Nations Unies

CCPR/C/136/2/Add.2

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

5 décembre 2022

Français

Original : anglais

Comité des droits de l’homme

Rapport sur le suivi des observations finales du Comité des droits de l’homme *

Additif

Évaluation des renseignements sur la suite donnée aux observations finales concernant l’Angola

Observations finales (125 e session) :CCPR/C/AGO/CO/2, 22 mars 2019

Paragraphes faisant l’objet d’un suivi :22, 26 et 46

Renseignements reçus de l’État partie :CCPR/C/AGO/FCO/2, 29 mars 2021

Évaluation du Comité:22 [C][B], 26 [B][A][C] et 46 [C]

Paragraphe 22 : Interruption volontaire de grossesse et mortalité maternelle

L’État partie devrait revoir sa législation de façon à s’assurer qu’elle ne réglemente pas la grossesse et l’avortement d’une manière contraire à l’obligation qui lui incombe de veiller à ce que les femmes et les filles n’aient pas à recourir à des avortements non sécurisés, et supprimer tout obstacle qui oblige les femmes à recourir à des avortements clandestins susceptibles de mettre en danger leur vie ou leur santé. Il devrait en particulier :

a) Veiller à ce qu’il ne soit pas imposé de sanctions pénales aux femmes qui se font avorter ou aux prestataires de services de santé qui les accompagnent dans cette démarche ;

b) Faire en sorte que les femmes et les filles aient effectivement accès à des soins de santé prénatals et postavortement de qualité sur l’ensemble du territoire de l’État partie ;

c) Veiller à ce que toute la population, et en particulier les jeunes, ait accès à une information et une éducation de qualité et factuelle sur la santé sexuelle et procréative ainsi qu’à une large gamme de méthodes contraceptives abordables.

Résumé des renseignements reçus de l’État partie

a)La question de l’avortement relève de la protection du droit à la vie, lequel droit est consacré par la Constitution. Si le Code pénal (loi no 38/20 du 11 novembre 2020) fait primer la protection du droit à la vie, il prévoit certaines exceptions afin de tenir compte des pratiques internationales en matière de droits humains. Après de nombreuses consultations et discussions publiques, l’avortement a été considéré comme un délit passible d’une peine de prison pouvant aller de deux à huit ans, sauf dans les circonstances suivantes, prévues par l’article 156 du Code pénal : a) lorsque la vie d’une femme est en danger ou qu’elle risque de subir des lésions physiques ou psychiques graves et irréversibles, à condition que l’interruption de grossesse soit pratiquée à la demande de la femme enceinte ou avec son consentement ; b) lorsqu’il est médicalement prouvé que le fœtus n’est pas viable ; c) lorsque la grossesse résulte d’une infraction à la liberté et à l’autodétermination sexuelles et que l’interruption est pratiquée au cours des seize premières semaines de grossesse.

b)Les établissements et infrastructures de santé sont développés en vue de garantir l’accès effectif des femmes à des soins de santé prénatals et des soins liés à l’avortement de qualité. Afin de décentraliser la prestation des services de santé, de rapprocher ces derniers de la population et de garantir la disponibilité de services de santé de qualité, les fonds destinés aux soins de santé primaires sont directement alloués aux municipalités. La mortalité maternelle et infanto-juvénile a été réduite grâce à l’exécution de programmes tels qu’un plan complet de soins de santé pour la mère et l’enfant. Le décret présidentiel no 59/19 du 14 mai 2019 a conduit à la signature avec la Banque mondiale d’un accord destiné à financer un projet de renforcement du système national de santé. Le projet, qui permettra d’améliorer le fonctionnement de 300 établissements de soins de santé primaires situés dans 21 municipalités, sera bénéfique en particulier aux femmes en âge de procréer et aux enfants de moins de 5 ans.

c)Il existe un plan stratégique de sensibilisation des adolescents à la santé sexuelle et procréative, dont la mise en œuvre contribue à réduire le taux de grossesse chez les filles de moins de 18 ans. Une stratégie d’action globale pour la santé des adolescents et des enfants, visant à sensibiliser ces groupes et à leur fournir des informations sur la santé sexuelle et procréative, a été adoptée en collaboration avec des acteurs nationaux et internationaux.

