Nations Unies

CRC/C/CYP/CO/5-6

Convention relative aux droits de l’enfant

Distr. générale

24 juin 2022

FrançaisOriginal : anglais

Comité des droits de l’enfant

Observations finales concernant le rapport de Chypre valant cinquième et sixième rapports périodiques *

I.Introduction

1.Le Comité a examiné le rapport de Chypre valant cinquième et sixième rapports périodiques à ses 2602e et 2603e séances, les 16 et 17 mai 2022, et a adopté les présentes observations finales à sa 2630e séance, le 3 juin 2022.

2.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport de Chypre valant cinquième et sixième rapports périodiques, ainsi que les réponses écrites à la liste de points, qui lui ont permis de mieux appréhender la situation des droits de l’enfant dans l’État partie. Il se félicite du dialogue constructif qu’il a eu avec la délégation multisectorielle de l’État partie.

II.Mesures de suivi adoptées et progrès réalisés par l’État partie

3.Le Comité salue les progrès accomplis par l’État partie dans différents domaines, notamment la ratification du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant établissant une procédure de présentation de communications et de la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, en 2017, ainsi que de la Convention du Conseil de l’Europe sur la protection des enfants contre l’exploitation et les abus sexuels, en 2015. Il salue également l’adoption d’autres mesures législatives, institutionnelles et générales concernant les droits de l’enfant, notamment la mise en place d’un système de justice pour enfants et la lutte contre la violence à l’égard des enfants.

III.Facteurs et difficultés entravant la mise en œuvre de la Convention

4.Conscient que l’État partie, dont le territoire est partiellement occupé depuis 1974, ne peut garantir l’application de la Convention dans les zones échappant à son contrôle, le Comité demeure toutefois préoccupé par l’absence d’informations sur les enfants dans les territoires occupés.

IV.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

5.Le Comité rappelle à l’État partie le caractère indivisible et interdépendant de tous les droits consacrés par la Convention et souligne l’importance de toutes les recommandations figurant dans les présentes observations finales. Il appelle l’attention de l’État partie sur les recommandations concernant les domaines ci-après, dans lesquels il est urgent de prendre des mesures : la non-discrimination (par. 18) ; la violence à l’égard des enfants (par. 24) ; les enfants privés de milieu familial (par. 28) ; les enfants handicapés (par. 31) ; les enfants demandeurs d’asile, réfugiés ou migrants (par. 38).

6. Le Comité recommande à l’État partie d’assurer la réalisation des droits de l’enfant conformément à la Convention, au Protocole facultatif concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés et au Protocole facultatif concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, tout au long de la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030. Il le prie instamment de faire en sorte que les enfants participent activement à la conception et à l’exécution des politiques et des programmes les concernant adoptés aux fins de la réalisation des 17 objectifs de développement durable.

A.Mesures d’application générales (art. 4, 42 et 44 (par. 6))

Législation

7. Le Comité prend note de l’explication de l’État partie selon laquelle le projet de loi relatif à la prise en charge des enfants placés sous la protection du Directeur des Services de protection sociale et au dispositif de placement familial et le projet de loi relatif à la protection et à la prise en charge des enfants remplaceront la loi sur les enfants. Constatant avec préoccupation que ces projets de loi sont à l’examen depuis 2008, il invite instamment l’État partie à en accélérer l’adoption et à faire en sorte qu’ils répondent à l’ensemble des problèmes actuels en matière de protection de l’enfance et respectent pleinement les dispositions de la Convention et des Protocoles facultatifs s’y rapportant, et l’engage vivement à mobiliser des ressources suffisantes et à mettre en place des mécanismes permettant d’assurer et de contrôler l’application effective de ces textes.

Politique et stratégie globales

8. Le Comité prend note de l’existence de plusieurs stratégies et plans d’action, dont le plan d’action national pour la mise en œuvre de la Convention (2015-2017) portant sur les travaux du Commissaire à la protection des droits de l’enfant, mais prie instamment l’État partie d’élaborer une politique globale en faveur des enfants, qui couvre tous les domaines visés par la Convention, ainsi qu’une stratégie comprenant les éléments nécessaires à l’exécution de cette politique et prévoyant l’allocation de ressources humaines, techniques et financières suffisantes, et d’actualiser son plan d’action pour l’application de la Convention.

