Nations Unies

CCPR/C/135/D/2981/2017

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

30 janvier 2023

Français

Original : anglais

Comité des droits de l’homme

Constatations adoptées par le Comité au titre de l’article 5 (par. 4) du Protocole facultatif, concernant la communication no 2981/2017 * , ** , ***

Communication soumise par :

Graham Cayzer (représenté par un conseil, Nigel Davidson)

Victime (s) présumée (s) :

L’auteur

État partie :

Australie

Date de la communication :

13 juillet 2016 (date de la lettre initiale)

Références :

Décision prise en application de l’article 92 du Règlement intérieur du Comité, communiquée à l’État partie le 24 mai 2017 (non publiée sous forme de document)

Date des constatations :

25 juillet 2022

Objet :

Expulsion vers le Royaume-Uni de Grande‑Bretagne et d’Irlande du Nord

Question ( s ) de procédure :

Ratione personae, ratione materiae, statut de victime, griefs non étayés

Question ( s ) de fond :

Liberté d’aller et venir ; arrestation arbitraire ; rétention ; droit de vote ; droit d’entrer dans son propre pays ; équité du procès ; vie de famille ; non bis in idem ; expulsion d’un national

Article ( s ) du Pacte :

9 (par. 1), 12 (par. 1 et 4), 14, 14 (par. 7), 15 (par. 1), 24 (par. 1) et 25 (al. b))

Article ( s ) du Protocole facultatif :

2 et 3

1.1L’auteur de la communication, datée du 13 juillet 2016, est Graham Cayzer, né en 1960 en Écosse (Royaume de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord). Il a émigré en Australie avec sa famille à l’âge de 5 ans. L’auteur déclare qu’en annulant son visa, en l’arrêtant, en le plaçant en rétention administrative et en l’expulsant vers le Royaume-Uni, l’Australie (l’État partie) a violé les droits qu’il tenait des articles 9 (par. 1), 12 (par. 1 et 4), 14, 15 (par. 1), 24 (par. 1) et 25 (al. b)). L’auteur est représenté par un conseil.

1.2La plainte a été enregistrée le 24 mai 2017. Le Comité, par l’intermédiaire de son Rapporteur spécial chargé des nouvelles communications et des mesures provisoires, a décidé de ne pas faire droit à la demande de mesures provisoires de l’auteur. Le 10 décembre 2017, l’auteur a été expulsé d’Australie vers le Royaume-Uni.

Rappel des faits présentés par l’auteur

2.1L’auteur est né au Royaume-Uni le 1er août 1960 de parents britanniques dont aucun n’a la nationalité australienne. La famille a émigré en Australie le 5 octobre 1965. Un visa de résident permanent a immédiatement été délivré à l’auteur, qui a vécu en Australie jusqu’à son expulsion vers le Royaume-Uni en décembre 2017. Il affirme avoir la double nationalité australienne et britannique, ayant acquis la nationalité australienne en 1981 lors d’une cérémonie au cours de laquelle il a prêté le serment d’allégeance. Il a également voté et brigué un mandat électif dans l’État partie. Il n’a pas renoncé à la nationalité britannique.

2.2Le 11 novembre 2011, la Cour suprême de Tasmanie a reconnu l’auteur coupable d’avoir entretenu des relations sexuelles avec une personne âgée de moins de 17 ans. Il a été condamné à quatre ans d’emprisonnement et a bénéficié d’une libération conditionnelle le 7 mai 2014.

2.3Le 27 octobre 2014, le Ministre de l’immigration a décidé d’annuler le visa transitoire (permanent) de l’auteur en application du paragraphe 2 de l’article 501 de la loi de 1958 sur les migrations, considérant que l’intéressé ne satisfaisait pas au « test de moralité ». Le 29 octobre 2014, l’auteur a été informé par les services de l’immigration qu’il devait se présenter à leurs bureaux à 9 heures le 31 octobre 2014 au plus tard. Il a également été informé que s’il ne se présentait pas dans les délais, les autorités demanderaient l’aide de la police pour le localiser et le placer en détention.

2.4Le 30 octobre 2014, l’auteur a introduit une requête ex parte d’urgence pour obtenir que soit rendue une ordonnance interdisant à l’État partie de le placer en rétention administrative jusqu’à ce que son statut quant à la nationalité de cet État soit déterminé. Le Tribunal administratif fédéral a fait droit à la requête de l’auteur. Aux termes de sa décision, l’auteur étant en liberté conditionnelle jusqu’en novembre 2015 suite à sa condamnation, tout manquement aux conditions de sa libération conditionnelle entraînerait son arrestation et son incarcération. Le Tribunal a donc estimé que le risque de fuite, s’il ne pouvait être totalement écarté, était négligeable et ne justifiait pas la modification du statu quo, en vertu duquel l’auteur n’était pas détenu. Toutefois, dans sa décision du 31 octobre 2014, le Tribunal administratif fédéral a autorisé l’État partie à relever appel de l’ordonnance rendue à son encontre. Le 12 novembre 2014, le Ministre a demandé l’annulation de l’ordonnance interdisant de placer l’auteur en détention. Le Tribunal administratif fédéral a fait droit à cette demande le 21 novembre 2014.

2.5Dans l’intervalle, le 13 novembre 2014, l’auteur a lui aussi saisi le Tribunal administratif fédéral d’appel, lui demandant de se prononcer sur la décision du Ministre d’annuler son visa de résident permanent au motif qu’ayant fait valoir qu’il avait acquis la nationalité en 1981 et qu’il ne pouvait être considéré comme un étranger dont le visa pouvait être annulé en application du paragraphe 2 de l’article 501 de la loi sur les migrations. Il contestait son placement en détention sur le même fondement. Il faisait valoir qu’il n’était pas un étranger lorsqu’il était entré en Australie parce qu’il était un sujet britannique et donc une « personne du Commonwealth ». Il faisait également valoir que depuis son arrivée dans l’État partie et en vertu de son droit de vote (ayant également brigué un mandat électif), il était devenu une personne du Commonwealth jouissant de la protection prévue à l’article 41 de la Constitution australienne.

2.6Le 23 novembre 2014, quatre policiers se sont présentés au domicile de l’auteur. N’ayant pas reçu de réponse après avoir frappé à la porte, ils ont brisé une fenêtre pour entrer de force. Constatant, après avoir fouillé les lieux, que l’auteur était absent, les policiers ont interrogé son fils, âgé de 6 ans, pour savoir où se trouvait son père. La police a fini par retrouver l’auteur alors qu’il circulait en voiture avec ses autres enfants ; ils l’ont contraint à s’arrêter, l’ont fait sortir de force du véhicule, l’ont arrêté et placé en garde à vue puis en détention au Centre de détention Maribyrnong, à Melbourne.

2.7Le 13 avril 2015, l’auteur a modifié sur le fond son recours contre l’annulation de son visa. Dans ce recours modifié, outre qu’il reprenait les motifs de sa demande initiale, l’auteur contestait la légalité de sa détention. Il demandait également que soit rendue une ordonnance d’habeas corpus pour mettre fin à sa rétention administrative. Le 8 décembre 2015, l’auteur a introduit une requête interlocutoire demandant à ce qu’il soit mis fin à sa rétention administrative. Le 18 décembre 2015, le Tribunal administratif fédéral a rendu une ordonnance rejetant la requête interlocutoire de l’auteur sollicitant son assignation à résidence.

2.8Le 13 juillet 2016, le Tribunal administratif fédéral a examiné la décision du Ministre d’annuler le visa de l’auteur, et a jugé que, selon toute probabilité, l’auteur n’avait pas démontré avoir obtenu la nationalité australienne en 1981 et qu’il ne relevait pas de la définition d’une personne du Commonwealth, et qu’il était donc un étranger auquel l’article 502 de la loi sur les migrations s’appliquait. Cela étant, l’auteur n’avait pas le droit de vote mais avait bénéficié d’un privilège législatif accordé à certains résidents permanents. Le Tribunal a donc jugé que les droits de l’auteur n’avaient pas été violés. L’auteur a relevé appel de cette décision devant la Cour fédérale plénière d’Australie. Le 18 août 2016, il a été transféré sur l’île Christmas.

2.9Le 14 décembre 2016, la Cour fédérale plénière a rejeté l’appel de l’auteur, confirmant la décision du Tribunal administratif fédéral. L’auteur a saisi la Haute Cour d’Australie d’une demande tendant à être autorisé à relever appel de la décision de la Cour fédérale plénière. Cette demandé a été rejetée par la Haute Cour d’Australie le 11 mai 2017, au motif que l’appel n’avait aucune chance raisonnable d’aboutir, dans la mesure où les motifs invoqués par l’auteur allaient à l’encontre de la jurisprudence contraignante.

