Nations Unies

CCPR/C/JPN/CO/7

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

30 novembre 2022

Français

Original : anglais

Comité des droits de l’homme

Observations finales concernant le septième rapport périodique du Japon *

1.Le Comité a examiné le septième rapport périodique du Japon à ses 3925e et 3926e séances, les 13 et 14 octobre 2022. À sa 3944e séance, le 28 octobre 2022, il a adopté les observations finales ci-après.

A.Introduction

2.Le Comité sait gré à l’État partie d’avoir accepté la procédure simplifiée de présentation des rapports et d’avoir soumis son septième rapport périodique en s’appuyant sur la liste de points établie au préalable dans le cadre de cette procédure. Il apprécie l’occasion qui lui a été offerte de renouer un dialogue constructif avec la délégation de l’État partie au sujet des mesures prises pendant la période considérée pour appliquer les dispositions du Pacte. Il remercie l’État partie des réponses fournies oralement par sa délégation et des renseignements complémentaires qui lui ont été communiqués par écrit.

B.Aspects positifs

3.Le Comité salue l’adoption par l’État partie des mesures législatives, politiques et institutionnelles ci-après :

a)L’approbation du Cinquième plan fondamental pour l’égalité des sexes (2020) ;

b)L’adoption de la loi sur le versement d’une indemnité forfaitaire aux personnes ayant subi une opération chirurgicale à des fins eugéniques en vertu de l’ancienne loi relative à la protection eugénique (2019) ;

c)La formulation du Plan d’accélération des efforts en faveur de l’autonomisation des femmes (2018) ;

d)L’adoption de la loi sur la promotion de l’égalité des sexes dans le domaine politique (2018) ;

e)La modification apportée en 2018 à l’article 731 du Code civil, fixant pour les hommes et pour les femmes le même âge minimum pour le mariage ;

f)L’adoption de la loi no 72 de 2017, modifiant partiellement les dispositions du Code pénal relatives aux infractions sexuelles ;

g)La modification apportée en 2016 au Code de procédure pénale, imposant de nouvelles pratiques pour les interrogatoires, dont l’enregistrement vidéo obligatoire dans le cas de certains types d’infraction ;

h)L’adoption de la loi sur les stages de formation technique et la protection des stagiaires (2016) ;

i)L’adoption de la loi relative aux dispositions spéciales applicables aux travaux auxiliaires et aux horaires de travail des médecins pénitentiaires (2015).

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Cadre constitutionnel et juridique de la mise en œuvre du Pacte

4.Le Comité prend note des informations fournies par l’État partie sur les affaires judiciaires dans lesquelles il a été fait référence aux dispositions du Pacte, et sur la formation continue dispensée aux juges et aux avocats sur le droit international des droits de l’homme, y compris sur le Pacte et son interprétation au moyen des observations générales du Comité. Toutefois, il reste préoccupé par l’absence d’informations concrètes sur les actions menées pour assurer une formation continue aux responsables de l’application des lois, aux membres des forces de sécurité, aux acteurs de la société civile et aux membres du grand public et pour les sensibiliser au Pacte et à son applicabilité en droit interne. En outre, le Comité prend acte de l’engagement répété de l’État partie d’envisager sérieusement de ratifier le premier Protocole facultatif se rapportant au Pacte (art. 2).

5.Le Comité rappelle ses précédentes recommandations et demande à l’État partie de poursuivre ses efforts pour assurer une formation continue aux juges, procureurs, avocats, responsables de l’application des lois, membres des forces de sécurité, acteurs de la société civile et membres du grand public concernant le Pacte et pour les sensibiliser à son applicabilité en droit interne. L’État partie devrait aussi donner pleinement effet au Pacte dans son ordre juridique interne et veiller à ce que la législation interne soit interprétée et appliquée conformément aux obligations découlant du Pacte. En outre, l’État partie devrait veiller à ce que des recours effectifs soient disponibles en cas de violations des droits protégés par le Pacte. Il devrait faire davantage d’efforts encore en vue de ratifier le premier Protocole facultatif se rapportant au Pacte, qui établit un mécanisme d’examen, par le Comité, des communications émanant de particuliers.

Institution nationale des droits de l’homme

6.Le Comité prend acte des informations que l’État partie a fournies au sujet de la poursuite des discussions sur la création d’une institution nationale des droits de l’homme indépendante, mais regrette le caractère vague et général de ces informations et l’absence de progrès manifestes vers la création d’une telle institution conformément aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris) (art. 2).

7. Le Comité réitère ses précédentes recommandations et demande à l’État partie de créer, à titre prioritaire, une institution nationale des droits de l’homme indépendante et conforme aux Principes de Paris, et de lui allouer des ressources financières et humaines suffisantes.

Cadre juridique de lutte contre la discrimination

8.Le Comité note que l’article 14 de la Constitution contient une clause générale de non‑discrimination qui établit l’égalité de tous les individus devant la loi, mais il reste préoccupé par l’absence d’une loi complète contre la discrimination, qui soit conforme aux dispositions du Pacte. Il regrette que l’État partie ne dise rien de ses intentions d’adopter une loi complète contre la discrimination (art. 2, 20 et 26).

9. L’État partie devrait prendre toutes les mesures nécessaires, notamment moyennant l’adoption d’une loi complète contre la discrimination, pour garantir que son cadre juridique offre une protection suffisante et effective, tant en droit positif qu’en matière procédurale, contre toutes les formes de discrimination directe, indirecte et plurielle, y compris dans la sphère privée, pour tous les motifs interdits par le Pacte, à savoir notamment la couleur, les opinions, l’orientation sexuelle, l’identité de genre, la naissance et toute autre situation, et garantir aux victimes de discrimination l’accès à des voies de recours efficaces et appropriées.

