NATIONS UNIES

CCPR

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr.GÉNÉRALE

CCPR/C/RWA/327 novembre 2007

Original: FRANÇAIS

COMITÉ DES DROITS DE L’HOMME

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES

EN VERTU DE L’ARTICLE 40 DU PACTE

Troisième rapport périodique

RWANDA

[12 septembre 2007]

TABLE DES MATIÈRES

Paragraphes Page

SIGLES ET ABBRÉVIATIONS..........................................................5

INTRODUCTION1 − 66

I.INFORMATIONS SOMAIRES SUR LE RWANDA....................7 − 1117

I.1Présentation du Rwanda7 − 117

I.2Cadre institutionnel12 − 138

I.2.1Organisation des pouvoirs............................................................148

I.2.1.1Le pouvoir législatif15 − 198

a)Le Sénat168

b)La Chambre des députés17 − 199

I.2.1.2Le pouvoir exécutif20 − 249

I.2.1.3Le pouvoir judiciaire25 − 919

I.2.1.3.1Les juridictions ordinaires28 − 3010

a)La Cour suprême31 − 3610

bLa Haute Cour de la République37 − 4111

c)Les tribunaux de grande instance42 − 4612

d)Les tribunaux de base47 − 5013

I.2.1.3.2Les juridictions spécialisées51 − 6613

a)Les juridictions militaires52 − 5313

b)Les juridictions gacaca.54 − 6613

I.2.1.3.3Les organes connexes à la justice.67 − 9115

a)Le ministère public67 − 7815

b)La police nationale79 − 8016

c)Les comités de conciliateurs81 − 9117

TABLE DES MATIÈRES (suite)

Paragraphes Page

I.2.2Rapport entre les pouvoirs9218

I.3Les Commissions nationales et organes étatiques spécialisés93 − 11119

I.3.1La Commission nationale des droits de la personne9319

I.3.2La Commission nationale de l’unité et la réconciliation94 − 9520

I.3.3La Commission nationale de lutte conte le génocide96 − 9720

I.3.4La Commission de la fonction publique9821

I.3.5La Commission nationale électorale9921

I.3.6L’Office de l’Ombudsman100 − 10121

I.3.7Observatoire du «gender»102 − 10322

I.3.8Conseil national des femmes104 − 10722

I.3.9Conseil national de la jeunesse108 − 11123

II.LA SOCIÉTÉ CIVILE112 − 12123

II.1Le Collectif des ligues et associations pour la défensede droits de l’homme (CLADHO113 − 11424

II.2Le Collectif Profemmes − Twese Hamwe115 − 11624

II.3IBUKA117 − 12125

IIILES MESURES PRISES POUR LA MISE EN ŒUVREET LA JOUISSANCE DES DROITS GARANTIS PARLE PACTE INTERNATIONAL RELATIFAUX DROITS CIVILS ET POLITIQUES122 − 29026

III.1Le droit à l’autodétermination (art. 1 du Pacte)125 − 13226

III.2Interdiction de discrimination (art. 2 et 3 et 26 du Pacte)133 − 13627

III.3Le droit à la l’égalité entre homme et femme et protectionde la famille (art. 3, 23 et 24 du Pacte)137 − 17128

III.3.1Protection et interdiction de discrimination à l’égardde la femme (art. 3)137 − 14728

TABLE DES MATIÈRES (suite)

Paragraphes Page

III.3.2Protection de la famille (art. 23 du Pacte)..............................148 − 15030

III.3.3Protection de l’enfant (art. 24 du Pacte)................................151 − 17131

III.4Le droit à la vie (art. 6 du Pacte)..............................................172 − 18934

III.5État d’urgence: Dérogations et restrictions aux droitsgarantis par le Pacte (art. 4 du Pacte182 − 18336

III.6Lutte contre le terrorisme et d’autres crimes transfrontaliers184-18636

III.7Interdiction de tortures et mauvais traitements(article 7 du Pacte)187 − 19237

III.8Interdiction de l’esclavage, de la servitude et du travail forcé (art. 8 du Pacte)193 − 20238

III.8.1Interdiction de l’esclavage et de la servitude193 − 19838

III.8.2Interdiction du travail forcé199 − 20239

III.9Le droit à la liberté et à la sécurité (art. 9 à 13 du Pacte)203 − 22640

III.10Droit à un procès équitable (art. 14 du Pacte)227 − 24144

III.11Le droit à la personnalité juridique et à la vie privée(art. 16 et 17 du Pacte)242 − 24546

III.12La liberté de pensée, d’opinion, de conscienceet de religion (articles 18 à 21du Pacte)..........................................246 − 26547

III.12.1Liberté de pensée et d’opinion246 − 26147

III.12.2La liberté de conscience et religion262 − 26549

III.13La liberté de réunion et d’association(art. 21 et 22 du Pacte)266 − 27749

III.13.1La liberté de réunion266 − 26749

III.13.2La liberté d’association268 − 27750

III.14Le droit de prendre part à la direction des affaires publiques (article 25 du Pacte)278 − 28651

III.15Protection des minorités nationales (art. 27 du Pacte)287 − 29052

CONCLUSION291-29452

SIGLES ET ABRÉVIATIONS

ADL:

Association pour la défense des droits de la personne et des libertés

ARBEF:

Association rwandaise pour le bien être de la famille

ARDHO:

Association rwandaise pour la défense de droits de l’homme

A.P:

Arrêté présidentiel

AVEGA:

Association des veuves du génocide

AVP:

Association des volontaires de la paix

CEDAW:

Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes

COOPEDU:

Coopérative d’épargne et de crédit DUTERIMBERE

CLADHO:

Collectif des ligues etassociations de défense de droits de l’homme

FACT:

Forum for Activists Against Torture

FAWE RWANDA:

The Forum for African Women Educationalists- Rwanda

HAGURUKA:

Association pour la défense des droits de la femme et de l’enfant

HIMO:

La haute intensité de la main d’œuvre

IBUKA:

Collectif des associations engagées dans la lutte pour le bien être des rescapés du génocide

J.O:

Journal officiel

KANYARWANDA:

Association pour la promotion de l’union et la justice sociale

LDGL:

Ligue des droits de la personne dans la région des Grands Lacs

LIPRODHOR:

Ligue rwandaise pour la promotion et la défense des droits de l’homme

N o:

Numéro

ONG:

Organisations non gouvernementales

PNE:

Programme national pour l’enfant

PPMER:

Promotion des petites et moyennes entreprises au Rwanda

PREPAF:

Programme de réduction de la pauvreté chez les femmes

PROFEMME/TWESE HAMWE:

Plate forme des Associations féminines engagées dans la lutte pour la promotion intégrée de la femme

OIT:

Organisation internationale du Travail

INTRODUCTION

1.Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques est en vigueur depuis le 23 mars 1976. Le Rwanda en est partie depuis le dépôt des instruments de ratification le 16 avril 1975 au Secrétariat des Nations Unies. Le Pacte a été intégré dans la législation nationale par le décret-loi n°8/75 du 12 février1975 (J.O n°5 du 1er mars1975).

2.Le présent rapport est un document cumulé des rapports devant être présentés par la République du Rwanda conformément au paragraphe premier de l’article 40 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Il complète et actualise le rapport présenté le 10 octobre 1987 (CCPR/46/Add.1).

3.Depuis la ratification du Pacte, la plupart de ses dispositions ont déjà été introduites dans la législation nationale.

4.En ce qui concerne la place du Pacte et des instruments internationaux en général vis-à-vis de la législation rwandaise, l’article 190 de la Constitution de la République du Rwanda dispose que: «Les traités et accords internationaux régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication au Journal officiel, une autorité supérieure à celle des lois organiques et des lois ordinaires, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son application par l’autre partie». Cette disposition donne ouverture à l’application directe au niveau interne des instruments internationaux pour toutes les fois qu’ils sont régulièrement ratifiés et appliqués par l’autre partie. Ayant l’autorité supérieure à l’ordonnancement juridique interne, à l’exception de la Constitution et des lois référendaires, le recours à ces instruments devant les juridictions nationales est garanti.

5.Il convient de relever que depuis le dépôt du dernier rapport par le Rwanda, les cadres institutionnel et juridique ont connu des progrès pour garantir et préserver les droits civils et politiques à tous les habitants du Rwanda. Il y a lieu de citer notamment la mise en place de la nouvelle Constitution de la République du Rwanda du 4 juin 2003 qui réserve une place privilégiée aux droits et libertés fondamentaux de la personne, prévoit les institutions d’appui à la démocratie et les commissions spécialisées pour traiter des questions particulières, la réforme législative et judiciaire, etc. Les lignes qui vont suivre relatent et fournissent des précisions sur ces progrès.

6.Le présent rapport est l’œuvre de toutes les institutions étatiques impliquées dans la mise en œuvre du Pacte et de la société civile qui joue un rôle important dans le suivi de cette mise en œuvre.

I. INFORMATIONS SOMMAIRES SUR LE RWANDA

I.1 Présentation du Rwanda

7.La République du Rwanda est un pays de l’Afrique centrale situé entre l’Ouganda au Nord, le Burundi au Sud, la République-Unie de Tanzanie à l’Est et la République démocratique du Congo à l’Ouest. Il s’étend sur une superficie de 26 338 km2 et se situe entre 1° et 3° de latitude sud et 29-31° de longitude est et jouit d’un climat tropical de montagne. La population actuelle est estimée à plus de 8 162 715 millions d’habitants avec une densité de 337 habitants par km2.

8.Le Rwanda a connu des régimes monarchique et colonial jusqu’à son indépendance qu’il a obtenue en 1962.

9.Depuis son indépendance, la République du Rwanda a connu des institutions caractérisées par des violations massives des droits de l’homme et un régime d’impunité qui ont conduit au génocide de 1994.

10.En juillet 1994, le Front patriotique rwandais qui a mis fin au génocide et a pris une part active dans la mise en place d’un Gouvernement d’union nationale et un peu plus tard en novembre d’une Assemblée nationale de transition. La transition politique a pris fin en juin 2003 avec l’adoption d’une nouvelle Constitution et la mise en place des institutions démocratiquement élues.

11.La Constitution de la République du Rwanda a constitué une pierre angulaire de la fin de la transition. Cette Constitution garantit des droits et libertés fondamentaux à tout citoyen. Parmi les principes fondamentaux de la nouvelle Constitution, on cite:

Combattre la dictature en mettant en place des institutions démocratiques et des autorités librement choisies par le peuple;

Bâtir un État de droit fondé sur le respect des libertés et droits fondamentaux de la personne en mettant en place les commissions spécialisées;

Combattre le génocide et l’idéologie du génocide par la mise en place d’une commission de lutte;

Assurer l’égalité entre les Rwandais et entre les femmes et hommes sans porter préjudice au principe de l’approche de l’égalité entre les sexes;

La recherche permanente du dialogue et du consensus, etc.

I.2 Cadre institutionnel

12.Au lendemain du génocide, planifié et supervisé par des dirigeants sans scrupules, le Gouvernement rwandais s’est doté des institutions capables de consolider l’état de droit à savoir:

Les organes démocratiques indépendants détenant respectivement les trois pouvoirs: le pouvoir législatif, le pouvoir exécutif et le pouvoir judiciaire;

Les commissions nationales et les organes étatiques spécialisés pour traiter des questions particulières.

13.Également, dans le but de faire régner une paix durable fondée sur le respect des droits civils et politiques, le Gouvernement bénéficie du concours de la société civile dont les réalisations feront partie de ce rapport.

I.2.1 Organisation des pouvoirs

14.Pendant la période de transition et au cours de la période qui a suivi, les institutions de l’État rwandais se sont organisées de telle façon que les trois pouvoirs de l’État ne soient pas réunis entre les mains d’une seule et même personne ou d’un seul organe. Le pouvoir législatif est exercé par le Parlement, le pouvoir exécutif par le Président de la République et le Gouvernement et le pouvoir judiciaire par les cours et tribunaux.

I.2.1. 1 Le pouvoir législatif

15.En vertu du principe de la séparation des pouvoirs consacré par la Constitution de la République du Rwanda du 4 juin 2003 telle que révisée à ce jour, c’est le Parlement composé de deux chambres (Chambredes députés et le Sénat) qui incarne le pouvoir législatif.

a) Le Sénat

16.Le premier alinéa de l’article 82 de la Constitution prévoit que le Sénat est composé de 26 membres dont le mandat est de huit ans et dont 30 % au moinssont du sexe féminin.

«Les membres du Sénat doivent être des citoyens intègres et d’une grande expérience… élus ou désignés objectivement par le Président de la République à titre individuel et sans considération de leur appartenance politique, parmi les nationaux possédant des qualifications de haut niveau dans les domaines scientifique, juridique, économique, politique, social et culturel ou qui sont des personnalités ayant occupé de hautes fonctions publiques ou privées.» (art. 83 de la Constitution)

Leur désignation tient compte de l’unité nationale, de la représentation des deux sexes et de la catégorie des personnes nécessitant une protection particulière.

b) La Chambre des députés

17.L’article 76 de la Constitution prescrit que la Chambre des députés est composée de 80 membres dont 24 au moins doivent être de sexe féminin.

18.La liste des candidats est composée dans le respect du principe d’unité nationale et du principe d’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux. Les candidats peuvent se présenter sous le parrainage d’une formation politique ou à titre indépendant et le droit de vote s’exerce individuellement.

19.Un régime d’incompatibilité parlementaire permet de garantir l’indépendance des parlementaires vis-à-vis des pouvoirs publics ou, le cas échéant, des intérêts privés.

I.2.1.2 Le pouvoir exécutif

20.Le pouvoir exécutif est exercé par le Président de la République et le Gouvernement. Celui-ci est composé du Premier Ministre, des ministres, des secrétaires d’État et d’autres membres que peut désigner le Président de la République (art. 116 de la Constitution).

21.Le Président de la République est élu au suffrage universel direct et au scrutin secret à la majorité relative des suffrages exprimés (art. 100 de la Constitution) et pour un mandat de sept ans renouvelable une fois (art. 101 de la Constitution).

22.Les membres du Gouvernement sont choisis au sein des formations politiques en tenant compte de la répartition des sièges à la Chambre des députés sans pour autant exclure la possibilité de choisir d’autres personnes capables qui ne proviennent d’aucune formation politique.

23.Le parti politique majoritaire à la Chambre des députés ne peut pas dépasser 50 % de tous les membres du Gouvernement (art. 116, al. 5, de la Constitution).

24.En sa qualité de Chef suprême de l’État, le Président de la République dispose des pouvoirs que lui confère la Constitution, notamment la déclaration de guerre (art. 136 de la Constitution), le droit de grâce, la signature de l’armistice et les accords de paix (art. 110 de la Constitution), la nomination et la cessation de fonctions de certains hauts fonctionnaires (art. 113 de la Constitution).

I.2.1.3 Le pouvoir judiciaire

25.Le pouvoir judiciaire est exercé par la Cour suprême et les cours et tribunaux institués par la Constitution et d’autres lois.

26.Dans le cadre de la réhabilitation du pouvoir judiciaire, une Commission de la réforme législative a mis en place de nouvelles lois visant principalement au renforcement des principes tels que la séparation des pouvoirs, l’indépendance du pouvoir judiciaire et la promotion d’un État de droit.

27.Pour garantir l’indépendance du pouvoir judiciaire, un Conseil supérieur de la magistrature (art. 157 de la Constitution) composé exclusivement des juges a été institué. Ses attributions sont notamment d’étudier les questions relatives au fonctionnement de la justice, de donner des avis, à son initiative ou sur demande, sur toutes les questions intéressant l’administration de la justice, de décider de la nomination, de la promotion et de la révocation des juges et de donner des avis sur tout projet ou toute proposition de création d’une nouvelle juridiction ou relatif au statut des juges ou du personnel judiciaire relavant de sa compétence.