2.10L’auteur renvoie à la jurisprudence du Comité selon laquelle l’« expulsion », à savoir le transfert forcé d’une personne d’un pays dans un autre, constitue une violation du droit à la liberté et à la sécurité et il affirme que son arrestation, son placement en détention et son transfèrement constituent cumulativement une « opération unique » revenant à l’enlever dans un pays pour le transporter dans un autre pays.

2.11L’auteur renvoie également aux constatations du Comité dans l’affaire Tillman c. Australie dans lesquelles le Comité a considéré que le maintien en détention d’une personne qui avait déjà purgé l’intégralité de sa peine constituait une détention arbitraire au sens de l’article 9 du Pacte. L’auteur relève que dans ses constatations, le Comité a confirmé que, pour ne pas que la détention soit qualifiée d’arbitraire, il devait être démontré qu’elle était raisonnable, nécessaire dans toutes les circonstances de l’espèce et proportionnelle aux buts légitimes de l’État partie. Si ces buts légitimes pouvaient être atteints par des mesures moins attentatoires que la détention, celle-ci était arbitraire. L’auteur affirme que son « pronostic de réadaptation complète est très bon » et qu’il « est actuellement considéré comme présentant un risque de récidive minimal ». Il affirme également qu’il a suivi tous les cours de réadaptation requis durant son séjour en prison.

2.12En ce qui concerne la proportionnalité de la détention par rapport à l’objectif légitime de protection du public, l’auteur fait valoir que l’État partie dispose, pour atteindre cet objectif, de nombreuses options moins contraignantes, notamment un soutien psychosocial permanent au sein de la communauté.

2.13L’auteur renvoie à la jurisprudence du Comité dans l’affaire A. c. Australie et à d’autres constatations, qui confirment qu’une détention prolongée et indéfinie comme celle que prévoit et autorise l’article 189 de la loi sur les migrations constitue une détention arbitraire. L’auteur cite également la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme confirmant le principe selon lequel la prolongation rétroactive d’une détention de sûreté est incompatible avec le paragraphe 1 de l’article 7 de la Convention européenne des droits de l’homme, relatif à la détention arbitraire.

2.14L’auteur affirme que son expulsion a eu pour effet collatéral de le séparer de sa mère, de son épouse et de ses enfants, qui résident tous en Australie, et de le déconnecter de ses réseaux sociaux et professionnels de longue date. Il affirme également qu’elle a effectivement rompu le lien qui l’unissait au pays dans lequel il avait grandi.

2.15L’auteur réaffirme qu’ayant participé à une cérémonie de citoyenneté en 1981 lorsqu’il s’est engagé dans les forces armées, il se considère comme un citoyen australien. Toutefois, même s’il n’était pas considéré comme tel, il résidait légalement dans l’État partie en tant que résident permanent et, cela étant, la décision d’annuler son visa, de l’arrêter, de le placer en détention et de l’expulser a violé le droit de circuler librement et de choisir librement sa résidence qu’il tenait de l’article 12 du Pacte.

2.16L’auteur fait valoir qu’il considère l’État partie comme son « propre pays » au sens du paragraphe 4 de l’article 12 du Pacte car, que l’État partie reconnaisse ou non officiellement qu’il a sa nationalité, la jurisprudence du Comité a établi que les personnes qui résident en permanence dans un pays, même si elles restent des nationaux d’un pays différent, jouissent du droit d’y circuler librement et d’y choisir librement leur résidence. L’auteur, invoquant les constatations du Comité dans l’affaire Stewart c. Canada, fait valoir qu’il a démontré son intention de résider en permanence dans l’État partie en demandant la nationalité de cet État, même si aucun certificat ne lui a jamais été délivré.

2.17L’auteur affirme que, outre les autres questions soulevées, les représentants de l’État partie ont pris des mesures contre lesquelles son fils aurait dû être protégé et il renvoie à cet égard au rapport d’un médecin, qui déclare que les enfants de l’auteur et sa mère ont commencé à être affectés par le départ de l’auteur.

Teneur de la plainte

3.1L’auteur affirme qu’il y a eu violation du droit à la liberté et à la sécurité de sa personne et du droit de ne pas faire l’objet d’une arrestation ou d’une détention arbitraire qu’il tenait de l’article 9 (par. 1) du Pacte.

3.2L’auteur affirme qu’il y a eu violation des droits qu’il tenait de l’article 12 (par. 1 et 4) du Pacte puisque, comme l’annulation de son visa n’était ni raisonnable, ni nécessaire ni proportionnelle à l’objectif légitime de l’État partie de protéger le public, elle ne remplissait pas les conditions qui, aux termes de l’article 12 (par. 3), doivent être réunies pour que les droits à la liberté de circuler librement et de choisir librement sa résidence dans « son propre pays » qu’il tenait de l’article 12 (par. 1 et 4) du Pacte puissent faire l’objet de restrictions.

3.3L’auteur affirme que l’État partie a violé les droits qu’il tenait de l’article 14 (par. 7) du Pacte car l’annulation de son visa et l’arrestation, la détention et l’expulsion qui en ont résulté reviennent à le punir de nouveau pour une même infraction. L’auteur note, en ce qui concerne le test de moralité, que l’État partie a utilisé une « procédure civile » en application de la loi sur les migrations pour le condamner à une nouvelle peine d’emprisonnement pour la même infraction, ce qui constitue selon lui une violation de l’article 15 du Pacte, qui consacre le principe non bis in idem.

3.4L’auteur fait donc valoir que l’annulation de son visa et l’arrestation, la détention et l’expulsion qui en ont découlé sur la base de sa condamnation antérieure reviennent à le condamner à une peine plus lourde que celle qui était applicable au moment où l’infraction a été commise et constitue donc une peine rétroactive, en violation de l’article 15 du Pacte.

3.5L’auteur fait valoir que l’État partie a violé les droits que son fils tenait de l’article 24 (par. 1) du Pacte en ne le protégeant pas adéquatement contre des actes de la police au moment où l’auteur a été arrêté et placé en rétention administrative. L’auteur affirme également que sa fille est médicalement vulnérable. Il fait valoir qu’en le séparant de deux enfants aussi vulnérables, l’État partie manque à son obligation de prendre les mesures spéciales qui sont nécessaires pour protéger les enfants. Il indique également que son expulsion continue d’être cause d’une grande détresse pour sa mère, qui demeure dans l’État partie, et donc que les droits de celle-ci ont été pareillement violés.

3.6L’auteur affirme que, parce qu’il été expulsé, il a été privé de son droit de vote, attesté par le fait que son nom figurait sur les listes électorales et qu’il avait voté lors de nombreuses élections et même brigué un mandat électif lorsqu’il résidait dans l’État partie. L’auteur fait donc valoir qu’il a été porté atteinte au droit de vote qu’il tenait de l’article 25 (par. 1) du Pacte.

Observations de l’État partie sur la recevabilité et le fond de la communication

4.1Le 23 août 2018, l’État partie a présenté ses observations sur la recevabilité et le fond de la communication.

4.2L’État partie conteste la recevabilité des griefs de l’auteur de la manière suivante : a) s’agissant de l’article 14 du Pacte, les griefs de l’auteur ne sont pas suffisamment fondés ; b) outre qu’ils sont irrecevables parce qu’insuffisamment étayés, les griefs que l’auteur tire des articles 14 (par. 7), 15 (par. 1) et 24 (par. 1) du Pacte (cette dernière disposition en ce qui concerne la mère de l’auteur) sont incompatibles avec les dispositions du Pacte et doivent donc être déclarés irrecevables ratione materiae en application de l’article 3 du Protocole facultatif et de l’article 96 (al. d)) du règlement intérieur du Comité ; et c) le grief que l’auteur tire de l’article 24 (par. 1) du Pacte est totalement irrecevable, car l’auteur n’est pas habilité à formuler un grief au nom de ses enfants puisqu’il n’a pas démontré qu’il avait qualité pour agir en leur nom, et il devrait donc être déclaré irrecevable ratione personae conformément à la jurisprudence du Comité.

4.3En ce qui concerne l’article 14 du Pacte, l’État partie fait valoir que l’auteur n’a pas précisé quelles dispositions spécifiques de cet article auraient été violées lors des procédures pénales, les seules procédures relevant de l’article 14 du Pacte.

4.4De plus, les griefs que l’auteur tire de l’article 14 du Pacte en ce qui concerne son statut au regard de la législation sur l’immigration n’entrent pas dans le champ d’application du Pacte et doivent être rejetés ratione materiae. L’État partie relève que l’annulation du visa de l’auteur était fondée sur une procédure administrative. Il appelle en outre l’attention sur l’observation générale no 32 (2007), sur le droit à l’égalité devant les tribunaux et les cours de justice et à un procès équitable, dans laquelle le Comité précise que le paragraphe 1 de l’article 14 « ne s’applique pas […] aux procédures d’extradition, d’expulsion et d’éloignement ».

