Nations Unies

CCPR/C/135/2/Add.4

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

20 septembre 2022

Français

Original : anglais

Comité des droits de l’homme

Rapport sur le suivi des observations finales du Comité des droits de l’homme *

Additif

Évaluation des renseignements sur la suite donnée aux observations finales concernant la Roumanie

Observations finales (121 e session) :CCPR/C/ROU/CO/5, 6 novembre 2017

Paragraphes faisant l ’ objet d ’ un suivi :12, 30 et 42

Renseignements reçus de l ’ État partie : CCPR/C/ROU/FCO/5, 6 octobre 2020

Évaluation du Comité : 12 [B], 30 [B] [C] et 42 [B]

Paragraphe 12 : Égalité et droit des Roms de ne pas subir de discrimination

Résumé des renseignements reçus de l’État partie

Le droit interne prévoit que les expulsions sont menées en application d’une décision de justice ; les locataires peuvent demander une suspension de la mesure d’expulsion. La disposition du Code civil interdisant les expulsions entre le 1er décembre et le 1er mars ne s’applique pas aux personnes qui occupent abusivement un logement sans détenir de titre ou qui causent des troubles de voisinage ou troublent gravement l’ordre public. Tout abri, habitation ou autre structure de fortune érigé sans autorisation sur un terrain appartenant à l’État doit être démoli, sans autorisation judiciaire préalable ni autre formalité, si l’administration locale le décide. Les décisions de cette nature peuvent être contestées devant un tribunal.

En vertu de la modification apportée en 2019 à la loi sur l’aménagement du territoire et l’urbanisme, les établissements informels doivent être recensés et faire l’objet d’un traitement prioritaire dans les politiques publiques relatives au logement, à l’accès aux infrastructures, à la santé publique et à la sécurité personnelle. Lorsqu’elles décident de démanteler un établissement informel, les autorités locales doivent préalablement consulter les habitants et obtenir leur accord avant de les reloger ou de leur fournir un terrain et une aide afin qu’ils puissent reconstruire ailleurs. Les programmes d’aide sociale peuvent souvent venir en aide aux personnes vivant dans des établissements informels.

Afin de promouvoir l’intégration des enfants issus de familles socioéconomiquement défavorisées dans le système scolaire ordinaire, des chèques sociaux sont remis à de nombreuses familles, et de nombreux enfants bénéficient gratuitement de fournitures scolaires ainsi que de repas chauds à l’école. Le programme Éducation, bourses d’études, apprentissage et entrepreneuriat des jeunes de l’Espace économique européen comprend un volet destiné aux élèves roms et finance des projets sur l’école et l’éducation inclusives, la tolérance, les contextes multiculturels, la lutte contre la discrimination, le civisme démocratique et la formation des enseignants qui travaillent avec les enfants roms. La modification apportée en 2019 à la loi sur l’éducation nationale rend obligatoire l’enseignement préscolaire. En décembre 2021, le Ministère de l’éducation et de la recherche achèvera la mise en œuvre du projet de réforme de l’enseignement préprimaire. Des projets ciblés financés par les Fonds structurels de l’Union européenne sont également utilisés pour remédier aux difficultés auxquelles se heurtent les enfants des communautés défavorisées. L’ordonnance-cadre no 6134/2016 interdisant la ségrégation scolaire prévoit des méthodes de surveillance et de prévention de la ségrégation en milieu scolaire, ainsi qu’une méthode d’intervention s’appliquant lorsqu’un cas de ségrégation est avéré, et prévoit la création d’un comité national pour l’éducation inclusive et l’élimination de la ségrégation scolaire. Depuis l’année scolaire 2017/18, les inspections scolaires départementales peuvent revoir la carte scolaire pour aider à éliminer la ségrégation.

L’ordonnance gouvernementale d’urgence no 18/2017 sur les soins infirmiers communautaires a pour objet de garantir l’accès des Roms aux soins de santé de base et aux services collectifs. Une équipe composée d’une infirmière et d’un médiateur de santé diffuse, au niveau local, des informations essentielles sur les soins de base à dispenser aux enfants, les prestations du système d’assurance maladie, l’alimentation saine et le planning familial, facilite la mise en relation avec les professionnels de la santé et apporte de l’aide aux personnes les plus vulnérables qui ont des problèmes médicaux et sociaux. Le nombre de médiateurs de santé est passé de 391 en 2014 à 456 en 2019 et le nombre d’infirmiers et d’infirmières de proximité de 982 en 2014 à 1 694 en 2019. La plupart des équipes locales sont rémunérées par le Ministère de la santé, ce qui garantit la pérennité du projet. Le Ministère fournit également des lignes directrices prônant une alimentation saine et la pratique d’une activité physique par les enfants dans les écoles et les jardins d’enfants. Les habitants de 139 collectivités marginalisées bénéficieront de services médicaux, sociaux et éducatifs adaptés dans le cadre d’un projet qui doit s’achever en 2022.

