Nations Unies

CRPD/C/28/2

Convention relative aux droits des personnes handicapées

Distr. générale

26 avril 2023

Français

Original : anglais

Comité des droits des personnes handicapées

Rapport du Comité des droits des personnes handicapées sur sa vingt-huitième session (6-24 mars 2023)

I.États parties à la Convention et au Protocole facultatif s’y rapportant

1.Au 24 mars 2023, date de clôture de la vingt-huitième session du Comité des droits des personnes handicapées, le nombre des États parties à la Convention relative aux droits des personnes handicapées était de 186 et celui des États parties au Protocole facultatif s’y rapportant de 104. La liste des États parties à chacun de ces deux instruments figure sur le site Web du Bureau des affaires juridiques du Secrétariat.

II.Ouverture de la vingt-huitième session du Comité

2.La vingt-huitième session a été ouverte en séance publique par la Chef de la Section des droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels, du Service des traités relatifs aux droits de l’homme, de la Division des mécanismes relevant du Conseil des droits de l’homme et des instruments relatifs aux droits de l’homme du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, qui a souhaité la bienvenue aux participants. Le texte de l’allocution de bienvenue est disponible sur le site Web du Comité.

3.Le Comité a examiné puis adopté l’ordre du jour et le programme de travail provisoires de la vingt-huitième session.

III.Composition du Comité

4.La liste des membres du Comité au 24 mars 2023, avec mention de la durée de leur mandat, figure sur le site Web du Comité.

IV.Élection du Bureau

5.L’élection du Bureau a été conduite par la Chefde la Section des droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels. Les membres ci-après ont été élus pour un mandat de deux ans, conformément aux articles 15, 16 et 17 du Règlement intérieur du Comité :

Présidence :Gertrude Oforiwa Fefoame

Vice-Présidence :Amalia Eva Gamio RíosOdelia FitoussiRosemary Kayess

Rapporteuse :Vivian Fernández de Torrijos

V.Méthodes de travail

6.Le Comité a débattu de diverses questions ayant trait à ses méthodes de travail et décidé de poursuivre l’actualisation et la simplification de ces dernières pendant la période intersessions.

VI.Activités se rapportant aux observations générales

7.Le Comité a organisé une journée de débat général sur les personnes handicapées dans les situations de risque et les situations d’urgence humanitaire. Il a également organisé plusieurs séances d’information privées avec des partenaires ayant des compétences particulières sur des questions touchant à l’article 11 de la Convention relative aux droits des personnes handicapées.

VII.Activités se rapportant au Protocole facultatif

8.Le Comité a examiné trois communications. Il a conclu à des violations de la Convention dans deux affaires : Mangisto et al-Sayed c. État de Palestine, concernant la disparition et la détention arbitraire de deux personnes handicapées, et García Vara c. Mexique, concernant l’absence d’aménagements raisonnables et le manque d’accessibilité dans l’enseignement supérieur. Dans la troisième affaire, P. L. et consorts c. France , concernant l’arrêt des traitements de maintien des fonctions vitales d’une personne handicapée, le Comité a déclaré la communication irrecevable après avoir conclu que ses auteurs n’avaient pas la qualité pour agir au nom de la victime présumée.

9.Le Comité a également adopté un rapport intermédiaire sur la suite donnée aux communications émanant de particuliers. Dans ce rapport, la Rapporteuse spéciale chargée du suivi des constatations rend compte des renseignements qu’elle a reçus entre les vingt-troisième et vingt-huitième sessions en application du Règlement intérieur du Comité, ainsi que des évaluations que le Comité a effectuées et des décisions qu’il a prises à propos du suivi.

10.Les constatations et décisions adoptées au sujet des communications seront publiées sur le Système de diffusion électronique des documents et sur le site Web du Comité. On trouvera à l’annexe III du présent rapport un résumé des constatations et décisions adoptées à la vingt-huitième session.

11.Le Comité a examiné des questions relatives à la procédure d’enquête prévue aux articles 6 et 7 du Protocole facultatif.

VIII.Prochaines sessions

12.Il est prévu à titre provisoire que le Comité tienne sa vingt-neuvième session à Genève, du 14 août au 9 septembre 2023, avant la dix-huitième réunion du groupe de travail de présession (11-14 septembre 2023).

