Nations Unies

CCPR/C/GEO/CO/4

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

19 août 2014

Français

Original: anglais

Comité des droits de l ’ homme

Observations finales concernant le quatrième rapport périodique de la Géorgie *

Le Comité des droits de l’homme a examiné le quatrième rapport périodique de la Géorgie (CCPR/C/GEO/4) à ses 3074e et 3075e séances (CCPR/C/SR.3074 et 3075), les 10 et 11 juillet 2014. À sa 3091e séance (CCPR/C/SR.3091), le 23 juillet 2014, il a adopté les observations finales ci-après.

A.Introduction

Le Comité prend acte avec satisfaction de la présentation du quatrième rapport périodique de la Géorgie et des informations qu’il contient. Il se réjouit de la possibilité qui lui a été donnée d’engager un dialogue constructif avec la délégation de haut niveau de l’État partie sur les mesures prises par celui-ci pour donner effet aux dispositions du Pacte. Il sait gré à l’État partie de ses réponses écrites (CCPR/C/GEO/Q/4/Add.1) à la liste des points à traiter (CCPR/C/GEO/Q/4), que sont venues compléter les réponses données oralement par la délégation pendant le dialogue, et des informations complémentaires qu’il lui a fournies par écrit.

B.Aspects positifs

Le Comité se félicite des mesures législatives et institutionnelles suivantes qui ont été prises par l’État partie:

a)L’adoption de la Stratégie nationale relative aux droits de l’homme pour 2014-2020 et du Plan d’action national relatif aux droits de l’homme pour 2014-2015, en avril et juin 2014, respectivement;

b)Les modifications apportées au Code pénitentiaire en avril 2014;

c)La décision de la Cour constitutionnelle, en date du 4 février 2014, qui a déclaré non constitutionnel le fait de faire figurer «l’homosexualité» parmi les indications contraires s’agissant de don du sang et de ses composants;

d)Les modifications et les ajouts apportés à la loi relative aux réunions et manifestations, en juillet 2011;

e)Le relèvement de l’âge de la responsabilité pénale, qui est passé de 12 à 14 ans, en février 2010.

Le Comité se félicite de la ratification par l’État partie des instruments internationaux ci-après ou de son adhésion à ces instruments:

a)Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés, le 3 août 2010;

b)La Convention de 1954 relative au statut des apatrides, le 23 décembre 2011;

c)La Convention relative aux droits des personnes handicapées, le 13 mars 2014;

d)La Convention de 1961 sur la réduction des cas d’apatridie, le 1er juillet 2014.

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Suite donnée aux constatations adoptées par le Comité au titre du Protocole facultatif

Le Comité note que les procédures d’exécution des décisions prises par les tribunaux internationaux compétents dans le domaine des droits de l’homme ont été mises en place et que la question des modifications à apporter aux dispositions législatives pertinentes en vue de garantir la mise en œuvre des décisions prises et des recommandations faites par les autres organes internationaux, notamment les organes conventionnels de l’ONU, fait actuellement l’objet de débats, mais il est préoccupé par le fait qu’il n’existe pas encore de dispositif permettant de donner pleinement suite aux constatations du Comité (art. 2).

L ’ État partie devrait prendre toutes les mesures institutionnelles et législatives nécessaires pour veiller à ce qu ’ il soit donné pleinement suite aux constatations adoptées par le Comité, afin de garantir le droit des victimes à un recours utile lorsqu ’ il y a eu une violation du Pacte, conformément au paragraphe 3 de l ’ article 2 du Pacte.

Législation antidiscrimination

Le Comité salue l’adoption de la loi relative à l’élimination de toutes les formes de discrimination, le 2 mai 2014, et note que le Bureau du Défenseur public est chargé de surveiller l’application de la législation antidiscrimination. Néanmoins, il se dit préoccupé par: a) la question de l’efficacité du mécanisme d’application, en l’absence d’un organe indépendant chargé de rendre des décisions contraignantes et de demander que des amendes soient infligées aux auteurs d’infractions; b) l’insuffisance des sanctions prises pour décourager et prévenir la discrimination; et c) la modicité des ressources allouées à l’Office du Défenseur public pour que celui-ci puisse assumer efficacement ses nouvelles fonctions (art. 2 et 26).