1.2.1.3.1 Les juridictions ordinaires

28.Aux termes de la Constitution (art. 143), les juridictions ordinaires sont la Cour suprême, la Haute Cour de la République, les tribunaux de grande instance et les tribunaux de base.

29.Les affaires relevant du domaine administratif, social, commercial, financier, fiscal et celles concernant les mineurs sont déférées devant les chambres spécialisées y relatives au sein des tribunaux de grande instance.

30.En vue de garantir le respect des droits de la personne en matière judiciaire, des principes fondamentaux sont pris en compte, notamment:

L’indépendance du juge qui n’est soumis qu’à l’autorité de la loi dans l’exercice de ses fonctions.

Les décisions judiciaires s’imposent à tous ceux qui y sont parties, que ce soit les pouvoirs publics et les particuliers. Elles ne peuvent être remises en cause que par les voies et sous les formes prévues par la loi.

Les audiences des juridictions sont publiques sauf le huis clos prononcé par une juridiction pour des raisons d’ordre public ou de bonnes mœurs.

Tout jugement ou arrêt doit être motivé et prononcé en audience publique dans un délai ne pouvant pas dépasser un mois.

La justice est rendue au nom du peuple. Nul ne peut se rendre justice à soi même.

Nul ne peut être distrait, contre son gré, du juge que la loi lui assigne.

a) La Cour suprême

31.Selon la Constitution, la Cour suprême est la plus haute juridiction du pays. Ses décisions ne sont susceptibles d’aucun recours si ce n’est en matière de grâce ou de révision.

32.L’organisation, le fonctionnement et la compétence de la Cour suprême sont prescrits par la loi organique n° 01/2004 du 29 janvier 2004 telle qu’elle a été modifiée à ce jour.

33.Pour suivre de près les activités des cours et tribunaux, au sein de la Cour suprême, un département chargé de l’inspection des cours et tribunaux a été institué.

34.Dans ses compétences ordinaires, la Cour suprême statue sur les appels formés contre les arrêts rendus au premier degré par la Haute Cour de la République ou par la Haute Cour militaire et, le cas échéant, sur les appels formés contre les arrêts rendus au second degré par ces cours (art. 2 de la loi organique n°13/2006 du 21 mars 2006 modifiant et complétant la loi organique n° 01/2004 portant organisation de la Cour suprême). Elle dispose également des compétences dites extraordinaires lorsqu’elle statue au pénal sur les affaires dirigées contre les hautes autorités du pays.

35.Elle a d’autres attributions, notamment:

Contrôler la constitutionalité des traités et accords internationaux ainsi que les lois à la demande du Président de la République, des Présidents de la Chambre des députés et du Sénat ou d’un cinquième des membres de la Chambre des députés ou du Sénat;

Juger le contentieux électoral relatif au référendum, aux élections présidentielles et législatives;

Recevoir le serment du Président de la République et celui du Premier Ministre avant leur entrée en fonction;

Trancher sur demande, les conflits d’attribution opposant les différentes institutions de l’État;

Juger le Président de la République en cas de haute trahison ou de violation grave et délibérée de la Constitution;

Constater la vacance du poste de Président de la République en cas de décès, de démission, de condamnation pour haute trahison ou de violation grave et délibérée de la Constitution;

Donner l’interprétation authentique de la coutume en cas de silence de la loi.

36.Devant la Cour suprême, les arrêts rendus au premier degré par la Haute Cour de la République et par la Haute Cour militaire font objet d’un pré-examen de la régularité de l’appel.

b) La Haute Cour de la République

37.Le pays dispose d’une Haute Cour de la République dont le ressort correspond à toute l’étendue de la République. Son siège est établi dans la ville de Kigali, mais elle est dotée de quatre chambres siégeant en dehors de la ville de Kigali.

38.Elle siège à juge unique dans toutes les affaires portées au premier degré, avec l’assistance d’un greffier. Sur les appels interjetés contre les décisions rendues par les juridictions inférieures, elle siège au moins au nombre de trois juges avec l’assistance d’un greffier. Elle est compétente en matière pénale, civile, commerciale et administrative.

39.Au pénal, elle connaît des appels des jugements rendus au premier ou au second degré par les tribunaux de grande instance et, en premier ressort, des crimes graves dont les assassinats, les meurtres, les atteintes à la sûreté de l’État, les crimes transfrontaliers, le génocide, les crimes de guerre, de terrorisme, la prise d’otage, etc.

40.En matière civile, commerciale et sociale, elle connaît de l’appel des jugements rendus au premier ou au second degré par les tribunaux de grande instance et des sentences arbitrales. Elle connaît également l’exequatur des décisions rendues par les juridictions étrangères.

41.En matière administrative, elle connaît de tout litige relatif à la validité, à l’interprétation, à l’exécution, à la nullité, à la résolution ou à la résiliation des contrats administratifs de sa compétence. Elle connaît également des contestations relatives au contentieux administratif, notamment des actions en annulation des décisions administratives, des recours en annulation pour violation des règles de fond et de procédure pour incompétence ou pour excès de pouvoirs, des contestations relatives à l’expropriation pour cause d’utilité publique, des contestations relatives aux formations politiques intervenues entre elles, entre une formation politique et ses membres ou entre une formation politique et l’administration.

c) Les tribunaux de grande instance

42.Au premier degré, chaque tribunal de grande instance siège à juge unique avec assistance d’un greffier. En appel, il siège au nombre de trois juges avec assistance du greffier.

43.Les tribunaux de grande instance connaissent en appel des jugements rendus en premier ressort par les juridictions de base de leur ressort.

44.En matière pénale, les tribunaux de grande instance connaissent des infractions punissables de plus de cinq ans à l’exception des infractions qui sont réservées à d’autres juridictions.

45.Ils sont également compétents pour juger les personnes que les actes constitutifs du crime de génocide et des crimes contre l’humanité commis au Rwanda entre le premier octobre 1990 et le 31 décembre 1994 rangent dans la première catégorie, dont les planificateurs, les organisateurs, les personnes agissant en position d’autorité, les meurtriers de grands renoms, les personnes qui ont commis les infractions de viol, etc.

46.En matière civile, les tribunaux de grande instance connaissent en premier ressort de toutes les actions qui ne sont pas de la compétence d’autres juridictions. Ils connaissent également au premier degré du contentieux d’assurance quelque soit la valeur du litige. Leurs décisions sont successibles d’appel et d’opposition.

d) Les tribunaux de base

47.En matière pénale les tribunaux de base connaissent de toutes les infractions à l’exception de celles qui sont punissables d’une peined’emprisonnement de plus de cinq ans et celles relatives au code de la route (art. 35 de la loi n°14/2006).

48.En matière civile, ils connaissent des contestations entre les personnes morales et physiques dont la valeur n’excède pas trois millions de francs rwandais, les actions relatives à l’état et la capacité des personnes et les contestations relatives à la famille.

49.Pour les cas soumis aux tribunaux de base, en toute matière, les contestations doivent être soumises aux comités de conciliateurs avant d’être portées devant ces juridictions.

50.Les tribunaux de base siègent à juge unique pour tous les cas qui leur sont soumis avec l’assistance des greffiers.

I.2.1.3.2 Les juridictions spécialisées

51.Selon l’article 143 de la Constitution, les juridictions spécialisées sont les juridictions militaires dont le tribunal militaire et la Haute Cour militaire et les juridictions gacaca .

a) Les juridictions militaires

52.Les juridictions militaires comportent un tribunal militaire et une Haute Cour militaire ayant le ressort correspondant à toute l’étendue de la République. Elles sont chargées de juger au pénal les militaires et leurs complices quel que soit leur grade.

53.Pour siéger valablement, le tribunal militaire et la Haute Cour militaire doivent réunir un nombre impair de trois juges au moins, avec l’assistance d’un greffier. Le président du siège doit avoir au moins un grade égal à celui du prévenu.

b) Les juridictions gacaca

54.Les «juridictions gacaca» ont été introduites dans le système judiciaire rwandais par la loi organique n° 40/2000 du 26 janvier 2001 et elles ont été consolidées par l’article 152 de la Constitution.

55.Pour répondre efficacement aux missions qui leur sont assignées, elles ont été restructurées par la loi organique n°16/2004 du 19 juin 2004 et par la loi organique n°28/2006 du 27 juin 2006 portant organisation, compétence et fonctionnement des juridictions gacaca chargées des poursuites et du jugement des infractions constitutives du crime de génocide et d’autres crimes contre l’humanité commis entre le 1er octobre 1990 et le 31 décembre 1994.

56.Un service national est chargé d’assurer le suivi, la supervision et la coordination des activités de ces juridictions. Son rôle consiste également à régler tout conflit de compétence survenu entre les juridictions gacaca et à mettre en place les instructions relatives à la bonne marche des activités de ces dernières.

57.La mission principale des juridictions gacaca est de révéler la vérité sur ce qui s’est passé pendant le génocide, d’accélérer les procès du génocide en palliant la lenteur de la justice classique due au nombre limité de tribunaux et aux difficultés de constitution de preuves. Elles ont pour objectif l’éradication de la culture de l’impunité, le renforcement de l’unité et la réconciliation des Rwandais ainsi que la valorisation de la capacité des Rwandais à résoudre leurs propres problèmes.

58.Dans le cadre de la consolidation de l’unité nationale et en vue de favoriser la réconciliation entre les Rwandais, ce système comporte spécialement une procédure d’aveu, de plaidoyer de culpabilité et de repentir suivant laquelle les personnes appartenant aux catégories passibles de jugement devant les juridictions gacaca ayant fait recours à cette procédure bénéficient d’une réduction de peine, avec commutation de sa moitié en une peine d’exécution de travaux d’intérêt général (TIG) alternative à l’emprisonnement. L’arrêté présidentiel n°10/01 du 7 mars 2005 détermine les modalités d’exécution de la peine de travaux d’intérêt général alternative à l’emprisonnement.

59.L’introduction dans le processus gacaca de la peine de travaux d’intérêt général par arrêté présidentiel n° 17/03/2003 permettra de désengorger les prisons tout en favorisant la reconstruction du pays et la réintégration sociale des personnes condamnées aux TIG.

60.Le nombre total des juridictions gacaca à tous les niveaux s’élève à 12 103 dont 9 013 au niveau de cellules, 1 545 au niveau immédiatement supérieur (secteur) et 1 545 juridictions d’appel à ce niveau pour garantir le principe du double degré de juridiction.

61.En juin 2002, les juridictions gacaca ont commencé par une phase pilote couvrant seulement 9 % du nombre total des juridictions gacaca de cellules, soit 751 sur 9 013. La phase pilote du processus gacaca a porté essentiellement sur la collecte des informations utiles pour l’élaboration des dossiers des accusés au niveau des cellules et les résultats présageaient la réussite de la mission assignée aux juridictions gacaca.

62.Dans la phase pilote, les jugements ont démarré le 10 mars 2005 et, au 14 juillet 2006, 7 015 jugements avaient été rendus.

63.Vu ces résultats satisfaisants, la phase de jugement dans les juridictions gacaca a été étendue à l’échelle nationale à partir du 15 juillet 2006. Jusqu’au 31 décembre 2006, 51 649 dossiers ont été jugés avec comme résultats: 10 723 personnes acquittées et 12 478 personnes condamnées à des travaux d’intérêt général.

64.Malgré les résultats escomptés des juridictions gacaca, la sécurité des témoins qui jouent un rôle primordial dans la procédure gacaca reste problématique et ces derniers se trouvent victimes d’actes d’intimidation dans le but de les empêcher de témoigner. Certains rescapés du génocide et témoins dans ces procès subissent des actes d’agressions et d’assassinat. Mais la protection de ces derniers est une préoccupation de l’État. Le Gouvernement et l’administration locale s’investissent dans des programmes de sensibilisation en vue de l’éradication des violences faites aux témoins et rescapés du génocide. Un service dénommé «Protection des témoins» a été instauré au niveau du parquet général de la République et est représenté dans tous les parquets des tribunaux de grande instance.

65.Enfin, les aveux partiels de certains prévenus constituent un handicap pour le rétablissement de la vérité attendue, mais les témoignages complémentaires permettent de reconstituer les faits.

66.Un autre problème subsiste quant à la réparation à allouer aux victimes du génocide. Bien que l’État ait mis en place un Fonds d’assistance aux rescapés du génocide (FARG), l’assistance allouée reste dérisoire compte tenu des besoins des victimes. Les modalités de réparation restent donc pour l’État un problème qu’il l’a conduit à recourir aux contributions de la population active pour alimenter ce fonds. Toutefois, l’État dans les limites de ses moyens et capacités prend les mesures nécessaires pour la réussite des juridictions gacaca, la sauvegarde des droits et le bien être des victimes du génocide. Une nouvelle loi dont le projet est au Parlement permettra de régler certains aspects de la réparation aux victimes.

I .2.1.3.3 Les organes connexes à la justice

a) Le ministère public

67.Le ministère public est institué par la Constitution dans ses articles 160 à 164. Il comprend le parquet général de la République et l’Auditorat militaire. La loi organique n°03/2004, telle que modifiée et complétée par la loi organique n°15/2006 du 24 mars 2006, organise sa compétence et son fonctionnement.

68.Le parquet général est placé sous l’autorité du Ministre ayant la justice dans ses attributions, mais il jouit d’une autonomie de gestion administrative et financière.

69.Le ministère public est exercé par les officiers du ministère public de carrière, les auditeurs militaires et les officiers du ministère public auxiliaires.

70.Devant les juridictions ordinaires, l’action publique est exercée par le bureau du Procureur général et les services décentralisés du parquet exerçant au niveau de base et au niveau de grande instance sur toute l’étendue de la République.

71.Les officiers du ministère public sont pleinement indépendants des parties et des magistrats du siège.

72.Devant les juridictions militaires l’action publique est exercée sous l’autorité de l’Auditeur général militaire qui est assisté par l’Auditeur général adjoint ainsi que d’autres auditeurs militaires.

73.L’Auditorat militaire comprend également le corps des officiers de police judiciaire militaire, compétent pour constater les infractions relevant des juridictions militaires, en rechercher les auteurs et en rassembler les preuves.

74.Actuellement, la carrière des officiers du ministère public est gérée par le Conseil supérieur du parquet dont la composition fait intervenir, outre les officiers du ministère public élus par leurs pairs, les autres membres du secteur de la justice.

75.Ce Conseil est un organe chargé d’assurer le suivi des activités du ministère public et a pour mission de donner un avis motivé, à sa propre initiative ou à la demande des autorités habilitées, sur toute question intéressant le fonctionnement du parquet ainsi que le régime disciplinaire des officiers du ministère public de profession à l’exception du Procureur général de la République et du Procureur général de la République adjoint.

76.Institué par la Constitution dans son article 165, le Conseil supérieur du parquet est composé des personnalités suivantes:

Ministre de la justice;

Procureur général de la République;

Procureur général de la République adjoint;

Un procureur à compétence nationale élu par ses pairs;

Commissaire général de la police nationale;

Président de la Commission nationale des droits de la personne;

Auditeur général militaire et son adjoint;

Trois officiers du ministère public au niveau de grande instance élu par leurs pairs;

Cinq officiers du ministère public au niveau de base élus par leurs pairs;

Deux doyens des facultés de droit des universités agréées élus par leurs pairs;

Bâtonnier de l’ordre des avocats;

Ombudsman.

77.Le Ministre de la justice assure la présidence du Conseil supérieur du parquet et le Procureur général de la République en est son vice-président.

