Nations Unies

CAT/C/EGY/5

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr. générale

27 décembre 2021

Français

Original : arabe

Anglais, arabe, espagnol et français seulement

Comité contre la torture

Cinquième rapport périodique soumis par l'Égypte en application de l’article 19 de la Convention, attendu en 2004 *

[Date de réception : 13 septembre 2021]

Introduction

1.Fermement déterminée à collaborer avec les mécanismes internationaux relatifs aux droits de l’homme et à respecter ses obligations conventionnelles, l’Égypte soumet le présent rapport, qui couvre la période allant de la date de présentation de son précédent rapport à la fin de 2019, en application de l’article 19 (par. 1) de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

2.Ce document a été élaboré à l’issue d’un large processus de consultation, auquel ont pris part les différents organismes publics concernés. Les autorités exécutives, législatives et judiciaires ont également contribué à renforcer l’incrimination de la torture et des mauvais traitements en participant à bon nombre d’activités menées par des organisations non gouvernementales, telles que le symposium intitulé « Vers une réforme de la législation pénale en Égypte » (6 et 7 avril 2019), organisé par l’Organisation arabe des droits de l’homme, et la conférence internationale portant sur le thème « Législation et mécanismes de lutte contre la torture dans les États arabes » (8 et 9 octobre 2019), qui s’est tenue sous l’égide du Conseil national des droits de l’homme et des organisations de la société civile partenaires. Le présent rapport rend compte des évolutions législatives, juridiques et administratives liées à l’application de la Convention qui ont eu lieu depuis que l’Égypte a soumis son quatrième rapport périodique, en 2001, et plus particulièrement depuis l’adoption de la Constitution en vigueur. Les mesures décrites dans les précédents rapports, que celui-ci vient compléter, ne sont pas présentées de nouveau.

3.L’Égypte a été l’un des premiers pays à ratifier la Convention. Elle a également adhéré en 1984 à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples qui interdit, dans son article 5, la torture sous toutes ses formes, ainsi que les peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. En avril 2019, elle a adhéré à la Charte arabe des droits de l’homme qui interdit, dans son article 8, de soumettre quiconque à des tortures physiques ou mentales ou à un traitement cruel, humiliant, dégradant ou inhumain et fait obligation à chaque État partie de protéger tout individu relevant de sa juridiction contre de telles pratiques, de prendre des mesures efficaces visant à les prévenir, de considérer ces actes, ou la participation à ces actes, comme des crimes imprescriptibles punis par la loi et de garantir, dans son système juridique, réparation aux victimes d’actes de torture et le droit à la réhabilitation et à une indemnisation.

4.Située dans un environnement régional très instable, l’Égypte a été secouée par de nombreux événements internes depuis 2011. Le 25 janvier 2011, elle a été le théâtre d’un vaste soulèvement populaire, au cours duquel les Égyptiens ont réclamé la chute du régime politique et la protection de leurs droits et libertés fondamentaux, avec pour mots d’ordre la liberté, une vie décente et la justice sociale. Profitant de cette situation, de nombreux éléments terroristes s’en sont pris aux prisons, aux tribunaux et à de nombreuses institutions, détruisant et brûlant tout sur leur passage, notamment les dossiers et documents qui s’y trouvaient. Il s’en est ensuivi une succession d’événements et de changements politiques qui ont abouti à l’élection, en juin 2012, d’un Président de la République issu du mouvement des Frères musulmans, avec 51,7 % de voix favorables. Toutefois, le peuple égyptien n’a pas apprécié les politiques autoritaires du Président, qui portaient atteinte à l’État de droit et s’éloignaient des objectifs de la révolution. Le Président a ainsi accaparé le pouvoir avec son mouvement et fait une déclaration constitutionnelle unilatérale dans le but de légitimer sa décision de contrôler l’appareil judiciaire, après avoir porté atteinte à l’indépendance de la justice en évinçant le Procureur général et en s’abstenant d’appliquer les décisions judiciaires exécutoires contraires aux intérêts politiques de son régime. Ses partisans ont assiégé la Haute Cour constitutionnelle afin de l’empêcher d’exercer ses fonctions. De plus, le Président et son parti ont adopté un discours politique incitant à la haine et à la violence entre citoyens et encourageant la discrimination fondée sur l’affiliation politique et l’appartenance religieuse. Le Président a également créé une commission chargée d’élaborer une constitution, composée exclusivement de partisans de son mouvement politique fondé sur une base religieuse. Endépit d’une décision de justice invalidant la formation de cette commission pour violation des règles démocratiques, le Président a promulgué le 25 décembre 2012 une Constitution promouvant l’exclusion et portant atteinte de manière flagrante au pouvoir législatif constitutionnel, avant de limoger plusieurs magistrats de la Haute Cour constitutionnelle.

5.Lorsque le peuple s’est rendu compte que le Président de la République s’était écarté des objectifs de la révolution qu’il avait promis de réaliser et qu’il bafouait l’État de droit, un mouvement pacifique de protestation populaire a débuté, appelant à l’organisation d’élections présidentielles anticipées, mais les revendications populaires ont été rejetées par le Président et ses partisans, qui ont répondu à ces manifestations par la violence et l’intimidation. Face à ce rejet, près de 30 millions d’Égyptiens sont descendus dans la rue le 30 juin 2013 afin de renverser le régime en place et remettre le processus révolutionnaire sur la bonne voie. Lesforces nationales ont convenu d’une Feuille de route destinée à reconstruire les institutions constitutionnelles, à poser les fondements d’un système démocratique et à remédier aux carences de la phase précédente. Dans ce cadre, un collectif appelé Comité des 50, composé de membres représentant toutes les catégories de la société égyptienne, a été formé et chargé de réviser la Constitution. Il a élaboré un projet de révision de la Constitution qui a été soumis à un référendum et adopté par 98,1 % des votants.

6.La Constitution a été adoptée le 18 janvier 2014 et des élections présidentielles ont ensuite été organisées mi-mai 2014, conformément au deuxième objectif de la Feuille de route. Ces élections ont abouti à la victoire du Président actuel, élu à 96,91 % des voix. Fin2015, le dernier objectif a été concrétisé par l’élection des membres de la Chambre des représentants. Les élections présidentielles et législatives ont eu lieu en présence d’observateurs issus de nombreuses organisations de la société civile, de l’Union africaine et d’un certain nombre d’organisations régionales et internationales, qui ont unanimement considéré que le scrutin était conforme aux critères de transparence, d’impartialité et d’intégrité. Le 30juin 2013 marque le début de la concrétisation des aspirations du peuple égyptien à construire les fondations institutionnelles d’une société démocratique respectant les droits de l’homme et les libertés fondamentales. Le Président actuel a été réélu en avril 2018, avec 97,08% des voix.

7.La Constitution pose de nombreux principes qui garantissent le respect de la dignité humaine et interdisent la torture sous toutes ses formes. Elle dispose à cet égard que tout être humain a droit à la dignité, qu’il est interdit d’y porter atteinte, que l’État s’engage à la respecter et à la protéger (art.51) et que la torture sous toutes ses formes est un crime imprescriptible (art.52). Elle dispose également que toute personne arrêtée, détenue ou privée de liberté, doit être traitée d’une manière qui préserve sa dignité et ne peut être torturée, intimidée, contrainte, ni atteinte physiquement ou moralement. La détention ou l’emprisonnement ne peuvent avoir lieu qu’en des lieux conçus à cet effet, décents du point de vue de la dignité humaine et de la santé. La violation de ces dispositions est sanctionnée par la loi. Tout détenu a le droit de garder le silence. Tout propos dont il s’avère qu’il a été obtenu sous la menace ou dans l’une des conditions précitées est nul et non avenu (art.55).

8.L’article151 de la Constitution impose aux autorités législatives, judiciaires et exécutives le respect des dispositions des instruments internationaux ratifiés par l’Égypte, au même titre que celui des lois nationales. Il en découle que toute personne lésée du fait d’un manquement à ces textes peut saisir la justice. La Constitution actuelle va encore plus loin que les précédentes, dans la mesure où son article93 confère un statut particulier aux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme ratifiés, auxquels elle reconnaît force de loi. Par conséquent, les droits et libertés énoncés dans ces instruments bénéficient de la même protection que les dispositions constitutionnelles. Selon l’article121 de la Constitution, les lois relatives aux droits et libertés énoncés par la Constitution ou complétant ses dispositions doivent être approuvées à une majorité des deux tiers des membres de la Chambre des représentants. Par conséquent, toute partie qui y a intérêt peut introduire devant la Haute Cour constitutionnelle un recours en inconstitutionnalité contre toute disposition législative contraire.

9.Au cours de la période considérée, plusieurs textes législatifs ont été adoptés, reflétant la détermination de l’État à respecter ses obligations internationales en matière de droits de l’homme et interdisant la torture sous toutes ses formes, notamment la loi instituant le Conseil national des droits de l’homme, la loi sur la lutte antiterroriste et la loi sur les droits des personnes handicapées. Des modifications ont également été apportées à la législation existante, notamment le Code pénal, le Code de procédure pénale, la loi régissant les établissements pénitentiaires, la loi relative à l’état d’urgence, le Code pénal militaire, la loi sur les forces de police et le Code de l’enfance, comme expliqué de manière détaillée dans le présent rapport.

10.La première partie du présent rapport décrit les mesures législatives, judiciaires et administratives prises afin de donner effet aux dispositions des articles1 à 16 de la Convention, en suivant l’ordre desdits articles. Ces mesures ont été étayées par des données statistiques postérieures à 2014, eu égard aux événements qu’a connus l’Égypte avant cette date. Ladeuxième partie comporte des renseignements complémentaires et les réponses aux questions et recommandations formulées par le Comité à l’issue de l’examen du dernier rapport périodique de l’Égypte, ainsi que des renvois aux informations et éclaircissements déjà fournis dans la première partie. Le présent rapport a été établi conformément aux directives du Comité en matière d’établissement des rapports périodiques que les États parties doivent présenter en application de l’article19 (par.1) de la Convention et du paragraphe16 de la résolution A/RES/68/268 du 9avril 2014 de l’Assemblée générale des NationsUnies.

I.Informations relatives à la mise en œuvre des articles du Pacte

Article premierDéfinition de la torture

11.L’Égypte tient compte des observations générales du Comité relatives à cet article, ainsi que des recommandations relatives à l’harmonisation de la définition de la torture figurant dans la législation nationale égyptienne avec celle de la Convention. À cet égard, elle tient à préciser ce qui suit :

1.La législation pénale égyptienne se fonde sur une approche bien établie en la matière, à savoir la graduation et la proportionnalité des sanctions aux incriminations, via les différentes qualifications des infractions et des peines correspondantes. Elleincrimine de multiples actes qui affectent un seul droit en imposant différentes sanctions à chacun de ces actes, afin qu’elles soient à la mesure de la gravité de chaque atteinte à ce droit protégé. Lamise en jeu de la responsabilité pénale dans le cadre de l’administration de la justice implique en effet de proportionner les peines à la gravité des infractions. Dans le cadre de la mise en œuvre des dispositions du présent article, plusieurs États parties à la Convention, ayant différents systèmes juridiques, ont adopté une législation fondée sur cette approche. Toutes les formes de torture mentionnées à l’article premier de la Convention figurent dans différentes parties duCode pénal.

2.Il ressort clairement de la définition de l’article premier de la Convention que les éléments constitutifs d’un acte de torture sont au nombre de deux : un premier élément matériel, qui inclut l’acte de torture, son résultat et le lien de causalité entre eux. La notion d’acte s’entend de « tout acte », de quelque type ou nature que ce soit, qui occasionne un préjudice physique ou moral ou les deux à la fois, tandis que le résultat est « la douleur ou les souffrances », qui doivent être aigus comme l’exige la Convention. Au sens de l’infraction, la douleur ou les souffrances, à moins qu’elles ne soient particulièrement intenses, ne peuvent être qualifiées de torture, telle que définie par l’article premier de la Convention, bien qu’elles puissent être considérées comme l’une des formes de traitements inhumains interdits par l’article16 (par.1).

3.Le deuxième élément est l’élément moral. L’article premier de la Convention indique qu’il prend la forme de l’intention criminelle, fondée sur la connaissance et la volonté, via les termes « intentionnellement infligée ». Outre cette intention criminelle générale (dolgénéral), le texte énonce une intention criminelle spéciale (dol spécial). L’article 5 énumère cinq formes d’actes de torture, classés en fonction des objectifs poursuivis : 1.latorture aux fins d’obtenir des renseignements ou des aveux ; 2.latorture destinée à punir une personne d’un acte qu’elle ou une tierce personne aurait commis ou serait soupçonnée d’avoir commis ; 3.la torture visant à intimider une personne ; 4.la torture en vue de faire pression sur une personne ; 5.la torture fondée sur la discrimination.

4.Ces objectifs peuvent être considérés sous deux aspects, le premier étant lié aux motifs du recours à la torture : dans ce cas, lesdits objectifs n’ont aucun effet sur la qualification juridique et peuvent être pris en compte lors de l’évaluation des sanctions. Le deuxième aspect des objectifs du recours à la torture est l’intention criminelle spéciale, la volonté de l’auteur étant alors orientée vers la réalisation de celle-ci : dans ce dernier cas, ils font l’objet d’une évaluation juridique. Ces objectifs ont été considérés comme des intentions spéciales afin d’élargir la portée de la protection. Dans cette optique, il convient de noter que l’article énumère quatre formes d’actes de torture : 1.la torture aux fins d’obtenir des renseignements ou des aveux ; 2.la torture visant à intimider une personne ; 3.la torture en vue de punir une personne d’un acte qu’elle ou une tierce personne aurait commis ou serait soupçonnée d’avoir commis ; 4.la torture fondée sur la discrimination.

12.L’Égypte affirme que sa législation nationale incrimine toutes les formes de pratiques qualifiées de torture précitées (art. 126, 129, 375bis et 375bisa) du Code pénal) infligées à une personne aux fins d’obtenir des renseignements ou des aveux, de la punir d’un acte qu’elle aurait commis, de l’intimider ou de faire pression sur elle ou pour tout autre motif fondé sur la discrimination. Elle souligne également que des pratiques qui ne sont pas considérées, en tant que telles, comme des actes de torture au sens de l’article premier, sont incriminées par certains textes législatifs et interdits par la loi égyptienne. Par exemple, le titreVI du livreII du Code pénal, intitulé « Contrainte et mauvais traitements infligés à des personnes par les fonctionnaires », érige en infractions pénales plusieurs pratiques exercées par des agents de la fonction publique et constitutives de violations des droits de l’homme, notamment la torture aux fins d’obtenir des aveux (art.126). L’élément matériel de ces infractions n’exige pas de l’auteur un certain comportement, car tout acte visant à porter atteinte à l’intégrité physique de la victime, avec établissement d’un lien de causalité, est qualifié de torture, même s’il ne présente pas une gravité particulière et que la douleur ou les souffrances infligées sont peu intenses ou n’ont pas laissé de traces sur le corps de la victime, alors que l’article premier de la Convention exige que la douleur ou les souffrances physiques soient intenses.

13.Selon l’article126, la torture infligée en vue d’obtenir un aveu peut prendre la forme d’un acte positif, telle qu’une atteinte à l’intégrité physique ou mentale d’une personne sous différentes formes ; ou d’un acte négatif d’omission, lorsque l’auteur a l’obligation légale ou conventionnelle d’empêcher la commission de telles atteintes et qu’il se rend intentionnellement complice de torture. La législation égyptienne est conforme à l’article1er de la Convention, en ce sens qu’elle considère cette situation comme une infraction intentionnelle, dont l’élément matériel est en lui-même constitutif de l’intention criminelle. Elle est également conforme à l’exigence relative à l’intention criminelle spéciale, c’est‑à‑dire la volonté de faire avouer à un accusé une infraction ou un fait matériel, quelles que soient les motivations ayant poussé l’auteur à commettre des actes de torture.

14.Afin de réprimer ces actes, la justice égyptienne n’exige pas l’obtention d’aveux de la part de la victime en vue de sanctionner l’auteur, les actes perpétrés contre la victime en vue de l’amener à faire des aveux étant réprimés en tant que tels. De même, la législation ne conditionne pas la sanction des actes de torture à l’existence de traces visibles sur le corps de la victime. En outre, il n’est pas nécessaire que l’auteur ait un mobile particulier afin de commettre un acte de torture, car la loi prévoit des sanctions contre tout fonctionnaire ou agent public qui torture délibérément un accusé en vue de lui extorquer des aveux, quel qu’en soit le mobile. Ainsi, en vue d’appliquer l’article126, il n’est pas exigé que l’agent public auteur d’un acte de torture visant à extorquer des aveux soit compétent en matière d’instruction ou de recherche de preuve, car il suffit qu’il soit, en vertu des pouvoirs conférés par sa fonction, en mesure de torturer un accusé afin de le forcer à faire des aveux au sujet d’un acte qu’il serait soupçonné d’avoir commis ou auquel il aurait participé, quels que soient les motifs qui l’animent.

15.Le troisième et le quatrième objectif poursuivis via des actes de torture, tels qu’évoqués à l’article premier, à savoir la torture infligée en vue d’intimider, de terroriser et de faire pression sur une personne, sont incriminés par les articles375bis et 375bisa) du Code pénal, qui répriment la torture et les autres formes d’atteintes susceptibles d’être commises dans le but de terroriser, d’intimider ou de causer un préjudice matériel ou moral, tant à la victime qu’à son conjoint ou à l’un de ses ascendants ou descendants ;d’obtenir un avantage de la victime ou de l’influencer en vue de la manipuler en l’amenant à accomplir ou à s’abstenir d’accomplir un acte, à faire obstacle à l’application des lois ou de la législation, à résister aux autorités ou à empêcher l’exécution des ordres et décisions judiciaires exécutoires et porter atteinte à la sécurité et à la tranquillité publiques ; de terroriser la victime en portant atteinte à sa sécurité, à sa tranquillité ou à sa sérénité, en mettant sa vie ou sa sécurité en danger et en portant atteinte à l’un quelconque de ses biens ou à ses intérêts, à sa liberté personnelle, à sa dignité, à sa réputation ou à son intégrité. Cesactes sont passibles d’une peine maximale de cinq ans d’emprisonnement. La peine est l’emprisonnement assorti de travaux forcés ou l’emprisonnement à temps si l’acte de torture est accompagné de coups et blessures ou d’administration de substances nocives ayant entraîné la mort. La sanction est la réclusion criminelle à perpétuité si l’acte a été commis avec préméditation, accompagnée d’un placement sous surveillance policière pendant une durée égale à celle de la peine, sans toutefois dépasser trois ans.

16.Le deuxième objectif poursuivi via un acte de torture, à savoir celui visant à punir la victime d’un acte qu’elle aurait commis ou serait soupçonnée d’avoir commis, ainsi que le cinquième, concernant la torture fondée sur la discrimination, sont abordés par l’article129 du Code pénal, au même titre que d’autres objectifs poursuivis par l’auteur d’un acte de torture. Cet article incrimine tout acte par lequel un fonctionnaire ou ses subordonnés font subir des actes de cruauté à une personne, en abusant de leur autorité, si l’honneur de la victime est atteint ou si une douleur physique en résulte. La formulation de cet article est suffisamment large pour couvrir toutes les formes d’abus que des fonctionnaires publics ou leurs subordonnés peuvent faire subir à des personnes, en abusant des pouvoirs conférés par leurs fonctions ou par les services qu’ils rendent au public. Les dispositions de cet article s’étendent également à tous les actes portant atteinte à l’intégrité physique des personnes, quelle que soit leur forme et la manière dont ils sont infligés, même s’ils ne laissent aucune trace sur le corps des victimes, ainsi qu’aux violences verbales ou autres propos portant atteinte à l’honneur et à la considération des personnes, que l’auteur ait l’intention de punir la victime ou que son acte soit motivé par la discrimination ou tout autre motif. Les délits visés à l’article ci-dessus sont passibles de peines correctionnelles.

