Nations Unies

CAT/C/FRA/CO/4-6/Add.1

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr.: générale

8 mai 2014

Original: français

Anglais et français seulement

Comité contre la torture

Observations finales concernant les quatrième, cinquième et sixième rapports périodiques de la France

Additif

Renseignements reçus de la France au sujet de la suite donnée aux observations finales *

[Reçues le 22 juin 2011]

I.Introduction

1.A la suite de l’examen du sixième rapport périodique de la France devant le Comité contre la torture des Nations-Unies, lors de ses 928ème et 931ème séances, les 27 et 28 avril 2010, ce comité a adopté des observations finales le 10 mai 2010, au cours de sa 946ème séance.

2.Dans ces observations, le Comité a demandé à la France de lui fournir dans le délai d’un an des informations sur la mise en œuvre de ses recommandations telles que figurant aux paragraphes 14, 21, 24, 28, 30 et 36 des observations finales.

3.Un échange de vues a été organisé le 7 février 2011 entre la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) et des représentants des différents ministères concernés par la rédaction du rapport de la France et des réponses aux observations du Comité, au sujet de ces observations finales et notamment des recommandations qui appelaient une réponse dans le délai d’un an.

4.La présente réponse a ensuite été portée à la connaissance de la CNCDH avant sa transmission au Comité.

5.Le Gouvernement français a l’honneur de transmettre au Comité les éléments d’information suivants.

Réponse au paragraphe 14 des observations finales (CAT/C/FRA/CO/4-6)

Non-refoulement

A.S’agissant de la procédure prioritaire

6.Dans ses réponses aux questions écrites soulevées par le Comité avant l’audition (8 et 10) ainsi que lors de l’audition des 27/28 avril 2010, les autorités françaises ont exposé les conditions d’examen des demandes d’asile traitées selon la procédure « prioritaire ».

7.Pour mémoire, il a été indiqué que si dans le cadre de cette procédure, le recours devant la Cour nationale du droit d’asile (CNDA) contre une décision de refus de protection prise par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) n’avait pas un caractère suspensif, l’étranger bénéficiait en tout état de cause de la garantie d’un recours pleinement suspensif contre la décision d’éloignement à destination de son pays d’origine. Il a été souligné que ce n’était pas en effet la décision négative de l’OFPRA qui entrainait l’éloignement, mais que cet éloignement procédait d’une décision distincte (l’obligation de quitter le territoire français ou l’arrêté préfectoral de reconduite à la frontière), prise par l’autorité administrative, susceptible donc d’un recours. Dans le cadre de ce recours juridictionnel pleinement suspensif, le juge doit s’assurer que l’étranger n’est pas exposé à des risques pour sa vie ou sa liberté, ni à des traitements contraires à la Convention. S’il considère ces risques établis, le juge annule la décision fixant le pays de renvoi.

8.Le dispositif d’examen prioritaire repose sur un équilibre entre la nécessité de disposer d’outils procéduraux adaptés à la nature des demandes et les exigences du droit d’asile et de la protection. A cet égard, il est souligné que les demandeurs d’asile bénéficient des mêmes garanties d’examen devant l’OFPRA que celles offertes aux autres demandeurs et en particulier de la garantie d’un entretien individuel (l’OFPRA convoque près de 95 pour cent des primo-demandeurs d’asile), en présence si nécessaire d’un interprète. Dans le cadre de la procédure juridictionnelle dirigée contre la mesure d’éloignement, l’étranger est entendu et peut être assisté d’un conseil, désigné au titre de l’aide juridictionnelle ainsi que d’un interprète.

9.Le Gouvernement informe par ailleurs le Comité que la question des dérogations au caractère suspensif du recours devant la Cour nationale du droit d’asile contre les décisions de rejet de l’ OFPRA, a fait l’objet d’une question prioritaire de constitutionnalité posée par la Cour de cassation le 9 février 2011 au Conseil constitutionnel. Dans sa décision du 8 avril 2011, le Conseil constitutionnel a confirmé la conformité à la Constitution de ces dispositions, rappelant à cet égard sa décision de conformité du 13 août 1993 et considérant qu’il n’existait pas de changement de circonstances de nature à remettre en cause ce constat.

10.Par ailleurs, plusieurs contentieux sont en cours devant la Cour européenne des droits de l’homme concernant la conformité du dispositif d’examen prioritaire de certaines demandes d’asile à l’article 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Cet article garantit le droit à un recours effectif, combiné avec l’article 3 qui prohibe les mauvais traitements. La Cour devrait également se prononcer prochainement dans un de ces contentieux.

11.Les autorités françaises tireront toutes les conséquences de ces décisions et se conformeront à l’arrêt qui sera rendu par la Cour, comme elles l’ont toujours fait.

B.S’agissant de la formation des juges aux risques de torture dans les pays de renvoi

12.La formation initiale et continue des juges de l’éloignement inclut des éléments relatifs aux risques de torture dans les pays de destination.

13.Lors de leur formation initiale, les juges administratifs stagiaires sont particulièrement sensibilisés au droit des étrangers, matière qui représentera une large part des dossiers dont il ils auront à connaître, par le moyen de plusieurs conférences présentées par des Présidents de chambre de cour administrative d’appel ou de tribunal administratif, qui sont à même de leur faire part de leur expérience et de leur dispenser une formation adéquate : 

(a)Le contentieux des étrangers (9h)

(b)Les reconduites à la frontière et les obligations de quitter le territoire français (OQTF) (3h)

(c)Le droit d’asile et les conférences pays (6h)

(d)Actualité de la législation en droit des étrangers (3h)

(e)Permanences hebdomadaires relatives à la reconduite frontière (6h)

14.Ils participent à la visite d’un centre de rétention administrative (3h) et d’un service des étrangers d’une préfecture (3h).

15.Parallèlement aux conférences, les magistrats stagiaires reçoivent une formation pratique, en étudiant des dossiers contentieux portant sur tous les domaines du contentieux administratif, et notamment sur le droit au séjour et l’éloignement des étrangers. Ce travail individuel, semblable à celui qu’ils exerceront dans le cadre de leur fonction de rapporteur, fait l’objet d’une correction en groupe d’une dizaine de personnes (formation de jugement fictive) encadrée par un magistrat expérimenté. La formation initiale comporte également un stage de quinze jours au sein d’une juridiction administrative.

16.En complément de cette formation initiale, le centre de formation de la juridiction administrative organise chaque année, à destination des magistrats administratifs, plusieurs journées de formation en droit des étrangers, dans une perspective d’actualisation des connaissances. Ces journées sont prévues dans un catalogue des formations, proposé annuellement, et prenant en compte les besoins de formation exprimés par les magistrats. Pour répondre de façon souple et satisfaisante aux demandes, une action de formation peut être programmée à plusieurs reprises dans l’année. En particulier, s’agissant du risque de torture dans le pays de renvoi, un stage d’une journée intitulé « la situation des droits de l’homme dans les pays d’émigration » présente la situation de l’Arménie, de l’Azerbaïdjan, de la Chine, du Sri Lanka, et du Bangladesh. Il a été proposé une fois en 2010, deux fois en 2011.

17.Un stage d’une journée est par ailleurs consacré au droit d’asile, à destination des magistrats nouvellement affectés à la Cour nationale du droit d’asile (CNDA).

18.Un autre stage d’une journée, intitulé « point sur la jurisprudence du droit au séjour et de l’éloignement des étrangers » traite notamment des risques en cas de retour et du statut de réfugié. Il dure également une journée, et est proposé chaque année.

19.Le centre de formation de la juridiction administrative propose également des stages dans d’autres domaines relatifs au droit des étrangers, pouvant aborder la question du risque de torture dans le pays d’origine :

(a)La loi relative à l’immigration (1 journée)

(b)Le contentieux des étrangers (2 jours)

(c)Le contentieux des étrangers et l’état des personnes (2 jours)

(d)Le contentieux des refus de visa (1 journée)

(e)Le droit au séjour à titre sanitaire (1 journée)

20.Par ailleurs, la Cour nationale du droit d’asile organise à destination des magistrats administratifs, une à deux conférences par an, traitant de la géopolitique d’un pays.

21.Enfin, l’intranet de la juridiction administrative propose un accès au centre d’information politique de la CNDA, qui présente des dossiers pour plusieurs pays avec par exemple des études et des notes d’actualité et des comptes-rendus de conférences.

22.Ainsi, les outils mis à la disposition des magistrats administratifs leur permettent de disposer d’une formation adéquate, tout au long de leur carrière, en matière de risque de torture dans les pays de renvoi.