L’évaluation de la stratégie nationale d’intégration des citoyens roumains appartenant à la minorité rom est en cours. L’Agence nationale pour les Roms a émis des recommandations d’actions publiques à mener pour favoriser l’intégration des Roms pour la période 2021-2027, proposant une approche fondée sur des données et mettant l’accent sur la responsabilisation des autorités locales. Le Conseil national de lutte contre la discrimination a prononcé des sanctions à l’encontre des autorités locales qui avaient fait expulser des Roms sans leur fournir de logement de remplacement et à l’encontre de celles qui, dans des communiqués de presse, avaient fait référence à l’origine ethnique de personnes enregistrées comme ayant des dettes de subsistance ou d’entretien.

Évaluation du Comité

[B]

Le Comité se félicite de la modification apportée à la loi sur l’aménagement du territoire et l’urbanisme et des garanties qu’elle institue, notamment en ce qui concerne la consultation préalable des résidents en cas de démantèlement d’un établissement informel, leur relogement et l’aide sociale ciblée. Il demande des renseignements sur l’application de cette modification législative, souhaitant notamment savoir si un préavis suffisant est respecté et notifié aux résidents en cas d’expulsion, et sur les ordres d’expulsion prononcés à l’encontre de Roms qui ont été contestés en justice.

Le Comité accueille avec satisfaction les renseignements donnés sur le programme Éducation, bourses d’études, apprentissage et entrepreneuriat des jeunes, la modification de la loi sur l’éducation nationale rendant l’enseignement préscolaire obligatoire et la création du Comité national pour l’éducation inclusive et l’élimination de la ségrégation scolaire. Il demande des informations sur le nombre d’enfants roms inscrits dans des établissements préscolaires pendant la période considérée et sur les mesures prises pour prévenir la ségrégation scolaire des enfants roms et pour y remédier le cas échéant, notamment la refonte de la carte scolaire.

Le Comité accueille favorablement les informations concernant l’ordonnance gouvernementale d’urgence no 18/2017 sur les soins infirmiers communautaires, les services fournis, l’augmentation du nombre de médiateurs de santé et d’infirmiers et d’infirmières et la contribution du Ministère de la santé à cet égard. Il souhaite savoir quels effets ont eu ces mesures, notamment sur la santé et l’espérance de vie des Roms.

Le Comité note que la stratégie nationale d’intégration des citoyens roumains appartenant à la minorité rom est en cours d’évaluation, que des recommandations d’actions publiques à mener pour favoriser l’intégration des Roms ont été émises par l’Agence nationale pour les Roms et que des sanctions ont été prononcées à l’encontre des autorités locales qui avaient adopté des mesures discriminatoires. Il regrette toutefois qu’aucune information ne lui ait été communiquée sur la coordination avec les autorités locales et sur un système global de collecte de données sur la discrimination à l’égard des Roms. Il renouvelle sa recommandation et demande des informations sur les conclusions de l’évaluation de la stratégie nationale et sur les sanctions prononcées contre les autorités locales ayant adopté des mesures discriminatoires à l’encontre des Roms pendant la période considérée.

Paragraphe 30 : Mauvais traitements dans les établissements publics de santé

Résumé des renseignements reçus de l’État partie

a)En 2018 et 2019, le mécanisme national de prévention, un service du Bureau de l’Avocat du peuple, a effectué plus de 100 visites dans des centres sociaux, des hôpitaux psychiatriques et des foyers d’aide à l’enfance, dont il est ressorti qu’il fallait améliorer les conditions matérielles et la protection juridique des résidents, qu’il existait des lacunes dans l’assistance médicale et la prise en charge, et que les mesures de contrainte et d’isolement n’étaient pas suffisamment consignées.

Le Conseil national de surveillance a contrôlé les établissements résidentiels et les hôpitaux psychiatriques afin de surveiller le respect des droits des personnes handicapées ; il a ainsi réalisé 57 visites d’inspection en 2018 et 96 visites en 2019. Il a formulé des recommandations, concernant notamment le respect de normes minimales de conditions de vie, le désengorgement des établissements et la formation du personnel.