78.Le parquet général de la République est doté d’un service d’inspection composé d’inspecteurs qui sont des officiers du ministère public chargés d’assurer le suivi et le contrôle du fonctionnement des organes du ministère public. Ils exercent leurs fonctions au niveau du bureau du Procureur général de la République et sont nommés et démis de leurs fonctions par le Conseil supérieur du parquet.

b) La police nationale

79.La police nationale est un organe de sécurité créé par la loi n°09/2000 du 16 juin 2000 et qui a été raffermi par l’article 170 de la Constitution. Elle exerce ses compétences sur l’ensemble du territoire national et doit servir le peuple sur la base des principes suivants:

La sauvegarde des droits fondamentaux définis par la Constitution et la loi;

La coopération avec la communauté nationale;

La responsabilité de la police nationale devant la communauté;

L’obligation de tenir la population informée de l’exécution de sa mission.

80.La loi n°9/2000 du 19 juin 2000 définit les attributions de la police nationale qui sont:

Assurer le respect de la loi;

Maintenir et rétablir l’ordre public;

Assurer la sécurité des personnes et de leurs biens ;

Intervenir sans délais en cas de calamité, de sinistre et de catastrophe;

Combattre le terrorisme;

Assurer la police de l’air, des frontières et des eaux;

Participer aux missions internationales de maintien de la paix, de secours et de perfectionnement.

c) Les comités de conciliateurs

81.En vue de désengorger les juridictions ordinaires, une institution appelée «comité des conciliateurs» a été instaurée par la Constitution dans son article 159. La loi organique n°17/2004 du 20 juin 2004, telle que modifiée à ce jour par la loi organique n°31/2006 du 14 août 2006, détermine l’organisation, le ressort, la compétence et le fonctionnement de ce comité.

82.Un comité de conciliateurs est une institution destinée à fournir un cadre obligatoire de conciliation préalable à la saisine des juridictions de premier degré siégeant dans certaines affaires définies par la loi.

83.Le comité des conciliateurs de chaque cellule administrative est composé de 12 personnes intègres ayant leur résidence dans la cellule administrative et reconnues pour leur aptitude à concilier.

84.Les conciliateurs sont élus par le conseil de la cellule pour un mandat de deux ans renouvelable et leur service est bénévole. Ne peuvent être élus les agents des entités décentralisées et des institutions et services de la justice.

85.Le comité des conciliateurs est dirigé par un bureau composé d’un président et d’un vice-président élus par leurs pairs. Le secrétaire exécutif de la cellule est de droit secrétaire du comité des conciliateurs.

86.Sur la liste des conciliateurs, les parties en conflit conviennent de trois personnes auxquelles elles soumettent leur différend.

87.Les comités sont compétents aussi bien en matière pénale qu’en matière civile dans les limites déterminées par la loi organique n°31/2006 (art. 8 et 9). En matière civile les comités connaissent notamment des affaires familiales autres que celles relatives à l’état civil, des successions dont la valeur ne dépasse pas trois millions de francs rwandais, des affaires relatives au bétail et autres biens meubles dont la valeur ne dépasse pas un million, des affaires relatives aux terrains et autres biens immeubles dont la valeur ne dépasse pas trois millions, etc.

88.En matière pénale, les comités connaissent notamment des affaires en rapport avec certaines infractions déterminées avant qu’elles ne soient portées devant la police judiciaire ou le ministère public. Il s’agit notamment de l’enlèvement ou du déplacement des bornes des terrains ou des parcelles, de la destruction ou la dégradation des récoltes lorsque leur valeur ne dépasse pas trois millions de francs rwandais, des imputations dommageables, du vol simple lorsque l’objet de vol ne dépasse pas un million, de l’injure, etc.

89.Les conciliateurs qui ont statué sur l’affaire dressent un procès-verbal de règlement du différend qui leur est soumis. Les conciliateurs et les parties apposent leur signature sur ce procès-verbal.

90.La partie au différend qui n’est pas satisfaite de la décision des conciliateurs peut saisir la juridiction compétente pour connaître de l’affaire au premier degré.

91.Les conciliateurs rencontrent des problèmes dans la réalisation de leurs tâches notamment la limitation des connaissances dans la résolution des conflits, le manque de locaux et de matériels nécessaires, etc.

I.2.2 Rapport entre les pouvoirs

92.Tous les pouvoirs (le pouvoir législatif, le pouvoir exécutif et le pouvoir judiciaire) travaillent en toute indépendance, mais dans leurs rapports, la Constitution de la République du Rwanda prévoit l’intervention de l’un ou l’autre, notamment dans les cas suivants:

La Chambre des députés peut mettre en cause la responsabilité du Gouvernement ou celle d’un ou plusieurs membres du Gouvernement par le vote d’une motion de censure (art. 130 de la Constitution);

Le Président de la République peut, après consultation du Premier Ministre, des présidents de deux chambres du Parlement et du président de la Cour suprême, prononcer la dissolution de la Chambre des députés (art. 133 de la Constitution). Cette dissolution n’est valable qu’une fois au cours de son mandat (art. 133 de la Constitution);

Le Présidentde la République et le Premier Ministre doivent être informés de l’ordre du jour des séances de chaque chambre du Parlement et de ses Commissions. Le Premier Ministre et les autres membres du Gouvernement peuvent, s’ils le désirent, assister aux séances de chaque chambre (art. 127 de la Constitution);

En cas d’empêchement ou d’incapacité du Président de la République d’exercer ses fonctions, le Président du Sénat assure l’intérim jusqu’à la reprise des fonctions par le Président; si celui-ci est empêché, l’intérim est assuré par le Président de la Chambre des députés. Lorsque ces deux derniers ne sont pas disponibles, notamment en cas de maladie ou autres empêchements provisoires, l’intérim de la Présidence de la République est assuré par le Premier Ministre (art. 107 de la Constitution);

Le Président de la République est investi par le Président de la Cour suprême (art. 104 de la Constitution). Inversement, le Président et les Vice-Présidents de la Cour suprême prêtent serment devant le Président de la République en présence du Parlement;

Le Président et les Vice-Présidents de la Cour suprême sont élus pour un mandat unique de huit ans par le Sénat à la majorité absolue de ses membres, sur proposition du Président de la République à raison de deux candidats par poste, et après consultation du Conseil des Ministres et du Conseil supérieur de la magistrature (art. 147 de la Constitution);

Les parlementaires prêtent serment devant le Président de la République et en son absence devant le Président de la Cour suprême (art. 65 de la Constitution);

Le Président de la République et le Gouvernement exercent aussi de façon régulière la fonction normative dès l’instant où ils réglementent certaines matières par voie d’arrêtés présidentiels et ministériels. Exceptionnellement, le Président de la République peut légiférer par voie de décrets-lois en cas d’urgence ou d’impossibilité du Parlement de siéger (art. 63 de la Constitution).

I.3 Les Commissions nationales et organes étatiques spécialisés

I.3.1 La Commission nationale des droits de la personne

93.La Commission nationale des droits de la personne a été créée par la loi n°04/99 du 12 mars 1999. Cette loi a été modifiée par la loi n°37/2002 du 31 décembre 2002. La Commission nationale des droits de la personne a été consolidée par l’art. 177 de la Constitution et les missions suivantes, entre autres, lui ont été assignées:

Éduquer et sensibiliser la population aux droits de la personne;

Examiner les violations des droits de la personne commises sur le territoire rwandais par des organes de l’État, des personnes agissant sous couvert de l’État, des organisations et des individus;

Faire des investigations sur des violations des droits de la personne et saisir directement les juridictions compétentes;

Établir et diffuser largement un rapport annuel et aussi souvent que nécessaire sur l’état des droits de la personne au Rwanda;

Diffuser des instruments internationaux relatifs aux droits de la personne ratifiés par le Rwanda et faire le plaidoyer pour la ratification de ceux qui ne sont pas encore ratifiés;

Inciter les organes compétents de l’État à ratifier les conventions relatives aux droits de la personne et à soumettre à temps les rapports y relatifs;

Visiter les lieux de détention et s’assurer que les droits des détenus sont respectés;

Donner des avis, sur demande ou à son initiative, sur les projets de lois relatifs aux droits de la personne, etc.

I.3.2 La Commission nationale de l’unité et la réconciliation

94.La Commission nationale de l’unité et la réconciliation créée par la loi n° 03/99 du 12 mars 1999 a été raffermie par l’article 178 de la Constitution.

95.Il s’agit d’une Commission indépendante chargée notamment de:

Concevoir et coordonner le programme national pour la promotion de l’unité et la réconciliation nationale;

Mettre en place et développer les voies et moyens de nature à restaurer et consolider l’unité et la réconciliation;

éduquer et sensibiliser la population rwandaise à l’unité et la réconciliation;

Effectuer des recherches, organiser des débats, diffuser des idées et faire des publications sur la paix, l’unité et la réconciliation nationales;

Formuler des propositions sur les meilleures actions susceptibles d’éradiquer les divisions entre les Rwandais et de renforcer l’unité et la réconciliation nationales;

Dénoncer et combattre les actes, les écrits et le langage susceptibles de véhiculer toute forme de discrimination, d’intolérance et de xénophobie.

I.3.3 La Commission nationale de lutte contre le génocide

96.La Commission nationale de lutte contre le génocide est une institution publique autonome instituée par la Constitution en son article 179. La loi n°09/2007 portant son organisation et son fonctionnement est en vigueur depuis le 16 février 2007 (J.O n° spécial du 19 mars 2007).

97.Cette Commission est chargée notamment de:

Organiser une réflexion permanente sur le génocide, ses conséquences et les stratégies de sa prévention et de son éradication;

Mettre en place un centre de recherche et de documentation sur le génocide;

Plaider la cause des rescapés du génocide à l’intérieur comme à l’extérieur du pays;

Concevoir et coordonner toutes les activités en vue de perpétuer la mémoire du génocide de 1994;

Entretenir des relations avec d’autres institutions nationales et internationales qui partagent la même mission.

I.3.4 La Commission de la fonction publique

98.La Commission de la fonction publique est une institution publique indépendante prévue par Constitution en son article 181. Elle sera chargée notamment chargée de:

Procéder au recrutement des agents des services publics de l’État et de ses institutions;

Soumettre pour nomination, affectation et promotion par les autorités compétentes, les noms des candidats qui remplissent tous les critères exigés et qui sont jugés les plus qualifiés professionnellement pour occuper les postes ouverts à candidature, sans préjudice des qualités morales requises;

Organiser un système de sélection des candidats qui soit objectif, impartial, transparent et égal pour tous;

Faire des recherches sur les lois, règlement, qualifications requises, conditions de service et sur toutes les questions relatives à la gestion et au développement du personnel, et faire des recommandations au Gouvernement;

Faire des propositions des sanctions disciplinaires suivant la législation en vigueur.

1.3.5 La Commission nationale électorale

99.La Commission nationale électorale est une Commission indépendante chargée de la préparation et de l’organisation des élections locales, législatives, présidentielles, référendaires et d’autres élections que la loi peut lui réserver. Cette Commission veille à ce que les élections soient libres et transparentes.

I.3.6 L’Office de l’Ombudsman

100.L’Office de l’Ombudsman est une institution publique indépendante instituée par l’article 182 de la Constitution. Son organisation et son fonctionnement sont régis par la loi n°25/2003 du 15 août 2003.

101.Il est chargé notamment de:

Servir de liaison entre le citoyen, d’une part, et les institutions publiques et privées, d’autre part;

Prévenir et combattre l’injustice, la corruption et d’autres infractions connexes dans les services publics et privés;

Recevoir et examiner dans le cadre précité les plaintes des particuliers et des associations privées contres les actes des agents ou des services publics et privés et si ces plaintes paraissent fondées, attirer l’attention de ces agents ou de ces services en vue de trouver une solution satisfaisante ;

Recevoir la déclaration sur l’honneur des biens et patrimoine du Président de la République, du Président du Sénat, du Président de la Chambre des députés, du Président de la Cour suprême, du Premier Ministre et des autres membres du Gouvernement avant leur prestation de serment et lors de leur cessation de fonction. Cette procédure a été étendue aux détenteurs des postes impliquant l’engagement des dépenses de l’État et aux services où les possibilités de corruption se font sentir.

I.3.7 L’Observatoire du « gender »

102.L’Observatoire du «gender» est une institution nationale indépendante instituée par la Constitution en son article 185. Il sera chargée notamment de:

Faire le monitoring pour évaluer d’une manière permanente le respect des indicateurs «gender» dans la vision de développement durable et servir de cadre d’orientation et de référence en matière d’égalité de chance et d’équité ;

Formuler des recommandations à l’endroit des différentes institutions dans le cadre de la vision du «gender».

103.Le projet de loi portant organisation et compétence de l’Observatoire du «gender» est en cours d’examen.

I.3.8 Le Conseil national des femmes

104.Le Conseil national des femmes est institué par la Constitution en son article 187. Il s’agit d’une institution dotée de personnalité juridique et jouissant d’une autonomie financière et administrative. Il constitue un forum de convivialité où les femmes rwandaises échangent leurs idées en vue de résoudre dans la concertation leurs problèmes et participer ainsi au développement du pays.

105.La loi n°27/2003 du 18 août 2003 détermine l’organisation, les attributions et le fonctionnement du Conseil national des femmes.

106.Il a pour principales attributions:

De rassembler les idées des femmes rwandaises sans aucune distinction;

De former les femmes rwandaises à analyser et à résoudre de concert leurs problèmes;

De sensibiliser la femme rwandaise au patriotisme et à servir le pays;

D’améliorer les capacités des femmes rwandaises dans leurs actions;

De représenter les femmes rwandaises dans la gouvernance du pays afin qu’elles puissent participer au programme du Gouvernement;

D’encourager les femmes rwandaises à lutter pour l’égalité et la complémentarité entre les hommes et les femmes.

107.Les organes de cette institution se situent au niveau national, provincial et du district jusqu’au plus petit niveau de l’administration.

I.3.9 Le Conseil national de la jeunesse

108.Le Conseil national de la jeunesse, prévu par l’article 188 de la Constitution, est institué par la loi n°24/2003 du 14 août 2003, modifiée et complétée par la loi n°05/2006 du 5 février 2006, déterminant son organisation et son fonctionnement.

109.Il s’agit d’une institution dotée de la personnalité juridique et de l’autonomie de gestion, administrative et financière.

110.Le Conseil national de la jeunesse est un forum d’échange d’idées entre les jeunes en vue de contribuer à leur développement ainsi qu’à celui du pays.

111.Ses principales missions sont de:

Rassembler les jeunes, les former à l’éducation civique et les initier à la culture rwandaise, aux sports et aux loisirs;

Sensibiliser les jeunes aux activités de production visant à contribuer à leur développement et à celui du pays;

Soutenir les associations des jeunes et leur chercher des appuis;

Initier les jeunes à résoudre eux-mêmes leurs problèmes, les inciter et les préparer à faire partie des organes de prise de décisions;

Plaider en faveur des jeunes auprès des organes de prise de décisions en rapport avec la jeunesse et faciliter leur participation au processus de décisions de ces organes afin que les problèmes auxquels ils font face soient pris en considération;

Sensibiliser les jeunes à éviter tout ce qui peut les entraîner dans des futilités;

Former les jeunes à la science et à la technologie et les initier à créer des emplois;

Collaborer avec ceux qui ont dans leurs attributions les activités visant à promouvoir la jeunesse;

Sensibiliser les jeunes à se protéger contre le VIH/SIDA et autres pandémies;

Nouer les relations entre la jeunesse du Rwanda et celle des pays étrangers;

Nouer les relations entre les structures organisationnelles de la jeunesse et les autres organisations.

II. LA SOCIÉTÉ CIVILE

112.Dans la mise en œuvre du Pacte, les collectifs et associations contribuent à la promotion et la protection des droits de la personne. Les plus connus sont notamment le CLADHO (Collectif des ligues et associations de défense des droits de l’homme au Rwanda), Profemmes/Twese Hamwe, la LDGL (Ligue des droits de la personne dans la région des Grands Lacs) et IBUKA.