IX.Accessibilité des séances du Comité

13.La vingt-huitième session du Comité s’est tenue sous une forme hybride. Les membres du Comité et la plupart des délégations des États parties y ont participé en personne à Genève et certaines délégations y ont participé à distance, en ligne. Les parties prenantes, parmi lesquelles figuraient des organisations de personnes handicapées, des organisations de la société civile, des institutions nationales des droits de l’homme, des institutions spécialisées et d’autres organes de l’Organisation des Nations Unies, ont participé en personne ou en ligne. Des services d’interprétation en signes internationaux et en langue des signes nationale ainsi que des services de sous-titrage à distance étaient assurés. Les séances publiques ont été diffusées sur le Web. Aucun document n’était disponible en langue simplifiée ou en langage facile à lire et à comprendre pendant la session. Le logiciel utilisé pour l’inscription des participants à la réunion n’était pas accessible aux personnes aveugles ou ayant une déficience visuelle. Les protocoles concernant l’entrée des véhicules dans l’enceinte du Palais des Nations posaient encore des obstacles aux participants handicapés ayant besoin de services de transport accessibles. Cette fois encore, peu d’aménagements raisonnables ont été apportés, y compris dans l’organisation des déplacements des membres du Comité ayant un handicap.

X.Coopération avec les organes compétents

A.Coopération avec les organes de l’ONU et les institutions spécialisées des Nations Unies

14.À la séance d’ouverture de la session, une représentante de l’Organisation mondiale de la Santé a fait une déclaration. À la séance de clôture, les représentants du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) et du Conseil d’administration du Fonds de contributions volontaires des Nations Unies pour les victimes de la torture ont fait des déclarations.

B.Coopération avec des organisations non gouvernementales et d’autres organismes

15.À la séance d’ouverture de la session, des allocutions ont été prononcées par des représentants des entités suivantes : l’International Disability Alliance, la Global Albinism Alliance, le Forum européen des personnes handicapées, la Coalición Interamericana para la Desinstitucionalización de Personas con Discapacidad, le Disability Rights Fund, l’International Communication Rights Alliance, la Citizens Commission of Human Rights et Cités et Gouvernements Locaux Unis, ainsi que par un représentant de l’administration judiciaire de la province de Buenos Aires.

16.Les représentants du mécanisme indépendant de surveillance du Pérou et de l’institution nationale des droits de l’homme de Géorgie ont participé à l’examen public des rapports initiaux de leurs pays respectifs par le Comité. Lors des séances privées consacrées à la situation dans les pays à l’examen, le Comité a recueilli des informations provenant de plusieurs organisations de personnes handicapées, organisations de la société civile et mécanismes indépendants de surveillance, notamment des institutions nationales des droits de l’homme, et s’est entretenu avec ceux-ci.

17.À la séance de clôture de la session, l’International Disability Alliance a fait une déclaration devant le Comité.

XI.Examen des rapports soumis en application de l’article 35 de la Convention

18.Le Comité a tenu six dialogues constructifs : cinq en personne et un en ligne. Il a examiné les rapports initiaux de l’Angola, de la Géorgie et du Togoainsi que les rapports valant deuxième et troisième rapports périodiques de l’Argentine, du Pérou et de la Tunisie. Il a adopté des observations finales concernant ces rapports. Une liste des États parties dont les rapports initiaux sont attendus depuis plus de cinq ans figure à l’annexe II du présent rapport.

XII.Autres décisions

19.Le Comité a adopté le présent rapport sur sa vingt-huitième session.

20.La liste complète des décisions adoptées par le Comité figure à l’annexe I du présent rapport.

Annexe I

Décisions adoptées par le Comité à sa vingt-huitième session

1.Le Comité a adopté des observations finales concernant les rapports initiaux de l’Angola, de la Géorgie et du Togo. Il a également adopté des observations finales concernant les rapports valant deuxième et troisième rapports périodiques de l’Argentine, du Pérou et de la Tunisie.

2.Le Comité a examiné trois communications émanant de particuliers qui lui avaient été soumises en vertu du Protocole facultatif à la Convention. Il a conclu à des violations de la Convention dans les cas soumis dans deux d’entre elles (Mangisto et al-Sayed c. État de Palestine et García Vara c. Mexique) et a déclaré la troisième irrecevable (P. L. et consorts c. France). On trouvera à l’annexe III du présent rapport un résumé des constatations et décisions adoptées par le Comité. Elles seront communiquées aux parties dès que possible, avant d’être publiées. Le Comité a également adopté un rapport de la suite donnée à ses constatations.

