NATIONS UNIES

CAT

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr.GÉNÉRALE

CAT/C/COL/CO/3/Add.1*13 juin 2006

FRANÇAISOriginal: ESPAGNOL

COMITÉ CONTRE LA TORTURE

EXAMEN DES RAPPORTS SOUMIS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 19 DE LA CONVENTION

Commentaires du Gouvernement colombien au sujet des conclusions et recommandations du Comité contre la torture (CAT/C/CR/31/1)

[24 mars 2006]

1.J’ai l’honneur de transmettre par la présente la note verbale DDH/ONU 13077/0597 datée du 15 mars 2006, par laquelle le Gouvernement colombien fait droit à la demande contenue dans la communication jmn/mm/fg/follow‑up/CAT datée du 17 février 2006 concernant la mise en œuvre des conclusions et recommandations adoptées par le Comité contre la torture à l’issue de l’examen du troisième rapport périodique présenté par la Colombie.

2.J’ai l’honneur, au nom du Gouvernement colombien, de répondre à la communication jmn/mm/fg/follow‑up/CAT, datée du 17 février 2006, concernant la mise en œuvre des recommandations adressées par le Comité contre la torture à l’État colombien à l’issue de l’examen du troisième rapport périodique réalisé en 2003.

3.À ce propos, et gardant à l’esprit les faits nouveaux et les progrès consignés dans la note verbale DDH.57149 transmise au Comité par notre Mission à Genève dans la communication MPC.1688, en date du 15 novembre 2004, je me permets, à cette occasion, de mentionner les aspects suivants:

Faits nouveaux sur le plan juridique

4.La pratique de la torture viole de nombreux droits fondamentaux de la personne protégés par la Constitution colombienne et consacrés dans de nombreux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme ratifiés par la Colombie. La Constitution colombienne consacre, en son article 12, l’interdiction expresse de la torture, soulignant que «nul ne fera l’objet de disparition forcée, d’actes de torture ni d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants». Cette disposition constitutionnelle est un prolongement de l’article 10 de la Loi fondamentale − qui fonde l’état de droit sur le respect de la dignité humaine − et reprend la teneur de l’article 5 de la Déclaration universelle des droits de l’homme et de la Convention américaine relative aux droits de l’homme, ainsi que les dispositions des articles 2 et 4 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

5.S’agissant du prolongement législatif de l’article 12 de la Constitution, il convient de souligner l’adoption et l’entrée en vigueur de la loi no 589 du 6 juillet 2000 qualifiant de crimes le génocide, la disparition forcée et le déplacement forcé, et aggravant les peines encourues pour le crime de torture, conformément aux principales normes internationales en la matière. Dans le même temps, cette loi dispose que ces crimes ne sont ni amnistiables ni prescriptibles et qu’ils relèvent de la compétence des juridictions pénales spécifiques.

6.Conformément au Code pénal colombien, modifié par la loi no 599 de 2000, le crime de torture est défini comme suit:

Article 178. Torture. Quiconque inflige à une personne des douleurs ou des souffrances physiques ou psychologiques dans le but d’obtenir d’elle ou d’un tiers des renseignements ou des aveux, de la punir d’un acte commis par elle ou supposé tel, ou de l’intimider ou de la contraindre pour un motif fondé sur une forme de discrimination quelle qu’elle soit, encourt une peine de détention d’une durée comprise entre huit et 15 ans, une amende d’un montant représentant entre 800 et 2 000 fois le salaire minimum légal en vigueur, et une interdiction de l’exercice de ses droits pendant une période égale à celle de la peine privative de liberté.

Quiconque inflige à autrui des souffrances physiques graves à des fins différentes de celles qui sont décrites au paragraphe précédent encourt la même peine.

Ne sont pas considérées comme torture la douleur ou les souffrances qui résultent uniquement de sanctions licites ou qui en sont une conséquence normale ou fortuite.

7.Dans le même temps, l’article 179 du Code pénal définit les circonstances considérées comme aggravantes pour ce crime:

Article 179. Circonstances aggravantes. Les peines prévues à l’article précédent seront augmentées d’un tiers dans les cas suivants:

a) Lorsque l’auteur fait partie des proches de la victime;

b) Lorsque l’auteur est un agent public ou un particulier agissant sur instruction ou au su d’un agent public;

c) Lorsque la victime est une personne incapable, un mineur de moins de 18 ans, une personne âgée de plus de 60 ans ou une femme enceinte.

d) lorsque le crime est commis contre une personne parce qu’elle appartient à l’une des catégories suivantes: fonctionnaire, journaliste, communicateur social, défenseur des droits de l’homme, candidat déclaré ou potentiel à des fonctions électives, responsable civique, communautaire, ethnique, syndical, politique ou religieux, témoin ou victime d’actes répréhensibles ou d’infractions disciplinaires, ou conjoint, compagnon ou compagne attitrés des personnes susmentionnées, ou encore personne apparentée par consanguinité jusqu’au troisième degré, par mariage jusqu’au deuxième degré ou par adoption au premier degré.

e) Lorsque le crime est commis en utilisant des biens publics.

f) Lorsque le crime est commis dans le but de préparer, faciliter ou dissimuler un autre crime ou d’en protéger le produit ou l’impunité, ou de faire en sorte que la personne visée ne puisse pas intervenir dans une procédure civile ou disciplinaire.

