Nations Unies

CCPR/C/134/D/2841/2016 (Initial proceedings)

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

24 mai 2022

Français

Original : anglais

Comité des droits de l’homme

Constatations adoptées par le Comité au titre de l’article 5 (par. 4) du Protocole facultatif, concernant la communication no 2841/2016 * , ** , ***

Communication présentée par :

Luiz Inácio Lula da Silva (représenté par des conseils, Valeska Teixeira Zanin Martins, Cristiano Zanin Martins et Geoffrey Robertson)

Victime(s) présumée(s) :

L’auteur

État partie :

Brésil

Date de la communication :

28 juillet 2016

Références :

Décision prise en application de l’article 92 (par. 2 à 5) du Règlement intérieur du Comité, communiquée à l’État partie le 25 octobre 2016 (non publiée sous forme de document)

Date des constatations :

17 mars 2022

Objet :

Procès équitable ; emprisonnement sans jugement définitif ; interdiction de se présenter aux élections

Questions de procédure :

Épuisement des recours internes ; mise en place de mesures provisoires

Questions de fond :

Arrestation et détention arbitraires ; tribunal compétent, indépendant et impartial ; présomption d’innocence ; droit à la vie privée ; atteintes au droit à l’honneur et à la réputation ; droit de voter et d’être élu

Articles du Pacte :

9 (par. 1), 14 (par. 1 et 2), 17 et 25

Articles du Protocole facultatif :

1 et 5 (par. 2 b))

1.1L’auteur de la communication est Luis Inácio Lula da Silva, de nationalité brésilienne, né le 27 octobre 1945. Il a été Président du Brésil de 2003 à 2010. Il affirme que l’État partie a violé les droits qu’il tient des articles 9 (par. 1), 14 (par. 1 et 2), 17 et 25 du Pacte. Le Protocole facultatif est entré en vigueur pour l’État partie le 25 décembre 2009. L’auteur est représenté par un conseil.

1.2Le 25 octobre 2016, le Comité, agissant par l’intermédiaire de son rapporteur spécial chargé des nouvelles communications et des mesures provisoires et en application de l’article 92 (par. 5) de son règlement intérieur, a prié l’État partie de lui soumettre des observations portant exclusivement sur la recevabilité de la communication.

1.3Le 22 mai 2018, le Comité a rejeté la demande de l’auteur aux fins de mesures provisoires, au motif que les informations que celui-ci avait fournies ne lui permettaient pas alors de conclure que les faits dont il était saisi étaient de nature à faire courir un risque de préjudice irréparable à l’auteur ou à l’empêcher de formuler ses constatations. Cependant, le Comité a rappelé qu’un État partie contrevient aux obligations que lui impose le Protocole facultatif s’il prend une mesure qui empêche le Comité de mener à bonne fin l’examen d’une communication dénonçant une violation du Pacte ou qui rend l’expression de ses constatations sans valeur ni effet. Il a également décidé de revenir sur sa décision du 24 octobre 2016 et d’examiner conjointement la recevabilité et le fond de la communication.

1.4Le 17 août 2018, le Comité, prenant note des informations communiquées par l’auteur le 27 juillet 2018, a conclu que les faits dont il était saisi indiquaient l’existence d’un possible préjudice irréparable aux droits que l’auteur tenait de l’article 25 du Pacte. En application de l’article 92 de son règlement intérieur, il a demandé à l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour que, pendant son emprisonnement, l’auteur puisse jouir de ses droits politiques et les exercer, en tant que candidat aux élections présidentielles de 2018, notamment moyennant un accès suffisant aux médias et aux membres de son parti politique ; de ne pas empêcher l’auteur de se présenter aux élections, jusqu’à ce que ses demandes aux fins du réexamen de la déclaration de culpabilité prononcée contre lui, encore pendantes, aient été tranchées dans le cadre d’une procédure judiciaire équitable et que la condamnation soit devenue définitive. Le 10 septembre 2018, le Comité a réitéré la demande adressée à l’État partie le 17 août 2018, lui rappelant ses obligations au titre du Protocole facultatif.

Rappel des faits présentés par l’auteur

Contexte

2.1En mars 2014, une enquête criminelle (connue par la suite sous le nom d’« Opération Lava Jato ») a été ouverte dans la juridiction fédérale de l’État du Paraná (Brésil). Le juge au treizième tribunal pénal fédéral à Curitiba, Sérgio Moro, faisait fonction de juge d’instruction dans le cadre de l’enquête. L’Opération Lava Jato a permis de mettre au jour des faits de corruption entre la compagnie pétrolière nationale Petrobras, détenue par l’État, cinq grandes entreprises de construction et des partis politiques de toutes tendances, notamment pour l’obtention de fonds de campagne secrets. L’auteur nie avoir eu connaissance de ces infractions, les avoir approuvées ou avoir reçu de l’argent ou des faveurs en échange d’actions qu’il a menées ou de décisions qu’il a prises pendant sa présidence ou à tout autre moment.

2.2L’auteur a également fait l’objet d’une enquête dans le cadre, entre autres choses, de deux affaires liées à l’Opération Lava Jato, qui relevaient toutes deux de la compétence du treizième tribunal pénal fédéral à Curitiba, à savoir une affaire concernant des entreprises de construction qui auraient aidé l’auteur à acquérir un appartement de vacances, et une affaire liée à l’ameublement allégué de sa propriété à Atibaia (São Paulo).

Procédure judiciaire engagée contre l’auteur

2.3Le 19 février 2016, le juge, Sergio Moro a fait droit à une demande émanant du Bureau du Procureur fédéral aux fins de mise sur écoute des téléphones de l’auteur, ainsi que de ceux des membres de sa famille et de son avocat. Le 26 février 2016, il a expressément autorisé la mise sur écoute de la principale filiale du cabinet de l’avocat de l’auteur, touchant 25 avocats et 300 clients.

2.4Le 2 mars 2016, le juge Moro a émis un mandat d’amener dans le but d’entendrel’auteur. Le 4 mars 2016, à 6 heures, des policiers sont entrés au domicile de l’auteur et ont exigé qu’il les accompagne au complexe officiel de l’aéroport Congonhas, où il a été retenu pendant six heures. L’auteur fait observer que l’information selon laquelle le juge avait délivré un mandat d’amener pour l’interroger a été divulguée aux médias par « l’appareil du ministère public (c’est-à-dire le juge, le procureur fédéral et la police fédérale) ». Par conséquent, l’auteur a été photographié comme s’il était en état d’arrestation. L’aéroport est devenu le théâtre de manifestations et de contre-manifestations.

2.5Le 16 mars 2016, à 11 h 12, le juge Moro a envoyé une ordonnance urgente au Bureau du Procureur fédéral, selon laquelle l’écoute du téléphone de l’auteur devait prendre fin immédiatement. L’auteur explique que l’écoute s’est néanmoins poursuivie de manière illégale, et était notamment toujours en place lorsqu’il a téléphoné à 13 h 32 à Dilma Rousseff, alors Présidente du Brésil, et a discuté avec elle de questions liées à sa nomination au poste de Chef de la Maison civile. Il ajoute que, bien que cet appel ait été intercepté illégalement, le juge Moro en a communiqué le contenu aux médias l’après-midi même, tout comme le contenu d’autres appels de l’auteur, de sa femme, de ses avocats et d’autres membres de sa famille. Le 17 mars 2016, par une décision, Sérgio Moro a confirmé la légalité tant de l’écoute téléphonique que de la divulgation du contenu de l’appel entre l’auteur et la Présidente.