17.À la lumière des articles24 et 25 du Code pénal, une condamnation pour torture entraîne la révocation définitive de la fonction publique de l’auteur de l’acte, ainsi que l’interdiction d’exercer toute autre fonction ou emploi public. Cette peine s’applique de plein droit en tant que mesure accessoire à la peine principale prononcée, même si le jugement ne la prévoit pas. La révocation est également appliquée à titre de sanction pénale accessoire, même lorsque la procédure disciplinaire engagée contre l’auteur aboutit à sa révocation ou s’il a fait l’objet de sanctions administratives plus clémentes. Elle s’applique également dans les cas où il y a eu un commencement d’exécution de l’infraction non mené à son terme. D’après l’article27 du Code pénal, la révocation est appliquée en tant que peine accessoire même lorsque la Cour use de son pouvoir discrétionnaire en vue de réduire la peine en tenant compte des circonstances de l’espèce.

18.Conformément aux dispositions de l’article1er qui exigent que l’auteur ou le commanditaire d’actes de torture soit un agent de la fonction publique, les articles126 et 129 du Code pénal disposent que la personne qui commet l’infraction ou ordonne de la commettre doit avoir le statut d’agent public. Outre ce qui précède et conformément aux règles générales du droit égyptien, est considéré complice d’une infraction quiconque incite à la commettre ou s’entend avec autrui pour la commettre ou aide son auteur à accomplir des activités de préparation, de facilitation ou d’accomplissement de celle-ci. Les complices sont passibles de la même peine que l’auteur principal.

19.Il convient de noter que selon les règles générales établies, l’action pénale obéit à une prescription décennale, qui commence à courir à compter de la date de commission d’une infraction. Toutefois, compte tenu de la gravité des actes de torture et des traitements inhumains incriminés par les articles117, 126 et 127 du Code pénal, l’article15 du Code de procédure pénale dispose que l’action pénale est imprescriptible en ce qui les concerne. Cesdispositions sont renforcées par celles de l’article52 de la Constitution selon lesquelles : « La torture sous toutes ses formes est imprescriptible ».

20.En conclusion, il convient de noter que les États parties interprètent l’article premier de la Convention en fonction de leur système juridique (latin ou anglo-saxon), indépendamment du sens que lui donne le Comité contre la torture dans ses observations générales, ce qui soulève des problèmes juridiques et pratiques quant à la façon la plus appropriée de le mettre en œuvre.

Article 2Mesures législatives, judiciaires et administratives visant à prévenir latorture

Paragraphe 1 : Mesures législatives, judiciaires et administratives visant à prévenir latorture

21.Le dispositif législatif, judiciaire et exécutif comporte de nombreuses lois, décisions, mesures et règles visant à empêcher la perpétration d’actes de torture ou autres formes de traitements inhumains. Ces divers instruments ont vocation à renforcerle contrôle des lieux de détention et des prisons, à garantir le droit des détenus et des personnes placées en détention provisoire d’avoir accès à un conseil, d’être examinées par un médecin, de bénéficier sans délai de soins de santé gratuits et de prendre contact avec leur famille et leurs avocats, et à faire en sorte que les cas de torture signalés aux autorités judiciaires compétentes fassent l’objet d’enquêtes diligentes, afin que les responsables soient poursuivis et punis et que les victimes bénéficient d’une juste réparation. Sont décrites ci-après les mesures prises récemment à cet égard, qui s’ajoutent à celles présentées dans les rapports précédents.

Mesures législatives

22.L’Égypte a accompli de grands progrès législatifs s’agissant de protéger les droits de l’homme en général et de lutter contre les pratiques attentatoires à ces droits, notamment la torture. La loi no145 de 2006 portant modification du Code de procédure pénale a introduit de nouvelles règles régissant la détention provisoire, qui soumettent son application à des conditions, la restreignant donc à certaines infractions seulement, et en fixent la durée maximale, qui varie en fonction de la nature de l’infraction. En effet, la durée de la détention provisoire ne peut dépasser, au stade de l’enquête préliminaire et au cours de toutes les étapes d’un procès pénal, le tiers de la durée maximale de la peine privative de liberté, soit six mois en cas de délit, dix-huit mois en cas de crime et deux ans si la peine envisageable est la réclusion à perpétuité ou la peine capitale. La loi exige que les ordonnances de placement en détention provisoire soient délivrées par des autorités d’un certain degré et précise les voies de recours possibles. Elle prévoit également des solutions alternatives visant à réduire le recours à la détention provisoire. En outre, le ministère public doit publier les verdicts de non-lieu ou d’abandon des poursuites au journal officiel, aux frais de l’État, afin d’innocenter définitivement les personnes ayant fait l’objet d’une détention provisoire, et veiller à ce qu’elles soient indemnisées du préjudice causé par cette mesure.

23.Il convient de noter que le parquet a compétence exclusive en matière d’investigation, de mise en mouvement de l’action publique et d’instruction des affaires pénales. Il bénéficie à cet égard des garanties prévues par la Constitution (art.189), en tant que partie intégrante de l’ordre judiciaire. Il est également chargé, en application de l’article25 du Code de procédure pénale, d’ouvrir une enquête dès l’instant où il reçoit une plainte. Selon les articles22 et 23 du même code, les officiers de police judiciaire sont placés, dans le cadre de l’exercice de leurs fonctions, sous la direction et le contrôle du Procureur général. Cesdispositions sont confirmées par les directives judiciaires régissant le fonctionnement du parquet, dont l’article premier dispose ce qui suit : « Le parquet fait partie de l’autorité judiciaire et veille, au nom de la société et dans l’intérêt général, à l’application de la loi ». Ces directives insistent sur l’obligation d’impartialité et d’indépendance des membres du parquet, en soulignant que leur mission suprême est de permettre à la justice d’être rendue en faisant apparaître la vérité. Selon l’article147 des directives précitées : « Les enquêteurs doivent considérer que leur rôle est de révéler la vérité, par tous les moyens disponibles, et que la manifestation de la vérité et la réalisation de la justice sont leurobjectif ultime». L’article148 prévoit ce qui suit : « Tout membre du parquet endosse la fonction de magistrat lorsqu’il procède à des investigations et doit faire preuve d’impartialité dans la recherche de la vérité, que celle-ci aboutisse à la condamnation de l’accusé ou au rejet des accusations portées contre lui ». Le fait que les membres du parquet soient placés à la tête de la police judiciaire et qu’ils aient le droit d’en contrôler les activités constitue une garantie solide de protection des libertés publiques et l’une des mesures législatives les plus importantes visant à interdire et à prévenir les actes de torture et autres formes de traitements inhumains.

24.Compte tenu des graves attaques terroristes subies par l’Égypte, de la complexité des enquêtes judiciaires dont elles font l’objet, du nombre élevé de suspects impliqués et de leurs connexions avec d’autres entités internes et externes, la loi no83 de 2013 portant modification du Code de procédure pénale a été promulguée afin de permettre à la Cour de cassation et aux tribunaux chargés de ces affaires − et non au parquet − d’ordonner la détention préventive des accusés précédemment condamnés à mort ou à l’emprisonnement à perpétuité, et ce, pendant une durée de quarante-cinq jours renouvelable, indépendamment des durées précitées. Il s’agit dans ce cas d’une détention avant jugement, sachant que le procès peut être long dans ce type d’affaires pénales,le temps que soient examinés tous les éléments de preuve présentés contre les accusés et que soient entendus la défense puis les témoins à charge et à décharge, qui sont plus de 800 dans certaines affaires.

25.En ce qui concerne le droit à la défense et sauf en cas de flagrant délit ou lorsqu’il existe des motifs sérieux de croire que des preuves pourraient être perdues, le juge d’instruction ne peut interroger un suspect ou le confronter à d’autres suspects avant que son avocat, s’il en a un, ait été invité à assister à l’interrogatoire ou à la confrontation. S’il n’a pas d’avocat, le juge d’instruction doit lui en désigner un d’office et l’autoriser à prendre connaissance des faits de la cause la veille de l’interrogatoire et, en aucun cas, l’accusé ne doit être séparé de son conseil au cours de cette procédure (art.124 et 125 du Code de procédure pénale). Ce droit constitutionnel à la défense garanti à l’accusé ne fait l’objet d’aucune dérogation car, en règle générale, l’interrogatoire mené par les autorités compétentes est nul s’il est conduit sans l’assistance d’un avocat. Les éléments de preuve recueillis lors de cet interrogatoire sont également nuls et ne peuvent être invoqués en vue de condamner l’accusé, comme confirmé par la Cour de cassation.

26.En ce qui concerne les droits des détenus, la loi no106 de 2015 modifiant la loi no396 de 1956 régissant les établissements pénitentiaires fait obligation à l’administration pénitentiaire d’informer les détenus de leurs droits et obligations dès leur admission en prison, ainsi que des actes interdits et des sanctions encourues en cas de violation des lois et règlements. Elle impose également aux établissements publics et universitaires de santé de soigner les détenus malades et accorde à tout détenu soumis à l’obligation de travailler le droit d’en être dispensé pour des raisons médicales. Aux termes de cette loi, les prévenus placés en détention provisoire doivent être hébergés dans des locaux séparés de ceux abritant les condamnés et autorisés à séjourner dans une cellule meublée, dans la mesure où les locaux de détention le permettent. La loi accorde en outre à toute personne condamnée le droit d’envoyer et de recevoir du courrier et des appels téléphoniques, ainsi que celui de bénéficier de visites de ses proches deux fois par mois.

27.L’article54 de la Constitution conforte ce qui précède en disposant ce qui suit : « Laliberté personnelle est un droit naturel inviolable. Sauf en cas de flagrant délit, nul ne peut être arrêté, fouillé, détenu, ou privé de liberté qu’en vertu d’une décision de justice dûment motivée, rendue sur la base d’une enquête. Toute personne dont la liberté est restreinte doit être informée sans délai des motifs de cette mesure, être avertie par écrit de ses droits, autorisée à contacter ses proches et son avocat immédiatement et être présentée aux autorités chargées des investigations dans les vingt-quatre heures qui suivent la restriction de liberté. L’interrogatoire ne peut commencer qu’en présence d’un avocat mandaté et, à défaut, d’un avocat commis d’office. Il convient de fournir l’aide nécessaire aux personnes handicapées, conformément aux procédures prévues par la loi. Toute personne dont la liberté est restreinte, de même qu’une personne tierce, a le droit de présenter un recours auprès des tribunaux, qui se prononcent dans la semaine suivante. À défaut et au-delà de ce délai, tout détenu est immédiatement relâché. La loi détermine les conditions de la détention préventive, sa durée et ses motifs, ainsi que les cas donnant droit à une indemnisation de la part de l’État en compensation d’une détention provisoire ou de l’exécution d’une peine ayant fait l’objet d’une annulation par un jugement définitif. En tout état de cause, il est interdit de juger un prévenu accusé d’une infraction susceptible de l’exposer à un emprisonnement en l’absence d’un avocat mandaté ou commis d’office ». L’article96 dispose ce qui suit : « Toute personne accusée est présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie au cours d’un procès équitable où toutes les garanties nécessaires à sa défense lui auront été assurées ... ». En outre, selon l’article98 : « Le droit de se défendre en justice soi‑même ou par procuration est garanti. L’indépendance du Barreau et la protection de ses membres constituent des garanties des droits de la défense. La loi garantit aux personnes financièrement démunies les moyens d’ester en justice et de défendre leurs droits ». Selon l’article198 de la Constitution, les avocats bénéficient de garanties et de la protection nécessaire à l’exercice de leur fonction. Une formation à l’application de ces principes constitutionnels et une formation destinée à mieux faire connaître les obligations internationales ont été organisées à l’intention de tous les membres du parquet et de la police, en collaboration avec les organismes internationaux compétents, tels que l’Office des NationsUnies contre la drogue et le crime (ONUDC), le Haut‑Commissariat aux droits de l’homme (HCDH) et l’Institut international de Syracuse pour la justice pénale et les droits de l’homme.

28.Selon la loi sur la lutte antiterroriste, les droits protégés et garantis par la Constitution et la loi restent applicables sans restriction et le Code de procédure pénale constitue la loi commune régissant les procédures pénales en cas de mise en accusation pour acte terroriste. Certaines de ces procédures sont prévues par la loi sur la lutte anti-terroriste, notamment par son article44, qui accorde à titre gratuit aux personnes accusées d’actes terroristes le droit d’interjeter appel de la décision de placement en détention provisoire, ou de sa prolongation, devant la juridiction compétente. L’article45 de la même loi interdit de fouiller une personne accusée d’acte terroriste sans décision de justice dûment motivée. L’article46 du même texte interdit de surveiller et d’enregistrer les conversations et les messages, d’enregistrer ou de prendre des photos des lieux privés ou de les diffuser sur les réseaux de communication et d’information ou sur les sites Web sans un mandat de justice dûment motivé, délivré conformément aux procédures établies à cette fin.

29.Afin d’établir un juste équilibre entre la lutte contre la menace terroriste et la sauvegarde des droits et libertés, les pouvoirs conférés aux autorités chargées de l’application des lois ne peuvent s’exercer que dans les cas où de telles infractions sont commises et dans le respect de règles de procédure spécifiques préservant le cadre de la légalité des procédures et garantissant la protection des droits et libertés publics. Les procédures relatives aux droits et libertés sont soumises au contrôle et au suivi du pouvoir judiciaire, qui bénéficie de pouvoirs spéciaux afin de mener à bien sa mission, dans le cadre des règles spécifiques prévues par les articles40, 41 et 42 de la loi sur la lutte antiterroriste. Ainsi, la loi accorde aux autorités chargées de recueillir des éléments de preuve le droit de placer en détention provisoire des suspects impliqués dans des actes terroristes pendant une durée pouvant aller jusqu’à quatorze jours, renouvelable une fois, sous la surveillance et le contrôle du ministère public, sur la base d’une décision judiciaire motivée et conformément à un certain nombre de règles, parmi lesquelles la nécessité d’informer toute personne placée en détention des motifs de son arrestation, de son droit de communiquer avec ses proches et de la possibilité d’avoir accès à un avocat. Toutes les déclarations de tels suspects ont en outre vocation à être consignées dans un procès-verbal dressé à cet effet.

30.Le Conseil national des droits de l’homme a été créé par la loi no94 de 2003 en tant que mécanisme national indépendant chargé de promouvoir, de développer et de protéger les droits de l’homme et les libertés publiques conformément à la Constitution et aux conventions internationales ratifiées par l’Égypte. Il est également chargé d’examiner les allégations de violations des droits de l’homme et de formuler des recommandations aux autorités compétentes. En outre, il reçoit et examine les plaintes et transmet celles qu’il juge fondées aux instances compétentes et en assure le suivi, en collaborant avec les autorités concernées, en les informant des procédures juridiques prescrites et en les aidant à les engager ou bien à régler et à résoudre leur différend avec les organismes intéressés. Le Conseil assure également le suivi de la mise en œuvre des obligations internationales du pays en matière de droits de l’homme et soumet aux autorités compétentes ses propositions, observations et recommandations. Le Conseil a également pour mission de diffuser et de promouvoir la culture des droits de l’homme parmi les citoyens, en collaboration avec les instances chargées des questions relatives à l’éducation, à l’information et à la culture, ainsi que de contribuer à l’élaboration des programmes d’éducation aux droits de l’homme et de produire des rapports sur la situation et l’évolution des droits de l’homme.

31.Ce texte a été modifié par la loi no197 de 2017 afin de se conformer aux dispositions de l’article214 de la Constitution et aux Principes de Paris relatifs aux institutions nationales des droits de l’homme et donner suite aux propositions et recommandations du Conseil national des droits de l’homme. Les modifications apportées garantissent l’indépendance du Conseil, fixent sa composition, son mode de fonctionnement et ses attributions et lui accordent une autonomie financière, ainsi que le droit de visiter les prisons et la plupart des lieux de détention et des établissements de soins et de rééducation, de s’entretenir avec les prisonniers et les détenus en vue de s’assurer qu’ils sont bien traités et qu’ils jouissent pleinement de leurs droits. Le Conseil est également habilité à informer le parquet de toute atteinte à la liberté personnelle ou à la vie privée ou à d’autres droits et libertés publics garantis par la Constitution et les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme ratifiés par l’Égypte.

32.Outre ce qui précède, plusieurs modifications législatives ont été opérées au cours de la période considérée afin de renforcer la protection des droits de l’homme à tous les niveaux du système pénal et de lutter contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, parmi lesquelles les suivantes :

La loi no 152 de 2001 abolissant la flagellation, qui était un châtiment corporel auparavant appliqué dans les prisons ;

La loi no 95 de 2003 portant abolition des travaux forcés là où elle était prévue par le Code pénal ou toute autre loi ou disposition pénale, via le remplacement de la peine des « travaux forcés à perpétuité » par la « réclusion à perpétuité » et celui des « travaux forcés à temps » par la « réclusion criminelle » ;

La loi no6 de 2009 modifiant certains articles de la loi régissant les établissements pénitentiaires, en accordant aux femmes détenues enceintes le droit de bénéficier d’un traitement spécifique en matière de nutrition, d’emploi et de sommeil dès que la grossesse est confirmée médicalement et jusqu’à quarante jours après l’accouchement ;

La loi no 71 de 2009 relative au traitement des patients psychiatriques et aux procédures pénales applicables aux prévenus atteints de troubles mentaux et psychiques, afin de prévenir toute forme de torture ;

La loi no 74 de 2007 portant modification de certaines dispositions du Code de procédure pénale, qui autorise les tribunaux à prononcer des ordonnances pénales comme alternative aux peines privatives de liberté, dans le cadre d’un système de justice réparatrice fondé sur le recours à la médiation concernant certains types d’infractions et le versement par l’auteur des faits d’une contrepartie financière en réparation du préjudice causé, ainsi que la prise en charge par le trésor public des honoraires des avocats engagés par les organes chargés de l’enquête afin d’assister la personne mise en cause dans le cas où elle n’aurait pas choisi d’avocat ;

La loi no 94 de 2014 portant modification de la loi régissant les établissements pénitentiaires, qui accorde à toute personne condamnée à une peine d’emprisonnement allant jusqu’à six mois le droit de solliciter, en tant que peine de substitution à l’incarcération, un emploi en dehors de la prison, conformément aux dispositions prévues par le Code de procédure pénale, sauf si le jugement prévoit une privation de ce droit ;

La loi no6 de 2018 modifiant la loi relative aux établissements pénitentiaires, qui prévoit la possibilité de mise en liberté conditionnelle d’une personne faisant l’objet d’une condamnation définitive à une peine privative de liberté, si elle a purgé la moitié de sa peine et que son comportement durant la détention laisse légitimement présumer une amélioration de sa conduite.