8.Par ailleurs, le Code pénal prévoit des peines supplémentaires ou majorées pour association de malfaiteurs, instigation, prévarication, non‑dénonciation et assistance, lorsque lesdits actes sont commis dans l’intention de torturer.

9.Il convient de souligner que, s’agissant des peines prévues pour les infractions visées dans la partie spéciale du Code pénal (notamment la torture), la loi no 890 de 2004, en vigueur depuis le 1er janvier 2005, prévoit, en son article 14, une majoration des peines encourues du tiers au minimum et de la moitié au maximum.

10.De même, le Code pénal, dans son chapitre consacré aux infractions contre le droit international humanitaire, dispose ce qui suit s’agissant de la torture sur personne protégée:

Article 137. Torture sur personne protégée. Quiconque, en situation de conflit armé, inflige à une personne des douleurs ou des souffrances physiques ou psychologiques graves, dans l’intention d’obtenir d’elle ou d’un tiers des renseignements ou des aveux, de la punir d’un acte commis par elle ou supposé tel, ou de l’intimider ou de la contraindre pour un motif fondé sur une forme de discrimination quelle qu’elle soit, encourt une peine de détention d’une durée comprise entre 10 et 20 ans, une amende d’un montant représentant entre 500 et 1 000 fois le salaire minimum légal mensuel en vigueur, et une interdiction de l’exercice de ses droits et de l’exercice d’une fonction publique pour une période comprise entre 10 et 20 ans.

11.S’agissant du Code pénal militaire, il convient de souligner que conformément à la loi de réforme no 522 de 1999 (art. 3), le crime de torture est expressément exclu de la compétence des tribunaux militaires.

Le Programme des paysans soldats

12.Le Programme des paysans soldats, destiné à permettre aux jeunes âgés de 18 à 24 ans d’effectuer leur service militaire obligatoire de 18 mois dans leur municipalité d’origine ou de résidence, s’inscrit dans le contexte du plan mis en œuvre par le Gouvernement colombien pour endiguer la vague de violence provoquée par les groupes armés illégaux, et a pour principal objectif le rétablissement de la présence de la force publique (à savoir près de 17 000 hommes) dans toutes les municipalités du pays. En tant que membres de la force publique, il leur est appliqué l’ensemble des droits et obligations organiquement attachés à ce statut.

13.Les paysans soldats ont pour mission d’assurer la sécurité dans les localités des lieux où ils résident et la défense des populations civiles, en ripostant ou en contre‑attaquant en cas d’attaques. La priorité de ces hommes est de renforcer la solidarité et la coopération au sein de leur communauté.

14.L’instruction de ces soldats se déroule, sur une période de 10 semaines, au sein des bataillons des forces armées de la région concernée et dans les bases d’entraînement de l’infanterie de marine. Au cours de cette période d’instruction, les recrues sont formées pour assurer la protection des populations locales, avec un accent particulier sur l’aspect relationnel et le respect des droits de l’homme et du droit international humanitaire. Le processus de recrutement, qui relève de la responsabilité du commandant de l’unité opérationnelle de la région concernée, est soumis à l’aval de la communauté et des autorités locales et assujetti à des mesures de sécurité draconiennes destinées à empêcher les infiltrations de membres des groupes armés illégaux.

15.La première phase d’enrôlement de paysans soldats dans les forces armées et la marine a commencé en novembre 2002, avec l’incorporation d’un premier contingent, et s’est achevée en mars 2003 avec l’affectation opérationnelle de 288 fantassins de marine et de 5 112 soldats du contingent. Ces hommes ont été affectés dans 133 municipalités où la force publique était complètement absente, et ils sont venus renforcer le dispositif de sécurité existant dans neuf autres municipalités. Actuellement, le Programme se trouve dans sa quatrième phase et il a, à ce jour, permis la constitution de 598 unités, regroupant 21 528 soldats.

Renforcement de l’administration de la justice

16.En 2003, le Comité s’est déclaré préoccupé par certaines des mesures législatives en cours d’adoption par le Congrès de la République. Il convient donc d’apporter certaines précisions concernant ces mesures. D’abord, le projet de loi antiterroriste, dont l’objectif était de transférer certaines compétences de police judiciaire aux forces armées et d’autoriser les mises en détention et les interrogatoires sans contrôle des services judiciaires pour une durée maximale de 36 heures, a été déclaré non exécutoire pour vice de forme par la Cour constitutionnelle, qui en avait été automatiquement saisie. Il n’existe à ce jour aucun projet de loi en la matière.

17.S’agissant du projet de loi relatif à la réforme de la justice, si une initiative à cet effet a effectivement été déposée devant le Congrès national par le Ministère de l’intérieur et de la justice en octobre 2002, elle a été retirée en mars 2003, et à ce jour le Gouvernement n’a présenté aucun nouveau projet de loi en la matière. Il convient toutefois de mentionner le projet de loi soumis par le Conseil supérieur de la magistrature pour réformer la loi no 270 de 1996 sur l’administration de la justice, qui suit son cours.