L ’ État partie devrait continuer d ’ améliorer sa législation antidiscrimination pour assurer une protection adéquate contre la discrimination dans la pratique. Il devrait notamment:

a) Continuer d’augmenter les ressources financières et humaines allouées au Bureau du Défenseur public, afin qu’elles soient à la mesure des nouveaux rôles qui lui ont été confiés et lui permettent de s’acquitter efficacement de ses nouvelles fonctions;

b) Autoriser le Bureau du Défenseur public à émettre des avis contraignants et à demander l’ouverture de procédures judiciaires dans le cadre de son mandat relatif au suivi de l’application de la législation antidiscrimination, ou instaurer un organe de contrôle indépendant distinct et étendre ses pouvoirs à ce domaine;

c) Veiller à ce que les auteurs d ’ infractions soient dûment sanctionnés et que les victimes de la discrimination aient accès à des recours utiles et appropriés;

d) Mieux faire connaître à l ’ ensemble de la population la loi relative à l ’ élimination de toutes les formes de discrimination et les sanctions encourues pour discrimination.

Non-discrimination et égalité des sexes

Le Comité se félicite des mesures prises par l’État partie pour promouvoir l’égalité des sexes, dont l’adoption de la loi sur l’égalité des sexes en 2010 et l’adoption du Plan national d’action en faveur de l’égalité des sexes pour 2014-2016, mais il demeure préoccupé par:

a)La sous-représentation des femmes aux postes de décision dans les organes législatifs et exécutifs, dont le Parlement et le Gouvernement;

b)L’écart considérable entre les salaires des hommes et ceux des femmes;

c)La fréquence du harcèlement sexuel, notamment sur le lieu de travail;

d)Le nombre de cas de mariage précoce;

e)La pratique de l’avortement sélectif concernant les fœtus de sexe féminin (art. 2, 3, 23 et 26).

L ’ État partie devrait renforcer les mesures qu ’ il prend pour garantir l ’ égalité des sexes, et notamment:

a) Mettre au point des stratégies de lutte contre les attitudes patriarcales et les stéréotypes sur les rôles et responsabilités des hommes et des femmes dans la famille et dans l’ensemble de la société, notamment en organisant des campagnes de sensibilisation de la population au fait qu’il faut que les femmes puissent exercer leurs droits;

b) Renforcer l ’ action menée pour parvenir à une représentation équitable des femmes aux postes de décision dans les organes législatifs et exécutifs, y compris au Parlement et aux niveaux les plus élevés du Gouvernement, en se fixant expressément des échéances;

c) Éliminer l ’ écart entre les salaires des hommes et ceux des femmes par la lutte contre la ségrégation verticale et horizontale sur le marché de l ’ emploi;

d) Édicter des lois interdisant le harcèlement sexuel, prévoir des sanctions à l ’ effet dissuasif et protéger les victimes, sensibiliser l ’ ensemble de la population au caractère inadmissible du harcèlement et encourager le signalement de tels actes;

e) Combattre le mariage précoce, notamment en mettant au point des stratégies de sensibilisation au niveau local axées sur ses conséquences négatives;

f) Lutter contre la pratique des avortements sélectifs en fonction du sexe du fœtus, et notamment surveiller l ’ ampleur de ce phénomène, faire face à ses causes profondes et à ses conséquences à long terme pour la société, élargir et améliorer les services de planification de la famille et mener des activités de sensibilisation aux effets néfastes de la sélection selon le sexe et au fait que les garçons et les filles ont la même valeur.

Discrimination fondée sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre

Le Comité est préoccupé par la discrimination et l’opprobre social, les discours de haine et les actes de violence dont sont victimes les personnes lesbiennes, gay, bisexuelles et transgenre et par la violation de leur droit à la liberté d’expression et de réunion (art. 2, 9, 19, 21 et 26).

L ’État partie devrait prendre des mesures efficaces pour lutter contre toute forme de stigmatisation sociale de l’homosexualité, de la bisexualité ou de la transsexualité, ou les discours de haine, la discrimination ou la violence à l’égard de personnes, fondés sur leur orientation sexuelle ou leur identité de genre. Il devrait assurer une protection efficace des personnes lesbiennes, gay, bisexuelles et transgenre et garantir que tout acte de violence fondé sur l’orientation sexuelle ou l’identité de genre de la victime donne lieu à une enquête, à des poursuites et à des sanctions conformément au paragraphe 3 1 de l’article 53 du Code pénal. Il devrait prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir l’exercice, dans la pratique, des droits à la liberté d’expression et de réunion des personnes lesbiennes, gay, bisexuelles et transgenre et des défenseurs de leurs droits.