Mesures judiciaires

33.La nature de la mission juridictionnelle et l’organisation de la justice, ainsi que les garanties et immunités accordées aux magistrats afin qu’ils puissent s’acquitter de leurs fonctions sans crainte, ni influence ou ingérence, ont été examinées dans les rapports précédents. Les compétences du parquet, en tant que partie intégrante du pouvoir judiciaire chargée de superviser, contrôler et inspecter les prisons, de prendre les mesures requises en cas de violations constatées lors des inspections menées par ses membres, ainsi que de recevoir les plaintes des prisonniers et d’examiner tous les dossiers et registres pénitentiaires, ont également été passées en revue. Entre 2011 et 2019, le parquet a effectué 266visites d’inspection.

Mesures administratives

34.Dans les rapports précédents, il a été fait mention de la mise en place, au sein de chaque ministère et organisme gouvernemental, d’une unité des droits de l’homme composée d’un certain nombre de cadres qualifiés et formés, chargée de recevoir et de traiter les plaintes et d’y répondre, en veillant à statuer avec sérieux et célérité, ainsi que de superviser l’organisation et le déploiement de sessions de formation visant à renforcer les capacités du personnel, à diffuser les valeurs d’égalité et de non-discrimination et à promouvoir les principes d’intégrité et de transparence.

35.Le Haut Comité permanent des droits de l’homme a été créé par le décret no2396 de 2018 du Président du Conseil des ministres. Il s’agit d’une instance présidée par le Ministre des affaires étrangères et composée de représentants des ministères, des parties concernées et des conseils nationaux dédiés aux femmes, à l’enfance, à la maternité et aux personnes handicapées. Le Haut Comité est chargé d’élaborer une stratégie nationale des droits de l’homme et des plans d’action permettant sa mise en œuvre, d’assurer le suivi des obligations qui incombent à l’Égypte au titre des instruments internationaux pertinents auxquels elle est partie et de proposer l’adoption des mesures et dispositions législatives nécessaires à cet effet. Il est également chargé de procéder au suivi et aux modalités de règlement des questions relatives aux droits de l’homme en Égypte et de rédiger les réponses aux communications émanant des titulaires de mandat au titre des procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme et autres mécanismes similaires relevant des organisations régionales auxquelles l’Égypte est partie. En outre, le Haut Comité est chargé d’élaborer les politiques et programmes visant à sensibiliser et à former les personnes chargées de l’application des lois conformément aux obligations internationales du pays, ainsi qu’à renforcer leurs capacités. Il veille en outre à collaborer avec les organes compétents de l’ONU, ainsi qu’avec les organisations gouvernementales concernées, afin de s’inspirer des expériences internationales et renforcer les efforts gouvernementaux visant à instaurer un système institutionnel national de protection des droits de l’homme.

36.De nombreux organismes indépendants procèdent à des visites auprès des établissement pénitentiaires afin de s’assurer que les droits des prisonniers sont respectés et que ces personnes ne sont soumises ni à la torture, ni à aucune autre forme de mauvais traitements. Ces visites sont organisées sans préavis par la Commission des droits de l’homme de la Chambre des représentants, le Conseil national des droits de l’homme, le Conseil national de la femme et le Conseil national de l’enfance et de la maternité, ainsi que par des représentants d’organisations non gouvernementales. Entre 2010 et 2019, 60visites ont ainsi été effectuées auprès des établissements pénitentiaires.

37.Dans les centres sociaux spécialisés destinés aux personnes âgées de moins de 18ans, le règlement intérieur des établissements pénitentiaires destinés à l’accueil des mineurs est applicable et impose la présence d’un travailleur social vingt-quatre heures sur vingt-quatre en vue d’assurer la prise en charge des mineurs, ainsi que le suivi de leur situation et le signalement de tout abus aux autorités concernées. Un dispositif de surveillance visuelle est en outre installé afin de prévenir tout acte répréhensible et sanctionner le ou les auteurs, le cas échéant.

Paragraphe 2 : Circonstances exceptionnelles et état d’exception

38.Les circonstances exceptionnelles susceptibles de menacer l’ordre public, la sécurité publique ou la sûreté nationale peuvent justifier la proclamation de l’état d’urgence en vue d’écarter rapidement la menace, en conférant aux autorités chargées de l’application de la loi des pouvoirs spécifiques leur permettant d’adopter les mesures nécessaires au maintien de l’ordre, à la protection des biens publics et privés et à la préservation de la vie des civils.

39.La situation vécue par l’Égypte, notamment à cause du terrorisme qui mine sa stabilité et menace sa sécurité et celle de ses citoyens, a motivé la proclamation de l’état d’urgence. Comme indiqué dans l’introduction du présent rapport, l’Égypte fait face depuis 2011 à des événements tragiques menaçant sa sécurité et son intégrité et portant atteinte à sa population et aux établissements publics et privés. En outre, bien qu’elle ait été confrontée depuis fin 2013 à une recrudescence d’attaques terroristes ciblant tout le pays, l’Égypte n’a imposé l’état d’urgence que dans certaines zones du Nord Sinaï suite aux attentats perpétrés en 2017 contre les églises et les mosquées, qui ont fait près de 200victimes (morts et blessés), en encadrant cette mesure par des règles constitutionnelles et un contrôle juridictionnel exhaustif. En effet, toutes les poursuites pénales engagées en application de la loi régissant l’état d’urgence sont soumises aux règles générales posées par la Constitution et le Code de procédure pénale. Envérité, sur le terrain, l’état d’urgence prend la forme d’un couvre-feu devant être observé à des heures précises dans ces régions.

40.L’article4 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques reconnaît le droit des États, dans le cas où un danger public exceptionnel menace l’existence de la nation, de prendre, dans la stricte mesure où la situation l’exige, des mesures dérogeant à ses obligations, sous réserve que ces mesures ne soient pas incompatibles avec les autres obligations que leur impose le droit international et qu’elles n’entraînent pas une discrimination fondée sur la race, la couleur, le sexe, la langue, la religion ou l’origine sociale.

41.La Constitution a prévu des règles et procédures régissant la proclamation de l’état d’urgence et l’a assorti de garanties permettant de s’assurer que la situation et les circonstances justifient amplement son instauration. Ainsi, le Président de la République ne peut prononcer l’état d’urgence qu’après avis du Conseil des ministres et transmission à la Chambre des représentants, laquelle doit l’approuver à la majorité de ses membres. De plus, l’état d’urgence ne peut être décrété que pour une durée déterminée n’excédant pas trois mois et ne peut être prolongé qu’une seule fois, pendant une durée similaire, sous réserve de l’approbation des deux tiers des membres de la Chambre des représentants.

42.La Haute Cour constitutionnelle a confirmé que la loi sur l’état d’urgence n’était qu’une mesure exceptionnelle destinée à soutenir l’autorité exécutive et à lui permettre de restreindre certains droits et libertés publics dans le but de faire face à des situations d’urgence menaçant la sécurité publique ou la sûreté nationale du pays, telles que la guerre, les menaces extérieures, les atteintes à la sécurité intérieure, les épidémies ou des événements similaires susceptibles de porter atteinte à la sécurité publique ou à la sûreté nationale. Ils’agit là d’une mesure exceptionnelle qui vise un objectif précis et qui ne peut être appliquée que dans des cas exceptionnels, sur la base d’une interprétation étroite des dispositions qui la régissent. Dans son arrêt rendu dans l’affaire no17, 15eannée judiciaire, audience du 2juin 2013, la Haute Cour constitutionnelle a prononcé la non‑conformité à la Constitution de l’article1er (par.1) de la loi no162 de 1958 sur l’état d’urgence, car il autorisait, en cas d’état d’urgence décrété par le Président de la République, l’arrestation de suspects ou de quiconque représentait un danger pour la sécurité et l’ordre public, ainsi que leur détention et l’émission de mandats de fouille des personnes et de perquisition de lieux, indépendamment des dispositions du Code de procédure pénale. Dans sa sentence, la Cour a mis en garde contre toute interprétation large de la loi relative à l’état d’urgence et déclaré qu’il convenait de l’appliquer de la façon la plus restrictive possible, tout en veillant à se conformer aux règles régissant l’action législative, dont la plus importante consiste à ne pas enfreindre les autres dispositions de la Constitution. En effet, la promulgation de la loi sur l’état d’urgence sur la base d’un article de la Constitution ne signifie pas qu’il est permis de déroger à d’autres dispositions constitutionnelles. Par conséquent, la mise en détention administrative ne peut être autorisée qu’en vertu d’une décision de justice.

43.Les dispositions de la loi no162 de 1958 sur l’état d’urgence ont été présentées dans des rapports précédents. L’Égypte affirme qu’aucune disposition de cette loi n’autorise une dérogation aux dispositions du Code pénal relatives à l’incrimination de la torture et autres formes de traitements inhumains et que ces infractions sont punissables même en période d’état urgence.

Paragraphe 3 : Interdiction d’invoquer l’ordre d’un supérieur afin de justifier latorture

44.Dans les rapports précédents, les motifs d’exonération prévus par la loi ont été présentés, sur la base de l’article63 du Code pénal selon lequel : « Le fonctionnaire est tenu de prouver qu’il a agi seulement après avoir vérifié et s’être assuré du bien-fondé de l’acte, qu’il avait la conviction que l’ordre était légitime et que son opinion était fondée sur des motifs raisonnables », étant par ailleurs précisé qu’en vertu de principes bien établis, l’ignorance de la loi, notamment celle à caractère pénal, ne peut être invoquée comme justification de la torture. Par conséquent, le fait d’avoir agi sur ordre d’un supérieur ne peut être invoqué en aucune circonstance afin de justifier des actes de torture ou de cruauté ou d’autres actes interdits.

45.L’article52 de la Constitution dispose ce qui suit : « La torture sous toutes ses formes est imprescriptible ». Aucune disposition législative ne permet de justifier la torture pour quelque raison ou motif que ce soit. La torture est une infraction dont l’auteur ne peut se soustraire aux poursuites pénales.

46.L’article126 du Code pénal confirme cette règle générale en incriminant explicitement la torture commise sur ordre d’un fonctionnaire, ou par un fonctionnaire, ainsi que tout acte de cette nature susceptible d’être commis par un supérieur hiérarchique et d’amener un subordonné à commettre une infraction de ce type. Toute personne qui donne l’ordre de torturer (supérieur hiérarchique) ou qui torture parce qu’on lui en a donné l’ordre (subordonné) est considérée à ce titre comme auteur principal de cette infraction. Lesubordonné a l’obligation de s’opposer à l’ordre de son supérieur et d’en informer les autorités compétentes, conformément aux dispositions des articles25 et 26 du Code de procédure pénale. Cette mesure constitue une garantie importante au profit des victimes ou de leurs proches dont la situation a été affectée, notamment en cas d’omission de signalement de tels actes en raison du traumatisme subi. Il s’agit d’une obligation qui incite les subordonnés à dévoiler de telles infractions, ce qui permet d’en poursuivre les auteurs. Deplus, si un subordonné s’abstient de signaler ces actes après avoir reçu l’ordre de les commettre, ou qui s’abstient de signaler un acte de torture dont il aurait été témoin ou dont il aurait eu connaissance du fait de sa fonction, il s’expose, dans certaines circonstances, à être considéré complice de ces infractions.

47.La jurisprudence a affirmé que l’invocation d’un ordre émanant d’un supérieur ne pouvait justifier la torture, que l’obéissance à un supérieur ne pouvait aller jusqu’à la perpétration d’une infraction et que le fait qu’un accusé ait agi en exécution d’un ordre d’un supérieur ne l’exonérait en aucune manière de sa responsabilité pénale. En conséquence, ces motifs ne peuvent être invoqués pour conférer un caractère licite à l’acte ou exonérer son auteur de toute responsabilité ou sanction, comme énoncé par la Cour de cassation en ces termes : « … en aucune circonstance l’obéissance à un supérieur ne s’étend à la commission d’infractions et un subordonné ne doit pas obéir à l’ordre donné par son supérieur de commettre un acte dont il sait qu’il est interdit par la loi ».

Article 3Interdiction d’expulser, de refouler ou d’extrader des étrangers s’il existe des motifs sérieux de croire qu’ils risquent d’être soumis à la torture

48.Le système constitutionnel et juridique interdit l’expulsion, le refoulement ou l’extradition d’un étranger vers un autre État où existent des motifs sérieux de croire qu’il risque d’être soumis à la torture, en particulier si des violations flagrantes ou massives des droits de l’homme ont été établies dans l’État en question et pourraient l’exposer à un tel risque. Cette interdiction s’applique tant aux citoyens qu’aux étrangers.

49.En ce qui concerne la procédure d’extradition des étrangers, le droit égyptien consacre le principe de l’application directe des traités internationaux, bilatéraux ou multilatéraux signés par l’Égypte en la matière, ainsi que des instruments comportant des dispositions régissant cette question. De ce fait, ces textes deviennent des composantes du droit interne, conformément à l’article151 de la Constitution, comme confirmé par la jurisprudence de la Cour de cassation. La législation nationale réglemente également les procédures d’extradition applicables aux infractions liées à la traite des êtres humains, à la migration illégale et au trafic de migrants. En l’absence de traité, l’extradition s’effectue conformément aux dispositions du droit international coutumier ou au principe de réciprocité.

50.Suite à l’adhésion de l’Égypte à la Convention, celle-ci a acquis force de loi dès sa ratification, conformément aux dispositions des articles93 et 151 de la Constitution. Étant donné que l’article3 de la Convention est directement exécutoire sans qu’une législation distincte soit nécessaire, il est interdit à l’État, aux termes de son paragraphe1, d’expulser, de refouler ou d’extrader une personne vers un autre État où il y a des motifs sérieux de croire qu’elle risque d’être soumise à la torture. En application du paragraphe2 du même article, l’État est tenu, pour déterminer la présence de tels motifs, de tenir compte de toutes les considérations pertinentes, ycompris, le cas échéant, de l’existence, dans l’État intéressé, d’un ensemble de violations systématiques des droits de l’homme, graves, flagrantes ou massives.

51.Le Procureur général est compétent pour statuer sur les demandes d’extradition, aussi bien avant le déclenchement de l’action pénale que pendant l’enquête ou le procès, ou après qu’un jugement définitif ait été rendu. Le parquet est une partie intégrante de l’autorité judiciaire indépendante en vertu des articles184 et 189 de la Constitution. Le Bureau pour la coopération internationale, l’application des peines et les conditions de détention est chargé d’examiner les demandes d’extradition et de les soumettre au Procureur général.

52.Les membres du Bureau examinent les demandes d’extradition présentées par les États et procèdent aux actes d’investigation requis. Au cours de l’enquête, la personne réclamée est informée de l’accusation qui pèse sur elle et des preuves retenues à cet égard et ses déclarations sont consignées dans un procès‑verbal, accompagné des pièces justificatives présentées par ladite personnes et des éléments avancés par l’État requérant, afin de s’assurer qu’il existe des motifs de fait et de droit justifiant l’extradition. S’il existe des motifs sérieux de croire que la personne réclamée risque d’être soumise à la torture dans l’État requérant, compte tenu de toutes les considérations pertinentes, ycompris l’existence d’une tendance constante de violations graves, flagrantes ou massives des droits de l’homme dans cet État, le Procureur général peut refuser la demande d’extradition et sa décision à cet égard lie toutes les autorités publiques.

53.Quant aux décisions d’expulsion hors du territoire, l’article62 de la Constitution interdit d’expulser un citoyen du pays, de l’empêcher d’y retourner ou de l’extrader vers un autre État, même s’il est titulaire d’une autre nationalité.

54.En ce qui concerne l’expulsion des étrangers, la loi no89 de 1960 sur l’entrée, la sortie et le séjour des étrangers fixe les conditions et modalités d’octroi des titres de séjour spéciaux, ordinaires ou temporaires. La loi donne compétence au Ministre de l’intérieur d’édicter les arrêtés d’expulsion des étrangers.

55.Aux termes de cette loi, un étranger titulaire d’un permis de séjour spécial ne peut être expulsé, sauf si sa présence constitue une menace pour la sécurité intérieure ou extérieure de l’État, l’économie nationale, la santé publique, la moralité publique, l’ordre public ou la tranquillité publique. Les décisions d’expulsion ne peuvent être prononcées que sur la base d’une étude de chaque cas particulier, visant à déterminer les raisons objectives et juridiques permettant de justifier leur adoption. L’intéressé est convoqué, interrogé et invité à fournir les éclaircissements nécessaires en présence d’un avocat, d’un représentant de son ambassade et d’un interprète. La décision d’expulsion est prise par le Ministre de l’intérieur après approbation d’un comité composé de représentants des organismes concernés.

56.En tout état de cause, la décision d’expulsion du Ministre de l’intérieur peut faire l’objet d’un recours en annulation devant le Conseil d’État. La personne faisant l’objet d’un arrêté d’expulsion a le droit d’invoquer les dispositions de la Convention devant le tribunal et de soutenir que son retour dans son pays l’exposerait au risque d’être soumise à la torture. En l’espèce, le tribunal vérifie le bien-fondé des risques encourus et tient compte de toutes les considérations pertinentes lui permettant de se prononcer sur la base des dispositions de la Convention, dans la mesure où celle-ci fait partie intégrante de l’ordre juridique interne. S’il est établi qu’il existe des motifs sérieux de croire que ces allégations sont fondées, le tribunal peut annuler la décision d’expulsion. En attendant l’issue de la procédure, le demandeur peut demander au tribunal le prononcé d’une ordonnance de référé imposant le sursis à exécution de l’arrêté d’expulsion.

57.En outre, conformément à l’interdiction posée par la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés concernant l’expulsion, le refoulement ou l’extradition s’il y a des motifs sérieux de croire que l’auteur risque d’être soumis à la torture, l’article91 de la Constitution autorise l’Égypte à accorder l’asile politique à tout étranger persécuté pour avoir défendu les intérêts des peuples, les droits de l’homme, la paix ou la justice. L’Égypte respecte cette interdiction et ses obligations découlant de la Convention.

58.Le Gouvernement collabore en permanence avec le Bureau du Haut-Commissariat des NationsUnies pour les réfugiés (HCR) en Égypte, qui procède à l’enregistrement des réfugiés et des demandeurs d’asile sur la base de l’accord signé entre les deux parties. Actuellement, 250000réfugiés et demandeurs d’asile de 55nationalités différentes sont enregistrés auprès du HCR et on compte environ 5millions de personnes supplémentaires, dont la plupart ont fui les conflits armés dans les pays voisins et n’ont pas demandé l’asile, dans la mesure où elles se sont bien intégrées dans la société, étant donné qu’elles ne sont pas parquées dans des camps et bénéficient gratuitement de tous les services de base offerts aux Égyptiens, notamment l’accès au logement, à la santé et à l’éducation. La collaboration avec le bureau du HCR inclut la mise à disposition de travailleurs sociaux chargés de s’occuper des enfants non accompagnés et de s’assurer qu’ils ont accès aux services de base.

59.Il convient de noter qu’aucune disposition de la législation nationale, notamment celle concernant le terrorisme, la proclamation de l’état d’urgence ou la sécurité nationale, ne peut affecter l’engagement de l’Égypte à respecter les dispositions du présent article. Aucune mesure d’expulsion, de refoulement ou d’extradition contraire aux dispositions de la Convention n’a été prise au cours de la période considérée.

Article 4 Incrimination de la torture

60.Comme indiqué dans les observations formulées au sujet de l’article premier, le régime juridique de l’infraction de torture est déterminé par les dispositions du droit égyptien interdisant toutes les formes de torture en des termes plus généraux et plus complets que ceux de la Convention, comme renforcé par la Constitution, selon laquelle la torture sous toutes ses formes est imprescriptible.