18.La loi no 003 de 2002 a introduit le système de procédure pénale accusatoire dans la Constitution colombienne. Approuvée par la loi no 908 du 31 août 2004, cette réforme marque l’aboutissement d’un travail mené conjointement par le Fiscal General de la Nación, le Ministère de l’intérieur et de la justice, le Procureur général de la nation, le Défenseur du peuple, le Président du Conseil supérieur de la magistrature, le Président de la Chambre pénale de la Cour suprême de justice, trois députés de la Chambre des représentants et trois sénateurs de la République. Cette réforme ne s’est pas limitée à une simple modification de la législation, mais a impliqué la rédaction d’un nouveau Code de procédure pénale et la modification du Code pénal, du Code pénitentiaire et carcéral, du Statut organique de la Fiscalía General de la Nación, de la réglementation du ministère public et de la loi statutaire sur l’administration de la justice.

19.Le nouveau système de procédure pénale a commencé à être mis en œuvre progressivement à partir du 1er janvier 2005, dans les circonscriptions judiciaires de Bogota, Armenia, Manizales et Pereira. En 2006, le système sera étendu à des villes comme Cali, Medellín, Tunja et Bucaramanga, et il sera généralisé à tout le pays d’ici le 31 décembre 2008.

20.Le nouveau système de procédure pénale accusatoire permettra de faire en sorte que les fiscales et les magistrats instructeurs fassent aboutir les procédures en moins de sept mois, à savoir le délai nécessaire au déroulement de l’enquête, de l’instruction et du procès. En 2004, on a commencé à mettre en place des programmes spéciaux de formation destinés aux fiscales, aux magistrats instructeurs, aux experts judiciaires et aux auxiliaires de justice entrés en fonction dans le nouveau système. Au travers de ces cours de formation et de perfectionnement, la Fiscalía et les institutions connexes s’efforcent de promouvoir la dimension humaine au sein des différentes instances judiciaires du pays. Au mois de décembre 2004, 479 fiscales, 499 magistrats instructeurs et 302 fonctionnaires avaient reçu une formation avant d’aller renforcer le Groupe technique d’investigation de la Fiscalía, soit un total de 1 280 fonctionnaires à Bogota au cours du premier trimestre 2005.

21.Dans le nouveau système de procédure pénale accusatoire, le défenseur sera choisi par l’accusé ou, à défaut, désigné dans le cadre du système national d’aide juridictionnelle. L’accusé devra, dès la première audience, disposer d’un avocat qui exercera tous les droits et compétences dévolus à la défense aux termes des traités internationaux relatifs aux droits de l’homme, ainsi que ceux qui sont expressément prévus par la Constitution. Ainsi, le défenseur disposera du temps et des moyens raisonnablement nécessaires pour préparer la défense, et notamment de la possibilité exceptionnelle d’obtenir des reports d’audience justifiés.

22.Par ailleurs, afin de garantir un accès libre et équitable à l’administration de la justice et aux décisions rendues par une autorité publique, le système national d’aide juridictionnelle organisé, dirigé et contrôlé par le Bureau du Défenseur du peuple, apportera une assistance technique aux personnes qui, du fait de difficultés économiques ou autres, ne peuvent s’offrir les services d’un avocat privé.

23.Dans le cadre du nouveau système, l’action du ministère public au pénal sera effectuée par l’intermédiaire de bureaux délégués du service du Procureur général de la nation constitués en instance spécialisée, une fois que la nécessité d’intervenir aura été établie, puisque dans le cadre du nouveau système fondé sur le principe contradictoire, l’intervention ne sera pas systématique et ne sera pas requise pour que la procédure soit valide.

24.Par ailleurs, la mise en œuvre du nouveau système de procédure pénale accusatoire a nécessité la réforme du Code pénitentiaire et carcéral. Par le décret no 2636 de 2004, le Président de la République a modifié certaines des dispositions contenues dans la loi no 65 de 1993, notamment pour garantir que nul ne puisse demeurer privé de sa liberté dans un établissement de réclusion sans que le juge des garanties ait prononcé la légalité de son arrestation ou de sa mise en détention provisoire, mesure dont l’objectif est d’assurer la comparution de l’accusé en audience pénale, la conservation des preuves, la protection de la société − particulièrement des victimes − et l’exécution effective de la peine; et pour attribuer des compétences de police judiciaire aux directeurs généraux, au directeur régional et au directeur de l’établissement pour enquêter sur les infractions commises à l’intérieur des établissements carcéraux.