Violence intrafamiliale et châtiments corporels infligés aux enfants

Le Comité salue les mesures prises pour lutter contre la violence intrafamiliale, notamment l’incrimination de la violence intrafamiliale en juin 2012, mais il note avec préoccupation que les actes de violence intrafamiliale continuent d’être insuffisamment signalés, pour des raisons liées aux stéréotypes sexistes et au manque de diligence des agents des forces de l’ordre s’agissant d’enquêter sur de telles affaires, à l’insuffisance des mesures de protection des victimes, y compris des ordonnances de protection, et au nombre limité de refuges et de services d’appui financés par l’État. Le Comité note aussi avec préoccupation que les châtiments corporels, spécialement à la maison, continuent d’être acceptés et pratiqués comme méthode de discipline traditionnelle par les parents ou les gardiens (art. 2, 3, 6, 7, 24 et 26).

L ’ État partie devrait renforcer l ’ action qu ’ il mène pour prévenir et combattre toutes les formes de violence intrafamiliale en veillant à ce que les cadres légaux et politiques pertinents qui existent soient effectivement respectés, et notamment:

a) Encourager le signalement des actes de violence intrafamiliale, notamment informer les femmes de leurs droits et des recours juridiques qui leur permettent de bénéficier d ’ une protection;

b) Veiller à ce que la législation visant à lutter contre la violence intrafamiliale soit effectivement appliquée et à ce que les victimes aient accès à des recours utiles et à des moyens de protection, notamment à des refuges et des services d ’ appui disponibles en nombre suffisant dans l ’ ensemble du pays;

c) Garantir que les responsables des forces de l ’ ordre, ainsi que les personnels de santé et les travailleurs sociaux continuent de recevoir la formation voulue pour traiter les affaires de violence intrafamiliale;

d) Poursuivre l ’ action menée pour sensibiliser largement l ’ ensemble de la population aux effets néfastes de la violence intrafamiliale;

e) Prendre des mesures concrètes, notamment des mesures législatives si nécessaire, pour mettre un terme aux châtiments corporels en toute circonstance, encourager le recours aux méthodes de discipline non violentes pour remplacer les châtiments corporels et mener des campagnes d ’ information pour mieux faire connaître les effets néfastes de ces châtiments.

Responsabilité pour les violations des droits de l’homme commises dans le passé

Le Comité est préoccupé parla lenteur des progrès dans les enquêtes sur les violations des droits de l’homme commises pendant ou immédiatement après le conflit armé de 2008, qui peuvent constituer des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité, dans l’identification des auteurs de ces violations et dans les poursuitescontre ceux-ci, notamment en ce qui concerne les cas de disparition forcée, les attaques aveugles et disproportionnées contre les populations civiles et d’autres personnes protégées, les cas de détention illégale, de tortures et de traitements inhumains et la destruction et l’appropriation de biens. (art. 2, 6, 7, 9, 14 et 16).

L ’ État partie devrait faire en sorte que toutes les allégations de disparition forcée, d ’ attaques aveugles et disproportionnées contre des populations civiles et d ’ autres personnes protégées, de détention illégale, de torture, de traitements inhumains, de destruction massive et d ’ appropriation de biens fassent l ’ objet d ’ enquêtes sérieuses, indépendantes et impartiales, que les auteurs relevant de la juridiction de l ’ État partie, en particulier les personnes occupant des postes de commandement, soient poursuivis et condamnés à des peines à la mesure de la gravité des actes commis et que des recours utiles, y compris une indemnisation, soient assurés aux victimes.

Le Comité a conscience des difficultés que l’État partie rencontre pour ce qui est d’assurer des recours aux victimes, mais il est préoccupé par les dizaines de milliers de plaintes déposées auprès du bureau du procureur au sujet de violations commises avant les élections de 2012, notamment des procès iniques, des actes de torture et des mauvais traitements et des expropriations illégales. Dans le même temps, tout en prenant acte de la nécessité de garantir le respect de la légalité et de combattre la corruption, d’assurer aux victimes de violations des droits de l’homme des recours utiles et de faire en sorte que les auteurs de violations des droits de l’homme et d’actes de corruption ne restent pas impunis, le Comité est préoccupé par le grand nombre d’enquêtes et d’accusations pénales mettant en cause de hautes personnalités politiques du précédent gouvernement et de l’actuelle opposition, qui peuvent donner à penser que le système juridique est utilisé à des fins de représailles politiques (art. 2, 7, 9, 14 et 17).