Réponse au paragraphe 21 des observations finales

Formation des agents de la force publique

A.S’agissant des allégations de mauvais traitements

23.Cette recommandation reposant sur « la persistance d’allégations » reçues par le Comité au sujet de cas de mauvais traitements qui auraient été infligés par des agents de l’ordre public, sans précision sur leur nombre et sans indication sur les circonstances de ces allégations, le Gouvernement rappelle au Comité sa disposition à lui fournir toutes explications sur les suites qui ont été données aux allégations auxquelles le Comité se réfèrerait de manière précise.

24.Au demeurant, les mesures prises pour assurer prévenir les mauvais traitements et pour garantir une enquête approfondie, indépendante et impartiale pour chaque allégation de mauvais traitement – et sanctionner les auteurs de ces faits le cas échéant – ont été détaillées dans la réponse du Gouvernement français aux questions 4, 26 et 28 posées par le Comité sur les 4ème à 6ème rapports de la France.

25.Pour mémoire, le Gouvernement a eu l’occasion, dans ces réponses, de détailler les éléments de prévention suivants :

(a)Lorsqu’une personne est blessée dans le cadre de sa privation de liberté, elle est systématiquement vue par un médecin, en détention, en garde à vue, comme en rétention. Le médecin décide ou non de la rédaction d’un certificat médical.

(b)La déontologie occupe une place centrale et de plus en plus importante dans la formation initiale et continue des agents des forces de l’ordre.

(c)L’encadrement hiérarchique et le contrôle de l’action des forces de l’ordre, aussi bien en interne (corps d’inspection) que par l’autorité judiciaire sont des moyens supplémentaires de prévention des mauvais traitements.

26.Le Gouvernement a par ailleurs indiqué au Comité les principales initiatives engagées, au sein des forces de l’ordre, à la suite des recommandations du Comité européen pour la prévention de la torture et des autres peines ou traitements inhumains ou dégradants ainsi que des observations du rapport 2005 de l’Inspection générale de la police nationale (IGPN) relatives aux allégations de violence formulées à l’encontre des membres des forces de l’ordre.

27.Parmi ces initiatives, le Gouvernement informait notamment le Comité de l’édition d’un nouveau règlement général d’emploi de la police nationale ; de l’adoption, le 28 juillet 2006, d’une instruction relative à l’exercice de l’autorité hiérarchique dans le contexte rénové de la police nationale ; de la mise en place, la nuit, dans les grandes agglomérations françaises, d’un dispositif renforcé de permanence opérationnelle des commissaires et des officiers de police, afin d’améliorer la direction et le commandement des effectifs sur le terrain ; de la mise en place d’un dispositif de contrôles inopinés dans les services de police et dans les unités territoriales de la gendarmerie ; de la diffusion d’une note du directeur chef de l’Inspection générale de la police nationale relative aux conditions de l’emploi de la force par les policiers (jointe à la présente réponse) ; de la promulgation en 2005 du code de la défense qui regroupe l’ensemble des textes législatifs et réglementaires relatifs à la responsabilité et à la discipline des militaires ; de la Charte du gendarme, document qui traduit le socle commun des valeurs qui s’imposent à chaque gendarme.

28.Outre ces éléments préventifs, il a été rappelé que tout fonctionnaire qui s’écarte des lois et des règles éthiques s’expose à une double sanction pénale et disciplinaire et qu’en application des dispositions de l’article 40 du Code de procédure pénale, les actes commis par les forces de l’ordre susceptibles de recevoir une qualification pénale, sont portés à la connaissance du procureur de la République.

29.S’agissant des procédures disciplinaires, des éléments statistiques ont été indiqués au Comité dans le 6ème rapport, démontrant que celles-ci sont effectives et mises en œuvre de façon particulièrement fréquente au sein de la police et de la gendarmerie. Ces éléments seront actualisés dans le cadre du 7ème rapport.

30.S’agissant des procédures pénales, le Gouvernement rappelle que les enquêtes judiciaires diligentées à la suite d’allégations de mauvais traitements commis par des agents de la force publique sont menées sous la direction du procureur de la République, dont le statut de magistrat constitue une garantie d’objectivité dans la manière dont il exerce ses attributions. Celui-ci peut saisir le service d’enquête judiciaire qui lui semble le plus approprié, au regard de la nature et des circonstances de l’affaire et des personnes mises en cause, en application de l’article 12-1 du code de procédure pénale. Ainsi, toute infraction commise par un fonctionnaire dépositaire de l’autorité publique à l’occasion de l’exercice de ses fonctions fait l’objet d’une enquête, qui est confiée à un service autre que celui auquel appartient le mis en cause. Au service qu’il saisit, le procureur peut demander de réaliser tous actes utiles à la manifestation de la vérité. Il s’assure de leur bonne exécution ainsi que du respect des dispositions du code de procédure pénale.

31.A l’issue de ces enquêtes, le procureur de la République apprécie seul la suite à leur donner, conformément à l’article 40 du code de procédure pénale. A ce titre, il peut décider soit d’engager des poursuites, soit de mettre en œuvre une procédure alternative aux poursuites, soit de classer sans suite la procédure (article 40-1 du code précité). En application de l’article 30 du code de procédure pénale, le pouvoir exécutif n’est pas susceptible de donner des instructions particulières de classement sans suite.

32.Dans toutes ces hypothèses, le procureur de la République avise les plaignants ou victimes de sa décision. Aussi, lorsqu’il décide de classer sans suite, le procureur de la République indique aux plaignants ou victimes les raisons juridiques ou d’opportunité qui justifient sa décision (article 40-2 du code précité).

33.Par ailleurs, les victimes peuvent en effet former un recours contre les décisions de classement sans suite auprès du procureur général compétent, en application de l’article 40‑3 du code de procédure pénale. Elles peuvent également agir elles-mêmes devant les juridictions de jugement, par la voie de la citation directe, ou devant les juridictions d’instruction, par la voie de la plainte avec constitution de partie civile.

34.En tout état de cause, lorsque des agissements de policiers ou de gendarmes sont constitutifs d’infractions pénales ou de manquements déontologiques, les services d’inspection de la police et de la gendarmerie nationales peuvent être saisis par l’autorité judiciaire aux fins de diligenter des enquêtes judiciaires, sans préjudice des enquêtes administratives pouvant être ordonnées à la demande des autorités hiérarchiques des policiers et gendarmes concernés.

35.De plus, en application de l’article 15-2 du code de procédure pénale, les services de l’inspection générale des services judiciaires peuvent être associés à des enquêtes administratives menées par les services d’inspection, lorsque le comportement d’un officier ou d’un agent de police judiciaire est mis en cause dans l’exercice d’une mission de police judiciaire.

36.Enfin, au sein du Gouvernement, le ministère de la justice et des libertés tire toutes les conséquences nécessaires des avis et recommandations que la Commission nationale de déontologie de la sécurité, autorité administrative indépendante, lui fait parvenir, notamment en sollicitant des procureurs généraux compétents tous éléments relatifs aux situations dénoncées et, surtout, à la mise en œuvre rapide des préconisations de ladite autorité.

B.S’agissant de l’asphyxie posturale

37.En complément des éléments déjà indiqués en réponse à la question n° 19 posée par le Comité sur les 4ème à 6ème rapports de la France, le Gouvernement transmet au Comité la note du 8 octobre 2008 de l’IGPN qui précise notamment que : « […] lorsque l’immobilisation de la personne est nécessaire, la compression – tout particulièrement lorsqu’elle s’exerce sur le thorax ou l’abdomen – doit être la plus momentanée possible et relâchée dès que la personne est entravée par les moyens réglementaires et adaptés. Ainsi, comme le soulignent régulièrement les services médicaux, l’immobilisation en position ventrale doit être la plus limitée possible, surtout si elle est accompagnée du menottage dans le dos de la personne allongée. Il en est de même, a fortiori, pendant le transport des personnes interpellées ».

38.Cette note, comme cela a été constaté « avec satisfaction » par la Commission nationale de déontologie et de sécurité (CNDS) dans son rapport annuel 2010, a fait l’objet d’une diffusion à l’ensemble des fonctionnaires de la police nationale. Ainsi une note de service du 22 octobre 2008 a été adressée par le directeur central de la sécurité publique à l’ensemble des directeurs départementaux de la sécurité publique en leur demandant de communiquer les prescriptions de la note précitée de l’IGPN aux fonctionnaires placés sous leur autorité et de « veiller personnellement à leur stricte application ». De même, le Comité est informé de la note de service prise le 22 octobre 2008 par la Direction centrale de la police aux frontières (DCPAF) déclinant, pour l’éloignement des étrangers, la note précitée de l’IGPN.

39.Enfin, il est précisé que les formations initiale et continue aux gestes techniques professionnels en intervention (GTPI) dispensées aux fonctionnaires de la police nationale intègrent désormais les prescriptions de la note précitée de l’IGPN.