Discrimination fondée sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre

10.Le Comité prend note des mesures que l’État partie a prises pour lutter contre la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre et sensibiliser le grand public à l’égalité de traitement. Il est néanmoins préoccupé par l’absence de dispositions légales interdisant expressément la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre. En outre, il est préoccupé par les informations indiquant que les personnes lesbiennes, gays, bisexuelles et transgenres font l’objet d’une discrimination, notamment en ce qui concerne l’accès à un logement social, le changement de sexe à l’état civil, l’accès au mariage légal et le traitement dans les établissements pénitentiaires (art. 2 et 26).

11. Conformément aux précédentes recommandations du Comité , l’État partie devrait :

a) Intensifier ses activités de sensibilisation auprès du grand public pour lutter contre les stéréotypes et les préjugés concernant les personnes lesbiennes, gays, bisexuelles et transgenres ;

b) Veiller à ce que les couples de même sexe puissent exercer tous les droits consacrés par le Pacte, y compris l’accès au logement social et le mariage légal, sur tout le territoire de l’État partie ;

c) Envisager d’éliminer les exigences injustifiées en matière de reconnaissance légale du changement de sexe, notamment l’ablation des organes reproducteurs ou la privation de la capacité de reproduction, et l’obligation d’être célibataire ;

d) Prendre les mesures nécessaires pour garantir un traitement équitable des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles et transgenres détenues dans les établissements pénitentiaires, notamment en révisant les lignes directrices de 2015 relatives au traitement des détenus transgenres ainsi que leur mise en application, afin de garantir que l’isolement ne soit pas le traitement normal pour ces personnes.

Discours de haine et infractions motivées par la haine

12.Le Comité salue les mesures que l’État partie a prises pour lutter contre la discrimination et les discours de haine, notamment l’adoption en 2016 de la loi relative à la promotion de l’action menée pour éliminer les discours et les comportements injustes et discriminatoires à l’égard des personnes non originaires du Japon (loi sur l’élimination des discours de haine) et de celle sur la promotion de l’élimination de la discrimination à l’égard des Burakumin, ainsi que les efforts visant à éliminer les discours de haine par des campagnes d’éducation et de sensibilisation, mais il est préoccupé par ce qui suit : a) de nombreux discours racistes continuent d’être tenus, en ligne et hors ligne, à l’égard des minorités et des ressortissants étrangers, dont les Chinois, les Burakumin, les Ryukyu et d’autres groupes minoritaires et autochtones et, en particulier, les Coréens et les ressortissants japonais d’origine coréenne, notamment par des organisations et des groupes politiques ainsi que par des plateformes médiatiques incitant à la discrimination au moyen de manifestations, de contestations de rue et de discours politiques, y compris dans le cadre de campagnes électorales ; b) l’État partie n’a pris aucune mesure pour incriminer expressément les discours de haine, les infractions motivées par la haine et les actes d’incitation à la discrimination, et la discrimination raciale n’est qu’une circonstance aggravante laissée à l’appréciation du juge ; c) la législation actuelle n’offre aucun recours approprié aux victimes. (art. 2, 19, 20 et 27).

13. Réitérant ses précédentes recommandations , le Comité prie instamment l’État partie :

a) D’envisager d’étendre le champ d’application de la loi sur l’élimination des discours de haine afin qu’elle couvre les discours et comportements discriminatoires à l’encontre de toutes les personnes, quelle que soit leur origine ;

b) Conformément aux articles 19 et 20 du Pacte et à l’observation générale n o  34 (2011) du Comité, d’envisager de modifier le Code pénal afin de définir séparément les crimes de haine et de les interdire explicitement, et d’ériger expressément en infraction les discours de haine en ligne et hors ligne pour tous les motifs prohibés par le Pacte, y compris l’orientation sexuelle et l’identité de genre, et favoriser le signalement des infractions motivées par la haine et des discours de haine et veiller à ce que ces infractions soient recensées et consignées, notamment au moyen d’un système complet de collecte de données ventilées ;

c) De combattre l’intolérance, les stéréotypes, les préjugés et la discrimination visant les groupes vulnérables, y compris les minorités ethniques ou religieuses et les personnes lesbiennes, gays, bisexuelles et transgenres, notamment en renforçant la formation des responsables de l’application des lois, des procureurs et des juges et en menant des campagnes de sensibilisation auprès du grand public pour favoriser l’ouverture à la diversité et promouvoir son respect ;

d) De renforcer la capacité des responsables de l’application des lois d’enquêter sur les crimes et les discours de haine et faire en sorte que toutes les affaires fassent systématiquement l’objet d’une enquête, que les responsables aient à rendre compte de leurs actes et que les victimes aient accès à une réparation intégrale.

Égalité entre hommes et femmes

14.Le Comité salue les mesures prises dans le domaine de l’égalité des sexes, notamment les modifications apportées aux articles 731 et 733 du Code civil, qui harmonisent l’âge minimum du mariage pour les hommes et les femmes et réduisent de six mois à 100 jours la période pendant laquelle il est interdit aux femmes de se remarier après un divorce. En outre, le Comité se félicite de l’information fournie par l’État partie selon laquelle, en février 2022, une ébauche de projet de loi a été présentée en vue d’abolir le délai que les femmes divorcées doivent respecter avant de pouvoir se remarier. Le Comité reste toutefois préoccupé par le fait que certaines dispositions du Code civil peuvent contribuer à perpétuer les inégalités entre les hommes et les femmes, notamment l’article 750 qui exige que les couples mariés portent le même nom de famille, ce qui, dans la pratique, contraint souvent les femmes à adopter le nom de famille de leur mari. Le Comité prend note de l’adoption, en 2018, de la loi sur la promotion de l’égalité des sexes dans le domaine politique, et de l’approbation en 2020 du Cinquième plan fondamental pour l’égalité des sexes, mais s’inquiète encore de ce que les femmes restent sous-représentées aux postes de décision à tous les niveaux des pouvoirs exécutif et judiciaire, ainsi que dans les organes de décision du secteur privé, et regrette le manque d’informations disponibles concernant la participation des femmes issues de minorités, notamment les femmes burakumin, aïnou et coréennes zainichi (art. 2, 3, 23 et 26).

