Nations Unies

CCPR/C/133/D/3124/2018*

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

27 janvier 2022

Français

Original : anglais

Comité des droits de l’homme

Décision adoptée par le Comité au titre du Protocole facultatif, concernant la communication no 3124/2018 ** , ***

Communication présentée par :

G. B. (non représenté par un conseil)

Victime (s) présumée (s):

L’auteur

État partie :

Lettonie

Date de la communication :

12 octobre 2017 (date de la lettre initiale)

Références :

Décision prise en application de l’article 92 du règlement intérieur du Comité, communiquée à l’État partie le 14 février 2018 (non publiée sous forme de document)

Date de la décision :

5 novembre 2021

Objet :

Divulgation à la défense de dossiers confidentiels

Question (s) de procédure :

Recevabilité

Questions (s) de fond :

Procès équitable, présomption d’innocence

Articles(s) du Pacte :

14 (par. 1, 2 et 6)

Articles (s) du Protocole facultatif :

2, 3 et 5 (par. 2 b))

1.L’auteur de la communication est G. B., de nationalité lettone. Il affirme que l’État partie a violé les droits qu’il tient de l’article 14 (par. 1, 2 et 6) du Pacte. Le Protocole facultatif est entré en vigueur pour la Lettonie le 22 septembre 1994. L’auteur n’est pas représenté par un conseil.

Rappel des faits présentés par l’auteur

2.1En octobre et novembre 2004, la police a mené une opération d’enquête spéciale contre l’auteur. Dans le cadre de cette opération, un policier infiltré, I., se faisant passer pour un trafiquant de drogues, a contacté l’auteur et l’a convaincu de devenir un intermédiaire dans un trafic de drogues. L’auteur affirme que I., qui était toujours en civil quand ils se rencontraient, n’intervenait pas dans des activités criminelles en cours mais a en fait lui‑même monté une affaire en lui envoyant des textos, en provoquant une rencontre soi-disant fortuite et en l’encourageant de façon répétée à lui procurer de la drogue. L’auteur fait observer que le policier infiltré n’a pas été passif mais l’a au contraire incité à commettre l’infraction qui s’est produite le 3 novembre 2004, lorsque I. lui a acheté de la drogue.

2.2Le 21 octobre 2005, le tribunal régional de Riga a reconnu l’auteur coupable d’acquisition et détention illégales de stupéfiants dans l’intention de les vendre, avec circonstances aggravantes, et l’a condamné à dix ans d’emprisonnement, avec confiscation des fonds. La Chambre des affaires criminelles de la Cour suprême et le Sénat de la Cour suprême ont rejeté, respectivement le 15 septembre 2006 et le 19 mars 2007, l’appel et le pourvoi en cassation formés par l’auteur.

2.3Le 12 juin 2007, l’auteur a saisi la Cour européenne des droits de l’homme. Le 8 janvier 2013, la Cour a notamment considéré que, s’il incombait à l’accusation de prouver qu’il n’y pas eu provocation, la capacité des tribunaux internes d’assurer l’équité du procès serait compromise si, lorsqu’une provocation est alléguée, ces tribunaux fondaient leurs conclusions sur des informations non vérifiées détenues exclusivement par l’accusation. La Cour a jugé qu’il y avait eu violation de l’article 6 (par. 1) de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (la Convention européenne des droits de l’homme), notant que, dans le cadre des poursuites pénales engagées contre l’auteur, les tribunaux internes n’avaient pas répondu comme il convient à son allégation de provocation ni examiné les décisions ayant autorisé les mesures spéciales d’enquête. La Cour a considéré que la forme de réparation la plus appropriée consisterait à faire rejuger le requérant. Elle a en outre accordé à celui-ci 5 000 euros de dommages-intérêts au titre du préjudice moral.

2.4Le 20 juin 2013, le Procureur général du Parquet spécialisé dans la criminalité organisée et d’autres domaines a rouvert la procédure pénale en invoquant des faits nouveaux.

2.5Le 1er octobre 2013, le Sénat de la Cour suprême a annulé sa décision du 19 mars 2007 ainsi que la décision de la Chambre des affaires criminelles du 15 septembre 2006 et a rouvert la procédure pénale. L’affaire a été renvoyée à la Chambre des affaires criminelles pour qu’elle examine, dans le cadre d’un nouveau procès, la conclusion de la Cour européenne des droits de l’homme selon laquelle les droits humains de l’auteur avaient été violés.

2.6Le 26 septembre 2014, la Chambre des affaires criminelles a rejugé l’affaire au fond ; elle a examiné l’allégation de l’auteur selon laquelle il avait été incité à commettre une infraction et a pris connaissance des informations classifiées. Elle a rejeté les allégations de l’auteur concernant la légalité des mesures spéciales d’enquête prises à son encontre et jugé que les actions de la police ne constituaient pas une provocation. L’auteur indique que la Chambre, statuant en appel, a examiné les deux dossiers d’enquête spéciale concernant l’opération policière « Rebus » mais ne les a pas versés au dossier. Il fait aussi valoir qu’elle n’a pas expressément évoqué l’opération de police « Rebus » dans sa décision au motif que les informations obtenues au moyen de mesures spéciales d’enquête devaient demeurer classifiées. Si la juridiction d’appel a bien examiné ces deux dossiers, l’auteur s’inquiète de ce que les informations qui y figurent n’ont pas été vérifiées à l’audience. Il met en doute leur fiabilité, soulignant que les informations recueillies dans le cadre de mesures spéciales d’enquête ne sont bien souvent que de pures spéculations, suppositions et conjectures.

