42.1Parallèlement, pour ne pas négliger la bonne application et la réalisation des droits, le même texte prévoit la possibilité de déposer une demande respectant toutes les conditions prévues par la loi, en accordant un allégement de la preuve à la personne qui sollicite une restitution des terres en cas de dépôt d’une nouvelle demande, à condition qu’elle n’ait aucun nouvel élément à faire valoir depuis sa première requête et qu’elle n’ait pas fait l’objet d’un refus d’inscription au RTDAF.

43.À cet égard, le 30 septembre 2020, sur les 126 322 demandes d’inscription au RTDAF à titre individuel déposées, 41,61 % ont été retirées par le requérant, n’ont pas été formellement examinées ou n’ont pas été inscrites, comme en témoigne le tableau suivant :

Total des demandes d’inscription déjà déposées

100 %

Retirées

9,26 %

Non examinées formellement

16,31 %

Non inscrites

16,03 %

Source  : Agence nationale des terres .

44.« Le retard important que l’Agence foncière nationale a pris dans l’application des décisions de la Cour exigeant l’octroi de titres de propriété pour les territoires collectifs ».

45.Les procédures de délivrance de titres de propriété aux communautés ethniques sont des démarches administratives réglementées gérées de manière interdisciplinaire par des professionnels du droit, des agronomes, la zone topographique et d’autres entités telles que l’Institut national géographique Agustin Codazzi (ci-après IGAC), mais aussi par la communauté elle-même.

46.Les procédures administratives qui conditionnent la délivrance de titres de propriété des territoires des communautés ethniques, puis l’état d’application des arrêts de la Cour constitutionnelle en la matière, sont décrits ci-après.

Conditions des procédures de délivrance de titres de propriété

47.S’agissant des procédures administratives applicables aux communautés ethniques, elles se déroulent en fonction de la faisabilité technique et juridique de chaque cas. Si les délais fixés par la loi doivent être respectés, les circonstances particulières de chaque cas peuvent nécessiter davantage de temps que prévu, ce qui rend leur prise en charge et leur réalisation plus complexes. Les procédures de délivrance de titres de propriété dépendent des facteurs suivants :

•Avant de parvenir au stade de l’approbation du projet d’accord de création, d’extension, de restructuration d’un resguardoautochtone, il peut arriver que les communautés ne disposent pas de suffisamment de terres et qu’il soit nécessaire de recourir à un processus d’achat. En temps normal, cela retarde de huit mois la procédure de délivrance de titres de propriété d’un resguardo;

•Dans certains cas, les membres de la communauté doivent d’abord réaliser tous les dons de terres possibles en faveur de la communauté pour donner plus de poids à leur revendication territoriale en vue d’une légalisation ;

•La consolidation des procédures administratives menées par l’ANT dépend d’autres entités, telles que l’IGAC, la Direction du notariat et de l’enregistrement ou le Ministère de l’environnement et du développement durable ;

•Les démarches administratives qui doivent se dérouler sur le terrain dépendent également de circonstances externes déterminées dans une large mesure par les conditions d’accessibilité au territoire, en matière d’ordre public, de situation géographique, d’extension territoriale et de facteurs écosystémiques. Cela peut allonger la durée d’intervention ou même gêner les travaux préparatoires, tels que l’activation des protocoles de sécurité, la coordination logistique avec les communautés bénéficiaires, la coopération interinstitutionnelle et l’élaboration des plans de travail en plusieurs étapes, entre autres ;

•Certains facteurs externes influent également sur le déroulement des tâches administratives de chaque procédure, qu’il s’agisse des conditions d’accessibilité au territoire en raison de son emplacement géographique et de ses conditions météorologiques, ou de l’étendue du territoire ;

•De même, en matière d’ordre public, certaines études sur le terrain nécessitent que l’autorité compétente certifie l’absence de mines antipersonnel ou de munitions non explosées sur les territoires visés ; ou qu’un travail de coordination avec le Ministère de la défense soit réalisé en vue de définir les conditions de sécurité. À cet égard, il convient de rappeler que la terre est considérée par la Cour constitutionnelle, dans son ordonnance no 004 de 2009, comme un facteur lié et sous-jacent au conflit armé ; en ce sens, les procédures menées par l’ANT ont tendance à susciter des réserves, voire de l’animosité de la part des acteurs territoriaux, notamment de ceux qui sont en dehors du cadre de la loi ;

•L’accès des équipes techniques aux territoires dans le cadre des procédures de l’ANT nécessite la plus grande prudence, ce qui explique que les interventions sur le terrain ont parfois été suspendues jusqu’à ce que l’ordre public soit normalisé et garanti. Par conséquent, depuis l’année dernière, l’entité a mis en place un protocole de sécurité pour garantir la viabilité des interventions et la coordination de la gestion de la procédure, avec le Ministère de la défense à l’échelle nationale et avec les autorités civiles et les forces de l’ordre à l’échelle territoriale.