25.De plus, conformément au chapitre III du Plan national de développement 2002‑2006 intitulé «Vers un État communautaire», qui prévoit le renforcement des services de justice, le Ministère de l’intérieur et de la justice a commencé, par l’entremise de sa Direction de l’accès à la justice, à mettre en œuvre trois programmes importants pour développer l’accès à la justice: le Programme national des maisons de justice, qui facilite l’accès des communautés aux services de justice à titre officiel ou amiable, afin de promouvoir le règlement pacifique des différends et le renforcement du lien social avec, au 3 décembre 2004, 37 maisons ouvertes dans les différentes régions du pays; le Programme national des centres de promotion de la coexistence citoyenne, né en 2001 d’une initiative de la municipalité de Barrancabermeja et coordonné depuis 2003 par le gouvernement central, dont l’objectif est d’ouvrir, dans les régions les plus exposées au conflit, des espaces d’accès aux institutions locales à travers des programmes et initiatives destinés à promouvoir et consolider les valeurs citoyennes, la coexistence et la résolution pacifique des différends; et le Programme national de réconciliation fondée sur le droit et l’équité, mécanisme parallèle de règlement des différends permettant à deux personnes ou davantage de rechercher elles‑mêmes la solution de leur différend avec l’aide et le concours d’une tierce partie neutre et qualifiée, le conciliateur.

Lutte contre l’impunité

26.S’agissant de la lutte contre l’impunité en cas de violations graves des droits de l’homme et d’infractions au droit international humanitaire, il convient de souligner la mise en œuvre, depuis octobre 2003, d’un projet de coopération internationale et d’assistance technique pour la mise en place d’un système de gestion et de coordination interinstitutions, dont l’objectif est double:

a)Appui et suivi de 134 procédures pour violations graves des droits de l’homme et infractions au droit international humanitaire. L’appui consiste à fournir les moyens financiers et logistiques nécessaires pour permettre aux entités chargées des enquêtes de mener à bien en temps voulu et comme il se doit les procédures et les actions requises, sur la base de programmes méthodologiques prédéfinis;

b)Élaboration et mise en œuvre d’une politique publique de lutte contre l’impunité dans les cas de violations graves des droits de l’homme et d’infractions au droit international humanitaire.

27.La réalisation de ces deux objectifs passe par une coordination et une coopération interinstitutionnelles entre les entités qui constituent le Comité spécial chargé d’appuyer les enquêtes sur les violations des droits de l’homme et infractions au droit international humanitaire et le Groupe de travail du Comité.

28.L’une des fonctions principales du Comité spécial est d’appuyer, dans le cadre de la loi et sans entraver l’action des organes compétents, les démarches et les procédures pertinentes dans les enquêtes en matière de droits de l’homme; il exerce en outre des fonctions de coordination et d’appui auprès des fonctionnaires compétents de chaque entité pour la conduite des enquêtes, afin de promouvoir une collaboration harmonieuse et efficace.

29.Le projet de lutte contre l’impunité s’appuie sur trois principaux types d’activités, à savoir:

a)Appui aux procédures: appui financier aux organes chargés d’enquêter sur les cas de violations des droits de l’homme et d’infractions au droit international humanitaire, afin de promouvoir le développement de commissions spéciales comprenant des équipes d’enquêteurs appelées à se rendre là où elles pourraient recueillir des éléments de preuve ou des informations utiles à l’établissement des faits. Il existe deux types de commissions: i) les commissions créées spécifiquement pour élucider une affaire; et ii) les commissions régionales, dont le rôle est d’appuyer diverses enquêtes sur des affaires connexes.

b)Facilitation de la coordination interinstitutionnelle: le projet offre à la fois un cadre et un moyen de communication entre les entités qui font partie aussi bien du système pénal que du système de contrôle disciplinaire et qui sont compétentes pour enquêter sur les violations des droits de l’homme et les infractions au droit international humanitaire. Cette démarche vise à favoriser l’échange d’informations et l’élaboration et le réexamen des stratégies communes;

c)Formulation de la politique de renforcement des capacités de l’État en matière d’enquête et de répression dans les cas de violations des droits de l’homme et d’infractions au droit international humanitaire: sur la base des travaux menés conjointement par les diverses institutions publiques responsables de la lutte contre l’impunité en cas de violations des droits de l’homme et d’infractions au droit international humanitaire, et des différentes études réalisées pour comprendre ce phénomène, un document a été élaboré afin d’orienter l’action à moyen et à long terme de l’État pour surmonter les obstacles qui empêchent ou compliquent l’élucidation des cas de violations des droits de l’homme et d’infractions au droit international humanitaire, la condamnation de leurs auteurs et l’indemnisation des victimes.

30.Cet objectif général ainsi défini requiert un renforcement des institutions existantes et des pratiques et procédures en vigueur pour connaître des cas de violations des droits de l’homme et d’infractions au droit international humanitaire, élucider les faits, punir les auteurs et indemniser les victimes. Il requiert également une amélioration du cadre réglementaire nécessaire à l’harmonisation des différentes sources de normes.