II.1 Le Collectif des ligues et associations pour la défense de droits de l’homme (CLADHO)

113.Collectif de cinq associations, CLADHO s’investit dans des activités de promotion et de protection des droits de la personne notamment en faisant:

Le traitement et le suivi des doléances de la population lésée dans ses droits et en organisant les séminaires;

La vulgarisation des instruments nationaux et internationaux relatifs aux droits de l’homme;

L’alphabétisation fonctionnelle basée sur les droits en faveur des groupes vulnérables notamment les enfants;

Le plaidoyer auprès des institutions en vue de faire le suivi des cas de violation des droits de la personne.

114.Outre les activités de promotion et de protection des droits de la personne, CLADHO s’intéresse aux activités relatives au processus de démocratie. Il s’est investi notamment dans le monitoring des élections institutionnelles ayant marqué la fin de la transition dont l’observation du référendum du 26 mai 2003.

II.2 Le Collectif Profemmes - Twese Hamwe

115.Le Collectif Pro-Femmes Twese Hamwe est une plate forme des associations féminines engagées dans la lutte pour la promotion intégrée de la femme. Son objectif principal est de contribuer à la transformation structurelle de la société rwandaise en vue d’une plus grande participation des femmes et d’influencer la société en faveur de la mise en place des conditions juridiques, politiques, socio-économiques et morales favorables à la réhabilitation de la justice sociale et à l’égalité des chances afin d’arriver à la paix et au développement durables.

116.De nombreuses activités ont été réalisées par ce Collectif dans le cadre de la sauvegarde et de la promotion des droits civils et politiques dont la protection et la promotion des droits humains tels qu’ils sont définis par la Déclaration universelle des droits de l’homme, notamment:

Assister en justice les femmes et les enfants;

Initier les programmes de plaidoyer pour l’éducation formelle ou informelle de la fille, tout en lui donnant toute assistance nécessaire à cette fin;

Contribuer à la sensibilisation et à l’information sur les droits humains, en général, et les droits de l’enfant, en particulier;

Jouer le rôle de lobby et de plaidoyer en faveur du respect des droits humains de la femme et de l’enfant et créer des réseaux d’échange et de concertation tant aux niveaux national et régional qu’international pour mieux protéger la femme et l’enfant;

Sensibiliser au processus d’intégration de la femme dans les instances de prise de décisions et de bonne gouvernance.

II.3 IBUKA

117.L’Association IBUKAa été créée par ses membres pour se pencher sur tous les problèmes de violation des droits de la personne causés par le génocide rwandais de 1994, répondre au souci de coordonner toutes les activités relatives aux problèmes économiques et sociaux, notamment ceux que connaissent les rescapés du génocide, et les représenter vis-à- vis des tiers.

118.Ses principaux objectifs sont de:

Perpétuer la mémoire des victimes du génocide de 1994;

Assister et défendre les rescapés du génocide;

Appuyer toute initiative visant à retrouver et à juger les responsables du génocide;

Lutter constamment contre la banalisation, le négationnisme et révisionnisme du génocide.

119.IBUKA sensibilise les rescapés du génocide à la participation massive au processus des juridictions gacaca et les invite à jouer un rôle prépondérant dans la réussite de ce processus, notamment par la présentation des témoignages. L’association épaule le Gouvernement dans ses efforts de protection des rescapés du génocide et autres témoins devant les juridictions gacaca.

120.Elle lutte pour le bien être des rescapés, notamment dans le domaine de l’éducation des enfants les plus démunis et de la santé ainsi que dans tout autre domaine socioculturel rentrant dans l’intérêt des rescapés.

121.IBUKA défend les intérêts des rescapés dans des procès des personnes poursuivies pour génocide tant au Rwanda que devant le Tribunal pénal international pour le Rwanda et partout ailleurs.

III. LES MESURES PRISES POUR LA MISE EN ŒUVRE ET LA JOUISSANCE DES DROITS GARANTIS PAR LE PACTE INTERNATIONAL RELATIF AUX DROITS CIVILS ET POLITIQUES

122.Plus d’une décennie après le génocide de 1994 qui a emporté plus d’un million de vies humaines tout en détruisant toutes les infrastructures sociales, économiques et politiques, le Rwanda essaie de renaître en édifiant l’état de droit, fondement de toute action gouvernementale.

123.Conscient que le développement du pays passe par la satisfaction de tous les droits fondamentaux, le Gouvernement a pris des mesures aussi bien juridiques que pratiques pour atteindre progressivement, et dans la mesure de ses moyens, cet objectif.

124.Ainsi, tous les instruments juridiques, dont la Constitution, à partir desquels la vie nationale est organisée, reflètent la volonté du Gouvernement rwandais de promouvoir les droits civils et politiques et témoignent de son attachement à leur mise en œuvre.

III.1 Le droit à l’autodétermination (art. 1 du Pacte)

125.En droit international «l’autodétermination» est le principe selon lequel un peuple doit avoir le droit de déterminer sa propre forme de gouvernement indépendamment de toute influence étrangère. C’est ce qui est appelé communément «indépendance politique». La Constitution de la République du Rwanda affirme ce principe en son article premier qui dispose que: «[l]’État rwandais est une République indépendante, souveraine, démocratique, sociale et laïque. Le principe de la République est le Gouvernement du peuple par le peuple et pour le peuple». La Constitution affirme solennellement la détermination du pays à créer un État indépendant et démocratique, dans lequel les droits fondamentaux de l’homme et les libertés publiques sont garantis non seulement au niveau national mais aussi dans ses relations avec l’extérieur.

126.La Constitution affirme que tout changement qui porte sur la nature du régime notamment la forme républicaine et l’intégrité du territoire national doit être approuvé par référendum, après adoption par chaque chambre du Parlement (art. 193, al. 3).

127.Le droit à l’autodétermination implique également l’autodétermination économique qui investit le peuple de la capacité de choisir librement son système économique et d’exploiter librement à son profit ses richesses et ressources naturelles.

128.La loi organique n°08/2005 du 14 juillet 2005 portant régime foncier au Rwanda détermine les modalités d’utilisation et de gestion de la terre. Elle protège de façon équitable les droits sur les terres qu’ils résultent de la coutume ou du droit écrit.

129.Selon cette loi organique, la terre fait partie du patrimoine commun de tout le peuple rwandais. L’État dispose d’un droit éminent de gestion de l’ensemble des terres situées sur le territoire national. Mais les terres peuvent être détenues en propriété privée. Seules les ressources minières et d’autres ressources naturelles enfouies dans le sous-sol échappent au propriétaire foncier (art. 55 de la loi organique n°08/2005).

130.La Constitution de la République du Rwanda reconnaît l’indépendance économique au deuxième alinéa de l’article 189 qui dispose que: «…[l]es traités de paix, les traités de commerce, les traités ou accords relatifs aux organisations internationales, ceux qui engagent les finances de l’État, ceux qui modifient des dispositions de nature législative, ceux qui sont relatifs à l’état des personnes ne peuvent être ratifiés qu’après autorisation du Parlement».

131.D’autres lois particulières réglementent le commerce extérieur dont la loi n°22/1989 portant organisation du commerce extérieur, la loi relative au contrôle des changes et du commerce extérieur, décret-loi n°SPI du 3 mars 1995 portant organisation et gestion du marché des changes, etc.

132.Dans le but d’asseoir une indépendance économique soutenue et partant du principe de base de l’inviolabilité de la propriété privée individuelle ou collective garanti par la Constitution (art. 29), le Gouvernement soutient le principe de justice sociale qui exige que l’État mette en œuvre les mécanismes utiles à l’augmentation des richesses nationales, relève le niveau de vie de la population et fortifie la souveraineté économique du pays. Ainsi plusieurs programmes d’augmentation des richesses nationales ont été initiés. Il s’agit notamment du Document de stratégie pour la réduction de la pauvreté (DSRP) qui, dans ses grandes lignes, préconise une croissance économique élevée accompagnée de mesures visant notamment à accroître les recettes d’exploitation et de production agricole, à diversifier l’économie, à faciliter la privatisation, à appuyer les initiatives privées et à encourager l’organisation de coopératives et d’autres institutions visant à améliorer l’économie du pays.

III.2 Interdiction de la discrimination (art. 2, 3 et 26 du Pacte)

133.La Constitution de la République du Rwanda reconnaît les droits civils et politiques consacrés par le Pacte à tous les habitants du territoire de la République. Elle prescrit que tous les Rwandais naissent et demeurent libres et égaux en droit et en devoir. Elle interdit toute discrimination fondée notamment sur la race, l’ethnie, la couleur, le clan, la tribu, la couleur de la peau, le sexe, la religion, l’origine sociale, la religion ou la croyance, l’opinion, la différence de cultures, la langue, la situation sociale, la déficience physique ou mentale ou toutes autres formes de discrimination (art. 11).

134.L’égalité est garantie par la Constitution dont l’article 16 prévoit que «[t]ous les êtres humains sont égaux devant la loi. Ils ont droit, sans aucune distinction, à une égale protection par la loi».

135.La loi n° 42/2001 portant répression des crimes de discrimination et des pratiques du sectarisme et la loi n°23/2003 relative à la répression de la corruption et des infractions connexes prévoient l’application de cette disposition constitutionnelle. Même en cas de poursuites judiciaires, personne ne peut échapper à la justice du fait de son statut politique, sa carrière ou sa position dans les forces de l’ordre (armée et police). La tendance est de réduire les exceptions légales relatives aux traitements différenciés de personnes se trouvant dans des situations semblables et à privilégier la transparence. Ainsi, pour empêcher des avantages exceptionnels, un arrêté présidentiel détermine les salaires et autres avantages alloués aux hauts mandataires politiques de l’État. Il en est de même pour les autres catégories de salariés.

136.Plusieurs conventions internationales et régionales ont été ratifiées par le Rwanda dont:

La Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (A.P no 8/75 du 12 février1975);

la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (A.P no 143/16/ du 7 novembre 1980);

Convention de l’UNESCO concernant la lutte contre la discrimination dans le domaine de l’enseignement acceptée par le Rwanda le 28 décembre 2000;

Etc.

III.3 Le droit à l’égalité entre homme et femme et la protection de la famille (art. 3, 23 et 24 du Pacte)

III.3.1 Protection et interdiction de discrimination à l’égard de la femme (art. 3)

137.Le Rwanda est engagé en faveur de la promotion de l’égalité des genres et l’intégration totale de la question du genre dans le développement du pays. La Constitution du Rwanda inscrit l’égalité entre l’homme et la femme en tant que principe fondamental dans son préambule et dans son article 9. Elle prévoit d’autres institutions chargées de la protection des droits de la femme, dont le Conseil national des femmes et l’Observatoire du «gender».

138.Dans cette perspective, le Rwanda a entrepris d’importantes actions stratégiques visant à promouvoir la situation de la femme dans les domaines juridique, politique, social et économique.

139.Dans le domaine juridique de nombreuses de lois sont à citer:

La loi n°22/99 du 12 novembre1999 complétant le livre premier du Code civil et instituant la cinquième partie relative aux régimes matrimoniaux, aux libéralités et aux successions, qui supprime l’inégalité des genres dans ces matières (J.O n°22 du 15 novembre 1999);

La loi portant création du Conseil national des femmes, en vigueur depuis août 2003. Ce Conseil est un forum très actif de femmes;

La loi sur la réforme foncière qui a intégré le genre dans la gestion des terres;

La nouvelle loi n°29/2004 sur la nationalité qui exclut toutes les formes de discrimination à l’égard de femmes en matière d’acquisition ou de transmission de la nationalité;

Le projet de nouveau code pénal qui réprime les violences conjugales, le harcèlement et l’attentat à la pudeur;

Un projet de loi portant prévention et répression des violences domestiques et conjugales, en cours d’examen.

140.D’autres actions dans ce domaine ont été entreprises par le Gouvernement en vue de promouvoir les droits civils et politiques de la femme:

Le Ministère du genre a élaboré un document dans le cadre de l’application de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDAW)

Les conventions régionales et internationales relatives aux droits de la femme sont ratifiées;

Une liste des lois discriminatoires nécessitant d’être révisées a été élaborée.

141.Pour garantir le bien être de la femme et garantir son droit à la vie plusieurs actions ont été réalisées dont:

La mise en place d’un fonds de garantie de crédits, géré conjointement avec la Banque commerciale du Rwanda et le Ministère ayant le genre dans ses attributions, qui permet l’octroi de petits crédits aux femmes;

La mise en place des associations de promotion de la femme ayant des actions en vue du renforcement des capacités économiques: Coopérative d’épargne et crédit (COOPEDU), Société anonyme de microcrédit (DUTERIMBERE), etc.;

L’appui à différents projets: Programme de réduction de la pauvreté chez les femmes (PREPAF), Promotion des petites et moyennes entreprises rurales (PPMR), Haute Intensité de main d’œuvre (HIMO), etc., qui apportent un appui économique et financier aux femmes;

La mise en place de stratégies en vue d’améliorer la santé maternelle. C’est ainsi, par exemple, que les femmes séropositives sont traitées en vue d’augmenter leurs chances de mettre au monde des enfants sains.

142.En ce qui concerne la participation des femmes dans l’administration des affaires publiques, on note depuis l’année 2003, la politique de décentralisation qui favorise une représentativité des femmes à différents échelons administratifs. Ainsi la représentativité dans les instances de prise de décisions en 2006 s’élèvait à:

31 % de femmes au Gouvernement (Ministres et Secrétaires d’État);

30 % de femmes au Sénat;

48,8 % de femmes à la Chambre des députés;

17 % de femmes secrétaires exécutifs des districts;

49,2 % de femmes vice-maires des districts;

45,5 % de femmes dans les comités consultatifs des districts;

44,3 % de femmes dans les comités consultatifs des secteurs;

25,6 % dans les comités exécutifs des cellules;

39,1 % dans les comités exécutifs du Conseil de la jeunesse;

45 % de femmes au niveau des cours et tribunaux;

37 % de femmes au niveau du parquet général de la République;

143.Elles sont présentes dans la police nationale et les différentes commissions spécialisées.

144.Le Rwanda est actuellement classé en tête des pays du globe en matière de représentativité de femmes au Parlement.

145.En ce qui concerne l’intégration du genre dans les programmes et politiques du pays, nous noterons la vision 2020, l’«Economic Development Poverty Reduction Strategy» (EDPRS) et le budget de l’État qui tiennent compte de la promotion du genre.

146.Le Ministère du genre et de la promotion de la famille continue à contribuer au renforcement des capacités des femmes dans tous les domaines de la vie nationale afin de réduire leur niveau de marginalisation et ainsi leur faire prendre conscience de leurs droits, en général, et de leurs droits civils et politiques, en particulier.

147.C’est dans ce cadre que le Gouvernement s’est assigné le devoir d’informer l’ensemble des citoyens, notamment dans les zones rurales, et tout particulièrement les femmes, sur les lois interdisant toute discrimination fondée sur le sexe et les violences à l’égard des femmes.

III.3.2 Protection de la famille (art. 23 du Pacte)

148.Conformément à l’article 23 du Pacte, l’État rwandais protège la famille, base naturelle de la société, et veille à l’amélioration de sa situation morale et économique en vue de son épanouissement (art. 27 de la Constitution).

149.Le devoir de l’État de mettre en place une législation et des institutions appropriées pour la protection de la famille est donc prescrit par la Constitution.

150.D’autres lois particulières protègent le mariage et favorisent l’organisation du patrimoine familial. Il s’agit notamment de la loi n°42/1988 du 27 octobre 1988 instituant le titre préliminaire et le livre premier du Code civil, la n°22/99 du 12 novembre 1999 complétant le livre premier du Code civil et instituant la cinquième partie relative aux régimes matrimoniaux, aux libéralités et aux successions (J.O n°22 du 15 novembre 1999) et la loi organique portant régime foncier (J. O n°18 du 15 septembre 2005).