48.Compte tenu de ce qui précède, les procédures ne peuvent être menées à bien en une seule année et, dans certains cas, des modifications doivent être apportées au plan de prise en charge, en fonction de la viabilité de chaque cas. Ces facteurs, ainsi que le contenu du dossier de délivrance de titre de propriété territoriale, sont finalement analysés par le Conseil d’administration de l’ANT, qui prend une décision et, en cas d’octroi de titres de propriété aux communautés noires, il est soumis à l’avis préalable de la Commission technique de la loi no 70.

49.Compte tenu de ce qui précède, étant donné que la délivrance de titres de propriété est une procédure interadministrative, complexe, qui doit garantir l’accès aux terres collectives selon les us et les coutumes des communautés ethniques, l’exécution des décisions de la Cour constitutionnelle est coordonnée avec les procédures réglementées et établies dans le décret no 1071 de 2015 et le décret no 1066 de 2015.

État d’avancement de l’exécution des arrêts de la Cour constitutionnelle

50.L’annexe 2 cite les arrêts rendus par la Cour constitutionnelle et les met en relation avec les mesures prises par le Gouvernement colombien pour chacun d’entre eux.

II.Recommandation sur les peuples autochtones menacés d’extinction, en situation d’isolement et de premier contact, paragraphe 23 des observations finales concernant le rapport de la Colombie valant dix-septième à dix-neuvième rapports périodiques

A.Progrès dans l’application des arrêts de la Cour constitutionnelle et des plans de sauvegarde ethnique en faveur des peuples autochtones reconnus comme étant en danger d’extinction physique et culturelle, en particulier les peuples awá et uitoto

51.L’État colombien, par l’intermédiaire du Ministère de l’intérieur, en application des ordonnances nos 004 de 2009, 174 de 2011, 373 de 2016 et 620 de 2017, dans le cadre de l’arrêt T-025 de 2004 par lequel la Cour Constitutionnelle déclare l’état de fait inconstitutionnel de la situation de déplacement forcé, met en œuvre les plans au moyen des mesures suivantes : i) consultation, installation, présentation et définition du plan de travail ; ii) élaboration d’un diagnostic commun ; iii) validation du diagnostic par la communauté et l’institution ; et iv) formulation de programmes et de projets.

1.Consultation, installation, présentation et définition du plan de travail.

52.Cette étape comprend la mise en place officielle de la procédure, la présentation de l’ordonnance no 004, ainsi que le plan de travail à développer selon les phases envisagées pour l’élaboration du plan de sauvegarde.

53.À cet égard, en janvier 2010, une assemblée générale du peuple awá s’est tenue dans la municipalité de Ricaurte (resguardoel Palmar). Trois organisations du peuple awá en Colombie (UNIPA, CAMAWARI et ACIPAP) y ont participé, en présence d’entités gouvernementales nationales et locales, du Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), du Comité consultatif pour les droits de l’homme et les déplacements (CODHES) et de la M inga. À cette occasion, les propositions des organisations ont été présentées, les critères de coordination des trois documents ont été définis et cinq groupes de travail ont été mis en place pour chaque axe prioritaire. Des points spécifiques ont aussi été abordés, comme la protection des dirigeants, la vérité, la justice, la réparation et les garanties de non-répétition, et les délais à court, moyen et long terme ont été fixés.

54.Sur la base de tous les éléments précités, la proposition conjointe de Plan de sauvegarde ethnique a été acceptée et approuvée et, en septembre 2011, dans la municipalité d’Orito‑Putumayo, il a été annoncé que la procédure de consultation préalable du Plan de sauvegarde était mise en œuvre, et un accord a été trouvé concernant la marche à suivre.

2.Élaboration d’un diagnostic commun

55.Cette étape correspond à l’élaboration d’un diagnostic complet de la situation de chaque peuple au regard de la question du déplacement forcé et des risques d’extinction physique et culturelle auxquels il est confronté. À ce stade, il est fait appel à la participation des représentants des communautés autochtones du peuple concerné, des entités publiques impliquées dans l’ordonnance no 004 et de tout autre acteur, selon les besoins.

56.Par conséquent, de septembre à décembre 2011, les documents de diagnostic élaborés par chaque organisation du peuple awá de Colombie ont été mis en commun. Celles-ci ont travaillé selon une méthodologie participative, en parvenant à associer connaissances techniques et savoir traditionnel. Pour cela, une méthodologie flexible, combinant des techniques qualitatives et l’étude de données quantitatives, a été adoptée.

57.De cette façon, l’observation directe − pendant la première phase du travail de terrain − permet d’identifier les resguardoset de définir les contextes. Les ateliers permettent de connaître l’évolution récente de la situation sociale et culturelle, de la dynamique du conflit armé interne et des déplacements forcés ; ainsi que des principales incidences sur le territoire.