L’État partie devrait poursuivre les enquêtes sur les violations commises dans le passé tout en évitant, dans la mesure où ces violations sont antérieures aux élections de 2012, de donner à penser qu’il se livre à des représailles politiques. L’État partie devrait cependant faire tout ce qui est en son pouvoir pour assurer aux victimes de violations des recours utiles, conformément au paragraphe 3 de l’article 2 du Pacte.

Le Comité constate avec préoccupation que certaines enquêtes ne sont toujours pas achevées, notamment celles portant: a) sur l’usage excessif de la force par des membres de la force publique et/ou des agents pénitentiaires pendant les troubles survenus dans la prison no 5 de Tbilissi en mars 2006; b) sur les mauvais traitements infligés à des prisonniers à la prison de Gldani à Tbilissi, à la prison no 15 de Ksani, à la prison no 2 de Kutaisi, à la prison no 6 de Rustavi et à la prison no 4 de Zugdidi; et c) sur la dispersion violente de manifestations pacifiques le 7 novembre 2007, le 15 juin 2009 et le 3 janvier 2011 et sur les incidents qui se sont produits à Mereti (le 26 juin 2012) et à Karaleti (le 12 juillet 2012), au cours desquels des journalistes ont été physiquement et verbalement agressés.. Il note aussi avec préoccupation que les allégations de torture et de traitements inhumains ou dégradants sont souvent instruites au titre de l’article 333 du Code pénal (excès de pouvoir) et non pas au titre de l’article 1441 (torture) et 1443 (traitements inhumains ou dégradants) du Code pénal (art. 2, 6, 7, 9, 10 et 14).

L ’ État partie devrait aller de l ’ avant dans son intention de créer un organe indépendant et impartial chargé d ’ enquêter sur les allégations de mauvais traitements imputés à des policiers et à d ’ autres agents de la force publique, notamment des tortures et des traitements inhumains ou dégradants. Il devrait achever les enquêtes concernant de telles affaires sans retard excessif, poursuivre les responsables et leur imposer, s ’ ils sont reconnus coupables, des peines à la mesure de la gravité de leurs actes, et assurer aux victimes des recours utiles. L ’ État partie devrait faire en sorte que les cas de torture et de mauvais traitements fassent l ’ objet de poursuites au titre des articles du Code pénal pertinents et cesser d ’ utiliser pour qualifier ces infractions des dispositions qui prévoient des peines plus légères. Il devrait en outre former des experts de la réadaptation psychologique des victimes de la torture.

Détention administrative

Le Comité note avec préoccupation que l’actuel système de détention administrative prévoit la possibilité d’imposer jusqu’à quatre-vingt-dix jours d’emprisonnement aux auteurs d’infractions administratives, que les intéressés ne bénéficient pas de garanties suffisantes quant au respect du droit à une procédure équitable, notamment en ce qui concerne le droit à l’égalité des armes et qu’ils sont incarcérés dans des lieux de détention temporaire gérés par le Ministère de l’intérieur. Le Comité note que des modifications à apporter aux dispositions législatives appliquées actuellement, visant à corriger ces défauts et d’autres insuffisances, ont été récemment soumises au Parlement (art. 2, 7, 9, 10 et 14).

L ’ État partie devrait réformer d ’ urgence son système de détention administrative afin de le rendre pleinement conforme aux articles 9 et 14 du Pacte.

Procès avec jury

Le Comité note avec préoccupation que l’actuel système de procès avec jury n’offre pas des garanties suffisantes permettant à l’accusé et au public de comprendre le verdict prononcé par le jury et n’offre aucune possibilité de faire appel sur le fond d’un verdict de culpabilité, en violation des dispositions du Pacte (art. 14).

L ’ État partie devrait d ’ urgence aller de l ’ avant dans son intention de réformer l ’ actuel système de procès avec jury en vue de le rendre compatible avec les garanties d ’ une procédure équitable consacrées par l ’ article 14 du Pacte.