2.7Le 20 février 2015, la Cour suprême, statuant en cassation, a rejeté le recours de l’auteur. Elle a considéré qu’il avait bénéficié des garanties voulues puisque la juridiction d’appel avait dûment pris connaissance de la teneur des dossiers contestés avant de décider de ne pas les divulguer à la défense et qu’elle avait donc pu statuer en connaissance de cause.

2.8L’auteur indique que la Cour suprême a examiné ses griefs portant sur le refus d’accès aux dossiers des enquêtes spéciales et invoqué la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme confirmant que le droit de la défense à la divulgation des preuves n’était pas absolu et devait, dans certaines circonstances, être mis en balance avec l’intérêt public et la nécessité de protéger les tiers. Il ajoute que la juridiction d’appel et la Cour suprême ont fait valoir que la restriction du droit de la défense à la divulgation des deux dossiers d’enquête spéciale concernant l’opération de police « Rebus » était fondée sur les articles 8 (par. 3) et 24 (par. 1) de la loi relative aux mesures spéciales d’enquête, qui disposent que les informations contenues dans de tels dossiers constituent un secret d’État. De plus, la Cour suprême a déclaré qu’une telle restriction était particulièrement nécessaire pour protéger à la fois les droits fondamentaux des tiers et l’intérêt public et que, en imposant cette restriction, la juridiction d’appel avait raisonnablement mis en balance l’intérêt public et l’intérêt de l’accusé.

2.9L’auteur conteste l’argument de la Cour suprême, faisant observer que le fondement juridique de la restriction en cause devrait être non pas la loi relative aux mesures spéciales d’enquête mais l’article 6 (par. 1) de la Convention européenne des droits de l’homme, et que la Cour n’avait pas expliqué pourquoi cette restriction était absolument nécessaire. L’auteur estime en outre que la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme citée par la Cour suprême était dénuée de pertinence. Il fait valoir que la juridiction d’appel n’a pas utilisé toutes les options légales prévues par le Code de procédure pénale qui auraient permis à la défense d’exercer pleinement son droit d’examiner les dossiers contestés. Quant à l’affirmation de la Cour suprême selon laquelle la restriction imposée visait à protéger l’intérêt public, l’auteur fait observer qu’on voit mal à quel intérêt public il aurait été porté atteinte s’il avait été autorisé à prendre connaissance d’informations qui, après tout, étaient considérées comme des éléments de preuve très importants. Il était accusé d’une infraction qui n’avait pas menacé la sûreté de l’État et n’était pas violente. L’infraction dont il était accusé ne portait pas si gravement atteinte à l’intérêt public qu’il fût nécessaire de restreindre dans une aussi large mesure son droit fondamental de se défendre. Par conséquent, l’auteur conclut que la Cour suprême n’a pas assuré un équilibre raisonnable entre l’intérêt public et l’intérêt de l’accusé.

2.10Le 1er décembre 2016, la requête introduite par l’auteur devant la Cour européenne des droits de l’homme concernant l’arrêt rendu par celle-ci en l’affaire Baltiņš c. Lettonie a été rejetée par la Cour, siégeant en formation de juge unique, et déclarée irrecevable au motif qu’elle ne satisfaisait pas aux critères de recevabilité énoncés aux articles 34 et 35 de la Convention européenne des droits de l’homme.

Teneur de la plainte

3.1L’auteur affirme que l’État partie a violé les droits qu’il tient de l’article 14 (par. 1) du Pacte parce que ni la juridiction d’appel, ni la Cour suprême statuant en cassation, n’ont vérifié lors des audiences les informations figurant dans les deux dossiers d’enquête spéciale concernant l’opération de police « Rebus » et qui, au lieu d’être admises comme éléments de preuve, auraient dû être exclues. La restriction du droit de la défense à ce que les informations concernant l’opération de police « Rebus » lui soient divulguées lors du procès n’était ni transparente ni impartiale.

3.2Par ailleurs, l’auteur affirme que son droit à être présumé innocent jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie, garanti à l’article 14 (par. 2) du Pacte, a été violé parce que les tribunaux internes n’ont pas pu prouver qu’il aurait commis l’infraction dont il était accusé s’il n’y avait pas été incité. Ils l’ont reconnu coupable parce qu’ils n’ont pas interprété les doutes existants en sa faveur.

3.3L’auteur demande au Comité de recommander à la Lettonie d’annuler sa déclaration de culpabilité et de lui verser une indemnité conformément à l’article 14 (par. 6) du Pacte.