61.En ce qui concerne l’incrimination de la torture selon la loi no25 de 1966, ce sont les dispositions relatives aux procédures et aux sanctions de droit commun qui s’appliquent, sauf s’il existe des dispositions spécifiques prévues en la matière par le Code de justice militaire. En conséquence, la justice militaire applique les textes incriminant la torture et n’accorde aucune valeur aux aveux obtenus de cette manière.

62.Il convient de noter que les tribunaux appliquent les dispositions pénales incriminant la torture en s’inspirant de la jurisprudence pertinente, comme illustré par les cas d’espèce suivants :

Des policiers ont torturé une personne en vue de lui faire avouer un vol, lui causant des blessures ayant provoqué son décès : ils ont été déférés devant le tribunal pénal, qui les a condamnés à une peine d’emprisonnement aggravée et prononcé leur licenciement de la fonction publique en tant que mesure accessoire ;

Des policiers ont torturé un accusé placé en détention provisoire dans un établissement pénitentiaire public, dans le but de lui faire avouer le contenu de la plainte dont il faisait l’objet, lui causant des blessures ayant provoqué son décès : ils ont été déférés devant le tribunal pénal qui les a condamnés à dix ans de travaux forcés et prononcé leur exclusion de leurs fonctions;

Un officier de police a torturé un accusé afin de lui faire avouer diverses infractions, lui causant des blessures ayant provoqué son décès, comme établi dans le rapport d’enquête : le policier a été déféré devant le tribunal pénal qui l’a condamné à une peine d’emprisonnement aggravée et a prononcé son licenciement de la fonction publique à titre de mesure accessoire ;

Un accusé placé en détention provisoire a été torturé par plusieurs policiers, dont deux officiers, dans le but de lui extorquer des aveux concernant des accusations liées à la possession et à la consommation de stupéfiants, lui causant des blessures graves ayant entraîné son décès : ils ont été déférés devant le tribunal pénal qui a condamné les deux officiers à un an d’emprisonnement et à deux ans de suspension de fonction et les policiers à dix ans de travaux forcés, outre leur licenciement de la fonction publique ; en outre, le jugement a mis à la charge du Ministre de l’intérieur l’obligation d’indemniser les héritiers de la victime des dommages subis du fait du décès de celle-ci ;

Un accusé a été torturée par un officier de police dans le but de lui faire avouer un vol, lui causant des blessures graves ayant provoqué son décès : le tribunal pénal a condamné l’officier à cinq ans d’emprisonnement et à réparer le préjudice subi par les héritiers de la victime.

63.En conclusion, il convient de noter qu’outre la mise en jeu de sa responsabilité pénale, l’auteur présumé de toute forme de torture ou de traitements inhumains s’expose à des poursuites disciplinaires justifiant le prononcé d’une mesure de suspension de ses fonctions par les autorités compétentes, en attendant la clôture de l’enquête. Cette suspension est obligatoirement prononcée si l’accusé fait l’objet d’une décision de placement en détention provisoire, conformément aux dispositions des articles53 et 54 de la loi no109 de 1971 sur les forces de police. Elle est facultative s’il n’est pas placé en détention ou si l’intérêt de l’enquête l’exige. La décision de suspension dépend du résultat de l’enquête pénale : sicelle‑ci débouche sur des poursuites pénales donnant lieu à une condamnation, cela entraîne inévitablement le licenciement de l’accusé de la fonction publique, en tant que peine accessoire à la peine principale. En revanche, si l’enquête ne débouche pas sur un procès pénal, l’autorité chargée de l’enquête peut renvoyer l’affaire devant l’autorité investie du pouvoir disciplinaire, laquelle peut infliger à l’accusé une sanction administrative ou engager une procédure disciplinaire à son égard, susceptible d’aboutir à un licenciement.

Article 5Compétence juridictionnelle concernant les faits de torture

Paragraphe 1

64.La question relative au champ d’application territorial des dispositions du droit national a été abordée dans les rapports précédents. Il convient de noter qu’en vue de renforcer la prévention internationale du crime en général et des violations des droits de l’homme en particulier, notamment la torture, il a été fait référence à la création du Bureau pour la coopération internationale et la protection des droits des détenus auprès du parquet, chargé de recevoir les demandes de coopération et de donner suite aux commissions rogatoires et aux demandes d’entraide judiciaire provenant de l’étranger, comme indiqué ci‑dessus dans le cadre des commentaires relatifs à l’article3.

Paragraphe 2

65.Les dispositions du présent paragraphe ont été abordées dans les précédents rapports, ainsi que dans les commentaires relatifs à l’article3 ci-dessus et aux articles8 et 9 ci-dessous, concernant la réglementation de l’extradition.

Article 6Mesures relatives à l’arrestation des personnes impliquées dans des faits de torture

66.Dans le système juridique égyptien, les règles de procédure pénale applicables aux Égyptiens sont identiques à celles applicables aux étrangers, lesquels jouissent même de droits plus étendus liés à leur extranéité, comme celui de bénéficier des services d’un interprète, le cas échéant, ou de communiquer avec l’ambassade de leur pays ou de l’État dans lequel ils résident habituellement s’ils sont apatrides.

67.Après arrestation de toute personne mise en cause, les officiers de police judiciaire sont tenus de lui demander de décliner son identité, de consigner ses déclarations dans un procès-verbal et de lui poser des questions relatives aux faits qui lui sont reprochés, mais sans l’interroger. Tout prévenu a le droit de garder le silence, conformément aux dispositions de l’article54 de la Constitution. Dans les vingt-quatre heures suivant son arrestation, tout prévenu doit comparaître devant les autorités chargées de l’instruction, à savoir le ministère public ou le juge d’instruction, aux fins d’enquête et de décision.

68.Afin de faire comparaître sans délai les inculpés devant l’autorité chargée de l’instruction, les directives judiciaires régissant le fonctionnement du parquet imposent au personnel des permanences de nuit quotidiennes, ainsi que des astreintes de jour et de nuit, de fin de semaine et de jours fériés, en vue de faire comparaître rapidement chaque prévenu, même dans le cadre des délais prescrits par la loi.

69.Il incombe au Ministère des affaires étrangères d’adresser une communication à l’ambassade du pays d’origine de chaque prévenu pendant la phase de collecte des preuves. De son côté, le Bureau de la coopération internationale du ministère public prend contact avec ladite ambassade et l’informe de l’ouverture d’une enquête contre le prévenu concerné, en requérant la présence de l’un de ses représentants en vue d’assister aux procédures.

70.En conclusion, des restrictions à la liberté des prévenus ne peuvent être appliquées que dans les deux situations suivantes, à savoir s’il fait l’objet d’une mesure d’extradition ou de poursuites judiciaires. Dans les deux cas, la période de restriction de liberté ne peut excéder celle prévue par la loi, que l’accusé soit égyptien ou étranger. La durée et les règles régissant la détention provisoire ont déjà été abordées dans le cadre du commentaire de l’article2.

Article 7Garanties au profit de personnes impliquées dans des actes de torture au cours des procès

71.Si un prévenu n’est pas extradé vers un autre État et que l’un des critères de compétence pénale est rempli, les autorités compétentes peuvent initier les procédures d’enquête, d’instruction et de jugement, et ce, en application des dispositions de la Convention, désormais partie intégrante de l’ordre juridique interne, ainsi que d’autres lois nationales. Qu’il soit égyptien ou étranger, tout prévenu est soumis aux mêmes règles de procédure et de fond, qui font partie des règles de droit commun bien établies.

72.Les garanties reconnues par le système judiciaire égyptien aux personnes soupçonnées d’avoir commis des actes de torture et d’autres formes de traitements inhumains au cours des étapes de la collecte des preuves et de l’instruction préliminaire sont les suivantes :

Le droit de ne pas être arrêtées ou fouillées, ou de subir une quelconque restriction de leur liberté, sauf en cas de flagrant délit ou sur la base d’un mandat judiciaire dûment motivé faisant suite à une enquête ; ce mandat doit être fourni par écrit, mentionner des données précises et signé par le magistrat qui l’a décerné, comme prévu par le Code de procédure pénale et l’article 54 de la Constitution, qui exigent également qu’une personne arrêtée soit informée par écrit de ses droits et des motifs de son arrestation, ainsi que de son droit de contacter ses proches et de demander l’assistance d’un avocat ;

Le même article accorde les mêmes droits aux suspects au cours de l’enquête préliminaire afin de leur accorder davantage de garanties ; ce texte souligne également que tout mandat d’arrêt contre un inculpé doit être présenté à l’autorité chargée de l’instruction dans un délai raisonnable, sachant que l’article 36 du Code de procédure pénale impose aux officiers de police judiciaire de faire comparaître l’accusé devant les autorités chargées de l’instruction dans les vingt-quatre heures suivant son arrestation ou de le libérer immédiatement ; l’article 26 du même code exige que tout prévenu soit entendu et, si ses déclarations ne permettent pas de le disculper, de le présenter au parquet ;

L’article 55 la Constitution consacre le droit de toute personne privée de liberté d’être traitée avec le respect dû à la dignité inhérente à la personne humaine au cours de sa détention dans des lieux prévus à cet effet, décents en termes humains et sanitaires, ainsi que le droit de ne pas être soumise à la torture, à l’intimidation, à la contrainte ou à des mauvais traitements physiques ou psychologiques et de garder le silence, tout en reconnaissant aux personnes handicapées le droit d’accès aux équipements, matériels, appareils et autres accessoires d’assistance ; la loi sur les droits des personnes handicapées réglemente ce droit reconnu aux personnes handicapées, qu’elles soient accusées, victimes ou témoins, tout au long des phases d’arrestation, d’instruction, de jugement ou d’exécution de la peine, ainsi que le droit à la protection, à la prise en charge sanitaire et sociale et à une assistance technique spéciale, le cas échéant ;

La loi sur les établissements pénitentiaires garantit le droit des détenus et des prisonniers d’avoir accès à un médecin et aux soins médicaux dont ils ont besoin ;

Toutes les activités de collecte des preuve menées par les officiers de police judiciaire sont soumises à un contrôle judiciaire, conformément à l’article22 du Code de procédure pénale, sachant que les éléments de preuve sont par ailleurs transmis à la juridiction compétente, chargée d’en évaluer la conformité à la loi et le bien-fondé.

73.Les garanties accordées par le système juridique égyptien aux personnes accusées d’actes de torture et de traitements inhumains au cours du procès sont les suivantes :

L’indépendance du pouvoir judiciaire, consacrée par l’article 184 de la Constitution et l’inamovibilité des magistrats prévue par l’article 186 du même texte ; complétées par les dispositions de l’article 302 (par. 1) du Code de procédure pénale et du chapitre IV du Titre II du Livre II du même code, qui garantissent la liberté du juge de statuer en toute indépendance et impartialité et selon son intime conviction et réglementent les recours mettant en cause son impartialité si l’un des motifs affectant cette impartialité est prévu par la loi ;

La publicité des débats judiciaires, conformément aux dispositions de l’article 187 de la Constitution, tel que confirmé par les articles 18 de la loi sur le pouvoir judiciaire et 268 du Code de procédure pénale, sachant que selon la Cour de cassation : « La publicité des débats judiciaires est la règle, le huis clos entachant tout jugement de nullité » ;

La présomption d’innocence consacrée par l’article 96 de la Constitution, comme confirmé par l’article 304 (par. 1) du Code de procédure pénale et appliqué par les tribunaux égyptiens dans de nombreuses décisions, qui posent la règle selon laquelle les jugements, en matière pénale, reposent sur la certitude et la conviction, ce dont il résulte que le doute bénéficie à l’accusé ; la non rétroactivité des lois pénales, principe reconnu par la jurisprudence de la Cour de cassation ; l’interdiction de juger deux fois la même personne pour le même fait, tel qu’affirmé par l’article 455 du Code de procédure pénale et fermement établi par la jurisprudence ;

Le droit à l’assistance d’un avocat au cours du procès, conformément aux articles 54 et 98 de la Constitution et, si l’accusé n’a pas mandaté de défenseur, le tribunal doit lui en désigner un d’office, dont découle le droit de l’accusé et de son avocat de demander toute mesure d’enquête permettant de prouver l’innocence du prévenu, d’entendre les dépositions des témoins et des experts, de mener des investigations et de présenter des plaidoiries orales et écrites : la Cour de cassation a estimé qu’une violation du droit à la défense pouvait annuler un jugement ; en outre, l’article 19 de la loi sur le pouvoir judiciaire garantit le droit de bénéficier des services d’un interprète ; dans plusieurs de ses articles, le Code de procédure impose au tribunal de clôturer l’instruction et de superviser l’accomplissement des procédures, d’entendre les plaidoyers à charge et à décharge, d’écouter les plaidoiries de l’accusation et de la défense, d’exiger la présence de l’accusé au procès et de lui soumettre tous les éléments de preuve retenus contre lui afin qu’il puisse les réfuter ou les confirmer, le cas échéant, et de ne tenir compte que des éléments de preuve produits au cours des audiences : la jurisprudence de la Cour de cassation a estimé que la violation de ce principe pouvait entraîner la nullité d’un jugement ;

Le droit aux voies de recours contre les jugements rendus en matière pénale, comme prévu par le Code de procédure pénale, qui réglemente les procédures d’appel ou de cassation, sachant qu’en matière de délits, les jugements rendus par contumace peuvent également faire l’objet d’une opposition devant le tribunal de première instance ou la cour d’appel : en matière pénale, les affaires sont en principe jugées par un seul degré de juridiction, mais les sentences rendues par contumace peuvent être annulées en cas de comparution du prévenu et toute décision rendue en présence de ce dernier peut faire l’objet d’un recours en cassation ; de plus, l’article96 de la Constitution a introduit le principe du double degré de juridiction dans le domaine pénal et l’article240 a mis à la charge de l’État le devoir de réglementer les procédures pertinentes à cet effet dans les dix ans de la date d’entrée en vigueur des dispositions constitutionnelles.

Article 8Extradition des personnes impliquées dans des actes de torture

74.Dans toute la mesure où les dispositions de la Convention sont applicables en droit interne, conformément aux articles93 et 151 de la Constitution, les infractions visées à l’article4 font partie de celles donnant lieu à extradition, sachant que seuls les réfugiés politiques ne peuvent être extradés en vertu de l’article91 de la Constitution. Cela signifie qu’hormis cette exception, toutes les autres formes d’extradition sont autorisées, comme précisé par les dispositions des instruments internationaux auxquels l’Égypte est partie, ainsi que par le droit coutumier.

75.Concernant les États avec lesquels l’Égypte n’est pas liée par un traité d’extradition bilatéral ou multilatéral, la Convention constitue la base juridique de l’extradition, en relation avec les infractions qui y sont prévues. L’Égypte continue de considérer les infractions visées à l’article4 comme donnant lieu à extradition dans tout traité conclu à cet effet. Il convient de noter que dans tous les instruments conclus par l’Égypte, qu’ils soient bilatéraux ou multilatéraux, la torture figure au nombre des infractions donnant lieu à extradition.

76.L’article1716 des directives judiciaires régissant le fonctionnement du parquet dispose qu’en l’absence d’un traité entre l’Égypte et l’État requérant, ce sont les règles du droit international coutumier qui s’appliquent. En conséquence, l’extradition de la personne réclamée n’est pas subordonnée à l’existence d’un traité international entre l’Égypte et l’État requérant, dès lors qu’elle est autorisée par le droit international coutumier et sur la base du principe de réciprocité.

77.Généralement soumise à des règles, l’extradition est interdite dans le cas où la condition de la double incrimination dans les États concernés n’est pas remplie ou lorsque la procédure pénale ou la peine sont éteintes en raison de l’expiration du délai de prescription. Cette interdiction ne concerne pas les actes de torture, qui sont imprescriptibles en Égypte, comme indiqué supra. De plus, la demande d’extradition doit être présentée accompagnée de la documentation requise au parquet pour examen et suite à donner.

78.Enfin, il convient de noter qu’au cours de la période considérée, l’Égypte n’a pas reçu de demandes d’extradition pour des faits qualifiés de torture conformément aux dispositions de la Convention.

Article 9 Fourniture de l’assistance requise concernant les faits de torture dans lecadre de l’entraide judiciaire internationale

79.L’Égypte s’engage à aider les États parties à la Convention dans le cadre des procédures juridiques et judiciaires relatives à l’une quelconque des infractions visées à l’article4, ycompris en ce qui concerne la communication de tous les éléments de preuve dont elle dispose et qui sont nécessaires aux fins de la procédure judiciaire, afin de prévenir l’impunité des auteurs et complices de tels actes.

80.Les commissions rogatoires constituent l’un des aspects de la coopération internationale. L’Égypte est partie à plusieurs traités d’entraide judiciaire bilatéraux et multilatéraux. L’article1709 des directives judiciaires régissant le fonctionnement du parquet précise que les demandes de commissions rogatoires présentées par les États doivent être exécutées, même en l’absence d’un instrument international, conformément aux règles de courtoisie internationale. L’entraide judiciaire internationale est régie par les instruments internationaux et les règles du droit international coutumier, sans préjudice des dispositions de la Constitution et de la législation.

81.L’article1709 des directives judiciaires régissant le fonctionnement du parquet cite quelquesunes des mesures susceptibles d’être prises dans le cadre des commissions rogatoires, telles que l’audition de témoins, l’interrogatoire d’accusés, la conduite de confrontations, la désignation d’experts et la saisie d’objets. In fine, l’État requérant est informé des mesures prises dans le cadre de l’exécution d’une commission rogatoire et reçoit transmission des actes judiciaires exécutés.

82.Enfin, il convient de noter qu’au cours de la période considérée, l’Égypte n’a ni reçu ni sollicité de demandes d’entraide se rapportant à des faits qualifiés de torture conformément aux dispositions de la Convention.

Article 10Éducation et formation à la lutte contre la torture

Paragraphe 1

83.L’Égypte accorde une attention particulière à la formation des responsables de l’application des lois et des magistrats, ainsi qu’à celle de toutes les autres personnes susceptibles d’intervenir lors de la détention, de l’interrogatoire ou de la prise en charge de toute personne détenue ou demandeuse d’asile dans les domaines liés à l’interdiction de la torture et autres peines ou traitements cruels inhumains ou dégradants. Des sessions de formation sont périodiquement organisées à l’intention des médecins et experts en médecine légale, afin d’améliorer leurs capacités à détecter et à documenter les faits de torture. Conscients que l’éducation aux droits de l’homme contribue dans une large mesure à mieux les faire connaître et à promouvoir leur respect, les établissements de l’enseignement de base et secondaire ont continué, au cours de la période considérée, à inscrire cette discipline dans leurs programmes.

84.Conformément à l’article24 de la Constitution, le Conseil supérieur des universités a décidé en 2018 d’enseigner les droits de l’homme dans tous les collèges et instituts supérieurs, en tant que matière obligatoire conditionnant le passage d’un niveau à l’autre, dispensée une seule fois au cours de la scolarité. Les diplômés de l’Académie de police peuvent postuler à une licence en droit, ainsi qu’à une licence en sciences policières. L’enseignement des droits de l’homme constitue désormais une matière de base faisant l’objet d’un examen obligatoire dans le cadre de l’obtention du diplôme. Parmi les matières dispensées dans le cadre de l’enseignement des droits de l’homme figurent les dispositions de la Convention. Par ailleurs, un Département de la justice pénale et des droits de l’homme a été créé au sein de l’Académie de police en vue d’inculquer les valeurs des droits de l’homme aux agents de police tout au long de leurs études et au cours des sessions de formation continue organisées à leur intention. Un « Diplôme en droits de l’homme et relations communautaires » a en outre été créé au niveau du cycle d’études supérieures de l’Académie, fondé sur l’enseignement de 7matières : le droit international humanitaire ; les dimensions médiatiques, psychologiques et sociales de la protection des droits de l’homme ; les droits de l’homme au cours du rassemblement des preuves ; les principes fondamentaux relatifs aux droits de l’homme et le rôle de la police dans leur protection ; les droits de l’homme au cours de l’exécution des peines ; le cadre international et régional de la protection des droits de l’homme ; et les garanties de protection des droits de l’homme.