Coordination

9. Le Comité prend note de la création, en 2012, d’un comité ministériel se réunissant chaque année pour suivre l’application de la Convention mais recommande de nouveau à l’État partie d’instaurer et de promouvoir un mécanisme efficace doté d’un mandat clair et d’une autorité suffisante pour coordonner toutes les activités relatives à la mise en œuvre de la Convention aux niveaux national, régional et local et dans tous les secteurs, et d’allouer les ressources nécessaires à son bon fonctionnement.

Allocation de ressources

10. Le Comité prend note de l’explication donnée par l’État partie concernant les difficultés rencontrées et le retard pris dans l’application des réformes budgétaires prévoyant l’allocation de ressources à l’enfance pour 2021. Rappelant son observation générale n o 19 (2016) sur l’élaboration des budgets publics aux fins de la réalisation des droits de l’enfant, il recommande à l’État partie de mettre à profit son nouveau cadre financier pour :

a) Adopter une approche budgétaire tenant compte des droits de l’enfant, en indiquant clairement le montant et la part du budget de l’État qui seront consacrés à la réalisation de ces droits ;

b) Définir des lignes budgétaires pour les enfants défavorisés ou en situation de vulnérabilité, notamment les enfants handicapés, les enfants appartenant à des groupes minoritaires et les enfants demandeurs d’asile, réfugiés ou migrants, et faire en sorte que ces lignes budgétaires soient garanties même en cas de crise économique et de catastrophe naturelle et dans d’autres situations d’urgence ;

c) Mettre en place des mécanismes visant à évaluer l’adéquation, l’efficacité et l’équité de la répartition des ressources affectées à la réalisation des droits de l’enfant.

Collecte de données

11. Compte tenu de son observation générale n o 5 (2003) sur les mesures d’application générales de la Convention et rappelant ses recommandations précédentes , le Comité invite instamment l’État partie à mettre en place un système global centralisé de collecte de données sur les droits de l’enfant couvrant tous les domaines visés par la Convention et les Protocoles facultatifs s’y rapportant, les données étant ventilées par âge, sexe, handicap, lieu, appartenance ethnique et nationale et situation socioéconomique, et à renforcer la collecte et l’analyse de données sur les enfants handicapés, les enfants demandeurs d’asile, réfugiés ou migrants et les enfants victimes d’infractions, en ce qui concerne leur accès aux services sociaux et aux services de protection sociale et de santé.

Mécanisme de suivi indépendant

12. Le Comité salue la nomination du Commissaire à la protection des droits de l’enfant et du Commissaire aux lois en 2019 et se félicite de la création de quatre postes et d’une ligne budgétaire distincte pour les activités du Commissaire à la protection des droits de l’enfant. Eu égard à son observation générale n o  2 (2002) sur le rôle des institutions nationales indépendantes de défense des droits de l’homme dans la protection et la promotion des droits de l’enfant, il recommande à l’État partie :

a) De garantir l’indépendance du Bureau du Commissaire à la protection des droits de l’enfant et du Bureau du Commissaire aux lois, dans le plein respect des Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris), notamment en ce qui concerne leur financement, leur mandat et leurs immunités ;

b) De doter ces bureaux de ressources humaines, financières et techniques suffisantes, et de veiller à ce qu’ils disposent des pouvoirs et des mécanismes nécessaires pour contrôler le respect des droits de l’enfant, traiter les plaintes et faire appliquer les décisions.

Diffusion, sensibilisation et formation

13. Le Comité prend note des activités de sensibilisation et des formations destinées aux professionnels dans différents domaines mais recommande à l’État partie :

a) De renforcer ses programmes de sensibilisation visant à faire connaître la Convention et les Protocoles facultatifs s’y rapportant au grand public, y compris aux parents et aux enfants eux-mêmes, et de faire participer activement les enfants à ces activités ;

b) De veiller à ce que tous les professionnels concernés reçoivent une formation obligatoire sur les droits de l’enfant et les droits des enfants ayant besoin d’une protection spéciale, notamment les enfants handicapés, les enfants demandeurs d’asile, réfugiés ou migrants et les enfants victimes d’infractions ;

c) De faire connaître à tous les enfants le Protocole facultatif établissant une procédure de présentation de communications et de dispenser une formation sur ce texte aux acteurs concernés, y compris aux enfants défenseurs des droits de l’homme.