2.6Le 22 mars 2016, dans le cadre d’une plainte déposée par la Présidente, Teori Albino Zavascki, juge au Tribunal fédéral suprême, a accordé une injonction préliminaire suspendant les effets de la décision par laquelle le juge Moro avait autorisé la divulgation des conversations entre la Présidente et l’auteur. Le 13 juin 2016, il a annulé la décision rendue le 17 mars par Sérgio Moro, affirmant, entre autres, que celui-ci n’avait pas compétence pour lever la confidentialité de la conversation avec la Présidente, et a déclaré nul aux fins des enquêtes le contenu de cette conversation. Le 11 juillet 2016, l’auteur a déposé une requête en suspicion de partialité (exceção de suspeição), demandant que le juge Moro se récuse ; celui-ci a lui-même rejeté la requête le 22 juillet.

2.7Le 4 mars 2016, l’Association des juges fédéraux du Brésil, dont Sérgio Moro était alors membre, a publié une déclaration indiquant que le juge, ainsi que les procureurs et la police, avaient « agi strictement dans le cadre légal et constitutionnel » et qu’ils « continueraient à agir dans le respect de la loi et de la Constitution ». Le même jour, l’Association nationale des procureurs fédéraux a affirmé, dans un communiqué de presse, que le mandat d’amener émis contre l’auteur était parfaitement légal. Le 29 juillet 2016, dans un communiqué de presse, l’Association des juges fédéraux a condamné la communication déposée par l’auteur devant le Comité, affirmant qu’elle comportait des « lamentations infondées » et, le 13 décembre 2016, le Président de cette association a fait l’éloge du juge Moro dans les médias, le qualifiant d’« exemple pour le Brésil ». Le 15 décembre 2016, dans un communiqué de presse, l’Association nationale des procureurs fédéraux s’en est prise à l’auteur pour avoir intenté une action en diffamation contre Deltan Dallagnol, le procureur principal de l’Opération Lava Jato.

2.8Le 14 septembre 2016, pendant quatre-vingt-dix minutes à la télévision, les procureurs chargés des enquêtes dans le cadre de l’Opération Lava Jato avaient exposé leurs arguments pour démontrer la culpabilité de l’auteur « au-delà du doute raisonnable ». C’est après cet épisode que l’auteur a porté plainte pour diffamation contre le Procureur, Deltan Dallagnol.

2.9Le 22 septembre 2016, la Cour spéciale du Tribunal fédéral régional de la quatrième région a rejeté une requête aux fins d’une procédure disciplinaire contre le juge Moro, déposée par d’autres prévenus visés par les enquêtes de l’Opération Lava Jato. Selon la Cour, cette opération étant « une affaire sans précédent », elle entraîne « des problèmes sans précédent », et exige « des décisions sans précédent » ; il n’est « pas possible de condamner [le juge Moro] pour avoir adopté des mesures préventives contre l’entrave à la justice ».

2.10Le 9 mars 2017, le Tribunal fédéral régional a rejeté une plainte déposée au pénal par l’auteur et sa famille contre le juge Moro, au motif que la question des sanctions administratives avait déjà été tranchée le 22 septembre 2016. Les recours que l’auteur a déposés devant le Tribunal supérieur de justice et devant le Tribunal fédéral suprême ont été rejetés.

2.11Le 12 juillet 2017, le juge Moro a déclaré l’auteur coupable de corruption et de blanchiment d’argent et l’a condamné à neuf ans d’emprisonnement. En novembre 2017, les requêtes en suspicion de partialité visant le juge Moro, qui avaient été rejetées en appel par le Tribunal fédéral régional, étaient également rejetées par le Tribunal supérieur de justice. Le Tribunal fédéral suprême a rejeté les appels concernant deux requêtes, en décembre 2017. Le 24 janvier 2018, le Tribunal fédéral régional a confirmé, en appel, la déclaration de culpabilité prononcée contre l’auteur et a porté la peine de prison à douze ans et un mois d’emprisonnement. L’auteur a interjeté appel de cette décision sur le fond. Le 2 février 2018, il a déposé une requête en habeas corpus devant le Tribunal fédéral suprême, faisant valoir que, selon la Constitution de l’État partie, une personne déclarée coupable ne doit pas purger une peine de prison tant que le jugement n’est pas définitif.

2.12Le 5 avril 2018, le Tribunal fédéral suprême a rejeté la requête en habeas corpus de l’auteur et déclaré que rien ne s’opposait à son incarcération, en dépit du fait que son recours était pendant. Quelques heures après le prononcé de cette décision, le juge Moro a émis un mandat d’arrêt, exigeant que l’auteur soit placé en détention pour purger sa peine. Le 7 avril 2018, l’auteur a été emmené à la prison de Pinhais, à Curitiba.

2.13Le 23 avril 2018, l’auteur a déposé un recours spécial devant le Tribunal supérieur de justice et un recours extraordinaire devant le Tribunal fédéral suprême, dans lesquels il contestait l’ordonnance de mise en détention le visant. Selon lui, alors que le Tribunal fédéral régional aurait pu en quelques jours seulement l’autoriser à interjeter appel, il ne l’a fait que le 22 juin 2018, et a uniquement accordé l’autorisation de faire appel devant le Tribunal supérieur de justice. L’auteur a sollicité une audience en urgence devant ce tribunal, mais sa demande n’a été examinée qu’après le début des vacances judiciaires, le 26 juin 2018.

2.14Le 6 juillet 2018, la requête en habeas corpus déposée par l’auteur est parvenue à Rogério Favreto, juge de la Chambre d’appel du Tribunal fédéral régional désigné pour entendre toutes les affaires de ce type pendant la période de vacances judiciaires. Le 8 juillet 2018, à 9 h 5, le juge Favreto a fait droit à la requête en habeas corpus de l’auteur et ordonné la mise en liberté provisoire de celui-ci. Il a motivé sa décision par les points suivants : a) la candidature de l’auteur à l’élection présidentielle était un fait nouveau pertinent pour la question de savoir s’il devait être incarcéré avant qu’un tribunal ne se soit prononcé sur son appel ; b) la décision du Tribunal suprême, par 6 voix contre 5, avait permis l’incarcération de l’auteur mais ne l’avait pas ordonnée ; c) le juge Moro n’avait pas motivé son ordonnance de mise en détention de l’auteur. Les autorités compétentes n’ont pas exécuté l’ordonnance de libération et l’auteur a immédiatement porté ce fait à l’attention du juge Favreto. Des recherches ont rapidement révélé que le juge Moro, alors en vacances, avait ordonné par téléphone que l’auteur ne soit pas libéré. À 12 h 44, le juge Favreto a une nouvelle fois ordonné la libération de l’auteur, avec exécution immédiate. À 14 h 13, João Pedro Gebran Neto, l’un des trois juges qui avaient rejeté le recours de l’auteur, a ordonné l’annulation de la décision du juge Favreto. À 16 h 12, le juge Favreto a décidé que le juge Gebran Neto n’était pas compétent, puisque c’est lui-même qui était le juge désigné pendant les vacances judiciaires. À 17 h 53, le Bureau du Procureur fédéral a déposé un recours devant Carlos Eduardo Thompson Flores, le Président du Tribunal fédéral régional qui, à 19 h 30, a décidé que le juge Gebran Neto était l’autorité compétente, et a annulé la décision de libérer l’auteur.