85.Un cours intitulé « droits de l’homme − enseignement approfondi » fait également partie des matières obligatoires enseignées dans le cadre des cursus diplômants de l’Académie. En outre, les élèves officiers sont encouragés à mener des recherches individuelles et collectives et à les approfondir au cours des cycles d’enseignement supérieur. Ainsi, les élèves de l’Académie ont soutenu 41thèses de doctorat en matière de droits de l’homme, 14autres thèses sont en cours de rédaction et 104mémoires de recherche ont été élaborés dans ce domaine par les élèves officiers. L’Académie a intégré la préparation psychologique sur des bases scientifiques dans ses programmes de formation, en mettant l’accent sur le renforcement des capacités des policiers à faire face aux différentes pressions, ainsi que sur l’amélioration de leurs performances en matière de maintien de l’ordre, dans le respect des principes des droits de l’homme. En outre, des officiers instructeurs scientifiquement qualifiés ont été chargés d’organiser des ateliers et des sessions de formation à l’intention des officiers dans les commissariats de police des provinces et de publier des brochures et des dépliants de sensibilisation aux droits de l’homme et de les diffuser auprès des officiers de police. De plus, les questions relatives aux droits de l’homme ont été intégrées dans les concours de recherches de l’Académie, dont la bibliothèque a été dotée de manuels et d’ouvrages locaux et étrangers. Le département de traduction du Centre de recherche de la police a traduit plusieurs publications scientifiques afin de les mettre à la disposition de la police. Des séminaires et réunions ont également été organisés à l’intention des élèves de l’Académie, présentés par des hommes de lettres et des experts multidisciplinaires, afin de leur apprendre à s’abstenir de porter atteinte aux droits de l’homme et à bannir tout comportement de ce type.

86.De janvier 2010 jusqu’à la date d’achèvement du présent rapport, 70sessions de formation aux droits de l’homme et à la lutte contre la torture ont été organisées à l’intention des agents de police, auxquelles ont participé 1392stagiaires.

87.De 2015 à 2018, le Ministère de l’intérieur a également organisé 139sessions de formation spécialisées à l’intention des officiers, portant sur tous les aspects relatifs aux droits de l’homme, ainsi que 2796sessions de formation à l’intention des agents et du personnel civil du Ministère, visant le renforcement de leurs capacités en sciences humaines, sociales et juridiques et la promotion des valeurs professionnelles et déontologiques, incluant des conférences spécialisées dans le domaine des droits de l’homme. Au total, 462conférences de sensibilisation à différentes questions relatives aux droits de l’homme ont été organisées. De plus, le Centre de recherche de la police a accueilli plusieurs séminaires à l’organisation desquels ont contribué des écrivains, des intellectuels, des personnalités publiques et des représentants des médias, ainsi que des membres des Conseils nationaux dédiés aux femmes, à l’enfance et à la maternité et aux personnes handicapées.

88.Des sessions de formation ont également été organisées à l’intention des officiers et du personnel des établissements pénitentiaires et des centres de protection sociale au sujet de la prise en charge des détenus, des mineurs et des femmes. De 2016 à 2019, 100sessions de formation ont été organisées à l’intention du personnel des établissements pénitentiaires et de 2017 à la date de rédaction du présent rapport, 4officiers, 58agents de police et 13fonctionnaires de centres de protection sociale ont bénéficié d’une formation. De plus, un protocole de coopération entre la Direction des droits de l’homme du Ministère de l’intérieur et le Conseil national des droits de l’homme a été signé en mars 2017, dans le cadre duquel, jusqu’à la date de rédaction du présent rapport, 10sessions de formation au respect des droits de l’homme lors des opérations de sécurité ont été organisées à l’intention de 300officiers des postes et commissariats de police, afin de les familiariser avec les obligations posées par la Constitution, les lois et les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, notamment la Convention contre la torture.

89.Des exemplaires de la Déclaration universelle des droits de l’homme et du Code de conduite et de déontologie de la police, ainsi que deux dépliants de sensibilisation, respectivement intitulés « Non à la violence à l’égard des femmes » et « La police au service de la population », ont été distribués par le Ministère de l’intérieur à son personnel. D’autres dépliants relatifs au rôle et aux attributions de la Direction des droits de l’homme du Ministère de l’intérieur ont également été conçus et publiés. La sensibilisation à la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants figure en bonne place dans les manuels et instructions destinés aux agents de police.

90.De même, un Institut de recherche criminelle et de formation a été créé en 2015 auprès du ministère public, notamment afin d’assurer la formation des nouveaux membres du parquet au moyen de cours de base et spécialisés portant sur les garanties procédurales applicables lors des investigations relatives à tous les types d’infractions. Un nombre de 1180personnes a bénéficié de cette formation au cours de la période allant du premier janvier 2017 à la date de rédaction du présent rapport. L’enseignement dispensé consiste à présenter les dispositions de la Convention, les actes de torture et les modalités d’investigation à leur sujet, sur la base d’exemples concrets, complété par des visites auprès des établissements pénitentiaires en vue de mieux faire connaître les droits des détenus et le rôle du ministère public en matière d’inspection, de recueil des plaintes et d’enquêtes relatives à tout incident susceptible de se produire à l’intérieur des prisons.

Paragraphe 2

91.La Constitution interdit la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Cette interdiction est explicitement incorporée dans les règles ou instructions relatives aux obligations et attributions des agents de la fonction publique, des responsables de l’application des lois et du personnel médical et judiciaire.

92.L’article160 des directives judiciaires régissant le fonctionnement du parquet dispose ce qui suit : « Lors de l’interrogatoire, l’accusé doit être traité dans le respect de sa dignité et de son humanité, en évitant tout recours à des méthodes ou à des comportements susceptibles de porter atteinte à la dignité humaine. Il est interdit de recourir à la torture en vue de faire avouer à l’accusé les faits faisant l’objet de l’enquête ».

93.L’article41 de la loi sur les forces de police met explicitement à la charge des officiers et agents de police l’obligation de respecter la Constitution et la loi, les normes relatives aux droits de l’homme dans le cadre de l’usage de l’autorité et de la force, les principes d’impartialité, de transparence, de légalité procédurale, de protection des droits et libertés, de préservation de la dignité humaine et de respect des valeurs démocratiques de la société, conformément à la Constitution et à la législation et de faire en sorte que les personnes accusés et/ou soupçonnées d’infractions soient traitées dans le respect de leurs droits constitutionnels et juridiques et des normes relatives aux droits de l’homme.

94.Le Ministère de l’intérieur a également publié en 2011 le Code de conduite et de déontologie de la police, qui consacre un ensemble de principes et de valeurs relatifs à une conduite éthique et professionnelle conforme aux normes internationales, afin d’instaurer une doctrine de sécurité respectueuse des principes et valeurs des droits de l’homme, en tant que normes fondamentales de ce secteur. L’article premier de ce code consacre le respect de la Constitution, de la loi et des normes relatives aux droits de l’homme. L’article5 souligne la nécessité de s’abstenir de se livrer à toute pratique négative ou inhumaine en ces termes : « Les agents de police ne doivent infliger, encourager ou tolérer aucun acte de violence physique ou psychologique, aucun traitement ou peine cruel, inhumain ou dégradant, ni aucune autre forme de violence portant atteinte à l’intégrité physique ou psychologique d’autrui. Aucune circonstance exceptionnelle, ni l’ordre d’un supérieur, ne peuvent être invoqués par les agents de police en vue de justifier de telles pratiques contraires à la loi ou aux droits de l’homme ». Le Code impose à tous les membres des services de police l’obligation de respecter ses dispositions et de prévenir toute violation de celles-ci, de réagir fermement à toute atteinte et de fournir à leurs supérieurs toutes les informations nécessaires à la prise des mesures permettant d’empêcher leur survenue.

95.L’article35 du Code de déontologie de la profession médicale, publié par le Ministre de la santé et de la population par le décret no234 de 1974, dispose ce qui suit : « Le médecin chargé de la prise en charge sanitaire en milieu pénitentiaire doit dispenser aux personnes détenues un traitement de même qualité et répondant aux mêmes normes que celui dont bénéficient les personnes qui ne sont pas privées de liberté ». Il est interdit à tout médecin de commettre tout acte constituant une participation active ou passive, une complicité ou une incitation à la torture et à d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Ilest également interdit à tout médecin d’utiliser ses connaissances ou ses compétences professionnelles afin de participer à l’interrogatoire d’une personne privée de liberté susceptible de porter atteinte à sa santé physique ou mentale, ou de contribuer à toute procédure visant à restreindre les déplacements des personnes détenues, sauf si cela est justifié par des raisons strictement médicales, en vue d’assurer la protection de leur santé physique ou mentale ».

Article 11 Mesures propres à empêcher la torture dans les lieux de détention

96.Outre les éléments présentés dans le cadre des développements relatifs aux articles1, 2, 6, 7 et 10, les règles, instructions et méthodes d’interrogatoire, les dispositions régissant la détention et le traitement des personnes détenues ou emprisonnées, les droits des détenus en matière de soins de santé, la responsabilité des médecins en matière de protection contre la torture et le rôle des membres du parquet et d’autres intervenants compétents (juges d’instruction, présidents et substituts des tribunaux de première instance, des cours d’appel et de la Cour de cassation) en matière de visite des prisons et autres lieux de détention en vue d’y constater d’éventuelles irrégularités et de prendre les mesures nécessaires visant à y mettre fin, de vérifier le respect de l’application de la législation et de la réglementation en vigueur, d’examiner les registres et documents des prisons afin de s’assurer que la loi est appliquée et que les contrevenants font l’objet de poursuites, ont déjà été abordés dans les rapports précédents, sachant qu’il s’agit là des principales garanties de la protection des droits et libertés.

97.Les garanties visées à l’article55 de la Constitution confirment ce qui précède, via l’interdiction du recours à la torture contre les personnes dont la liberté est restreinte, le devoir de les traiter d’une manière qui préserve leur dignité et l’obligation de les incarcérer uniquement en des lieux conçus à cet effet, décents en termes humains et sanitaires. De son côté, l’article56 impose la soumission des prisons et lieux de détention au contrôle judiciaire et interdit tout ce qui porte atteinte à la dignité des personnes ou met en danger leur santé.

98.Les articles1747-1750 des directives judiciaires régissant le fonctionnement du parquet imposent aux avocats généraux auprès des tribunaux de grande instance, ou à leurs représentants, ainsi qu’aux présidents des tribunaux correctionnels, d’inspecter les prisons générales et les prisons centrales placées sous leur juridiction au moins une fois par mois sans préavis, de consulter les registres pénitentiaires, de vérifier la légalité des mandats d’arrêt et de dépôt et de recevoir toute plainte émanant des détenus. À cet effet, le directeur et le personnel de l’établissement pénitentiaire doivent mettre à la disposition des détenus toutes les données et informations demandées. Selon ces articles, les membres du parquet doivent s’assurer qu’aucune personne n’est emprisonnée ou détenue sans mandat judiciaire et veiller à ce que les catégories de personnes détenues soient séparées les unes des autres et à ce que chaque catégorie bénéficie du traitement auquel elle a droit. Les membres du parquet sont également tenus d’enquêter au sujet des irrégularités et infractions constatées au cours de l’inspection et d’en informer le procureur adjoint.

99.Outre les développements consacrés aux commentaires de l’article16 (par.1) de la Convention, les règles, règlements et instructions relatifs au traitement des personnes privées de liberté conformément aux dispositions de la loi (dont le contenu reflète globalement l’Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus, les Principes fondamentaux relatifs au traitement des détenus et l’Ensemble de principes pour la protection de toutes les personnes soumises à une forme quelconque de détention ou d’emprisonnement) sont les suivantes :

L’article 5 de la loi régissant les établissements pénitentiaires, selon lequel : « Nul ne peut être emprisonné en l’absence d’un mandat écrit délivré par une autorité compétente et nul ne peut être maintenu en détention au-delà de la date indiquée sur le mandat » ; l’article 6, qui dispose ce qui suit : « Le chef de l’établissement pénitentiaire ou le fonctionnaire désigné à cette fin doit prendre possession, avant l’admission d’un détenu, d’une copie de l’ordonnance de mise en détention après apposition de sa signature sur l’accusé de réception, remettre l’original de l’ordonnance à l’agent chargé de l’exécution du mandat d’amener et conserver une copie visée par l’autorité ayant ordonné le placement » ; l’article 7, qui prévoit ce qui suit : « En cas de transfert d’un détenu vers un autre établissement, une copie de l’ordonnance de mise en détention visée à l’article précédent, ainsi que les pièces figurant dans son dossier individuel, notamment les résultats des enquêtes auxquelles il a pu être procédé concernant sa situation sociale et son état de santé, sont transmis à l’établissement pénitentiaire de destination » ; l’article 8 qui énonce ce qui suit : « Dès l’admission du détenu en prison, un résumé de l’ordonnance de mise en détention doit être consigné sur le registre d’écrou des détenus, en présence de l’agent ayant exécuté le mandat d’amener qui doit y apposer sa signature », étant précisé que tous les registres sont soumis au contrôle et au suivi de l’autorité judiciaire chargée de l’inspection et du contrôle des prisons et des lieux de détention, conformément aux directives judiciaires régissant le fonctionnement du parquet précitées ;

L’article 33 de la même loi, qui dispose ce qui suit : « Chaque prison centrale ou établissement pénitentiaire doit disposer des services d’un ou plusieurs médecins, dont au moins un résidant sur place, chargé des questions de santé conformément aux dispositions du règlement intérieur. La prison centrale doit disposer d’un médecin ; si aucun médecin ne lui a été affecté, un médecin public doit être désigné afin de remplir les fonctions de médecin pénitentiaire » ; l’article 33 bis, selon lequel : « Les établissements publics et universitaires de santé sont tenus de soigner les détenus malades » ; l’article 36 de la même loi, selon lequel : « En cas de diagnostic d’une pathologie engageant le pronostic vital d’un détenu ou totalement invalidante, effectué par un médecin pénitentiaire, ce dernier doit en informer le directeur des services de santé de l’établissement afin de soumettre le détenu concerné à un examen, mené conjointement avec un médecin légiste, en vue de sa libération. La décision de mise en liberté est exécutée suite à son adoption par l’adjoint du Ministre chargé de l’administration pénitentiaire et approbation du procureur général. Elle est notifiée aux autorités administratives compétentes et au ministère public. L’autorité administrative du lieu de résidence du détenu remis en liberté est tenue de le soumettre à un examen médical tous les six mois, de rédiger un rapport au sujet de son état de santé et de le transmettre au service pénitentiaire, chargé d’évaluer cet état dans la perspective d’une révocation de la mesure de remise en liberté si nécessaire. L’adjoint du Ministre chargé de l’administration pénitentiaire peut demander au directeur des services de santé de l’établissement et au médecin légiste d’examiner la personne remise en liberté, afin d’évaluer son état de santé chaque fois qu’il l’estime nécessaire. Le détenu remis en liberté conformément à ce qui précède peut être renvoyé en détention afin de purger sa peine sur ordre du procureur, si l’examen effectué par les médecins précités démontre que les motifs justifiant sa libération n’existent plus ou s’il a changé de domicile sans en informer l’autorité administrative compétente. Le temps passé hors de prison par tout détenu ayant bénéficié d’une mesure de remise en liberté médicale est comptabilisé comme durée de détention effective » ; le décret d’application de la loi prévoit également d’autres dispositions garantissant le droit d’accès des détenus aux soins de santé : ainsi, l’article 24 dispose ce qui suit : « Le médecin exerçant en prison est responsable de l’administration de soins de santé aux détenus, de la prévention des maladies infectieuses, du contrôle de la quantité et de la qualité des aliments, des vêtements et de la literie, ainsi que de la vérification de la propreté des ateliers et dortoirs et de l’ensemble de l’établissement » ; selon l’article 25 : « En cas d’absence du médecin pénitentiaire, le chef de l’établissement demande au service pénitentiaire de prendre les dispositions nécessaires afin de procéder à son remplacement par un médecin du Ministère de la santé. En cas d’urgence, il peut appeler directement un médecin du Ministère de la santé et en informer l’administration pénitentiaire a posteriori » ; l’article 26 dispose ce qui suit : « Le médecin pénitentiaire doit procéder à un contrôle au moins une fois par jour. Il ne peut être astreint à travailler les jours fériés qu’en cas d’urgence » ; l’article 27 énonce ce qui suit : « Le médecin doit examiner chaque détenu dès que possible après son admission, soit au plus tard le lendemain matin, consigner son état de santé et estimer sa capacité à travailler. Il doit également voir chaque jour tous les détenus malades, examiner ceux qui se plaignent d’être malades et transférer ceux dont l’état de santé nécessite une hospitalisation vers l’hôpital pénitentiaire, rendre visite chaque jour aux détenus mis à l’isolement et examiner au moins une fois par semaine les autres détenus, afin d’évaluer leur état de santé et d’hygiène » ; selon l’article 31 : « Si le médecin estime que la santé d’un détenu risque d’être affectée par une mise à l’isolement, par une tâche donnée ou par la nature de celle-ci, il doit en informer par écrit le chef de l’établissement pénitentiaire et lui enjoindre d’adopter des mesures destinées à y remédier. Le chef de l’établissement doit tenir compte du rapport et des conseils du médecin et prendre des mesures visant à les concrétiser » ; l’article 37 dispose ce qui suit : « Si un hôpital pénitentiaire n’est pas en mesure d’assurer certains soins particuliers aux détenus et que le médecin pénitentiaire estime qu’il devrait être traité dans un hôpital externe, il doit rédiger un rapport à ce sujet et le transmettre au service médical de l’administration pénitentiaire, en vue de l’adoption de toute mesure appropriée. En cas d’urgence, le médecin pénitentiaire peut prendre les mesures qu’il juge nécessaires afin de préserver la santé du détenu et présenter immédiatement un rapport médical à l’administration pénitentiaire. Si le médecin estime que l’état de santé du patient nécessite l’avis d’un spécialiste, il doit demander l’autorisation de l’administration pénitentiaire afin de solliciter son aide et, en cas d’urgence, l’autorisation doit être obtenue par téléphone. Le médecin de la prison peut autoriser les détenus à recevoir des médicaments de l’extérieur s’il le juge nécessaire » ;