31.Parmi les résultats concrets des actions entreprises dans le cadre du projet de lutte contre l’impunité, il convient, en particulier, de souligner les suivants:

a)Dynamisation des enquêtes: les mesures d’appui ont permis de mettre un terme à l’état de stagnation dans lequel se trouvaient beaucoup des enquêtes ouvertes à la suite de violations des droits de l’homme ou d’infractions au droit international humanitaire et sélectionnées par le Comité spécial d’appui. C’est ainsi que, dans son rapport consolidé du mois de décembre 2005, l’Unité des droits de l’homme de la Fiscalía General de la Nación a présenté les résultats suivants s’agissant de l’appui apporté aux 134 affaires retenues par le Comité spécial:

i)Au total, 159 commissions spécifiques et 10 commissions régionales ont été créées, apportant un appui à 83 enquêtes sélectionnées et 384 enquêtes non sélectionnées;

ii)Cent quatorze personnes ont été condamnées: 4 membres des forces armées, 1 délinquant de droit commun, 108 membres du groupe armé illégal d’autodéfense et 1 membre des FARC. Par ailleurs, 307 personnes ont été arrêtées;

iii)Au total, 81 mesures d’instruction ont été ordonnées, 42 informations ont été ouvertes, et 108 informations ont été ouvertes avec dévolution de compétence;

iv)Il a été décidé 143 mises en détention provisoire et 50 mises en accusation, 47 affaires ont été classées et 30 déclarations concernant des personnes absentes ont été consignées. Au mois de décembre 2005, dans le contexte des activités du service du Procureur général de la nation, 31 commissions spéciales au total avaient pu être financées. Ces commissions ont permis d’apporter un appui à 25 enquêtes, dont 13 enquêtes sur des infractions disciplinaires et 12 enquêtes pénales spécialement diligentées par le ministère public. Les résultats de l’appui ainsi formé aux enquêtes sont les suivants:

44 % des affaires sélectionnées par le Comité spécial ont été classées, dont 90 % pour absence de preuve et 10 % du fait de la prescription applicable en matière disciplinaire;

72 % des affaires classées l’ont été au stade de l’enquête préliminaire, et 28 % au stade de l’enquête disciplinaire;

17 % des affaires sélectionnées par le Comité spécial étaient déjà classées au moment de leur sélection;

27 % des procédures financées par le Comité spécial ont abouti à un jugement, avec des condamnations dans 79 % des cas et des acquittements dans les 21 % restants;

29 % des affaires jugées avaient été intégrées au projet au stade de l’enquête préliminaire, 27 % au stade de l’enquête disciplinaire, et les 44 % restants au stade de l’énoncé des preuves à charge ou à décharge.

b)Coordination institutionnelle: les mesures prises dans le cadre du projet de lutte contre l’impunité ont favorisé le renforcement du Comité spécial d’appui et de son Groupe de travail en tant que cadres d’échange d’informations et de prise en compte collective des critères et lignes directrices applicables pour appuyer les procédures. Par ailleurs, ces deux instances ont également permis au projet de négocier et obtenir les moyens et produits de la «Politique de renforcement des capacités de l’État en matière d’enquête et de répression dans les cas de violations des droits de l’homme et d’infractions au droit international humanitaire»;

c)Apprentissage préalable à l’élaboration d’une politique: dans le cadre du projet, il a été élaboré et réalisé des études pour comprendre les facteurs qui conditionnent l’impunité dans les cas de violations des droits de l’homme et d’infractions au droit international humanitaire en Colombie. Ces études ont porté sur les obstacles que les institutions chargées des enquêtes et de la répression en la matière rencontrent dans l’élucidation des faits. Le projet s’est également nourri des recommandations adressées à l’État par les organisations nationales et internationales, et des études réalisées par d’autres institutions publiques ou privées;

d)Stratégies d’enquête: les activités menées dans le cadre du projet ont permis d’améliorer la capacité de planification des institutions responsables des enquêtes, ce qui s’est traduit par l’élaboration de plans semestriels d’appui aux procédures et de stratégies régionales et, à terme, par des progrès dans l’attention dévolue aux principes de célérité, d’efficacité et d’économie;

e)Finalisation d’un document d’orientation: d’août à octobre 2005, dans le cadre du projet de lutte contre l’impunité des réunions de travail ont été organisées avec la participation de toutes les institutions qui enquêtent sur les violations des droits de l’homme et les infractions au droit international humanitaire, les jugent et les répriment, dans le but d’identifier les projets s’inscrivant dans cette politique et d’en définir les orientations. Ces réunions de travail ont permis d’identifier 24 projets en vue de la réalisation des 17 objectifs spécifiques inscrits dans la politique et de son objectif général.

32.À sa réunion du 22 novembre 2005, le Comité spécial d’appui a approuvé la «politique de lutte contre l’impunité dans les cas de violations des droits de l’homme et d’infractions au droit international humanitaire par le renforcement des capacités de l’État en matière d’enquête, de poursuites et de répression», et a estimé que cette politique devrait être présentée dans un document publié par le Conseil national de politique économique et sociale (CONPES). Dans le cadre du mandat du Comité spécial, l’élaboration de ce document a été engagée, avec le concours technique de la Direction justice et sécurité du Département national de la planification et des autres institutions concernées. En décembre 2005 et janvier 2006, des réunions de travail interinstitutionnelles ont été organisées avec les organes chargés de mettre en œuvre les mesures contenues dans la politique, afin de déterminer le mode de financement de chaque projet. Par ailleurs, la Direction justice et sécurité précitée a été associée à la rédaction du document d’orientation final.