15. Conformément aux précédentes recommandations du Comité , l’État partie devrait :

a) Redoubler d’efforts pour assurer une égalité effective entre les hommes et les femmes dans tous les domaines de la société et de la vie ; en particulier, prendre des mesures concrètes pour accroître la représentation des femmes, y compris des femmes issues de minorités et des femmes autochtones, aux postes de décision à tous les niveaux des pouvoirs exécutif et judiciaire et dans le secteur privé ;

b) Renforcer les stratégies de sensibilisation auprès du grand public en vue de lutter contre les stéréotypes sexistes dans la famille et dans la société, notamment par la mise en œuvre du Cinquième plan fondamental pour l’égalité des sexes, et par des campagnes d’information et de sensibilisation visant à garantir une interprétation correcte de la loi afin de prévenir les inégalités entre les sexes dans la pratique ;

c) Continuer à combattre les stéréotypes concernant les rôles des femmes et des hommes dans la société et veiller à ce qu’ils ne soient pas utilisés pour justifier les violations du droit des femmes à l’égalité devant la loi, notamment en modifiant les articles 733 et 750 du Code civil.

Mesures de lutte contre le terrorisme

16.Le Comité constate avec préoccupation que la loi sur la répression de la criminalité organisée et le contrôle des produits du crime définit un champ d’application très large qui incrimine 277 actes, dont des infractions sans aucun rapport apparent avec le terrorisme et la criminalité organisée. Il constate également avec préoccupation que cette loi pourrait restreindre indûment les droits fondamentaux consacrés par le Pacte, tels que la liberté d’expression, le droit de réunion pacifique et la liberté d’association, et entraîner des violations du droit à la liberté et à la sécurité et du droit à un procès équitable (art. 4, 9, 14, 17, 19, 21 et 22).

17. L’État partie devrait envisager de modifier la loi sur la répression de la criminalité §+ contrôle des produits du crime afin de décriminaliser les actes qui n’ont aucun rapport avec le terrorisme et la criminalité organisée. Il devrait également adopter des garanties et des mesures préventives appropriées pour s’assurer que l’application de cette loi ne restreint pas indûment les droits consacrés par le Pacte.

Violence à l’égard des femmes, y compris violence sexuelle et violence familiale

18.Le Comité se félicite de la modification apportée en juin 2017 aux dispositions du Code pénal relatives aux infractions sexuelles, qui maintenant s’appliquent aussi à l’infraction de rapports sexuels forcés, quels que soient le sexe de l’auteur des faits et celui de la victime, et à d’autres formes de rapports sexuels et permettent l’engagement de poursuites judiciaires pour toute infraction sexuelle, même si la victime n’a pas porté plainte. Il prend également note des informations reçues concernant les mesures de protection mises en place pour les victimes d’actes de violence familiale et sexuelle et du fait que, bien qu’il ne soit pas expressément mentionné dans le Code pénal, le viol conjugal est également puni par la loi. Le Comité est toutefois préoccupé par les informations selon lesquelles les responsables de l’application des lois ne sont pas suffisamment sensibilisés ni formés à la question de l’égalité entre les sexes, ce qui fait que des femmes, en particulier des migrantes victimes d’actes de violence familiale et sexuelle, sont maltraitées et revictimisées, et par les informations selon lesquelles les autorités ne feraient guère d’effort pour enquêter sur les cas de violence à l’égard des femmes et de disparition de femmes. En outre, il est préoccupé par les informations concernant l’insuffisance de l’assistance et du soutien fournis aux victimes. Le Comité regrette l’absence de données ventilées sur la violence à l’égard des femmes et le fait que l’État partie n’a pas progressé pour ce qui est de fixer l’âge du consentement sexuel au-dessus de 13 ans (art. 2, 3, 6, 7 et 26).

19.Conformément aux recommandations précédentes du Comité, l’État partie devrait redoubler d’efforts pour prévenir, combattre et éradiquer toutes les formes de violence contre les femmes et les filles. Il devrait en particulier prendre les mesures nécessaires pour :

a) Renforcer encore les programmes de formation, d’éducation et de sensibilisation à la lutte contre la violence familiale destinés à la police, à l’appareil judiciaire, y compris aux procureurs, au personnel des services de l’immigration et d’autres services publics concernés, et au grand public ;

b) Faciliter et encourager le dépôt de plaintes par les victimes, faire en sorte que tous les actes de violence à l’égard des femmes et des filles, y compris les cas de disparition, fassent rapidement l’objet d’une enquête approfondie et impartiale, prévenir la revictimisation des victimes pendant les enquêtes, et veiller à ce que les responsables soient poursuivis et sanctionnés et à ce que les victimes obtiennent une réparation intégrale ;

c) Veiller à ce que toutes les victimes, quelle que soit leur situation au regard de l’immigration, bénéficient d’une assistance, d’une protection et de services de soutien rapides et adéquats ;

d) Mettre en place un système fiable de collecte de données statistiques ventilées par race ou origine ethnique sur la violence à l’égard des femmes, afin de cibler efficacement les actions destinées à assurer la protection de celles-ci ;

e) Relever sans plus attendre l’âge du consentement sexuel.