2.15Le 23 août 2018, l’auteur, alors en tête dans les sondages d’intentions de vote, a déposé une requête devant le Tribunal électoral suprême, lui demandant de veiller à ce que les médias publics, dans leur couverture des campagnes électorales, lui accordent le même traitement qu’aux autres candidats, conformément à la loi électorale applicable. Le 24 août 2018, le Tribunal a toutefois rejeté cette demande. Le 27 août 2018, l’auteur a interjeté appel devant la même juridiction, qui l’a débouté le lendemain.

2.16Le 1er septembre 2018, et sans tenir compte de la demande du Comité aux fins de mesures provisoires, le Tribunal électoral suprême a rejeté la candidature de l’auteur à la présidence, lui a interdit de faire campagne via la radio, la télévision et Internet, et a ordonné au parti de désigner un autre candidat dans un délai de dix jours. En conséquence de cette ordonnance, à partir de ce moment-là, l’auteur ne pouvait même plus être mentionné dans les sondages d’intentions de vote. Le 11 septembre 2018, le Parti des travailleurs a été contraint de retirer la candidature de l’auteur et a proposé un autre candidat pour le remplacer.

2.17Le 28 septembre 2018, Enrique Ricardo Lewandowski, juge au Tribunal fédéral suprême a autorisé l’éditorialiste d’un journal à interviewer l’auteur en prison, après que ce journal avait porté plainte pour censure de la presse. Le même jour, le juge Luis Fux, alors Président faisant fonction du Tribunal fédéral suprême, faisant droit à la requête déposée par un parti politique, a suspendu la décision du juge Lewandowski, interdit l’interview et ordonné que, si celle-ci avait déjà eu lieu, sa publication serait censurée. Le 1er octobre 2018, le juge Lewandowski a rendu une autre décision pour autoriser l’interview, déclarant que le parti politique qui avait déposé la requête n’avait pas la légitimité procédurale et que sa décision n’était pas une injonction susceptible de suspension, mais bien une décision sur le fond. Le même jour, José Antonio Dias Toffoli, Président du Tribunal, a suspendu la deuxième décision du juge Lewandowski, déclarant que la décision rendue par le juge Fux, en sa qualité de Président, devait être exécutée jusqu’à une délibération ultérieure du Tribunal fédéral suprême en formation plénière.

Teneur de la plainte

Mandat d’amener du 2 mars 2016

3.1L’auteur déclare que l’article 260 du Code de procédure pénale brésilien énonce une condition préalable à la délivrance d’un mandat d’amener, à savoir que si le prévenu refuse de témoigner lors de l’interrogatoire, l’autorité compétente peut ordonner qu’il soit contraint de se présenter devant l’autorité chargée de l’enquête. Il soutient que, comme le montre la jurisprudence, cette procédure obligatoire qui prive le suspect de sa liberté peut seulement être ordonnée par un juge si le prévenu a auparavant explicitement refusé de témoigner. Il ajoute que le juge doit d’abord citer le prévenu potentiel à comparaître, et ce n’est que si celui-ci ne se présente pas ou refuse de se présenter qu’un mandat d’amener peut être délivré.

3.2En l’espèce cependant, le juge Moro a émis le 2 mars 2016, un mandat d’amener devant être exécuté le 4 mars, sans jamais avoir auparavant cité l’auteur à comparaître. Il a affirmé qu’un mandat d’amener était nécessaire pour assurer la sécurité de l’auteur. Néanmoins, l’auteur affirme que la condition juridique préalable à la délivrance du mandat n’a jamais été remplie et que, de ce fait, la question de l’ordre public ne pouvait se poser. Bien que la durée de sa détention obligatoire n’ait été que de six heures, l’événement et la manifestation qu’il a provoquée ont eu un énorme effet symbolique, notamment par le message qu’ils ont fait passer, à savoir que l’auteur tentait de se soustraire à la justice. L’auteur explique que cela constitue une violation de l’article 9 (par. 1) du Pacte, puisque le transport forcé pour un interrogatoire constitue également une privation de liberté. Il ajoute que le Comité a considéré qu’une détention de huit heures était disproportionnée et donc arbitraire.

Divulgation de diverses conversations téléphoniques interceptées

3.3L’auteur explique qu’en communiquant aux médias des transcriptions et enregistrements audio de conversations téléphoniques interceptées, le juge Moro a enfreint les articles 8 et 10 de la loi no 9 296/96 qui régit la mise sur écoute. Il soutient que ces éléments ne présentaient aucun intérêt concevable pour le public et que leur divulgation a été faite par malveillance, dans le but d’humilier et d’intimider publiquement l’auteur, en violation des droits qu’il tient de l’article 17 du Pacte. Il ajoute que l’État partie a récemment été condamné par la Cour interaméricaine des droits de l’homme pour avoir autorisé la divulgation d’enregistrements secrets à caractère personnel. Il affirme que le juge Moro, tant au regard du droit interne que de la jurisprudence de la Cour interaméricaine, aurait dû assurer la confidentialité des conversations interceptées, au moins jusqu’à ce qu’une décision soit rendue sur leur pertinence et leur recevabilité au procès.

3.4L’auteur ajoute que la divulgation de sa conversation avec la Présidente était encore plus manifestement illégale, puisque cette conversation avait été interceptée après que le juge Moro lui-même avait ordonné la fin des écoutes téléphoniques. Ainsi, en violation de sa propre ordonnance, le juge Moro a décidé non seulement de conserver la conversation interceptée, mais aussi d’en communiquer le contenu aux médias. Il a justifié cette divulgation par des raisons d’intérêt public, mais la nomination de l’auteur en tant que Chef de la Maison civile avait déjà été annoncée au public le 16 mars 2016 au matin par le Bureau de la Présidente, avant l’interception et la divulgation de la conversation. Selon l’auteur, cette divulgation, en donnant l’impression qu’il avait cherché à éviter d’être arrêté parce qu’il était coupable, était destinée à susciter un tollé politique et une forte pression pour que sa nomination soit annulée.

3.5L’auteur soutient que, bien que le Tribunal fédéral suprême ait annulé la décision du juge Moro sur la légalité de la mise sur écoute, aucune mesure n’a été prise contre lui. Malgré plusieurs plaintes de citoyens, le Conseil national de la justice n’a pris aucune mesure, pas plus que les autres autorités chargées des poursuites qui, conscientes des délits d’action publique du juge Moro, auraient dû agir d’office.