Réponse au paragraphe 24 des observations finales

Conditions carcérales et politique pénale

40.A titre liminaire, il convient de relever que l’analyse de la surpopulation carcérale par les autorités françaises repose sur le calcul du taux d’occupation obtenu en rapportant le nombre de personnes écrouées détenues (hébergées), à un moment donné, au nombre de places disponibles au même moment. Au 1er janvier 2010, pour l’ensemble des établissements pénitentiaires, ce taux était de 110,7 détenus pour 100 places. Il était de 107,4 pour cent au 1er janvier 2011.

41.Cette densité demeure hétérogène puisque le taux d’occupation moyen des maisons d’arrêt et quartiers maisons d’arrêt est de 118,4 pour cent (en baisse de 5,6 points par rapport au 1er janvier de l’année précédente). La densité relevée à la même date est de 69,9 pour cent au sein des établissements pénitentiaires pour mineurs (EPM) et de 90,4 pour cent en ce qui concerne les établissements pour peine.

42.Les évolutions suivantes sont observées entre le 1er janvier 2010 et le premier janvier 2011, tous types d’établissement confondus :

(a)5 établissements ou quartiers ont une densité supérieure ou égale à 200 pour cent [-3]

(b)17 établissements ou quartiers ont une densité supérieure ou égale à 150 et inf. à 200 pour cent [-9]

(c)52 établissements ou quartiers ont une densité supérieure ou égale à 120 et inf. à 150 pour cent [+2]

(d)34 établissements ou quartiers ont une densité supérieure ou égale à 100 et inf. à 120 pour cent [-2]

(e)129 établissements ou quartiers ont une densité inférieure à 100 pour cent [+13], soit 54,4 pour cent de l’ensemble des établissements et quartiers d’établissement.

43.La volonté du Gouvernement est de réduire la population détenue. Toutefois, des événements conjoncturels peuvent avoir pour effet de durcir temporairement l’application des peines.

44.Le taux d’encellulement individuel fait désormais partie des indicateurs permettant d’évaluer la performance de l’administration pénitentiaire dans le cadre de la loi des finances annuelle.

45.Les actions engagées pour lutter contre la surpopulation carcérale sont de deux ordres :

(a)d’une part, la construction de nouveaux établissements pénitentiaires offrant des conditions d’hébergement améliorées (a) ;

(b)d’autre part, la mise en œuvre d’une politique de développement d’aménagement des peines fermes (c) et des peines alternatives à l’incarcération (b).

A.La construction de nouveaux établissements pénitentiaires offrant des conditions améliorées d’hébergement, de réinsertion et de prise en charge

46.Un effort immobilier de très grande ampleur est mené depuis la loi d’orientation et de programmation de la justice du 9 septembre 2002.

47.25 établissements ont déjà été construits ou rénovés dans le cadre de plusieurs programmes dénommés « 4000 », « 13000 » et le plus récent, « 13200 ».

48.Entre 2008 et 2010, 8 725 places ont été construites, dont 7 470 issues du programme « 13 200 ». Le nombre total de places d’hébergement sera d’environ 62 000 d’ici 2015, permettant de diminuer sensiblement la densité carcérale.

49.Un bilan des usages, réalisé auprès de 16 établissements issus des programmes précédents, a permis de recenser leurs points forts et leurs points faibles et d’en tirer les enseignements pour les projets en cours.

50.Le nouveau programme immobilier pénitentiaire, annoncé en mai 2011, vise à assurer des conditions dignes de détention, en conformité avec les règles pénitentiaires européennes, et à garantir la mise en œuvre des prescriptions de la loi pénitentiaire adoptée le 24 novembre 2009. Par ailleurs, il permettra d’augmenter les capacités d’hébergement de l’administration pénitentiaire, dans le but d’améliorer le taux de mise à exécution des peines d’emprisonnement prononcées par les juridictions pénales et d’assurer l’encellulement individuel des détenus. Est ainsi prévue la construction de 25 nouveaux établissements (dont 2 outre-mer), ainsi que la réhabilitation/extension de 3 sites, soit un total de 14 280 nouvelles places dont 7 600 places en remplacement d’anciennes places vétustes et 6 680 places supplémentaires. La France sera alors dotée approximativement de 70 000 places de prison, dont plus de la moitié auront été ouvertes après 1990.  

51.Les points forts du programme « 13200 » seront maintenus voire améliorés, en particulier :

(a)Le maintien de la qualité de l’aménagement des cellules avec présence systématique d’un espace « douches, WC et lavabo » cloisonné. Par ailleurs l’aménagement des cellules sera particulièrement soigné (choix des coloris, organisation optimisée de l’espace, amélioration de la fonctionnalité et de la solidité du mobilier, choix des matériaux, isolation acoustique),

(b)L’insertion du bâtiment dans le site, une architecture non anxiogène (choix des couleurs, matériaux),

(c)Le maintien d’un glacis minimum de 30 mètres afin de lutter contre les projections extérieures et les parloirs sauvages,

(d)L’installation systématique des dispositifs de vidéosurveillance dans les coursives des unités d’hébergement et les cours de promenades afin de limiter les phénomènes de violence et permettre les enquêtes a posteriori,

(e)L’accessibilité complète aux personnes à mobilité réduite.

52.Par ailleurs, une attention particulière a été apportée à la conception des quartiers d’hébergement  :

(a)Conception de quartiers à taille humaine (quartiers de 160 places avec des unités de 40 places),

(b)Création de nefs,

(c)Traitement acoustique des espaces (coursives, cellules),

(d)Cours de promenade aménagées (cours en partie engazonnée et arborée, et équipée de mobiliers robustes) et augmentation de leur superficie de 25 pour cent.

53.Tenant compte des avancées des programmes précédents, le nouveau programme s’articule autour du nouveau concept d’établissement « à réinsertion active », concept notamment forgé à partir des retours d’expériences à l’étranger (Suède, Espagne, Angleterre). De nombreux groupes de travail ont permis de décliner concrètement ce concept.

54.Afin de prendre en compte notamment les objectifs de la loi pénitentiaire, les mesures suivantes sont inclues dans les nouveaux programmes fonctionnels :

(a)Concernant l’encellulement individuel: le taux d’encellulement individuel sera de 95 pour cent. Par ailleurs dans les nouveaux établissements, la taille des cellules sera fixée à 8,5 m², afin d’éviter qu’y soient affectées deux personnes ;

(b)Concernant la mise en œuvre des régimes différenciés : une évaluation préalable de chaque détenu lors de son arrivée en détention déterminera le choix du mode de détention le plus adapté à sa personnalité et à sa dangerosité. Il en résultera une population plus homogène au sein des quartiers afin de réduire les troubles en détention et de favoriser la réinsertion des détenus. Deux modes de détention sont ainsi prévus, un mode dit « ouvert » et un mode dit « fermé ». Le régime de détention « ouvert » est fondé sur l’autonomie et la libre circulation du détenu au sein du quartier, qui reproduit le plus possible les conditions de vie à l’extérieur afin de faciliter la resocialisation. En journée, les détenus, qui possèdent une clef de leur cellule, se déplacent librement au sein de l’unité et dans les locaux d’activités/ détente du quartier, ainsi que dans les cours de promenades. En cas de non respect des règles, le détenu rejoindra le mode « fermé » ;

(c)Concernant l’obligation d’offres d’activités : il est prévu que des activités soient proposées à tous les détenus (en mode ouvert comme fermé). En conséquence le nombre de locaux d’activités sera augmenté de 40 pour cent par rapport au programme précédent. Ces locaux seront répartis équitablement entre locaux « en quartier » et « hors quartier » afin que les détenus ne soient pas «assignés » à un quartier. Les locaux d’activités seront plus fonctionnels que ceux du programme précédent et adaptés à l’activité qui leur est assignée (par exemple, les locaux scolaires seront mieux conçus). Les locaux ont été dimensionnés sur la base du volume horaire estimé de chaque activité dans l’objectif de 5h/jour (activités socioculturelles, activités sportives, travail pénitentiaire, service général, formation scolaire, formation professionnelle). Par ailleurs, il est prévu la construction d’une salle de spectacle et d’une bibliothèque/médiathèque centrale avec une offre importante et permettant des animations en groupe (en lieu et place de petites bibliothèques). De plus, la construction d’un pôle d’insertion d’environ 150 m² est programmée, en vue de faciliter l’accès au droit des personnes détenues et leur rencontre avec des partenaires institutionnels (pôle emploi, accès au logement…) ;

(d)Concernant le maintien des liens familiaux : la loi pénitentiaire prévoit l’accueil en unité de vie familiale (UVF) ou en parloirs familiaux (PF) de toute personne détenue sur la base d’un parloir par trimestre, sans distinction entre prévenu et condamné. Le choix entre UVF et PF est du ressort de l’administration pénitentiaire, qui fixe la durée du parloir. Il est prévu la construction d’un nombre suffisant d’UVF et de parloirs familiaux afin de répondre à l’objectif de la loi.