Évaluation du Comité

[C] : a)

Prenant note des informations communiquées, le Comité regrette que l’État partie continue d’infliger des sanctions pénales pour l’avortement dans des circonstances autres que celles visées à l’article 156 du Code pénal. Il réitère sa recommandation.

[B] : b) et c)

Le Comité accueille avec satisfaction les informations relatives au développement des établissements et infrastructures de santé, à l’affectation directe aux municipalités des fonds destinés aux soins de santé primaires et à la réduction de la mortalité maternelle et infanto‑juvénile. Il demande des renseignements complémentaires sur : a) les mesures prises pour améliorer l’accès à des soins de santé prénatals et des soins liés à l’avortement de qualité ; b) l’exécution des programmes visant à réduire la mortalité maternelle et infanto‑juvénile, tels que le plan complet de soins de santé pour la mère et l’enfant, et les effets de ces programmes, assortis de données statistiques actualisées ; c) l’exécution du projet de renforcement du système national de santé financé par la Banque mondiale, et les effets du projet.

Le Comité accueille avec satisfaction les informations relatives à l’adoption de la stratégie d’action globale pour la santé des adolescents et des enfants. Il demande des renseignements complémentaires sur : a) la date d’adoption de la stratégie, les activités qui ont été menées et les dispositions qui ont été prises ; b) le plan stratégique visant à sensibiliser toute la population, en particulier les jeunes, et à fournir des informations sur la santé sexuelle et procréative, et les mesures et dispositions concrètes prises ; c) des données statistiques actualisées sur le taux de grossesse chez les filles de moins de 18 ans.

Paragraphe 26 : Usage excessif de la force et comportement des agents de la force publique

L’État partie devrait :

a) Veiller à ce que les principes de nécessité et de proportionnalité dans l’usage de la force soient dûment pris en compte dans la législation et les politiques et à ce qu’ils soient respectés dans la pratique, conformément aux Principes de base sur le recours à la force et l’utilisation des armes à feu par les responsables de l’application des lois ;

b) Renforcer la formation dispensée aux membres des forces de l’ordre sur les normes internationales relatives au recours à la force, et sensibiliser les juges, les procureurs et les avocats à cette question ;

c) Faire en sorte que tous les cas d’usage excessif de la force par les forces de sécurité donnent lieu sans tarder à des enquêtes impartiales et efficaces, que les responsables soient traduits en justice et condamnés à des peines appropriées et que les victimes disposent de recours utiles.

Résumé des renseignements reçus de l’État partie

a)La loi-cadre sur l’organisation et le fonctionnement de la police (loi-cadre no 6/20 du 24 mars 2020) a établi les principes régissant le comportement des policiers, parmi lesquels figurent notamment la légalité, l’intégrité, la responsabilité, la courtoisie et le respect de la vie privée. Le Règlement relatif au régime disciplinaire du personnel de la police nationale, adopté en vertu du décret présidentiel no38/14 du 19 février 2014, fixe les sanctions disciplinaires dont sont passibles les différentes infractions, et le comportement du personnel de la police nationale est également régi par le Statut organique de la police nationale et la loi sur les infractions militaires. Tous ces textes sont conformes aux normes internationales, notamment au Code de conduite pour les responsables de l’application des lois. L’élaboration d’un projet de loi sur l’utilisation des armes à feu et des mesures de contrainte par les forces de police a bien avancé. Les forces de police angolaises respectent d’ores et déjà les principes internationaux relatifs à l’utilisation des armes à feu par les forces de l’ordre.

b)La question des droits de l’homme est abordée dans le programme de formation de la police nationale que dispense l’Institut national des sciences médico-légales. Quatre cours de formation ont été organisés dans le cadre du mémorandum de coopération signé en 2018 entre le Ministère de la justice et des droits de l’homme, le Ministère de l’intérieur et la Police nationale, puis reproduits au niveau des provinces, ce qui a permis de former plus de 1 000 membres des forces de sécurité, notamment à l’usage de la force. La coopération entre le Ministère de l’intérieur et le Programme des Nations Unies pour le développement a donné lieu à neuf activités de formation, organisées en 2020, destinées à enseigner au personnel du Ministère comment, dans l’exercice de ses fonctions, interagir avec la population dans le respect de la dignité humaine, des droits de l’homme et des principes d’égalité, de dignité et de respect. Au total, 375 agents de police ont été formés au respect des normes relatives aux droits de l’homme en période d’état d’urgence ou en situation de catastrophe, aux mécanismes de défense des droits de l’homme, aux incidences psychologiques de la maladie à coronavirus (COVID-19), au respect des normes relatives aux droits de l’homme dans le contexte de la détention et de l’usage de la force et aux responsabilités de la police dans le cadre de la riposte à la COVID-19. Plusieurs organisations non gouvernementales proposent des ateliers de formation pour les fonctionnaires, notamment sur la citoyenneté et la sécurité publique. Le Centre pour les droits de l’homme et la citoyenneté de l’Université catholique d’Angola a dispensé une formation sur les droits de l’homme à 86 agents pénitentiaires et 55 procureurs. La question des droits de l’homme a également été intégrée dans le programme de l’Institut national d’études judiciaires, afin de sensibiliser et de former les juges et les procureurs.