Mise sur écoute des téléphones des avocats de l’auteur et divulgation desconversations interceptées

3.6L’auteur affirme que la mise sur écoute des téléphones de ses avocats et la divulgation de certaines conversations interceptées dans lesquelles ceux-ci donnaient des conseils sur différents points de la procédure face au juge Moro constituent également une violation du droit qui lui est reconnu à l’article 17 du Pacte. Il explique que, selon le juge Moro, l’écoute téléphonique a eu lieu parce que des éléments prouvaient l’implication de l’un de ses avocats dans l’achat de sa propriété à Atibaia. Roberto Teixeira, l’avocat visé, était donc un sujet d’enquête, et non un avocat. Selon l’auteur, cette distinction est erronée puisque M. Teixeira n’a jamais cessé d’être son avocat et que sa participation, en tant qu’avocat, à l’achat d’un bien immobilier ne pouvait être source de soupçon, sauf si la transaction était elle-même frauduleuse ou illégale. L’auteur ajoute qu’aucun élément de preuve de cet ordre n’existait, ni ne ressortait des transcriptions des conversations téléphoniques interceptées. Il soutient qu’il s’agit donc d’une violation manifeste du secret des communications entre l’avocat et son client qui, comme l’a dit le Comité, vise à protéger le client.

Absence de tribunal impartial

3.7L’auteur soutient que lorsque le juge Moro a statué sur la requête en suspicion de partialité, il s’est appuyé sur la procédure normale selon laquelle un juge qui a rendu une décision au stade de l’enquête peut siéger en tant que juge au procès. L’auteur explique que selon le Code de procédure pénale au Brésil, il n’y a pas de réelle distinction entre les stades de l’enquête et du procès. Le juge du tribunal de première instance est chargé d’autoriser les mesures extraordinaires demandées par le ministère public, d’approuver l’acte d’accusation présenté par le ministère public, et de juger l’affaire sans jury ni autres juges. L’auteur dit que, si cette procédure ne porte pas, par elle‑même, atteinte à l’article 14 du Pacte, selon le Comité, la participation de juges à une procédure préliminaire dans laquelle ils se font une opinion sur un prévenu est incompatible avec l’exigence d’impartialité. Il ajoute que le Comité a également dit que les juges devaient non seulement être impartiaux mais aussi être perçus comme tels. Il affirme qu’il faut tenir compte du fait que la population s’attendait à ce que le juge Moro arrête l’auteur et le déclare coupable, ce qu’il a finalement fait.

3.8L’auteur explique que les éléments ci-après, entre autres, étaient signes de la partialité du juge Moro : a) l’émission délibérée d’un mandat d’amener illégal pour pouvoir arrêter l’auteur inutilement et publiquement ; b) la mise sur écoute de ses téléphones et de ceux de sa famille, et la divulgation illégale et malveillante des transcriptions de conversations aux médias (en particulier les conversations avec la Présidente) ; c) l’interception et la communication aux médias des enregistrements et transcriptions de conversations téléphoniques confidentielles avec son avocat, et les allégations de comportement délictueux visant son avocat. Il ajoute qu’à plusieurs reprises, le juge Moro a accepté des invitations à être présent ou à prendre la parole lors de manifestations organisées par des groupes qui étaient politiquement hostiles à l’auteur et qui avaient demandé publiquement son arrestation et sa condamnation, et qu’il a assisté en tant qu’invité d’honneur au lancement d’un livre consacré à l’Opération Lava Jato, qui le présentait sous un jour hagiographique et diffamait l’auteur en affirmant qu’il était coupable de corruption. L’auteur souligne que l’on ne peut dissocier la façon dont les actes du juge Moro étaient perçus de la théorie très médiatisée qu’il présentait dans ses conférences publiques et ses publications, à savoir la croisade d’un « juge d’attaque » très actif. L’auteur affirme que, parce que le juge Moro a utilisé sa fonction dans le service public pour avancer des arguments par lesquels il préjugeait de sa culpabilité à lui, il s’est disqualifié en tant que juge impartial dans la procédure engagée contre lui.

Risque de détention provisoire pour une durée indéterminée

3.9Lorsqu’il a soumis sa communication initiale et avant d’être incarcéré après confirmation de sa condamnation par le Tribunal fédéral régional, l’auteur a affirmé qu’il risquait d’être placé en détention provisoire pour une durée indéterminée, en violation de l’article 9 du Pacte. Il explique qu’il avait été formellement qualifié de suspect dans un certain nombre d’enquêtes et que la procédure engagée contre lui aboutirait plus que vraisemblablement à son arrestation et à sa mise en détention provisoire pour une durée indéterminée, sans possibilité de recours effectif. Il explique que d’après l’article 312 du Code de procédure pénale, le juge peut ordonner un placement en détention provisoire aux fins du maintien de l’ordre public et économique, de la commodité d’une enquête criminelle ou de la garantie d’applicabilité du droit pénal, chaque fois qu’un crime est établi et que des indices suffisants pointent vers son auteur. Il affirme que le « maintien de l’ordre public » − le motif pour lequel la plupart des suspects de l’Opération Lava Jato ont été placés en détention − est vague et doit être limité aux situations d’urgence. De même, la « commodité » d’une enquête criminelle doit s’entendre de la situation où il est probable que le détenu, s’il est libéré, entravera l’enquête en prenant la fuite ou en faisant pression sur les témoins, ou commettra d’autres infractions graves, une probabilité déterminée sur la base de son casier judiciaire ou de ses intentions récentes. L’auteur affirme que l’article 312 du Code n’est pas conforme à l’article 9 du Pacte parce qu’il ne contient pas les critères stricts permettant de réglementer la détention visant à obtenir un témoignage, une mesure exceptionnelle qui doit être encadrée avec soin et précision. Il ajoute que le Comité a condamné des États qui avaient placé des prévenus en détention pour les forcer à coopérer dans le cadre d’enquêtes. Il affirme que, bien qu’il n’ait jamais été placé en détention provisoire, conformément à la jurisprudence du Comité, il devrait être considéré comme une victime parce qu’il y avait un « risque réel » que les droits qu’il tient du Pacte soient violés.

Atteintes à la présomption d’innocence

3.10L’auteur affirme que la campagne médiatique virulente menée par le juge Moro, le Bureau du Procureur fédéral et la police a porté atteinte à son droit à la présomption d’innocence, en violation de l’article 14 (par. 2) du Pacte. Il rappelle que, dans son observation générale no 32 (2007), le Comité a dit que toutes les autorités publiques avaient le devoir de s’abstenir de préjuger de l’issue d’un procès, par exemple de s’abstenir de faire des déclarations publiques affirmant la culpabilité de l’accusé. Il ajoute que le Comité a appliqué ce principe lorsque, dans une autre affaire, il a conclu que la déclaration concernant la culpabilité de l’auteur, faite par un haut responsable de l’application des lois dans une réunion publique faisant l’objet d’une large couverture médiatique, avait constitué une violation de l’article 14 (par. 2) du Pacte. Dans le même sens, l’auteur rappelle que le Comité a conclu qu’un grand intérêt et une hostilité affichés avant le procès par des médias contrôlés par l’État constituaient une violation de ce droit, ce qui souligne l’importance du lien entre la couverture médiatique hostile et l’État.