4.5En ce qui concerne l’article 9 (par. 1) du Pacte, l’État partie, renvoyant aux travaux préparatoires du Pacte, affirme qu’aucune règle ne prescrit de considérer comme arbitraire une détention d’une durée particulière : le facteur déterminant est de savoir si les motifs de la détention sont justifiables. C’est donc au cas par cas qu’il convient de déterminer si la détention d’une personne est arbitraire eu égard à son objectif et à la situation de l’intéressé.

4.6En ce qui concerne la détention de l’auteur par les services de l’immigration, l’État partie fait valoir que l’auteur a été placé en détention à la suite de l’annulation légale de son visa pour des raisons de moralité, en application de l’article 501 (par. 2) de la loi sur les migrations, qui fait obligation aux services de l’immigration de placer en détention les personnes qui n’ont pas de visa valide. L’article 196 du même texte dispose qu’un non-ressortissant en situation irrégulière est placé en détention jusqu’à ce qu’« il ou elle soit expulsé(e) d’Australie » en application des articles 198 ou 199. L’État partie soutient donc que la détention de l’auteur par les services de l’immigration était légale et conforme au droit interne. Notant que le Comité a jugé que le placement en détention de non-ressortissants, y compris de demandeurs d’asile, n’était pas en soi arbitraire, l’État partie affirme qu’il convient d’examiner la raison d’être de sa législation sur l’immigration pour déterminer si celle-ci est arbitraire et démontrer que la détention de l’auteur n’était pas contraire à l’article 9 (par. 1) du Pacte.

4.7Dans le cas de l’auteur, il était nécessaire de le placer en détention pour pouvoir l’expulser dès que cela serait raisonnablement possible. L’État partie fait observer que cette approche est conforme au principe fondamental de la souveraineté en droit international, qui comprend le droit de tout État de contrôler l’entrée et le séjour des non-ressortissants sur son territoire. Contrairement à ce qu’affirme l’auteur, la rétention administrative est différente de l’emprisonnement, car les personnes placées en rétention administrative ne sont pas en prison, ne sont pas considérées comme des détenus et ne sont pas détenues à des fins punitives mais pour des raisons administratives.

4.8L’auteur a été placé en détention parce qu’en raison de son casier judiciaire chargé, il ne satisfaisait pas au test de moralité prévu à l’article 501 de la loi sur les migrations. Il a eu la possibilité de présenter des observations pour sa défense et, comme celles-ci n’ont pas été jugées suffisantes, il était prévisible qu’il soit placé en détention.

4.9L’État partie explique qu’avant que le Ministre décide d’annuler le visa de l’auteur, celui-ci s’était vu remettre une notification d’intention d’envisager l’annulation de son visa, ce qui lui a permis d’expliquer les raisons pour lesquelles il estimait que son visa ne devait pas être annulé. Le Ministre a examiné tous les facteurs invoqués par l’auteur, comme il ressort de l’exposé des motifs de sa décision, mais il a décidé qu’« un risque, certes faible, demeurait que [l’auteur] récidive », et que le préjudice matériel et psychologique que la récidive de l’auteur causerait aux membres vulnérables de la communauté australienne justifiait l’annulation. De ce fait, l’auteur n’était plus en possession d’un visa valide et n’était donc plus en situation régulière sur le territoire de l’État partie. Il a donc été placé en rétention administrative en attendant d’être expulsé. Cette décision a été confirmée par la Cour fédérale d’Australie et, en appel, par la Cour fédérale plénière d’Australie. La demande introduite devant la Haute Cour par l’auteur pour être autorisé à interjeter appel a été rejetée. La détention de l’auteur était donc raisonnable étant donné les circonstances et proportionnelle à l’objectif légitime poursuivi.

4.10L’État partie note que la détention de l’auteur n’a été prolongée que pour la durée nécessaire pour mener à bien la procédure interne le concernant afin de pouvoir l’expulser. Il a été expulsé d’Australie le 10 décembre 2017 après qu’il eut épuisé tous les recours internes pour contester l’annulation de son visa. Bien que la détention en un lieu autre qu’un centre de rétention administrative soit dans certains cas possible, elle n’a pas été jugée appropriée en l’espèce en raison du risque pour la communauté.

4.11En ce qui concerne le contexte de la détention au regard du Pacte, l’article 12 de celui‑ci concerne la liberté de circuler en général, et l’article 13 du Pacte reconnaît spécifiquement le droit d’un État souverain de réglementer l’entrée des étrangers sur son territoire et d’expulser les étrangers de son territoire. Le contexte spécifique et les dispositions précédant et suivant l’article 9 (par. 1) du Pacte montrent que le texte de cet article ne concerne pas « l’exil ». En conséquence, la question de l’exil ou de la déportation des non-ressortissants a donc été explicitement exclue.

4.12L’État partie affirme que, même s’il en adopte l’interprétation large de l’article 9 du Pacte que donne l’auteur (et que l’État partie conteste), l’expulsion de l’auteur n’a pas été arbitraire. Elle était légale, conforme aux dispositions, buts et objectifs du Pacte, et raisonnable étant donné les circonstances. Le cas de l’auteur, qui concerne une procédure administrative d’expulsion d’un non-ressortissant en situation irrégulière conformément tant au droit interne qu’aux obligations internationales de l’État partie, doit être distingué de l’affaire Burgos, qui concernait l’enlèvement illégal et clandestin de M. Burgos en Argentine et son transfert en Uruguay, où il a été détenu au secret et torturé.

4.13S’agissant du grief que l’auteur tire de l’article 12 du Pacte, l’État partie cite l’observation générale no 27 (1999) du Comité, sur la liberté de circulation, dans laquelle le Comité déclare que « [l]a question de savoir si un étranger se trouve “légalement” sur le territoire d’un État est régie par la législation nationale, qui peut soumettre l’entrée d’un étranger sur le territoire d’un État à des restrictions, pour autant qu’elles soient compatibles avec les obligations internationales de l’État ». L’État partie fait valoir qu’il considère que l’auteur n’est pas un citoyen australien, ce qu’a confirmé la Cour fédérale itinérante. S’agissant du grief que l’auteur tire de l’article 12, l’État partie note que dans les affaires Stewart c. Canada , Canepa c. Canada et Madafferi c. Australie , le Comité a jugé qu’une personne qui entrait sur le territoire d’un État en vertu de la législation relative à l’immigration de cet État ne peut considérer celui-ci comme son propre pays lorsqu’il n’en a pas acquis la nationalité et conserve la nationalité de son pays d’origine. L’État partie note également que le Comité a conclu que refuser d’accorder la nationalité à une personne au vu de son casier judiciaire ne constituait pas un obstacle déraisonnable à l’acquisition de la nationalité.

4.14L’État partie note que le Comité a interprété cette disposition de manière plus large, en particulier dans l’affaire Nystrom c. Australie, dans laquelle il a considéré qu’un pays pouvait être le « propre pays » d’une personne aux fins de l’article 12 (par. 4) du Pacte même si elle n’avait pas la nationalité de ce pays mais pouvait établir qu’elle avait avec celui-ci « des liens étroits et durables ». Selon le Comité, les facteurs à prendre en considération comprennent la résidence permanente, les liens personnels et familiaux étroits et l’absence de tels liens ailleurs. Toutefois, dans des opinions dissidentes, deux membres du Comité se sont dissociés de cette approche indûment large, estimant qu’un étranger ne pouvait établir des liens étroits et durables avec un État de manière à pouvoir considérer cet État comme son propre pays au sens de l’article 12 (par. 4) du Pacte que dans des circonstances limitées et exceptionnelles.

4.15L’État partie indique que son interprétation du terme « propre pays » figurant à l’article 12 (par. 4) du Pacte est conforme à l’article 13 du Pacte, qui porte sur l’expulsion des étrangers, c’est-à-dire des non-ressortissants. L’article 13 du Pacte reconnaît le droit d’un État souverain de réglementer l’entrée des étrangers sur son territoire et leur expulsion de son territoire et de décider qui est en mesure de séjourner à l’intérieur de ses frontières, et il énonce les normes procédurales minimales qui doivent être respectées dans l’exercice de ce droit souverain.

4.16L’auteur tente d’étayer son affirmation selon laquelle il a la nationalité australienne en déclarant que les tribunaux australiens ont admis qu’il « avait, en fait, demandé la nationalité australienne, bien qu’aucun certificat n’ait été délivré ». La Cour fédérale d’Australie a toutefois jugé que « le Département de l’immigration ne dispos[ait] d’aucun élément attestant que l’auteur ait jamais demandé la nationalité australienne ». « Bien que l’auteur ait peut-être rempli un formulaire, aucune demande d’octroi de la nationalité n’a jamais été instruite, car l’auteur ne s’est jamais inscrit à cette fin. ». De plus, la Cour fédérale d’Australie a jugé que la nationalité ne pouvait avoir été attribuée à l’auteur lors de la cérémonie à laquelle celui-ci avait assisté en 1981 puisque les agents du Ministère de la défense qui l’avaient organisée n’avaient pas le pouvoir d’attribuer la nationalité. L’auteur n’a produit aucune preuve à l’appui de son affirmation selon laquelle la nationalité lui a été attribuée ou il avait réussi à l’acquérir.