III.3.3 Protection de l’enfant (art. 24 du Pacte)

151.Au Rwanda on entend par «enfant» toute personne n’ayant pas atteint l’âge de 18 ans (art. premier de la loi n°27/2001 du 28 avril 2001 relative aux droits et à la protection de l’enfant contre les violences). La législation rwandaise protège l’enfant en général et la jeune fille de manière particulière. L’article 28 de la Constitution dispose que «[t]out enfant a droit de la part de sa famille, de la société et de l’État, aux mesures spéciales de protection qu’exige sa condition, conformément aux droits national et international».

152.Le Code civil garantit à l’enfant le droit de connaître son origine (art. 126). Ainsi, il est fait obligation aux parents de faire enregistrer des naissances dans les 15 jours qui suivent l’accouchement chez l’officier de l’état civil (art. 117 du Code civil). Le manquement à cette obligation est sanctionné par la loi. Dans la législation rwandaise, tout enfant bénéficie de tous ses droits sans distinction entre les enfants légitimes, les enfants reconnus ou légitimés. La présomption de paternité reconnue par le Code civil décharge l’enfant de prouver son origine, sauf en cas de désaveux de paternité.

153.La loi n°27/2001 du 28 avril 2001 protège les enfants contre les violences de toutes sortes, plus spécialement contre les violences sexuelles, et elle est d’application stricte par les cours et tribunaux.

154.Dans le cadre de lutte contre l’apatridie, l’article 7 de la Constitution prescrit que «[t]oute personne a droit à la nationalité» Les articles 4 et 6 de la loi organique n°29/2004 portant Code de la nationalité accordent automatiquement la nationalité rwandaise à tout enfant dont l’un des parents au moins est rwandais, à tout enfant né au Rwanda de parents inconnus ou apatrides ou à qui la nationalité de l’un de ses parents au moins ne peut lui être attribuée. Il en est de même de tout nouveau-né trouvé sur le territoire rwandais.

155.Cette protection est également assurée en cas d’adoption ou de filiation naturelle. C’est ainsi que l’article 11 de cette loi dispose que: «[…] devient rwandais de plein droit, l’enfant de nationalité étrangère ou apatride, mineur non émancipé, reconnu ou adopté par un Rwandais» tandis que l’article 12 dispose que: «[…]devient rwandais de plein droit au même titre que ses géniteurs, à condition que sa filiation soit établie conformément à la loi rwandaise, l’enfant mineur non émancipé dont le père ou la mère acquiert la nationalité rwandaise».

156.Le Code pénal rwandais protège l’enfant contre l’abandon, l’exploitation et les mauvais traitements tandis que le Code civil donne droit à tout enfant de connaître ses parents et oblige les parents à s’acquitter de leurs obligations d’assistance, d’alimentation et d’éducation à l’égard de leurs enfants. Le recours en reconnaissance de paternité ou de maternité lui est reconnu par ce même code.

157.La législation rwandaise interdit le mariage forcé et précoce. L’article 26 de la Constitution dispose que «[t]oute personne de sexe féminin ou masculin ne peut contracter le mariage que de son libre consentement». Le consentement au mariage n’est valable que lorsque l’enfant est âgé de 21 ans révolus. Toutefois, pour des motifs graves, le Ministre de la justice ou son délégué peut accorder la dispense d’âge pour les enfants âgés de plus de 18 ans (art. 171 du Code civil).

158.L’article 49 de la loi n°27/2001 relative aux droits et à la protection de l’enfant contre les violences et l’article 193 du nouveau projet du code pénal punit toute personne responsable de mariage précoce ou forcé. Les peines sont aggravées si la personne responsable du mariage précoce ou forcé est son parent ou son tuteur.

159.L’article 196 du nouveau projet de code pénal en cours d’élaboration punit l’enlèvement ou la séquestration d’une personne en vue de l’épouser.

160.Le projet du nouveau code pénal punit, en ses articles 220 et 221, l’implication des enfants dans les conflits armés et dans les sports nuisibles à leur santé. Il punit également le refus de présenter ou de remettre un enfant à la personne qui en a le droit de garde ainsi que le fait de se soustraire à l’obligation parentale (art. 223).

161.En outre, une loi particulière relative à la répression du trafic des personnes, et en particulier des enfants, est en cours d’adoption par le Parlement.

162.Dans le cadre des enquêtes, une section spéciale chargée de la lutte contre les violences sexuelles et celles faites dans les ménages a été créée au niveau de la police nationale («Gender based violence in Rwanda») et des formations y relatives ont été dispensées à l’intention des agents de la police et du ministère public.

163.Dans le même but, un observatoire des droits de l’enfant a été créé par la Commission nationale des droits de la personne. Il est piloté par la même Commission et représenté à tous les niveaux de l’administration.

164.Le Rwanda a ratifié la majorité des conventions et des protocoles régionaux et internationaux relatifs auxdroits de l’enfant dont:

La Convention relative aux droits de l’enfant (A.P n°773/16 du 19 septembre 1990, J.O n°21 du 1 novembre 1990);

Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant concernant l’implication des enfants dans les conflits armés (A.P n°32/1 du 26 février 2002, J.O n° spécial du 26 juin 2002);

Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants (A.P n°32/1 du 26 février 2002, J.O n° spécial du 26 juin 2002);

Convention de l’Organisation internationale du Travail n°182 concernant l’interdiction de pires formes de travail des enfants et l’action immédiate en vue de leur élimination (A.P n°39 bis/01 du 30 septembre 1999, J.O n°7 du 1 avril 2000);

Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant (A.P n°773/16 du 19 septembre 1990, J.O n°21 du 1 novembre 1990);

Etc.

165.En ce qui concerne les procès impliquant les enfants, les chambres spécialisées pour mineurs ont été créées au sein des tribunaux de grande instance.

166.Le Code de procédure pénale, dans ses articles 184 à 192, prévoit une procédure particulière pour les poursuites engagées contre les enfants. Il empêche, en son article 184, de placer en garde à vue un mineur poursuivi de moins de 12 ans. Toutefois, s’il existe des indices graves de culpabilité, le mineur peut, pour les besoins de l’enquête, être retenu à la disposition de l’officier de police judiciaire pour une durée qui ne saurait excéder 48 heures, lorsqu’il est présumé avoir commis une infraction qualifiée de crime d’après la législation rwandaise, c’est-à-dire punissable de cinq ans d’emprisonnement au moins. Le mineur âgé de plus de 12 ans et de moins de 18 ans peut être poursuivi, mais il bénéficie des excuses de minorité et doit toujours être assisté par un conseil. À défaut de choix d’un conseil par son ou ses représentants légaux, le ministère public fait désigner un conseil d’office par le Bâtonnier (art. 185 de la loi portant Code de procédure pénale). Le fond d’aide judiciaire, envisagé par le nouveau projet de loi sur le barreau, va jouer un rôle important dans les procès impliquant des enfants. La procédure d’enquête tient compte de la situation sociale, morale et matérielle de la famille, de l’antécédent du mineur et des conditions dans lesquelles il a vécu ou a été élevé.

167.Pour améliorer le bien être et le développement des enfants en général, et des enfants orphelins et vulnérables en particulier, le Gouvernement a approuvé un Programme national pour l’enfant (PNE) visant la réintégration familiale et socio-économique des enfants, élaboré par le Ministère ayant les affaires sociales dans ses attributions, en collaboration avec des partenaires non gouvernementaux, et a adopté en 2003 une politique nationale pour les orphelins et autres enfants vulnérables. Plusieurs raisons ont justifié cette action du Gouvernement, notamment:

L’engagement du Rwanda à mettre en place un plan d’action en faveur de l’enfant;

La multiplicité des acteurs et la diversité des domaines dans lesquels s’inscrivaient les droits de l’enfant qui rendaient nécessaire une approche intégrée et coordonnée des actions;

La coordination des actions en faveur de l’enfant, l’évaluation de sa situation et la mise en œuvre de la Convention relative aux droits de l’enfant;

L’initiation des programmes de placement familial consistant à offrir une famille d’accueil aux enfants qui ont perdu le soutien familial;

Etc.

168.La coordination de ces politiques visant l’intégration sociale totale des enfants a amené la réduction du nombre des centres d’accueil des enfants orphelins et vulnérables et, par là, la réduction du nombre des enfants entretenus dans ces centres. Beaucoup d’entre eux ont regagné leurs familles ou les familles d’accueil ou ont trouvé des tuteurs.

169.Le Ministère à la primature chargé de la promotion de la famille et du genre, en collaboration avec les organismes non gouvernementaux (ARBEF, FAWE RWANDA, Profemmes - Twese Hamwe), met en œuvre des programmes permanents d’aide aux adolescents et assure le fonctionnement de centres d’orientation familiale et d’information sexuelle.

170.Le Ministère de la fonction publique et du travail veille à la lutte contre le travail des enfants tandis que le Ministère de l’éducation met en place divers programmes d’assistance et de protection familiale notamment des programmes d’aides scolaires (financière) aux familles et aux enfants pauvres et orphelins.

171.Malgré les efforts consacrés par le Gouvernement en matière de protection et de promotion des droits de l’enfant, de nombreux défis restent à relever. C’est ainsi que, pour épauler le Programme national pour l’enfance, un avant projet de loi organique portant création, organisation et fonctionnement de la Commission nationale pour l’enfance a été initié par Ministère ayant les enfants dans ses attributions. D’après ce projet de loi, cette commission sera chargée principalement de veiller au respect des droits de l’enfant, d’initier et de promouvoir des politiques et des lois en faveur de l’enfant, d’assurer la participation des enfants à la prise de décisions les concernant, de disséminer des informations relatives à leurs droits et à leur survie, d’évaluer les actions en faveur de l’enfant en application de la Convention relative aux droits de l’enfant et ses protocoles, d’assurer le monitoring sur le respect des droit de l’enfant, de mettre à disposition et de diffuser les instruments juridiques internationaux et nationaux relatifs aux droits de l’enfant, etc.

III.4 Le droit à la vie (art. 6 du Pacte)

172.La dignité de la personne humaine est garantie, protégée et promue comme la condition nécessaire au développement véritable et harmonieux de chaque Rwandais.

173.Au Rwanda, la dignité est la base de tout respect de l’être humain et intègre les droits et libertés garantis par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et repris par la Constitution de la République du Rwanda.

174.Selon la Constitution, le droit à la vie constitue le support des autres droits, autrement dit, l’exercice de ces derniers ne peut se concevoir sans respect du droit à la vie. Elle dispose en son article 10 que «[l]a personne humaine est sacrée et inviolable» tandis que son article 12 consacre expressément le droit à la vie et le précise en ces termes: «[t]oute personne a droit à la vie. Nul ne peut être arbitrairement privé de la vie». Ces deux dispositions interdisent aux pouvoirs publics et aux particuliers de donner la mort à un individu. En ce sens, les lois pénales dont le Code pénal et d’autres lois particulières plus spécialement la loi portant répression des violences faites aux enfants, etc.; répriment sévèrement les actes attentatoires à la vie humaine. La privation de la vie n’intervient que dans les cas prévus par la loi, par exemple en cas de condamnation à mort pour crime. Mais le condamné à mort bénéficie d’office d’un recours en appel et peut exercer toute autre voie de recours tel que le recours en révision. Le condamné à mort peut également demander une grâce présidentielle, prévue à l’article 227 du Code de procédure pénale, qui est une voie ouverte à toutes les peines principales et accessoires, y compris la peine de mort. Le Code de procédure pénale traite également de l’amnistie en ses articles 247 à 248 qui peut être accordée au condamné à mort.

175.Dans l’objectif de préserver la vie de l’enfant à naître, la peine de mort prononcée contre une femme enceinte est exécutée après sa délivrance.

176.Dans le cadre de l’éradication de la culture de l’impunité qui a caractérisé les dernières décennies, les lois portant répression des violations massives des vies humaines, notamment la loi organique portant répression du crime de génocide et de crimes contre l’humanité et la loi portant création des juridictions gacaca, ont été promulguées. L’article 13 de la Constitution qualifie le crime de génocide, les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité de crimes imprescriptibles.

177.Au Rwanda, jusqu’à ce jour, la peine de mort est acceptée par la législation pénale. Mais considérant que cette sanction est contraire aux principes constitutionnels d’unité et réconciliation durement ébranlés par le génocide et affirmant son attachement aux principes des droits fondamentaux de la personne tels qu’ils ont été définis par les instruments internationaux, le Gouvernement rwandais a décidé d’abolir la peine de mort dans la législation. Un projet de loi portant abolition de cette peine est au Parlement pour adoption. Quatre raisons principales ont motivé le Gouvernement rwandais pour abolir cette peine:

L’exécution d’un être humain viole non seulement les principes garantis par les instruments internationaux souscrits par le Rwanda, mais aussi ceux garantis par la Constitution du Rwanda: tout individu a droit a la vie (art. 12), nul ne sera soumis à la torture ou à des peines ou traitement cruels, inhumains, et dégradants (art. 15). L’application de la peine de mort ne cadre plus avec la vision de l’État rwandais en matière de droits de la personne visant le respect total de la vie humaine;

L’abolition de cette peine permettra aux États qui rejettent les demandes d’extradition spécialement concernant le génocide de 1994 de mieux coopérer avec la justice rwandaise. De même, n’étant pas appliquée par le Tribunal pénal international pour le Rwanda d’Arusha, cela permet d’éviter les injustices et les inégalités qui risqueraient de se créer entre les personnes poursuivies par ce tribunal et celles poursuivies par les juridictions internes;

La peine de mort est irréversible. L’erreur judiciaire est toujours possible et il faut exclure un châtiment sur lequel il est ensuite impossible de revenir;

La peine de mort n’est pas dissuasive et ne provoque pas la diminution de criminalité.

178.Dans le cadre de la lutte contre l’insécurité, les cas de disparitions et d’exécutions extrajudiciaires dénoncés font l’objet d’enquêtes de la part des autorités et les responsables sont condamnés par les juridictions compétentes. Les agents de police et du ministère public sont tenus à procéder à l’enquête après disparition et le manquement à cette obligation est sanctionné par les juridictions compétentes.

179.Dans le cadre de la protection de la santé et de la lutte contre des épidémies, l’État a pris des engagements dont l’objectif fondamental est de favoriser le développement d’un système de santé capable de répondre aux besoins individuels et collectifs de la population. Le but essentiel consiste à intensifier les mesures visant à garantir le droit à la vie en réduisant la morbidité et la mortalité imputable à différentes causes.

180.L’avortement et la publicité des moyens abortifs sont punis par le Code pénal (art. 235 à 238).

181.Enfin, conscient que la violation du droit à la paix est l’une des causes qui menacent la vie de la population, la volonté du Rwanda de lutter pour la paix dans le monde, en Afrique et particulièrement dans la sous région se manifeste dans ses actions (intervention dans le domaine du maintien de la paix et de la sécurité (par exemple au Darfour) et dans les accords auxquels il est partie (Accord de Lusaka, Accord de Pretoria, etc.). Dans le but de garantir une paix durable dans la région, l’intégration régionale est l’une des priorités du Rwanda.