c)Conformément au Règlement relatif au régime disciplinaire du personnel de la police nationale, lorsque le comportement d’un agent constitue une infraction commise dans l’exercice de ses fonctions ou nuit à l’harmonie sociale, une notification officielle est émise et communiquée au ministère public ou au Bureau du procureur militaire afin que des poursuites pénales soient engagées. Le Département des enquêtes et des plaintes est expressément chargé de traiter les affaires dans lesquelles des agents de police ou d’autres fonctionnaires agissant dans l’exercice de leurs fonctions portent atteinte aux droits des personnes. Le Département des enquêtes et des poursuites pénales, qui relève du Bureau du Procureur général, punit les abus de ce type, en particulier ceux qui sont le fait de hauts fonctionnaires. Il se charge des enquêtes et des procédures d’instruction et traduit les responsables présumés devant la justice. Parmi les affaires dans lesquelles des agents ont été sanctionnés entre 2016 et 2018, 30 % étaient liées à des mauvais traitements infligés aux citoyens ou à des comportements inappropriés à leur égard. Les membres de la police nationale ont reçu plus de sanctions que le personnel des autres services ; les pompiers sont ceux qui en ont reçu le moins. La police nationale a connu 79 affaires en 2017, 186 en 2018 et 7 en 2019. Les agents concernés se sont vu infliger diverses sanctions disciplinaires et pénales : peines d’emprisonnement, démission ou licenciement, amendes et avertissements écrits. En 2020, en raison de la pandémie de COVID-19, l’exercice de certains droits fondamentaux a été restreint pendant soixante jours dans le cadre de l’état d’urgence et des mesures de confinement instaurés par le décret présidentiel no 81/20 du 25 mars 2020 sur la base des articles 57 et 58 de la Constitution, de la loi sur l’état d’urgence no 17/91 du 11 mai 1991 et de l’article 4 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Au cours de cette période, un certain nombre de cas de recours excessif à la force ont été recensés, qui portaient toutes sur des actes individuels dont les auteurs ont eu à répondre. Sur les 185 procédures engagées, 157 étaient des enquêtes, 26 étaient de nature disciplinaire, 10 concernaient des affaires qui ont été renvoyées à la police judiciaire militaire et 9 sont encore entre les mains du Service d’enquête criminelle du Ministère de l’intérieur. Certaines affaires ont fait l’objet de condamnations publiques.

Évaluation du Comité

[B] : a)

Le Comité note avec satisfaction l’adoption de la loi-cadre sur l’organisation et le fonctionnement de la police, qui établit les principes régissant le comportement des policiers. Il demande des renseignements complémentaires sur les mesures prises pour garantir l’application effective des principes établis par la loi-cadre.

Tout en prenant note avec satisfaction de l’élaboration en cours d’un projet de loi qui fixera les règles régissant l’utilisation des armes à feu et des mesures de contrainte par les forces de police, le Comité demande des renseignements complémentaires sur l’avancement de l’élaboration du projet, notamment sur le calendrier prévu pour son achèvement et son adoption.

[A] : b)

Le Comité accueille avec satisfaction les informations concernant la formation des membres des forces de sécurité et des agents de police à l’usage de la force et au respect des droits de l’homme, y compris en période d’état d’urgence et dans les situations de catastrophe. Il demande des renseignements complémentaires sur ce qui est fait pour que les activités de formation s’inscrivent dans la durée et sur les autres mesures de sensibilisation.