4.17De plus, l’État partie distingue la situation de l’auteur de celle de l’auteur dans l’affaire Nystrom, en ce que ses liens ne le rattachent pas exclusivement à l’Australie puisqu’il a de la famille ailleurs (un frère au Canada) et qu’il n’étaye pas son affirmation selon laquelle il n’a pas d’autres liens avec l’Écosse. De plus, à la différence de l’auteur dans l’affaire Nystrom, l’auteur parle la langue du Royaume-Uni. En outre, aucun obstacle culturel ne l’empêchera de se réinsérer dans la société en Écosse ou d’y trouver un emploi ou un logement. L’État partie note que les membres de la famille de l’auteur en mesure de voyager peuvent lui rendre visite au Royaume-Uni.

4.18L’État partie fait valoir que les allégations de l’auteur au titre de l’article 14 et de l’article 14 (par. 7) du Pacte sont dénuées de fondement parce que la décision d’annuler le visa de l’auteur et de l’expulser était une décision purement administrative et ne relève donc pas de l’article 14, et que sa détention et son expulsion subséquentes ne constituent pas une sanction pénale.

4.19S’agissant de l’article 14 (par. 7) du Pacte, cette disposition ne s’applique qu’aux infractions pénales et ne s’applique pas aux mesures disciplinaires qui ne constituent pas une peine prononcée pour une infraction pénale au sens de l’article 14 du Pacte. Dans l’affaire J.G. c. Nouvelle-Zélande , le Comité a estimé que la décision d’expulser l’auteur, qui avait été condamné pour infraction à la législation sur les stupéfiants, était de nature administrative et ne constituait pas une double peine.

4.20Dans l’affaire Uner c. Pays-Bas, la Cour européenne des droits de l’homme a jugé qu’« une expulsion ordonnée dans le cadre d’une procédure administrative à la suite du prononcé d’une condamnation pénale ne constituerait pas une double peine, ni aux fins de l’article 4 du Protocole no 7 ni “au sens humain du terme” ». La rétention administrative de l’auteur et son expulsion ne constituent pas une sanction pénale ni une double peine au regard de l’article 14 (par. 7) du Pacte.

4.21S’agissant de l’allégation de rétroactivité interdite par l’article 15 (par. 1) du Pacte, l’État partie affirme que cette disposition ne s’applique qu’aux lois imposant une responsabilité pénale ou une peine pour des infractions pénales. En l’espèce, il n’y a pas eu application rétroactive de la loi, car les dispositions relatives à l’annulation des visas pour des raisons de moralité ont été introduites en 1999 et sont applicables à tous.

4.22Pour ce qui est de l’article 24 (par. 1) du Pacte, l’État partie fait valoir que cet article ne définit pas les droits des enfants mais vise à garantir que tous les enfants relevant de la juridiction de chaque État partie bénéficient d’une protection. L’Australie a pris un grand nombre de mesures législatives et autres pour que les enfants soient protégés par leur famille, la société dans son ensemble et l’État. L’auteur n’a produit aucune preuve attestant que l’Australie n’avait pas pris les mesures de protection voulues au bénéfice des mineurs.

4.23En ce qui concerne le droit de vote garanti à l’article 25 (al. b)) du Pacte, l’État partie affirme que ces dispositions ne s’appliquent qu’aux citoyens. Il existe toutefois une exception, certains résidents permanents inscrits avant la date limite du 25 janvier 1984 s’étant vu accorder le droit de voter lors des élections fédérales et des référendums, et l’auteur a bénéficié de cette exception. Aux termes de l’article 25 (al. b) du Pacte, les États parties ne sont pas tenus d’accorder le droit de vote aux résidents permanents, pas plus que l’État partie n’est empêché de retirer à un étranger son droit de résider en permanence en Australie ni tenu de maintenir le droit de vote d’une personne qui a cessé d’être un résident permanent. Les griefs que l’auteur tire de l’article 25 (al. b) du Pacte sont donc dénués de fondement.

Commentaires de l’auteur sur les observations de l’État partie concernant la recevabilité et le fond

5.1Dans des commentaires datés du 15 juillet 2019, l’auteur déclare que la décision du Ministre d’annuler son visa était « clairement arbitraire » et « représentait un déni de justice ». Il fait valoir en particulier que le Ministre n’a pas accordé le poids voulu à l’appréciation selon laquelle le risque de récidive était « faible », à ses liens de longue date avec l’Australie, à « l’intérêt supérieur » de ses enfants et l’impact de cette annulation et ses conséquences sur sa santé et son bien-être. L’auteur affirme qu’un décideur raisonnable aurait jugé que ces considérations étaient suffisantes pour faire obstacle à l’annulation de son visa.

5.2Le fait que la décision initiale d’annulation du visa de l’auteur représentait un déni de justice est étayée par un renvoi à un rapport médical récent (daté du 1er mai 2019) sur sa santé mentale. Sont extrêmement pertinentes les conclusions de ce rapport selon lesquelles il n’y avait « aucune crainte justifiant des mesures de sauvegarde » ou ni « aucun risque de préjudice à autrui ». Ce rapport expose toutefois les problèmes de santé mentale que connaît l’auteur, problèmes qui ont été aggravés par sa rétention administrative et son expulsion. Autoriser le rapatriement de l’auteur en Australie atténuerait ces problèmes. Le rapport expose en détail les sévices qu’a subis l’auteur dans le centre de détention et les périodes d’abattement et d’anxiété qu’il traverse actuellement et détaille certains symptômes biologiques de dépression.

Observations complémentaires de l’État partie

6.Le 11 novembre 2019, l’État partie a répondu aux commentaires de l’auteur, soulignant que celui-ci n’avait relevé aucune irrégularité dans la décision du Ministre, qui a été examinée dans le cadre de cinq instances judiciaires distinctes. Il renvoie à l’exposé des motifs du Ministre, dans lequel tous les facteurs mentionnés sont pris en considération mais jugés insuffisants pour compenser le risque de dommage au public. En ce qui concerne le rapport du médecin, l’État partie note qu’il concerne non le risque de récidive mais l’état dépressif de l’auteur, et que sa pertinence est donc limitée. Il indique toutefois qu’un rapport psychologique figurait parmi les éléments pris en compte par le Ministre.

Délibérations du Comité

Examen de la recevabilité

7.1Avant d’examiner tout grief formulé dans une communication, le Comité des droits de l’homme doit, conformément à l’article 97 de son règlement intérieur, déterminer si la communication est recevable au regard du Protocole facultatif.

7.2Le Comité s’est assuré, comme il est tenu de le faire conformément à l’article 5 (par. 2 a)) du Protocole facultatif, que la même question n’était pas déjà en cours d’examen devant une autre instance internationale d’enquête ou de règlement.

7.3Le Comité note que l’auteur affirme avoir épuisé tous les recours internes utiles dont il disposait. En l’absence d’objection de l’État partie à cet égard, le Comité considère que les dispositions de l’article 5 (par. 2 b)) ne l’empêchent pas d’examiner la communication.

7.4Le Comité prend note de l’argument de l’État partie selon lequel le grief que l’auteur tire de l’article 14 (par. 7) du Pacte selon lequel son arrestation, sa détention et son expulsion constituaient une nouvelle peine s’ajoutant à celle déjà purgée pour une condamnation antérieure, est insuffisamment étayée. Le Comité prend également note des allégations de l’auteur selon lesquelles les mesures prises par l’État partie constituaient des sanctions pénales imposées pour des infractions pour lesquelles il avait déjà purgé sa peine et que, comme il n’y avait pas eu de nouveau procès, de nouvelles sanctions pénales n’étaient pas justifiées. Il fait donc valoir que son traitement durant la procédure d’expulsion, laquelle a un caractère pénal, relève des articles 14 et 15 du Pacte, qui consacrent le principe non bis in idem et interdisent les peines rétroactives, et en viole les dispositions. Le Comité prend de plus note de l’argument de l’État partie selon lequel la procédure d’expulsion avait un caractère purement administratif et que, bien que le test de moralité au titre de la loi sur les migrations tienne compte des condamnations passées, l’objectif n’est pas de punir de nouveau l’intéressé mais d’assurer la sécurité publique. LeComité rappelle sa jurisprudence confirmant que l’article 14 du Pacte est applicable en matière pénale et non aux procédures d’expulsion et d’éloignement et qu’une procédure administrative faisant suite à une condamnation pénale ne constitue pas une double peine au regard de l’article 14 (par. 7) du Pacte. En conséquence, le Comité conclut que les griefs que l’auteur tire des articles 14 et 15 sont irrecevables ratione materiae au regard de l’article3 du Protocole facultatif.