Coopération avec la société civile

14. Le Comité prend note avec satisfaction du soutien que l’État partie apporte à la société civile, notamment dans le cadre de son programme de subventions, et lui recommande d’associer systématiquement tous les groupes d’enfants et les organisations non gouvernementales œuvrant au service des enfants, y compris des enfants handicapés et des enfants demandeurs d’asile, réfugiés ou migrants, à l’élaboration, à l’exécution, au suivi et à l’évaluation des lois, politiques et programmes relatifs aux enfants et à l’établissement de rapports au titre de la Convention.

Droits de l’enfant et entreprises

15. Compte tenu de la contribution importante du secteur des voyages et du tourisme au produit intérieur brut, le Comité, rappelant son observation générale n o  16 (2013) sur les obligations des États concernant les incidences du secteur des entreprises sur les droits de l’enfant, recommande à l’État partie :

a) D’établir et d’appliquer des dispositions réglementaires visant à garantir que les entreprises, y compris celles du secteur du tourisme, respectent les normes internationales relatives aux droits de l’homme et aux droits de l’enfant ;

b) D’assurer le contrôle effectif du respect de ces règles et, en cas d’infraction, de prendre des sanctions appropriées et de prévoir des voies de recours ;

c) De contraindre les entreprises à évaluer les effets de leurs activités sur les droits de l’enfant s’agissant de l’environnement et de la santé, à mener des consultations sur ces questions et à rendre publiques toutes les informations y relatives ainsi que les mesures qu’elles prévoient de prendre pour réduire ces effets ;

d) De mener des campagnes de sensibilisation auprès des prestataires de services touristiques et du grand public pour prévenir l’exploitation sexuelle des enfants dans le secteur des voyages et du tourisme.

B.Définition de l’enfant (art. 1er)

16. Le Comité recommande à l’État partie de modifier sa législation afin de supprimer toutes les exceptions à l’interdiction du mariage de personnes de moins de 18 ans.

C.Principes généraux (art. 2, 3, 6 et 12)

Non-discrimination

17.Le Comité prend note avec satisfaction de l’adoption et de l’application dans les écoles du Code de conduite contre le racisme et du Guide de la prise en charge et du signalement des faits de racisme, ainsi que des mesures visant à améliorer l’accès des enfants en situation de vulnérabilité à l’éducation et aux soins de santé. Il reste néanmoins préoccupé par ce qui suit :

a)Il n’existe pas de législation, de stratégie ou de plan d’action globaux visant à lutter contre la discrimination ;

b)Les cas de discrimination et de racisme à l’égard d’enfants en situation de vulnérabilité, y compris le harcèlement en milieu scolaire, sont rarement signalés, ce qui empêche d’évaluer précisément ce phénomène et d’élaborer des politiques adaptées ;

c)Les enfants demandeurs d’asile, réfugiés ou migrants n’ont pas suffisamment accès aux soins de santé et aux services sociaux en raison de la nationalité, du lieu de résidence ou du statut juridique de leurs parents ;

d)Les enfants handicapés, les enfants appartenant à des groupes minoritaires, les enfants demandeurs d’asile, réfugiés ou migrants, les enfants issus de familles défavorisées sur le plan socioéconomique, les enfants faisant l’objet d’une protection de remplacement, les enfants roms et les autres enfants en situation de vulnérabilité ont rarement accès à une éducation ordinaire inclusive, sans ségrégation.

18. Rappelant les cibles 5.1 et 10.3 des objectifs de développement durable et ses recommandations précédentes , le Comité recommande à l’État partie :

a) D’adopter une loi anti-discrimination complète interdisant la discrimination quel qu’en soit le motif, y compris les origines et la situation des parents ou du représentant légal de l’enfant, conformément à l’article 2 ( par.  1) de la Convention, et de modifier sa législation en conséquence ;

b) D’encourager les enfants, les personnes qui s’en occupent et les enseignants ainsi que les autres professionnels travaillant au contact et au service des enfants à signaler les cas de discrimination par des voies appropriées adaptées aux enfants, et de faire en sorte que ces professionnels connaissent mieux le principe de non ‑ discrimination et son application et aient conscience de la responsabilité qui leur incombe de signaler ces discriminations et d’appliquer les politiques pertinentes ;

c) De veiller à ce que tous les cas de discrimination à l’égard d’enfants donnent lieu à une enquête et à des poursuites et à ce que les auteurs de ces discriminations, y compris les enseignants, répondent de leurs actes ;