Observations de l’État partie sur la recevabilité

4.1Dans une note verbale du 12 avril 2018, l’État partie fait part de ses observations. Il indique qu’en février 2004, la division de la Police nationale chargée de la lutte contre la drogue a reçu de ses informateurs des renseignements indiquant que l’auteur était impliqué dans des infractions liées à la drogue. Les responsables de la division ont donc ouvert une procédure d’enquête spéciale (dossier no 7004204).

4.2Le 27 octobre 2004, la division est passée à l’étape suivante de ses activités d’enquête spéciale et a ouvert la procédure no 7019304, et elle a informé le Parquet général de la nature et de la portée de ces activités.

4.3Entre le 2 novembre et le 1er décembre 2004, le Parquet général a autorisé plusieurs activités spéciales d’enquête contre l’auteur au cours desquelles celui-ci a rencontré un policier infiltré, I., lui a fourni de la méthamphétamine et a discuté de la possibilité de l’approvisionner régulièrement en stupéfiants. Toutes les conversations, y compris téléphoniques, entre l’auteur et I. étaient enregistrées. Les rencontres entre l’auteur et I. ont cessé le 1er décembre 2004, quand l’auteur a appelé I. pour se plaindre que les billets que celui-ci lui avait remis en paiement de la drogue avaient été marqués au moyen d’un produit chimique.

4.4Le 1er décembre 2004, la division chargée de la lutte contre la drogue a engagé une action pénale contre l’auteur pour acquisition et détention illégales de stupéfiants dans l’intention de les vendre, avec circonstances aggravantes.

4.5Le 6 décembre 2004, l’auteur a été appréhendé par des agents de la division. Les policiers ont perquisitionné son domicile et saisi plusieurs objets à titre de pièces à conviction. L’examen médico-légal a confirmé que les objets saisis portaient des traces chimiques de méthamphétamine et de cocaïne.

4.6Le 4 janvier 2005, l’auteur a été accusé d’acquisition et de détention illégales de stupéfiants dans l’intention de les vendre, avec circonstances aggravantes. Le 21 octobre 2005, le tribunal régional de Riga l’a reconnu coupable et l’a condamné à dix ans de privation de liberté avec confiscation de biens et trois ans de contrôle judiciaire.

4.7Le 15 septembre 2006, la Chambre des affaires criminelles de la Cour suprême, statuant en appel, a confirmé le jugement du tribunal régional de Riga. L’auteur s’est pourvu en cassation devant le Sénat de la Cour suprême, faisant valoir qu’il avait été incité par la police à commettre une infraction, en violation de la loi relative aux mesures spéciales d’enquête .

4.8Le 1er mars 2007, le Sénat de la Cour suprême a demandé au Parquet général des informations au sujet des allégations formulées par l’auteur dans son pourvoi.

4.9Le 13 mars 2007, le Parquet général a informé le Sénat de la Cour suprême des activités spéciales d’enquête menées contre l’auteur et a affirmé que les actes du policier infiltré, I., n’avaient pas constitué une incitation à commettre une infraction pénale ; au contraire, les policiers étaient intervenus dans des activités criminelles déjà en cours et les avaient déjouées.

4.10Le 19 mars 2007, le Sénat de la Cour suprême a rejeté le pourvoi en cassation de l’auteur, considérant que celui-ci n’avait pas fait l’objet d’une provocation policière car les autorités disposaient de suffisamment d’informations indiquant qu’il était impliqué dans un trafic de stupéfiants.

4.11Le 12 juin 2007, l’auteur a saisi la Cour européenne des droits de l’homme d’une requête dans laquelle il alléguait qu’il avait fait l’objet d’une provocation policière et que sa cause n’avait pas été entendue équitablement lors de la détermination du bien-fondé des accusations en matière pénale dirigées contre lui.

4.12Le 8 janvier 2013, la Cour européenne des droits de l’homme a constaté une violation de l’article 6 (par. 1) de la Convention européenne des droits de l’homme. La Cour n’a pas considéré que l’auteur avait fait l’objet d’une provocation policière, contrairement à ce que celui-ci allègue dans sa communication au Comité. Elle a jugé que, dans le cadre du procès pénal, les tribunaux internes n’avaient pas examiné les décisions ayant autorisé les mesures spéciales d’enquête prises à son encontre et n’avaient donc pas examiné comme il convient ses allégations de provocation. La Cour a aussi jugé que la forme de réparation la plus appropriée consisterait à rejuger l’auteur si celui-ci en faisait la demande. L’arrêt de la Cour est devenu définitif le 8 avril 2013.

4.13Le 26 septembre 2014, la Chambre des affaires criminelles de la Cour suprême a rejugé l’affaire au fond. À la lumière des conclusions de la Cour européenne des droits de l’homme, elle a en particulier examiné l’allégation d’incitation à la commission d’une infraction formulée par l’auteur. Elle s’est fait communiquer par la police les dossiers d’enquête spéciale no 7004204 et no 7019304 concernant l’opération « Rebus » et a examiné les informations classifiées y figurant.

