Nations Unies

CAT/C/46/D/350/2008

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr. restreinte*

4 juillet 2011

Original: français

Décision

Communication no 350/2008

Présentée par:

R.T-N. (représenté par Maître Kathrin Stutz du Zürcher Beratungsstelle für Asylsuchende)

Au nom de:

Le requérant

État partie:

Suisse

Date de la requête:

5 août 2008 (lettre initiale)

Date de la présente décision:

3 juin 2011

Objet:

Risque de déportation du requérant vers la République démocratique du Congo (RDC)

Question de procédure:

Néant

Question de fond:

Expulsion d’une personne vers un autre État où il y a des motifs sérieux de croire qu’il risquerait d’être soumis à la torture

Article de la Convention:

3

[Annexe]

Annexe

Décision du Comité contre la torture au titre de l’article 22de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants(Quarante-sixième session)

concernant la

Communication no 350/2008

Présentée par:

R.T-N. (représenté par Maître Kathrin Stutz du Zürcher Beratungsstelle für Asylsuchende)

Au nom de:

Le requérant

État partie:

Suisse

Date de la requête:

5 août 2008 (lettre initiale)

Le Comité contre la torture, institué en vertu de l’article 17 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,

Réuni le 3 juin 2011,

Ayant achevé l’examen de la requête no 350/2008, présentée par R.T-N. en vertu de l’article 22 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,

Ayant tenu compte de toutes les informations qui lui ont été communiquées par le requérant, son conseil et l’État partie,

Adopte ce qui suit:

Décision au titre du paragraphe 7 de l’article 22 de la Convention contre la torture

1.1Le requérant est M. R.T-N., citoyen de la République Démocratique du Congo, né le 25 décembre 1970 et actuellement domicilié en Suisse. Il estime que son expulsion vers la République démocratique du Congo (RDC) constituerait une violation par la Suisse de l’article 3 de la Convention. Le requérant est représenté par Maître Kathrin Stutz (Zürcher Beratungsstelle für Asylsuchende).

1.2Conformément au paragraphe 3 de l’article 22 de la Convention, le Comité a porté la communication à l’attention de l’État partie le 18 août 2008. Parallèlement, en application du paragraphe 1 de l’article 114 de son règlement intérieur (précédent article 108), le Comité a prié l’État partie de ne pas procéder à l’expulsion du requérant vers la République démocratique du Congo (RDC) tant que sa requête serait à l’examen.

Exposé des faits

2.1 Le requérant est originaire de RDC et a toujours vécu à Kinshasa où il était actif au sein de l’association G.J.C.C. (Groupe de jeunes chrétiens pour le changement). En mai 2004, il a tenu des discours en vue de sensibiliser les jeunes avant les élections et les a informés que le Président Joseph Kabila n’était pas d’origine congolaise. Il a été appréhendé le 15 juillet 2004 pour cette raison et son épouse aurait été violée. Trois jours plus tard, il a été interrogé, puis, le soir même, transféré par avion dans une prison du Katanga (région située près de la frontière zambienne). Le requérant s’est évadé de prison le 13 septembre 2004 grâce à la complicité d’un officier et a quitté le pays quatre jours plus tard. Il a appris par la suite par le biais de son épouse que des recherches avaient été lancées contre lui.

2.2 Le 20 septembre 2004, le requérant est arrivé par avion en Suisse et a déposé une demande d’asile le jour même. Le 17 septembre 2006, la Croix Rouge Suisse lui a demandé s’il était d’accord de témoigner pour la Télévision Suisse Romande (TSR) lors d’un reportage sur les mesures de contrainte dans le canton de Zurich dans le cadre des votations sur les nouvelles lois sur l’asile et les étrangers du 26 septembre 2006. Le requérant a accepté de témoigner à visage découvert car les journalistes lui ont dit que le reportage ne serait diffusé qu’en Suisse. Peu de temps après la diffusion du reportage, il a reçu des appels de RDC, car le journal télédiffusé de la TSR est retransmis sur TV5, chaîne qui émet également en RDC. Entretemps, l’épouse du requérant a fui au Zimbabwe avec leur fille et toutes deux ont reçu le statut de réfugié en décembre 2007 et sont sous la protection du Haut Commissariat aux Réfugiés (UNHCR).

2.3 Le requérant a développé des problèmes psychiques du fait de ce qu’il a vécu en RDC, de la prolongation de la procédure d’asile et de la situation de sa femme qui est réfugiée au Zimbabwe avec leur fille. Il a consulté en urgence le service de psychiatrie ambulatoire du Centre des Hôpitaux Universitaires du Canton de Vaud (CHUV) le 17 février 2005 en raison des cauchemars répétés et d’importantes angoisses. Ses troubles psychiques l’ont conduit à consulter de manière régulière deux praticiens du centre de soins ambulatoires socio-psychiatriques de Bülach, dépendant de la clinique Psychiatrie-Zentrum Hard. D’après le rapport médical établi sur demande du requérant par la policlinique psychiatrique de l’Hôpital universitaire de Zürich le 22 janvier 2009, les symptômes pathologiques concordent avec le témoignage du requérant quant au traitement subi en RDC et démontrent que d’un point de vue clinique, il n’y a pas de doute que le requérant a expérimenté un stress traumatique considérable. Le rapport établit le diagnostique de stress post-traumatique.