Système de négociation de plaidoyers et politique de tolérance zéroconcernant la drogue

Le Comité note avec inquiétude qu’en dépit de certaines améliorations, le taux d’acquittement dans les affaires pénales demeure faible. Il s’inquiète en outre de l’insuffisance des garanties juridiques offertes aux prévenus dans le cadre de l’actuel système de négociation de plaidoyers, en particulier des mauvais traitements et des pressions subis par des personnes pour qu’elles concluent des transactions en matière pénale, du manque de transparence dans la négociation de telles transactions entre le prévenu et le procureur et du rôle restreint que jouent le juge et la défense en la matière. Le Comité prend note de la criminalisation de la consommation de drogues dans le contexte de la politique de tolérance zéro suivie dans ce domaine et des allégations selon lesquelles le système de négociation de plaidoyers est utilisé pour extorquer de l’argent à ceux qui enfreignent la législation sur les stupéfiants. Il prend note en outre avec préoccupation des milliers de plaintes soumises au bureau du procureur à la suite des élections d’octobre 2012 par des personnes qui affirment avoir fait l’objet de pressions pour qu’elles acceptent des transactions en matière pénale − pratique qui pourrait être en rapport avec le faible taux d’acquittement. Le Comité note enfin que des projets de modifications législatives visant à réformer le système de négociation de plaidoyers et la politique de tolérance zéro en ce qui concerne la drogue ont été rédigés (art. 2, 7, 9, 10 et 14).

L ’ État partie devrait poursuivre ses efforts pour réformer l ’ actuel système de négociation de plaidoyers et la politique de tolérance zéro en ce qui concerne la drogue et s ’ occuper des cas passés de coercition exercée à l ’ égard de prévenus pour les amener à conclure des transactions en matière pénale. Il devrait, entre autres:

a) Offrir des garanties juridiques suffisantes aux prévenus dans le cadre du système de négociation de plaidoyers, en particulier contre le recours à des mauvais traitements et à la coercition pour les amener à conclure des transactions en matière pénale, conformément aux droits qui leur sont reconnus dans le Pacte;

b) Garantir la transparence des négociations menées dans le cadre du système de négociation de plaidoyers et élargir et renforcer le rôle du juge et de la défense dans ce processus;

c) Adopter une approche du problème de la consommation de drogues axée sur les droits de l ’ homme, en mettant l ’ accent sur les soins de santé et les services de soutien psychologique et de réadaptation voulus pour les consommateurs de drogues, notamment sur le traitement de la toxicomanie par des moyens tels que la thérapie de substitution aux opiacés et des programmes de réduction des effets nocifs.

Système de justice pour mineurs

Tout en prenant note des progrès accomplis dans la réforme du système de justice pour mineurs, notamment le lancement du Programme de déjudiciarisation et de médiation pour mineurs en novembre 2010, le Comité constate avec préoccupation que les jeunes délinquants ne sont encore pas pris en charge dans le cadre d’un système de justice pour mineurs distinct qui tienne compte de leur âge, de leurs besoins particuliers et de leur vulnérabilité (art. 14 et 24).

L ’ État partie devrait prendre des mesures pour créer des chambres pour mineurs confiées à des juges formés pour assurer aux jeunes délinquants un traitement adapté à leur âge, à leurs besoins particuliers et à leur vulnérabilité. Il devrait dispenser à tous les groupes professionnels intervenant dans le système de justice pour mineurs une formation aux normes internationales applicables et exécuter des programmes de réadaptation à long terme pour les jeunes délinquants en vue de faciliter leur réinsertion dans la société après leur remise en liberté.

Droit des personnes déplacées à l’intérieur du pays

Le Comitésalue les mesures prises par l’État partie pour faire face aux problèmes des personnes déplacées à l’intérieur du pays, notamment la fourniture de logements et l’adoption en février 2014 d’une nouvelle législation régissant le traitement de ces personnes, mais ilnote qu’il est nécessaire d’accorder une attention accrue aux moyens de subsistance de ces personnes dans le cadre des efforts visant à trouver une solution durable (art. 2, 12 et 26).

L’État partie devrait intensifier ses efforts pour améliorer la situation des personnes déplacées à l’intérieur du pays et mettre l’accent, non seulement sur des solutions d’hébergement durables, mais aussi sur l’intégration sur place et sur les possibilités pour ces personnes de s’assurer un revenu durable et d’autres moyens de subsistance dans les nouveaux lieux de réinstallation. Il devrait en outre faire en sorte que toutes les personnes déplacées exercent leur droit de décider librement et en connaissance de cause de regagner de leur propre gré leur foyer dans la sécurité et la dignité, de s’intégrer dans les lieux où elles se trouvent ou de se réinstaller ailleurs dans le pays.