58.S’agissant de l’étude quantitative, dans le cas de l’organisation Unidad Indígena del Pueblo Awá (UNIPA), les informations obtenues étaient issues de différents communiqués diffusés au public, de la base de données créée par l’organisation et alimentée par les informations issues de ces communiqués, ainsi que de données collectées auprès du Bureau du Défenseur du peuple et de diverses enquêtes menées dans la communauté.

59.Pour l’organisation autochtone ACIPAP, un rapport général et une analyse des violations des droits de l’homme ont été réalisés, grâce à des visites dans les communautés et des échanges avec les personnes concernées, avec la participation des autorités traditionnelles et des dirigeants qui ont vécu de près le conflit armé.

3.Validation du diagnostic par la communauté et l’institution

60.Cette étape correspond à la présentation de l’ensemble du diagnostic pour y apporter les ajustements ou les approbations nécessaires. Les axes d’action sont présentés sous forme de propositions de protection, de prise en charge ou de prévention des dommages, selon le cas.

61.En 2011, lors d’une m ingade réflexion, quelques lignes directrices politiques pour le Plan de sauvegarde ethnique du peuple awá (PSEA) ont été établies, en ajustant les matrices de chaque volet après examen des documents et de la base de données, et en utilisant de préférence du matériel de recherche déjà mis au point par les organisations awá, les organes internationaux, les organisations non gouvernementales et des recherches universitaires.

62.Au cours de la période allant de décembre 2011 à février 2012, le PSEA a été mis à jour. Certaines orientations ont notamment été redéfinies et d’autres, relatives à des questions telles que le katsa-Su (cosmos-environnement), le secteur minier et énergétique, la Gran Familia Awá − GFA (binationalité) et les femmes et la famille, ont été ajoutées.

63.D’autre part, en complément des tables rondes de dialogue et de concertation prévues pour la prochaine phase de la feuille de route, des progrès ont été réalisés pour diagnostiquer les conséquences sur l’environnement et les violations des droits de l’homme, et la conception du programme a été ajustée en apportant des modifications aux matrices des différents volets. Par ailleurs, les actions précédemment envisagées dans le cadre du PSEA ont été formulées sur la base des informations recueillies jusqu’en mars 2010.

64.Afin de réaliser cette mise à jour, le peuple awá a conclu avec le Ministère de l’intérieur l’accord interadministratif no 29 de 2011, qui validait le document de diagnostic du PSE en juin 2012, lorsque les autorités du peuple awá ont remis le Plan de sauvegarde ethnique au Gouvernement colombien. Une fois le Plan validé et rédigé par la communauté, une concertation a eu lieu sur les orientations qui y sont définies.

4. Formulation de programmes et de projets

65.Une fois le diagnostic et les axes d’action présentés, une feuille de route de concertation et de formulation des programmes et projets est fixée avec chaque secteur, ainsi qu’avec les entités territoriales. L’objectif est ainsi de respecter les critères minimaux de rationalité définis par la Cour constitutionnelle dans l’ordonnance no 004 et, en ce sens, de mettre en œuvre le plan. Les progrès suivants ont été accomplis :

•En septembre 2012, dans la ville de Pasto, la concertation relative au PSEAWÁ a débuté, avec les entités gouvernementales concernées par l’ordonnance no 004/2009, conformément aux nouvelles orientations politiques énoncées dans le document de mise à jour du Plan de sauvegarde ethnique ;

•À cette occasion, en l’absence des entités gouvernementales dont la présence est essentielle pour mener une concertation sur ces questions, telles que le Ministère de l’environnement et du développement durable, le Ministère de l’agriculture et du développement territorial et le Ministère des mines et de l’énergie, il n’a pas été possible de poursuivre cette première phase de concertation. En octobre 2012, la première phase de la concertation sur les nouvelles orientations politiques du PSEAWÁ s’est poursuivie dans la ville de Puerto Asís et a permis de parvenir à des accords sur les piliers cosmogoniques et culturels, fondamentaux pour la survie du peuple awá, de son propre point de vue et pour garantir son autonomie ;

•En octobre 2012, l’accord no 184 de 2012 a été signé avec l’Asociación de Cabildos Indígenas Awá del Putumayo (ACIPAP) dans le but de « conjuguer les efforts pour soutenir l’Asociación de Cabildos Indígenas Awá del Putumayo dans le cadre de la procédure de coordination interinstitutionnelle du Plan de sauvegarde du peuple awá » ;

•En novembre 2012, l’accord no 185 de 2012 a été signé avec l’Organisation autochtone du peuple awá (CAMAWARI) dans le but de « conjuguer les efforts pour soutenir l’Organisation autochtone du peuple awá (CAMAWARI) dans le cadre de la procédure de coordination interinstitutionnelle du Plan de sauvegarde du peuple awá » afin d’avancer dans la concertation avec l’ensemble du peuple awá ;