3.Le Comité a examiné des questions touchant aux enquêtes menées en application du Protocole facultatif.

4.Le Comité a organisé une journée de débat général au sujet de son projet d’observation générale no 9 sur les personnes handicapées dans les situations de risque et les situations d’urgence humanitaire.

5.Le Comité a décidé que, pour l’exercice biennal 2023-2024, ses langues de travail seraient l’anglais, l’arabe, l’espagnol et le français.

6.Le Comité a décidé que sa vingt-neuvième session se tiendrait à Genève du 14 août au 8 septembre 2023, sous réserve que le secrétariat confirme que la session pourrait se tenir en présentiel, et serait suivie par la dix-huitième réunion du groupe de travail de présession, du 11 au14 septembre 2023. Il a adopté le programme de travail provisoire de la vingt‑neuvième session.

7.Le Comité a décidé de poursuivre ses travaux visant à actualiser et simplifier ses méthodes de travail. Il a décidé de simplifier les méthodes de travail pour les séances d’information privées, notamment en déterminant ce qui devrait être modifié ou mieux appliqué dans la version actuelle des directives pour la participation des organisations de personnes handicapées aux travaux du Comité ; de réaliser des travaux intersessions ; et de mettre en application les méthodes de travail révisées pour les séances d’information privées à sa prochaine session. Il a également décidé de créer à titre expérimental des équipes spéciales chargées de préparer et de mener les dialogues constructifs avec les États parties.

8.Le Comité a décidé de poursuivre ses échanges avec l’Office des Nations Unies à Genève et le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme en vue d’améliorer la fourniture de services de conférence accessibles et la mise en place d’aménagements raisonnables pour les membres du Comité et participants ayant un handicap lors de ses réunions.

9.Le Comité a décidé de poursuivre l’application, toujours à titre expérimental, du projet de base de données proposé par la Fundación Saraki.

10.En réponse à une demande de la République bolivarienne du Venezuela, le Comité a préparé des commentaires et des conseils relatifs à un projet de loi sur les droits des personnes handicapées, qui seront transmis à l’État partie le 31 mars 2023.

11.Le Comité a adopté le rapport sur sa vingt-huitième session et son septième rapport biennal à l’Assemblée générale et au Conseil économique et social.

Annexe II

États parties dont les rapports initiaux sont attendus depuis plus de cinq ans

Partie

Date à laquelle le rapport aurait dû être soumis

Guinée

8 mars 2010

Saint-Marin

22 mars 2010

Lesotho

2 janvier 2011

Yémen

26 avril 2011

République arabe syrienne

10 août 2011

République-Unie de Tanzanie

10 décembre 2011

Malaisie

19 août 2012

Saint-Vincent-et-les Grenadines

29 novembre 2012

Belize

2 juillet 2013

Cabo Verde

10 novembre 2013

Nauru

27 juillet 2014

Eswatini

24 octobre 2014

Dominique

1er novembre 2014

Cambodge

20 janvier 2015

Barbade

27 mars 2015

Papouasie-Nouvelle-Guinée

26 octobre 2015

Côte d’Ivoire

10 février 2016

Grenade

17 septembre 2016

Congo

2 octobre 2016

Guyana

10 octobre 2016

Guinée-Bissau

24 octobre 2016

Annexe III

Résumé des constatations et des décisions adoptées par le Comité concernant les communications émanant de particuliers

P. L. et consorts c. France

1.Le Comité a examiné la communication concernant l’affaire P. L. c. France . Les auteurs de la communication étaient P. L., V. L., D. P. et A. T., respectivement le père, la mère, le frère et la sœur de V. L., de nationalité française, né le 20 septembre 1976 et mort le 11 juillet 2019. Selon la famille, l’État partie a violé les droits que V. L. tenait des articles 1, 3, 4, 15, 16, 17, 25 et 26 de la Convention.