55.La prise en charge des détenus présentant des troubles mentaux est améliorée avec la création systématique, en accord avec le Ministère de la Santé, de locaux pour les services de psychiatrie au sein des unités de consultation et de soins ambulatoires (UCSA).

56.La capacité d’hébergement des nouvelles structures est déterminée par les besoins en place qui se fondent sur l’activité des juridictions, sur la nécessité de maintenir les populations détenues proches de leur lieu de résidence habituelle, et par les fermetures corrélatives d’établissements qui ne répondent pas aux standards actuels de détention.

B.Le développement des peines alternatives à l’incarcération

57.La loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 pose comme principe que l’emprisonnement, hors hypothèse de la récidive, ne peut être prononcé qu’en dernier recours, si la gravité de l’infraction et la personnalité de son auteur rendent cette peine nécessaire et si toute autre sanction est manifestement inadéquate (article 132-24 du Code pénal).

58.En amont du prononcé d’une peine d’emprisonnement ferme, et dans un souci d’individualisation de la peine, le recours aux alternatives à l’incarcération est fortement encouragé. Elles permettent en effet d’éviter le prononcé d’une peine d’emprisonnement sans sursis et d’adapter la condamnation au profil de la personne, à sa situation et au type de délit commis.

59.Ces alternatives à l’incarcération sont nombreuses :

(a)Le travail d’intérêt général (TIG) à titre de peine principale ;

(b)Le sursis assorti de l’obligation d’accomplir un travail d’intérêt général ;

(c)Le sursis avec mise à l’épreuve ;

(d)Le stage de citoyenneté ;

(e)Les jours-amendes ;

(f)La sanction-réparation ;

(g)L’ajournement avec mise à l’épreuve (SME);

(h)Les peines privatives ou restrictives de droit prévues par l’article 131-6 du code pénal qui peuvent être prononcées à titre de peine principale quand l’emprisonnement est encouru : suspension ou annulation du permis de conduire, interdiction de porter une arme, interdiction d’émettre des chèques, etc.

60.Parmi ces mesures, le TIG, le SME et le stage de citoyenneté sont les trois « mesures phares » tant par leur nombre que par leur finalité.

Le travail d’intérêt général (TIG)

61.Institué par la loi de 1983, le TIG est une peine alternative à l’emprisonnement qui vise à sanctionner le condamné en l’obligeant à effectuer une activité utile, non rémunérée, au profit de la société, qui s’inscrit dans une dimension réparatrice tout en permettant d’éviter les effets désocialisant de l’incarcération.

62.La loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 contient des dispositions favorisant le recours au TIG :

(a)La durée minimale du TIG ou du sursis-TIG a été abaissée de 40 à 20 heures (article 131-8 du Code pénal) ;

(b)Le délai de 18 mois pour exécuter le TIG peut être suspendu si la personne est assignée à résidence avec surveillance électronique, est placée en détention provisoire, exécute une peine privative de liberté ou accomplit les obligations du service national ; le travail d’intérêt général peut également être exécuté en même temps qu’une assignation à résidence ou pendant un aménagement de peine (article 131-22 du Code pénal) ;

(c)Les hypothèses de conversion de peines d’emprisonnement en travail d’intérêt général ont été étendues (article 132-57 du code pénal) ;

(d)Le travail d’intérêt général devient exécutoire dès l’expiration du délai d’appel de dix jours, nonobstant le délai d’appel de vingt jours du procureur général ;

(e)Les modalités d’habilitation des organismes d’accueil ont été simplifiées par le décret en Conseil d’Etat du 18 juin 2010, afin de lever tous les obstacles administratifs au développement de cette mesure.

63.L’objectif du TIG est double :

(a)Sanctionner le condamné en l’obligeant à effectuer, dans une démarche réparatrice, une activité utile au profit de la collectivité tout en lui laissant la possibilité d’assurer ses responsabilités sociales, familiales et matérielles.

(b)Impliquer la collectivité dans un dispositif de réinsertion sociale.

64.Le TIG a connu un développement important qu’il reste indispensable de poursuivre.

65.C’est dans cette perspective, que les services déconcentrés de l’administration pénitentiaire s’impliquent dans la prospection partenariale pour mettre en place des actions nouvelles et établir des relais nécessaires à la réinsertion des personnes placées sous main de justice dans le cadre des dispositifs de droit commun (ex : accord entre l’administration pénitentiaire et la SNCF).

66.Monsieur Christian Vanneste, député du Nord s’est vu confier par le Garde des sceaux la rédaction d’un rapport sur le travail d’intérêt général. Ce rapport, déposé en juillet 2010, formule 30 propositions et suggère des outils pratiques destinés notamment à simplifier les démarches des organismes souhaitant accueillir une personne condamnée à un travail d’intérêt général.

67.A la suite de ce rapport, le ministère de la justice et des libertés a enrichi un guide technique sur le TIG contenant des préconisations pour dynamiser le recours au TIG, encourager la prospection et mobiliser les collectivités territoriales et associations.

Le sursis avec mise à l’épreuve (SME)

68.Il s’agit de la mesure alternative la plus importante en nombre. Cette mesure, suivie par le service pénitentiaire d’insertion et de probation (SPIP), doit permettre un travail de réflexion de la personne condamnée sur le passage à l’acte. Le SME passe également par le contrôle des obligations que la personne doit respecter et une aide à l’insertion.

Le stage citoyenneté 

69.Le stage de citoyenneté a pour objet de rappeler à l’auteur des faits les valeurs républicaines sur lesquelles est fondée la société et de lui faire prendre conscience de sa responsabilité pénale et civile ainsi que des devoirs qu’implique la vie en société.

70.La mesure peut être prononcée en tant que peine principale ou en tant qu’alternative aux poursuites. Dans ce dernier cas, et uniquement dans celui-ci, l’organisation du stage peut être confiée à une association habilitée par le tribunal.

71.Le stage de citoyenneté présente un caractère éducatif et paraît spécialement adaptée aux auteurs les plus jeunes qui ont commis des délits d’atteinte à l’autorité tels la rébellion, l’outrage, les actes à caractère raciste ou encore la dégradation des biens publics.

C.Le développement de l’aménagement des peines fermes

72.Parallèlement à cet ambitieux programme immobilier et au développement des peines alternatives à la détention, le Gouvernement mène depuis plusieurs années et plus particulièrement en application de la loi pénitentiaire, une politique volontariste très favorable aux aménagements de peine.

73.Ces mesures permettent, d’une part, d’éviter d’incarcérer des condamnés à de courtes peines d’emprisonnement ferme lorsque cette incarcération est susceptible de mettre en péril leur situation socioprofessionnelle ou familiale et, d’autre part, d’organiser la sortie progressive de détenus pour lesquels un certain contrôle doit être maintenu avant la levée définitive de l’écrou.

Les différents types d’aménagement des peines

74.Lorsqu’aucune alternative à l’incarcération ne semble adaptée, et quand une peine d’emprisonnement sans sursis est prononcée, plusieurs mesures offrent la possibilité d’aménager une peine selon des modalités d’exécution adaptées à la situation et au profil de la personne condamnée, dans un souci de réinsertion des condamnés et de la prévention de la récidive :

(a)Les aménagements de peine dits « sous écrou » la semi-liberté, le placement à l’extérieur (PE hébergé et non hébergé) et le placement sous surveillance électronique (PSE),

(b)La libération conditionnelle : elle diffère des précédentes mesures en ce que le bénéficiaire n’est plus sous écrou.

75.Afin d’éclairer au mieux le Comité sur ces possibilités d’aménagement, le Gouvernement en décrit les modalités concrètes.

La semi-liberté

76.Au 1er avril 2011, 1 713 personnes condamnées sont en semi-liberté.

77.La semi-liberté permet à un condamné de quitter l’établissement pénitentiaire où il est écroué, pour une durée limitée selon des horaires aménagés déterminés par le juge de l’application des peines (la journée avec un retour à l’établissement le soir, ou la semaine, avec un retour à l’établissement en fin de semaine) en fonction de son projet d’insertion. L’intéressé peut ainsi exercer une activité rémunérée, suivre des soins, une formation, etc.

78.Peuvent bénéficier de ce régime :

(a)Les personnes condamnées à une peine inférieure ou égale à deux ans ou n’ayant plus à exécuter qu’un reliquat de peine inférieur ou égal à deux ans (1 an pour les personnes en état de récidive légale).

(b)Les bénéficiaires d’une libération conditionnelle sous la condition d’avoir été soumis à titre probatoire à une semi-liberté.

(c)Les personnes astreintes à une période de sûreté d’une durée supérieure à 15 ans qui ne peuvent bénéficier d’une libération conditionnelle qu’après avoir été soumises à une mesure de semi-liberté.