L’article 38 de la loi régissant les établissements pénitentiaires, qui dispose ce qui suit : « Conformément aux dispositions du Code de procédure pénale, toute personne condamnée a le droit d’envoyer et de recevoir du courrier, de passer et de recevoir des appels téléphoniques à ses frais, ainsi que celui de bénéficier de visites de ses proches deux fois par mois, sous la surveillance et le contrôle de l’administration pénitentiaire et conformément aux règles et procédures établies par le règlement intérieur » ; les mêmes droits sont accordés aux personnes en détention provisoire, à moins que le parquet ou le juge d’instruction compétent n’en décide autrement, conformément aux procédures définies par le règlement intérieur et l’administration pénitentiaire veille à ce que les visiteurs soient bien traités et à ce que des salles d’attente et des zones de visite appropriées soient prévues ; selon l’article 40 de la même loi : « Le procureur général, l’avocat général et l’adjoint du Ministre chargé de l’administration pénitentiaire ou son représentant sont habilités, le cas échéant, à accorder aux détenus le droit de recevoir la visite de leurs proches hors des horaires habituels de visite » ; l’article 60 du texte d’application de la loi garantit le droit des détenus aux visites en ces termes : « Toute personne condamnée à une peine d’emprisonnement correctionnel ou placée en détention provisoire, a le droit d’envoyer et de recevoir du courrier à tout moment, ainsi que de recevoir la visite de ses proches une fois par semaine, sauf le vendredi et les jours fériés, à moins que le parquet ou le juge d’instruction n’en décide autrement en ce qui concerne les personnes placées en détention provisoire conformément aux dispositions de l’article 141 du Code de procédure pénale » ; l’article 64 dispose également ce qui suit : « Toute personne condamnée à une peine privative de liberté a le droit d’envoyer quatre courriers par mois à compter de la date du début de l’exécution de sa peine et de recevoir du courrier conformément aux règles énoncées à l’article 61 du règlement intérieur. Les proches des détenus condamnés sont autorisés à leur rendre visite tous les quinze jours, à compter d’un mois à partir de la date du début de l’exécution de la peine, sous réserve de bonne conduite desdits détenus au sein de l’établissement pénitentiaire » ; selon l’article 64 bis : « Toute personne condamnée a le droit de téléphoner pendant une durée maximale de trois minutes deux fois par mois à compter de la date à laquelle elle est autorisée à recevoir des visites et de communiquer une fois par semaine avec ses proches pendant les visites, conformément aux règlements et instructions de fonctionnement établis par décision de l’adjoint du Ministre chargé de l’administration pénitentiaire après approbation du Ministre de l’intérieur, sauf si cela constitue un danger pour la sécurité publique et sous réserve de bonne conduite de cette personne au sein de l’établissement pénitentiaire. Les appels téléphoniques peuvent être provisoirement interdits en cas de circonstances particulières ou de raisons de sécurité impérieuses. En cas de nécessité, la personne condamnée est autorisée à passer des appels téléphoniques sur autorisation du Ministre de l’intérieur. Toute personne placée en détention provisoire est autorisée, selon les mêmes règles, à passer des appels téléphoniques, à moins que le parquet ou le juge d’instruction n’en décide autrement conformément aux dispositions de l’article 141 du Code de procédure pénale » ;

L’article 38 bis de la même loi, qui dispose ce qui suit : « L’adjoint du Ministre chargé de l’administration pénitentiaire autorise les représentants des ambassades et consulats à rendre visite aux détenus originaires des États qu’ils représentent ou dont ils défendent les intérêts et à leur apporter toute l’assistance nécessaire, sous réserve de réciprocité » ;

L’article39, qui énonce ce qui suit : « Toute personne détenue a le droit de s’entretenir en privé avec son avocat, à sa demande ou à celle de son conseil, sous réserve d’une autorisation écrite du ministère public et du juge d’instruction ».

Article 12Enquête sur les actes de torture

100.Comme mentionné dans les rapports précédents, les autorités compétentes procèdent immédiatement à une enquête impartiale chaque fois qu’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un acte de torture ou autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants a été commis en tout lieu relevant de leur juridiction. Les constitutions égyptiennes successives ont toujours consacré le principe de la primauté du droit en tant que fondement de l’exercice des pouvoirs. Elles ont également toujours affirmé que la primauté de la loi et l’indépendance et l’immunité de la magistrature constituaient des garanties fondamentales de protection des droits et libertés. Les dispositions du titreIV de la Constitution en vigueur garantissent la mise en œuvre de ces principes.

101.Conformément aux dispositions de l’article189 de la Constitution et de l’article199 du Code de procédure pénale, le parquet, en tant que partie intégrante de l’ordre judiciaire, a compétence exclusive pour enquêter, mettre en mouvement l’action publique et instruire les affaires pénales. Les principes d’impartialité et d’intégrité au cours de l’enquête sont consacrés à l’article123 (par.1) du Code de procédure pénale qui dispose ce qui suit : « Lejuge d’instruction doit vérifier l’identité de tout accusé qui comparaît pour la première fois devant lui, l’informer des charges qui pèsent contre lui et consigner ses déclarations dans un procès-verbal ». L’article160 des directives judiciaires régissant le fonctionnement du parquet dispose ce qui suit : « L’enquêteur traite l’accusé dans le respect de sa dignité et de son humanité, en évitant tout recours à des méthodes ou à des expressions susceptibles de porter atteinte à la dignité humaine… ». Selon l’article226 : « Les membres du parquet doivent éviter que des agents de police soient présents pendant l’instruction, afin que cela n’influe pas sur les déclarations des parties au procès. Cependant, la simple présence de policiers au cours de l’instruction ne constitue pas en elle-même une contrainte susceptible d’influencer les aveux d’un accusé, à moins qu’il ne soit établi que la peur qu’ils suscitent a effectivement affecté sa volonté et l’a conduit à faire de tels aveux ». L’article227 des directives énonce ce qui suit : « Les membres du parquet doivent user de leur sens de l’observation pour évaluer le comportement des accusés et des témoins. S’ils concluent qu’une personne investie d’une autorité ou un représentant de l’une des parties au procès exerce, de par sa présence, une influence sur les accusés ou les témoins, ils doivent l’inviter à quitter temporairement la salle où se déroule l’instruction et rassurer les personnes entendues quant au respect du caractère confidentiel de leur déposition ». L’article64 du Code de procédure pénale accorde la compétence aux juges d’instruction désignés par le tribunal de première instance, à la demande du ministère public, d’enquêter, de mettre en mouvement l’action publique et d’instruire les affaires pénales, dans le cadre des garanties d’indépendance et d’impartialité du pouvoir judiciaire consacrées par la Constitution et parla loi.

102.La loi sur les forces de police confie à la Direction générale de l’inspection du Ministère de l’intérieur la mission d’enquêter sur les infractions disciplinaires impliquant des officiers et à la Direction générale des affaires du personnel de la police celle d’instruire les infractions disciplinaires imputables au personnel.

103.Le Code de procédure pénale confie au parquet la mission d’enquêter sur les infractions commises par les officiers de police judiciaire et d’engager des procédures disciplinaires à leur égard. En effet, l’article22 du Code dispose ce qui suit : « Les officiers de police judiciaire sont placés sous l’autorité et le contrôle du Procureur général dans l’exercice de leurs fonctions. Le Procureur général peut demander aux autorités compétentes d’ouvrir une enquête au sujet de tout officier de police judiciaire accusé de manquement à ses devoirs ou de négligence et de lancer une procédure disciplinaire à son égard, sans préjudice des poursuites pénales susceptibles d’être engagées par ailleurs ».

104.Selon les articles53 et 54 de la loi sur les forces de police, tout officier placé en détention provisoire pendant une procédure d’enquête ou détenu dans le cadre de l’exécution d’une sanction pénale est suspendu de plein droit de ses fonctions pendant toute la durée de sa détention. En dehors de ces deux cas, un officier peut faire l’objet d’une exclusion temporaire de ses fonctions si l’intérêt de l’enquête l’exige. En règle générale, un officier soupçonné d’avoir commis une forme quelconque de torture est suspendu et ne peut réintégrer ses fonctions qu’une fois définitivement acquitté, même s’il ne fait l’objet d’aucune mesure de détention provisoire.

105.Entre le 1erjanvier 2010 et le 10avril 2019, des enquêtes et des poursuites pénales ont été engagées dans 485affaires dans le cadre desquelles des membres des forces de police étaient accusés de torture dans 41cas, d’actes de cruauté dans 117cas et de mauvais traitements et de détention illégale dans 327cas. Il y a eu condamnation dans 120cas, 302affaires ont été classées et 63 sont toujours en cours. En outre, au cours de la même période, sur les 1788procédures disciplinaires engagées contre des membres des forces de police impliqués dans des actes ne relevant pas de la torture ou de mauvais traitements ou ayant fait l’objet de condamnations pénales, 1 069 ont abouti à des sanctions disciplinaires, 622affaires ont été classées et 97 sont en cours.

Article 13Droit des victimes d’actes de torture de porter plainte devant les autorités compétentes

106.Le système égyptien garantit le droit de porter plainte à toute personne prétendant avoir été soumise à la torture ou à d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, l’ouverture immédiate d’une enquête impartiale et la protection du plaignant et des témoins contre tout mauvais traitement ou acte d’intimidation. L’article25 du Code de procédure pénale autorise quiconque ayant eu connaissance d’une infraction à la signaler au ministère public ou à un officier de police judiciaire. L’article43 affirme expressément le droit de quiconque apprend qu’une personne est détenue illégalement ou en un lieu non destiné à cet effet de porter plainte auprès du ministère public. Pour sa part, l’article26 oblige tout fonctionnaire ou agent public à signaler toute infraction dont il a connaissance dans le cadre de l’exercice de ses fonctions ou en raison de celles-ci. De son côté, l’article24 impose aux officiers de police judiciaire l’obligation de recevoir les plaintes relatives à des infractions et de les transmettre sans délai au ministère public, de recueillir tous les éléments susceptibles de faire avancer les enquêtes, de prendre les mesures nécessaires à la conservation des éléments de preuve et de consigner tous les actes dans des procès-verbaux qui doivent être transmis au ministère public.

107.L’article42 du Code de procédure pénale autorise également les membres du parquet, les juges d’instruction et les présidents des tribunaux de première instance et des cours d’appel, au cours de leurs visites dans les prisons générales et les prisons centrales placées sous leur juridiction, à s’entretenir avec tout détenu et à recueillir ses plaintes. L’article43 du même code reconnaît à chaque détenu le droit de déposer à tout moment une plainte écrite ou orale auprès du directeur de la prison et de lui demander de la transmettre au parquet ou aux juges d’instruction. Le directeur de prison est tenu d’accepter la plainte et de la transmettre immédiatement à l’autorité compétente, après l’avoir consignée dans un registre prévu à cet effet, lequel est soumis au contrôle des autorités judiciaires et administratives. L’article73 de la loi régissant les établissements pénitentiaires autorise l’adjoint du Ministre chargé de l’administration pénitentiaire à recevoir les plaintes des détenus et à les transmettre au parquet compétent.

108.Les articles11 et 12 du Code de procédure pénale autorisent également les tribunaux pénaux et la Cour de cassation, en cas de constat d’infractions de nature criminelle ou délictuelle lors d’un procès pénal, par eux-mêmes ou suite à une plainte, ycompris celles visées par la Convention, à engager des poursuites pénales contre les accusés et de les présenter au parquet afin de procéder à une enquête ou de renvoyer l’affaire devant un autre tribunal.

109.L’article99 de la Constitution confie de nouvelles compétences au Conseil national des droits de l’homme, lequel peut désormais rapporter au Procureur général toute violation de ces droits et se constituer partie civile à la demande des plaignants. L’article3 de la loi instituant le Conseil national des droits de l’homme, telle que modifiée par la loi no197 de 2017, ainsi que l’article73 de la loi relative aux établissements pénitentiaires, telle que modifiée par la loi no106 de 2015, comportent davantage de détails au sujet des nouvelles dispositions introduites dans la Constitution et accordent au Conseil national des droits de l’homme le droit de visiter les prisons et de recueillir les plaintes des détenus.

110.Le Code de procédure pénale met à la charge des organes chargés de l’instruction l’obligation d’ouvrir une enquête au sujet de toute infraction qualifiée de crime, conformément aux dispositions légales. De plus, bien que la loi n’impose pas l’ouverture d’une enquête au sujet des infractions constitutives de délits ou de contraventions, cette obligation est posée par les articles122-145 des directives judiciaires régissant le fonctionnement du parquet et concerne toutes les infractions (contraventions, délits et crimes) impliquant des officiers de police lorsqu’elles sont commises dans le cadre de l’exercice de leurs fonctions ou en raison de celles-ci, ou si elles portent sur des incidents ayant eu lieu dans les prisons, à moins qu’elles ne présentent qu’une importance mineure. En cas de plainte contre un agent pénitentiaire, les mêmes directives imposent aux membres du parquet de se rendre sur le lieu de détention afin de procéder sans délai à une enquête.

111.Lorsque le ministère public décide de classer une plainte sans suite et de ne pas ouvrir d’enquête ou d’abandonner les poursuites pénales à l’issue d’une enquête, le Code de procédure pénale prévoit la possibilité d’un recours gracieux après de l’auteur de la décision ou d’une autorité supérieure, visant à l’annuler et à poursuivre les investigations. Afin de conférer davantage de rigueur aux enquêtes, l’article44 impose aux autorités chargées de l’instruction, à savoir le ministère public ou le juge d’instruction, l’obligation de rendre compte des résultats de l’enquête à la victime, même lorsque celle-ci ne se constitue pas partie civile, en vue de renforcer l’efficacité des investigation et permettre aux victimes d’exercer leur droit de recours.

112.Un Département des droits de l’homme chargé de recevoir et d’examiner les plaintes et de prendre les mesures appropriées en vue d’y donner suite a été créé et rattaché au bureau du procureur général par la décision no2034 de 2017, en tant que mécanisme indépendant et accessible de traitement des plaintes relatives aux violations des droits de l’homme en général. Ce Département est chargé de recueillir les plaintes, communications et rapports relatifs aux droits de l’homme. Les plaintes sont examinées et étudiées et celles dont le bien‑fondé est établi font l’objet d’une enquête, puis transmises à tous les parquets compétents afin qu’ils prennent les mesures nécessaires, après soumission au procureur général. LeDépartement assure également le suivi de toutes les affaires relatives aux droits de l’homme instruites par le parquet. De sa création à septembre 2019, le Département a reçu 2249communications, dont 662 émanant d’organismes publics, 765 de citoyens via les réseaux sociaux, 174 du Conseil national des droits de l’homme, 515 du Conseil national de l’enfance et de la maternité, 61 reçues directement par le département et 72 en provenance des parquets territorialement compétents. Il a examiné et instruit 1 986 plaintes et 263 sont en cours d’examen.

113.Le Ministère de l’intérieur a également mis en place une Direction des droits de l’homme chargée de veiller au respect de la Constitution, des lois et des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme par les officiers et agents dans le cadre de l’exercice de leurs fonctions, ainsi que de recevoir les plaintes émanant de particuliers concernant toute allégation de violation des droits de l’homme, directement, par courriel ou par téléphone. À son tour, cette direction a institué un Bureau des droits de l’homme auprès de chaque poste de police et l’a chargé de superviser les services, de vérifier que les citoyens sont bien traités, de recueillir les plaintes et de prendre les mesures nécessaires afin d’y donner suite.

114.L’article214 de la Constitution accorde au Conseil national dédié aux femmes, au Conseil national chargé de l’enfance et de la maternité et au Conseil national s’occupant des personnes handicapées le droit de signaler aux autorités publiques toute atteinte à leurs activités. Les lois régissant les travaux de ces instances prévoient également des mécanismes de réception des plaintes. L’article85 de la Constitution reconnaît à tout individu le droit de s’adresser aux autorités publiques par un écrit signé. Aux termes de l’article138, tout citoyen peut déposer une plainte auprès de la Chambre des représentants, qui doit être transmise aux ministres compétents. Si la Chambre le demande, les ministres doivent fournir les clarifications demandées et le plaignant doit être informé de la suite donnée à sa plainte, conformément au règlement intérieur de la Chambre des représentants.

115.Enfin, l’article96 (par.2) de la Constitution impose l’obligation « d’assurer la protection des victimes, des témoins, des prévenus et des informateurs, lorsque cela est approprié, conformément à la loi ». Le Code de procédure pénale pose les règles régissant la protection des témoins, déjà abordées dans le quatrième rapport. Comme indiqué plus haut dans le présent rapport, le Gouvernement a présenté un projet de loi modifiant certaines dispositions du Code de procédure pénale, prévoyant davantage de protection au profit des témoins, des informateurs et des victimes et permettant aux témoins, sur autorisation du ministère public ou du juge d’instruction compétent, d’indiquer les locaux d’un commissariat de police comme étant leur lieu de résidence ou de déclarer comme domicile l’adresse de leur lieu de travail. Lorsque l’audition d’une personne est susceptible de mettre en danger sa vie ou sa sécurité ou celle d’un membre de sa famille, le tribunal de première instance, le premier avocat général ou le juge d’instruction peut, à la demande de cette personne ou d’un officier de police judiciaire, autoriser à recueillir son témoignage sans faire apparaître son identité dans les documents du procès, mais un dossier distinct de celui du procès a vocation à être créé, indiquant l’identité et les données personnelles de ladite personne. Lorsque la connaissance de l’identité d’une personne est indispensable à l’exercice des droits de la défense, le projet de loi autorise également, le prévenu ou son conseil à contester la décision du premier avocat général ou du juge d’instruction de dissimuler des données personnelles devant le tribunal pénal, dans les dix jours à compter de la date à laquelle il a eu connaissance du contenu d’un témoignage. Le juge statue par décision motivée insusceptible de recours au sujet de l’appel, après audition des parties et sans préjudice du droit du tribunal de première instance d’ordonner l’annulation de la décision ou de citer la personne à comparaître. Lestribunaux peuvent également autoriser tout prévenu, au cours d’un procès, à demander une confrontation avec la personne ayant fait l’objet d’une décision ordonnant la confidentialité de son identité (témoin) et d’ordonner qu’il soit procédé à son interrogatoire via un dispositif technique permettant d’entendre ses déclarations à distance sans révélation de son identité. Aux termes du projet de loi, la divulgation de l’identité d’une personne ayant fait l’objet d’une décision de confidentialité est punie d’emprisonnement et/ou d’une amende d’au moins 50000livres et, en cas d’intention terroriste, les travaux forcés à temps peuvent être prononcés. En tout état de cause, si la révélation d’identité entraîne le décès de la personne concernée, c’est la peine de mort qui a vocation à être prononcée contre l’auteur de ladivulgation.

Article 14Droit de la victime d’un acte de torture d’obtenir réparation

116.L’article99 de la Constitution affirme que toute atteinte à la liberté personnelle, à la vie privée des citoyens et aux autres droits et libertés garantis par la Constitution et à la loi, constitue une infraction qui ne peut être prescrite au pénal comme au civil et que la victime est en droit d’engager une action pénale en citation directe. Le même article dispose que l’État garantit une juste réparation à toute personne qui en a été victime. Cette disposition constitue une garantie importante en cas d’actes de torture, en ce sens que ceux-ci constituent une atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution, comme confirmé par les articles15 et 259 du Code de procédure pénale, tel que modifié par la loi no16 de 2015.

117.Conformément aux règles de droit commun, la loi accorde aux victimes et à toute personne ayant subi un préjudice du fait d’une telle infraction le droit d’intenter une action civile devant les tribunaux. Les mêmes poursuites peuvent également être engagées contre les personnes civilement responsables des actes d’un accusé. Le montant de l’indemnisation est à la discrétion des juges, lesquels, avant de se prononcer, doivent tenir compte des conséquences de la torture, ycompris, le cas échéant, le coût de la réadaptation. Le droit d’intenter une action civile et de réclamer réparation appartient aux héritiers de la victime en cas de décès de celle‑ci du fait d’un acte de torture, sachant qu’elle inclut deux catégories d’indemnisations, à savoir celle visant à réparer tout préjudice subi par les héritiers (prévisible ou non, matériel, moral), complétée par la compensation du préjudice matériel subi par le testateur.