2.À l’enregistrement de la communication, puis dans des notes verbales datées du 17 mai 2019 et du 2 juillet 2019, le Comité a formulé une demande de mesures provisoires en application de l’article 4 du Protocole facultatif, par laquelle il demandait à l’État partie de prendre les mesures nécessaires pour que l’alimentation et l’hydratation entérales de V. L. ne soient pas suspendues tant que la communication serait à l’examen. Le 7 mai 2019, l’État partie a notifié au Comité qu’il ne pouvait pas donner suite à cette demande, car la décision d’arrêter le traitement avait été jugée conforme à la loi par plusieurs juridictions internes et par la Cour européenne des droits de l’homme.

3.À la suite d’un accident survenu le 29 septembre 2008, V. L. a été hospitalisé au Centre hospitalier universitaire de Reims. Il était tétraplégique et en état de conscience altérée. Il a été diagnostiqué en état pauci-relationnel ou en état végétatif. Il était alimenté et hydraté par sonde de gastrostomie. Le 8 avril 2013, après une première procédure collégiale, un médecin a décidé d’arrêter l’alimentation et l’hydratation de V. L., au motif que leur poursuite apparaissait inutile, disproportionnée et avait comme seul effet de maintenir V. L. artificiellement en vie, au sens de l’article 1110-5 du Code de la santé publique, et ne respectait donc pas le droit de V. L. de refuser une obstination médicale déraisonnable. Le 11 mai 2013, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé la décision au motif que les auteurs de la communication n’en avaient pas été informés. Toutefois, les activités de stimulation sensorielle n’ont pas repris.

4.Une seconde décision d’arrêter l’alimentation et l’hydratation de V. L. a été annulée le 16 janvier 2014 par le Tribunal administratif de Châlons-en Champagne, avant d’être confirmée le 24 juillet 2014 par le Conseil d’État. Dans un arrêt du 5 juin 2015, la Cour européenne des droits de l’homme a conclu que l’application de la décision du Conseil d’État n’entraînerait pas une violation de l’article 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (Convention européenne des droits de l’homme). Une troisième procédure collégiale a été suspendue dans l’attente d’une réponse à une demande de mise sous tutelle. Par jugement du 10 mars 2016, le Tribunal d’instance de Reims a désigné R. L., l’épouse de V. L., comme sa tutrice. Une quatrième décision collégiale d’arrêter l’alimentation et l’hydratation de V. L. a été confirmée par le Tribunal administratif de Châlons-en Champagne, le 31 janvier 2019, et par le Conseil d’État, le 24 avril 2019. V. L. est mort le 11 juillet 2019 suite à l’arrêt de son alimentation et de son hydratation.

5.Dans ses constatations, le Comité a expliqué qu’il avait dû déterminer si les auteurs avaient la qualité pour agir au nom de V. L., celui-ci n’étant pas en état de consentir à la soumission de la communication. Le Comité a donc examiné la question de savoir si la communication respectait la volonté et les préférences de V. L. Il a pris note que la communication concernait l’arrêt de l’alimentation et de l’hydratation de V. L. Il a également pris note que le Conseil d’État avait examiné en détail la volonté de V. L., y compris les déclarations que celui-ci avait faites de manière répétée à son épouse et dans lesquelles il disait ne pas vouloir être maintenu artificiellement en vie s’il devait se retrouver dans un état de grande dépendance. Le Comité a constaté que les juridictions internes avaient conclu que V. L. n’aurait pas souhaité se retrouver dans l’état dans lequel il était maintenu. Il n’a donc pas été convaincu que la communication était l’expression de la volonté de V. L. Enconséquence, le Comité a conclu que les auteurs n’avaient pas qualité pour agir au nom de V. L. et que la communication était irrecevable au regard de l’article premier du Protocole facultatif.

Mangisto et al-Sayed c. État de Palestine

6.Le Comité a examiné les communications concernant l’affaire Mangisto et al-Sayed c. État de Palestin e , soumises par des membres des familles des deux victimes présumées. Les auteurs ont expliqué que celles-ci avaient été diagnostiquées comme ayant des handicaps psychosociaux, avaient pénétré dans la bande de Gaza en 2014 et 2015, et y auraient subi une disparition forcée. Les auteurs ont affirmé que les droits que les victimes présumées tenaient des articles 4, 10, 11, 12, 14, 15, 16 et 25 de la Convention avaient été violés.