d) De collecter des données, ventilées par âge, sexe, handicap, lieu, appartenance ethnique et nationale et milieu socio économique, afin d’évaluer l’ampleur de la discrimination dont les enfants sont victimes pour divers motifs ;

e) D’élaborer, d’adopter et de mettre en œuvre, à la lumière de ces données, une politique, une stratégie et un plan d’action globaux visant à lutter contre la discrimination qui soient assortis d’indicateurs particuliers et de cibles et objectifs mesurables, afin de combattre la discrimination dans tous les domaines de la vie, en portant une attention particulière aux enfants en situation de vulnérabilité ;

f) De renforcer les mesures visant à ce que les enfants handicapés, les enfants appartenant à des minorités, les enfants demandeurs d’asile, réfugiés ou migrants, les enfants issus de familles défavorisées sur le plan socioéconomique, les enfants faisant l’objet d’une protection de remplacement, les enfants roms et les autres enfants en situation de vulnérabilité aient accès aux soins de santé, aux services sociaux et à une éducation ordinaire inclusive, d’assurer un suivi régulier et systématique de ces mesures et d’en évaluer les effets.

Intérêt supérieur de l’enfant

19. Compte tenu de son observation générale n o  14 (2013) sur le droit de l’enfant à ce que son intérêt supérieur soit une considération primordiale, le Comité recommande à l’État partie :

a) De faire en sorte que le droit de l’enfant à ce que son intérêt supérieur soit une considération primordiale soit dûment intégré ainsi qu’interprété et appliqué de manière cohérente dans toutes les procédures et décisions législatives, administratives et judiciaires, y compris en ce qui concerne l’asile, ainsi que dans l’ensemble des politiques, des programmes et des projets ayant une incidence sur les enfants ;

b) D’élaborer des procédures et des critères visant à aider toutes les personnes ayant autorité à déterminer l’intérêt supérieur de l’enfant dans tous les domaines et à en faire une considération primordiale.

Respect de l’opinion de l’enfant

20. Le Comité note avec préoccupation que les enfants ne sont pas suffisamment reconnus comme des sujets de droits et que leur opinion est rarement entendue, notamment sur les questions de migration et d’éducation. Compte tenu de son observation générale n o  12 (2009) sur le droit de l’enfant d’être entendu, il recommande à l’État partie :

a) De veiller à ce que les enfants soient reconnus comme des sujets de droits ;

b) De supprimer toute limite d’âge applicable au droit de l’enfant d’exprimer son opinion, et de veiller à ce que son droit d’être entendu dans les procédures judiciaires le concernant, y compris en matière d’asile, soit inscrit dans la législation et effectivement réalisé, notamment en établissant des systèmes et des procédures aux fins de l’application de ce principe et en donnant aux tribunaux et aux professionnels qui travaillent au contact et au service des enfants les moyens de les utiliser ;

c) De faire en sorte que les structures participatives, notamment le Parlement des enfants, les conseils centraux d’élèves, le Comité consultatif de la jeunesse et le Conseil de la jeunesse, représentent des enfants issus de groupes ethniques, religieux, linguistiques et culturels divers, ainsi que les enfants handicapés, et disposent des ressources nécessaires pour s’acquitter de leur mandat ;

d) De s’attaquer aux stéréotypes négatifs et à la stigmatisation qui entravent la participation des enfants en situation de vulnérabilité ;

e) De sensibiliser les parents et les professionnels concernés au droit des enfants d’être entendus, d’encourager la participation effective et active de tous les enfants dans la famille, dans la communauté et à l’école, de tenir compte de leur opinion et de les associer à la prise de décisions sur toutes les questions les concernant.

D.Libertés et droits civils (art. 7, 8 et 13 à 17)

Enregistrement des naissances et nationalité

21. Compte tenu de la cible 16.9 des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l’État partie :

a) De mettre en place, entre autres protections juridiques, une législation et des procédures visant notamment la suppression des frais d’enregistrement des naissances, afin de prévenir l’apatridie ;

b) De faciliter l’obtention de la nationalité pour les enfants qui autrement seraient apatrides, quels que soient la citoyenneté, le lieu de résidence, le statut juridique et la situation matrimoniale de leurs parents, en accordant une attention particulière aux enfants nés de parents réfugiés, demandeurs d’asile, migrants ou apatrides, indépendamment de l’existence du lien familial avant le départ du pays d’origine ;

c) D’envisager de ratifier la Convention relative au statut des apatrides, la Convention sur la réduction des cas d’apatridie et la Convention européenne sur la nationalité.