2.4 Le 20 septembre 2004, à son arrivée sur le territoire suisse, le requérant a introduit une requête de demandé d’asile alors qu’il était dans la zone de transit de l’aéroport de Zürich. Par décision du 30 septembre 2004, l’Office fédéral des migrations (ODM) lui a refusé l’autorisation d’entrée sur le territoire suisse au motif que les faits allégués n’avaient pas été rendus vraisemblables. Le 26 octobre 2004, la Commission suisse de recours en matière d’asile (CRA ; depuis lors remplacée par le Tribunal administratif fédéral, ci-après TAF) a déclaré le recours du requérant irrecevable au motif que l’avance exigée en garantie des frais de procédure n’avait pas été versée dans le délai imparti. Le 11 janvier 2005, le requérant a sollicité le réexamen de la décision prise à son encontre. Le 27 janvier 2005, l’ODM a rejeté sa demande. Le recours interjeté contre cette décision a été déclaré irrecevable par la CRA le 9 mars 2005 en raison du paiement tardif de l’avance de frais requise. Le 17 mars 2005, le requérant a déposé une nouvelle demande auprès de l’ODM qui l’a rejetée le 24 mars 2005. Il a interjeté appel de cette décision et le 6 décembre 2006, l’ODM a annulé sa décision du 24 mars 2005 au motif que le requérant invoquait l’existence de motifs subjectifs postérieurs à sa fuite, lesquels devaient être examinés dans une seconde procédure d’asile.

2.5 Par décision du 12 juillet 2007, l’ODM n’est pas entré en matière sur la deuxième demande d’asile en application de l’article 32 alinéa 2 let. e de la loi fédérale suisse du 26 juin 1998 sur l’asile (LAsi). Le recours du requérant contre cette décision a été rejeté le 1er février 2008 par le Tribunal administratif fédéral (TAF, anciennement la CRA) au motif que les nouveaux éléments soumis par le requérant n’étaient pas de nature à remettre en cause la conclusion à laquelle avaient abouties les autorités judiciaires précédentes. Le 8 avril 2008, le requérant a déposé auprès de l’ODM une demande de réexamen, qui a été transmise au TAF pour raison de compétence, qui l’a à son tour rejetée le 20 juin 2008. Le requérant avait jusqu’au 19 février 2008 pour quitter la Suisse. Il a déposé une demande de réexamen accompagnée d’une demande de mesures provisionnelles mais le TAF a rejeté la demande de réexamen et par conséquent également les mesures provisionnelles le 20 juin 2008. La déportation est dès lors possible à tout moment.

Teneur de la plainte

3.1 Le requérant estime qu’il encourt un risque d’être torturé en violation de l’article 3 de la Convention s’il était expulsé vers son pays d’origine. En tant que membre actif de l’association G.J.C.C (Groupe de jeunes chrétiens pour le changement), il a été amené à organiser trois conférences sur les élections en RDC, au cours desquelles il a averti les jeunes chrétiens du fait que Joseph Kabila n’était pas d’origine congolaise. Suite à ces déclarations il a été torturé et emprisonné pendant deux semaines avant qu’il puisse s’échapper et quitter le pays. Le requérant considère que les évènements précédant son départ ainsi que son apparition à visage découvert à la TSR dans une émission sur les demandes d’asile le 26 septembre 2006, impliquent un risque pour lui d’être torturé en cas d’expulsion vers la RDC. Le requérant ajoute que sa femme a elle-même été violée et est, de ce fait, réfugiée dans un pays tiers.

3.2 Le requérant cite le rapport annuel 2008 d’Amnesty International qui évoque les tensions politiques et militaires qui ont dégénéré en affrontements violents à Kinshasa et dans la province du Bas-Congo. Des homicides illégaux, des arrestations et placements en détention arbitraires, des actes de torture et d’autres formes de traitement cruel, inhumain et dégradant étaient pratiqués dans tout le pays par les forces de sécurité et les groupes armés, et visaient le plus souvent des personnes ressenties comme étant des opposants politiques. Le requérant estime donc que la situation en RDC répond aux caractéristiques de la situation visée par l’article 3, alinéa 2 de la Convention en ce qu’il s’agit de violations systématiques de droits de l’homme, graves, flagrantes et massives. Le requérant insiste sur le fait que la torture est systématiquement pratiquée en détention, plus particulièrement sur des personnes pressenties comme étant des opposants politiques.