4.14L’État partie fait observer qu’étant donné que les informations obtenues au moyen des mesures spéciales d’enquête figurant dans les dossiers confidentiels étaient classifiées, la Chambre des affaires criminelles de la Cour suprême ne s’y est pas référée directement mais, en ayant pris connaissance, elle a dans un premier temps réfuté les allégations de l’auteur concernant la légalité des mesures spéciales d’enquête. Elle a notamment établi que toutes les mesures contestées, y compris l’opération spéciale d’enquête, avaient été autorisées par le procureur compétent du Parquet général conformément aux dispositions pertinentes de la loi relative aux mesures spéciales d’enquête. Elle s’est en particulier assurée que les informations initiales dont disposait la Police nationale étaient plus que suffisantes pour justifier l’ouverture d’une procédure spéciale d’enquête contre l’auteur.

4.15L’État partie fait également observer que la juridiction nationale a ensuite analysé les éléments de preuve réunis contre l’auteur. Elle a analysé les déclarations des témoins, notamment au regard des dispositions régissant l’opération spéciale d’enquête − autorisée par le Parquet général − et encadrant strictement l’action des policiers infiltrés. La juridiction nationale n’a constaté aucune méconnaissance des règles établies, les policiers infiltrés ayant agi dans les strictes limites de la loi relative aux mesures spéciales d’enquête. Par conséquent, ayant pris connaissance du contenu des dossiers classifiés, la Chambre des affaires criminelles de la Cour suprême a pu établir que les actions de la police n’avaient pas constitué une provocation. Elle a ensuite acquitté l’auteur d’un des chefs d’accusation portés contre lui et l’a reconnu coupable des autres chefs.

4.16L’État partie ajoute que l’auteur, dans son pourvoi en cassation devant la Cour suprême, s’est aussi plaint de n’avoir pas eu accès aux dossiers confidentiels pendant la procédure d’appel puisque seuls les juges de la Chambre des affaires criminelles de la Cour suprême avaient pu en prendre connaissance.

4.17Le 20 février 2015, la Cour suprême, statuant en cassation, a examiné et rejeté le pourvoi de l’auteur. Elle a souligné expressément que la Chambre des affaires criminelles de la Cour suprême avait pris connaissance des dossiers classifiés en question et avait établi dans son jugement du 26 septembre 2014 que l’opération spéciale d’enquête contestée avait été menée conformément à l’autorisation préalable du parquet. Elle a examiné le grief de l’auteur concernant le droit de de la défense à la divulgation de ces dossiers et a renvoyé à la jurisprudence pertinente de la Cour européenne des droits de l’homme selon laquelle le droit de la défense à la divulgation n’est pas absolu et doit être mis en balance avec l’intérêt public et la nécessité de protéger les tiers. Selon la Cour suprême, l’affaire de l’auteur posait exactement ce même problème de la nécessité pour le juge de limiter le droit de la défense à la divulgation. La Cour suprême a également considéré que, bien que le droit à la divulgation ait dû être restreint, la juridiction d’appel avait offert les garanties requises puisque c’était un tribunal indépendant et impartial qui avait dûment pris connaissance du contenu des dossiers contestés avant de décider de ne pas les divulguer à la défense, et qu’elle avait donc pu statuer en connaissance de cause.

4.18Le 6 septembre 2016, le Comité des ministres du Conseil de l’Europe a conclu que toutes les mesures requises pour l’exécution de l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme avaient été appliquées et a décidé de clore l’affaire Baltiņš c. Lettonie.

4.19L’État partie fait observer que les allégations répétées de l’auteur selon lesquelles il aurait été incité à commettre une infraction pénale sont incompatibles avec le Pacte, l’auteur n’ayant pas étayé la violation de l’article 14 (par. 1) qu’il allègue. L’État partie rappelle que le Comité, selon sa jurisprudence constante, n’est pas « une quatrième instance » habilitée à réexaminer les conclusions adoptées par des tribunaux internes compétents et impartiaux, et qu’il appartient généralement aux juridictions des États parties au Pacte d’examiner les faits et les éléments de preuve ou l’application de la législation nationale. À cet égard, l’État partie affirme que, dans le cas de l’auteur, on ne peut invoquer ni le caractère arbitraire de la procédure ni un déni de justice.

4.20S’agissant de l’argument de l’auteur selon lequel le policier infiltré ne serait pas intervenu dans des activités délictueuses en cours mais aurait lui-même monté une affaire en lui adressant des textos et en provoquant une rencontre soi-disant fortuite, l’encourageant ainsi de façon répétée à lui procurer de la drogue, et qu’il n’aurait pas été passif mais l’aurait au contraire incité à commettre l’infraction dont il a été accusé, l’État partie fait observer que l’auteur cherche avec cet argument à faire réexaminer les faits et éléments de preuve sur le fondement desquels il a été condamné alors même qu’il a été rejugé par deux juridictions nationales de degrés différents.