33.À sa réunion du 6 mars 2006, le CONPES a approuvé le document no 3411 contenant le texte de ce document d’orientation, qui prévoit 17 objectifs spécifiques concrétisés par 24 projets organisés suivant quatre grands axes stratégiques, à savoir: a) développement institutionnel et organisationnel; b) gestion des ressources et, en particulier, développement des ressources humaines; c) victimes et témoins; et d) procédures opérationnelles spécifiques pour les enquêtes et la répression. Dans ce document, le CONPES prévoit une enveloppe budgétaire de 40 083 946 000 pesos colombiens sur trois ans pour la mise en œuvre de la politique.

34.Enfin, le projet contribuera à promouvoir le processus d’élaboration, de préparation et de mise en œuvre du programme de suivi de la politique. C’est dans ce contexte qu’au mois de janvier 2006 a été lancée la première série de consultations en vue de l’identification d’indicateurs permettant de mesurer les progrès réalisés dans la mise en œuvre des objectifs inscrits dans la politique et des propositions d’indicateurs ont été reçues de chacune des entités impliquées dans les enquêtes, les poursuites et la répression en cas de violations des droits de l’homme et d’infractions au droit international humanitaire.

Constatation d’actes de torture en cas de violations de l’intégrité de la personne et du droit à la vie

35.L’Institut national de médecine légale et science médico‑légale, établissement public créé sous l’égide de la Fiscalía General de la Nación, s’est engagé dans un processus de développement des capacités comprenant notamment les activités suivantes:

a)Présentation du Protocole d’Istanbul à l’occasion du Congrès national de médecine légale et science médico‑légale, en novembre 2002;

b)Formation d’experts légistes en vue de l’application de méthodes techniques et scientifiques modernes lors des autopsies et pour la recherche et la conservation d’éléments de preuves physiques. Cette formation comportait des programmes scientifiques pour l’harmonisation des pratiques de médecine légale avec les principes directeurs contenus dans le Manuel sur la prévention des exécutions extrajudiciaires, arbitraires et sommaires et les moyens d’enquête sur ces exécutions, publié par l’ONU en 1991, dont les aspects relatifs à l’étude du cadavre ont été repris dans le Manuel pour la pratique des autopsies médico‑légales, adopté comme norme institutionnelle le 11 septembre 2002. Les manuels de procédures de l’Institut en matière d’autopsie traitent également d’aspects spécifiques tels que le diagnostic des abus sexuels, l’étude des corps ou parties de corps en décomposition ayant parfois séjourné dans l’eau, les lésions provoquées par des décharges électriques et autres circonstances ou constatations éventuelles susceptibles de révéler des actes de torture ou de constituer en eux‑mêmes des actes de torture;

c)L’application, dans le contexte du service régional spécialisé dans la pathologie légale, du Protocole d’autopsie élaboré par l’ONU comme guide pour réaliser une autopsie complète en cas de violations possibles des droits de l’homme et du droit international humanitaire dans toutes les affaires nécessitant une autopsie, particulièrement lorsqu’elles sont en rapport avec des événements survenus dans des zones de combats. Ce protocole garantit un compte rendu scientifique complet des constatations effectuées et il sert l’enquête à travers l’examen et la description systématiques du cadavre. Lorsque les conditions de travail ne permettent pas l’application intégrale du Protocole, celui‑ci prévoit des mesures d’exception et des ajustements;

d)La mise en œuvre d’un programme de surveillance de la qualité, comprenant la vérification des compétences de chaque expert médico‑légal appelé à réaliser des autopsies, et particulièrement de sa faculté à détecter et établir spécifiquement la présence de lésions susceptibles d’avoir provoqué des douleurs et des souffrances, les signes d’une immobilisation forcée ou d’une agression sexuelle et des indices ou éléments permettant de conclure que le corps a été dissimulé ou qu’on a tenté d’en rendre l’identification impossible;

e)La mise en œuvre de programmes visant à permettre une identification fiable des cadavres autopsiés, comportant notamment un processus de localisation des corps en préalable à une éventuelle demande d’exhumation.

36.Dans ce cadre, l’Institut a mis en place un système de surveillance épidémiologique des lésions provoquées par des causes externes (SIVELCE) qui, sous l’intitulé «Variables relatives aux droits de l’homme» et sur la base des définitions suivantes, recueille depuis 2003 les données pertinentes:

a)Indices de torture physique (pour les homicides ou les lésions corporelles): ensemble de signes susceptibles d’indiquer que la victime a été torturée, étant entendu que ces indices doivent être distingués de toutes autres formes de lésions postérieures au décès;

b)Indices d’immobilisation: si la victime ou le cadavre présente un ou plusieurs des signes suivants: mains attachées, pieds attachés, autres liens, bâillon;

c)Indices de souffrances physiques: lorsque la victime ou le cadavre présente une ou plusieurs traces de piqûres, brûlures, coupures, coups, chocs électriques ou pression excessive;

d)Indices de mutilation antérieure au décès: lorsque la victime ou le cadavre présente une amputation des ongles, des phalanges, des mains, des pieds, des extrémités, de la tête, des yeux, de la langue, des organes sexuels, des oreilles, du nez ou des cheveux;

e)Indices de pratiques propres à entraîner la mort: si la victime ou le cadavre a un sac sur la tête, ou présente des signes d’immersion.