3.3 A l’appui de ses allégations, le requérant fournit une copie de l’avis de recherche lancé par la police nationale congolaise ; l’extrait du journal « Le Satellite » dans lequel est mentionné qu’un avis de recherche a été lancé pour retrouver la trace du requérant le 17 juillet 2004 ; deux copies de convocations envoyées respectivement à la femme du requérant et au Président de l’association G.J.C.C par le même commandant Clément Konde ; une copie de l’avis de recherche lancé par l’agence nationale de renseignements du 10 novembre 2004 ; une page du journal « Le Palmares » datée du 6 septembre 2006 signalant la disparition du président de l’association G.J.C.C à Kinshasa et précisant que celle-ci est intervenue après la disparition du requérant. S’ajoute à cette liste une lettre attestant du passage du requérant dans une émission de la TSR diffusée par la suite sur TV5. Le requérant fournit également copie des rapports médicaux établis par les psychologues ou thérapeutes sur sa santé depuis qu’il est en Suisse.

Observations de l’État partie sur la recevabilité et sur le fond

4.1Le 18 février 2009, l’État partie a présenté ses observations sur la recevabilité et sur le fond de la requête. Rappelant brièvement les faits tels que présentés par le requérant, il soutient que celui-ci n’apporte pas de nouveaux éléments devant le Comité, si ce n’est la détérioration de son état de santé. L’Etat partie rappelle à ce titre que les autorités judiciaires notamment le TAF, dans ses arrêts du 1er février et du 20 juin 2008, ont examiné la situation du requérant de manière circonstanciée et qu’aucun argument avancé par le requérant ne permet de remettre en cause cet examen. L’Etat partie souligne en outre que dans sa communication, le requérant n’explique pas les incohérences et contradictions figurant dans ses allégations bien qu’elles aient été clairement relevées par les autorités suisses compétentes.

4.2 Rappelant les dispositions de l’article 3 de la Convention, l’Etat partie mentionne la jurisprudence du Comité ainsi que son observation générale No 1 dont les alinéas 6 et suivants prévoient que le requérant doit prouver qu’il existe pour lui un risque personnel, actuel et sérieux d’être soumis à la torture en cas d’expulsion vers son pays d’origine. L’Etat partie note que cette disposition signifie que les faits allégués ne peuvent se limiter à de simples soupçons et qu’ils doivent faire apparaître un risque sérieux. Confrontant ensuite les éléments à prendre en compte pour évaluer le risque avec la situation du requérant, l’Etat partie reconnaît que la situation en RDC est préoccupante. Toutefois, selon la jurisprudence du Comité et son observation générale mentionnée ci-dessus, la situation dans le pays du requérant ne saurait constituer, à elle seule, un motif suffisant pour conclure que le requérant risquerait d’y être torturé en cas de renvoi.

4.3 S’agissant des allégations de torture du requérant, l’Etat partie note que celles-ci sont évoquées devant le Comité sans donner plus de détails. Les seuls moyens de preuve déposés au cours de la procédure à cet égard sont deux rapports médicaux datés du 27 septembre 2006 et du 30 août 2007, qui ont été respectivement examinés par l’Office fédéral des migrations (ODM) dans sa décision du 12 juillet 2007, et le TAF dans son arrêt du 1er février 2008. L’Etat partie insiste sur le fait que le requérant n’a à aucun moment évoqué ces allégations de torture devant les autorités suisses avant la transmission des deux rapports médicaux susmentionnés. Le requérant a donc pour la première fois évoqué ces allégations lorsqu’il a été interrogé sur le contenu du premier rapport médical le 28 mars 2007. L’Etat partie ajoute que les deux rapports reposent sur une anamnèse élaborée sur la base des seules déclarations du patient. Ils n’apportent pas de preuve de la véracité des faits allégués, notamment quant aux circonstances et aux motifs ou encore à l’auteur des mauvais traitements. Les rapports ne font non plus pas état de traces de torture physique.

4.4 L’Etat partie ne conteste pas les troubles psychiques constatés par les médecins mais il relève que les rapports médicaux ne prouvent pas l’origine, alléguée par le patient, des troubles psychiques, qui sont au demeurant attribués par les médecins traitants à d’autres causes. Les rapports médicaux font ressortir en effet que le requérant souffre de la séparation d’avec sa famille comme de l’insécurité liée à son statut en Suisse. L’Etat partie ajoute que les maux dont semble souffrir le requérant ne sont en tout état de cause pas d’une gravité telle qu’ils fassent obstacle à l’exécution de son renvoi, ce d’autant plus qu’il lui est possible de s’adresser à un médecin dans son pays d’origine en sollicitant, si nécessaire, une aide financière au retour. L’Etat partie se rallie donc à l’analyse faite par les autorités judiciaires internes et considère que les rapports médicaux n’établissent pas la véracité des faits allégués et, par conséquent, ne constituent pas un motif pour conclure à l’existence d’un risque concret de torture en cas de retour dans le pays d’origine. L’Etat partie ajoute que la demande d’asile déposée par la femme du requérant auprès de l’Ambassade de Suisse au Zimbabwe le 17 avril 2008 ne fait pas état, en tout cas explicitement, de torture ou violences subies en RDC. L’Etat partie en conclut qu’aucun élément du dossier ne permet de retenir que le requérant a subi des tortures par le passé.