III.5 État d’urgence: Dérogations et restrictions aux droits garantis par le Pacte (art. 4 du Pacte)

182.L’alinéa 3 de l’article 110 de la Constitution dispose que le Président de la République déclare l’état de siège et l’état d’urgence dans les conditions fixées par la Constitution et la loi. Les articles 137 à 139 régissent l’état de siège ou d’urgence. Selon ces articles, c’est le Président de la République qui proclame l’état d’urgence ou l’état de siège après décision du Conseil des Ministres. L’état de siège ou d’urgence doit être dûment motivé et spécifier l’étendue du territoire concerné, ses effets, les droits, les libertés et les garanties suspendus de ce fait ainsi que sa durée, qui ne peut être supérieure à 15 jours et dont la prorogation ne peut être autorisée que par le Parlement statuant à la majorité des deux tiers de chaque chambre. La déclaration de l’état de siège ou d’urgence ne peut en aucun cas affecter les compétences des hautes autorités du pays ou modifier les principes de la responsabilité de l’État

183.L’alinéa 7 de l’article 137 dispose que la déclaration de l’état de siège ou d’urgence ne peut en aucun cas porter atteinte au droit à la vie, à la l’intégrité physique, à l’état et la capacité des personnes, à la nationalité, à la non rétroactivité de la loi pénale, au droit de la défense ni à la liberté de conscience et de religion.

III.6 Lutte contre le terrorisme et d’autres crimes transfrontaliers

184.L’article 90 de la loi organique portant code d’organisation, de fonctionnement et de compétence judiciaires donne compétence à la Haute Cour de la République pour statuer en premier ressort sur les crimes graves dont le terrorisme. Cette compétence est rendue universelle en ce qu’elle concerne les accusations dirigées même contre les étrangers pour infractions commises à l’étranger.

185.D’autres mesures visant la lutte contre le terrorisme ont été adoptées dont:

Un projet de loi relative à la lutte contre le terrorisme en cours d’examen au niveau du Parlement;

Un projet de loi réprimant le branchement et le financement du terrorisme en cours d’examen au niveau du Parlement;

Un projet de loi portant création d’un Centre d’information sur le branchement et le financement du terrorisme.

186.Le Rwanda est partie à plusieurs conventions régionales et internationales dont:

La Convention internationale pour la répression des attentats terroristes à l’explosif, adoptée par l’Assemblée Générale de l’Organisation des Nations Unies le 15 décembre 1997, ratifiée par l’arrêté présidentiel n°40/01 du 14 avril 200l;

La Convention internationale contre la prise d’otages, adoptée par l’Assemblée générale de l’Organisation des Nations Unies le 17 décembre 1979, ratifiée par l’arrêté présidentiel n°14/04/2002;

La Convention internationale pour la répression du financement du terrorisme et la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, ratifiées le 31 décembre 2002 (A.P n°158/01 du 31 décembre 2002, J.O n°12 ter du 15 juin 2003;

Le Protocole pour la répression d’actes illicites contre la sécurité des plates-formes fixes situées sur le plateau continental, ratifié le 14 avril 2002 (A.P n°42/01 du 14 avril 2002, J.O n°14 du 15 juillet 2002);

La Convention sur le marquage des explosifs plastiques et en feuilles aux fins de détection, ratifiée le 14 avril 2002 (A.P n°44/01 du 14 avril 2002, J.O n°14 du 15 juillet 2002;

La Convention pour la répression des actes illicites contre la sécurité de la navigation maritime, ratifiée par l’A.P n°46/01 du 14 avril 2002, J.O n°14 du 15 juillet 2002;

Le Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, ratifiée par l’A.P163/01 du 31 décembre 2002 (J.O n°20 du 15 octobre 2003);

La Convention de l’Organisation de l’Unité Africaine sur la prévention et la lutte contre le terrorisme, adoptée à Alger le 14 juillet 1999, ratifiée par l’A.P n°40/01 du 14 avril 2002, etc.

III.7 Interdiction des tortures et mauvais traitements (art. 7 du Pacte)

187.Ce droit renvoie à l’interdiction de porter atteinte à l’intégrité physique et mentale de l’individu en infligeant des tortures et traitements inhumains, cruels ou dégradants. Cette interdiction s’adresse essentiellement aux détenteurs de la puissance publique. La Constitution de la République du Rwanda en fait une interdiction absolue en disposant en son article 15 que: «[t]oute personne a droit à son intégrité physique et mentale», que «[n]ul ne peut faire l’objet de torture, de sévices ou de traitements cruels, inhumains ou dégradant». L’interdiction d’expérimentation médicale sans consentement du concerné est garantie par le même article en son alinéa 3.

188.Le Code pénal inscrit la répression la torture corporelle dans ses articles 316 et 388 mais n’érige pas les actes de torture et de mauvais traitement en infraction autonome. Toutefois, le projet de nouveau code pénal prévoit en son article 123 d’incriminer la torture et les mauvais traitements

189.Les articles 5 et 6 de la loi n°15/2004 du 12 juin 2004 portant mode et administration de la preuve interdit l’utilisation, en cas d’instruction, de la torture et autre pratique semblable, comme moyen de collecte des témoignages. L’article 5 dispose que: «[e]st interdit la preuve par mixture, par ordalie, divination, par envoûtement ou par tout autre moyen de caractère magique, mythique, ésotérique ou superstitieux» tandis que l’article 6 dispose que: «[i]l est interdit de ligoter, de fouetter ou de recourir à la torture ou au lavage de cerveau ou à tout acte cruel ou dégradant pour extorquer l’aveu des parties ou la déposition des témoins».

190.D’autres lois particulières réprimant la torture et les autres actes inhumains causant intentionnellement des souffrances ou atteintes graves à l’intégrité physique et mentale ont été adoptées, notamment la loi n°33 bis/2003 réprimant le crime de génocide et des crimes contre l’humanité, la loi n° 27/2001 du 28 avril 2001 relative aux droits et à la protection de l’enfant contre les violences.

191.En raison de graves conséquences psychologiques et physiques pour la victime de la torture, la prévention revêt d’une importance primordiale pour le Rwanda. Dans ce cadre, des formations en matière de lutte contre la torture sont dispensées notamment aux agents de la police, au personnel judiciaire impliqué dans la poursuite de tels crimes, aux médecins ainsi que dans les écoles. Les campagnes de sensibilisation ont été menées par les institutions de l’État et les organisations non gouvernementales locales et internationales, dont FACT, AVEGA, HAGURUKA, etc., dans une perspective de prévention à long terme.

192.Il convient de préciser que le Rwanda n’est pas partie à la Convention contre la torture, mais les autorités rwandaises, dans leur but de bâtir un État de droit fondé sur le respect des libertés et droits fondamentaux de la personne, ont entamé le processus de ratification de cette convention et de tous les instruments internationaux s’inscrivant dans le même contexte.

III.8 Interdiction de l’esclavage, de la servitude et du travail forcé (art. 8 du Pacte)

III.8.1 Interdiction de l’esclavage et de la servitude

193.L’esclavage est la non reconnaissance de la personnalité juridique de l’individu et implique la privation de tous ses droits pour le réduire en objet. La législation rwandaise interdit et punit toute négation de l’être humain jusqu’à le réduire en objet.

194.En cette matière, la Constitution de la République du Rwanda consacre un bon nombre de principes qui affirment que la personne humaine est sacrée et inviolable (art. 10) et que l’État et tous les pouvoirs publics ont l’obligation absolu de la respecter, la protéger et la défendre.

195.Pour renforcer cette position, la loi n°42/1988 du 27 octobre 1988 portant titre préliminaire et livre premier du Code civil reconnaît la personnalité juridique de la personne physique lorsqu’en son article 15 précise que «[l]a personne humaine est sujet de droit à partir de sa naissance jusqu’à sa mort».

196.Le projet du nouveau code pénal réprime la traite des personnes (art. 241), la vente et l’exploitation sexuelle des enfants (art. 248), la traite des esclaves (art. 242) et le trafic d’organes humains (art. 255).

197.Plusieurs instruments internationaux interdisant l’esclavage ont été ratifiés par le Rwanda. Il s’agit notamment de:

La Convention relative à l’esclavage de 1926 amendée par le protocole du 7 décembre 1953, approuvée par la loi belge du 18 juillet 1927 (Moniteur belge du 28 octobre 1927);

La Convention pour la répression de la traite des êtres humains et de l’exploitation de la prostitution d’autrui; ratifiée par l’A.P n° 161/01 du 31 décembre 2002(J.O n°12 ter du 15 juin 2003;

Le Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes en particulier des femmes et des enfants (voir point III. 6 ci-dessus).

198.Un projet de loi visant l’intégration des dispositions de ces instruments internationaux dans la législation interne est en cours d’adoption au Parlement.

III.8.2 Interdiction du travail forcé

199.Le travail forcé est entendu comme «tout travail d’un individu sous menace d’une peine quelconque ou pour lequel l’individu ne s’est pas offert de plein gré». Le libre choix du travail est un principe constitutionnel (art. 37). Le Code du travail rwandais en son article premier reprend cette définition en affirmant que le travail forcé est «tout travail ou service exigé d’un individu sous la menace d’une peine quelconque et pour lequel ledit individu ne s’est pas offert de plein gré». Ce même code interdit tout travail forcé ou obligatoire de façon absolue (loi n°31/2001 du 30 décembre 2001 portant Code du travail).

200.Dans le cadre d’exploitation des mineurs par les adultes la loi n°27/2001 du 28 avril 2001 relative aux droits et la protection de l’enfant contre les violences protège ces derniers contre les travaux qui comportent des risques susceptibles de compromettre leur éducation ou de nuire à leur santé et leur développement physique (art. 18). C’est dans ce cadre, que le Ministère à la primature chargé de la promotion de la famille et du genre et le Ministère de la fonction publique et du travail, en collaboration avec leurs partenaires dans leur programme, procèdent à des activités de sensibilisation visant à supprimer totalement le travail des enfants, notamment les enfants orphelins et non accompagnés.

201.Le Rwanda est également partie aux conventions de l’Organisation internationale du Travail (OIT) dont:

La Convention n°29 concernant le travail forcé, ratifiée par l’AP n°26/01 du 10 novembre 2000(J.O n°24 du 15 décembre 2000);

La Convention n°24 concernant le travail forcé, ratifiée par l’AP n°24/01 du 10 novembre 2000 (J.O n° 24 du 15 décembre 2000);

La Convention n° 182 concernant l’interdiction de pires formes de travail des enfants et l’action immédiate en vue de leur élimination, ratifiée par l’AP n°159/01 du 31 décembre 2002 (J.O n°12 ter du 15 juin 2003.

202.Toutefois, le Code du travail en son article 4 reconnaît certaines exceptions à la liberté au choix du travail. Il s’agit notamment du travail exigé d’un individu comme conséquence d’une condamnation judiciaire, du travail ou service exigé en vertu des dispositions régissant le service militaire et du travail organisé par les collectivités locales lorsque ces travaux ou services ont été approuvés par la population ou les représentants directs de celle-ci. Il s’agit également des travaux d’intérêt général effectués comme peine alternative à la peine d’emprisonnement prévue par l’arrêté présidentiel n°10/01 du 7 mars 2005 dans le cadre de l’exécution des peines résultant des infractions du génocide.

III.9 Le droit à la liberté et à la sécurité (art. 9 à 13 du Pacte)

203.La liberté et la sécurité de la personne sont sous la protection de la Constitution de la République du Rwanda qui les garantit contre toutes les atteintes possibles. Le principe général de liberté est consacré par l’article 18 qui dispose que « [l]a liberté de la personne est garantie par l’État. Nul ne peut être poursuivi, arrêté, détenu ou condamné que dans les cas prévus par la loi en vigueur au moment de la commission de l’acte».

204.Le droit à la liberté garanti par la Constitution, implique le droit de libre circulation et du libre établissement à l’intérieur du pays. Il implique également le principe de la présomption d’innocence qui suppose que toute personne accusée d’une infraction est présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité soit légalement et définitivement établie à l’issue d’un procès public et équitable au cours duquel toutes les garanties nécessaires à sa défense lui auront été accordées (art. 19 de la Constitution). Aussi longtemps que saculpabilité n’est pas établie, le prévenu n’est même plus tenu de fournir la preuve de son innocence.

205.Le droit d’asile est aussi reconnu par la Constitution (art. 25) sous réserve des conditions définies par les lois en vigueur et aucun Rwandais ne peut être contraint à l’exil ou à l’extradition.

206.Le droit à la liberté et à la sécurité garanti par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques consolidé par la Constitution et par d’autres dispositions législatives, notamment la loi n° 13/2004 du 17 mai 2004 telle que modifiée et complétée par la loi n°20/2006 portant Code de procédure pénale, qui a rendu les conditions d’arrestation et de détention très strictes, notamment en réduisant la durée d’arrestation et de détention pour besoin d’enquête par la police et par le parquet (art. 37 et 96). Ainsi, en matière de garde à vue, le procès verbal d’arrestation établi par l’officier de la police judiciaire n’est valable que pour une durée de 72 heures sans possibilité de prorogation tandis que le mandat d’arrêt délivré par le l’officier du ministère public n’est valable que pour sept jours. La comparution devant le juge afin qu’il se prononce sur la détention a lieu au plus tard en 72 heures après la délivrance du mandat d’arrêt et sa décision doit intervenir au plus tard en 24 heures à compter de la saisine. L’ordonnance autorisant la mise en détention provisoire doit préciser les circonstances qui la justifient. Elle est valable pour 30 jours, renouvelable chaque mois, sans possibilité de prorogation au-delà de six mois.

207.Le Code de procédure pénale prévoit la possibilité de caution constituée soit en somme d’argent, soit en une personne intègre et solvable ainsi que la possibilité de transaction pour une infraction dont la peine ne dépasse pas deux ans d’emprisonnement. L’article 89 de la loi portant Code de procédure pénale telle que modifiée et complétée dispose que lorsque survient un cas de détention illégale opérée par un officier de police judiciaire ou un officier du ministère public, toute personne intéressée peut demander au juge de la juridiction compétente la plus proche du lieu de la détention d’ordonner à l’auteur de la détention illégale de comparaître devant lui en compagnie du détenu pour expliquer les motifs et les circonstances de la détention. La loi permet également au juge de réprimer immédiatement et sans désemparer l’auteur de la détention illégale, au moment même où il ordonne la liberté provisoire (art. 89). Ces dispositions sont de stricte application.

208.Le respect du principe de la liberté et de la sécurité est la préoccupation de la République du Rwanda notamment après le génocide de 1994. Suite à ce génocide, le Rwanda a été confronté au problème particulièrement complexe de devoir juger plusieurs milliers de personnes suspectées d’y avoir participé. Dans ce contexte, environ 120 000 personnes se sont retrouvées en détention provisoire en attendant que leurs dossiers soient instruits par les juridictions compétentes.

209.Pour éviter que les personnes ne soient détenues au-delà de la durée dont ferait l’objet leur condamnation, il a été demandé par le communiqué du 1er janvier 2003 émanant de la Présidence de la République, qu’il soit régulièrement procédé, conformément à la législation en vigueur, à la libération provisoire des détenus poursuivis pour génocide ayant fait recours aux aveux dont la durée de détention pouvait dépasser la peine prévue pour les infractions pour lesquelles ils sont poursuivis. Cette mesure est également appliquée aux mineurs âgés entre 14 et 18 ans lors de la commission du génocide, aux vieillards âgés de plus de 70 ans et aux détenus atteints des maladies chroniques et incurables. Cette mesure a été étendue aux détenus poursuivis pour une infraction de droit commun dont la durée de la peine risquerait d’être supérieure à celle qu’ils risqueraient d’encourir après condamnation. Ce rappel à la justice est appliqué chaque année depuis 2003. Ainsi, 59 919 détenus viennent d’en bénéficier dont 24 903 en 2003, 4 500 en 2004, 20 859 en 2005 et 9 276 en 2006. Leur réinsertion dans la société nationale passe par une structure de rééducation qui s’avère efficace.

210.Sous peine de s’exposer aux sanctions résultant de la détention illégale, les autorités judiciaires et pénitentiaires veillent à ce que personne ne passe en détention une durée supérieure, même d’une journée, à la durée d’emprisonnement que la loi ou une décision judiciaire lui assigne.