7.5Le Comité note que l’État partie conteste la recevabilité des griefs que l’auteur tire de l’article 14 au motif qu’ils sont dénués de fondement au regard de l’article 2 du Protocole facultatif et de l’article 96 (al. b)) du règlement intérieur du Comité, puisque, à l’exception du paragraphe 7 (voir par. 7.4), l’auteur n’a pas indiqué quelles dispositions de l’article 14 auraient été violées, pas plus qu’il n’a relevé d’irrégularité dans les procédures pénales, c’est‑à-dire celles auxquelles l’article 14 s’applique. Le Comité conclut donc que les autres griefs que l’auteur tire de l’article 14 du Pacte sont irrecevables parce qu’insuffisamment étayés, conformément à l’article 2 du Protocole facultatif.

7.6Le Comité prend note de l’argument de l’État partie selon lequel tous les griefs concernant les membres de la famille de l’auteur devraient être jugés irrecevables ratione personae, car aucun grief n’a été formulé au nom d’aucun des autres membres de la famille de l’auteur et que ceux-ci ne sont pas désignés comme victimes dans la communication. L’État partie fait donc valoir qu’en application des articles 1er et 2 du Protocole facultatif, l’auteur n’a pas qualité pour alléguer la violation de droits garantis à autrui. Le Comité note que rien dans la communication de l’auteur n’indique qu’elle est présentée au nom d’autres membres de sa famille ou que quiconque d’autre que lui doive aussi être considéré comme une victime. Deplus, l’auteur ni ne fournit de preuve du consentement par lequel une autre personne l’aurait habilité à agir en son nom devant le Comité, ni n’avance dans sa communication qu’il lui aurait été demandé de le faire ou que le consentement des intéressés à cet égard serait implicite. LeComité conclut donc que les griefs formulés par l’auteur au sujet de ses enfants et de sa mère au titre de l’article 24 du Pacte sont irrecevables ratione personae au regard de l’article 91 du règlement intérieur du Comité et de l’article 2 du Protocole facultatif.

7.7Le Comité prend note des griefs que l’auteur tire de l’article 25 du Pacte, à savoir qu’il avait le droit de voter dans l’État partie, comme l’attestait son inscription sur les listes électorales, et qu’en le plaçant en détention puis en l’expulsant, l’État partie a violé ce droit en l’empêchant de l’exercer. L’État partie fait quant à lui valoir qu’en fait l’auteur a bénéficié d’un privilège législatif historique conféré à un groupe particulier de résidents permanents à un moment particulier. Il affirme donc que, n’étant pas un ressortissant, l’auteur ne peut être privé d’un droit dont il n’est pas en fait titulaire. En l’absence d’explications supplémentaires, le Comité considère que l’auteur n’a pas suffisamment étayé ces griefs aux fins de la recevabilité et conclut donc qu’ils sont irrecevables au regard de l’article 2 du Protocole facultatif.

7.8Le Comité considère que les autres griefs de l’auteur, qui soulèvent des questions au regard des articles 9 et 12 du Pacte, ont été suffisamment étayés aux fins de la recevabilité et il va les examiner au fond.

Examen au fond

8.1Conformément à l’article 5 (par. 1) du Protocole facultatif, le Comité a examiné la communication en tenant compte de toutes les informations que lui ont communiquées les parties.

8.2S’agissant des griefs que l’auteur tire de l’article 12 du Pacte, le Comité note en premier lieu qu’il allègue avoir participé en 1981, lors de son incorporation dans les forces armées, à une cérémonie lors de laquelle la nationalité australienne lui aurait été attribuée, qu’il a voté et brigué un mandat électif dans l’État partie et qu’en tant que membre du Commonwealth il est citoyen de l’État partie. Il prend également note des arguments de l’État partie, à savoir que les officiers recruteurs des forces armées n’ont pas le pouvoir d’attribuer la nationalité, que si l’auteur avait le droit de vote c’est parce qu’un privilège législatif avait été accordé à une catégorie particulière de résidents permanents qui avaient déjà bénéficié de ce droit et que l’auteur n’a à aucun moment demandé la nationalité australienne. L’État partie affirme en outre que ses autorités judiciaires ont tenu dûment compte de tous ces facteurs et ont conclu qu’aucun d’entre eux, pris individuellement ou avec les autres, ne conférait un droit de citoyenneté à l’auteur.

8.3Le Comité prend note que les restrictions au droit de l’auteur de circuler librement et de choisir librement sa résidence, protégé par l’article 12 (par. 1 et 2) du Pacte, sont liées au statut de l’auteur, qu’il soit un citoyen ou un étranger en situation régulière, et que le droit garanti par l’article 12 (par. 4) du Pacte s’applique aux personnes dont les liens avec l’État partie sont tels que cet État peut être considéré comme « leur propre pays ». Le Comité note également que la question de la nationalité de l’auteur a été examinée devant toutes les instances nationales disponibles et que l’auteur n’invoque aucune irrégularité procédurale. Le Comité conclut donc qu’il n’est pas nécessaire de revenir sur la détermination de l’État partie, à savoir qu’en fait l’auteur n’avait pas sa nationalité.

8.4Le Comité rappelle sa jurisprudence sur la question de savoir si une personne qui entre sur le territoire d’un État en vertu de la législation de cet État relative à l’immigration et aux conditions qu’elle énonce peut considérer cet État comme son propre pays s’il n’en a pas acquis la nationalité et s’il conserve la nationalité de son pays d’origine. La réponse pourrait être positive si le pays d’immigration posait des obstacles déraisonnables à l’acquisition de la nationalité par les nouveaux immigrants ; toutefois, lorsque, comme en l’espèce, le pays d’immigration facilite l’acquisition de sa nationalité et que l’immigrant n’acquiert pas cette nationalité soit par choix, soit parce qu’il a commis des actes qui l’empêchent de l’acquérir, le pays d’immigration ne devient pas « son propre pays » au sens de l’article 12 (par. 4) du Pacte. Il convient de noter à cet égard que lors de la rédaction du paragraphe 4 de l’article 12 du Pacte, si le terme « pays de sa nationalité » a été écarté, la proposition de viser le pays de la résidence permanente l’a également été. Le Comité rappelle en outre sa jurisprudence Nystrom et Warsame selon laquelle le fait de ne pas acquérir la nationalité en l’absence d’obstacles déraisonnables imposés par l’État partie n’était pas déterminant pour l’application de l’article 12 (par. 4) lorsque des circonstances individuelles extrêmement spécifiques rendaient une telle interprétation trop restrictive.

8.5Le Comité conclut que, si l’auteur allègue qu’il considère subjectivement l’État partie comme son propre pays, aucun élément du dossier ne révèle d’irrégularité dans l’examen du statut de l’auteur par l’État partie, qui a notamment tenu dûment compte de l’intention de l’auteur de résider en permanence dans l’État partie, du fait que l’auteur n’avait pas demandé la nationalité australienne ni renoncé à sa nationalité de naissance, de ses liens sociaux dans l’État partie, y compris sa participation à la vie publique, de l’absence de liens en Écosse et de l’impact sur sa vie familiale.

8.6Le Comité conclut qu’il n’existe pas en l’espèce de circonstances qui justifieraient l’une des exceptions susmentionnées au titre de l’article 12 (par. 4) du Pacte. Dans ces conditions, le Comité conclut que l’auteur ne peut affirmer que l’Australie est « son propre pays » aux fins de l’article 12 (par. 4) et ne peut donc conclure que les droits de l’auteur au titre de l’article 12 du Pacte ont été violés.

8.7Cela étant, le Comité prend note des allégations de l’auteur selon lesquelles, parce qu’il était toujours en situation régulière sur le territoire de l’État partie en raison de sa nationalité effective ou supposée, son arrestation, sa détention et son expulsion ont été en elles-mêmes arbitraires et ainsi contraires à l’article 9 du Pacte. Le Comité, n’ayant aucune raison de douter de la détermination de l’État partie selon laquelle l’auteur n’avait pas la nationalité australienne, va examiner les facteurs pris en compte pour décider d’annuler le visa de l’auteur et établir si cette décision a été prise arbitrairement et si, en conséquence, l’arrestation et la détention subséquentes de l’auteur ont été arbitraires.