4.21L’État partie souligne que l’arrêt du 26 septembre 2014 de la Chambre des affaires criminelles de la Cour suprême est en grande partie fondé sur les informations figurant dans les dossiers d’enquête spéciale classifiés (no 7004204 et no 7019304) concernant l’opération de police « Rebus ». La Chambre a notamment examiné de façon approfondie les informations classifiées contenues dans ces deux dossiers, ce qui lui a permis de conclure que les actions des autorités de police n’avaient pas constitué une provocation et que les policiers infiltrés n’avaient fait que déjouer des activités criminelles déjà en cours.

4.22La Cour suprême a confirmé que sa Chambre des affaires criminelles avait dûment pris connaissance des dossiers classifiés en question, ce qui lui avait permis de conclure que les informations initiales dont disposaient la police étaient plus que suffisantes pour justifier l’ouverture d’une procédure d’enquête spéciale contre l’auteur et mener l’opération spéciale d’enquête. Ainsi, la Cour suprême a établi qu’il n’y avait pas eu de provocation policière et que les policiers infiltrés n’avaient fait que déjouer des activités criminelles en cours. Elle a par conséquent considéré que les allégations de l’auteur étaient totalement dénuées de fondement.

4.23À cet égard, l’État partie rappelle la jurisprudence du Comité selon laquelle, lorsque les allégations de l’auteur ont été présentées, dûment examinées et jugées infondées par les tribunaux internes, la plainte de l’auteur au Comité doit être considérée comme non étayée aux fins de la recevabilité. L’État partie estime que les procédures judiciaires nationales, y compris l’examen des allégations de provocation policière, ne font globalement apparaître aucun élément permettant d’affirmer qu’elles ont été manifestement entachées d’arbitraire ou ont représenté un déni de justice. L’État partie fait donc observer que l’auteur n’a pas étayé, aux fins de la recevabilité, son allégation de provocation policière, et que cette partie de la communication doit être déclarée incompatible avec les dispositions du Pacte et donc irrecevable au regard de l’article 3 du Protocole facultatif.

4.24S’agissant de l’équité du procès, l’État partie fait observer que l’auteur n’a pas étayé les griefs qu’il tire de l’article 14 (par. 1). De plus, il renvoie à la jurisprudence constante du Comité selon laquelle l’exigence d’impartialité comprend deux aspects. Premièrement, les juges ne doivent pas laisser des partis pris ou des préjugés personnels influencer leur jugement ni nourrir d’idées préconçues au sujet de l’affaire dont ils sont saisis, ni agir de manière à favoriser indûment les intérêts de l’une des parties au détriment de l’autre. Deuxièmement, le tribunal doit aussi donner une impression d’impartialité à un observateur raisonnable.

4.25L’État partie relève que l’auteur n’a cité aucun fait, lors du réexamen de son affaire, montrant que les tribunaux internes avaient agi d’une manière indiquant des partis pris ou des préjugés personnels à son encontre ou qui aurait amené un observateur raisonnable à douter de leur impartialité. En réalité, le grief de l’auteur tient à ce qu’il n’est pas satisfait de la décision de la Chambre des affaires criminelles de la Cour suprême, agissant en vertu de l’article 500 4) du Code de procédure pénale, de ne pas lui donner accès aux dossiers confidentiels.

4.26À cet égard, l’État partie fait valoir que, bien que l’article 14 du Pacte protège le droit à un procès équitable et que le droit de l’accusé de disposer des facilités nécessaires à la préparation de sa défense demeure un élément essentiel de ce droit à un procès équitable, il n’énonce pas expressément le droit de l’accusé d’avoir directement accès à tous les documents utilisés dans le cadre de son procès. La question qui se pose en pareil cas est de savoir si l’utilisation des documents en question a ou non porté atteinte à l’équité de la procédure dans son ensemble et si des garanties suffisantes étaient en place.

4.27L’État partie rappelle que la question des garanties a déjà été examinée par la Cour suprême, qui a considéré que sa Chambre des affaires criminelles, un tribunal indépendant et impartial, avait offert les garanties nécessaires. En d’autres termes, la décision de refuser de divulguer certains documents à la défense n’a pas été prise arbitrairement. La Chambre a au contraire dûment pris connaissance du contenu des dossiers confidentiels contestés avant de décider de ne pas en autoriser la divulgation à la défense et a donc pu, de l’avis de la Cour suprême, statuer en connaissance de cause.

4.28L’État partie fait observer que l’auteur n’a pas étayé, aux fins de la recevabilité, son allégation de violation de la présomption d’innocence et fait valoir que cette partie de la communication doit être déclarée incompatible avec les dispositions du Pacte et donc irrecevable au regard de l’article 2 du Protocole facultatif. Se référant aux observations de l’auteur, l’État partie est convaincu que celui-ci n’a pas présenté le moindre fait ni la moindre information concernant un quelconque incident précis qui amènerait à conclure que la conduite des juridictions nationales aurait porté atteinte au droit qu’il tenait de l’article 14 (par. 2) du Pacte d’être présumé innocent jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie.