•En 2013, le Ministère de l’intérieur, par l’intermédiaire de la Direction des affaires relatives aux autochtones, aux Roms et aux minorités, a conclu trois projets d’accord pour la coordination des actions dans le cadre du volet Gouvernance du Plan de sauvegarde awá avec chacune des associations d’autorités traditionnelles awá de Nariño et Putumayo (UNIPA, CAMAWARI et ACIPAP) ;

•En décembre 2013, les accords suivants ont été signés avec l’UNIPA et l’ACIPAP, respectivement :

M-1139 de 2013

Conjuguer les efforts pour créer et mettre en œuvre l’école de formation à la pensée Awa, les mécanismes d’auto‑administration de la justice, afin de renforcer l’autonomie et l’auto‑administration dans le cadre du décret-loi no 4633 de 2011.

M-1140 de 2013

Conjuguer les efforts pour mettre en œuvre le volet Gouvernance de lapremière phase du Plan de sauvegarde du peuple awá, conformément auxdécisions prises par la Cour constitutionnelle dans son arrêtT-025 de 2004 et son ordonnance de suivino004 de 2009.

M-1147 de 2013 (ACIPAP)

Conjuguer les efforts pour mettre en œuvre le volet Gouvernance et auto‑administration de la première phase du Plan de sauvegarde du peuple awá, en faveur des autorités autochtones, des dirigeants et des dirigeantes du peuple Inkal Awa de Putumayo, conformément aux décisions prises par la Cour constitutionnelle dans son arrêtT‑025 de 2004 et son ordonnance de suivino004 de 2009.

•Au second semestre de 2015, la première phase du volet Droits territoriaux du Plan de sauvegarde de l’ethnie awá a fait l’objet d’un accord avec les autorités autochtones awá. Ainsi, le Ministère de l’environnement et du développement durable, comme convenu lors de la réunion de concertation en faveur du peuple awá (décret no 1137/10), pendant la session de Chachagui-Nariño qui a eu lieu en août 2015, a lancé la concertation pour la mise en œuvre du Plan de gestion culturelle et environnementale. À la suite de cette réunion, un plan de mise en œuvre de quatre ans a été décidé conjointement par le gouvernement awá, le Ministère de l’environnement et du développement durable et les Corporations territoriales autonomes, avec un accompagnement du Ministère de l’intérieur ;

•En 2016, des progrès ont été faits dans le cadre du plan de travail annuel, élaboré en concertation avec le peuple autochtone awá. Les contenus, dates et méthodologies ont été définis afin de lancer l’étape de concertation suivante, relative aux volets du PSEA ;

•Du 28 novembre au 2 décembre 2016, à Puerto Asís Putumayo, une session de la réunion de concertation awá s’est tenue afin de parvenir à un accord global sur les volets Droits de l’homme et Droits territoriaux.

66.Au cours du mois de novembre 2017, une somme de 100 millions a été accordée aux trois organisations awá, qui représentaient Nariño et Putumayo, en fonction des activités qui avaient été décidées avec chacune d’entre elles pour la deuxième phase de la ligne directrice « auto‑administration », par le biais des accords suivants :

M-2224 de 2017 (CAMAWARI)

Conjuguer les efforts du Ministère de l’intérieur, par l’intermédiaire de la Direction des affaires relatives aux autochtones, aux Roms et aux minorités, et de l’ASSOCIATION DES AUTORITÉS TRADITIONNELLES AUTOCHTONES AWA (CAMAWARI) afin de renforcer la gouvernance pour élaborer et mettre en œuvre le mandat politique, organisationnel et stratégique, en application de l’arrêt T-025 et de l’ordonnance de suivino004 de 2009.

M-2218 de 2017 (UNIPA)

Conjuguer les efforts du Ministère de l’intérieur, par l’intermédiaire dela Direction des affaires relatives aux autochtones, aux Roms et aux minorités, et de l’ASSOCIATION DES AUTORITÉS TRADITIONNELLES AUTOCHTONES AWA UNIDAD INDIGENA DEL PUEBLO AWA (UNIPA) afin de renforcer la gouvernance de ce peuple en améliorant ses capacités propres et ses capacités de coordination interinstitutionnelle des procédures et des projets, en application de l’arrêt T-025 et de l’ordonnance de suivino004 de 2009.

M-2158 de 2017 (ACIPAP)

Conjuguer les efforts du Ministère de l’intérieur et de l’Asociación de CabildosIndígenasdel pueblo AWA del Putumayo (ACIPAP INKAL AWA) afin de renforcer la gouvernance pour élaborer et mettre en œuvre le mandat politique, organisationnel et stratégique, en application de l’arrêt T-025 et de l’ordonnance de suivino004 de 2009.