4.5 S’agissant de la question de savoir si le requérant s’est livré à des activités politiques à l’intérieur ou hors de l’Etat d’origine, l’Etat partie relève que celui-ci allègue avoir été animateur au sein du groupe de jeunes chrétiens pour le changement au Congo (GJCC) en RDC. Or, les documents concernant le GJCC (notamment la carte de membre) et les attestations de responsables des paroisses, confirmant que l’intéressé aurait animé en 2004 des débats sur le thème « élections et nationalité », n’établissent pas l’existence d’un risque actuel et concret de torture. L’Etat partie se réfère notamment au document de l’Organisation suisse d’aide aux réfugiés (OSAR) du 24 mars 2005 déposé par le requérant en procédure. Celui-ci s’était adressé à l’OSAR pour obtenir diverses informations et avis sur son dossier. Dans sa réponse, l’OSAR avait confirmé l’absence de persécution à l’égard des membres de communautés religieuses comme le GJCC et elle avait également fait état de certains doutes sur la véracité des dires du requérant. L’Etat partie ajoute que l’origine de Joseph Kabila a été, durant des années, avant et durant la campagne présidentielle, un sujet de polémique. Avec sa victoire le 29 octobre 2006, Joseph Kabila s’est non seulement vu confirmer dans son poste de Président de la RDC mais a acquis une légitimité dont il ne pouvait se prévaloir auparavant. L’Etat partie souligne que le requérant n’a pas su expliquer les raisons pour lesquelles il serait actuellement recherché en RDC pour des propos pré-électoralistes utilisés largement à l’époque par l’opposition, aujourd’hui représentée au Parlement congolais.

4.6 En Suisse, le requérant a livré son témoignage dans le cadre d’un reportage de la Télévision Suisse Romande (TSR), le 17 septembre 2006, ayant pour sujet les mesures de contrainte, en relation avec les votations sur la loi sur l’asile. Il n’a pas prétendu avoir, dans le cadre de cette émission, tenu des propos critiques contre le gouvernement congolais. Il n’a pas non plus donné des informations sur les faits à l’origine de sa demande d’asile. Le seul fait que les autorités de son pays aient connaissance, par le biais de cette émission, de l’existence du dépôt d’une demande d’asile en Suisse ne permet pas de conclure à un risque concret de torture en cas de retour dans son pays. L’Etat partie ajoute que le requérant n’a pas prouvé qu’il a reçu des messages et appels après la diffusion de l’émission sur la TSR et TV5. L’Etat partie se rallie en outre au constat du TAF (arrêt du 1er février 2008, cons. 6.2) selon lequel la participation à visage découvert à cette émission semble incompatible avec le comportement d’une personne réellement persécutée et menacée. Ceci ne plaide donc pas pour la crédibilité du requérant.

4.7 L’Etat partie considère qu’hormis les raisons exposées ci-dessus, d’autres éléments indiquent que les allégations de l’auteur ne sont pas plausibles. Ces éléments ont été analysés par les juridictions internes. Parmi elles, l’Etat partie cite le fait qu’à son arrivée en Suisse, le requérant a tenté de tromper les autorités en produisant de faux documents d’identité ainsi qu’une carte de légitimation de la Croix-Rouge comprenant des indices objectifs de falsification. Fin 2006, le requérant a également essayé de se rendre en France muni d’une autorisation d’établissement (permis C) qui ne lui appartenait pas. Ces faits permettent de formuler des doutes quand à la crédibilité du requérant.

4.8 Avec sa demande de réexamen du 11 janvier 2005 et son recours devant la CRA du 27 janvier 2005, le requérant a fourni un communiqué de presse ainsi qu’un avis de recherche, paru le 15 octobre 2004 sur le site internet www.societecivile.cd, indiquant que l’organisation « Action contre les violations des droits des personnes vulnérables (ACVDP) » étaient à sa recherche. Dans un courriel du 18 février 2005 destiné au conseil du requérant, le président de l’ACVDP, Crispin Kobolongo, confirmait avoir été informé par le GJCC de l’enlèvement du requérant. Sur cette base, l’ACVDP aurait interrogé le président du GJCC et l’épouse du requérant. Celle-ci aurait confirmé son enlèvement et le fait qu’elle aurait été violée le même jour ainsi que la disparition depuis lors de son mari. C’est parce que les investigations se seraient avérées vaines pour localiser le requérant que l’avis de recherche et le communiqué de presse auraient été lancés. Or, la famille, en particulier l’épouse du requérant et son oncle, avaient été en contact par téléphone mobile, fax et courriel avec lui lors de son assignation à l’aéroport de Zürich, fin septembre et début octobre 2004, et connaissait donc son lieu de séjour. L’Etat partie en déduit que la femme du requérant n’avait aucun intérêt à la publication de ladite annonce, sauf à procurer au requérant un moyen de preuve à l’appui de ses démarches en Suisse. Le fait que le requérant lui-même a fourni ces pièces dites à conviction en 2005, alors même qu’il avait été en relation téléphonique avec son épouse au moins deux semaines avant leur parution jette un discrédit supplémentaire sur le requérant et son entourage.