4.29L’État partie invite le Comité à déclarer la plainte de l’auteur irrecevable en vertu de l’article 3 et de l’article 5 (par. 2 a)) du Protocole facultatif puisque la même question a été examinée dans le cadre d’une autre instance internationale de règlement. L’État partie rappelle la jurisprudence du Comité, qui s’est déclaré réticent à examiner une affaire déjà examinée par la Cour européenne des droits de l’homme dans la mesure où les dispositions du Pacte et celles de la Convention invoquées par la victime présumée convergent.

4.30Enfin, l’État partie appelle l’attention du Comité sur le fait que l’auteur a saisi le Comité deux ans et huit mois après l’adoption de la décision définitive de la juridiction de cassation, et un an après l’adoption de la décision de la Cour européenne des droits de l’homme. L’État partie estime qu’en l’absence d’explication, le Comité pourrait considérer que cette présentation tardive constitue un abus du droit de présenter une communication et déclarer la communication irrecevable au regard de l’article 3 du Protocole facultatif.

Commentaires de l’auteur sur les observations de l’État partie

5.1Dans une note du 19 juillet 2018, l’auteur indique qu’il est conscient que ni la Cour européenne des droits de l’homme ni le Comité ne sont une « quatrième instance » compétente pour réexaminer les conclusions des tribunaux internes. Il note que la Cour européenne des droits de l’homme a conclu que la forme de réparation la plus appropriée serait de le rejuger puisque les tribunaux internes n’avaient pas examiné son allégation de provocation, ni pris connaissance des dossiers d’enquête spéciale classifiés concernant l’opération de police « Rebus ». Cela n’a été fait qu’à l’occasion du réexamen de l’affaire.

5.2Selon l’auteur, deux solutions s’offrent au Comité pour faire droit à ses griefs : le Comité pourrait prendre connaissance des deux dossiers d’enquête spéciale classifiés concernant l’opération « Rebus » pour voir si les actes des tribunaux internes ont été manifestement entachés d’erreur ou ont représenté un déni de justice, ou bien conclure que la forme de réparation la plus appropriée serait de le juger une troisième fois.

5.3L’auteur prie de nouveau le Comité de recommander à la Lettonie d’annuler sa déclaration de culpabilité et de lui verser une indemnité conformément à l’article 14 (par. 6) du Pacte.

5.4S’agissant des observations de l’État partie selon lesquelles ses griefs ne sont pas étayés, l’auteur explique que les tribunaux internes ont violé ses droits fondamentaux lors de son deuxième procès. L’auteur maintient avoir été victime d’une provocation de la part du policier infiltré, I., qui n’était pas passif mais l’a au contraire incité à commettre une infraction, et note que sa culpabilité a été établie à partir des seuls éléments de preuve obtenus au moyen de cette provocation. Il explique qu’il a dénoncé cette provocation dans sa communication au Comité pour que celui-ci comprenne combien il était important pour lui de prendre connaissance des deux dossiers d’enquête spéciale classifiés. On lui a refusé l’accès à ces dossiers sans lui expliquer précisément pourquoi il était absolument nécessaire de ne pas les divulguer à la défense.

5.5S’agissant des observations de l’État partie concernant la recevabilité des griefs qu’il tire de l’article 14 (par. 2), l’auteur souligne que bien qu’aucun élément prouvant directement sa culpabilité n’ait été produit par le ministère public et les tribunaux, tous les doutes n’ont pas profité à l’accusé. Il affirme que les tribunaux internes n’ont pas utilisé toutes les options légales prévues par le Code de procédure pénale qui lui auraient permis de prendre connaissance des deux dossiers classifiés et d’exercer pleinement ses droits fondamentaux pour préparer sa défense, ce qui a abouti à une violation de son droit d’être présumé innocent jusqu’à ce que sa culpabilité ait été établie. Il explique que tout au long de son deuxième procès, il a eu l’impression que les tribunaux faisaient preuve de partialité et de parti pris à son encontre, le présentant d’emblée comme coupable, et lui donnaient l’impression que sa culpabilité avait été décidée d’avance. L’auteur ajoute qu’il est particulièrement sensible à la manière dont on se comporte à son égard.

5.6S’agissant de l’argument de l’État partie faisant valoir que la même question a été examinée dans le cadre d’une autre instance internationale de règlement, l’auteur fait valoir que sa communication au Comité porte sur la nouvelle procédure − postérieure à l’arrêt de 2013 de la Cour européenne des droits de l’homme − qui a donné lieu à une violation de ses droits à un procès équitable. Il affirme de plus qu’il a présenté sa communication dans un délai raisonnable.

Observations de l’État partie sur le fond

6.1Dans une note verbale du 13 août 2018, l’État partie a présente de nouvelles observations. S’agissant du grief de l’auteur dénonçant une provocation policière, il fait observer que l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme se réfère à deux obligations distinctes des États qui ont trait toutes deux à l’équité du procès.