[C] : c)

S’il prend note des renseignements relatifs aux règles et procédures qui s’appliquent lorsque le comportement d’un agent constitue une infraction commise dans l’exercice de ses fonctions ou nuit à l’harmonie sociale, le Comité regrette l’absence d’informations sur les mesures prises pour faire en sorte que les victimes disposent de recours utiles et d’informations précises sur les enquêtes menées pendant toute la période considérée et sur leurs résultats. Il réitère sa recommandation et demande des renseignements complémentaires sur le nombre total de plaintes pour usage excessif de la force reçues au cours de la période considérée ainsi que sur le nombre d’enquêtes menées et l’issue de ces enquêtes, notamment les éventuelles poursuites engagées contre les auteurs et mesures de réparation accordées en faveur des victimes.

Paragraphe 46 : Liberté de réunion

L’État partie devrait :

a) Veiller à ce que toutes les restrictions aux manifestations pacifiques qui ne sont pas strictement nécessaires et proportionnées au sens de l’article 21 du Pacte soient levées ;

b) Enquêter sur toutes les allégations de recours à une force excessive, à l’intimidation et à la détention arbitraire contre des manifestants pacifiques, et veiller à ce que les auteurs de tels actes soient dûment poursuivis et condamnés et à ce que les victimes reçoivent une indemnisation adéquate.

Résumé des renseignements reçus de l’État partie

a)La liberté de réunion et de manifestation est consacrée par l’article 47 de la Constitution et prévue par la loi no 16/91 du 11 mai 1991 sur le droit de réunion et de manifestation. Conformément à l’article 21 du Pacte, les citoyens peuvent manifester librement, à condition que leurs actions ne portent pas atteinte aux droits d’autrui et soient pacifiques et respectueuses de l’ordre et de la paix publics. Plusieurs manifestations ont eu lieu, généralement dirigées contre les pouvoirs publics ou contre la société. En 2018, 43 manifestations ont réuni 14 828 participants, et en 2019, il y a eu 63 manifestations pacifiques, qui ont toutes été encadrées par la police nationale, sans heurts.

b)Les moyens et le nombre d’agents déployés par la police nationale lors des manifestations dépendent de la situation et des problèmes rencontrés, et le principe de la proportionnalité est respecté. Il existe des dispositifs qui permettent d’enquêter sur les éventuels cas d’usage excessif de la force et de demander des comptes aux auteurs de tels actes. Tous les placements en détention décidés par les autorités de police respectent l’état de droit et toutes les personnes détenues sont déférées au ministère public dans les délais légaux. Toute personne responsable d’une détention arbitraire est soumise à des procédures disciplinaires ou pénales. Certains événements violents peuvent avoir été assimilés à tort à des manifestations, notamment des actes de vandalisme et de violence commis par des citoyens dans les provinces de Cabinda, de Luanda, de Lunda Norte et de Lunda Sul en particulier. Ces actes sont contraires aux principes des droits de l’homme car ils portent atteinte aux droits des autres citoyens ou les limitent. En pareil cas, des procédures pénales sont engagées. L’État partie souligne l’importance de l’adoption et de la mise en œuvre de la Stratégie nationale des droits de l’homme 2020-2022 et de son plan d’action, qui sont conformes aux instruments internationaux dont l’application est contrôlée par les différents organes conventionnels.

Évaluation du Comité

[C]

Tout en prenant note des informations fournies quant aux manifestations tenues en 2018 et 2019, le Comité regrette l’absence de renseignements détaillés sur les mesures qui auraient été prises après l’adoption des observations finales. Il réitère sa recommandation et demande des renseignements complémentaires sur : a) les mesures prises pour veiller à ce que toutes les restrictions aux manifestations pacifiques qui ne sont pas strictement nécessaires et proportionnées au sens de l’article 21 du Pacte soient levées ; b) le nombre de plaintes reçues pour recours à une force excessive, à l’intimidation ou à la détention arbitraire contre des manifestants pacifiques, le nombre d’enquêtes menées et leurs résultats, ainsi que les éventuelles poursuites engagées contre les auteurs et mesures de réparation accordées en faveur des victimes, y compris l’indemnisation adéquate de ces dernières.

Mesures recommandées : Une lettre devrait être adressée à l’État partie pour l’informer de l’arrêt de la procédure de suivi. Les renseignements demandés devraient être communiqués par l’État partie dans son prochain rapport périodique.

Prochain rapport périodique attendu en : 2028 (examen du rapport en 2029, conformément au cycle d’examen prévisible).