3.11L’auteur affirme que de nombreux suspects dans l’opération Lava Jato ont été maintenus en détention jusqu’à ce qu’ils acceptent une procédure de jugement sur reconnaissance préalable de culpabilité, et que, chaque fois que lui ou l’un de ses proches était mentionné dans ces arrangements de plaider-coupable, les détails en ont été communiqués aux médias. Les médias ont ensuite utilisé les informations divulguées, même si elles n’étaient pas fiables, pour contribuer à sa diabolisation publique et entretenir l’espoir qu’il serait déclaré coupable de corruption. Il soutient que les médias de l’État partie lui étaient tous hostiles. Alors qu’il faisait officiellement l’objet d’une enquête, rien dans la législation de l’État partie ne permettait de protéger son honneur et sa réputation pendant cette période, une protection qui aurait pu être assurée, par exemple, si des lois sur l’entrave à l’exercice de la justice avaient empêché les médias de préjuger de sa culpabilité. Il soutient que le juge Moro n’a rien fait pour décourager les calomnies parce que, selon lui, l’opinion publique doit démontrer son soutien à l’organisation de poursuites.

3.12L’auteur soutient que les procureurs fédéraux chargés des affaires le concernant n’ont cessé de déclarer publiquement qu’il était coupable. Il mentionne, à titre d’exemples, la conférence de presse de quatre-vingt-dix minutes qui a eu lieu en septembre 2016 et le livre publié par le Procureur, Deltan Dallagnol, intitulé A Luta Contra a Corrupção (La lutte contre la corruption), dans lequel il présente l’auteur comme coupable des infractions dont il était accusé. L’auteur affirme que le seul recours possible contre cette atteinte était de porter plainte devant le Conseil national des procureurs, ce qu’il a fait le 31 mai 2016. Cependant, aucune mesure n’a été prise parce que le Conseil ne peut rien contre un membre du Bureau du Procureur fédéral, si ce n’est ouvrir une enquête interne et formuler de simples recommandations aux procureurs concernés.

Droit de voter et d’être élu

3.13L’auteur soutient que l’État partie a violé les droits qu’il tient de l’article 25 (al. b) du Pacte, à savoir le droit d’être candidatàl’élection présidentielle et le droit de voter, étant donné que la loi complémentaire no 135/2020 (loi du casier judiciaire vierge) impose une période d’inéligibilité de huit ans pour tout responsable politique qu’un organe collégial aurait déclaré coupable de certaines infractions, notamment celles dont l’auteur a été déclaré coupable. Selon l’auteur, cette loi est à la fois inconstitutionnelle et incompatible avec le Pacte, puisque son application équivaut à une violation du droit à la présomption d’innocence. Il fait observer que le Comité a déjà conclu à une violation du droit de vote et du droit d’être élu dans une affaire où l’incarcération de l’auteur concerné résultait d’une procédure dans laquelle les garanties d’équité n’avaient pas été respectées. Il soutient que, dans son cas, son incarcération était le résultat d’une procédure pénale dépourvue des garanties de procédure régulière, et que cette procédure pénale avait été engagée contre lui dans le but de l’empêcher d’être candidat aux élections présidentielles. Il fait observer que près de 1 400 personnalités politiques dont l’inscription avait été refusée par les tribunaux électoraux en 2018 et dont les appels étaient pendants ont été autorisées à poursuivre leur campagne électorale de cette année-là, jusqu’à ce que les décisions sur leurs appels soient définitives.

Épuisement des recours internes

3.14L’auteur rappelle la jurisprudence constante du Comité, à savoir que la règle de l’épuisement des recours ne s’applique que dans la mesure où ces recours sont utiles et disponibles. Il cite la jurisprudence du Comité et rappelle que les recours doivent offrir une chance raisonnable d’obtenir réparation et ne doivent pas excéder des délais raisonnables, et que les réexamens internes par les organes professionnels d’encadrement des juges et des procureurs ne constituent pas un recours qui doit être épuisé.

3.15En ce qui concerne le mandat d’amener, l’auteur affirme qu’il n’a pas eu l’occasion de le contester à l’époque, et que le préjudice que lui a causé cette publicité est irréversible. Il ajoute que toute plainte ultérieure déposée contre le juge Moro aurait été envoyée pour « enquête interne » par un collège de juges, ce qui n’aurait pas constitué un recours effectif. Il affirme également que toute action constitutionnelle ultérieure aurait été qualifiée de futile, puisque l’affaire appartenait au passé et les dommages étaient irréversibles. L’auteur soutient qu’il aurait pu intenter une action en dommages et intérêts au civil, mais que le procès aurait été très long.

3.16En ce qui concerne les deux griefs concernant la divulgation de conversations téléphoniques interceptées dans la cadre de la mise sur écoute, l’auteur soutient qu’il n’existe aucun recours interne autre qu’une action civile, laquelle aurait pris des années avant d’être jugée. Bien que Teori Albino Zavascki, juge au Tribunal fédéral suprême, ait confirmé le caractère illégal de la divulgation de la conversation téléphonique du 13 juin 2016 avec la Présidente, il n’a fourni aucun recours ou réparation à l’auteur, acceptant le caractère « irréversible » des effets de l’illégalité. L’auteur affirme qu’il n’existait aucun moyen effectif par lequel il aurait pu provoquer une action du Gouvernement ou du Conseil national de la justice.

3.17En ce qui concerne le manque d’impartialité du juge Moro, l’auteur affirme qu’il n’existait aucun moyen effectif de récuser le juge Moro pour partialité. Une requête en ce sens pouvait uniquement être déposée devant le juge lui-même ou adressée au Procureur général qui avait lui-même, en sa qualité de procureur fédéral, accusé l’auteur d’être coupable. L’auteur affirme que, en tout état de cause, le Procureur général avait simplement le pouvoir discrétionnaire d’engager une action gouvernementale, ce qui ne constituait pas un recours effectif. Toutes les requêtes possibles ont dû être soumises au juge Moro, qui les a rejetées. Ces recours ne permettaient pas de garantir la tenue d’un procès devant un juge impartial, puisqu’ils dépendaient des décisions du juge même contre lequel l’objection avait été soulevée. L’auteur a interjeté appel du rejet de ces requêtes, jusque devant le Tribunal fédéral suprême ; tous les appels ont été rejetés.

3.18En ce qui concerne le risque de détention provisoire, l’auteur soutient qu’en tant que détenu provisoire, il n’aurait eu aucune possibilité d’invoquer l’habeas corpus ou d’accéder à un tribunal pour contester sa détention, sauf en passant par le juge Moro. Il affirme que parce que le droit interne ne limite pas la détention provisoire aux cas où il y a probabilité de fuite ou d’altération d’éléments de preuve, et l’utilise aux fins d’obtention d’aveux (c’est‑à‑dire un accord moyennant une reconnaissance de culpabilité), il n’existait aucun recours effectif pour l’empêcher.

3.19En ce qui concerne son droit à la présomption d’innocence, l’auteur affirme que l’État partie n’a pris aucune mesure pour empêcher les fuites et la divulgation d’informations aux médias. Il ajoute que, parce qu’il n’existait pas au Brésil de lois sur l’entrave à l’exercice de la justice, il n’y avait pas de recours utile pour empêcher les médias de préjuger de sa culpabilité sur la base de ces fuites. Il affirme que les plaintes déposées devant le Conseil national des procureurs pour dénoncer le comportement du Procureur fédéral qui avait publiquement affirmé que l’auteur était coupable ont simplement été envoyées pour « enquête interne ». Il soutient que ces procédures ne sauraient être considérées comme des recours effectifs, puisqu’il s’agit de procédures disciplinaires administratives et discrétionnaires.