4.9 Dans le cadre de son recours du 27 janvier 2005, le requérant a aussi fourni l’annonce de sa disparition, parue dans le bihebdomadaire « Le Satellite » le 22 octobre 2004, aux termes de laquelle la famille priait les lecteurs de lui communiquer ou de communiquer à la police tout renseignement permettant de localiser le disparu. L’Etat partie considère paradoxal que la famille invite les lecteurs d’un journal à collaborer avec la police afin de retrouver plus facilement l’intéressé. Après avoir noté que l’avis de recherche du 10 novembre 2004 de l’Agence nationale de renseignement avait également été manipulé, l’Etat partie souligne que l’avis de recherche du 19 septembre 2004 et la convocation du 26 septembre 2004 (avec invitation de l’épouse du requérant de se présenter dans les locaux de police le lendemain à 10h30), revêtent une valeur probatoire très faible. Ces deux documents, signés par le même Clément Konde, ont été établis à une semaine d’intervalle, chacun un dimanche, jour normalement chômé. L’Etat partie note que les instances suisses mettent en doute en général le caractère probatoire des convocations (qui sont pour la plupart des télécopies), tout comme les articles parus dans la presse écrite ou sur internet. Il note d’ailleurs la facilité avec laquelle il est possible à Kinshasa de se procurer de tels documents moyennant rétribution.

4.10 Dans sa demande de révision du 8 avril 2008, le requérant a fait valoir qu’après une perte de contact totale pendant plusieurs années, il aurait enfin retrouvé la trace de son épouse en mars 2008. Celle-ci l’aurait informé qu’elle avait quitté Kinshasa en 2005, les recherches entreprises par les autorités congolaises pour le retrouver la mettant en danger. Avant de quitter la RDC pour demander l’asile au Zimbabwe fin 2007, elle aurait vécu la plupart du temps chez ses parents, au centre du pays. Le TAF a considéré que compte tenu de la facilité avec laquelle l’épouse aurait eu la possibilité de retrouver des personnes ayant été en contact avec son mari depuis sa disparition, les allégations se rapportant à la perte totale de contact et la reprise du contact quelques jours seulement après que le requérant eut été informé de l’issue imminente de la procédure de recours, n’étaient guère convaincantes.

4.11 L’Etat partie note enfin que l’appréciation d’absence de plausibilité du requérant par l’ODM lors de la première procédure de demande d’asile a été partagée par le Haut Commissariat aux Réfugiés (UNHCR) auquel l’affaire a été soumise pour avis le 27 septembre 2004. Le UNHCR a estimé, au vu des documents transmis et de la situation des droits de l’homme en RDC, que le requérant n’était manifestement pas menacé de persécution dans son pays d’origine.

4.12 S’agissant du rapport médical daté du 22 janvier 2009 fourni par le requérant au Comité et transmis à l’Etat partie, celui-ci note, comme pour les précédents rapports médicaux fournis par le requérant, que les faits relevés dans l’anamnèse reposent sur les seules déclarations du patient et le rapport ne prouve pas l’origine, alléguée par le requérant, des troubles psychiques constatés (stress post-traumatique, dépression). L’Etat partie soutient que ces derniers peuvent être attribués à d’autres causes telles que la séparation du requérant d’avec sa famille et l’insécurité liée à son statut en Suisse. Il ressort par ailleurs du rapport médical que certains faits relevés par le requérant ne correspondent pas à ce qu’il a fait valoir lors de la procédure d’asile. Ainsi, il allègue pour la première fois avoir entendu parler du viol de sa femme. Il ne mentionne aucunement son transfert par avion de Kinshasa à la prison de Kasapa au Katanga. Dans sa demande de révision auprès du TAF, le requérant avait allégué n’avoir pu parler à son épouse qu’en mars 2008, après des années de perte totale de contact, tandis que dans le rapport médical, il est fait mention d’octobre 2008. Ces contradictions et incohérences ne plaident pas en faveur de la crédibilité du requérant. Enfin, le requérant ne donne aucun détail quant aux mauvais traitements qu’il aurait subi en RDC. L’Etat partie maintient donc que le rapport médical du 22 janvier 2009 n’apporte pas d’élément permettant de conclure à un risque pour le requérant d’être renvoyé dans son pays d’origine.

Commentaires du requérant sur les observations de l’État partie

5.1Le 27 avril 2009, le requérant note que s’agissant des tortures subies, les rapports médicaux du 4 mars 2005 et du 1er juin 2006 démontrent que le requérant avait déjà allégué des mauvais traitements subis en RDC dans ses premières thérapies. Les rapports font état de ce que le requérant a été traumatisé par les évènements vécus en RDC. Le requérant a aussi fourni une copie de l’avis de recherche de l’Agence nationale de Renseignement (ANR) qui est placée dans tous les postes frontière de RDC. Il mentionne également les confirmations de trois églises où il aurait tenu ses conférences. Le requérant souligne que jusqu’ici, l’Etat partie n’a entrepris aucune recherche ou déposé des preuves contraires à ces allégations. Il ajoute que la première audition de la procédure d’asile a été effectuée par un policier qui n’a pu mettre le requérant en confiance. Du fait du traitement subi par cette même police (menaces et ordre de se déshabiller), le requérant n’a pas senti qu’il pouvait s’exprimer librement sur la question des tortures subies en RDC.