•En 2018, le travail direct de concertation entre les organisations awá et la DAIRM pour établir la feuille de route pour l’année 2018 a débuté. Il a pris la forme de sessions de la réunion de concertation du peuple awá (MCAWA), dans le but de présenter une stratégie qui permette d’adopter formellement le Plan de sauvegarde ethnique.

•En 2019, l’accord no 1277 de 2019 a été signé avec l’UNIPA dans le but suivant : « Conjuguer les efforts du Ministère de l’intérieur, par l’intermédiaire de la Direction des affaires relatives aux autochtones, aux Roms et aux minorités, et de l’ORGANISATION UNIDAD INDIGENA DEL PUEBLO AWA (UNIPA) pour renforcer le peuple awá sur le plan politique et organisationnel et pour mener une concertation sur les axes d’action “femmes et famille” et “enfance et jeunesse”, dans le contexte de la concertation sur le Plan de sauvegarde ethnique du peuple autochtone awá en application de l’arrêt T-025 de 2004 et de l’ordonnance de suivi no 004 de 2009. » L’objectif est d’assurer la continuité du renforcement organisationnel politique, au moyen d’éléments et d’actions favorisant des processus constructifs et communautaires qui leur permettent d’exercer leurs droits collectifs et individuels, leur autonomie et leur capacité d’autodétermination. Il s’agit également de lancer la première des deux phases de définition des orientations relatives aux femmes et à la famille, ainsi qu’aux enfants et aux jeunes, et de concertation sur ces dernières ;

•Pour l’année en cours, le projet de finalisation du diagnostic sur les femmes awá doit être mené et l’école de leadership pour les jeunes awá doit être construite, dans le cadre du renforcement des axes d’action « femme et famille » et « enfants et jeunesse » du peuple awá et de la concertation sur ce thème de l’UNIPA. Pour cela, un accord interadministratif d’une valeur de 370 000 000 de dollars a été conclu avec l’association UNIPA ;

•À cela vient s’ajouter un projet de 200 000 000  de dollars pour renforcer l’axe « auto‑administration » de l’association ACIPAP du peuple awá, dans le cadre de la concertation sur le Plan de sauvegarde ; ainsi qu’une deuxième somme de 40 000 000 de dollars pour le renforcement de l’axe « auto‑administration » de l’association CAMAWARI du peuple awá, faisant suite à la dernière phase de concertation initiée en 2019 ;

•Afin de pouvoir clore la phase de formulation du programme et des projets dans le cadre de la concertation, l’accord no 1139 du 22 septembre 2020 a été signé en vue d’unifier et de valider les concertations partielles menées avec chacune des organisations du peuple awá. Selon cet accord, les trois organisations (UNIPA, CAMAWARI et ACIPAP) doivent impérativement travailler ensemble. L’objectif est de donner suite aux engagements pris lors des dernières réunions de concertation (MCAWA). Ces espaces ont été utilisés pour formuler les programmes et projets et mener des concertations à ce sujet, et pour définir les axes à court, à moyen et à long terme de la procédure d’adoption formelle du Plan de sauvegarde ;

•Cet accord conclura l’étape de concertation avec le peuple awá, qui doit être menée de manière coordonnée puisqu’il s’agit d’un plan de sauvegarde intégrant le travail de chacune des organisations, selon ses besoins définis en fonction de la taille de sa population, de sa situation géographique et de ses propres situations de vulnérabilité. En plus des travaux précédents, il est nécessaire de commencer l’adoption formelle du Plan de sauvegarde, qui implique la définition de ses axes à court, à moyen et à long terme ;

•La phase suivante, intitulée « Définition du Plan de sauvegarde, suivi et évaluation », qui correspond à l’adoption formelle du Plan de sauvegarde ethnique des peuples autochtones, doit être lancée dans les années à venir. À ce stade, il est fait appel à la participation des autorités et représentants des communautés autochtones du peuple concerné, des entités publiques impliquées dans l’ordonnance et de tout autre acteur qui pourrait être nécessaire pour garantir ensuite sa mise en œuvre à court, à moyen et à long terme.

B.Mesures de protection des peuples autochtones en situation d’isolement volontaire ou de premier contact, en particulier le peuple nukak-makú.

67.La Direction des affaires relatives aux autochtones, aux Roms et aux minorités du Ministère de l’intérieur a pris des mesures de protection et de prévention relatives aux droits des peuples autochtones en situation d’isolement, notamment le peuple autochtone nukak, en situation de premier contact. Compte tenu de ce qui précède, les points suivants sont évoqués ci-après : le Plan de sauvegarde du peuple nukak, conformément à l’ordonnance no 004 de 2009 ; la création d’un espace d’auto‑administration, conformément à l’ordonnance no 173 de 2012 ; les actions mises en œuvre pour les peuples autochtones dans le cadre de l’isolement volontaire ; ainsi que pour les peuples autochtones en situation de premier contact.