Non-application par l’État partie des mesures provisoires demandées par le Comité

3.20L’auteur explique que l’État partie n’a pas appliqué les mesures provisoires demandées par la Comité. Il affirme que l’État partie entendait clairement rendre les violations de ses droits politiques irréversibles et l’application d’une éventuelle décision du Comité impossible. Il soutient qu’en agissant de manière à empêcher le Comité de mener à bonne fin l’examen d’une communication ou à le rendre sans valeur ni effet, l’État partie a gravement contrevenu aux obligations qui lui incombent en vertu du Protocole facultatif.

Observations de l’État partie sur la recevabilité et sur le fond

Recevabilité : non-épuisement des recours internes

4.1L’État partie affirme que l’auteur n’a pas invoqué et épuisé tous les recours internes disponibles avant de présenter sa communication au Comité et que, de ce fait, les dispositions de l’article 5 (par. 2 b)) du Protocole facultatif empêchent celui-ci de l’examiner. Il fait valoir que selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, l’épuisement des voies de recours internes s’apprécie normalement par rapport à la date d’introduction de la requête devant la Cour, et que des exceptions sont acceptées lorsque le dernier échelon des recours internes est atteint peu après le dépôt de la requête, mais avant la décision de la Cour sur la recevabilité.

4.2L’État partie explique que les différentes lettres de l’auteur montrent que celui-ci a progressivement fait usage des recours internes disponibles à partir du dépôt de sa communication devant le Comité, ce qui démontre qu’il ne les avait pas correctement épuisés avant de s’adresser à celui-ci. L’État partie soutient que les griefs de l’auteur ont trait à deux procédures pénales en cours à Curitiba, qui étaient pendantes devant le tribunal de première instance lorsque l’auteur a déposé sa communication. Il explique que si une déclaration de culpabilité était prononcée − comme cela a été le cas par la suite −, l’auteur aurait le droit, conformément à l’article 593 (I) du Code de procédure pénale, de faire appel des deux condamnations, et la procédure d’appel suspendrait l’exécution de la sentence. Il explique également qu’en cas de déclaration de culpabilité, l’auteur aurait droit à d’autres recours ordinaires et extraordinaires devant le Tribunal supérieur de justice et devant le Tribunal fédéral suprême, ainsi qu’à des recours internes au sein de ces juridictions, conformément aux articles 619, 105 et 102 du Code de procédure pénale. Il ajoute que l’auteur avait également intenté une action en dommages-intérêts, mais qu’il n’a pas attendu la décision de la juridiction de première instance avant de déposer sa communication devant le Comité.

4.3L’État partie ajoute que, même au moment où il a transmis ses observations sur la recevabilité et sur le fond de la communication, les dernières étapes des recours internes disponibles n’avaient pas encore été atteintes. Il soutient que, compte tenu de la multitude de recours internes que l’auteur a déposés après avoir présenté la communication devant le Comité, et du fait que certains recours importants étaient encore pendants, il conviendrait de conclure que les recours internes n’ont pas été épuisés.

4.4L’État partie ajoute que l’auteur a tenté de décrire le système national de justice comme un système globalement partial dans lequel il n’y aurait aucune perspective d’accès à un véritable recours. Il soutient que donner à croire que les juges nationaux manquent généralement d’impartialité envers l’auteur relève de la subjectivité. De ce fait, il demande que le Comité déclare la communication de l’auteur irrecevable pour non-épuisement des recours internes.

Mandat d’amener du 2 mars 2016

4.5L’État partie explique que le mandat d’amener n’a pas entraîné une arrestation ou une détention arbitraire de l’auteur puisque tant la demande du Bureau du Procureur fédéral que la décision du tribunal étaient pleinement motivées, comme l’exige le droit interne. Il ajoute que le mandat était une mesure purement technique dépourvue de toute connotation ou intention politique, qui ne supposait aucun préjugé quant à la responsabilité pénale. L’État partie explique que, comme l’a précisé à l’époque l’équipe spéciale chargée de l’Opération Lava  Jato, la mesure avait été ordonnée conformément aux articles 201, 218, 260 et 278 du Code de procédure pénale et au pouvoir général de l’autorité judiciaire d’ordonner des mesures de protection qui, au moment où le mandat d’amener a été émis, étaient jugées constitutionnelles par le Tribunal fédéral suprême.

4.6L’État partie soutient que les circonstances rendaient nécessaire et justifiaient le mandat d’amener car la sécurité publique était en jeu. Le 17 février 2016, le ministère public de l’État de São Paulo avait prévu d’entendre la déposition de l’auteur et de son épouse. L’auteur a tenté de se soustraire à l’enquête en déposant une requête en habeas corpus devant le Tribunal de São Paulo, invoquant un risque élevé de protestations et de conflits. Ni l’auteur ni son épouse ne sont venus déposer et des manifestations ont quand même eu lieu aux alentours du palais de justice. L’État partie affirme que ces faits ont grandement motivé la délivrance du mandat d’amener à l’encontre de l’auteur, dans le but de garantir que l’enquête se déroule dans le calme.

4.7L’État partie fait valoir que, lorsqu’il a statué sur la requête en suspicion de partialité, le juge Moro a expliqué qu’une conversation téléphonique interceptée le 27 février 2016 entre l’auteur et le Président du Parti des travailleurs avait montré que l’auteur savait qu’une perquisition et une saisie étaient prévues et qu’il envisageait de « réunir certains membres du Congrès pour les surprendre ». L’État partie fait observer que, compte tenu de ces conversations, la police a pris des mesures pour prévenir tout risque pour l’enquête et pour l’intégrité morale et physique des agents de sécurité. Il soutient que, dans ces circonstances, le Tribunal aurait même pu opter pour une mesure légale plus sévère telle que la détention provisoire ou l’arrestation préventive. Cependant, en plus d’avoir opté pour une mesure moins sévère, le Tribunal, dans son ordonnance, a dit que l’auteur ne pouvait être ni menotté ni filmé, a expressément rappelé le droit de l’auteur de garder le silence et son droit à la présence de son avocat, et a précisé que l’ordonnance devait uniquement être utilisée si l’auteur refusait de suivre la police.

4.8L’État partie affirme que les allégations de l’auteur selon lesquelles le ministère public a illégalement rendu public cet acte de l’enquête ne sont pas crédibles. Puisque la mesure a été ordonnée précisément pour que la déposition puisse avoir lieu dans le calme, son succès dépendait du strict respect du secret nécessaire. En fait, contrairement à ce qu’affirme l’auteur, l’afflux de personnes n’a commencé qu’après que le conseil de l’auteur a eu connaissance de la mesure. L’État partie conclut que c’est le conseil de l’auteur et non le ministère public qui avait l’intention de perturber la déposition.