5.2 Le requérant insiste sur le fait que la demande d’asile engagée par son épouse au Zimbabwe est étayée par des preuves des violences qu’elle a subies en RDC. Sur la situation sécuritaire en RDC en général, le requérant souligne que le rapport de l’OSAR ne peut être considéré comme pertinent du fait de son absence d’enquête sur le GJCC et les activités du requérant en RDC. Le requérant souligne néanmoins que l’OSAR évoque les risques que peuvent courir les partisans de certaines communautés religieuses qui auraient mené une activité politique au nom de son groupe contre Joseph Kabila et le Gouvernement. Le requérant ajoute qu’il a toujours participé aux activités organisées par des partis politiques ou associations de la Diaspora congolaise en Suisse. Il est membre sympathisant du parti « Apareco » du Président Ngwanda, dont le siège est à Paris, en France. Il intervient également régulièrement à la radio « Kimpuanza » dans le cadre des émissions animées par le parti du Rassemblement des Patriotes pour la Libération du Congo (RPLC). Mais étant donné que le requérant a un statut précaire en Suisse, il est limité dans cette entreprise d’autant plus qu’il s’est déjà suffisamment exposé avec la diffusion de l’émission télévisée diffusée par la TSR puis TV5.

5.3 Le requérant ajoute que le GJCC, bien que sachant où il se trouvait, se devait d’informer l’organisation des droits d’une part pour mettre en lumière les abus du Gouvernement Kabila et d’autres part pour encourager un suivi par les organisations de droits de l’homme de ce type de violations. S’agissant de l’article paru dans le journal « Le Satellite », celui-ci ne fait qu’un rappel du communiqué de juillet 2004. A ce moment là, la famille du requérant n’était pas encore informé de son enlèvement. Lorsque l’épouse du requérant a été informée du départ de son mari pour la Suisse en septembre 2004, elle n’a pu en informer le journal, son mari étant encore détenu à l’aéroport de Zürich.

5.4 Le requérant considère par ailleurs que les avis de recherche attaqués par l’Etat partie pouvaient avoir été émis un dimanche du fait de l’aspect délicat et de l’urgence d’émettre de tels documents. Si l’acte avait été prémédité, le deuxième document aurait sans doute été modifié pour réparer l’erreur commise pour le premier avis de recherche. Le requérant précise également qu’il n’a pas eu de contact avec son épouse depuis mai ou juin 2005 lorsque sa femme a quitté Kinshasa jusqu’en mars 2008 lorsqu’il a pu lui parler grâce à l’aide de la Croix-Rouge à Zürich. S’agissant enfin de la position du UNHCR, le requérant considère que l’agence des Nations Unies ne pouvait que se contenter des documents qui lui avaient été présentés par l’ODM. Le requérant rappelle enfin que lors de la première procédure d’asile, il lui avait été demandé de fournir tout élément de preuve en appui à sa demande dans les deux semaines suivant l’introduction de la requête. Pour une personne en fuite, un tel délai ne peut être respecté.

Observations supplémentaires des parties

6.1Le 14 mai 2009, l’Etat partie commente les allégations et moyens de preuve nouveaux soumis par le requérant dans ses commentaires. S’agissant de la demande d’asile de l’épouse du requérant présentée à l’Ambassade de Suisse au Zimbabwe, l’Etat partie souligne que celle-ci a été rejetée le 19 août 2008 et qu’aucun recours devant le TAF n’a été introduit contre cette décision. Par ailleurs, l’épouse du requérant n’a pas fourni de moyens de preuve à l’appui de sa demande d’asile. Elle n’a pas non plus saisi l’occasion de se prononcer sur un préavis de l’ODM du 27 juin 2008 relatif à sa demande. L’Etat partie note en outre que le requérant a fourni un certificat médical daté du 1er juin 2006, dans lequel il est confirmé que le requérant aurait consulté un médecin en 2004 sur les violences qu’il aurait subies en RDC ; et l’information selon laquelle le requérant serait un membre sympathisant du parti « Apareco » et qu’il interviendrait régulièrement sur la station de radio « Kimpuanza ». L’Etat partie note que ces deux informations n’ont jamais été soumises aux autorités suisses dans le cadre des recours internes mais qu’en tout état de cause elles ne sauraient être probantes puisque le certificat n’établit pas la véracité des faits et la prétendue affiliation du requérant au parti politique « Apareco » ne semble pas être d’une telle ampleur qu’elle impliquerait un risque pour le requérant en cas de renvoi dans son pays d’origine.

6.2 Le 19 mai 2009, le requérant a informé le Comité de son arrestation le 24 avril 2009 par la police zurichoise malgré la suspension de l’exécution de renvoi par l’Etat partie depuis le 19 août 2008. Bien que les bureaux de l’immigration cantonale étaient encore ouverts et qu’il pouvait donc être procédé à une simple vérification administrative, le requérant a été arrêté et détenu pour une période de 4 jours. Ce n’est que le 28 avril 2009 que les vérifications par le procureur puis le juge d’instruction ont permis d’établir que le requérant résidait de manière légale en Suisse suite à la requête du Comité relative aux mesures provisoires de protection.