1.Plan de sauvegarde du peuple nukak, conformément à l’ordonnance no 004 de 2009

68.L’élaboration du Plan de Sauvegarde avec le peuple nukak a été l’un des exercices les plus complexes entrepris par le Gouvernement colombien, compte tenu des conditions physiques et culturelles de semi-nomadisme de ce peuple et de la gravité des effets dommageables sur ses habitants et son territoire, s’agissant du dernier peuple à être en situation de premier contact avec les entités. Dans certains cas, sa structure socioculturelle précaire a été affectée, suscitant de nouveaux problèmes qui ont porté atteinte aux droits des Nukak.

69.Le Ministère de l’intérieur a donc conçu une feuille de route méthodologique spécifique pour l’élaboration du PSE du peuple nukak, en tenant compte des mesures d’adoption fixées par la Cour constitutionnelle dans l’ordonnance no 004 de 2009. Pour cette feuille de route, les réalités contextuelles et culturelles de chacun des différents groupes locaux et du peuple nukak en général ont été prises en compte. Elle répond donc aux critères suivants : 1) connaissance approfondie des caractéristiques socioculturelles du peuple nukak ; 2) compréhension des dynamiques écologiques, économiques, sociales et politiques du département de Guaviare ; et 3) compréhension du fonctionnement des institutions afin de garantir les droits des peuples autochtones.

70.Ainsi, pour établir le diagnostic du PSE, son harmonisation avec les autres éléments de la politique publique et son intégration formelle à cette politique ont été prises en compte. L’Action sociale s’en est chargée, en appliquant les procédures administratives qui s’imposaient. En particulier, chaque Plan de sauvegarde devra être harmonisé avec les documents d’orientation existants. Le Ministère de l’intérieur a produit un document au moyen d’un processus participatif d’autonomisation et de coordination interinstitutionnelle.

2.Conformément à l’ordonnance no 173 de 2012, un espace d’auto‑administration a été créé et consolidé

71.Dans le cadre de la mise en œuvre des obligations spécifiques concernant le peuple nukak, il est important de mentionner que la structure d’auto‑administration est définie comme un espace de concertation et de dialogue avec les entités nationales et territoriales. Grâce à une opération menée au cours de l’année 2017, associant le peuple nukak et le Ministère de l’intérieur, les ressources provenant de la coopération internationale, l’Université Externado de Colombie et l’Organisation nationale autochtone de Colombie (ONIC), les autorités du peuple nukak ont été reconnues et une organisation, qu’elles appellent « Mauro Muno », a été créée.

72.Le « Mauro Muno » sera dirigé par les autorités bewene et webaka qui, réunies en assemblée, prendront des décisions pour le peuple. Les décisions qui concernent le groupe territorial ou la localité seront prises par les bewene et webaka de chacun d’entre eux. Le Ministère de l’intérieur a présenté le fonctionnement et la structure du « Mauro Muno » aux entités territoriales le 23 août 2019.

73.Enfin, dans le cadre de l’application de la mesure de protection en faveur du peuple nukak de l’ordonnance interlocutoire no AIR-18-197, émise en décembre 2018, et en lien avec le Plan de sauvegarde, le Ministère de l’intérieur a pris des mesures pour exécuter les décisions spécifiques suivantes concernant le peuple nukak :

•En ce qui concerne la troisième décision de cette même ordonnance, des actions d’information ont été menées dans le cadre d’une stratégie pédagogique auprès de la population paysanne vivant dans le resguardoautochtone nukak, dans la zone territoriale qui chevauche la zone de réserve paysanne de Guaviare et/ou les zones adjacentes, en mettant l’accent sur les droits et la réconciliation ;

•Pour la dix-neuvième décision relative à la traduction et à la présentation de l’ordonnance, le Ministère de l’intérieur a conçu une feuille de route méthodologique tenant compte des particularités du peuple nukak. Deux journées de travail ont eu lieu :

a)La première était consacrée à la traduction. Elle visait à définir les concepts de base pour le gouvernement, les institutions et les décisions relatives à la langue nukak nauyi. Les concepts stratégiques de l’ordonnance qui concernaient le peuple autochtone nukak ont également été identifiés et regroupés dans un glossaire. Ils ont été expliqués de manière didactique par les professionnels de l’entité. Dans le cadre de cet exercice, des espaces de réflexion, de discussion et de questions ont été créés pour les traducteurs, afin qu’ils puissent interpréter et traduire dans les différents dialectes de la langue nukak nauyi ;

b)Lors de la deuxième journée de travail, l’ordonnance a été présentée sur le territoire, avec la participation des bewene et des dirigeants de chaque localité « Mauro Munu ». À cette occasion, un exercice participatif a été proposé. Des groupes de travail ont été constitués, autour de huit thématiques relatives aux décisions de l’ordonnance interlocutoire.