37.Par ailleurs, on a commencé à mettre en place un système de surveillance des possibles violations des droits de l’homme et du droit international humanitaire en proposant des critères d’inclusion des corps soumis à autopsie pour faciliter la prise en compte sélective des cas dès les premières phases du processus, soit celle de l’autopsie − lorsque les causes du décès ne sont pas encore connues mais que les circonstances sont suspectes −, ou celle du signalement de la disparition d’une personne, lorsque les circonstances de cette disparition n’ont pas encore été confirmées. Cette méthode permet de déclencher les investigations rapidement et sans attendre les décisions des autorités judiciaires qui, lorsqu’il s’agit d’examiner, d’établir et de confirmer les cas de disparition forcée ou de torture, demandent beaucoup de temps.

38.En dépit de ce qui précède, les obstacles qui empêchent l’aboutissement des enquêtes sur les cas de torture quand il y a eu violation du droit à la vie sont encore nombreux. L’un de ces obstacles concerne les décès pour lesquels, comme c’est fréquemment le cas, il est impossible de mettre en place un protocole de travail, dans la mesure où au moment de l’autopsie les circonstances et les auteurs de l’infraction ne sont pas connus et où les lésions ne sont pas évidentes, de sorte que l’on ne sait pas exactement s’il y a eu torture et si celle‑ci a un lien avec le décès. Pour y remédier, il faut améliorer le niveau de formation et d’expérience du personnel chargé de pratiquer les autopsies afin d’améliorer l’«indice de présomption», domaine dans lequel l’Institut national de médecine légale et science médico‑légale, en dépit du travail déjà réalisé, doit encore faire des efforts pour développer l’équipement médical et scientifique dans certains services (matériel radiologique, matériel d’examen de l’ADN, etc.).

39.D’autre part, l’Institut national de médecine légale et science médico‑légale applique, suivant une procédure réglementée, les dispositions des manuels, normes et guides techniques qui ont été adoptés, notamment:

a)L’accord no 11 de 2002 portant adoption du Manuel régissant la pratique des autopsies;

b)La résolution no 586 de 2002 portant adoption du Règlement technique relatif à l’examen médico‑légal complet des victimes lors des enquêtes relatives à des infractions de nature sexuelle;

c)La résolution no 953 de 2003 régissant l’utilisation des conclusions des examens effectués ailleurs que dans les locaux de l’Institut national de médecine légale et science médico‑légale;

d)La résolution no 1019 de 2004 portant adoption de manuels sur les procédures et techniques en matière de médecine légale;

e)La résolution no 1026 de 2004 portant adoption d’une directive relative à l’utilisation de la photographie numérique dans les enquêtes relatives à des infractions de nature sexuelle et lésions corporelles;

f)La résolution no 1037 de 2004 portant adoption d’un guide pratique de l’examen odontologique en médecine légale;

g)La résolution no 1054 de 2004 adoptant la procédure de consentement informé préalable à la réalisation d’examens de médecine légale et autres procédures se rapportant aux victimes d’agressions sexuelles et de lésions corporelles, et réglementant son utilisation.

40.Ces mesures, déjà mises en œuvre, ont facilité l’application du Protocole d’Istanbul dans les cas de torture n’ayant pas entraîné la mort de la victime, une réglementation définitive à ce sujet devant être adoptée prochainement.

Protection des défenseurs des droits de l’homme

41.Dans le cadre du Programme de protection adopté par le Ministère de l’intérieur et de la justice, les activités suivantes ont été développées et se poursuivront:

a)Renforcement des actions de sécurité préventive dans les régions: ateliers de formation destinés à renforcer les compétences individuelles requises pour gérer les situations de risque auxquelles certaines personnes sont exposées en raison de leurs activités, en apprenant à ces personnes à prévenir, évaluer et gérer les événements susceptibles de se produire, sans recours aux armes. De janvier à mars 2006, neuf ateliers de ce type ont été organisés dans les départements de Cundinamarca et Antioquia et, depuis le mois de mai, d’autres ont été organisés dans les départements de Cauca, Norte de Santander, Nariño, Santander, Risaralda et Tolima, pour un total de 547 personnes formées;

b)Renforcement du Programme de protection dans les régions: création et développement d’espaces d’interaction entre les autorités civiles, les services de police et la population bénéficiaire (cible) du Programme, espaces qui seront renforcés d’ici le mois de mai 2006, et mise en œuvre de mécanismes d’analyse et de suivi en vue de l’élaboration de stratégies de prévention et de protection de la population, associant les autorités et la population cible, d’ici le mois de juin 2006.

42.S’agissant du budget du Programme, le Ministère des finances et du crédit public, à la demande du Ministère de l’intérieur et de la justice, a alloué pour l’exercice 2005 une somme de 32 123 000 pesos qui, au mois d’août de la même année, a été complétée par une nouvelle enveloppe de 16,1 millions de pesos. Pour l’exercice 2006, le Ministère des finances a alloué une enveloppe de 50 393 400 pesos. En outre, l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID) a financé le Programme à hauteur de 3,5 millions de pesos, soit un total de 53 893 400 pesos, dans le but de répondre efficacement aux exigences de protection incombant au Ministère de l’intérieur et de la justice, notamment s’agissant des défenseurs des droits de l’homme.