7.Lorsqu’il a examiné la recevabilité de la communication, le Comité a notamment étudié la question de la juridiction. Il a pris note que l’État partie n’avait pas pleinement accès à la bande de Gaza en raison des restrictions liées au blocus et ne pouvait donc pas mener une enquête efficace sur les violations présumées. Il a pris note que, selon les jurisprudences de la Cour européenne des droits de l’homme et de la Cour interaméricaine des droits de l’homme, même lorsqu’il n’a plus le contrôle effectif d’une partie de son territoire, un État conserve l’obligation positive de prendre les mesures diplomatiques, économiques, judiciaires ou autres qui sont en son pouvoir et qui sont conformes au droit international pour protéger les droits garantis aux résidents de ce territoire. Le Comité a donc estimé que la capacité limitée de l’État partie d’exercer son autorité sur la bande de Gaza n’empêchait pas les victimes présumées de relever de sa juridiction au sens de l’article premier du Protocole facultatif.

8.S’agissant du fond de l’affaire, le Comité a établi que la question dont il était saisi était de déterminer si l’État partie s’était acquitté de son obligation positive de prendre les mesures appropriées et suffisantes qui étaient en son pouvoir pour protéger les droits que les victimes présumées tenaient de la Convention. Il a relevé que l’État partie n’avait fourni aucune information précise sur les mesures qu’il avait prises ou tenté de prendre en ce sens. L’État partie n’avait notamment pas fourni d’informations sur les mesures qu’il avait prises pour déterminer ce qu’il était advenu des victimes présumées et où elles se trouvaient, ou quelles étaient leurs conditions de détention. Il n’avait pas non plus fourni d’informations sur ses éventuelles tentatives d’établir un dialogue avec les autorités de fait dans la bande de Gaza afin de remédier à la situation des victimes présumées, de faciliter et garantir leur libération et leur retour dans leur famille en toute sécurité, de les placer sous la protection de la loi, de faire en sorte qu’elles aient accès à des soins de santé appropriés qui tiennent compte de leurs handicaps psychosociaux et de leur situation particulièrement vulnérable, et de leur permettre d’être en contact avec leurs familles, leurs proches et leurs représentants. Le Comité a conclu qu’en n’ayant pas procédé ou tenté de procéder à des enquêtes, des recherches de renseignements ou des vérifications concernant le sort des victimes présumées et l’endroit où elles se trouvaient, alors que celles-ci pouvaient courir un danger pour leur vie, être maltraitées et privées de liberté et d’accès à des soins de santé, l’État partie avait violé les droits que les victimes tenaient des articles 10, 14, 15 et 25, lus séparément et conjointement avec l’article 11 de la Convention.

9.Le Comité a demandé à l’État partie de fournir aux auteurs un recours utile, y compris une indemnisation pour les frais de justice engagés pour la soumission des communications ; il lui a également demandé de prendre, conformément au droit international, toutes les mesures diplomatiques, économiques, judiciaires ou d’autre nature qui s’imposaient pour mener rapidement une enquête efficace, exhaustive, indépendante, impartiale et transparente sur les circonstances de la disparition et de la détention arbitraire présumées des victimes, afin d’établir la vérité et de garantir le retour des victimes dans leur famille ; de fournir aux auteurs des informations détaillées sur les résultats de l’enquête ; de faire en sorte que les victimes soient en lieu sûr et aient accès à des soins médicaux, y compris en lien avec leur handicap, et puissent être en contact avec leur famille et leurs représentants.

García Vara c. Mexique

10.Le Comité a examiné la communication concernant l’affaire García Vara c. Mexique. L’auteure de la communication est Selene Militza García Vara, de nationalité mexicaine, née le 21 octobre 1980. Elle affirme que l’État partie a violé les droits qu’elle tient des articles 1, 2, 4, 5, 6, 8, 9 et 24 de la Convention, en ne garantissant pas l’accessibilité de l’enseignement supérieur et en ne procédant pas aux aménagements raisonnables dont elle aurait eu besoin pendant un examen d’entrée en licence d’arts visuels.

11.En 2014, l’auteure, qui a un handicap intellectuel, a postulé pour une place en licence d’arts visuels à l’École d’art de l’État de Morelos. À l’issue de l’examen d’entrée, elle a appris qu’elle n’avait pas été admise car elle avait échoué à la plupart des épreuves. L’auteure a affirmé que l’examen d’entrée avait respecté une égalité purement théorique, sans qu’aucun aménagement raisonnable n’ait été apporté aux épreuves, bien que les représentants de l’école et d’autres membres du personnel aient été au courant de son handicap. Toujours selon elle, l’État partie n’avait pas pris les mesures législatives, administratives et d’autre nature qui s’imposaient pour garantir son droit à l’enseignement supérieur sur la base de l’égalité avec les autres, car l’école n’était pas accessible aux personnes handicapées.