Liberté de conscience et de conviction

Le Comité prend note de l’adoption, le 27 janvier 2014, du décret no 117 du Gouvernement géorgien sur la mise en œuvre de mesures relatives à l’indemnisation partielle des groupes religieux de Géorgie pour les préjudices subis sous le régime totalitaire soviétique, mais il constate avec préoccupation l’insuffisance des mesures prises pour restituer aux minorités religieuses leurs lieux de culte et d’autres biens connexes confisqués pendant l’ère soviétique. Il est en outre préoccupé par les cas d’intolérance religieuse, notamment de harcèlement et d’agression verbale et physique de personnes appartenant à des minorités religieuses, en particulier les Témoins de Jéhovah, les musulmans et les membres d’autres minorités religieuses non traditionnelles, ainsi que par les cas d’ingérences dans la pratique de leur culte et de vandalisme (art. 2, 7, 18 et 26).

L ’ État partie devrait garantir dans la pratique la liberté de religion et de conviction et la liberté de manifester une religion ou une conviction individuellement ou collectivement, tant en public qu ’ en privé, sous la forme d ’ un culte, d ’ une observance, d ’ une pratique ou d ’ un enseignement. Il devrait:

a) Condamner fermement tout acte de violence et tout discours de haine contre les minorités religieuses et lancer des campagnes de sensibilisation en vue de promouvoir le respect des droits de l ’ homme et la tolérance de la diversité;

b) Intensifier ses efforts pour faire en sorte que de telles infractions soient dûment qualifiées conformément au paragraphe 3 1 de l ’ article 53 du Code pénal et fassent l ’ objet d ’ enquêtes approfondies, que les auteurs soient poursuivis et, s ’ ils sont reconnus coupables, condamnés à des peines appropriées et que les victimes soient équitablement indemnisées;

c) Prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la restitution des lieux de culte et des biens connexes aux minorités religieuses et leur assurer une indemnisation équitable lorsque la restitution n ’ est pas possible.

Droits des minorités

Tout en prenant note desefforts que fournit l’État partie pour intégrer les minorités dans la vie politique et publique, le Comité demeure préoccupé par le fait que la méconnaissance de la langue géorgienne reste le principal obstacle à leur intégration et une raison expliquant leur marginalisation et leur faible représentation dans la vie politique. Il demeure également préoccupé par le fait que les autorités locales sont tenues de répondre par écrit en géorgien aux membres des minorités qui leur adressent des requêtes, même à ceux qui ne peuvent pas lire cette langue. L’utilisation obligatoire du géorgienest aussi susceptible d’empêcher les personnes appartenant à des minorités linguistiques d’assumer certaines fonctions officielles au niveau local. Le Comitéest également préoccupé par l’absence de programmes concrets d’intégration économique et sociale des Roms (art. 25 à 27).

L’État partie devrait renforcer ses programmes d’enseignement de la langue géorgienne aux minorités, promouvoir la représentation des minorités dans les organes politiques et publics à tous les niveaux et examiner la possibilité de les autoriser à utiliser les langues minoritaires dans leurs communications avec les autorités et l’ administration locales. Il  devrait en outre concevoir et mettre en œuvre les programmes et les stratégies voulus pour assurer l’intégration sociale et économique des Roms, notamment leur accès à l’emploi, aux soins de santé, à l’éducation et à la protection sociale sur un pied d’égalité avec les autres.

Diffusion d’une information concernant le Pacte et les protocoles facultatifs

L’État partie devrait diffuser largement le texte du Pacte, des deux Protocoles facultatifs se rapportant au Pacte, du quatrième rapport périodique, des réponses écrites à la liste de points à traiter établie par le Comité et des présentes observations finales auprès des autorités judiciaires, législatives et administratives, de la société civile et des organisations non gouvernementales présentes dans le pays, ainsi qu’auprès du grand public.

Conformément au paragraphe 5 de l’article 71 du Règlement intérieur du Comité, l’État partie devrait faire parvenir au Comité dans un délai d’un an, des renseignements sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations figurant aux paragraphes 13 et 14 ci‑dessus.

Le Comité demande à l’État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique, qui devra lui parvenir d’ici au 31 juillet 2019, des renseignements précis et à jour sur la suite qu’il aura donnée à toutes ses recommandations et sur l’application du Pacte dans son ensemble. Le Comité demande aussi à l’État partie de consulter largement la société civile et les organisations non gouvernementales présentes dans le pays lorsqu’il établira le prochain rapport périodique.