8.8Le Comité note que le 26 octobre 2014 l’auteur a été informé de la décision d’annuler son visa et que le 29 octobre 2014 il a été informé par les services de l’immigration qu’il devait se présenter le 31 octobre 2014 au plus tard et qu’il serait placé en détention en attendant d’être expulsé. Il a également été informé que s’il ne se présentait pas dans les délais, les autorités demanderaient à la police de le localiser et de le placer en détention. Le Comité note également que l’auteur a contesté la décision, notamment en introduisant une requête pour obtenir une ordonnance interdisant son placement en détention. Il note également que l’ordonnance ainsi obtenue a été annulée sur appel du Ministre, et que l’auteur a donc été arrêté et placé en détention.

8.9Le Comité prend note de l’argument de l’auteur selon lequel, quel que soit son statut au regard de la législation relative à l’immigration, la détention prolongée et indéfinie dont il a fait l’objet sur le fondement du droit interne est par sa nature même arbitraire et contraire au Pacte. Il prend également note de l’argument de l’État partie selon lequel cette détention était justifiée aux fins de l’expulsion et était raisonnable eu égard au risque que représentait l’auteur pour la communauté et que, pour cette raison et compte tenu de ce risque, la détention en un lieu autre qu’un centre de rétention administrative n’a pas été jugée appropriée. L’État partie indique que l’auteur a été maintenu en détention jusqu’à ce qu’il ait épuisé tous les recours internes utiles disponibles pour contester la décision de l’expulser et qu’il a été ultérieurement expulsé aussi rapidement que possible.

8.10Le Comité rappelle qu’en son article 9 (par. 1) le Pacte garantit le droit de tout individu à la liberté et à la sécurité de sa personne et dispose que nul ne peut faire l’objet d’une arrestation ou d’une détention arbitraire. Le Comité note toutefois que cet article autorise certaines restrictions sous la forme de détention pour les motifs et selon les procédures établis par la loi. Ces restrictions sont effectivement autorisées et existent dans la plupart des pays, et sont prévues dans des lois qui ont par exemple pour objet de contrôler l’immigration ou concernent les conditions dans lesquelles les individus sont considérés comme dangereux pour eux-mêmes ou pour la société. Le Comité rappelle sa jurisprudence selon laquelle le droit à la liberté de la personne n’est pas absolu. Si, au regard de l’article 9 du Pacte, la privation de liberté est parfois justifiée, par exemple en application de la législation pénale, l’arrestation ou la détention peuvent être autorisées par la législation interne et néanmoins être arbitraire. L’adjectif « arbitraire » n’est pas synonyme de « contraire à la loi » mais doit recevoir une interprétation plus large, intégrant le caractère inapproprié, l’injustice, le manque de prévisibilité et le non-respect des garanties judiciaires, ainsi que les principes du caractère raisonnable, de la nécessité et de la proportionnalité. Les motifs et procédures prévus par la loi ne doivent pas anéantir le droit à la liberté de la personne et le régime de la détention ne doit pas outrepasser les limites imposées au système de justice pénale en prévoyant l’équivalent d’une sanction pénale sans les protections applicables.

8.11Le Comité rappelle sa jurisprudence dans laquelle il a confirmé que la détention dans le cas du contrôle de l’immigration n’était pas arbitraire en soi mais a indiqué qu’elle devait être justifiée comme étant raisonnable, nécessaire et proportionnée compte tenu des circonstances et faire l’objet d’un examen périodique. Les États parties doivent également prévenir l’emploi injustifiable de la force par la police et y remédier. En ce qui concerne le maintien en détention après qu’une peine a été exécutée dans le but de protéger la communauté, ou « détention de sûreté » qui, bien que n’étant pas directement pertinente dans le cas de l’auteur, est peut-être analogue à la détention avant expulsion lorsque la protection du public est en cause, le Comité confirme ses constatations précédentes, à savoir que cette détention doit être justifiée par des raisons impératives découlant de la gravité des infractions commises et de la probabilité que le détenu récidive. De plus, les États ne doivent recourir à cette forme de détention qu’en dernier ressort et un organe indépendant doit procéder à des examens périodiques pour décider si le maintien en détention est justifié. Les États parties doivent faire preuve de prudence et appliquer les garanties voulues lorsqu’ils évaluent la dangerosité future de l’individu concerné. Si un détenu a purgé l’intégralité de la peine prononcée lors de la condamnation, l’allongement rétroactif de la peine est interdit par les articles 9 et 15 du Pacte et un État partie ne peut contourner cette interdiction en imposant une détention équivalant à un emprisonnement en la qualifiant de détention civile. Pour éviter l’arbitraire, l’État partie doit dans ces circonstances démontrer que l’objectif légitime de protection du public ne pouvait être atteint par d’autres moyens moins attentatoires à la liberté que l’arrestation et la détention indéfinie jusqu’à ce que tous les recours internes aient été épuisés.

8.12S’agissant de l’allégation de l’auteur selon laquelle la décision d’annuler son visa a été prise arbitrairement, le Comité note que dans l’État partie les demandes de visa sont évaluées au regard de la norme légale de « l’intérêt public ». Dans le cadre de cette évaluation, tant le casier judiciaire que la conduite générale de la personne concernée peuvent être considérés comme attestant un manque de « moralité ». Toute décision relative aux visas peut être portée devant un tribunal des recours administratifs du Département de l’immigration et des affaires multiculturelles. Le Ministre de l’immigration conserve le pouvoir juridique d’écarter la décision de ce tribunal. Il peut le faire lorsqu’il « soupçonne raisonnablement que la personne ne satisfait pas au test de moralité » sur la base d’un critère objectif, à savoir le « casier judiciaire chargé » de l’intéressé, défini par la loi comme un casier judiciaire comportant une « peine d’emprisonnement de 12 mois ou plus ». Le pouvoir discrétionnaire du Ministre permet toutefois à la personne concernée de présenter des preuves de sa moralité, ce qui permet au Ministre de décider d’intervenir dans la décision d’octroi du visa dans l’intérêt public. Le Comité note également que l’auteur a fait appel de la décision devant le Tribunal administratif fédéral auquel il a présenté des conclusions détaillées et dont il ne conteste pas l’équité de la procédure. Compte tenu de ce qui précède, le Comité conclut que les faits dont il est saisi n’indiquent pas que l’annulation du visa de l’auteur a été arbitraire, car tous les facteurs individuels présentés au Ministre par l’auteur ont été exhaustivement examinés et la décision du Ministre, selon laquelle la détention était nécessaire et proportionnée eu égard au risque de récidive qui, bien que défini par les autorités comme statistiquement minime, a été jugé trop important en termes de préjudice potentiel pour les victimes vulnérables, a fait l’objet d’un contrôle juridictionnel. Par conséquent, l’arrestation et la détention qui ont suivi cette décision ont été prima faciae imposées dans le but légitime d’un éloignement administratif et ne sont donc pas en elles-mêmes arbitraires. Le Comité ne considère pas que les informations dont il est saisi révèlent une violation de l’article 9 du Pacte dans la mesure où les décisions d’annulation du visa et d’éloignement sont concernées.

8.13S’agissant des allégations de l’auteur concernant son arrestation, le Comité ne dispose pas d’informations détaillées sur les interactions entre l’auteur et les services de l’immigration, mais relève toutefois qu’il est indiqué dans les pièces de procédure relatives à la requête du 30 octobre2014 que l’auteur a été informé que s’il ne se présentait pas volontairement dans le délai prescrit, initialement le 31 octobre 2014 au plus tard, la police l’arrêterait. Le Comité note que l’auteur ne s’est pas présenté volontairement mais a introduit une requête pour obtenir de ne pas être arrêté et placé en détention aussi longtemps que son appel contre la décision d’annuler son visa serait pendante devant le Tribunal administratif fédéral. Le Comité note également que l’auteur n’a pas été arrêté le 31 octobre, que sa requête ex parte a été examinée et qu’il a présenté des conclusions additionnelles en réponse à l’appel interjeté par le Ministre contre l’ordonnance suspendant son placement en détention, laquelle a été annulée. Il a été arrêté le 23 novembre 2014. LeComité conclut donc qu’il ne dispose pas de suffisamment d’informations pour conclure que l’arrestation de l’auteur a été arbitraire, étant donné que celui-ci ne s’est pas présenté devant les autorités comme il devait le faire à l’issue de la procédure sur sa requête ex parte. Il ne considère donc pas que l’arrestation de l’auteur constitue une violation de l’article 9.

8.14En ce qui concerne la détention de l’auteur, le Comité note qu’aucune des parties n’a présenté d’arguments détaillés concernant spécifiquement l’examen de la nécessité de la détention de l’auteur, seul le dossier de certaines des procédures lui ayant été communiqué. Étant donné que le Comité ne dispose pas du procès-verbal de l’audience du 18 décembre 2015 lors de laquelle a été rendue l’ordonnance rejetant la requête interlocutoire dans laquelle l’auteur demandait à être assigné à résidence, le Comité, tout en notant que l’ordonnance a été rendue par consentement et que l’auteur n’a pas présenté d’autres demandes pour limiter sa détention, conclut qu’il ne dispose pas de suffisamment d’informations pour considérer que la décision de placer l’auteur en détention a été prise arbitrairement.