6.2La première obligation, qui découle de l’élément matériel du droit à un procès équitable, est que les actes d’enquête de la police ne doivent pas aller au-delà de ceux des agents infiltrés : en d’autres termes, il faut établir si l’infraction aurait été commise sans l’intervention de la police. En ce qui concerne également cette obligation matérielle, l’État partie souligne que, contrairement à ce qu’allègue l’auteur dans sa communication, la Cour européenne des droits de l’homme n’a jamais conclu que les actes de la police avaient outrepassé ceux que les agents infiltrés avaient été autorisés à accomplir, ce qui aurait exposé l’auteur à une provocation.

6.3Dans ses conclusions, la Cour européenne des droits de l’homme a en fait visé une obligation totalement différente, en d’autres termes l’aspect procédural du droit à un procès équitable, à savoir que les tribunaux internes doivent se prononcer sur l’allégation de provocation pour garantir que les droits de la défense sont dûment protégés. Autrement dit, lorsqu’une allégation crédible de provocation policière est formulée dans le cadre d’un procès pénal, les tribunaux internes doivent prendre les dispositions nécessaires pour établir qu’il n’y a pas eu provocation.

6.4L’État partie fait observer que c’était cet aspect procédural du droit à un procès équitable qui était en cause dans le nouveau procès pénal dont l’auteur a fait l’objet. Il souligne que c’est à présent l’issue de ce nouveau procès qui est au cœur de la communication présentée l’auteur au Comité.

6.5L’État partie rappelle que dans son arrêt du 8 janvier 2013 la Cour européenne des droits de l’homme a relevé plusieurs carences dans le premier procès de l’auteur, en particulier le fait que les tribunaux internes compétents n’avaient pas examiné ni évalué de manière approfondie les actes des policiers infiltrés, ce qui a abouti à une violation de l’aspect procédural du droit à un procès équitable et au nouveau procès.

6.6À cet égard, les tribunaux internes compétents ont fait de leur mieux pour examiner de façon approfondie les problèmes recensés par la Cour européenne des droits de l’homme dans son arrêt du 8 janvier 2013 et y remédier, et pour s’acquitter de l’obligation découlant de l’aspect procédural du droit à un procès équitable. De plus, dans le cadre du nouveau procès, les tribunaux internes ont totalement réfuté, dans des conclusions solidement étayées et motivées, les allégations de provocation policière de l’auteur.

6.7En ce qui concerne les allégations de l’auteur dénonçant le manque d’impartialité et de transparence ayant résulté, lors de son nouveau procès, des restrictions imposées par la juridiction nationale au droit de la défense à la divulgation des éléments de preuve, l’État partie est convaincu que l’auteur n’a pas donné un seul exemple montrant que les tribunaux internes auraient agi d’une manière indiquant un parti pris ou un préjugé personnel à son encontre, ou d’une manière qui n’aurait pas paru impartiale à un observateur raisonnable. L’État partie réaffirme que l’article 14 du Pacte ne prévoit pas expressément le droit de l’accusé d’avoir directement accès à tous les documents utilisés dans son procès.

6.8L’État partie rappelle que tant la Chambre des affaires criminelles de la Cour suprême que la Cour suprême statuant en cassation avaient déjà souligné que le droit de la défense à la divulgation n’était pas absolu et devait être mis en balance avec l’intérêt public et la nécessité de protéger les tiers. À cet égard, l’État partie tient à souligner que l’interprétation donnée par les juridictions nationales était pleinement conforme à la jurisprudence du Comité. La Cour suprême a en outre indiqué que la nature des activités spéciales d’enquête en cause justifiait les restrictions au droit en question puisqu’il était nécessaire de protéger les personnes qui coopéraient avec la police.

6.9L’État partie rappelle ensuite que la question des garanties a déjà été examinée par la Cour suprême, qui a jugé que la décision de ne pas autoriser la divulgation des dossiers n’avait pas été adoptée de manière arbitraire. La juridiction nationale avait dûment pris connaissance du contenu des dossiers confidentiels contestés avant de décider de ne pas les divulguer à la défense et donc, de l’avis de la Cour suprême, sa Chambre des affaires criminelles avait été en mesure de statuer en connaissance de cause.

6.10S’agissant du droit de l’accusé d’être présumé innocent jusqu’à ce que sa culpabilité ait été établie, l’État partie rappelle que le Comité n’accueille pas les allégations de violations qui sont formulées en termes généraux sans exemples de faits précis. L’État partie affirme que le seul fait que les tribunaux internes ne soient pas d’accord avec l’interprétation de l’auteur concernant les faits de la cause ne saurait en soi établir ni constituer une violation de l’article 14 du Pacte. À cet égard, l’argumentaire des tribunaux internes et le jugement définitif de culpabilité ne peuvent être considérés comme ayant privé l’auteur du bénéfice du doute. L’État partie conclut que les tribunaux internes ont examiné l’affaire de façon approfondie, aussi bien en fait qu’en droit, afin de dissiper tout doute raisonnable quant à la culpabilité de l’auteur.

Commentaires de l’auteur sur les observations de l’État partie

7.Dans une note du 25 octobre 2018, l’auteur réaffirme qu’il n’a pas pu prendre connaissance des dossiers classifiés, que ces dossiers n’ont pas été vérifiés par les tribunaux internes et que ceux-ci n’ont pas utilisé d’autres options légales qui lui auraient permis d’exercer son droit de se défendre.