12.Dans ses constatations, le Comité a considéré que l’État partie n’avait pas démontré qu’il avait pris les mesures législatives, administratives et d’autre nature qui s’imposaient, telles que l’adoption de politiques sur les aménagements raisonnables et la formation du personnel, pour garantir un enseignement supérieur accessible et inclusif. Plus précisément, l’État partie n’avait pas garanti l’accessibilité de la licence d’arts visuels de l’École d’art de l’État de Morelos, notamment l’accessibilité des examens d’entrée, des outils d’information et de communication, des programmes d’études, du matériel pédagogique, des méthodes d’enseignement, des évaluations, des services linguistiques et des mesures d’accompagnement, sur la base de l’égalité avec les autres et sans discrimination. En ce qui concernait les affirmations de l’auteure selon lesquelles aucun aménagement raisonnable n’avait été fourni à l’examen d’entrée, le Comité a considéré que, si des critères s’imposaient pour évaluer les connaissances et aptitudes nécessaires à l’entrée dans l’enseignement supérieur, ceux-ci devaient tenir compte des besoins particuliers des personnes handicapées. Le Comité a noté que les représentants et autres membres du personnel de l’École d’art de l’État de Morelos, qui savaient que l’auteure avait un handicap intellectuel, n’avaient pas pris contact avec elle lorsqu’elle avait présenté sa candidature à la licence afin de déterminer quels aménagements raisonnables devraient être prévus pendant les épreuves de sélection communes à tous les candidats − par exemple, lui accorder plus de temps ou lui fournir l’assistance d’un professionnel qui se serait assuré qu’elle comprenait bien ce qui était demandé. En conséquence, le Comité a estimé que, faute d’avoir procédé aux aménagements raisonnables nécessaires pendant l’examen d’entrée, l’École d’art de l’État de Morelos n’avait pas garanti la participation de l’auteure dans des conditions d’égalité avec les autres candidats, qui n’avaient aucun handicap, ce qui avait exclu celle-ci de l’enseignement supérieur. Le Comité a conclu que l’État partie avait violé les articles 5 et 24, lus séparément et conjointement avec les articles 4 et 9 de la Convention. Il a également conclu que l’État partie avait violé l’article 24, lu séparément et conjointement avec les articles 4 et 8 de la Convention, en manquant à son obligation de combattre les stéréotypes, les préjugés et les pratiques préjudiciables à l’égard des personnes ayant un handicap intellectuel dans le domaine de l’éducation.

13.Le Comité a demandé à l’État partie d’accorder à l’auteure un recours utile, y compris le remboursement de tous les frais de justice qu’elle aurait pu avoir à supporter, et une indemnisation suffisante au regard du dommage subi, en tenant compte des débouchés professionnels dont elle avait été privée parce que son droit à l’enseignement supérieur n’avait pas été garanti. Il a aussi demandé à l’État partie de permettre à l’auteure d’exercer son droit à l’enseignement supérieur, si celle-ci le souhaitait toujours, en garantissant l’accessibilité de l’examen d’admission dans l’établissement d’enseignement de son choix, y compris par la réalisation des aménagements raisonnables nécessaires. Il a également demandé à l’État partie de faire figurer, dans sa législation et ses politiques, la mise en place d’un système d’éducation inclusive à tous les niveaux − enseignement primaire, enseignement secondaire, enseignement tertiaire et formation professionnelle − qui prévoie des mesures d’accompagnement, l’apport d’aménagements raisonnables, un financement suffisant et la formation du personnel enseignant ; de mettre en place des mécanismes de plainte et des moyens de recours indépendants, efficaces, accessibles, transparents, sûrs et applicables aux cas de violation du droit à l’éducation ; de mettre en garde et de lutter contre les stéréotypes, les préjugés et les pratiques préjudiciables visant les personnes handicapées, en accordant une attention particulière aux pratiques visant les femmes et filles handicapées, les personnes ayant un handicap intellectuel et les personnes ayant besoin d’un accompagnement poussé.