8.15Quant aux allégations de l’auteur concernant le caractère indéfini et inutilement prolongé de sa détention, le Comité note que, si la durée de la détention de l’auteur n’a pas été fixée au départ, les informations dont il est saisi indiquent que cette détention a été examinée par le Tribunal administratif fédéral les 30 et 31 octobre 2014, le 21 novembre 2014, le 18 décembre 2015 et le 13 juillet 2016 et par la Cour fédérale plénière le 14 décembre 2016. L’auteur a donc eu la possibilité de contester sa détention devant plusieurs instances judiciaires et les conséquences de cette détention pour l’auteur et sa famille ont été dûment mises en balance avec le risque qu’il représentait pour la communauté. Le Comité prend également note de la conclusion de l’État partie selon laquelle la détention était nécessaire et proportionnée eu égard au risque de récidive qui, bien que considéré comme statistiquement minime par les autorités, a été jugé trop important en termes de préjudice potentiel pour les victimes vulnérables. Le Comité conclut donc que la détention a été imposée dans le but bien défini d’expulser l’auteur, conformément au droit interne, une expulsion qui a été mise en œuvre dès que les recours internes, qui n’ont pas été indûment prolongés, ont été épuisés. Le Comité conclut donc que les faits dont il est saisi n’établissent aucune violation du droit que l’auteur tenait de l’article 9 du Pacte en ce qui concerne sa détention.

9.Le Comité, agissant en vertu de l’article 5 (par. 4) du Protocole facultatif, constate que les informations dont il est saisi ne font apparaître aucune violation par l’État partie des articles 9 ou 12 du Pacte.

Annexe  I

Joint opinion of Committee members Duncan Laki Muhumuza, Hernán Quezada Cabrera and José Manuel Santos Pais (dissenting)

1.We regret not being able to concur with the majority of the Committee in the present communication. In our view, there is a violation by the State party of the author’s rights under article 9 of the Covenant.

2.The author, born in Scotland in 1960, moved with his family to Australia at age 5 and lived there until his removal to the United Kingdom of Great Britain and Northern Ireland in December 2017 (paras. 1.1 and 2.1).

3.On 11 November 2011, the Supreme Court of Tasmania convicted the author of maintaining sexual relations with a person under 17 years of age and sentenced him to four years of imprisonment. The facts, however, date back to 1996, when the author was 36 years of age and commenced a relationship with one of his employees, then 12 years of age, which lasted for five years. The author served part of his sentence and was released on parole on 7 May 2014 (para. 2.2).

4.On 27 October 2014, the Minister for Immigration decided to cancel the author’s Transitional (Permanent) Visa, based on his having failed the “character test”. The author was informed by the immigration authorities that he must report to their offices; otherwise, authorities would seek the assistance of the police in locating and detaining him (para. 2.3).

5.He made an application for an injunction to prevent the State party from placing him in immigration detention while his citizenship status was being determined. The Federal Administrative Court, on 31 October 2014, granted the author’s injunction, considering the risk of flight to be slight. The Court, however, also granted leave to the State party to appeal and, on 21 November 2014, granted the Minister’s application to set aside the author’s injunction (para. 2.4).

6.Meanwhile, on 13 November 2014, the author filed another application, in which he requested a judicial review of the Minister’s decision to cancel his residence visa (para. 2.5). On 23 November 2014 while its consideration was pending, the author was forcibly removed from his car by four police officers, taken into custody and detained at the Maribyrnong Detention Centre in Melbourne (para. 2.6). He had never absconded, however, and had simply been exercising his right to guarantee his liberty through judicial means.

7.On 18 August 2016, he was transferred to Christmas Island (para. 2.8) and detained there until his removal to the United Kingdom. He was administratively detained for more than three years, pending such removal.

8.Domestic courts dealt mainly with the issue of whether the author had acquired Australian citizenship which prevented him from being deported (paras. 2.5–2.9). His applications to be released from immigration detention were always dismissed and the need for the extended period of his detention was not reassessed, the courts not having found any violation of the author’s rights, as regards his visa cancellation.

9.The question therefore remains whether, to avoid arbitrariness, the immigration detention, albeit lawful, was necessary, reasonable and proportionate in the circumstances; and whether there were sufficient reasons to consider that the author had failed the character test, which led to his visa’s being cancelled.

10.The author claims, in this regard, that his “prognosis for full rehabilitation is very good” and that he “is currently assessed as being at minimal risk of reoffending”, joining in support a report by a psychologist. He had completed all required rehabilitation courses during his time in prison (para. 2.11) and, indeed, he was released on parole, which attests to his claims.

11.As for the proportionality of the detention, to achieve the legitimate aim of protecting the public, the author argues that there were many less onerous options available to the State

party, including ongoing community-based psychosocial support (para. 2.12), an argument that the State party simply rebuts by saying the detention was appropriate owing to the risk to the community (para. 4.10), which was minimal, however.

12.The author claims that his deportation had the collateral effect of separating him from his mother, wife and children, all of whom reside in Australia, and disconnected him from his long-standing social and professional networks, severing his connection to the country in which he had grown up (paras. 2.14 and 2.17). The Minister for Immigration acknowledges all of these impacts.

13.Domestic courts, however, do not seem to have addressed these decisive questions, critical to an assessment of the arbitrariness of the author’s prolonged and indefinite detention, which ultimately extended for more than three years.

14.We dispute the State party’s claim that detention was necessary to ensure removal and “that this approach is consistent with the fundamental principle of sovereignty in international law, which includes the right of a State to control the entry and stay of non-citizens in its territory”, as well as the State party’s claim that “immigration detention is distinct from imprisonment, as persons in immigration detention are not in prison, are not considered to be prisoners and are not held for punitive reasons and rather, they are detained administratively” (para 4.7). In fact, the author was doubtlessly deprived of his liberty and prevented from leaving the detention premises during the whole of his “immigration detention”, which seriously impacted his mental health (para. 5.2).

15.Unlike the State party and the majority of the Committee (para 8.13), we consider, based on the very same reasons expressed in the Views (para 8.11), that the author’s detention was neither necessary nor reasonable or proportionate, particularly in view of the manner in which it was enforced, and was therefore arbitrary. Moreover, such detention was not reassessed as it extended in time, contrary to the reasoning adopted by the majority (para. 8.15).

16.We dispute the legitimacy of the aim of the author’s removal. The Statement of Reasons by the Minister (who belongs to the Liberal-National Coalition, responsible for implementing Operation Sovereign Borders) (para 4.9) does not justify, in our view, the ultimate visa cancellation decision.

17.The Minister agreed with the sentencing judge’s decision and considered the author’s “sexual offending as very serious” and “repugnant”. He also acknowledged, however, the author’s “addictions and psychological problems” at the time of the offence, his willingness to undergo treatment and to participate in rehabilitation programmes for sex offenders and persons with addictive behaviours, positive work reports regarding his general behaviour in prison and opportunities taken advantage of by the author to undergo psychological counselling so as to reduce the risk of reoffending and to continue such treatment following his release from prison. He also noted good progress achieved in the re-forming of bonds between the author, his partner and their children; the strong ongoing support provided by his family, mostly Australian citizens resident in Australia; his expression of remorse and existing support networks, including employment opportunities; and his deep and long sustained ties to Australia. The Minister acknowledged that it was in the best interests of the author’s four children and two step grandsons not to cancel the author’s visa, as this would cause them substantial hardship and deprive them of the opportunity to maintain close and direct personal contact with him. He also recognized the substantial hardship that the author’s family, with whom he maintained a close relationship, would endure as a result of his removal. While noting that the author had no relatives, no contacts and no ties in Scotland and that he would experience significant difficulties in establishing himself owing to his extended absence and to a lack of family support there, the Minister still decided to exercise his discretion to order the removal, concluding that “there remains a risk, albeit even if a low one, that Mr. Cayzer will reoffend”.

18.We cannot therefore endorse the majority’s conclusion (para 8.12), that “all of the individual factors presented to the Minister by the author were comprehensively assessed”. They were referred to but not duly assessed. In fact, by adhering to the sentencing court’s reasoning, the Minister simply disregarded all subsequent efforts made by the author to rehabilitate himself while serving his sentence, attested by his release on parole, as well as the several significant individual and family circumstances that would justify his stay. Rigid security reasons prevailed, notwithstanding the risk of reoffending being minimal, and the issue of the rehabilitation of the author was never seriously considered.

19.We would therefore have concluded for a violation of the author’s rights under article 9 of the Covenant, since his immigration detention, for more than three years, was neither necessary nor reasonable or proportionate and was therefore arbitrary. Moreover, the Statement of Reasons by the Minister does not justify, in our view, the author’s visa cancellation.