Droit à la vie, interdiction de la torture et des autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

20.Le Comité regrette que l’État partie n’ait pas pris de mesures pour abolir la peine de mort ou limiter le nombre d’infractions passibles de la peine capitale, et qu’il n’ait pas l’intention de le faire. Il reste préoccupé par le fait que plusieurs des 19 infractions passibles de la peine capitale sont incompatibles avec l’obligation énoncée dans le Pacte de limiter la peine de mort aux « crimes les plus graves » et que les condamnés à mort continuent d’être placés à l’isolement pendant des périodes pouvant aller jusqu’à quarante ans avant l’exécution et qu’ils sont soumis à une vidéosurveillance intrusive 24 heures sur 24. Il prend note avec inquiétude des déclarations de l’État partie selon lesquelles les détenus et les membres de leur famille ne sont pas informés au préalable du jour de l’exécution afin de protéger leur sécurité psychique et leur « tranquillité d’esprit » et que cette façon de faire est « inévitable ». En outre, tout en prenant note des informations fournies concernant le réexamen minutieux des demandes de nouveau procès, le Comité est profondément préoccupé par les informations selon lesquelles des personnes auraient été exécutées alors que des demandes de nouveau procès étaient toujours en instance. Il est également préoccupé par l’absence de système de réexamen obligatoire des affaires de condamnation à mort et de mécanisme indépendant permettant de surveiller la santé mentale des détenus dans le couloir de la mort (art. 2, 6, 7, 9 et 14).

21. Compte tenu de l’observation générale n o  36 (2018) et conformément à la précédente recommandation du Comité , l’État partie devrait :

a) Envisager d’abolir la peine de mort et faire comprendre au grand public, si nécessaire, en quoi l’abolition est souhaitable, notamment par des mesures de sensibilisation appropriées visant à mobiliser l’opinion publique ; et, dans l’intervalle, envisager d’instaurer un moratoire sur l’application de la peine de mort, et, à titre prioritaire, réduire le nombre d’infractions passibles de la peine capitale et veiller à ce que son application soit strictement limitée aux crimes les plus graves, comme l’exige le Pacte ;

b) Veiller à ce que le régime du couloir de la mort ne constitue pas une peine ou un traitement cruel, inhumain ou dégradant, en informant raisonnablement à l’avance les condamnés à mort et les membres de leur famille de la date et l’heure prévues pour l’exécution, afin de réduire les souffrances psychologiques liées à l’impossibilité de se préparer à cet événement, en s’abstenant d’imposer un isolement prolongé aux condamnés à mort et en utilisant la vidéosurveillance à leur égard uniquement lorsque cela est strictement nécessaire et pour la durée la plus courte possible ;

c) Mettre en place un système de réexamen obligatoire et efficace des affaires de condamnation à mort, dans le cadre duquel les demandes de nouveau procès ou de grâce ont un effet suspensif, en veillant à ce que la santé mentale des condamnés à mort soit examinée par un mécanisme indépendant et en garantissant la stricte confidentialité de tous les entretiens entre les condamnés à mort et leurs avocats concernant les demandes de nouveau procès ;

d) Envisager d’adhérer au d euxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte, visant à abolir la peine de mort.

22.Le Comité se félicite de l’affirmation de l’État partie selon laquelle un soutien sera fourni à toutes les personnes déplacées dans le pays en raison de la catastrophe nucléaire survenue à Fukushima, sans distinction entre les évacués « volontaires » et les évacués « forcés », mais il reste préoccupé par le risque que le seuil élevé du niveau d’exposition établi par l’État partie à Fukushima et sa décision de lever l’ordre d’évacuation dans certaines zones ne laissent pas d’autre choix à la population que de retourner dans des zones hautement contaminées. Il est également préoccupé par la fin de la fourniture d’un hébergement gratuit aux personnes évacuées qui vivent en dehors de la zone d’évacuation et par le manque d’informations concernant les mesures mises en place pour s’assurer que, dans la pratique, toutes les personnes déplacées dans le pays ont accès au soutien dont elles ont besoin, et ce, qu’elles décident ou non de retourner chez elles. En outre, le Comité est préoccupé par les informations concernant le nombre élevé d’enfants de Fukushima chez qui un cancer de la thyroïde a été diagnostiqué, ou dont on pense qu’ils en sont atteints, depuis la catastrophe (art. 6, 12 et 19).

23. Conformément aux précédentes recommandations du Comité , l’État partie devrait :

a) Protéger la vie de toutes les personnes touchées par la catastrophe nucléaire de Fukushima et lever la désignation des zones contaminées comme zones d’évacuation seulement là où le niveau de radiation ne met pas les habitants en danger ;

b) Continuer à surveiller les niveaux de radiation et porter cette information à la connaissance des personnes concernées dans les meilleurs délais ;

c) Veiller à ce que toutes les personnes déplacées, indépendamment de la distinction faite entre évacués « volontaires » et évacués « forcés » ou du fait qu’elles décident ou non de retourner chez elles, aient accès à l’aide financière, au logement, aux soins médicaux et autre soutien dont elles ont besoin, notamment en rétablissant la gratuité du logement pour les personnes touchées qui vivent en dehors de la zone d’évacuation ;

d) Continuer à évaluer les effets de la catastrophe nucléaire sur la santé des personnes exposées aux radiations, notamment la corrélation possible avec la forte prévalence du cancer chez les enfants, et envisager de proposer des examens de santé gratuits, périodiques et complets à toutes les personnes exposées aux radiations, y compris les enfants.

Liberté et sécurité de la personne et traitement des personnes privées de liberté

24.Le Comité prend note des informations données par l’État partie, selon lesquelles des procédures strictes encadrent l’hospitalisation sans consentement, et un comité psychiatrique indépendant passe en revue tous les cas d’hospitalisation de personnes présentant des handicaps intellectuels et psychosociaux et peut décider du traitement ou ordonner la fin de l’hospitalisation. Néanmoins, il est préoccupé par les informations selon lesquelles le nombre d’hospitalisations en établissement psychiatrique est en augmentation. S’il prend acte des efforts que fait l’État partie pour lutter contre la maltraitance des personnes handicapées, il note avec préoccupation que la loi relative à la prévention de la maltraitance des personnes handicapées et à l’accompagnement des aidants ne s’applique pas aux actes de maltraitance commis dans des établissements médicaux (art. 7, 9 et 10).