En 2019, les inspecteurs sanitaires des directions départementales de la santé publique ont mené des inspections dans 131 hôpitaux psychiatriques et services hospitaliers. Ils ont constaté des problèmes de surpeuplement ainsi que des conditions de vie et d’hygiène précaires, et ont imposé 115 amendes administratives.

L’unité d’inspection sociale du Ministère du travail et de la protection sociale évalue, surveille et contrôle les services sociaux destinés aux adultes handicapés. En 2018, les inspecteurs ont contrôlé 692 services, ordonné 248 mesures suite à des constats d’irrégularités et retiré 19 licences. Entre le 1er janvier et le 1er octobre 2019, ils ont contrôlé 67 services, ordonné 87 mesures et proposé le retrait d’une licence. L’ordonnance ministérielle no 82/2019 énonce les normes minimales auxquelles doivent satisfaire les services sociaux destinés aux personnes handicapées et réglemente les activités visant à faciliter l’autonomie de vie et la prise de décisions.

b)Aucune information n’a été communiquée sur les mesures prises pour que les personnes handicapées ne subissent pas de discrimination dans l’exercice de leurs droits.

c)Pour accélérer la désinstitutionalisation, en 2018, l’ordonnance gouvernementale d’urgence no 69 a limité la capacité d’accueil des centres résidentiels à 50 places et obligé les centres dépassant cette limite à se restructurer. La décision gouvernementale no 69/2018 prévoit de réduire de 25 % chaque année les fonds provenant du budget de l’État qui sont allouées aux établissements résidentiels accueillant plus de 50 personnes. La prochaine stratégie nationale (2021-2027) prévoira un mécanisme de coordination plus strict, assortie d’objectifs et d’indicateurs mesurables, afin de faciliter encore la transition vers une prise en charge en milieu ouvert.

d)Aucune information n’a été communiquée sur les mesures prises pour s’assurer que toute restriction est légale, nécessaire et proportionnée à la situation personnelle, en dehors de la référence faite à la consignation incomplète des mesures de contention et d’isolement constatée lors des visites du mécanisme national de prévention (voir a) ci‑dessus)).

e)Le 13 juillet 2020, la Cour constitutionnelle a jugé inconstitutionnelles les dispositions du droit interne relatives à la privation totale de la capacité juridique, aux motifs que la procédure de désignation d’un tuteur ne garantissait pas suffisamment le respect des droits fondamentaux et que de tels accords n’étaient pas revus et adaptés périodiquement pour tenir compte de l’évolution du degré de handicap ni de l’intérêt et des souhaits de la personne handicapée. La Cour a estimé que le législateur devait instituer des mesures de protection proportionnelles reflétant la réalité des divers degrés de handicap et tenant compte de l’évolution de celui-ci dans le temps.

Évaluation du Comité

[B] : a) et c)

Le Comité prend note des activités de surveillance menées par le mécanisme national de prévention, le Conseil national de suivi et les inspecteurs sociaux, mais il regrette l’absence de renseignements sur l’application des recommandations formulées par ces organes de surveillance qui visent à améliorer les conditions de vie et de prise en charge dans les établissements publics de santé. Il renouvelle sa recommandation et demande que ces renseignements lui soient communiqués.

Le Comité se félicite des efforts déployés en vue de la désinstitutionalisation des personnes handicapées, notamment la définition du nombre maximum de personnes que peuvent accueillir les centres résidentiels et la restructuration des centres. Il prend également note du mécanisme de coordination que prévoit le cadre de la stratégie nationale 2021-2027. Il regrette toutefois qu’aucun renseignement ne lui ait été communiqué au sujet de l’appui communautaire fourni aux fins de la désinstitutionalisation, et demande des informations à ce sujet.

[C] : b), d) et e)

Le Comité regrette qu’aucune information n’ait été fournie sur les mesures adoptées pour faire en sorte que les personnes handicapées ne subissent pas de discrimination dans l’exercice de leurs droits et que toute restriction appliquée soit légale, nécessaire et proportionnée à la situation personnelle et assortie de garanties de recours effectif. Il renouvelle ses recommandations.