Annexe II

Individual opinion of Committee member Arif Bulkan (dissenting)

1.In the present communication, the majority finds that the State party did not violate the author’s rights under article 12 (4) of the Covenant by deporting him from Australia, even though this meant his effective banishment from the only country he has ever known. In so deciding, the majority does not grapple meaningfully with the Committee’s evolving jurisprudence on article 12, nor does it accord the specific facts of the author’s case anything beyond cursory mention. For this reason, I cannot join in this decision to reject the author’s claims under both articles 12 and 9 of the Covenant.

2.The text of article 12 (4), which provides that “[n]o one shall be arbitrarily deprived of the right to enter his own country”, conspicuously eschews the language of citizenship or nationality. The ineluctable conclusion is that this was done to confer protection on a wider category of persons, capturing those who do not qualify under narrow, traditional criteria but nonetheless possess some deep and enduring connection to the country in question. This separate category is distinct from that of aliens, who are dealt with in article 13, reinforcing the conclusion that the categorization of “own country” is a unique one to be interpreted more flexibly.

3.Despite some initial resistance, this broader interpretation is now firmly incorporated in the meaning of article 12 (4). In its general comment 27 (1999) on freedom of movement, the Human Rights Committee affirms that the scope of this provision extends beyond the formal category of nationality. In a passage worth quoting in full, the Committee notes that article 12 (4) is capable of a “broader interpretation that might embrace other categories of long-term residents”, since “[i]t is not limited to nationality in a formal sense, that is, nationality acquired at birth or by conferral; it embraces, at the very least, an individual who, because of his or her special ties to or claims in relation to a given country, cannot be considered to be a mere alien”.

4.This broader approach has been embraced in several recent cases. In Nystrom v. Australia, for example, this Committee found that “there are factors other than nationality which may establish close and enduring connections between a person and a country, connections which may be stronger than those of nationality. The words ‘his own country’ invite consideration of such matters as long standing residence, close personal and family ties and intentions to remain, as well as to the absence of such ties elsewhere”. Applying that test, the Committee concluded that Australia was the author’s own country, notwithstanding his lack of citizenship, since he was taken there from Sweden by his mother when he was only 27 days old and lived there all his life; further, the author had no ties to Sweden, did not speak the language and had always considered Australia to be his home. A similar approach was taken in Warsame v. Canada, where the Committee echoed that there may be “close and enduring connections between a person and a country” which may be stronger than nationality, thereby attracting the protection of article 12 (4). In the case of Warsame, the author had arrived in Canada at age 4, lived there continuously thereafter with his nuclear family and received his entire education in that country. Before that, he had resided in Saudi Arabia and had never lived in Somalia nor could he speak the language properly. Given these factors, which the Committee described as indicating “strong ties” connecting him to Canada, it concluded that the author had established that Canada was the author’s “own country” for the purposes of article 12 (4).

5.Critiques of this approach have never satisfactorily explained the reason for a more restrictive interpretation. In Nystrom, for example, Committee members Gerald L. Neuman and Yuji Iwasawa asserted in a dissenting opinion that the primary purpose of article 12 (4) of the Covenant is to protect the rights of citizens, a frankly unconvincing position given that the language of this specific subparagaph studiously avoids any reference to nationality or citizenship. The obvious flaw in that argument is that if such had been the primary purpose of article 12 (4), it would have been the easiest thing for the drafters to adhere to traditional language which, significantly, is used in other subparagraphs of article 12. However, they chose instead to construct a category of “own country”, thereby clearly signalling the intent to offer protection to persons beyond the narrow category of citizenship.

6.Of considerable relevance is that the provision being interpreted forms part of a human rights treaty, not a deed or some other commercial transaction, which necessarily requires greater flexibility in the quest to discern meaning. Nowhere has this been more commandingly explained than in Minister of Home Affairs v. Fisher, a case involving the Privy Council of the United Kingdom, where the word “child” in section 11 (5) (d) of the Constitution of Bermuda was under consideration. Coincidentally, Fisher was also a case concerned with citizenship and the right of remaining in a country and equally in respect of conferring protection, the term used in the provision under consideration was the wider one of “belonging”, not citizenship or nationality. In seeking to deny the children of a Jamaican woman the right to remain in Bermuda, the Government argued, however, that they were illegitimate (sic) and thus could not qualify as “children” according to the traditional interpretation of the term. Rejecting this crabbed interpretation, the Privy Council traced the origins of the Constitution of Bermuda to both the Convention for the Protection of Human Rights and Fundamental Freedoms and the Universal Declaration of Human Rights, magisterially asserting that such antecedents “call for a generous interpretation avoiding …’the austerity of tabulated legalism’, suitable to give to individuals the full measure of the fundamental rights and freedoms referred to”. On this note, I should hasten to add that calling for a generous interpretation of human rights provisions is not to privilege a particular ideological bent at all costs; rather, it simply reflects a recognition that where the language of a human rights document permits, the more generous interpretation should be adopted. Nowhere would that be more possible than in this case, where the language of the provision is not one of “citizenship” or “nationality”, but rather of “own country”.

7.Against this background, the approach of the majority in finding no violation of article 12 (4) is a classic example of “tabulated legalism”. The majority focuses on the author’s lack of citizenship (see para. 8.2), an approach that is completely blind to the wider language used in the text. Compounding this misstep, the majority adds (in para. 8.3) that the author’s failure to demonstrate any procedural irregularity in domestic proceedings on the issue of his citizenship precludes any interference with the State party’s determination, which is again oblivious to the fact that the right in question under the Covenant is not confined to citizens but rather encompasses the conferring of protection on a wider class by the use of the term “own country”. At the domestic level, the focus was on citizenship; at the Committee level – where the text of the Covenant applies – the issue is a much broader one and the majority misdirected itself with its preoccupation with citizenship.

8.Applying the factors identified in paragraph 20 of general comment No. 27 (1999) on freedom of movement and reiterated in the Committee’s above-mentioned jurisprudence would produce the opposite conclusion to that reached by the majority. The author was involuntarily taken to Australia at age 5 by his parents and lived there for the rest of his life – some 52 years – before being deported to the United Kingdom in 2017. All of the members of his immediate family live in Australia, namely, his mother, his wife and his children, included among whom are a son who was only 6 years of age at the time and a daughter with a health condition rendering her extremely vulnerable. The author’s intention to remain in Australia has never been in question and was objectively established by his participation in a citizenship ceremony when he attained the age of majority in 1981 as well as by his involvement in the civic affairs of his community and the country at large by voting and even standing for elections. Any one of these factors would be sufficient to indicate the depth of the author’s attachment to Australia; combined, they leave no doubt that the State party qualifies as “his own country”. Indeed, if more than five decades of uninterrupted residence in a country are not sufficient to demonstrate “special ties” thereto, then it is unclear what could qualify.

9.Once it is accepted that for the purposes of article 12 (4) of the Covenant, Australia does qualify as the author’s own country, then it is at the same time difficult to resist the conclusion that the State party arbitrarily deprived him of the right to enter, which necessarily includes the right to remain therein. As pointed out by this Committee, there are “few, if any, circumstances in which deprivation of the right to enter one’s own country could be reasonable”. In this case, the factors that would strictly engage migration rules fall far short of contributing to a compelling case for deporting the author when measured against not only his lifelong attachment to the country, as discussed, but also the specific circumstances of the case. No evidence was presented portraying the author as a recidivist; rather, a psychologist’s report described the prognosis for his full rehabilitation as being very good (see para. 2.11); further, any risk that the author would reoffend was conceded by the Minister to be a low one (para. 4.9). In such circumstances, deportation constituted a nuclear option, completely at odds with the author’s lifelong attachment and profound familial ties to the country.

10.Given my views on the applicability of article 12 (4) of the Covenant, I find that the author’s pre-removal detention, which lasted for more than three years, was arbitrary and thus a violation of article 9 of the Covenant. Whatever the strict legality of the process, it was clearly unreasonable to keep him in such extended detention, especially when he could hardly pose any flight risk (he was, ironically, fighting to remain in the country!) and this incarceration served only to separate him from his family. That having been said, his detention was temporary. However disproportionate and ultimately wrong, it pales beside the drastic decision adopted by the State party, which was to banish the author permanently from the only home he has ever known. Considering that the author was severed from his closest relatives, including a son who was a minor and daughter who was ill, and sent to a country where he is a complete stranger, the State party’s response was not just disproportionate and arbitrary, it was callous and inhumane. For these reasons, I find that by deporting the author to the United Kingdom – a country from which he was removed at age 5 – the State party violated his rights under article 12 (4) of the Covenant and, through subjecting him to the processes leading thereto, his rights under article 9 as well.