211.Le droit à la liberté implique enfin la liberté d’établissement. À cet égard, tout Rwandais a le droit de se fixer librement sur le territoire et le droit de quitter librement son pays et d’y revenir (art. 23 de la Constitution).

212.Les pièces administratives de voyage telles que le passeport et le laissez-passer sont délivrées à la demande de l’intéressé dans le plus bref délai possible. À l’intérieur du territoire aucun document n’est exigé.

213.Cette liberté de mouvement ne peut être limitée que par une loi pour des raisons d’ordre public ou de sécurité de l’État pour parer à un danger public ou protéger des personnes en péril (art. 23 de la Constitution). Aucune limitation légale n’est en vigueur;

214.Les droits des étrangers sur le territoire rwandais sont garantis par la Constitution en son article 42 qui précise que tout étranger se trouvant régulièrement sur le territoire de la République du Rwanda jouit de tous les droits à l’exception de ceux réservés aux nationaux (art. 42 de la Constitution);

215.Le droit d’asile est reconnu par la Constitution (art. 25). Un Conseil national pour les réfugiés a été créé pour s’occuper des questions des réfugiés. Ses attributions sont notamment d’examiner les dossiers de demande du statut de réfugié, de se prononcer sur ces dossiers et de veiller au respect des droits des réfugiés. La loi n°34/2001 du 5 juillet 2001 sur les réfugiés telle que modifiée à ce jour dispose en son article 22 que: «[t]oute personne dont la qualité de réfugié est reconnue a les droits et libertés prévus dans les instruments juridiques internationaux relatifs aux réfugiés ratifiés par le Rwanda, notamment le droit à un traitement non discriminatoire, le droit d’ester et d’être représenté en justice, le droit à un emploi, le droit au logement...»;

216.L’extradition des étrangers n’est autorisée que dans les limites prévues par la loi ou les conventions internationales auxquelles le Rwanda est partie (art. 25 de la Constitution);

217.En ce qui concerne le traitement des personnes légalement privées de liberté, la loi n°38/2006 portant création et organisation du service national des prisons détermine les principes fondamentaux renforçant les droits de toute personne incarcérée tels que prévus par la Constitution de la République du Rwanda et les conventions internationales ratifiées par le Rwanda.

218.L’article 20 de cette loi prescrit que l’incarcération dans une prison s’exerce conformément aux principes et objectifs suivants:

Aider le prisonnier à se repentir et à changer de conduite;

Respecter les droits de la personne incarcérée tels que garantis par la Constitution et les conventions ratifiées par le Rwanda;

Assurer le respect de la vie, l’intégrité physique et morale ainsi que le bien être de la personne incarcérée;

Garantir la sécurité de toute personne incarcérée jusqu’à son élargissement;

Aider à travers l’amélioration de ses connaissances et compétences, la personne incarcérée à se rendre utile au pays et à elle-même.

219.L’article 23 prescrit que la personne incarcérée doit être traitée dans la dignité et le respect des droits de la personne humaine. Il la protège contre toute sorte de traitements cruels, de torture et contre tout autre traitement inhumain ou dégradant.

220.Bien qu’on enregistre une grande population carcérale consécutive au génocide, des améliorations sensibles sont de plus en plus apportées au respect des les droits de l’enfant dans le cadre de l’internement. Ainsi, les droits aux soins médicaux, à l’alimentation et à l’assistance judiciaire sont accordés à tout enfant détenu sans distinction aucune et des blocs séparés des adultes ont été aménagés. Un accent particulier a été mis sur la situation des nourrissons vivant avec leurs mères détenues, car un régime alimentaire amélioré leur est accordé par l’administration pénitentiaire. À l’âge de 3 ans l’enfant, est remis à sa famille pour permettre son épanouissement. Si l’enfant n’a pas de famille devant l’accueillir, l’État lui cherche un lieu d’accueil (art. 25 de la loi n°38/2006).

221.Dans le domaine de la formation, les cours d’alphabétisation ou de leçons d’école primaire et d’apprentissage de métiers sont dispensés par d’autres détenus.

222.Dans les lieux de détention, les femmes privées de liberté bénéficient des locaux spéciaux séparés des locaux des hommes et sont surveillées par un personnel de sexe féminin (art. 25 de la loi n°38/2006). Face aux viols et à tout autre mauvais traitement pratiqués dans les prisons par les détenus eux-mêmes ou par les agents de sécurité, un règlement intérieur des établissements pénitentiaires a été élaboré et doit être observé sous peine de sanctions sévères en cas d’indiscipline.

223.Une femme enceinte ou allaitante incarcérée bénéficie d’un traitement approprié.

224.Quant à la santé des détenus, toutes les prisons disposent d’infirmeries qui dispensent des soins et les médicaments de base aux détenus, les cas particuliers sont transférés dans des centres médicaux proches (art. 27 de la loi n°38/2006). Les soins médicaux sont en principe à charge de l’État mais les détenus bénéficient également de l’appui, notamment, du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) pour les médicaments de première urgence. Dans certains centres de détention, une mutuelle de soins de santé a été mise en place à laquelle chaque détenu est tenu d’adhérer. Toutefois, les détenus indigents bénéficient de soins médicaux gratuits.

225.Sans préjudice de l’ordre public, la personne incarcérée a le droit de recevoir des visites de sa famille ou de ses amis pendant les heures et jours autorisés et d’échanger verbalement les informations avec eux en public, en présence d’un surveillant ou de tout autre agent de prison habilité. Elle a également le droit de recevoir la visite de son avocat pendant les heures de service et d’échanger librement des informations soit par écrit soit verbalement (art. 28 de la loi n°38/2006). Si la personne incarcérée est expatriée, elle reçoit dans une langue qu’elle comprend des explications sur les lois régissant les personnes incarcérées. Elle a le droit de rencontrer ou d’échanger des informations avec la représentation diplomatique de son de son pays. Quand il s’agit d’un expatrié dont le pays d’origine n’a pas de représentation au Rwanda, le réfugié ou l’apatride, peut recevoir l’assistance des représentants d’un autre pays ou d’une organisation internationale de son choix qui accepte de faire le suivi de son cas (art. 34 de la loi n°38/2006).

226.Les bonnes conditions de détentions posées par l’article 26restent parfois au dessous des capacités du pays mais constituent un objectif à atteindre dans le plus court délai possible.

III.10 Droit à un procès équitable (art. 14 du Pacte)

227.Ce droit comprend des règles consacrées aussi bien par les dispositions constitutionnelles que les dispositions légales ou réglementaires. Ces règles sont notamment le droit à un tribunal, le droit à un procès indépendant et impartial, le droit d’être informé sur son dossier, le droit à la présomption d’innocence, le droit d’être assisté par un défenseur de son choix, le droit à l’égalité des armes et du principe du contradictoire, le droit au silence, le droit à un procès public, le droit d’être jugé dans un délai raisonnable, le droit à un jugement motivé, etc.

228.De manière générale, la politique du Gouvernement rwandais vise à atteindre dans l’ensemble une justice efficace, rapide, équitable et accessible à tous. C’est la raison même de la réforme judiciaire entreprise depuis les années 1999.

229.Les voies de recours efficaces et effectives pour violation des droits sont reconnues aux administrés sans distinction aucune. Elles peuvent être adressées aux instances judiciaires compétentes ou aux autorités administratives hiérarchiquement supérieures et aux institutions indépendantes de sauvegarde des droits de l’homme (Commission nationale des droits de la personne, Office de l’Ombudsman). À titre d’exemple, depuis la création de l’Office de l’Ombudsman en 2003, cette institution vient d’examiner plusieurs cas d’injustice et beaucoup d’entre eux ont trouvé des solutions. Au cours de l’année 2005, l’Office a reçu 3 056 plaintes relatives à l’injustice dont 2 257 ont trouvé solutions soit formellement ou directement lors des entretiens ou en réunions de l’Office avec les services concernés tandis qu’au cours de l’année 2006, l’Office a reçu 961 plaintes dont 459 ont trouvé solutions, 203 envoyées aux services concernés et 299 en cours d’examen.

230.Dans le but de garantir le droit à un tribunal, l’article 18 de la Constitution du 4 juin 2003 dispose que: «Nul ne peut être distrait contre son gré, du juge que la loi lui assigne»

231.Le droit d’être informé sur la nature et les motifs de l’accusation ainsi que le droit à la défense sont les droits absolus à tous les états et degrés de la procédure devant toutes les instances administratives et judiciaires et devant toutes les autres instances de prise de décision.

232.Le droit à la défense n’autorise aucune espèce de restriction même pour les citoyens les plus démunis; qu’il s’agisse des défendeurs ou des plaignants.

233.Unnouveau projet de loi modifiant l’actuelle loi portant création du Barreau du Rwanda met en exergue l’idée de l’aide judiciaire et fait obligation aux avocats d’assurer l’assistance des personnes sans ressources ou jugées indigentes. Ce projet de loi prend soin de rappeler aux avocats de répondre aux nouveaux impératifs tendant à promouvoir une justice équitable. C’est sous cet angle que ce projet interdit à l’avocat de faire usage de la corruption ou de se livrer à des activités commerciales. Et pour suivre le pas franchi avec la réforme judicaire, ce projet impose aux candidats avocats des conditions de performance de haut niveau afin de mettre en équilibre les acteurs de la justice et d’assurer l’égalité des armes.

234.En ce qui concerne la garantie de publicité du procès, la législation et la pratique judiciaire vont dans le même sens que les dispositions du paragraphe premier de l’article 14 du Pacte. En effet, la loi portant Code d’organisation, fonctionnement et compétence judiciaires telle que modifiée à ce jour par la loi n°14 /2006 du 22 mars 2006 (J.O n° spécial du 23 mars 2006), dispose en son article 167 que « [l]es audiences des cours et tribunaux sont publiques, sauf le huis clos prononcé par jugement en cas de danger pour ordre public ou pour les bonnes mœurs».

235.L’article 145 du Code de procédure pénale pose également le principe de la publicité des audiences mais que la juridiction peut ordonner le huis clos, après avoir constaté par jugement que la publicité est dangereuse pour l’ordre public ou les bonnes mœurs. Le même article dispose que, dans tous les cas, le prononcé doit être public.

236.Les articles 59 et 60 de la loi n°18/2004 du 20 juin 2004 portant Code de procédure civile, commerciale, sociale et administrative, telle que modifiée à ce jour par la loi n°09/2006 du 2 mars 2006 (J.O n° spécial du 5 avril 2006), quant à eux, posent le principe que les débats à l’audience sont contradictoires et publics à moins que la juridiction de jugement ne décide le huis clos d’office ou à la demande de l’une des parties pour sauvegarder l’ordre public, les bonnes mœurs ou l’intimité de la vie privée. Mais dans ce cas, la juridiction prononce le huis clos par décision motivée.

237.En matière civile les parties comparaissent en personne ou par conseil (art. 42 Code de procédure civile, commerciale, sociale et administrative) tandis qu’en matière de crime et de délit le prévenu comparaît en personne. Toutefois, la juridiction pourra toujours autoriser la représentation du prévenu qui se trouve dans l’impossibilité absolue de comparaître en personne (art. 139 du Code de procédure pénale).

238.Le procès équitable renvoie également au droit à un tribunal indépendant et impartial. L’indépendance du tribunal interdit toute intervention du pouvoir exécutif dans les affaires judiciaires surtout en ce qui concerne l’environnement du juge et sa carrière. L’indépendance de la justice est consacrée par la Constitution de la République à l’alinéa 2 de l’article 140 qui énonce que «le pouvoir judiciaire est indépendant et séparé du pouvoir législatif et du pouvoir exécutif». Il jouit d’une autonomie de gestion administrative et financière. L’indépendance des juges est également assurée. Ils sont pleinement indépendants et ne sont soumis dans l’exercice de leurs fonctions qu’à l’autorité de la loi. Ils apprécient souverainement les causes dont ils sont saisis et décident de la suite à leur donner indépendamment de toute pression (art. 22 de loi n°6 bis/2004 du 14 avril 2004 portant Statut des juges et des agents de l’ordre judiciaire). Cette indépendance est consolidée par le rôle joué par le Conseil supérieur de la magistrature dans leur désignation à l’exception du Président et du Vice-Président de la Cour suprême désignés par le Sénat.

239.Après désignation, les juges nommés à titre définitif sont inamovibles; ils ne peuvent être suspendus, mutés, même en avancement, mis en retraite ou démis de leurs fonctions sauf dans les cas prévus par la loi.

240.Pour éradiquer la corruption dans les instances judiciaires, des services d’inspection ont été instaurés auprès de la Cour suprême et du parquet général de la République.

241.La loi n°23/2003 du 07 août 2003 relative à la répression de la corruption et des infractions connexes constitue la base légale de répression.

III.11 Le droit à la personnalité juridique et à la vie privée (art. 16 et 17 du Pacte)

242.La reconnaissance de la personnalité juridique de la personne physique ou morale est expressément établie par la loi. La loi n° 42/1998 du 27 octobre 1988 portant titre préliminaire et le livre premier du Code civil dispose en son article 15 que «[l]a personne humaine est sujet de droit à partir de sa naissance». En droit rwandais le Code civil affirme que la personnalité juridique de l’être humain commence dès la naissance mais que l’enfant tout simplement conçu jouit de ces mêmes droits toutes les fois que son intérêt l’exige. Ainsi l’avortement et la publicité des moyens abortifs sont punis par le Code pénal en ses articles 325 à 228 et 379.

243.La législation rwandaise reconnaît également la personnalité juridique à des groupements juridiques dont les sociétés (la loi du 12 février 1998 portant organisation des sociétés commerciales), à des coopératives (loi du 12 octobre 1988 relative aux coopératives) et les associations sans but lucratifs ayant pour objet un meilleur accomplissement des fins de l’être humain et de l’utilité sociale (la loi n°20/2000 du 26 juillet 2007).

244.La vie privée de tous les habitants du Rwanda est protégée par la Constitution en son article 22 qui dispose que: «[n]ul ne peut faire objet d’immixtion arbitraire dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance ni d’atteinte à son honneur et sa réputation. Le domicile d’une personne est inviolable. À défaut de son consentement, nulle perquisition ou visite domiciliaire ne peut être ordonnée que dans les cas et selon les formes prévues par la loi». En cette circonstance l’officier de la police judiciaire qui constate que la preuve ne peut être acquise que par papiers, documents ou autres pièces ou autre effets en possession de l’auteur présumé ou d’un tiers, ne peut procéder à des visites et perquisitions que sur mandat délivré par un Officier du ministère public.

245.Le secret de la correspondance et des communications ne peut faire l’objet de dérogation que dans les formes prévues par la loi. Sa violation est punie par le Code pénal dans ses articles 215 et 216.

III.12 La liberté de pensée, d’opinion, de conscience et de religion (art. 18 à 21du Pacte)

246.La liberté de pensée, d’opinion, de conscience et de religion est prévue par la Constitution en son article 33 qui dispose: «[l]a liberté de pensée, d’opinion, de conscience, de religion, de culte et de leur manifestation publique est garantie par l’État dans les conditions définies par la loi».

III.12.1 La liberté de pensée et d’opinion

247.La liberté de pensée et d’opinion est reconnue aux politiciens et aux formations politiques par Constitution et la loi organique n°16/2003 du 27 juin 2003 régissant les formations politiques et les politiciens.

248.Les formations politiques se forment et exercent leurs activités librement et concourent à l’éducation politique démocratique des citoyens. Mais, elles ne doivent pas porter atteinte à la Constitution, aux lois, à l’ordre public et à l’unité nationale (art. 52 de la Constitution et l’article 2 de loi organique n°16/2003). C’est ainsi qu’il est interdit aux formations politiques de s’identifier à une race, une ethnie, une tribu, une région, un clan, une religion, un sexe ou tout autre élément pouvant servir de base de discrimination.