25. Conformément aux précédentes recommandations du Comité , l’État partie devrait :

a) Poursuivre ses efforts pour mettre en place des services locaux ou des services de substitution à l’intention des personnes présentant des handicaps intellectuels et psychosociaux ;

b) Veiller à ce que l’hospitalisation forcée ne soit décidée qu’en dernier recours, pour la période la plus courte possible, et seulement lorsque cela s’avère nécessaire et proportionné, afin de protéger l’intéressé de tout préjudice grave ou de prévenir des atteintes à autrui ;

c) Prévoir des garanties, notamment une assistance juridique et toute autre assistance nécessaire, pour protéger le droit de toutes les personnes handicapées au respect de leur consentement libre et éclairé ;

d) Redoubler d’efforts pour surveiller, prévenir et éradiquer toutes les formes de maltraitance à l’égard des personnes handicapées dans les établissements de santé mentale, qu’ils soient publics ou privés, et notamment envisager d’élargir aux établissements médicaux le champ d’application de la loi relative à la prévention de la maltraitance des personnes handicapées et à l’accompagnement des aidants ;

e) Veiller à ce que des enquêtes soient effectivement menées sur tous les actes de maltraitances commis par des prestataires de services médicaux ou dans des établissements médicaux et à ce que leurs auteurs soient sanctionnés, et offrir une réparation intégrale aux victimes et à leur famille.

26.Le Comité prend note des informations fournies par l’État partie concernant le système de détention, mais reste préoccupé par le fait qu’il n’existe pas de droit d’être libéré sous caution et que le droit d’accès à un avocat commis d’office, dès le début de la privation de liberté n’est pas respecté, et par le fait que l’État partie a déclaré qu’il n’était pas nécessaire d’instaurer un système de libération sous caution avant la mise en accusation. Il est également préoccupé par les informations selon lesquelles des personnes sont maintenues en détention provisoire pendant des périodes dépassant les délais prescrits par le droit interne, un grand nombre des demandes de prolongation de la détention et de renouvellement de la prolongation sont acceptées, la conduite des interrogatoires n’est toujours pas strictement réglementée dans la pratique et l’enregistrement vidéo des interrogatoires n’est obligatoire que dans un nombre limité de cas. En outre, il reste préoccupé par les conditions de détention, en particulier le recours à l’isolement prolongé et le manque d’accès à des services médicaux adéquats, ainsi que par le non-respect des garanties procédurales comme le droit de consulter un avocat et le droit d’avoir des contacts avec sa famille, et par le non-respect du droit de vote (art. 7, 9, 10, 14 et 25).

27.Conformément aux précédentes recommandations du Comité, l’État partie devrait prendre les mesures nécessaires pour garantir, dans la pratique, que toute personne arrêtée ou détenue bénéficie dès le début de la privation de liberté, de toutes les garanties juridiques fondamentales consacrées par les articles 9 et 14 du Pacte, et que la détention soit pleinement conforme à l’Ensemble de règles minima des Nations Unies pour le traitement des détenus (Règles Nelson Mandela), notamment en ce qui concerne l’accès à un conseil, le droit de contacter sa famille et la fourniture de soins médicaux en cas de besoin. L’État partie devrait aussi :

a) Veiller à ce que les interrogatoires, y compris ceux qui sont menés avant que la personne soit officiellement en état d’arrestation, soient filmés et enregistrés dans leur intégralité, et envisager sérieusement de faire en sorte que tous les interrogatoires menés dans le cadre d’affaires pénales fassent l’objet d’un enregistrement audiovisuel ;

b) Veiller à ce que la durée maximale de détention provisoire soit respectée afin d’éviter des périodes de détention excessives ;

c) Veiller à ce que des solutions de substitution à la détention, comme la libération sous caution, soient dûment envisagées pour la période avant jugement ;

d) Réexaminer la durée totale autorisée pour le placement à l’isolement des personnes en détention avant jugement, même lorsque l’isolement constitue une mesure de dernier recours, et évaluer régulièrement les effets de la mise à l’isolement en vue de continuer à réduire le recours à cette pratique et de mettre au point des mesures de substitution s’il y a lieu ;

e) Mettre en place un mécanisme d’examen des plaintes indépendant des commissions préfectorales de sécurité publique qui soit habilité à procéder promptement à des enquêtes impartiales et efficaces sur les allégations relatives à des actes de torture ou des mauvais traitements qui auraient été infligés pendant des interrogatoires ;

f) Tenant compte de l’observation générale n o  25 (1996) du Comité, réexaminer les dispositions de sa législation privant les détenus condamnés du droit de vote.

Élimination de l’esclavage, de la servitude et de la traite des personnes

28.Le Comité prend note des informations fournies par l’État partie concernant les efforts qu’il déploie pour remédier aux violations des droits humains des « femmes de réconfort ». Il regrette cependant que l’État partie n’ait fait aucun progrès en ce qui concerne l’application des précédentes recommandations du Comité et continue de nier l’obligation que lui fait le Pacte de remédier aux violations persistantes des droits humains des victimes. Il regrette également l’absence d’enquêtes et de poursuites pénales visant les auteurs des faits, ainsi que l’absence de recours effectifs et de réparation intégrale pour toutes les victimes de violations passées des droits humains (art. 2, 7 et 8).