6.3 Le 19 juin 2009, le requérant a informé le Comité de la détérioration de la santé de son épouse et d’un rapport médical établi par le Harare Central Hospital au Zimbabwe attestant du fait qu’elle souffre également d’un stress post-traumatique.

6.4 Le 10 juillet 2009, l’Etat partie commente les allégations transmises par le requérant le 19 mai 2009. Il note que celui-ci a été arrêté par la police zurichoise à l’occasion d’un contrôle d’identité. Soupçonné par la police de séjourner illégalement en Suisse, il a été placé en détention pour infraction aux dispositions pénales sur la loi sur les étrangers et non pour exécution du renvoi. Il a été déféré au parquet de Zürich-Limmat. Le 27 avril 2009, le juge unique du tribunal de district de Zürich a refusé d’ordonner la détention préventive du requérant, parce qu’à la suite de la demande de mesures provisoires de protection du Comité du 18 août 2008, l’exécution du renvoi a été suspendue. Le requérant a immédiatement été transféré à l’Office des Migrations du Canton de Zürich, lequel l’a relâché le lendemain. En tout état de cause, les autorités cantonales n’auraient pas pu exécuter le renvoi sans mandat de l’Office fédéral des Migrations (ODM). Le requérant n’a donc à aucun moment risqué d’être expulsé de Suisse et ces éléments sont sans rapport avec le contenu de la communication devant le Comité.

6.5Le 19 octobre 2010, le requérant attire l’attention du Comité sur la précarité de sa situation, vivant dans un centre d’aide d’urgence sous la menace perpétuelle d’arrestations arbitraires et de contrôles répétés par la police ; et des conditions financières précaires liées à l’aide d’urgence qui octroie une aide journalière de 10 CHF. Le requérant informe également le Comité de l’introduction d’une demande de permis de rigueur (permis se basant sur des considérations humanitaires), demande qui ne peut être traitée tant que la procédure est en cours devant le Comité. Le requérant réitère le fait que le gouvernement congolais ne garantit pas l’exercice des droits des citoyens en RDC, preuve en est les récents assassinats de M. Armand Tungulu, militant de la diaspora en Belgique et de M. Floribert Chebeya Bahizire ; ainsi que la disparition de M. Fidèle Bazana Edadi.

Délibérations du Comité

Examen de la recevabilité

7.1Avant d’examiner toute plainte soumise dans une communication, le Comité contre la torture doit s’assurer qu’elle est recevable en vertu de l’article 22 de la Convention. Le Comité s’est assuré, comme il est tenu de le faire conformément à l’alinéa a du paragraphe 5 de l’article 22, que la même question n’a pas été examinée, ni n’est en cours d’examen devant une autre instance internationale d’enquête ou de règlement.

7.2 Le Comité relève en outre que les recours internes ont été épuisés au titre de l’alinéa b du paragraphe 5 de l’article 22, et que l’État partie ne conteste pas la recevabilité de la requête. Il l’a déclare donc recevable et procède à son examen quant au fond.

Examen au fond

8.1Conformément au paragraphe 4 de l’article 22 de la Convention, le Comité a examiné la présente requête en tenant compte de toutes les informations qui lui ont été communiquées par les parties.

8.2Le Comité doit déterminer si, en expulsant le requérant vers la République démocratique du Congo (RDC), l’État partie manquerait à l’obligation qui lui est faite en vertu de l’article 3 de la Convention de ne pas expulser ou refouler un individu vers un autre État où il y a des motifs sérieux de croire qu’il risque d’être soumis à la torture.

8.3Concernant les allégations du requérant au titre de l’article 3, le Comité doit tenir compte de tous les éléments, y compris l’existence dans l’État de renvoi d’un ensemble systématique de violations graves, flagrantes ou massives des droits de l’homme. Il s’agit cependant de déterminer si le requérant risque personnellement d’être soumis à la torture en RDC. Dès lors, l’existence d’un ensemble de violations systématiques des droits de l’homme, graves, flagrantes ou massives dans le pays ne constitue pas en soi un motif suffisant pour établir qu’il risquerait d’être soumis à la torture en cas d’expulsion vers ce pays; il doit exister des motifs supplémentaires donnant à penser que l’intéressé court personnellement un risque.

8.4 Le Comité rappelle son Observation générale N° 1 concernant l’application de l’article 3 dans le contexte de l’article 22, dans laquelle il considère qu’il n'est pas nécessaire de montrer que le risque couru est hautement probable, mais ce risque doit être encouru personnellement et actuellement. A cet égard, le Comité a établi dans des décisions antérieures que le risque de torture devait être « prévisible, réel et personnel ».En ce qui concerne le fardeau de la preuve, le Comité rappelle qu’il incombe généralement au requérant de présenter des arguments défendables et que le risque de torture doit être apprécié selon des éléments qui ne se limitent pas à de simples supputations ou soupçons.