3.Peuples autochtones en situation d’isolement volontaire

74.À cet égard, le Gouvernement colombien a publié le décret no 1232 de 2018, dans lequel il exhorte l’État colombien à adopter les mesures nécessaires pour protéger et garantir les droits des peuples autochtones en situation d’isolement, en particulier leur vie, leur territoire et l’exercice de leur droit à l’autodétermination. À cette fin, des organes et des mécanismes de coordination institutionnelle ont été créés, et il a été reconnu que la participation des communautés autochtones était importante. Elles sont nécessaires pour renforcer les mécanismes spéciaux de prévention et de protection qui s’imposent.

75.Dans le but de faire progresser la mise en œuvre et la matérialisation du décret no 1232 de 2018, la Direction des affaires relatives aux autochtones, aux Roms et aux minorités du Ministère de l’intérieur a lancé dès le mois de juin 2019 une opération de présentation du décret auprès des associations voisines des deux peuples autochtones dont la situation d’isolement a été confirmée (Yuri et Passé), dans le département d’Amazonas.

76.La présentation de cet instrument s’est déroulée dans le respect de la procédure régulière permettant de garantir la participation des autorités des communautés et des personnes représentant les resguardoset les communautés. La méthodologie adoptée, qui laissait largement la place à une approche différentiée, a abouti à des propositions de la part de chaque association d’autorités traditionnelles autochtones (AIZA, CIMTAR, PANI et AIPEA), qui ont indiqué comment les composantes locales de cet instrument normatif pouvaient être mises en œuvre par les autorités autochtones.

77.En parallèle, les études officielles des peuples autochtones yuri et passé ont progressé. Elles relèvent de la deuxième modalité d’enregistrement établie par le décret no 1232 de 2018, dont le lancement officiel est prévu à l’article 2 des résolutions 041 et 042 de 2020. Les enquêtes sur les peuples yuri et passé et les enregistrements qui ont suivi ont pris la forme de projets pilotes. En effet, s’agissant d’une nouvelle procédure, des aménagements administratifs et juridiques doivent être apportés aux actes administratifs d’enregistrement. Grâce aux enseignements tirés de l’expérience des Yuri et Passé, les procédures d’enregistrement des autres indices pourront être lancées, et elles permettront de procéder à l’enregistrement selon la première modalité.

78.La première session du Comité local pour la prévention et la protection des peuples autochtones en situation d’isolement dans le département d’Amazonas s’est tenue au cours du second semestre 2020. Il s’agit d’une instance et d’un espace suggérés par le décret no 1232 de 2018 pour concevoir, mettre en œuvre et évaluer les stratégies de prévention et de protection des droits de ces peuples, sous la responsabilité du Cabinet du Gouverneur de ce département.

79.Par ailleurs, conformément aux dispositions de l’article 2.5.2.2.2.4 du décret no 1232 de 2018, la Direction des affaires relatives aux autochtones du Ministère de l’intérieur travaille à la création de la Commission nationale pour la prévention et la protection des droits des peuples autochtones en situation d’isolement. Elle aura notamment pour mission de définir les lignes directrices du fonctionnement du système national, de guider les comités locaux et de contribuer à la conception, à la mise en œuvre et au suivi des mécanismes spéciaux de prévention et de protection des peuples autochtones en situation d’isolement sur les plans national, régional et local.

80.À ce jour, le Comité local du département d’Amazonas est le seul à avoir été créé. La création et la mise en fonctionnement de la Commission nationale pour la prévention et la protection des droits des peuples autochtones en situation d’isolement sont une priorité.

81.Compte tenu de l’importance et de l’influence de la pandémie de COVID-19 pendant l’année 2020, la matérialisation du décret no 1232 de 2018 a connu des limites. Les actions menées sur le terrain avec les communautés voisines ou le déplacement de personnel dans les zones concernées ont été restreints en raison du risque que représente la maladie pour les peuples autochtones en situation d’isolement, les communautés voisines et le personnel. En effet, les mesures prises doivent réduire le risque autant que possible, en tenant compte de la législation nationale et locale.

82.D’autre part, il est important de prendre en compte la forte vulnérabilité des peuples autochtones en situation d’isolement, en raison de leur moindre réponse immunitaire. Les conséquences négatives que peut avoir un contact non souhaité se trouvent donc encore renforcées par le virus.

83.Enfin, il faut mentionner que le Ministère de l’intérieur a établi une convention de partenariat avec l’Amazon Conservation Team pour le renforcement des peuples autochtones en situation d’isolement. Son objectif est de garantir les mécanismes de prévention et de protection de leurs droits, conformément aux dispositions du décret no 1232 de 2018. En effet, l’organisation Amazon Conservation Team a acquis une vaste expérience nationale et internationale en matière de prévention et de protection des droits des peuples autochtones en situation d’isolement, en travaillant selon trois axes : 1. Travail et formation des dirigeants des communautés voisines des territoires des peuples autochtones en situation d’isolement ; 2. Incidence sur la politique publique ; et 3. Gestion de l’information.