29. Le Comité réitère ses précédentes recommandations et exhorte l’État partie à prendre des mesures législatives et administratives immédiates et efficaces pour :

a) Faire en sorte que toutes les allégations relatives à des violations des droits humains perpétrées par l’armée japonaise en temps de guerre contre les « femmes de réconfort » fassent l’objet d’enquêtes efficaces, indépendantes et impartiales, et que les auteurs des faits soient poursuivis et, s’ils sont reconnus coupables, sanctionnés ;

b) Garantir l’accès à la justice et à une réparation intégrale pour les victimes, y compris les victimes d’autres pays, et leur famille ;

c) Éduquer la population sur la question, y compris en veillant à ce que les manuels scolaires en rendent compte de manière appropriée, et condamner fermement toute tentative de diffamation à l’égard des victimes ou de négation des faits.

30.Le Comité prend note et se félicite des informations fournies par l’État partie au sujet des efforts qu’il déploie pour lutter contre la traite des personnes, mais est préoccupé par le fait que les peines prononcées ne sont pas proportionnées à la gravité des actes commis, de nombreuses personnes reconnues coupables étant condamnées à des peines avec sursis ou à des amendes dérisoires. En ce qui concerne le Programme de stages techniques, il salue les informations concernant l’augmentation du nombre d’inspections sur le terrain, destinées à prévenir la traite à des fins d’exploitation par le travail et d’autres violations du droit du travail ; il reste préoccupé par celles selon lesquelles le travail forcé se poursuit dans le cadre du Programme (art. 2, 7 et 8).

31. Conformément aux précédentes recommandations du Comité , l’État partie devrait poursuivre ses efforts en vue de :

a) Renforcer les procédures d’identification des victimes, en particulier des victimes du travail forcé, y compris dans le cadre du Programme de stages techniques, et assurer une formation spécialisée dans ce domaine à tous les agents de la force publique, y compris les inspecteurs du travail ;

b) Mettre en place un mécanisme de plainte indépendant et mener des enquêtes efficaces sur toutes les formes de traite des personnes, y compris les cas de traite à des fins d’exploitation par le travail et d’autres violations du droit du travail, notamment les violations commises dans le cadre du Programme de stages techniques, en poursuivre les auteurs et, s’ils sont reconnus coupables, leur imposer des peines proportionnées à la gravité des actes commis.

Traitement des étrangers, notamment des réfugiés et des demandeurs d’asile

32.Le Comité prend note des réponses de l’État partie concernant le traitement des étrangers, notamment des réfugiés et des demandeurs d’asile, et prend acte avec satisfaction des informations relatives à un plan d’amélioration du traitement des personnes dans les centres de détention et de la révision de la procédure d’expulsion selon laquelle il doit s’écouler au moins deux mois entre la notification de la décision d’expulsion et son exécution. Il note avec intérêt que l’État partie envisage la possibilité de modifier la loi relative au contrôle de l’immigration et à la reconnaissance du statut de réfugié afin qu’elle prévoie des mesures de substitution à la détention ainsi que la mise en place d’un système permettant de repérer les personnes pouvant bénéficier d’une protection complémentaire. Il se félicite que l’État partie soit disposé à envisager d’adopter des mesures visant à éviter la détention de longue durée. Il reste toutefois préoccupé par les informations alarmantes selon lesquelles des personnes souffrent dans les centres de détention pour immigrants en raison des mauvaises conditions sanitaires, qui ont notamment entraîné le décès de trois détenus entre 2017 et 2021, ainsi que par la situation précaire des Karihomensha, personnes qui ont perdu leur statut de résident ou leur visa et sont en « liberté provisoire », sans pouvoir travailler ou obtenir un revenu. Il est également préoccupé par les informations selon lesquelles le taux de reconnaissance du statut de réfugié est faible (art. 7, 9, 10 et 13).

33. Compte tenu des précédentes recommandations du Comité , l’État partie devrait :

a) Adopter rapidement une législation complète relative à l’asile qui soit conforme aux normes internationales ;

b) Prendre toutes les mesures voulues pour que les immigrants ne soient pas soumis à des mauvais traitements, et notamment élaborer, conformément aux normes internationales, un plan d’amélioration du traitement des personnes dans les centres de détention, y compris en ce qui concerne l’accès à une assistance médicale adéquate ;

c) Fournir le soutien nécessaire aux immigrants qui sont en « liberté provisoire » et envisager de leur permettre d’avoir des activités génératrices de revenus ;

d) Veiller à ce que le principe de non-refoulement soit respecté dans la pratique et à ce que toutes les personnes demandant une protection internationale aient accès, en cas de refus, à un mécanisme de recours indépendant ayant un effet suspensif ;

e) Prévoir des mesures de substitution à la détention administrative, faire le nécessaire pour fixer une durée maximale pour la détention des immigrants et prendre les mesures voulues pour que la détention soit utilisée en dernier recours, pour la durée la plus courte possible et uniquement si les mesures de substitution existantes ont été dûment envisagées, et pour que les migrants aient la possibilité d’introduire effectivement un recours en justice afin qu’il soit statué sur la légalité de leur détention ;

f) Veiller à ce que les gardes - frontières et le personnel des services d’immigration reçoivent une formation adéquate afin de garantir que les droits des demandeurs d’asile consacrés par le Pacte et les autres normes internationales applicables soient pleinement respectés.

Droit à la vie privée

34.Le Comité accueille avec satisfaction les informations fournies par l’État partie concernant les efforts qu’il déploie pour indemniser les personnes dont les informations personnelles ont été diffusées à la suite d’une fuite au sein du Département de la police métropolitaine de Tokyo, et prend note des informations fournies concernant les six lois relatives à la réforme numérique et le rôle de la Commission de protection des informations personnelles. Il est toutefois préoccupé par l’étendue des pouvoirs de surveillance et par l’absence de garanties suffisantes contre les atteintes arbitraires au droit à la vie privée qui peuvent être commises dans le cadre des activités de surveillance et d’interception et de l’accès aux données personnelles, y compris l’absence de contrôle juridictionnel indépendant (art. 17).