(d)Les personnes qui justifient exercer une activité professionnelle, suivre un enseignement, une formation professionnelle, un stage ou un emploi temporaire, ou participer à la vie de famille, subir un traitement médical, ou de l’existence d’efforts sérieux de réadaptation sociale résultant d’une implication durable dans tout autre projet caractérisé d’insertion ou de réinsertion de nature à prévenir les risques de récidive.

Le placement à l’extérieur

79.1 003 mesures de placement extérieur étaient en cours au 1er avril 2011, dont 385 en placement à l’extérieur hébergés, et 618 en placement à l’extérieur non hébergés.

80.Il s’agit d’une mesure extrêmement flexible qui peut recouvrir des réalités variées, avec ou sans surveillance pénitentiaire.

81.Le placement à l’extérieur sans surveillance pénitentiaire est un aménagement de peine sous écrou, permettant à une personne condamnée d’exécuter sa peine en dehors de l’établissement pénitentiaire pour poursuivre une activité professionnelle, participer à une formation ou un stage, effectuer un travail temporaire en vue de son insertion sociale, suivre un enseignement ou faire l’objet d’une prise en charge sanitaire.

82.La personne placée peut par exemple être suivie par des associations conventionnées avec l’administration pénitentiaire, proposant des hébergements, des accompagnements socio-éducatifs, des emplois ou des formations. Elle est donc encadrée par des partenaires extérieurs contrôlés par l’administration pénitentiaire.

83.L’association conventionnée, l’employeur ou le directeur de l’établissement de formation, de soins ou d’hébergement doivent informer l’administration pénitentiaire de tout incident concernant le détenu.

84.Peuvent bénéficier de cet aménagement les condamnés dont la peine restant à subir n’excède pas deux ans (un an en cas de récidive légale) ou ceux qui remplissent les conditions de délai requises pour être proposés au bénéfice de la libération conditionnelle et dont la peine restant à subir n’excède pas trois ans. Cette mesure peut également être accordée à titre probatoire à une libération conditionnelle.

85.Le placement à l’extérieur sous surveillance pénitentiaire, quant à lui, permet à la personne condamnée d’être employée en dehors de l’établissement pénitentiaire à des travaux contrôlés par l’administration pénitentiaire. Le détenu regagne l’établissement à la fin de chaque journée sauf décision contraire du juge de l’application des peines sur proposition de l’administration pénitentiaire. Ce placement à l’extérieur peut être collectif (chantier extérieur) ou individuel. Ce type de placement à l’extérieur s’apparente à la mesure de semi-liberté.

86.Peuvent en bénéficier les détenus ayant à subir une durée d’incarcération inférieure ou égale à cinq ans et n’ayant pas été condamnés antérieurement à une peine d’emprisonnement supérieure à six mois, les détenus remplissant les conditions de délai requises pour être admis à la semi-liberté ou proposés au bénéfice de la libération conditionnelle quels que soient leurs antécédents et la durée de l’incarcération à subir. La personne doit présenter, en outre, des garanties suffisantes pour la sécurité et l’ordre public, notamment au regard de sa personnalité, de ses antécédents, de sa conduite en détention et des gages de réinsertion dont il a fait preuve.

Le placement sous surveillance électronique (PSE)

87.Au 1er avril 2011, 7 147 personnes condamnées se trouvent en PSE, ce qui représente 72 pour cent des aménagements de peine sous écrou en cours au 1er avril 2011.

88.Il s’agit d’un mode d’exécution d’une peine privative de liberté en dehors d’un établissement pénitentiaire. Porteur à la cheville d’un bracelet électronique, la personne condamnée a l’interdiction de s’absenter de son domicile ou de tout autre lieu désigné dans la décision du juge en dehors des périodes fixées par ce dernier, au risque de déclencher des alarmes de violation de la mesure. Le respect de la mesure est en effet contrôlé par l’administration pénitentiaire au sein d’un pôle centralisateur, chaque direction interrégionale disposant d’une de ces structures.

89.En cas d’incidents liés au non respect des horaires ou des obligations générales et particulières, un rapport est immédiatement transmis par le service pénitentiaire d’insertion et de probation au juge de l’application des peines (JAP) et au procureur de la République qui décideront des suites à donner (réincarcération éventuelle).

90.Peuvent en bénéficier :

(a)Les personnes condamnées à une peine inférieure ou égale à deux ans ou n’ayant plus à exécuter qu’un reliquat de peine inférieur ou égal à deux ans (1 an pour les personnes en état de récidive légale) ;

(b)Les bénéficiaires d’une libération conditionnelle sous la condition d’avoir été soumis à titre probatoire à un PSE ;

(c)Les personnes astreintes à une période de sûreté d’une durée supérieure à 15 ans qui ne peuvent bénéficier d’une libération conditionnelle qu’après avoir été soumises à une mesure de PSE.

(d)Les personnes qui justifient exercer une activité professionnelle, suivre un enseignement, une formation professionnelle, un stage ou un emploi temporaire, ou participer à la vie de famille, subir un traitement médical, ou de l’existence d’efforts sérieux de réadaptation sociale résultant d’une implication durable dans tout autre projet caractérisé d’insertion ou de réinsertion de nature à prévenir les risques de récidive.

La libération conditionnelle

91.Au 1er avril 2011, 7 276 libérés conditionnels étaient suivis par les Services pénitentiaires d’insertion et de probation.

92.La libération conditionnelle (LC) est une mesure d’individualisation de la peine privative de liberté, dont l’exécution est suspendue ; le bénéficiaire de cette mesure n’est plus sous écrou, mais fait l’objet d’un certain nombre de conditions particulières ainsi que de mesures d’assistance et de contrôle. Bénéficier d’une libération conditionnelle nécessite un projet particulièrement structuré.

93.La libération conditionnelle se déroule sous le contrôle du juge de l’application des peines qui mandate le service pénitentiaire d’insertion et de probation (SPIP) pour veiller au respect des obligations et accompagner la personne dans sa réinsertion. Elle ne peut excéder une durée totale de 10 ans.

94.Pour bénéficier d’une telle mesure, le condamné doit avoir fait l’objet d’une condamnation définitive, avoir donné son consentement à l’octroi d’une telle mesure, remplir les conditions de délai tenant à la durée de la peine accomplie (la durée de la peine accomplie par le condamné doit être au moins égale à la durée de la peine lui restant à subir ou au double de la durée de la peine restant à accomplir si les faits ont été commis en récidive), et manifester des efforts sérieux de réadaptation sociale : il peut s’agir de l’exercice d’une activité professionnelle qui peut revêtir la forme d’un enseignement, d’une formation, d’un stage, d’un emploi temporaire mais également de la participation essentielle à la vie de famille, de la nécessité de suivre un traitement médical, de l’effort en vue d’indemniser les victimes, ou encore de l’implication dans tout autre projet sérieux d’insertion ou de réinsertion.

Le développement volontariste des aménagements de peine

95.La politique de développement des aménagements de peine porte ses fruits, puisque les aménagements de peine sous écrou ont été multipliés par 3,6 en 5 ans, entre le 1er octobre 2005 (2.157 personnes) et le 1er octobre 2010 (7 774 personnes). La part des aménagements de peine sous écrou est passée de 5,8 pour cent à 15,2 pour cent des personnes écrouées.Le Gouvernement projette un effectif de 10 593 personnes écrouées non détenues en 2012.

96.Les dispositions de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009, dont l’objectif était de développer encore le recours aux mesures d’aménagement de peines et corrélativement d’entraîner une baisse de la population pénale détenue, commencent à démontrer leurs effets.

97.Ainsi, le nombre d’aménagements de peine accordés aux condamnés à une peine d’emprisonnement ferme au cours de l’année 2010 a encore augmenté de 9 pour cent par rapport à l’année précédente (32 969 contre 30 333).

98.Cette volonté de faciliter le recours aux aménagements de peine s’est traduite par :

(a)L’extension du placement sous surveillance électronique fixe ou mobile pour les prévenus avant le procès, afin de limiter la détention provisoire ;

(b)L’extension du nombre de condamnés concernés : le seuil en dessous duquel les peines doivent faire l’objet d’un aménagement est désormais fixé à 2 ans d’emprisonnement et non plus d’un an, sauf pour les récidivistes ;

(c)L’affirmation d’un principe selon lequel doivent être aménagées, sauf impossibilité, toutes les peines d’emprisonnement ferme inférieures ou égales à deux ans ou dont le reliquat est inférieur ou égale à deux ans (1 an pour les personnes en récidive légale) ;

(d)L’élargissement des conditions d’octroi : l’implication durable dans un projet sérieux d’insertion ou de réinsertion de nature à prévenir la récidive, peut désormais donner lieu à un aménagement de peine.