E.Violence à l’égard des enfants (art. 19, 24 (par. 3), 28 (par. 2), 34, 37 (al. a) et 39)

Châtiments corporels

22. S’il note que l’article 54 de la loi sur les enfants a été modifié de manière à interdire d’infliger des châtiments corporels à des enfants de moins de 16 ans, le Comité, rappelant son observation générale n o  8 (2006) sur le droit de l’enfant à une protection contre les châtiments corporels et les autres formes cruelles ou dégradantes de châtiments, demande instamment à l’État partie d’étendre l’interdiction des châtiments corporels à tous les enfants de moins de 18 ans, de réviser sa législation en conséquence et de promouvoir des formes d’éducation et de discipline positives, non violentes et participatives.

Violence à l’égard des enfants y compris la maltraitance et la négligence

23.Le Comité salue l’adoption de la loi sur la violence familiale (prévention et protection des victimes) (no L.119(I)/2000) et de la loi visant à prévenir et combattre les abus sexuels sur enfants, l’exploitation sexuelle des enfants et la pédopornographie (no 91(I)/2014), la création de la Maison des enfants, qui offre aux enfants victimes d’abus sexuels des services multidisciplinaires, et l’adoption de mesures pour lutter contre le harcèlement à l’école. Il reste cependant préoccupé par :

a)La quantité insuffisante de données ventilées sur les cas de violence à l’égard d’enfants, due notamment au sous-signalement de ces violences et au manque de coordination des autorités compétentes, qui empêche d’évaluer précisément l’ampleur du phénomène ou de prendre des mesures ciblées pour y remédier ;

b)Le faible nombre d’interventions, d’enquêtes, de poursuites et de condamnations dans les affaires de violence contre des enfants ;

c)Le fait que l’aide aux enfants victimes de la violence sous toutes ses formes pâtit d’un manque de moyens professionnels et n’obéit pas à une approche pluridisciplinaire adaptée aux enfants, notamment dans le cadre des procédures pénales ;

d)L’impossibilité pour un enfant victime de maltraitance de subir un examen médical et de recevoir une aide psychologique et psychiatrique sans l’accord de ses parents ;

e)L’absence de cadre juridique et le manque de transparence concernant le fonctionnement et le contrôle des activités de la Maison des enfants.

24. Eu égard à son observation générale n o  13 (2011) sur le droit de l’enfant d’être protégé contre toutes les formes de violence et aux cibles 5.2, 16.1 et 16.2 des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l’État partie :

a) De veiller à ce que les lois sur l’exploitation sexuelle d’enfants et les abus sexuels sur enfants et les lois sur la violence dans la famille soient réellement appliquées, à ce qu’elles le soient conjointement et de manière interchangeable s’il y a lieu, et à ce que leur mise en œuvre fasse régulièrement et systématiquement l’objet d’un suivi et d’une évaluation ;

b) De renforcer et de centraliser la collecte et l’analyse de données ventilées sur les enfants victimes de la violence sous toutes ses formes, telles que la violence familiale, les châtiments corporels, le harcèlement ainsi que l’exploitation sexuelle et les abus sexuels, y compris les violences commises dans le cercle de confiance de l’enfant et par des religieux, pour évaluer l’ampleur du phénomène et élaborer et appliquer, avec la participation des enfants, une stratégie globale visant à prévenir et combattre toutes les formes de violence à l’égard des enfants ;

c) De garantir et de promouvoir le signalement obligatoire des cas de violence à l’égard d’enfants, notamment en modifiant la législation, en sensibilisant davantage les enfants, les parents et les professionnels travaillant auprès d’enfants aux différentes formes que revêt cette violence et à ses effets négatifs, en mettant en place un service d’assistance téléphonique accessible, respectueux de la confidentialité et adapté aux enfants et en assurant un accès effectif à l’aide juridictionnelle ;

d) De veiller à ce que tous les cas de violence à l’égard d’enfants fassent rapidement l’objet d’une enquête, en adoptant une approche multisectorielle adaptée dans la Maison des enfants, à ce que des enregistrements audiovisuels des témoignages d’enfants soient réalisés et acceptés comme preuve principale dans le cadre des procédures judiciaires et à ce qu’il soit procédé par la suite à un contre-interrogatoire adapté aux enfants ;