35.L’État partie devrait mettre les dispositions régissant la conservation des données, l’accès aux données et les activités de surveillance et d’interception en pleine conformité avec le Pacte, en particulier l’article 17, et veiller au strict respect des principes de légalité, de proportionnalité et de nécessité. Il devrait faire en sorte que toute atteinte au droit à la vie privée ait préalablement été autorisée par un tribunal et soit contrôlée par des mécanismes de surveillance efficaces et indépendants et, que, dans la mesure du possible, les personnes visées soient informées des activités de surveillance et d’interception dont elles font l’objet et qu’elles aient accès à des recours utiles en cas d’abus. Il devrait également veiller à ce que tous les abus signalés fassent l’objet d’une enquête approfondie débouchant sur des sanctions appropriées s’il y a lieu.

Liberté de pensée, de conscience et religion et liberté d’expression

36.Le Comité exprime une nouvelle fois ses préoccupations au sujet de la notion vague et imprécise de « bien-être public », qui pourrait conduire à la restriction du droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion et du droit à la liberté d’expression, et au sujet de la définition large qui est donnée des informations pouvant être classées secrètes et des critères généraux applicables au classement de ces données qui figurent dans la loi sur la protection de certaines catégories de données secrètes. Il prend note des informations fournies par l’État partie selon lesquelles aucune autorisation de diffusion n’a été suspendue à ce jour, mais craint que les sanctions pénales sévères prévues par la loi sur la protection de certaines catégories de données secrètes et les pouvoirs étendus accordés au Gouvernement dans le cadre de la loi sur l’audiovisuel et de la loi sur la radio, qui lui permettent de suspendre les activités des stations de radio ou des chaînes de télévision, n’aient un effet dissuasif sur les activités des journalistes et des défenseurs des droits de l’homme et ne conduisent à l’autocensure (art. 18 et 19).

37. Rappelant ses précédentes recommandations , le Comité prie l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour  :

a) Définir clairement la notion de « bien-être public » afin de garantir que toute restriction à la liberté de pensée, de conscience ou de religion, ou à la liberté d’expression pour des motifs liés au « bien-être public », soit conforme à ceux autorisés par le Pacte ;

b) Veiller à ce que la loi sur la protection de certaines catégories de données secrètes et son application soient conformes aux conditions strictes énoncées à l’article 19 du Pacte, notamment en donnant une définition étroite des catégories d’informations susceptibles d’être classées secrètes et en garantissant que toute restriction au droit de rechercher, recevoir et communiquer des informations soit compatible avec les principes de légalité, de proportionnalité et de nécessité et vise à prévenir une menace précise et identifiable pour la sécurité nationale, et à ce que personne ne soit puni pour avoir diffusé des informations d’intérêt public légitime qui ne portent pas atteinte à la sécurité nationale ;

c) Promouvoir le pluralisme dans les médias et faire en sorte que les médias et les professionnels des médias puissent mener leurs activités sans ingérence indue de la part de l’État ;

d) Garantir l’indépendance des autorités de radiodiffusion et de délivrance des licences ;

e) Offrir aux journalistes et aux professionnels des médias indépendants une protection efficace contre toute forme d’intimidation et s’abstenir d’invoquer les dispositions de la législation civile ou pénale, notamment les dispositions relatives à l’extrémisme, et d’autres dispositions, pour étouffer les critiques portant sur des questions d’intérêt public.

38.Le Comité prend note avec préoccupation des informations selon lesquelles la liberté de pensée et de conscience fait l’objet de restrictions dans l’État partie. Il note avec préoccupation qu’après que des enseignants ont refusé de se tenir debout face au drapeau et de chanter l’hymne national lors de cérémonies scolaires, plusieurs d’entre eux ont été sanctionnés, par des peines allant jusqu’à six mois de suspension pour cet acte passif et non perturbateur. Il note également avec préoccupation que la force aurait été employée pour obliger des élèves à se lever pendant les cérémonies (art. 18).

39. L’État partie devrait garantir l’exercice effectif de la liberté de pensée et de conscience et s’abstenir de toute action susceptible de restreindre cette liberté au-delà des limites bien définies à l’article 18 du Pacte. Il devrait mettre sa législation et ses pratiques en conformité avec l’article 18 du Pacte.

Liberté de réunion pacifique

40.Le Comité prend note des informations données par l’État partie, mais reste préoccupé par celles qu’il a reçues des parties prenantes au sujet de restrictions injustifiables et disproportionnées imposées par les forces de l’ordre aux contestations et manifestations, notamment l’emploi excessif de la force et l’enregistrement des manifestants, en particulier lors des contestations visant la Diète et les manifestations à Okinawa, et l’arrestation de manifestants et de journalistes (art. 19 et 21).

41. Conformément à l’article 21 du Pacte et compte tenu de l’observation générale n o  37 (2020) du Comité, l’État partie devrait :

a) Faire en sorte que toutes les allégations d’emploi excessif de la force et d’arrestations et détentions arbitraires par des membres des forces de l’ordre pendant des manifestations pacifiques fassent sans délai l’objet d’enquêtes approfondies et impartiales, que les responsables soient poursuivis et, s’ils sont reconnus coupables, qu’ils soient sanctionnés et que les victimes obtiennent une réparation intégrale ;

b) Dispenser régulièrement, à l’intention des responsables de l ’ application des lois , des formations sur l’emploi de la force inspirées des Principes de base sur le recours à la force et l’utilisation des armes à feu par les responsables de l’application des lois et des Lignes directrices des Nations Unies basées sur les droits de l’homme portant sur l’utilisation des armes à létalité réduite dans le cadre de l’application des lois ;

c) Veiller à prot éger les manifestants pacifiques, défenseurs des droits de l’homme et journalistes couvrant des manifestations pacifiques de toutes menaces, intimidations, actions de harcèlement et attaques de la part d’acteurs privés.