Le Comité se félicite que, le 13 juillet 2020, la Cour constitutionnelle ait jugé inconstitutionnelle la privation totale de la capacité juridique, mais il regrette l’absence d’informations sur les mesures prises pour continuer de modifier la législation en ce sens et sur les efforts déployés pour rétablir la capacité juridique des personnes handicapées. Il renouvelle sa recommandation et demande des renseignements sur l’application de la décision de la Cour constitutionnelle, notamment l’adoption des mesures de protection proportionnelles demandées par la Cour.

Le Comité s’inquiète de l’absence d’informations sur les mesures prises pour renforcer les mécanismes de plainte destinés aux personnes handicapées et aux personnes placées en établissement psychiatrique afin d’enquêter sur les cas de violences et poursuivre les auteurs, et pour assurer une représentation indépendante des personnes handicapées dans toute procédure afin de protéger leurs droits. Il renouvelle sa recommandation.

Paragraphe 42 : Protection des mineurs et droits de l’enfant

Résumé des renseignements reçus de l’État partie

Le nombre d’enfants placés en institution a diminué entre 2016 et 2019. Une modification apportée en 2018 à la loi sur la protection et la promotion des droits de l’enfant a étendu l’exception au placement en institution aux enfants de moins de 7 ans. Désormais, la loi n’autorise à placer en institution un enfant de moins de 7 ans que s’il présente un handicap lourd et qu’il a besoin de soins dispensés dans une institution résidentielle spécialisée. Une autre modification, actuellement à l’étude, étendrait l’exception aux enfants handicapés de moins de 3 ans. Ainsi, seuls les enfants âgés de 3 à 7 ans qui présentent un handicap fonctionnel total, dont l’activité est limitée et la participation très restreinte, et pour lesquels tout autre type de réadaptation est impossible, pourraient être placés en institution. Si elle est adoptée, la modification entrera en vigueur le 1er janvier 2021.

L’Autorité nationale pour les droits des personnes handicapées et des enfants et l’adoption surveille la situation en ce qui concerne la violence contre les enfants et l’exploitation par le travail. En 2018 et 2019, elle a enregistré 679 cas d’exploitation du travail des enfants et 71 cas d’exploitation sexuelle des enfants. Les équipes intersectorielles départementales, qui sont composées de représentants de la Direction générale de l’assistance sociale et de la protection de l’enfance, de la police, des services d’inspection de la santé, de l’éducation et du travail et d’organisations non gouvernementales, œuvrent à la prévention en menant des campagnes de sensibilisation et des formations, notamment sur le travail des enfants et la traite des enfants. Le mécanisme national de prévention a effectué des visites dans les institutions où sont placés des enfants. Le nouveau Défenseur des enfants relevant du Bureau de l’Avocat du peuple, dont le mandat a été créé par la loi no 9/2018, a établi en 2019 un rapport spécial sur l’état des droits de l’enfant et s’est rendu dans des institutions où des enfants sont placés et dans des foyers d’accueil.

Évaluation du Comité

[B]

Le Comité se félicite de la baisse du nombre d’enfants placés en institution ainsi que des mesures législatives adoptées, notamment la proposition de modification législative visant à limiter le placement en institution d’enfants de moins de 3 ans, mais il regrette qu’aucun renseignement n’ait été communiqué sur les mesures prises pour éviter le placement en institution d’enfants issus de familles monoparentales, pour recourir au placement dans un milieu familial de substitution et pour garantir des conditions de vie et des soins de santé adéquats dans les institutions résidentielles. Il renouvelle sa recommandation à ce sujet.

Le Comité prend note des actions menées par l’Autorité nationale pour les droits des personnes handicapées et des enfants et l’adoption et par les équipes intersectorielles départementales pour lutter contre l’exploitation des enfants, ainsi que de la création du mandat de Défenseur des enfants. Il demande des informations supplémentaires sur les effets de ces mesures.

Le Comité note qu’un certain nombre d’enquêtes ont été menées sur des cas d’exploitation d’enfants, mais il regrette qu’aucun renseignement n’ait été communiqué sur les résultats de ces enquêtes, notamment sur les sanctions qui ont été prises. Il renouvelle sa recommandation et demande des informations sur toutes réparations offertes aux victimes dans de telles affaires.

Mesures recommandées : Une lettre devrait être adressée à l’État partie pour l’informer de l’arrêt de la procédure de suivi. Les renseignements demandés devraient être communiqués par l’État partie dans son prochain rapport périodique.

Prochain rapport périodique attendu en : 2027 (examen du rapport en 2028, selon le cycle d’examen prévisible).