43.Concernant la nécessité de promouvoir et renforcer le travail des défenseurs des droits de l’homme, au sein de la fonction publique colombienne, la direction du Département administratif de la fonction publique (DAFP), en tant qu’instance assumant la présidence du Conseil consultatif pour le contrôle interne, a donné pour instruction en août 2005 à tous les responsables du contrôle interne − au niveau tant local que national − de prendre en compte dans toutes leurs activités en matière de prévention et d’amélioration la défense et la protection des droits de l’homme par l’ensemble des agents de l’État, en application des paragraphes 5 à 10 de l’article 48 du Code disciplinaire unique figurant dans la loi no 734 de 2002. Dans le même but, le Bureau du Procureur général de la nation, par l’intermédiaire de sa représentante disciplinaire pour la défense des droits de l’homme, du Groupe de conseillers pour les droits de l’homme et de la Direction nationale des enquêtes spéciales, a ordonné l’ouverture d’enquêtes sur tous les actes incompatibles avec les droits de l’homme attribués à des agents de l’État.

44.Au cours d’une réunion qui s’est tenue au mois de novembre 2005 et à laquelle ont participé des organismes officiels et diverses organisations non gouvernementales de défense des droits de l’homme, il a été indiqué que le Bureau du Procureur général de la nation effectuerait une analyse des résultats obtenus et des difficultés rencontrées dans l’application du paragraphe 53 de l’article 48 du Code disciplinaire unique, qui érige en faute très grave le «manquement aux ordres et instructions contenus dans les directives présidentielles ayant pour objet la promotion des droits de l’homme et l’application du droit international humanitaire». Cette analyse, qui devait être achevée pour le mois de mars 2006, permettra à ladite institution de déterminer dans quelle mesure le paragraphe en question peut être appliqué et jusqu’à quel point il contribue à la mise en œuvre de la recommandation faite en ce sens par le Haut‑Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme.

45.En outre, en application de la directive ministérielle no 9 de 2003, le Commandement général des forces armées a, par la circulaire no 133 du 23 janvier 2004, donné des instructions particulières à toutes les unités opérationnelles tactiques et annexes concernant les informations susceptibles de contribuer à la protection des droits des syndicalistes et des défenseurs des droits de l’homme et la nécessité de s’abstenir de toutes déclarations infondées qui risqueraient d’exposer ces groupes déjà vulnérables. Dans ce contexte, les unités concernées doivent, les trois premiers jours de chaque mois, communiquer les résultats des opérations tactiques menées pour protéger les organisations syndicales et les organisations de défense des droits de l’homme, en précisant lesquelles sont exposées à des risques particulièrement élevés face aux pressions des groupes armés illégaux et en faisant le point sur l’état des enquêtes disciplinaires ou pénales éventuelles.

46.En ce qui concerne le renforcement des cadres de dialogue entre les autorités et les organisations de défense des droits de l’homme, on sait qu’il existe en Colombie différents cadres institutionnels qui permettent des échanges périodiques ou permanents. Ces structures s’attachent à apporter des réponses aux problèmes et aux questions concernant spécifiquement la situation des droits de l’homme dans le pays, par exemple mise en œuvre et suivi de mesures conservatoires et provisoires dans le cadre du système interaméricain de protection, déplacements internes, disparitions forcées ou encore suivi de l’application des recommandations formulées au niveau international.

47.Dans le cadre de la politique de prévention des violations des droits de l’homme, des efforts ont été menés dans 30 des 32 départements du pays, ainsi que dans les chefs‑lieux de département, pour inscrire la composante droits de l’homme et droit international humanitaire dans les plans de développement présentés par les gouverneurs et les maires et adoptés par les assemblées départementales et les conseils municipaux concernés. Vingt‑sept plans d’action ont été élaborés dans les départements, et 186 dans les municipalités. Ces actions ont été menées en concertation constante avec les organisations issues de la société civile, notamment des défenseurs des droits de l’homme et de la paix, en application de la politique gouvernementale de dialogue et de renforcement des institutions. Tant au niveau départemental qu’au niveau municipal, la mise en œuvre de ces plans d’action a été l’occasion d’un dialogue permanent avec les organisations de défense des droits de l’homme et de la paix qui, à tous les stades, ont été associées aux processus de formation et d’information en matière de droits de l’homme, de même que les enfants et adolescents dans le cadre scolaire.

48.Dans le processus concerté d’élaboration du Plan national d’action pour les droits de l’homme et le droit international humanitaire, une interaction permanente a été entretenue avec les organisations nationales de défense des droits de l’homme. Tant au niveau national que sur le plan régional, le dialogue a été encouragé au travers de réunions organisées par différentes instances afin d’examiner des thèmes spécifiques intéressant ces organisations. Des contacts permanents et structurés ont en outre été établis avec les organisations de défense des droits de l’homme et les organisations de la société civile dans le cadre d’instances telles que les comités d’évaluation des risques, le Comité des droits de l’homme des travailleurs, le Comité pour la recherche des personnes disparues, le Comité des enseignants menacés et les comités départementaux de la Mission médicale.

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