8.5 Le Comité est conscient de la situation précaire des droits de l’homme en République démocratique du Congo, et observe que l’État partie reconnaît que la situation dans le pays est préoccupante. Il note cependant les doutes émis par l’Etat partie quant à la crédibilité des allégations soumises par le requérant depuis sa première demande d’asile en septembre 2004, ainsi que la référence qu’il fait à une lettre du UNHCR datée du 30 septembre 2004 dans laquelle le UNHCR a estimé qu’au vu des documents transmis et de la situation des droits de l’homme en RDC, le requérant n’était manifestement pas menacé de persécution dans son pays d’origine.

8.6 En évaluant le risque de torture dans le cas à l'examen, le Comité note l’affirmation du requérant selon laquelle en tant que membre actif de l’association chrétienne G.J.C.C, il a été amené à organiser trois conférences sur les élections présidentielles en RDC et a dans ce contexte averti les jeunes chrétiens du fait que Joseph Kabila, principal candidat, n’était pas d’origine congolaise ; que suite à ces déclarations, il a été arrêté, interrogé puis transféré dans une prison du Katanga où il a été torturé; que deux semaines plus tard il s’est échappé de cette prison, puis a fui le pays vers la Suisse. Le Comité note que selon le requérant, au moment de son arrestation, son épouse a été violée et a pu, quelques années plus tard, à son tour fuir le pays et se réfugier au Zimbabwe. Le Comité note également l’allégation du requérant selon laquelle son apparition à visage découvert dans une émission de la TSR retransmise sur TV5 ainsi que ses activités politiques au sein de « Apareco » et ses interventions dans l’émission de la radio « Kimpuanza » contribuent au risque qu’il encourt d’être torturé s’il était expulsé vers son pays d’origine. Il note enfin l’information selon laquelle les divers rapports médicaux de psychothérapeutes depuis 2005 font état d’un stress post-traumatique chez le requérant, qui confirme le traumatisme subi suite aux évènements qu’il a vécus en RDC.

8.7 Le Comité note l’argument de l’Etat partie selon lequel les rapports médicaux fournis par le requérant reposent sur une anamnèse élaborée sur la base des seules déclarations du patient ; qu’ils n’apportent pas la véracité des faits allégués, notamment quant aux circonstances, aux motifs ou encore à l’identité de l’auteur des mauvais traitements. Le Comité note que l’Etat partie ne conteste pas les troubles psychiques constatés mais qu’il met en doute le lien de causalité entre ces troubles et leur origine ; que ces troubles sont attribués par ces mêmes médecins à d’autres causes telles que le fait que le requérant souffre de la séparation d’avec sa famille et de l’insécurité liée à son statut en Suisse. Le Comité note également les doutes évoqués par l’Etat partie quant à la crédibilité des faits allégués par le requérant, faits qui sont à l’origine de son prétendu risque d’être torturé en cas d’expulsion vers la RDC. Il note à ce sujet le manque de détails fournis par le requérant s’agissant des tortures subies en RDC, du manque de caractère probatoire des documents tels que les avis de recherche et les articles de presse ; et les témoignages contradictoires du requérant s’agissant des contacts entretenus avec son épouse depuis son départ de RDC.

8.8 A la lumière des informations fournies par les parties, le Comité note que le requérant n’a pas établi le lien de causalité entre les évènements qui l’ont amené à quitter son pays d’origine ainsi que ceux qui se sont déroulés depuis son arrivée en Suisse ; et le risque de torture en cas de retour en RDC. Le requérant n’a en effet fourni aucun élément permettant de déduire que des déclarations sur l’origine non-congolaise du Président Joseph Kabila par des mouvements chrétiens tels que le G.J.C.C. entraîneraientdes conséquences telles que la torture par les autorités congolaises des personnes concernées, des années après les faits et alors que ce même sujet semble avoir été débattu largement par l’opposition. Le requérant n’a par ailleurs fourni aucun détail sur les tortures dont il aurait été victime pendant sa détention en RDC ; il n’a pas non plus établi que son apparition dans l’émission de la TSR ainsi qu’à la radio entraînerait un risque pour lui d’être torturé en cas de retour dans son pays d’origine. Le Comité rappelle que les faits tragiques dont la femme du requérant aurait été la victime n’entraîne pas pour autant un risque réel, personnel et prévisible pour le requérant lui-même.

8.9 Compte tenu de l’ensemble des informations qui lui ont été communiquées, le Comité estime que le requérant n’a pas apporté suffisamment d’éléments de preuve pour montrer qu’il court personnellement un risque réel et prévisible d’être soumis à la torture s’il était expulsé vers son pays d’origine.

9. Le Comité contre la torture, agissant en vertu du paragraphe 7 de l’article 22 de la Convention contre la torture et autres peines et traitements cruels, inhumains ou dégradants, en conclut que l’expulsion du requérant vers la République démocratique du Congo ne constituerait pas une violation de l’article 3 de la Convention.

[Adopté en français (version originale), en anglais et en espagnol. Paraîtra ultérieurement aussi en arabe, en russe et en chinois dans le rapport annuel du Comité à l’Assemblée générale.]