118.La jurisprudence de la Cour de cassation se fonde sur les dispositions de la Convention en tant fondement de l’indemnisation des victimes de torture, en considérant qu’elles ont la même force que les lois nationales. La Cour estime que le droit des victimes de torture à une indemnisation découle de l’adhésion de l’Égypte à la Convention et du caractère inadmissible des actes de torture, quelles que soient les circonstances dans lesquelles ils sont commis ou les autorités qui ordonnent de les commettre.

119.La Cour de cassation confirme ainsi la volonté de l’Égypte de respecter le principe de la primauté du droit et d’honorer ses obligations internationales en matière de lutte contre la torture et d’indemnisation des victimes, en mettant à la charge du pouvoir exécutif et de l’État dans son ensemble la responsabilité de la réparation des dommages causés aux victimes.

Article 15Irrecevabilité des aveux obtenus par la torture

120.En droit égyptien, il existe un principe constitutionnel et juridique selon lequel les déclarations dont il est établi qu’elles ont été obtenues sous la torture ne peuvent pas être invoquées comme éléments de preuve. En effet, l’article55 de la Constitution affirme que toute déclaration d’un détenu dont il est établi qu’elle a été faite sous la torture, l’intimidation, la contrainte, la pression physique ou psychologique ou la menace, est nulle et non avenue. Aux termes de l’article302 du Code de procédure pénale, aucune valeur n’est accordée aux déclarations d’un prévenu ou d’un témoin dont il a été établi qu’elles ont été obtenues sous la contrainte ou la menace et il convient de faire en sorte que les auteurs de ces pratiques aient à rendre des comptes. Ce principe constitue une garantie fondamentale que tous les types de tribunaux se doivent d’appliquer. En outre, ce principe doit être appliqué en toute circonstance, ycompris lorsque la loi sur l’état d’urgence est en vigueur. Le Code pénal égyptien ne précise pas le degré de souffrance ou de torture que doit éprouver la victime pour que soit retenue l’infraction de torture. Aussi, la disposition selon laquelle certaines déclarations ne peuvent être invoquées comme élément de preuve s’étend-elle à toutes les formes ou menaces de sévices et de préjudice physique ou moral ou d’emprisonnement en des lieux autres que les endroits prévus par les textes régissant les établissements pénitentiaires.

121.La Cour de cassation a statué à plusieurs reprises sur ce principe, en déclarant irrecevable toute preuve, de quelque nature que ce soit, verbale ou matérielle, découlant d’un aveu obtenu sous la contrainte ou via une quelconque forme de torture, de traitement inhumain, de menaces ou de pressions directes ou indirectes. Le fait que le tribunal n’applique pas ce principe et ne donne pas suite à la requête de la défense constitue un motif juridiquement valable de contestation du jugement rendu. Les décisions judiciaires successives ne prennent pas en considération les aveux obtenus sous la contrainte afin d’établir la culpabilité d’un prévenu, même s’ils sont exacts et conformes aux autres preuves légitimes produites au cours du procès. La légitimité procédurale prévaut donc, même si elle peut soustraire un criminel à une sanction, en raison de considérations plus élevées consacrées par la Constitution et la loi.

122.Quelques cas de jurisprudence dans lesquels la Cour de cassation a déclaré irrecevables des aveux dont il a été établi qu’ils avaient été obtenus sous la torture et la contrainte sont présentés ci-après :

Une personne a été inculpée de meurtre intentionnel et prémédité par le ministère public, qui l’a accusée d’avoir attiré sa victime dans un endroit isolé, avec la complicité d’une autre personne agissant de bonne foi, puis d’avoir exercé une pression manuelle sur le cou de la victime dans l’intention de la tuer, lui causant des blessures correspondant à celles décrites dans le rapport du médecin légiste, qui ont provoqué son décès ; le ministère public a renvoyé l’accusé devant le tribunal pénal, qui l’a condamné aux travaux forcés à perpétuité, mais le jugement a ensuite été contesté en cassation et la Cour a conclu que les aveux de l’accusé avaient été obtenus sous la contrainte des policiers et n’a pas pris en compte les autres éléments de preuve produits ; en conséquence, elle a décidé d’annuler la sentence et de juger l’affaire à nouveau, au motif que les aveux avaient été déclarés irrecevables ;

Un homme et une femme ont été inculpés du meurtre du mari de cette dernière par le ministère public et les deux inculpés ont reconnu les faits qui leur avaient été reprochés au cours de l’instruction, tandis que d’autres preuves matérielles ont conforté ces aveux ; le tribunal pénal a déclaré les prévenus coupables et les a condamnés à la peine de mort, mais sur appel du parquet interjeté conformément à la loi, la Cour a annulé le jugement et prononcé l’acquittement au motif que des témoignages concordants recueillis au cours de l’enquête finale avaient révélé l’existence de pressions exercées sur les prévenus : la Cour a estimé que la légalité procédurale, qu’elle soit liée à l’impartialité de l’enquêteur ou au respect de la liberté personnelle et de la dignité humaine de l’accusé, ainsi que les droits de la défense, étaient des principes juridiques inscrits dans la Constitution et la loi et protégés par la magistrature, non seulement dans l’intérêt des personnes accusées, mais surtout dans l’intérêt général, qui exige le respect de la présomption d’innocence et la restauration de la confiance du public en la justice;

123.Il convient de noter que le système juridique et judiciaire égyptien utilise les preuves indirectes ou circonstancielles, sur lesquels se fondent souvent les tribunaux afin de prononcer un jugement. Il existe deux types de preuves circonstancielles, à savoir les présomptions légales instaurées par la loi qui acquièrent force probante dès qu’elles existent et la preuve judiciaire qu’il appartient au juge d’évaluer souverainement, conformément à la loi et aux faits de l’espèce dont il est saisi. Toutefois, les preuves fondées sur des aveux obtenus sous la torture ou via d’autres traitements inhumains ne peuvent pas être considérées comme des preuves circonstancielles ou indirectes, car toute preuve doit provenir d’une source légale.

Article 16Interdiction des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

124.Les articles117, 127 et 280 du Code pénal incriminent toutes les formes de traitements inhumains ou dégradants infligés par un agent de la fonction publique. Celacomprend toutes les formes de pratiques inhumaines autres que la torture commises par des fonctionnaires, notamment les agressions physiques, quelle que soit leur nature, verbales ou à connotation sexuelle, lorsqu’elles portent atteinte à l’honneur des citoyens ou leur causent des souffrances physiques. Toutes les formes de ces pratiques sont érigées en infractions passibles de peines proportionnelles à leur gravité, variables en fonction de leur nature criminelle ou correctionnelle. Les textes concernés sont les suivants :

L’article117, qui incrimine l’abus de fonction des agents publics en vue de forcer une personne à exécuter une tâche pour le compte d’un organisme public ou de retenir, sans raison valable, une partie ou l’intégralité de son salaire ; considérés comme des formes de traitements inhumains pouvant être assimilés à la torture, ces actes sont passibles d’une peine d’emprisonnement en régime carcéral sévère ;

L’article127, qui incrimine le fait pour un fonctionnaire, d’ordonner ou d’appliquer à une personne condamnée une peine plus lourde que celle prononcée à son encontre ; ceci est passible d’emprisonnement même si un tel comportement ne laisse pas de traces sur le corps de la victime;

L’article129, qui incrimine l’abus de fonction des agents publics lorsqu’ils se livrent à des actes de cruauté portant atteinte à la dignité d’une personne ou lui causant des souffrances physiques et réprime un tel comportement d’une sanction délictuelle ; la formulation de cet article est suffisamment large pour couvrir toutes les formes de mauvais traitements que des agents publics peuvent faire subir à des personnes, en abusant des pouvoirs conférés par leurs fonctions ou par les services qu’ils rendent au public et ces dispositions s’étendent également à tous les actes portant atteinte à l’intégrité physique des personnes, quelle que soit leur forme et la manière dont ils sont infligés, même s’ils ne laissent aucune trace sur le corps des victimes, ainsi qu’aux violences verbales ou autres propos portant atteinte à l’honneur et à la considération des personnes, que l’auteur ait l’intention de punir la victime ou que son acte soit motivé par la discrimination ou tout autre motif ;

L’article280, qui érige en infraction le fait d’arrêter, d’emprisonner, de détenir ou de priver une personne de sa liberté par quelque moyen que ce soit, sans mandat émanant d’une autorité compétente ; en tant qu’infraction qui prépare ou facilite la commission de la torture, cette incrimination complète le système de prévention et de protection des personnes contre la torture et autres pratiques inhumaines ; elle est passible d’une peine de trois ans d’emprisonnement ou d’une amende, la peine étant l’emprisonnement ou le placement en régime carcéral sévère en cas de circonstances aggravantes.

125.Les conditions de vie dans les prisons et les lieux de détention ont été abordées à l’occasion des commentaires au sujet des articles2 et 11 de la Convention, ainsi que dans les rapports précédents.

126.L’article112 du Code de l’enfance, tel que modifié par la loi no126 de 2008, interdit de détenir ou d’emprisonner en un même lieu un mineur avec des adultes, les conditions de détention devant être déterminées selon l’âge, le sexe et la nature du délit. Tout fonctionnaire public ou agent chargé d’une mission d’intérêt général qui place en détention ou emprisonne en un même lieu un mineur en compagnie d’un ou de plusieurs adultes est passible d’un emprisonnement de trois mois à deux ans et/ou d’une amende de 1 000 à 5000livres. L’article13 de la loi régissant les établissements pénitentiaires, telle que modifiée par la loi no106 de 2015, dispose que les détenus doivent être répartis en au moins trois catégories. Lerégime et les conditions de détention de chaque catégorie sont définis par décision du Ministre de l’intérieur, prise sur proposition de l’adjoint du Ministre chargé de l’administration pénitentiaire, après approbation du procureur général. Le règlement intérieur de chaque établissement fixe les critères de classification des détenus et de leur passage d’une catégorie à une autre, en tenant compte de l’âge de chacun. L’article82bis du règlement intérieur des établissements pénitentiaires impose, dans chaque prison, la mise en place d’une commission présidée par le directeur de l’établissement ou son représentant, choisi parmi les agents pénitentiaires, et composée d’un surveillant pénitentiaire, d’un agent d’exécution des peines, d’un agent de détention, d’un médecin et d’un travailleur social. Cette commission a pour mission de classer les détenus en fonction de divers paramètres, à savoir la nature de l’infraction pour laquelle ils ont été condamnés, la durée de leurs peines respectives, leurs antécédents judiciaires et leur degré de dangerosité, ainsi que leur âge, leur état de santé et leur statut socioculturel.

127.Les autorités chargées de la gestion des centres de détention mettent en place de nombreux programmes et services visant à assurer la réinsertion des mineurs placés dans les établissements pénitentiaires et les centres de protection sociale, ainsi que des soins de santé dispensés quotidiennement par des médecins et infirmières détachés du Ministère de la santé auprès des infirmeries des prisons et des centres de protection sociale. Des visites de médecins spécialisés et des caravanes médicales sont organisées afin de faire bénéficier les mineurs d’examens médicaux périodiques et des traitements dont ils ont besoin, des salles isolées étant prévues pour le traitement des maladies infectieuses. L’État assure l’accès des détenus mineurs aux différents cycles de l’enseignement, en fonction de leur âge, et prend en charge les frais de scolarité et le coût des fournitures scolaires. Les mineurs font l’objet d’un suivi régulier de leur niveau et de leur assiduité scolaire. Ils bénéficient en outre d’une formation aux métiers de l’artisanat dès qu’ils atteignent l’âge légal prescrit à cette fin, afin de les aider à s’insérer sur le marché du travail une fois leur peine purgée et leur permettre d’accéder à une source de revenus en vue de leur éviter les risques de récidive. Desprogrammes de réadaptation sociale et psychologique sont également déployés au profit des mineurs par des sociologues et psychologues qualifiés afin d’assurer leur réinsertion sociale, ainsi que des activités sociales, religieuses, sportives, culturelles et récréatives, ycompris des concours et compétitions et des visites de sites archéologiques et récréatifs. Des cours, conférences et séminaires portant sur des questions culturelles et religieuses, ainsi que des compétitions sportives variées sont également organisés afin d’offrir aux mineurs la possibilité de s’adonner à des loisirs de leur choix. Des journaux, magazines hebdomadaires, livres et autres publications, qui tiennent compte de l’âge et des centres d’intérêt des mineurs leur sont également proposés quotidiennement. Dans le cadre des programmes de réinsertion des mineurs libérés, le Ministère de l’intérieur fournit une assistance matérielle et s’efforce de leur proposer des possibilités d’emploi appropriées.

128.Il existe des prisons réservées uniquement aux femmes, où elles sont surveillées par un personnel exclusivement féminin. Ces établissements disposent de tous les équipements et services nécessaires à leur bon fonctionnement. Des modifications ont été apportées à la loi régissant les établissements pénitentiaires et aux règlements qui s’y rapportent afin d’assurer une prise en charge adéquate des mères détenues. Ainsi, les détenues enceintes bénéficient d’un régime de détention spécifique et peuvent garder leurs enfants auprès d’elles jusqu’à l’âge de deux ans. Le Code de l’enfance prévoit la création d’une garderie conforme aux conditions requises des établissements de garde d’enfants dans chaque prison pour femmes, chargées d’accueillir les enfants des détenues et de veiller à ce qu’elles ne soient pas privées du droit d’en prendre soin pour des raisons disciplinaires. L’article4 du décret d’application de la loi relative aux établissements pénitentiaires dispose ce qui suit : « À l’intérieur de l’établissement pénitentiaire, les femmes détenues ne doivent effectuer que des travaux compatibles avec leurs aptitudes ». Conformément aux dispositions de l’article68 de la loi régissant les établissements pénitentiaires, telle que modifiée par la loi no106 de 2015, l’exécution d’une femme enceinte condamnée à mort n’est possible que deux ans après l’accouchement.

129.Dans le cadre de la prévention des traitements cruels ou inhumains et de la promotion de conditions de détention plus respectueuses de l’être humain et adéquates, l’Égypte a pris un certain nombre de mesures visant à lutter contre la surpopulation carcérale, parmi lesquelles les suivantes :

Le recours au droit de grâce et à la réduction des peines par le Président de la République, conformément à l’article155 de la Constitution, lors d’événements ou de fêtes nationales : de 2015 à février 2019, 56000détenus ont bénéficié d’une grâce présidentielle ;

La modification, par la loi no6 de 2018, des règles régissant la remise en liberté prévues par la loi relative aux établissements pénitentiaires, puisqu’il est désormais possible pour les détenus de bénéficier d’une libération anticipée s’ils ont exécuté la moitié de leur peine au lieu des trois quarts exigés auparavant, à condition que la peine d’emprisonnement ne soit pas inférieure à six mois ; toutefois, s’il s’agit d’une peine de réclusion à perpétuité, ils ne peuvent être libérés qu’après avoir purgé au moins vingt ans de prison, sachant qu’une liste nominative des personnes susceptibles de bénéficier d’une libération anticipée est remise au Ministère de la sécurité sociale au moins deux mois avant la date prévue de remise en liberté, afin de leur offrir une réadaptation sociale les préparant au retour à la vie hors de la prison ;

La libération des détenus conformément aux règles régissant la mise en liberté médicale, en application de l’article36 de la loi régissant les établissements pénitentiaires, qui oblige les médecins pénitentiaires, en cas de diagnostic d’une pathologie engageant le pronostic vital d’un détenu ou totalement invalidante, d’en informer le directeur des services de santé de l’établissement afin de soumettre le détenu concerné à un examen, mené conjointement avec un médecin légiste, en vue de sa libération ; la décision de remise en liberté est exécutée par l’adjoint du Ministre chargé de l’administration pénitentiaire et l’approbation du procureur général : de 2015 à février 2019, 60876détenus ont bénéficié d’une libération pour raisons médicales ;

La mise en œuvre de mesures de substitution à la détention provisoire, en application de l’article201 du Code de procédure pénale, tel que modifié par la loi no145 de 2006, qui autorise désormais les autorités chargées de l’enquête, d’imposer l’une des mesures suivantes au lieu de la détention provisoire : l’obligation mise à la charge de l’accusé : a)de ne pas quitter son domicile ou son lieu de résidence ; b)de se présenter périodiquement dans les locaux de la police ; et c)de ne pas se rendre en des lieux déterminés, sachant que ces mesures sont régies par les règles établies pour la détention provisoire en ce qui concerne leur objet, la durée et la procédure de leur détermination et de leur prorogation ;

Le lancement de l’initiative « Prisons sans Gharimine (débiteurs d’amendes) », menée en collaboration avec le Ministère de l’intérieur et la société civile, afin d’apurer les amendes infligées aux détenus indigents au titre d’infractions mineures, en vue de les libérer, grâce à un financement du Fonds Tahya Masr (Vive l’Égypte) alimenté par des contributions volontaires : depuis 2015, 15820prisonniers ont bénéficié d’une libération dans le cadre de cette initiative ;

L’élaboration d’un plan visant à créer de nouveaux établissements pénitentiaires et de rénover et agrandir les prisons existantes, conformément aux recommandations du ministère public, de la Commission des droits de l’homme de la Chambre des représentants et du Conseil national des droits de l’homme ; ces projets consistent notamment en la construction de la prison d’El-Qantara à l’est d’Alexandrie, l’achèvement de la quatrième phase de construction de la zone carcérale d’Al-Minya, la réalisation des travaux de sécurisation de la zone carcérale de Wadi Al-Natrun, la reconstruction des pavillonsB) et C) de la prison générale d’Alexandrie, la construction de bâtiments dans la prison générale de Damanhour, la rénovation de la prison no2 Assahraoui de Wadi Al-Natrun, la création de l’Office du secteur pénitentiaire de la zone carcérale de Tora B), la construction de la nouvelle prison générale de Qena, l’achèvement de la deuxième phase de construction de la prison de haute sécurité no2 de Petra et la construction de nouveaux bâtiments dans les prisons existantes ; en outre, de nouvelles installations ont été inaugurées, à savoir la prison générale no1 située à Wadi Al-Natrun, la prison de haute sécurité (pénitencier) de Jumsa, la prison de haute sécurité (pénitencier) d’Al-Minya et la prison de haute sécurité no2 de Petra ; enfin, les prisons existantes ont acquis des aspirateurs et ventilateurs afin d’améliorer la ventilation, ainsi que des rafraîchisseurs d’eau, ce qui a contribué à améliorer l’état de santé de 32,95 %.

130.La peine de flagellation a été abolie par la loi no152 de 2001, en tant que dernier châtiment corporel considéré comme une peine ou un traitement cruel, inhumain ou dégradant. Des modifications ont été apportées à la loi régissant les établissements pénitentiaires par la loi no106 de 2015, notamment à son article43, en vue de réduire le nombre de sanctions susceptibles d’être infligées aux détenus. L’article44 définit les sanctions susceptibles d’être infligées par les autorités compétentes aux détenus, à savoir le directeur d’établissement et l’adjoint du Ministre chargé de l’administration pénitentiaire. L’article45 définit les règles à observer lors de l’application des sanctions. L’article46 « impose au chef de chaque établissement pénitentiaire d’informer immédiatement l’adjoint du Ministre chargé de l’administration pénitentiaire, le directeur de la sécurité et le ministère public de toute agitation, insurrection collective ou grève de la faim menée par des prisonniers, ainsi que de toutes les mesures prises par l’administration pénitentiaire à ce sujet ». L’article47 dispose ce qui suit : « l’exécution de toute sanction disciplinaire prononcée conformément aux dispositions de la présente loi ne peut avoir lieu au-delà de la date prévue pour la libération du détenu, telle que fixée par une décision de justice ». Auxtermes de l’article48 : « En matière de discipline, les personnes placées en détention provisoire bénéficient du même traitement que celui réservé aux personnes condamnées à une peine d’emprisonnement, sauf pour ce qui est de leur transfert vers une prison de haute sécurité, qui ne peut leur être imposé à titre de sanction ».