(e)La simplification de la procédure dans un souci d’efficacité renforcée : grâce à une procédure plus rapide (convocation devant le juge de l’application des peines (JAP) et le service pénitentiaire d’insertion et de probation (SPIP) remise à l’audience, gestion des modifications d’horaires des aménagements de peine sous écrou par le chef d’établissement ou le directeur du SPIP,…), plus efficace (les aménagements de peine prononcés par la juridiction de jugement peuvent être assortis de l’exécution provisoire- ce qui permet à la personne condamnée d’exécuter immédiatement la mesure d’aménagement de peine sans attendre que le délai d’appel soit expiré-, procédures permettant, tant en milieu ouvert qu’en milieu fermé, un examen systématique de toutes personnes rentrant dans les conditions…)

(f)L’introduction de la nouvelle mesure de surveillance électronique de fin de peine pour les détenus condamnés à moins de 5 ans d’emprisonnement et auxquels il reste 4 mois de détention à subir. Tous les condamnés répondant à ces critères qui n’ont pu préalablement bénéficier d’un aménagement de peine peuvent désormais prétendre à l’exécution de la fin de leur peine sous surveillance électronique. L’objectif de cette disposition est notamment de permettre le placement sous surveillance électronique de détenus n’ayant pas construit en détention de projet préalable d’insertion. Cette mesure, entrée en vigueur depuis le 1er janvier 2011, bénéficie ainsi à un nouveau type de public qui aurait été définitivement élargi sans accompagnement.

99.Le modèle de projection des effectifs de la population carcérale utilisé par la direction de l’administration pénitentiaire tient compte de ces évolutions. Les projections établies au mois de février 2011 sont les suivantes :

Projection des effectifs écroués, hébergés et PSE selon le scénario moyen retenu

Population écrouée

Dont PSE classique

Dont PSE article 84 lp

Semi-liberté

Placement extérieur hébergé

Placement extérieur non hébergé

Population hébergée

01/01/2012

70 002

6 009

3 833

1 695

424

751

59 408

01/01/2013

71 611

6 458

3 821

1 757

450

827

60 506

01/01/2014

73 279

6 900

3 805

1 821

478

914

61 659

100.La mise en service du nouveau dispositif de surveillance électronique de fin de peine est progressive depuis le 1er janvier 2011. Son plein effet sera ressenti à partir de janvier 2012.

D.La prise en compte par le Gouvernement des recommandations du Contrôleur général des lieux de privation de liberté

101.Le Gouvernement s’efforce de répondre aux recommandations du contrôleur général des lieux de privations de liberté chaque fois qu’il est saisi par cette autorité. Ainsi, six réponses concernant des recommandations relatives à la santé mentale des personnes détenues ont été apportées depuis 2010. L’essentiel des questions posées par le Contrôleur général des lieux de privation de liberté porte sur la coordination entre les unités de consultation et de soins ambulatoires (UCSA) et les services médico-psychologiques régionaux (SMPR) ou sur les personnels affectés dans ces deux types de structures.

102.La loi d’orientation et de programmation pour la justice du 9 septembre 2002 a créé les unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA) afin d’assurer l’hospitalisation psychiatrique des personnes détenues, avec ou sans leur consentement, dont les troubles du comportement ne permettent pas leur maintien dans une structure pénitentiaire classique. Les points majeurs de ce programme sont les suivants :

(a)Ces unités sont implantées dans un établissement de santé,

(b)Est réaffirmée la primauté des soins pour la prise en charge des détenus, sans que cela ne fasse obstacle à l’application des règles pénitentiaires. Il est rappelé à cet égard que les patients admis à l’hôpital sont considérés comme continuant à subir leur peine ou, s’il s’agit de prévenus, comme placés en détention provisoire,

(c)La sécurisation du périmètre de ces unités est assurée par du personnel pénitentiaire, formé à cette mission.

103.Chaque UHSA fait l’objet d’une construction neuve au sein d’un centre hospitalier.

104.Deux tranches de travaux sont programmées, dont la première seulement est à ce stade planifiée, comme suit :

(a)Lyon2 avril 2010 (en service depuis cette date)

(b)Strasbourg (Nancy) :début 2012

(c)Toulouse : fin 2011

(d)Dijon (Orléans) :mi 2012

(e)Rennes :mi 2013

(f)Marseille :fin 2013

(g)Paris (Villejuif) :fin 2012

(h)Bordeaux :3éme trimestre 2014

(i)Lille :début 2013

Réponse au paragraphe 14 des observations finales

Fouilles corporelles

105.La nécessité de trouver un nécessaire équilibre entre le respect de la dignité de la personne détenue et les impératifs de sécurité en établissement pénitentiaire constitue un objectif fort et permanent de l’administration pénitentiaire, en particulier s’agissant de la réalisation des divers contrôles et fouilles de la personne détenue.

A.L’évolution normative : les principes de nécessité et de proportionnalité

106.Le régime des fouilles corporelles a fait l’objet d’une évolution normative significative ces derniers mois. Ainsi, l’article 57 de la loi pénitentiaire n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 prend en compte les exigences de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme (cf. arrêts FREROT c/ France, 12 juin 2007 et Khider c/ France, 9 juillet 2009), qui considère que les fouilles systématiques des détenus, non fondées par des impératifs de sécurité imposés par les circonstances, sont à proscrire.

107.Cette jurisprudence a été suivie par les juridictions administratives françaises (cf. CE, 14 novembre 2008, El Shennawy, n° 315622 ). Le Conseil d’Etat a ainsi jugé que les fouilles devaient, pour être conformes aux normes applicables, en particulier l’article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme, réunir les conditions de nécessité, d’adaptation au motif poursuivi et de proportionnalité des moyens employés.

108.L’article 57 de la loi et les articles R. 57-7-79 à R. 57-7-82 du Code de procédure pénale, issus du décret n° 2010-1634 en date du 23 décembre 2010, énoncent la nécessité d’adapter la nature de la fouille et sa fréquence aux circonstances de la vie en détention, au profil de la personne détenue, aux risques encourus en termes de sécurité et d’ordre, afin d’écarter toute suspicion quant à une décision arbitraire ainsi que le recours systématique aux mesures de fouille.

109.Ces dispositions, reprises et explicitées par voie réglementaire (circulaire d’application du 14 avril 2011), édictent clairement les principes de nécessité et de proportionnalité qui doivent encadrer chaque opération de fouille d’une personne détenue, quelle que soit la nature de la fouille (par palpation, intégrale ou investigation corporelle interne) ou le lieu de détention de cette personne (établissement pénitentiaire ou unité hospitalière sécurisée ou spécialement aménagée).

110.Ces dispositions rappellent également que ces mesures doivent être fondées sur un impératif de sécurité des personnes ou de bon ordre de l’établissement ou de prévention des infractions pénales, et réitèrent le principe de gradation des mesures de fouille mises en œuvre dans le respect de la dignité des personnes.

111.Ces dispositions impliquent une évolution des pratiques professionnelles fondées jusqu’alors sur des dispositions définissant les circonstances à l’occasion desquelles les fouilles s’effectuaient systématiquement.

112.Les services de l’administration pénitentiaire qui ont certes contribué à élaborer les textes de référence en la matière, cependant ces textes ont fait l’objet en ce qui concerne la loi d’un vote de la représentation nationale et, en ce qui concerne les décrets, d’un examen scrupuleux par le conseil d’Etat. La circulaire du 14 avril 2011 est susceptible, si elle est contestée par des parties intéressées, d’être déférée devant le conseil d’Etat.

B.Les modalités d’exécution des fouilles réalisées par les personnels pénitentiaires

113.Seuls deux types de fouilles sont réalisés au sein des établissements pénitentiaires français :

(a)La fouille par palpation, qui consiste en une palpation au dessus des vêtements.

(b)La fouille intégrale (et non pas « fouille à corps »), qui consiste à faire se déshabiller complètement le détenu, pour s’assurer qu’il ne transporte pas, dans ses vêtements ou sur lui, d’objet interdit. Cette fouille intégrale est réalisée sans aucun contact physique avec la personne fouillée.

114.Les fouilles sont décidées par le chef d’établissement et, par délégation, son adjoint, un directeur des services pénitentiaires ou un membre du corps de commandement placé sous son autorité. Il sera donc responsable, dans le strict cadre défini par la loi et le décret, de la motivation des décisions.

115.Les personnes détenues ne sont fouillées que par des agents de leur sexe et doivent l’être dans des conditions qui, tout en garantissant l’efficacité du contrôle, préservent le respect de la dignité inhérente à la personne humaine. Ainsi :

(a)Les fouilles intégrales collectives sont prohibées.

(b)Le nombre d’agents chargés de la fouille intégrale d’une personne détenue est strictement limité aux besoins évalués, en prenant en compte les circonstances et la personnalité de la personne concernée.

(c)Toute fouille intégrale est effectuée dans un local réservé à cet effet dans des conditions d’hygiène convenables (propreté, température).