4.Peuples autochtones en situation de premier contact

84.Le 20 mars 2018, le premier juge chargé de la restitution des terres de Villavicencio Meta, par l’ordonnance interlocutoire no 018-068, a ordonné des mesures de protection en faveur des communautés autochtones Mapayerri de Nacuanedorro et Sikuani d’Awia Tuparro, relevant de la juridiction de la municipalité de Cumaribo (Vichada).

85.Conformément à ce qui précède, le Ministère de l’intérieur s’emploie à coordonner la mise en œuvre des décisions énoncées dans cette ordonnance interlocutoire, en tenant compte du fait que le peuple autochtone mapayerri est en situation de premier contact et que le principe de l’approche non préjudiciable doit s’appliquer. C’est la raison pour laquelle la Direction des affaires relatives aux autochtones de cette entité a travaillé avec les entités impliquées dans la prise en charge intégrale de ces deux peuples autochtones afin que les activités, les actions et l’entrée sur le territoire des entités ne génèrent pas de dommages et d’effets préjudiciables sur le plan social et culturel pour cette population.

86.Il est important de mentionner que des groupes de travail thématiques ont été mis en œuvre en tant qu’outil méthodologique. Leur objectif est de concentrer le travail de mise en œuvre des décisions prises par le premier juge civil de la circonscription de Villavicencio‑Meta, spécialisé en restitution des terres, en élaborant un programme de travail visant à concevoir et à mettre en œuvre des actions pertinentes pour garantir la pleine application des décisions. Cela doit être fait sans porter atteinte à l’institution et en cherchant à limiter autant que possible le nombre d’entrées sur le territoire.

87.Conformément à ce qui précède, le travail interinstitutionnel se fonde sur l’élaboration collective de stratégies complémentaires pour renforcer les procédures menées par les entités, sans nuire à leur autonomie, dans le respect des décisions prises par le juge. La Direction des affaires relatives aux autochtones, aux Roms et aux minorités du Ministère de l’intérieur a aménagé des espaces de concertation et de dialogue sur le suivi des engagements pris l’année précédente et sur les travaux réalisés par les entités dans le cadre de l’application des décisions de l’ordonnance interlocutoire no AIR 018-068.

III.Conclusions

88.Les mesures institutionnelles prises pour mettre en application la loi no 70 de 1993 portant précision de l’article transitoire 55 de la Constitution politique et les progrès réalisés en matière de droit à la propriété collective montrent à quel point l’État colombien est attaché à sa mission de récupération et d’allocation des terres. À cette fin, le Ministère de l’intérieur a rendu compte des procédures suivies qui ont eu un rôle important dans les domaines de la participation ; de la protection des ressources naturelles ; des ressources minières ; du développement des droits à l’identité culturelle ; de la planification et la promotion du développement économique et social.

89.Il convient de signaler que la procédure normale suivie pour la restitution des terres aux peuples autochtones et d’ascendance africaine se fonde sur les dispositions de la loi no 1448 de 2011 et comprend différentes phases. L’UAE-GRTD prend des décisions sur le fond, en fonction de la demande et du respect de l’ensemble des critères. Par conséquent, en fonction de la situation ou du cas, qui peut présenter certaines difficultés, l’entité peut prendre les décisions suivantes : ne pas lancer d’examen formel, ne pas inscrire la parcelle au RTDAF ; ou, le cas échéant, prendre acte du retrait de la demande, comme expliqué dans le corps du document.

90.L’État colombien, grâce à son appareil réglementaire et au travail administratif des institutions compétentes, garantit l’accès aux terres collectives selon les us et coutumes des communautés ethniques. Il respecte également les principes de légalité, de propriété privée et de sécurité juridique en matière territoriale.

91.De nombreuses procédures menées par les institutions nationales compétentes dans ce domaine ont été retardées en raison de la pandémie de COVID-19, qui a entraîné une restriction des déplacements dans certains territoires. En effet, des mesures ont été prises pour protéger la vie et l’intégrité des communautés pendant l’état d’urgence sanitaire déclaré par le Gouvernement colombien.

92.En ce qui concerne l’octroi de titres de propriété des territoires autochtones et l’extension des resguardos, il convient de souligner les progrès réalisés par l’ANT pour garantir la sécurité juridique des territoires collectifs, toujours en faveur des communautés. De même, la mise en application des décisions prises par la Cour constitutionnelle est conforme aux procédures réglementées et établies dans le décret no 1071 de 2015 et le décret no 1066 de 2015. Il s’agit là du pilier fondamental sur lequel reposent l’exécution et l’état d’avancement des procédures d’octroi de titres de propriété et d’allocation de terres aux communautés dont certains droits ont été violés et dont la protection a été proclamée par la Haute Cour.