Délibérations du Comité

Examen de la recevabilité

8.1Avant examiner tout grief formulé dans une communication, le Comité doit, conformément à l’article 97 de son règlement intérieur, déterminer si la communication est recevable au regard du Protocole facultatif.

8.2Le Comité note que l’État partie affirme que la plainte devrait être déclarée irrecevable parce que la même question a été examinée par une autre instance internationale de règlement, à savoir la Cour européenne des droits de l’homme. Il note aussi que, lorsqu’il a adhéré au Protocole facultatif, l’État partie n’a pas fait de déclaration indiquant notamment que le Comité n’examinerait aucune communication sans s’être assuré que la même question n’était pas déjà en cours d’examen devant une autre instance internationale d’enquête ou de règlement. Le Comité constate toutefois que la Cour européenne des droits de l’homme a déclaré irrecevable la seconde requête de l’auteur en décembre 2016. La même question n’étant pas actuellement en cours d’examen devant une autre instance internationale d’enquête ou de règlement, le Comité n’est pas empêché par l’article 5 (par. 2 a)) du Protocole facultatif d’examiner la communication.

8.3Le Comité prend note de l’argument de l’État partie selon lequel l’auteur a abusé de son droit de présenter une communication au Comité puisqu’il a soumis sa communication tardivement, à savoir après l’adoption de la décision définitive de la juridiction de cassation et après que la Cour européenne des droits de l’homme, siégeant en formation de juge unique, eut rendu sa décision, et ce sans explication valable. Le Comité relève toutefois que la communication a été présentée deux ans et demi après l’épuisement des recours internes et un an après l’adoption de la décision de la Cour. Il note que la communication a été présentée bien avant l’expiration des délais de cinq ans à compter de l’épuisement des recours internes et de trois ans à compter de la décision de la Cour, qui sont prévus à l’article 99 c) de son règlement intérieur. Le Comité conclut donc qu’en l’espèce ces délais ne sauraient constituer un abus du droit de présenter une communication, et considère qu’il n’est pas empêché par l’article 3 du Protocole facultatif d’examiner la communication.

8.4Le Comité prend note du grief soulevé par l’auteur au titre de l’article 14 (par. 1) du Pacte, selon lequel les procédures internes n’ont été ni transparentes ni impartiales puisque la juridiction d’appel et la Cour suprême statuant en cassation n’ont pas vérifié à l’audience les informations figurant dans les deux dossiers d’enquête spéciale concernant l’opération de police « Rebus » et que l’auteur s’est vu refuser l’accès à ces dossiers sans qu’on lui explique précisément pourquoi il était absolument nécessaire de ne pas divulguer ces informations à la défense. Le Comité note toutefois que les tribunaux internes compétents ont fait de leur mieux pour examiner de façon approfondie les problèmes procéduraux recensés par la Cour européenne des droits de l’homme dans son arrêt du 8 janvier 2013 et pour y remédier, et que la juridiction d’appel a offert les garanties nécessaires et a pris dûment connaissance du contenu des deux dossiers classifiés contestés avant de décider de ne pas les divulguer à la défense. À cet égard, le Comité juge particulièrement pertinent l’argument de l’État partie selon lequel une telle restriction était nécessaire pour protéger à la fois les droits fondamentaux de tiers, à savoir les personnes qui coopéraient avec la police, et l’intérêt public, et assurer ainsi un équilibre raisonnable entre l’intérêt public et l’intérêt de l’accusé. Dans ces conditions, le Comité considère que les tribunaux internes ont évalué s’il était nécessaire de ne pas autoriser la divulgation. À la lumière de ces considérations, et en l’absence d’autres éléments d’information pertinents dans le dossier, le Comité considère que l’auteur n’a pas suffisamment étayé ce grief et le déclare irrecevable au regard de l’article 2 du Protocole facultatif.

8.5Le Comité prend note du grief que l’auteur tire de l’article 14 (par. 2) du Pacte. En l’absence d’autres éléments d’information ou d’explication pertinents dans le dossier, il considère toutefois que l’auteur n’a pas suffisamment étayé ce grief aux fins de la recevabilité. Par conséquent, il déclare cette partie de la communication irrecevable au regard de l’article 2 du Protocole facultatif.

8.6En ce qui concerne le grief que l’auteur tire de l’article 14 (par. 6) du Pacte, le Comité constate que la déclaration de culpabilité de l’auteur n’a jamais été annulée par une décision judiciaire ultérieure et que l’auteur n’a jamais été gracié. Par conséquent, le Comité considère que l’article 14 (par. 6) ne s’applique pas en l’espèce et que ce grief est irrecevable ratione materiae au regard de l’article 3 du Protocole facultatif.

9.En conséquence, le Comité décide :

a)Que la communication est irrecevable au regard des articles 2 et 3 du Protocole facultatif ;

b)Que la présente décision sera communiquée à l’État partie et à l’auteur de la communication.