(d)La fouille s’effectue hors la vue de toute autre personne étrangère à l’opération elle-même.

C.Les investigations corporelles internes

116.L’article 57 de la loi pénitentiaire consacre une procédure en vigueur dans l’ensemble des établissements pénitentiaires, celle des investigations corporelles internes, qui ne relèvent pas des pratiques pénitentiaires mais exclusivement de la compétence du personnel médical sur prescription de l’autorité judiciaire.

117.Ces investigations peuvent procéder d’un examen des cavités buccales, anales ou vaginales. Elles sont sollicitées de manière exceptionnelle, lorsque la personne détenue est soupçonnée d’avoir ingéré ou introduit des objets ou substances prohibés ou dangereux.

118.Les investigations corporelles internes sont pratiquées par des médecins qui n’exercent pas au sein de l’établissement pénitentiaire concerné.

119.Lorsqu’une telle mesure s’avère nécessaire, il appartient au chef d’établissement de saisir préalablement le parquet territorialement compétent qui décidera, le cas échéant, de requérir un médecin pour la mettre en œuvre.

D.Le recours à la détection par équipement électronique 

120.A titre liminaire, il convient d’indiquer que l’ensemble des établissements est doté de portiques de détection de masse métalliques, leur nombre et leur localisation (porte d’entrée principale, secteur atelier, secteur parloirs, accès cour de promenade, etc.) dépendant de la catégorie et de la structure de chaque établissement.

121.L’administration pénitentiaire réfléchit actuellement à l’installation d’un portique à ondes millimétriques au sein d’établissements pénitentiaires. Le coût unitaire est évalué à environ 150 000 euros. Il permet de visualiser les contours du corps, sans que la personne ait besoin de se dévêtir. Le coût et les implications de ce matériel imposent une réflexion préalable, afin notamment de déterminer des conditions d’usage précises et un déploiement ciblé. L’installation d’un premier portique au sein d’une maison centrale est envisagée courant 2011.

Réponse au paragraphe 30 des observations finales

Usage du pistolet à impulsion électrique en détention

122.Les pistolets à impulsion électrique (PIE) sont affectés exclusivement aux équipes régionales d’intervention et de sécurité (ERIS) et à l’école nationale d’administration pénitentiaire (ENAP), dans le cadre de la formation initiale des agents ERIS.

123.Les ERIS, composées de personnels pénitentiaires spécialement formés et habilités pour intervenir en cas d’incidents en établissement pénitentiaire, ont été créées en 2003, notamment afin d’intervenir de manière ponctuelle dans un établissement pour renforcer, maintenir ou rétablir l’ordre.

124.Le ministère de la justice et des libertés a mis en place les actions de formation nécessaires à la parfaite maîtrise de cette arme par les fonctionnaires qui sont ensuite spécialement et personnellement habilités à son utilisation.

125.Ilconvient de souligner que le PIE est particulièrement dissuasif quand il est déployé en mission et évite le recours à des armements plus invasifs. Ainsi, depuis 2006, le PIE n’a été utilisé en conditions opérationnelles par les personnels des ERIS qu’à l’encontre de deux personnes détenues au cours d’une seule intervention dans un dortoir à l’occasion d’un mouvement collectif de personnes détenues. A cette occasion, le PIE n’a été utilisé qu’en « mode contact » (application directe avec neutralisation par sensation de douleur), sans aucune conséquence sur la santé des personnes ayant du être maîtrisées par l’utilisation de cette arme. Aucune utilisation en « mode tir » (propulsion à distance avec perte de contrôle locomoteur) n’a été réalisée.

126.Les conditions de l’usage de cette arme sont strictement encadrées par les textes en vigueur qui imposent que son emploi doit toujours être nécessaire, s’inscrire dans le cadre d’une riposte ou d’une action proportionnée et être réalisée avec discernement, en particulier au regard de la vulnérabilité de la personne visée.

127.Ainsi, les instructions réglementaires, volontairement restrictives quant à l’utilisation de cette arme, imposent actuellement :

(a)Une utilisation proportionnelle au risque encouru pour répondre à une agression physique ou à comportement dangereux ou menaçant,

(b)Une information orale obligatoire (par sommation par exemple) de la personne du risque encouru d’être exposé au PIE,

(c)Une utilisation strictement limitée à la neutralisation de la personne afin de limiter la répétition de séquences électriques,

(d)Un enregistrement vidéo systématique des séquences de déploiement dès la mise sous alimentation du PIE.

128.Dans le cadre de la refonte de la circulaire sur l’usage de la force et des armes actuellement en cours, les conditions d’emploi du pistolet à impulsion électrique seront mises en cohérence avec les nouvelles dispositions du décret du 23 décembre 2010, selon lesquelles notamment la force ne peut être utilisée par les personnels de l’administration pénitentiaire envers les détenus qu’en cas de légitime défense, de tentative d’évasion, de résistance violente ou par inertie physique aux ordres donnés, sous réserve que cet usage soit proportionné et strictement nécessaire à la prévention des évasions ou au rétablissement de l’ordre.

Réponse au paragraphe 36 des observations finales

Traite des personnes

A.L’élaboration d’un plan national d’action contre la traite

129.Un plan d’action national de lutte contre la traite des êtres humains a été élaboré en juin 2010 par le groupe de travail relatif à la protection et la prise en charge des victimes de la traite des êtres humains. Installé le 15 décembre 2008 sur décision conjointe du Ministre de l’intérieur et du Garde des sceaux, ce groupe est composé de représentants des ministères concernés, d’associations spécialisées et de personnalités qualifiées.

130.Le plan d’action comprend 33 mesures qui portent sur 7 priorités :

(a)La coordination de la lutte contre la traite des êtres humains ;

(b)La prévention de cette infraction ;

(c)L’identification des victimes ;

(d)La protection des victimes ;

(e)La répression des auteurs ;

(f)La coopération internationale ;

(g)Le contrôle et l’évaluation des actions engagées.

131.En substance, les principales mesures portent sur :

(a)La création d’une structure de coordination nationale ;

(b)La formation des acteurs institutionnels et associatifs sur l’identification des victimes de la traite des êtres humains (souvent perçues comme des auteurs), préalable indispensable afin de les faire bénéficier du dispositif législatif et réglementaire qui leur est dédié (règles spécifiques en matière de protection, d’admission au séjour, d’hébergement, d’indemnisation et d’information des victimes) ;

(c)L’amélioration de la situation administrative des victimes de la traite des êtres humains qui peuvent bénéficier d’un délai de réflexion de trente jours pour choisir de bénéficier ou non de la possibilité d’admission au séjour, sous réserve de déposer plainte contre une personne qu’elles accusent d’avoir commis à leur encontre l’infraction de traite des êtres ou de témoigner dans une procédure pénale concernant une personne poursuivie pour cette infraction ;

(d)Le développement de la coopération internationale, notamment en direction des pays d’origine des victimes de la traite des êtres humains (Bulgarie, Roumanie, Nigéria…) en coordonnant les actions de coopération engagées par les différents départements ministériels et les acteurs associatifs.

132.Le plan d’action fédère les actions déjà entreprises et les développe et il en prévoit de nouvelles. Son succès dépendra de l’aboutissement de la première de ces mesures, de telle sorte que la coopération interministérielle puisse se faire de la façon la plus efficace. Pour cette raison, une telle structure fait actuellement l’objet de discussions ministérielles approfondies, s’agissant notamment de sa forme, sa composition et son rattachement.

B.Mesures déjà mises en œuvre pour la répression et la prévention de la traite

Mesures législatives

133.La directive 2011/36/UE du 5 avril 2011du Parlement européen et du Conseil concernant « la prévention de la traite des êtres humains et la lutte contre ce phénomène ainsi que la protection des victimes » a pour objet d’intégrer dans l’acquis de l’Union les dispositions de la Convention du Conseil de l’Europe relative à la lutte contre la traite des êtres humains signée à Varsovie le 25 octobre 2007 (ratifiée par la France et entrée en vigueur en 2008). Elle inclut les formes non sexuelles d’exploitation, et notamment, celles aux fins de mendicité et de travail forcé, de même que le prélèvement d’organes, l’adoption et le mariage forcé. Le droit français est d’ores et déjà très largement conforme aux dispositions de cette directive.

134.La Commission européenne prépare actuellement une nouvelle stratégie intégrée pour la lutte contre la traite des êtres humains (TEH) et la protection et l’assistance aux victimes de ces phénomènes.

135.La prévention et la répression de la traite des êtres humains en France se fait aussi en application du protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à « prévenir et réprimer cette infraction ».