249.À l’exception des juges, les officiers du ministère public, les membres des forces armées et de police ainsi que les membres du service national de sécurité, tout Rwandais âgé de 18 ans révolus est libre d’adhérer ou de ne pas adhérer à une formation politique (art. 59 de la Constitution et l’article 4 et 16 de la loi organique n°16/2003).

250.La presse est régie par la loi n°18/ 2002 du 11 mai 2002 reconnaissant aux particuliers le droit de créer une entreprise de presse audio et audiovisuelle, qui jusqu’à tout récemment était le monopole de l’État. Cependant, après la mise en place de la loi n° 18/2002 favorable à la libéralisation de la presse écrite et audiovisuelle, nous assistons actuellement à l’évolution de la presse écrite (des journaux) et l’implantation des radios privées et communautaires.

251.Au Rwanda, circulent actuellement plus de 47 journaux dont 26 sont en publication depuis 1994 et 13 autres depuis 2005.

252.Quatorze radios privées émettentet plusieurs de leurs détenteurs comptent ouvrir des chaînes de télévision très prochainement.

253.Hormis la Radionationale qui émet dans le pays depuis 1961, les autres radios ont débuté leurs émissions en 2003.

254.Les médias internationaux dont British Broadcasting Corporation (BBC), Voice of America (VOA), Radio Detchewelle, témoignent également de la liberté d’opinion et d’expression.

255.Le Haut Conseil de la Presse ayant pour objectif de promouvoir la liberté de la presse et de mettre en place des mécanismes de régulation équitable est prévu par la Constitution en son article 34. Il est opérationnel depuis 2003 et ses missions principales sont bien définies dans la Constitution. Il s’agit de:

Garantir la liberté et la protection de la presse;

Veiller au respect de la déontologie en matière de la presse;

Veiller à ce que les partis politiques et les associations aient un accès équitable aux moyens officiels d’information et de communication;

Donner des avis sur les autorisations d’installation des entreprises de presse et audiovisuelles;

Donner des avis sur les décisions de suspension, d’interdiction de publication d’un journal ou d’un périodique ou de fermeture d’une station de radiodiffusion, de télévision ou dune agence de presse;

Délivrer ou retirer la carte de presse.

256.La Constitution ne prévoit des restrictions à la liberté d’expression et d’information qu’en raison du maintien de l’ordre public et des bonnes mœurs, de la protection des jeunes et des enfants ainsi que du droit dont jouit tout citoyen à l’honneur, de la bonne réputation et de la préservation de l’intimité de la vie personnelle et familiale (art. 34, al. 2). C’est ainsi que malgré l’existence d’une grande liberté d’opinion et d’expression dans le pays, toute propagande en faveur de la guerre ou l’incitation à la guerre constitue un délit prévu et puni par le Code pénal en ses articles 164 à 177.

257.La Constitution interdit également toute propagande à caractère ethnique, régionaliste, raciste ou fondée sur toute autre forme de division.

258.Le droit à l’information est développé par la politique du Gouvernement de promouvoir la technologie de la communication et de l’information. L’accès à l’Internet et à l’intranet et leur utilisation font partie des pratiques courantes des institutions étatiques et privées ainsi que des individus.

259.Néanmoins les défis suivants sont à lever:

Un manque de professionnalisme dans le journalisme qui engendre la commission des délits de presse;

Les difficultés liées à l’accès à l’information;

La dépendance matérielle des entreprises de presse et des journalistes;

Le coût élevé de l’impression.

260.Les mesures pour faire face à ces problèmes sont envisagées, notamment la création d’un centre de formation continue pour les journalistes, la facilitation à l’accès à l’information et l’exonération des matériaux d’impression.

261.La liberté de pensée reconnue par le Pacte est une faculté qui n’a pas besoin d’être protégée par voie légale puisque la pensée, tant qu’elle n’est pas exprimée, n’est pas répréhensible et, quant elle l’est, relève de la liberté d’expression et d’opinion, consacrée par l’article 33 de la Constitution.

III.12.2 La liberté de conscience et de religion

262.Dans la législation rwandaise, la liberté de conscience et de religion se manifeste sur deux plans: la liberté d’adhérer et de manifester publiquement sa religion. La liberté de former une confession religieuse relève de la liberté d’association dont les modalités de formation et d’adhésion sont régies par la loi n°20/2000 du 26 juillet 2000 régissant les associations sans but lucratif (J.O n°7 du 1 avril 2001).

263.La liberté de conscience et de religion ne se manifeste pas seulement en droit et dans la conduite de l’État. Une tolérance religieuse particulière est aussi manifeste dans la culture rwandaise et au sein des cultes. D’une manière générale, il existe un profond respect pour les confessions religieuses d’autrui qui crée un climat de coexistence harmonieuse. Les différents cultes trouvent leur place dans la société rwandaise en acceptant que d’autres délivrent un message différent. L’État présente une position de laïcité et il n’existe pas de religion d’État (art. premier de la Constitution).

264.La liberté des parents et des enfants est respectée quant au choix d’instruction religieuse.

265.Pour garantir ce droit, le Code pénal rwandais tel que modifié à ce jour (loi n° 08/1983 du 10 mars 1983, J.O 1983) en ses articles 293 à 296 punit des atteintes à la liberté des cultes.

III.13 La liberté de réunion et d’association (art. 21 et 22 du Pacte)

III.13.1 La liberté de réunion (art. 21 du Pacte)

266.D’après l’article 36 de la Constitution, l’État rwandais garantit la liberté de réunion. Cette liberté implique le droit de se rassembler en des réunions pacifiques et sans armes. La législation rwandaise fait distinction entre les réunions publiques et privées. Les réunions privées sont celles qui se tiennent dans un lieu fermé ou d’habitation auxquels ont accès des personnes qui ont été invitées ou convoquées. Sont publiques les réunions qui se tiennent en un lieu ouvert au public. Ce sont ces dernières qui font l’objet de restriction.

267.Mais, les restrictions à apporter à ce droit sont seulement celles qui sont légales et qui sont admises dans une société démocratique. Elles sont surtout liées à l’intérêt de l’ordre et de la sûreté publics ou à la protection de la santé, des droits et libertés d’autrui et de la moralité publique. D’après la Constitution rwandaise, l’autorisation préalable n’est prescrite que par une loi et uniquement pour des rassemblements en plein air, sur la voie publique ou dans les lieux publics et pour autant que des raisons de sécurité, d’ordre public ou de salubrité l’exigent (art. 36 de la Constitution).

III.13.2 La liberté d’association (art. 22 du Pacte)

268.La Constitution de la République du Rwanda consacre pleinement la liberté d’association. Pour s’associer, aucune autorisation préalable n’est exigée. Cependant, cette liberté s’exerce dans les conditions prescrites par la loi (art. 35).

269.La Constitution et d’autres lois en vigueur protègent également les sociétés (la loi du 12 février 1988 portant organisation des sociétés commerciales, J.O, 1991), les coopératives (la loi du 12 octobre 1988 relative aux coopératives, J.O, 1989), et d’autres associations ayant pour objet un meilleur accomplissement des fins de l’être humain et de l’utilité sociale (la loi n°20/2000 du 26 juillet 2000 relative aux associations sans but lucratif, J.O n°7, 2001).

270.L’article 3 de la loi n°20 /2000 de cette loi, donne droit à toute personne de s’associer ou de se retirer librement de l’association mais sa démission ou son retrait ne la décharge pas des obligations contractées ou des engagements pris envers l’association.

271.Dans sa politique de lutte contre la pauvreté, le Gouvernement encourage la population à s’associer en vue de la création d’institutions financières visant à améliorer sa situation économique.

272.En ce qui concerne le droit de créer des syndicats, l’article 38 de la Constitution prévoit que: «[l]e droit de former des syndicats pour la défense et la promotion des intérêts professionnels légitimes est reconnu. Tout travailleur peut défendre ses droits par l’action syndicale dans les conditions déterminées par la loi». Il ressort de l’alinéa 3 de cet article que la Constitution ne garantit pas seulement ce droit aux travailleurs mais également aux employeurs en prescrivant que «[t]out employeur a droit d’adhérer à une association des employeurs». Les syndicats des travailleurs et les associations des employeurs sont libres d’avoir des conventions générales ou spécifiques régissant leurs relations de travail (art. 33 de la Constitution).

273.Les syndicats travaillent en toute indépendance et ne peuvent pas être dissous ou suspendus par décision administrative, sauf sur la base de la volonté des membres réunis en assemblée générale ou sur décision judiciaire (art. 147 du Code du travail)

274.La Centrale des Syndicats des Travailleurs du Rwanda (CESTRAR) est l’organisation regroupant tous les syndicats de travailleurs, tandis que les employeurs sont réunis dans l’association des employeurs du Rwanda.

275.L’article 39 de la Constitution consacre également le droit de grève pour les syndicats de travailleurs et le lock-out pour les employeurs. Ces droits sont réglementés par la loi n° 21/2001 portant Code du travail et s’exercent dans les conditions définies par la loi. Leur exercice ne peut porter atteinte à la liberté du travail reconnu à chacun.

276.Cependant, il faut rappeler qu’en réalité les grèves de travailleurs ou d’agents de l’État sont très rares car les revendications éventuelles passent par d’autres voies, notamment de négociations avec les employeurs.

277.Outre les organisations de travailleurs et d’employeurs, la législation rwandaise protège un grand nombre d’associations et de d’organisations professionnelles dont l’ordre des médecins, ordre des avocats, le corps des huissiers professionnels, etc.

III.14 Le droit de prendre part à la direction des affaires publiques (art. 25 du Pacte)

278.La Constitution énonce le droit des citoyens de prendre part à la direction des affaires publiques, soit directement ou indirectement par l’intermédiaire des représentants, de voter et d’être élu aux organes de l’État.

279.L’article 2 de la Constitution dispose que: «[t]out pouvoir émane du peuple. Aucune partie du peuple ni aucun individu ne peut s’en attribuer. La souveraineté nationale appartient au peuple qui l’exerce directement par la voie du référendum ou par ses représentants» tandis que l’article 45 dispose que «[t]ous les citoyens ont le droit, conformément aux règles édictées par la loi de participer à la direction des affaires publiques de leur pays, soit directement, soit par l’intermédiaire de représentants librement choisis». Le droit de vote est considéré comme un droit qui légitime le système de gouvernement du Rwanda. En même temps, il traduit en pratique le principe selon lequel la souveraineté réside dans le peuple. Le droit de vote n’est pas seulement un droit mais aussi un devoir. Cependant, il s’agit d’une obligation morale pour les citoyens car il n’existe aucune sanction pour les citoyens qui ne se rendent pas aux urnes.

280.Pour être électeur il faut être rwandais, être âgé de 16 ans au moins et ne pas être frappé des interdictions civiques et d’incapacité prévues par la loi, notamment la minorité et la condamnation pénale. Le scrutin est libre et secret. Dans le local du bureau de vote sont disposés un ou plusieurs isoloirs afin que l’électeur puisse faire son choix secrètement. Le bureau de vote doit toujours expliquer à l’électeur la manière de procéder pour exprimer son choix.

281.Conformément à la Constitution, les procédures électorales sont conduites techniquement et administrativement par un appareil électoral indépendant appelé la Commission électorale. Par ces processus électoraux, le peuple rwandais s’est exprimé en mettant en place des institutions qui ont mis fin à la transition.

282.Il est procédé périodiquement aux élections jusqu’au plus haut niveau de l’administration: Président de la République, députés, les maires etc.

283.Outre la participation directe aux affaires publiques par l’exercice du droit de vote, la Constitution du Rwanda, en son article 53, donne droit d’adhérer aux formations politiques pour participer, par des méthodes démocratiques, à l’orientation politique du pays.

284.La participation du peuple rwandais à la gestion des affaires publiques est concrétisée notamment par les mécanismes de décentralisation qui suppose la délégation d’une grande partie des attributions du pouvoir central à des pouvoirs locaux de manière à permettre à la population de participer activement à la gestion de la chose publique.

285.Au niveau de la fonction publique, les conditions de participation sont liées à la compétence et à la capacité des participants. C’est que dispose l’alinéa 2 de l’article 45 de la Constitution «[t]ous les citoyens ont un droit égal d’accéder aux fonctions publiques de leur pays compte tenu de leur compétence et capacité». Le système de recrutement aux postes de responsabilité de l’État et à tous les emplois est fondé sur la compétition et offre des conditions d’égalité de chances entre tous les candidats.

286.Une Commission de la fonction publique, en cours de création, est chargée par la Constitution d’assurer le respect de ces principes.

III.15 Protection des minorités nationales (art. 27 du Pacte)

287.La minorité nationale désigne un groupe de personnes dans un État qui résident sur le territoire de cet État et en sont citoyens, qui entretiennent des liens anciens, solides et durables avec cet État, qui présentent des caractéristiques ethniques, culturelles, religieuses ou linguistiques spécifiques, qui sont suffisamment représentatives tout en étant moins nombreuses au reste de la population de cet État ou d’une région de cet État et qui sont animées de la volonté de préserver ensemble ce qui fait leur identité commune notamment leur culture, leurs traditions, leur religion ou leur langue.

288.Au Rwanda, il ne peut être identifié de minorité au sens de cette définition du terme. Le Gouvernement rwandais est conscient qu’il existe des communautés historiquement défavorisées qui méritent de bénéficier d’une attention particulière par rapport au reste de la population en vue de leur intégration socioéconomique totale. L’article 82 de la Constitution insiste sur les communautés nationales défavorisées en prévoyant une représentativité au parlement de huit membres nommés par le Président de la République qui veille à ce que cette représentation soit assurée.

289.Toutefois, compte tenu des raisons ayant entraîné le génocide rwandais de 1994, le Gouvernement s’interdit de reconnaître dans telle ou telle catégorie de population des communautés cherchant à s’identifier sous une forme ethnique ou sous un groupement quelconque tendant à se présenter comme ayant par naissance des droits que le reste de la population ne peut pas avoir.

290.Le programme national de lutte contre la pauvreté est un plan global de développement qui vise à relever l’économie de la population en commençant par les catégories les plus vulnérables indépendamment de leur appartenance ethnique, religieuse, régionale ou autres.

CONCLUSION

291.Ce troisième rapport sur la mise en œuvre des dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques marque la volonté du Rwanda de respecter les engagements internationaux qu’il souscrit. Cependant cette mise en œuvre ne s’est pas réalisée sans heurts, surtout dans les premières étapes vers la démocratisation, dont une longue période de régime caractérisée par la violation massive des droits de l’homme et d’impunité qui a abouti au génocide de 1994, négation totale des droits humains.

292.Les Rwandais dignes de leur patrie n’ont pas entendu longtemps pour réagir et trouver solution à cette situation de violation des droits humains. Ainsi le Gouvernement de transition mis en place après le génocide et les institutions mises en place après cette transition qui ont été décrites dans ce rapport ont pour mission principale d’instaurer un état de droit qui garantit le respect des libertés et des droits fondamentaux de la personne.

293.Ce parcours témoigne, quelles que soient les difficultés rencontrées dans la réalisation du Pacte, l’engagement du Rwanda de protéger et promouvoir les droits de l’homme en général contenus dans les instruments internationaux et régionaux et les droits civils et politiques en particuliers.

294.Même si le Rwanda se félicite des réalisations décrites dans ce rapport concernant la mise en œuvre des dispositions contenues dans le Pacte international relatif aux droits et politiques, il compte encore s’impliquer davantage pour les rendre plus effectives et accessibles à tous, car, il reconnaît que le Pacte ne garantit pas les droits purement théoriques et illusoires mais plutôt les droits effectifs et accessibles.

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