Droits des minorités

42.Le Comité prend note de l’adoption en 2019 de la loi sur la promotion de la politique en faveur des Aïnus, mais reste préoccupé par les informations concernant la discrimination dont ceux-ci seraient victimes et le déni de leurs droits en tant que groupe autochtone, par l’absence de reconnaissance de la communauté autochtone Ryukyu et de ses droits, et par le déni du droit des communautés d’Okinawa de participer librement à la prise de décisions sur les politiques qui les concernent, de leurs droits à leurs terres ancestrales et ressources naturelles, et de leurs droits d’éduquer leurs enfants dans leur langue maternelle. En outre, le Comité est préoccupé par les informations selon lesquelles l’application discriminatoire des politiques aurait abouti à l’exclusion de résidents coréens vivant au Japon depuis l’époque coloniale et de leurs descendants, et qui devraient être reconnus comme une minorité nationale ou ethnique, des régimes de sécurité sociale et de l’exercice des droits politiques (art. 26 et 27).

43. L’État partie devrait prendre des mesures supplémentaires pour garantir pleinement aux Aïnus, Ryukyu et autres communautés d’Okinawa les droits à leurs terres ancestrales et à leurs ressources naturelles, pour faire respecter leur droit de participer librement à la prise de décisions sur toutes les politiques les concernant, et pour faciliter, dans la mesure du possible, l’éducation de leurs enfants dans leur langue maternelle. Il devrait également supprimer les obstacles qui empêchent les résidents coréens vivant au Japon depuis l’époque coloniale et leurs descendants d’avoir accès, entre autres, aux programmes d’aide et au régime de retraite qui leur sont ouverts, et envisager de modifier la législation pertinente afin de leur accorder le droit de vote aux élections locales.

Droits de l’enfant

44.Le Comité prend note de l’explication de l’État partie concernant l’utilisation du terme « illégitime » sur certains formulaires officiels pour désigner les enfants nés hors mariage, et se félicite de l’affirmation de la délégation selon laquelle l’État partie est disposé à envisager de supprimer ce terme, garantissant ainsi l’égalité des droits de tous les enfants. Il prend note des informations fournies par l’État partie concernant la loi modifiée sur la protection de l’enfance, mais est préoccupé par les informations selon lesquelles des enfants sont retirés de leur famille, en dehors de toute décision de justice et sans preuve manifeste de maltraitance parentale, et placés temporairement dans des centres d’orientation pour enfants, souvent pour de longues périodes, et par les informations selon lesquelles les parents ne sont pas autorisés à présenter directement leurs griefs devant les tribunaux pendant la procédure d’appel, lorsqu’un juge examine s’il convient de délivrer une ordonnance de garde temporaire. En outre, il prend acte des réponses fournies par l’État partie sur la question, mais est préoccupé par les informations concernant les cas fréquents d’enlèvement d’enfant par leurs parents, dans le pays et à l’étranger, et par l’absence de réponse adéquate de la part de l’État partie (art. 17, 23 et 24).

45. L’État partie devrait :

a) Veiller à ce que sa législation et ses pratiques soient pleinement compatibles avec l’article 24 du Pacte et adopter des mesures de protection visant à éliminer toute discrimination et stigmatisation visant des enfants ;

b) Modifier la législation de manière à établir des critères clairs pour le retrait d’un enfant de sa famille et soumettre chaque cas à un contrôle judiciaire obligatoire visant à déterminer si le retrait est justifié, en veillant à ce que la séparation d’enfants d’avec leurs parents soit uniquement une mesure de dernier recours, utilisée si et lorsqu’elle est nécessaire pour la protection et l’intérêt supérieur de l’enfant, après que l’enfant et ses parents ont été entendus ;

c) Introduire les mesures nécessaires pour réagir de manière adéquate aux cas d’enlèvement d’enfants par leurs parents et veiller à ce que les décisions relatives à la garde de l’enfant , qu ’ il s ’ agisse d ’ affaires nationales ou internationales, tiennent compte de l’intérêt supérieur de l’enfant et soient pleinement appliquées dans la pratique.

D.Diffusion et suivi

46. L’État partie devrait diffuser largement le texte du Pacte, de son septième rapport périodique et des présentes observations finales auprès des autorités judiciaires, législatives et administratives, de la société civile et des organisations non gouvernementales présentes dans le pays, ainsi qu’auprès du grand public pour faire mieux connaître les droits consacrés par le Pacte. L’État partie devrait faire en sorte que le rapport périodique et les présentes observations finales soient traduits dans ses langues officielles.

47. Conformément à l’article 75 (par. 1) du Règlement intérieur du Comité, l’État partie est invité à faire parvenir, le 4 novembre 2025 au plus tard, des renseignements sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations formulées aux paragraphes 7 (Institution nationale des droits de l’homme), 33 (Traitement des étrangers, notamment des réfugiés et des demandeurs d’asile) et 45 (Droits de l’enfant).

48.Dans le cadre du cycle d’examen prévisible du Comité, l’État partie recevra en 2028 la liste de points établie par le Comité avant la soumission du rapport et devra soumettre dans un délai d’un an ses réponses à celle-ci, qui constitueront son huitième rapport périodique. Il demande également à l’État partie, lorsqu’il élaborera ce rapport, de tenir de vastes consultations avec la société civile et les organisations non gouvernementales présentes dans le pays. Conformément à la résolution 68/268 de l’Assemblée générale, le rapport ne devra pas dépasser 21 200 mots. Le prochain dialogue constructif avec l’État partie se tiendra en 2030, à Genève.