136.Pour mémoire, l’article 225-4-1 du code pénal définit la traite des êtres humains comme

« le fait, en échange d’une rémunération ou de tout autre avantage ou d’une promesse de rémunération ou d’avantage, de recruter une personne, de la transporter, de la transférer, de l’héberger ou de l’accueillir, pour la mettre à sa disposition ou à la disposition d’un tiers, même non identifié, afin soit de permettre la commission contre cette personne des infractions de proxénétisme, d’agression ou d’atteintes sexuelles, d’exploitation de la mendicité, de conditions de travail ou d’hébergement contraires à sa dignité, soit de contraindre cette personne à commettre tout crime ou délit ».

137.La traite des êtres humains est punie de sept ans d’emprisonnement et de 150 000 euros d’amende. Lorsqu’elle est aggravée, comme en particulier lorsqu’elle est commise à l’égard d’un mineur, cette infraction est punie de dix ans d’emprisonnement et de 1 500 000 euros d’amende (article 225-4-2 du Code pénal).

Mesures opérationnelles

138.Au plan de la politique pénale, le Gouvernement s’attache à promouvoir l’emploi de la qualification de traite des êtres humains en donnant pour instruction au Parquet de mettre en avant auprès des juridictions le fait que la poursuite sur ce fondement précis de l’article 225-4-1 du Code pénal n’est pas exclusive d’autres qualifications habituellement retenues pour appréhender pénalement ce type de faits.

139.Cette qualification pénale permet ainsi de sanctionner toutes les personnes qui, en connaissance de cause, ont participé à l’une des étapes ayant conduit à la réalisation de l’une des formes d’exploitation visées dans ce texte, participant ainsi à une meilleure répression de l’ensemble du phénomène criminel.

140.Elle est en outre particulièrement importante dans la mesure où elle est susceptible d’ouvrir des droits particuliers aux victimes.

141.Ces éléments ont été rappelés par la circulaire de politique pénale générale du 1er novembre 2009.

142.La coopération internationale en matière de traite des êtres humains est assurée par l’office central pour la répression de la traite des êtres humains (O.C.R.T.E.H.) par l’intermédiaire des trois canaux de coopération policière internationale, INTERPOL, Europol et Schengen qui sont utilisés pour l’échange d’informations et les surveillances transfrontalières.

143.La coopération opérationnelle est renforcée par l’action d’officiers de liaison chargés d’assurer l’interface entre policiers français et étrangers. Ils constituent le rouage efficace pour l’échange informel de renseignements mais également pour la mise en place et le suivi des demandes d’entraide judiciaire émises par les magistrats français en matière de criminalité organisée.

144.S’agissant de la coopération avec les pays d’origine, la France a signé en 2002 avec la Roumanie, puis en 2003 avec la Bulgarie, des protocoles bilatéraux de coopération policière visant à renforcer l’échange d’informations opérationnelles et à permettre la constitution d’équipes communes d’enquête dès lors qu’une procédure est ouverte dans chacun des deux pays sur une même affaire. Au regard des résultats positifs enregistrés, ces protocoles sont régulièrement reconduits. En outre, depuis 2007, l’exécution des mandats d’arrêt européens contre les responsables de réseaux a renforcé l’efficacité des dispositifs de lutte mis en place avec ces pays.

145.Concernant plus spécifiquement la lutte contre l’exploitation sexuelle – et en particulier celle des mineurs – la France a privilégié la constitution des services spécialisés suivants :

(a)L’office central pour la répression de la traite des êtres humains (OCRTEH) qui coordonne et centralise l’action contre l’exploitation de la prostitution de personnes majeures. Ponctuellement, des mineurs sexuellement exploités par des réseaux sont identifiés dans le cadre du dispositif de lutte contre la traite des êtres humains à des fins de prostitution et sont remis aux services territoriaux spécialisés (brigades des mineurs).

(b)L’office central pour la répression des violences aux personnes (OCRVP) qui est compétent pour les infractions spécifiques au tourisme sexuel. Dans ce domaine, la France dispose d’un arsenal législatif complet, appliquant notamment le principe de compétence universelle pour ses ressortissants.

146.L’OCRVP a développé son activité en conséquence, en facilitant la remontée d’informations susceptibles de générer des enquêtes.

147.On relèvera que si les textes répressifs français organisent une répression sévère contre les responsables de l’exploitation sexuelle, leur application, dès le début de l’enquête, permet de ne pas nuire à la victime et surtout de prendre en compte sa sécurité et celle de la famille, y compris à l’étranger.

148.En effet, les enquêtes de police contre les réseaux de traite des êtres humains à des fins d’exploitation sexuelle sont menées sur le mode « pro actif » par les services spécialisés. Ce mode d’investigation peut souvent éviter le dépôt de plainte de la victime et donc une mise en danger vis-à-vis des réseaux les plus violents.

149.En pratique, dès qu’une enquête démontre l’implication d’un mineur en tant que victime d’un réseau de prostitution, un signalement est effectué auprès de l’autorité judiciaire territorialement compétente. Le démantèlement du réseau est alors immédiat afin de permettre la prise en charge et la protection de la victime.

150.Au-delà des investigations policières qui préservent les intérêts des victimes, le code de procédure pénale a prévu des dispositions spécifiques sur la « protection des témoins » (Art. 706-57 à 706-63). Ainsi :

(a)Sur autorisation du procureur de la République, les personnes qui sont susceptibles d’apporter des éléments de preuve peuvent déclarer comme domicile l’adresse du commissariat ou de la brigade de gendarmerie

(b)Dans le cadre d’un crime ou d’un délit puni d’une peine d’au moins cinq ans d’emprisonnement, lorsque la déclaration d’une personne est susceptible de mettre gravement en danger sa vie ou son intégrité physique, ou celle de sa famille, son audition pourra être recueillie sans que son identité apparaisse dans la procédure d’investigation. Cette disposition s’applique avec l’accord du magistrat ;

(c)Si le mis en examen demande à être confronté au témoin, la confrontation a lieu par l’intermédiaire d’un dispositif technique qui rendra méconnaissable la voix du témoin.

151.En outre, l’article L. 1316-1 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) prévoit qu’une carte de séjour temporaire peut être délivrée à la personne prostituée étrangère qui dépose plainte ou témoigne dans une procédure pénale engagée en matière de proxénétisme ou de traite des êtres humains, sauf si sa présence constitue une menace à l’ordre public. En cas de condamnation définitive de la personne mise en cause, une carte de résident peut alors être délivrée.

152.Plusieurs droits sont attachés à la détention de cette carte de séjour temporaire : elle permet notamment l’ouverture des droits à une protection sociale, à l’allocation temporaire d’attente, à un accompagnement social et, en cas de danger, à une protection policière pendant la durée de la procédure pénale.

153.Cette carte de séjour peut également être délivrée à un mineur âgé d’au moins 16 ans en application de l’article R. 316-3 du CESEDA.

154.Au-delà des seuls aspects répressifs, diverses actions préventives ont été également entreprises avec les organisations non gouvernementales les plus impliquées dans cette lutte. Par exemple, l’OCRVP a contribué avec l’association ECPAT International à l’élaboration d’un manuel de bonnes pratiques destiné à la sensibilisation des personnels hôteliers du groupe ACCOR à la problématique du tourisme sexuel.

155.Des groupes spécialisés ont été installés au sein des services de police judiciaire territoriaux les plus concernés dans la lutte contre cette forme de délinquance, comme à Marseille, Lyon, Strasbourg et Toulouse.

156.Le Gouvernement accorde également une attention particulière au soutien du réseau associatif chargé de l’accueil et de la prise en charge des victimes de la traite des êtres humains. En 2010, une subvention de 15 000 euros a été versée au Comité contre l’esclavage moderne. L’association Hors-La-Rue a bénéficié d’un financement à hauteur de 10 000 euros en vue d’améliorer le dispositif de prise en charge des mineurs victimes de cette infraction.

B.Eléments relatifs à la prévalence du phénomène

157.Une augmentation des procédures ouvertes du chef de traite des êtres humains est observée depuis la mise en œuvre de la politique pénale présentée plus haut, notamment au sein des juridictions interrégionales spécialisées en matière de lutte contre la criminalité organisée.

158.Il ressort de l’analyse des actions menées par l’ensemble des services répressifs, établie à partir des statistiques de l’O.C.R.T.E.H., qu’en 2010, sur l’ensemble du territoire (outre-mer compris) 518 personnes (dont 188 de nationalité française) ont été mises en cause pour des faits de traite des êtres humains à des fins d’exploitation sexuelle.

159.726 victimes (dont 189 de nationalité française) ont été identifiées en 2010 dans le cadre d’enquêtes judiciaires. 40 d’entre elles étaient mineures (contre 20 en 2009) réparties en 31 filles âgées de 16 à 18 ans (20 Françaises, 10 Roumaines, 1 Camerounaise) et 9 garçons (Bulgares) âgés de 13 à 18 ans.

160.En 2009, 79 titres de séjour temporaire ont été délivrés, dans le cadre de la lutte contre le proxénétisme.