131.En ce qui concerne l’isolement cellulaire, il s’agit d’une mesure disciplinaire limitée dans le temps, qui n’est appliquée que dans des cas extrêmes à titre de dissuasion, notamment contre les délinquants les plus dangereux et qui est assortie par la loi de plusieurs garanties. En effet, elle est considérée comme la sanction disciplinaire la plus grave qui puisse être imposée à un détenu, seulement en cas de manquement grave à la loi relative aux établissements pénitentiaires et à ses textes d’application. Cette mesure s’applique après information du détenu quant aux manquements qui lui sont reprochés, audition de ses déclarations et octroi de toutes les garanties de la défense. Seul le directeur de l’établissement pénitentiaire est habilité à prendre la décision de mise à l’isolement, qui peut aller jusqu’à quinze jours, sans dépasser trente jours au total. Conformément aux dispositions de la loi régissant les établissements pénitentiaires, les sanctions disciplinaires doivent être consignées dans un registre spécial, susceptible d’être consulté par les magistrats et les membres du parquet lors de l’inspection des prisons. Selon l’article31 du règlement intérieur des établissements pénitentiaires, si le médecin pénitentiaire constate que le maintien en isolement est de nature à compromettre la santé du détenu, la sanction doit être suspendue. Le médecin doit en informer par écrit le chef de l’établissement pénitentiaire et lui enjoindre d’adopter des mesures destinées à y remédier. Ce dernier doit tenir compte du rapport et des conseils du médecin et prendre des mesures en conséquence. L’isolement cellulaire ne peut être invoqué comme prétexte pour empêcher un détenu de s’entretenir avec son avocat. Enoutre, tout détenu mis à l’isolement peut porter plainte contre toute violation de ses droits et former un recours devant la justice administrative, conformément à la législation en vigueur.

IIEfforts visant à donner effet aux recommandations formuléespar le Comité dans ses observations finales à l’issue de l’examen du quatrième rapport périodique

132.L’Égypte a donné suite à la recommandation énoncée au paragraphe 6, al.a), relative au réexamen de la question du maintien de l’état d’urgence, en limitant l’application d’une telle mesure, comme indiqué dans le cadre des commentaires au sujet de l’article2 de la Convention.

133.Le suivi de la recommandation énoncée au paragraphe6, al.b), concernant l’adoption par l’Égypte d’une définition de la torture correspondant à celle qui en est donnée au paragraphe1 de l’article premier de la Convention, a été abordé au niveau des commentaires relatifs à l’article premier de la Convention.

134.Pour ce qui est de la recommandation énoncée au paragraphe6, al.c), visant à garantir que toutes les plaintes se rapportant à des cas de torture ou de mauvais traitements, ycompris celles ayant trait à des décès en détention, fassent l’objet d’enquêtes promptes, impartiales et indépendantes, il convient de signaler que l’Égypte a mis en place un mécanisme d’investigation rapide, impartial et indépendant, via la création du Département des droits de l’homme auprès du bureau du Procureur général, comme indiqué au paragraphe112, étant entendu que le parquet est une partie intégrante de l’autorité judiciaire, dont l’indépendance et l’impartialité sont consacrées par les articles184 et 189 de la Constitution.

135.L’Égypte a donné suite à la recommandation énoncée au paragraphe6, al.d), visant à s’assurer du caractère effectif et régulier de l’inspection obligatoire de tous les lieux de détention par des procureurs, des juges ou un autre organe indépendant, comme indiqué dans les commentaires relatifs aux articles2 et 11 de la Convention.

136.L’Égypte a également donné suite à la recommandation énoncée au paragraphe6,al.e), visant à s’assurer que toutes les personnes détenues puissent sans délai consulter un médecin et un avocat et se mettre en rapport avec leur famille, comme indiqué dans le commentaire de l’article11 de la Convention.

137.En ce qui concerne la recommandation énoncée au paragraphe6, al.f), visant à éliminer toutes les formes de détention administrative, à soumettre les locaux relevant du Service de renseignements de la sûreté nationale à une inspection obligatoire et à ouvrir des enquêtes promptes et impartiales au sujet des allégations de torture ou de mauvais traitements qui y auraient été perpétrés, il convient de préciser que l’Égypte a donné suite à la première partie de la recommandation en abolissant la détention administrative prévue à l’article1er (par.1) de la loi sur l’état d’urgence, comme indiqué dans le cadre des commentaires relatifs à l’article2 (par.2) de la Convention, via l’article54 de la Constitution qui interdit en toute circonstance la détention administrative et, pour ce qui est de la deuxième partie, il est pertinent de noter qu’il n’existe pas de lieux de détention dans les locaux des services de la sûreté nationale et que l’article91bis de la loi régissant les établissements pénitentiaires punit tout fonctionnaire ou agent public qui maintient ou ordonne, de quelque manière que ce soit, de maintenir une personne en détention en des lieux autres que les prisons ou ceux prévus à cet effet. En outre, le suivi de la troisième partie de la recommandation a été présenté dans le cadre des commentaires au sujet des articles2 et 13 de la Convention.

138.La recommandation énoncée au paragraphe6, al.g), relative à la nécessité, pour le législateur, de conférer plein effet aux droits reconnus par la Convention et d’instituer des voies de recours utiles permettant leur exercice, en veillant particulièrement à ce qu’il soit donné suite dans un délai raisonnable aux plaintes déposées et à l’application effective de toute décision judiciaire remettant des détenus en liberté, a été traitée lors des commentaires relatifs à l’article13 de la Convention. En outre, la Convention a force de loi en vertu des articles93 et 151 de la Constitution et toute partie intéressée doit respecter ses dispositions et les appliquer directement. Un Département des droits de l’homme a également été créé auprès du Bureau du Procureur général, notamment afin d’enquêter sur les plaintes dans des délais raisonnables. Comme mentionné ci-dessus, le parquet, qui fait partie de l’autorité judiciaire, est indépendant et impartial en vertu de la Constitution et a pour mission de superviser et de contrôler l’exécution des jugements et décisions rendus dans le cadre des procédures pénales, conformément au Code de procédure pénale, qui régit les procédures de suivi et de contrôle. En outre, les directives judiciaires régissant le fonctionnement du parquet réglementent les procédures d’exécution des jugements et décisions rendus par les tribunaux et le parquet et soumettent les activités des bureaux exécutifs des services de police au contrôle du ministère public, tout en mettant à la charge des inspecteurs administratifs du ministère public le devoir d’inspecter ces bureaux, ce qui garantit la mise en œuvre effective de toute décision judiciaire de mise en liberté des détenus.

139.Pour ce qui est de la recommandation énoncée au paragraphe6, al.h) concernant l’abolition de la détention au secret, elle a été abordée au paragraphe131 du présent rapport.

140.L’Égypte a tenu compte de la recommandation énoncée au paragraphe6, al.i), qui vise à s’assurer que toute personne déclarée coupable par une décision des tribunaux militaires dans des affaires de terrorisme a le droit de faire examiner par une juridiction supérieure la déclaration de culpabilité et la condamnation, conformément à la loi, car désormais, en matière de délits, les jugements rendus par des tribunaux militaires sont soumis au double degré de juridiction et les sentences émanant du tribunal correctionnel militaire peuvent faire l’objet d’appel devant la Cour d’appel militaire conformément aux dispositions de la loi no12 de 2014 modifiant le Code pénal militaire. En outre, la Cour d’appel est compétente pour connaître des aspects procéduraux et de fond, ainsi que des recours contre les décisions de cette dernière devant la Cour d’appel militaire. La Haute Cour d’appel militaire est compétente pour statuer sur les recours formés par le parquet militaire ou toute personne condamnée contre les décisions définitives rendues par des tribunaux militaires au sujet d’infractions de droit commun commises contre des militaires ou des civils. Ces recours sont régis par les règles et procédures des pourvois en cassation en matière pénale, posées par la loi no57 de 1959 relative aux voies de recours devant la Cour de cassation. La Haute Cour d’appel militaire est également compétente pour statuer sur les recours en révision des jugements prononcés par les tribunaux militaires concernant des infractions de droit commun. Enfin, l’article96 de la Constitution a établi l’obligation de réglementer les appels des jugements rendus en matière pénale par des juridictions ordinaires ou militaires. De son côté, l’article240 impose de réglementer les procédures d’appel dans les dix ans à compter de la date d’entrée en vigueur de la Constitution. Afin d’honorer cette obligation constitutionnelle, la mise en place d’un mécanisme de recours en appel devant les tribunaux militaires et la Haute Cour d’appel militaire des jugements rendus en matière pénale est prévue dans le projet de loi portant modification du Code de procédure pénale élaboré par leGouvernement.

141.Il convient de noter que de 2015 jusqu’à la date de rédaction du présent rapport, des décisions rendues dans 71affaires par des tribunaux militaires ont été annulées et jugées à nouveau par d’autres formations juridictionnelles. Par exemple, dans l’affaire no318 de 2014, l’un des accusés a fait appel de sa condamnation prononcée le 11février 2015 : la Cour a accepté ce recours le 27octobre 2016 et a réduit la peine dequinze à trois ans. Dans l’affaire no288 de 2015, l’un des accusés a fait appel de sa condamnation prononcée le 17janvier 2018 : la Cour a accepté ce recours le 19août 2018 et a commué sa condamnation à mort en réclusion à perpétuité. Dans l’affaire no54 de 2015, l’un des accusés a fait appel de sa condamnation prononcée le 30septembre 2015 : la Cour a accepté ce recours le29novembre 2016 et a commué sa condamnation à perpétuité à quinze ans de réclusion criminelle. Dans l’affaire no60 de 2016, l’un des accusés a fait appel de sa condamnation prononcée le 13décembre 2016 : la Cour a accepté ce recours le 11mars 2019 et réduit la peine de dix à cinq ans.

142.L’Égypte a donné suite à la recommandation énoncée au paragraphe6, al.j), visant à mettre fin à toutes les pratiques impliquant des sévices infligés à des mineurs dans les lieux de détention et d’en punir les auteurs, ainsi que d’interdire la détention de mineurs au contact de détenus adultes, comme illustré par les commentaires au sujet des articles11 et 16 de la Convention, selon lesquels les lieux de détention doivent être placés sous le contrôle des autorités judiciaires, habilitées à effectuer des visites d’inspection périodiques afin de s’assurer que la loi y est respectée et de veiller à ce que les différentes catégories de personnes détenues soient séparées les unes des autres et bénéficient du traitement auquel elles ont droit. En ce qui concerne les sévices infligés à des mineurs dans les lieux de détention, la loi prévoit, comme indiqué dans le présent rapport, des peines cumulant la peine prononcée et la peine minimale requise pour voies de fait à l’égard d’enfants, conformément aux dispositions de l’article116bis du Code de l’enfance.

143.Pour ce qui est de la recommandation énoncée au paragraphe6, al.k), visant à lever toute ambiguïté dans la loi qui pourrait conduire à ce que des individus soient persécutés en raison de leurs préférences sexuelles et à adopter des mesures de prévention de tout traitement dégradant lors des fouilles corporelles, il convient de noter que la législation égyptienne ne comporte aucune disposition prônant la discrimination ou la persécution pour quelque motif que ce soit, conformément aux dispositions de l’article53 de la Constitution. En effet, la loi encadre et réglemente de manière stricte les fouilles qui portent atteinte au droit à la vie privée, conformément aux dispositions de l’article51 de la Constitution, lequel interdit toute atteinte à la dignité humaine, ainsi qu’à celles de l’article54 qui dispose qu’à l’exception des cas de flagrant délit, nul ne peut être arrêté, fouillé, détenu, ou privé de liberté qu’en vertu d’une ordonnance judiciaire motivée, édictée sur la base d’une enquête. Hormis ces deux cas les fouilles sont interdites. La Cour de cassation a notamment annulé la procédure de prélèvement d’urine de conducteurs suspectés de conduire sous l’emprise de drogues ou d’alcool sans leur consentement, estimant que cette procédure était injustifiée, sans fondement légal, abusive et arbitraire. La Cour a fondé son arrêt sur l’article12 de la Déclaration universelle des droits de l’homme et sur l’article41 de la Constitution précédente, selon lesquels : « La liberté personnelle est un droit naturel inviolable ». Lajurisprudence de la Cour de cassation, suivie en cela par les tribunaux pénaux, a également établi que les fouilles devaient être pratiquées de manière à ne pas porter atteinte à la dignité humaine. La législation ayant interdit les fouilles des parties intimes du corps des personnes, du fait que ces opérations peuvent constituer un attentat à la pudeur, la Cour les a donc jugées irrecevables pour atteinte à la moralité publique, laquelle est une composante de l’ordre public. L’article46 (par.2) du Code de procédure pénale impose que les fouilles soient réalisées par des femmes désignées par un officier de police judiciaire. Dans de nombreux arrêts, la Cour de cassation affirme que la loi exige qu’une femme soit fouillée par une autre femme, dans la mesure où les officiers de police judiciaire masculins n’y sont pas habilités, car ces actes peuvent porter atteinte à la pudeur des femmes.

144.Les mesures prises par l’Égypte en vue de donner effet à la recommandation énoncée au paragraphe6, al.l), visant à établir la compétence de l’État à l’égard de tout auteur présumé d’actes de torture se trouvant dans le pays et ne faisant pas l’objet d’une mesure d’extradition vers un autre pays afin d’y être jugés, conformément aux dispositions des articles5 à 8 de la Convention, ont été abordées lors des commentaires au sujet desdits articles.

145.Pour ce qui est de la recommandation énoncée au paragraphe6, al.m), visant à s’assurer que les organisations non gouvernementales actives en matière de défense des droits de l’homme puissent exercer leurs activités sans entrave et soient notamment autorisées à se rendre dans tous les lieux de détention, plus particulièrement les prisons, afin de garantir un meilleur respect de l’interdiction de la torture et des mauvais traitements, il convient de préciser que la loi autorise les organisations non gouvernementales à visiter les lieux de détention et les prisons, en collaboration avec le Conseil national des droits de l’homme. Àcet égard, l’article3 (par.16) de la loi instituant le Conseil national des droits de l’homme autorise le Conseil à visiter les prisons et la plupart des lieux de détention et des établissements de soins et de rééducation et à s’entretenir avec les prisonniers et les détenus en vue de s’assurer qu’ils sont bien traités et qu’ils jouissent pleinement de leurs droits. LeConseil établit un rapport à l’issue de chaque visite, assorti d’observations et de recommandations visant à améliorer les conditions de vie des détenus et le transmet au Procureur général et à la Chambre des représentants. Des visites ont récemment été effectuées par des représentants d’organisations non gouvernementales dans plusieurs prisons.

146.En ce qui concerne la recommandation énoncée au paragraphe6, al.n), visant à fixer des normes et règles précises permettant aux victimes de torture et de mauvais traitements d’obtenir pleinement réparation, tout en évitant des écarts injustifiés d’indemnisation, il convient de noter qu’outre ce qui a été signalé au titre des commentaires relatifs à l’article14 de la Convention, la législation égyptienne laisse à la discrétion des tribunaux le soin d’évaluer le montant de l’indemnisation, selon des règles et des normes claires fixées par les articles221 et 222 du Code civil, sachant que les dommages subis par les victimes englobent les préjudices physiques, matériels et moraux, ainsi que toute atteinte à la réputation ou à l’intégrité. La loi adopte le principe de la réparation intégrale et proportionnelle des dommages subis. Les écarts entre les montants accordés à titre de réparation trouvent leur justification dans la variation de l’étendue de ces dommages. Le même code accorde également réparation aux conjoints et aux proches au deuxième degré, au titre des souffrances endurées suite au décès de la victime. L’article172 (par.2) dispose que l’action en réparation ne s’éteint que par l’extinction de l’action pénale. L’article52 de la Constitution consacre l’imprescriptibilité de l’infraction de torture sous toutes ses formes et les actions en réparation des actes de torture ne sont assujetties à aucune prescription, comme confirmé par les articles15 et 259 du Code de procédure pénale, tel que modifié par la loi no16 de 2015.

147.L’Égypte a donné suite à la recommandation énoncée au paragraphe6, al.o), visant la poursuite des activités de formation des responsables de l’application des lois, notamment en ce qui concerne les obligations qu’impose la Convention et le droit de tout détenu de bénéficier d’une aide médicale et juridique et de se mettre en rapport avec sa famille, comme indiqué dans les commentaires relatifs à l’article10 de la Convention.

148.Pour ce qui est de la recommandation énoncée au paragraphe6, al.p), qui incite le pays à envisager d’adopter les déclarations visées aux articles21 et 22 de la Convention, il est pertinent de rappeler que les autorités étudient régulièrement la possibilité d’adhérer aux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme et examinent périodiquement les réserves émises par l’État aux conventions auxquelles il est partie.

149.L’Égypte a donné suite à la recommandation énoncée au paragraphe 6, al.q), visant une large diffusion des conclusions et recommandations du Comité dans l’État partie, dans toutes les langues appropriées, notamment en distribuant aux organismes publics concernés des publications en langue arabe présentant les conclusions et recommandations du Comité. Enoutre, les droits de l’homme et les obligations internationales incombant à l’Égypte en la matière sont enseignés à l’Académie de police, au Centre de formation et de recherche du parquet et au Centre national d’études juridiques. De même, l’enseignement des droits de l’homme figure dans les programmes scolaires des différents niveaux d’enseignement et de plusieurs établissements universitaires, comme en témoignent les efforts dont il est fait mention dans le présent rapport.

150.Au paragraphe7 de ses conclusions, le Comité a réitéré à l’État partie les recommandations qu’il lui avait adressées en mai 1996, compte tenu des conclusions auxquelles il était parvenu dans le cadre de la procédure prévue à l’article20 de la Convention. L’Égypte a répondu à cette recommandation comme en témoignent les mesures législatives et judiciaires décrites ci-dessus, dans les commentaires relatifs aux articles2, 6, 11, 12 et 16 de la Convention.

151.Concernant la recommandation énoncée au paragraphe8, visant l’acceptation de la visite du Rapporteur spécial sur la question de la torture de la Commission des droits de l’homme, il convient de signaler que l’Égypte, soucieuse de coopérer et de collaborer pleinement avec les titulaires de mandat au titre des procédures spéciales, a adressé des invitations à six d’entre eux. Le Gouvernement attend toujours la communication des dates précises de ces visites et examinera les autres demandes afin de se préparer au mieux.

Conclusion

152.Le présent rapport décrit les mesures concrètes que l’Égypte prend continuellement en vue de s’acquitter des obligations qui lui incombent au titre de la Convention. Même s’il lui reste des efforts à accomplir, elle ne cesse de lutter contre les pratiques individuelles qui sont contraires aux dispositions constitutionnelles et juridiques concernant la prévention de la torture sous toutes ses formes. L’Égypte réaffirme sa volonté de poursuivre la collaboration avec les mécanismes conventionnels internationaux et régionaux en vue d’améliorer la situation des droits de l’homme dans le pays et dans le monde. Elle aspire également à un dialogue interactif et constructif avec le Comité et entend tirer profit de son expérience en matière d’assistance pour aider les autres pays à honorer de manière optimale les obligations que leur fait la Convention.