Divulgation de diverses conversations téléphoniques interceptées

4.9L’État partie explique qu’une limitation du droit à la vie privée, consacré à l’article 17 du Pacte, ne peut être ni arbitraire ni illégale. Il rappelle qu’aux termes de l’observation générale no 32 (2007) du Comité, même dans les affaires où le huis clos a été prononcé, le jugement doit être rendu public, notamment l’exposé des principales constatations, les éléments de preuve déterminants et le raisonnement juridique, sauf si l’intérêt de mineurs exige qu’il en soit autrement ou si le procès porte sur des différends matrimoniaux ou sur la tutelle des enfants.

4.10L’État partie explique que les décisions relatives à toutes les mises de téléphone sur écoute, qui avaient été demandées par le Bureau du Procureur fédéral, ont été largement motivées et étaient conformes au droit interne. Il soutient que la décision initiale, par les motifs exposés, explique le caractère indispensable de la mesure pour l’élucidation d’infractions graves qui avaient été révélées par un faisceau considérable de preuves, tout comme les décisions suivantes qui ont étendu et élargi les mesures prises. L’État partie ajoute que la levée de la confidentialité a aussi été décidée afin de prévenir toute entrave à la justice et de permettre un « contrôle public sain sur la performance du Gouvernement et de la justice pénale elle-même ». Selon le juge Moro, « ni le respect de la vie privée ni aucun intérêt social ne justifient que soient gardés secrets des éléments de preuve concernant une enquête qui vise des infractions commises contre le Gouvernement ». Par conséquent, la divulgation d’une conversation téléphonique interceptée, autorisée par le juge dans une décision largement motivée, ne soulève aucun problème au regard de l’article 17 du Pacte.

4.11L’État partie ajoute que le Tribunal fédéral suprême a décidé que la communication entre l’auteur et la Présidente ne pouvait être utilisée, ce qui démontre que des décisions judiciaires peuvent être réexaminées et que les organes chargés de la procédure pénale visant l’auteur étaient indépendants. Il précise que l’annulation d’une décision judiciaire rendue de manière technique relève de la procédure judiciaire et ne suppose pas la reconnaissance d’une faute d’ordre disciplinaire ou pénal, qui dans l’affaire concernant l’auteur, n’a pas eu lieu.

Mise sur écoute des téléphones des avocats de l’auteur et divulgation des conversations interceptées

4.12L’État partie soutient, en ce qui concerne la mise sur écoute du bureau de l’avocat de l’auteur, que le numéro de téléphone mis sur écoute était enregistré au nom d’une société appartenant à l’auteur. Ce fait a été confirmé par le Tribunal fédéral régional qui, ayant appris que les téléphones étaient utilisés par des tiers, a décidé que les éléments de preuve ne seraient aucunement utilisés. Les enregistrements audio ont d’ailleurs été détruits. L’État partie cite le juge Moro qui, dans sa décision sur la requête en suspicion de partialité a dit ce qui suit : « il n’existe pas d’enregistrement de conversations [interceptées] avec d’autres avocats que Roberto Teixeira, pas même de conversations dont le contenu a trait au droit de la défense ».

4.13En ce qui concerne la mise sur écoute du téléphone portable de M. Teixeira, l’État partie affirme que celui-ci faisait lui-même l’objet d’une enquête et était visé par une plainte au pénal pour la perpétration alléguée d’infractions liées au blanchiment d’argent. L’État partie cite le juge Moro qui affirme, dans sa décision, que M. Teixeira ne figurait pas sur la liste des avocats de l’auteur, et que « si l’avocat lui-même participe à un comportement illégal visé par l’enquête, aucune immunité d’enquête ou de mise sur écoute ne s’applique ».

Absence de tribunal impartial

4.14L’État partie soutient que la participation d’un juge à des manifestations publiques, telles la sortie d’un livre ou une exposition d’art, ne constitue pas une violation du devoir d’impartialité ou une tentative de se mettre en avant. Il ajoute que l’attribution de prix en reconnaissance de l’exercice d’une activité professionnelle est une pratique légitime et courante dans le domaine du droit et dans d’autres domaines des sciences humaines.

4.15En ce qui concerne le manque d’impartialité allégué du fait que le juge de première instance s’était prononcé sur des demandes de mesures provisoires pendant la phase préalable au procès, l’État partie affirme que le juge a un rôle passif dans l’enquête préliminaire. Il explique que le juge d’instruction évalue la légalité des demandes présentées par les parties et par la police mais n’est pas autorisé à mener lui-même l’enquête. En conséquence, les décisions ne reposent pas sur un examen judiciaire poussé des faits et ne lient pas le juge pendant le procès de l’affaire. L’État partie cite la décision du juge Moro selon laquelle, « bien que le délibéré signifie, sur le plan judiciaire, une certaine forme d’examen de l’affaire, ce qui importe c’est que le juge, même après avoir pris des décisions favorables ou défavorables à l’une des parties au procès, garde l’esprit ouvert pour changer d’avis pendant le procès, après la phase contradictoire et la présentation des arguments ».

4.16L’État partie fait observer que dans l’affaire Larrañaga c. Philippines, le juge de première instance et deux juges du Tribunal fédéral suprême avaient participé à l’évaluation des accusations préliminaires portées contre l’auteur, au point qu’ils avaient pu se faire une opinion sur l’affaire avant même le procès en première instance et en appel. Il ajoute que la Cour européenne des droits de l’homme a affirmé que le simple fait qu’un juge de première instance ait également pris des décisions avant le procès dans une affaire donnée ne constitue pas en soi un manque d’impartialité.

4.17Cependant, selon l’État partie, dans son système juridique, le juge ne participe jamais à la phase d’enquête ni à la stratégie d’investigation conçue par les procureurs et les policiers. Il ne se forge donc pas une opinion sur l’affaire avant le procès, mais garantit seulement le droit des prévenus à un contrôle judiciaire des actes accomplis par la police et les procureurs. L’État partie explique que c’est ce que le Tribunal fédéral régional a confirmé lorsqu’il a rejeté les quatre requêtes en suspicion de partialité déposées par l’auteur. Cependant, cela ne signifie pas que l’auteur ne disposait d’aucun recours effectif ou que les juges et tribunaux n’étaient pas impartiaux.

4.18L’État partie explique que les associations professionnelles de juges et de procureurs sont des institutions privées créées par des citoyens à titre privé et régies par le Code civil. Elles ne font pas partie de son système judiciaire et leur droit à la liberté d’expression est donc très protégé. Les opinions qu’elles expriment ne sont pas les opinions officielles de l’une quelconque de ses branches de pouvoir, et elles n’ont aucune capacité à influencer l’indépendance des juges. L’État partie conclut que les allégations de l’auteur à cet égard sont des affirmations rhétoriques non étayées.

Risque de détention provisoire pour une durée indéterminée

4.19L’État partie précise que l’auteur n’a jamais été placé en détention préventive. Il ajoute que l’auteur a été incarcéré en raison de l’exécution provisoire de sa sentence, après le prononcé de celle-ci par les juridictions de première et de deuxième instances, conformément à la jurisprudence du Tribunal fédéral suprême. Il explique que le placement en détention de manière légale d’une personne déclarée coupable par un tribunal compétent est un motif légitime de privation de liberté qui, s’il est prévu de manière explicite dans la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, est également implicite dans d’autres dispositions conventionnelles. Il fait observer que le Tribunal fédéral suprême a décidé le 17 février 2016, avant la première déclaration de culpabilité prononcée contre l’auteur, que la présomption d’innocence n’empêchait pas l’incarcération résultant d’un jugement qui, en appel, confirme une déclaration de culpabilité. En fait, avant l’auteur, plusieurs autres accusés dans le cadre de l’Opération Lava Jato ont été incarcérés après la confirmation, par une juridiction de deuxième instance, de la déclaration de culpabilité.

4.20En ce qui concerne la non-exécution de l’ordonnance du Tribunal fédéral régional, dans laquelle le juge Favreto ordonnait la libération de l’auteur, l’État partie explique que ce juge fait l’objet d’une enquête devant le Tribunal supérieur de justice pour délit présumé d’abus de pouvoir délibéré.

4.21En ce qui concerne les allégations de recours généralisé à la détention provisoire dans le cadre de l’Opération Lava Jato, l’État partie explique que le Tribunal fédéral pénal de Curitiba a dûment fondé ses ordonnances aux fins de la détention provisoire des accusés sur les dispositions légales pertinentes, à savoir l’article 312 du Code de procédure pénale, les a motivées, et a souligné le caractère exceptionnel de la mesure. Il ajoute que l’annulation de certaines décisions par des juridictions supérieures ne fait que démontrer l’indépendance et l’impartialité de son système judiciaire.

4.22En ce qui concerne les allégations selon lesquelles des mises en détention provisoire ont été ordonnées dans le cadre de l’Opération Lava Jato, dans le but de forcer des accords fondés sur une reconnaissance de culpabilité, l’État partie fait observer que 83,5 % des 175 accords de plaider-coupable conclus l’ont été alors que les personnes visées par l’enquête étaient libres. Il ajoute que, pour être valables, ces accords doivent être volontaires, comme l’exige la loi no 12850 modifiée en 2013, soit un an avant le début des enquêtes de l’Opération Lava Jato.

Présomption d’innocence

4.23L’État partie affirme que rien dans les déclarations des membres du Bureau du Procureur fédéral n’a pu influencer l’indépendance et l’impartialité de l’exercice du pouvoir judiciaire. Il ajoute que la fourniture au public d’une explication technique sur les accusations portées contre l’auteur relève du droit à l’information et obéit au principe de transparence. Il fait aussi observer que l’auteur et l’équipe de ses défenseurs ont tenu plusieurs conférences de presse pour communiquer leur version des faits.

4.24En ce qui concerne la première conférence de presse télévisée donnée par les procureurs de l’équipe spéciale chargée de l’Opération Lava Jato, l’État partie renvoie à la décision rendue par le juge Moro sur la requête en suspicion de partialité le visant. D’après cette décision, la conférence de presse : a) n’avait aucun objectif de politique partisane ou idéologique ; b) visait à informer et à rendre des comptes au public, compte tenu de la notoriété de l’accusé ; c) montrait l’importance de l’affirmation du pouvoir de commandement de l’auteur ; d) a décrit les accusations portées sans user d’un ton ou de qualificatifs irrévérencieux.

4.25L’État partie explique que l’auteur a intenté une action en justice contre le Procureur Deltan Dallagnol, demandant une indemnisation pour des dommages moraux allégués ; cette plainte a été rejetée en première instance puis, une seconde fois, en appel. Selon l’État partie la décision d’appel met en lumière le contexte des accusations, l’existence de preuves solides et le fait que l’intérêt public prime le droit à la vie privée lorsqu’une personnalité publique est concernée. Il explique que l’auteur a également déposé une plainte administrative contre le Bureau du Procureur fédéral, devant le Conseil national du Bureau du Procureur fédéral, un organe de contrôle indépendant qui a rejeté la plainte pour des motifs similaires.

Droit de voter et d’être élu

4.26L’État partie soutient que l’on peut seulement parler de violation de l’article 25 du Pacte si, selon les termes mêmes de celui-ci, les restrictions imposées au droit visé sont déraisonnables. Il cite l’observation générale no 25 (1996) du Comité selon laquelle des restrictions peuvent être imposées pour autant qu’elles soient établies par la loi et fondées sur des critères objectifs et raisonnables.

4.27En ce qui concerne le droit de l’auteur d’être élu, l’État partie explique que la loi du casier judiciaire vierge a été adoptée, conformément à l’article 14 (par. 9) de la Constitution, par une majorité absolue du Congrès national, ce qui indique que les restrictions sont exceptionnelles mais également qu’elles ont été soigneusement étudiées. Il ajoute que cette loi découle d’une initiative populaire prévue à l’article 61 (par. 2) de la Constitution, ce qui démontre la vigueur de la démocratie législative et de la souveraineté populaire, et a été promulguée par l’auteur lui-même lorsqu’il était Président. Selon son article premier (al. e 1)), est inéligible pendant huit ans à toute fonction publique tout citoyen reconnu coupable d’infractions telles que le blanchiment d’argent ou d’infractions contre l’administration publique, en vertu d’une sentence pénale passée en force de chose jugée ou rendue par un organe judiciaire collectif. L’État partie explique que l’auteur était dans ce cas. Il ajoute qu’en 2012, le Tribunal fédéral suprême avait jugé cette loi conforme à la Constitution. Cette décision a été rendue quatre ans avant le début des poursuites pénales contre l’auteur, ce qui indique qu’elle ne lui a pas été spécialement appliquée.

4.28L’État partie conclut que les restrictions imposées aux droits de l’auteur ont été établies démocratiquement par le droit interne et lui ont été dûment appliquées, en raison de la protection équilibrée des droits de l’homme, de la bonne gouvernance et de la démocratie, ce qui rend ces restrictions raisonnables et conformes à l’article 25 du Pacte.

4.29En ce qui concerne le droit de vote de l’auteur, l’État partie soutient que la restriction imposée était légale, objective et raisonnable. Il explique que, conformément au Code électoral, le Tribunal électoral suprême a adopté, le 8 décembre 2017, une résolution qui prévoit l’organisation de sessions électorales dans les établissements pénitentiaires et correctionnels comptant au moins 20 personnes habilitées à voter. Ce n’était pas le cas à la surintendance régionale de la police fédérale à Curitiba, ce qui explique que l’auteur n’a pas pu voter. L’État partie explique que, dans la mesure où le pays compte 600 000 personnes en détention, cette restriction est non seulement établie par la loi mais aussi raisonnable et objective.

Mesures provisoires

4.30L’État partie affirme que le Tribunal électoral suprême a dûment tenu compte, de bonne foi, de la recommandation du Comité des droits de l’homme aux fins de mesures provisoires en faveur de l’auteur. Il souligne que la proposition d’autoriser l’enregistrement de l’auteur en tant que candidat a été rejetée. Il ajoute que celle d’interdire l’enregistrement de la candidature de l’auteur mais de lui accorder le droit de faire campagne et de voir son nom maintenu dans le système électoral, a également été rejetée.

5.La suite des présentes constatations se trouve dans le document portant la cote CCPR/C/134/D/2841/2016 (Final proceedings).