e) De faire en sorte que les auteurs de violences à l’égard d’enfants soient poursuivis et dûment sanctionnés, à ce qu’ils soient empêchés d’avoir des contacts avec des enfants et que des réparations soient accordées aux victimes, le cas échéant ;

f) De veiller à ce que tous les cas de violence à l’égard d’enfants soient traités dans le cadre d’une approche multidisciplinaire et d’une coopération entre les services compétents, de doter les acteurs concernés des ressources nécessaires et de renforcer leurs capacités professionnelles afin qu’ils assurent des services complets, coordonnés et adaptés aux enfants en matière de repérage des victimes, d’évaluation de leurs besoins et de prise en charge, notamment sous forme de thérapie axée sur le traumatisme, d’améliorer la gestion des dossiers et de réduire les délais de traitement, et de renforcer le rôle des conseillers familiaux en ce qui concerne la protection des enfants contre toutes les formes de violence et de maltraitance ;

g) De faire en sorte, notamment en révisant la loi sur les procédures pénales et la loi sur l’aide juridictionnelle, que les procédures pénales soient respectueuses des droits des enfants victimes de violences, y compris de leur droit d’accéder à l’information, de faire entendre leur opinion et de bénéficier d’une aide juridictionnelle ou d’autres formes de soutien nécessaires, telles qu’une aide psychologique ou des services de traduction et d’interprétation ;

h) De mettre en place à l’intention des juges, des avocats, des procureurs, des policiers et des autres professionnels concernés des formations régulières portant sur des procédures normalisées de prise en charge des victimes qui soient adaptées aux enfants et tiennent compte des questions de genre ;

i) De consolider les fondements juridiques régissant le fonctionnement de la Maison des enfants afin de définir ses services, notamment dans le contexte des procédures judiciaires préalables au procès, et de renforcer la collaboration avec les organismes partenaires et le suivi de ses activités.

Pratiques préjudiciables

25. Rappelant la recommandation générale n o  31 du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et son observation générale n o  18 sur les pratiques préjudiciables, adoptées conjointement (2019), ainsi que la cible 5.3 des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l’État partie :

a) D’évaluer l’ampleur du phénomène du mariage d’enfants et de prendre toutes les mesures nécessaires pour le combattre, notamment dans la communauté rom et chez les migrants, et de sensibiliser la population aux effets néfastes du mariage d’enfants sur la santé physique et mentale des filles ;

b) De faire en sorte qu’aucun enfant, notamment aucun enfant intersexe, ne fasse l’objet de traitements médicaux ou d’interventions chirurgicales qui ne sont pas nécessaires, conformément aux droits de l’enfant à l’intégrité physique, à l’autonomie et à la libre disposition de soi, et d’offrir aux enfants intersexes et à leur famille des services d’assistance sociale, médicale et psychologique ainsi que des conseils, un soutien et des mesures de réparation appropriées.

F.Milieu familial et protection de remplacement (art. 5, 9 à 11, 18 (par. 1 et 2), 20, 21, 25 et 27 (par. 4))

Milieu familial

26. Le Comité recommande à l’État partie de tirer profit de sa réforme du droit de la famille et de la restructuration des services de protection sociale pour :

a) Renforcer le soutien aux familles afin de prévenir la séparation, y compris en mettant en place des programmes d’aide aux parents, de prévention et d’intervention précoce, des programmes de formation à la parentalité et à la communication positives et des espaces de loisirs pour les familles ;

b) Fournir un soutien et des services appropriés, y compris une aide sociale et psychologique, aux enfants et aux parents en situation de conflit ou de séparation ;

c) Faire en sorte que les enfants de parents séparés jouissent du droit d’entretenir régulièrement des relations personnelles et des contacts directs avec leurs deux parents, si cela n’est pas contraire à leur intérêt supérieur, conformément à l’article 9 ( par.  3) de la Convention, et appuyer l’exécution des décisions de justice à cet égard.

Enfants privés de milieu familial

27.Le Comité est préoccupé par :

a)L’absence de cadre juridique relatif à la protection de l’enfance ;

b)L’insuffisance des moyens dont disposent les services de protection sociale pour répondre aux besoins des enfants dans les contextes de séparation familiale ;

c)Le manque de données sur les enfants faisant l’objet d’une protection de remplacement ;

d)Le fait que des parents peuvent placer leurs enfants en famille d’accueil selon des arrangements privés, sans que cette famille soit dûment évaluée par les services de protection sociale ou que l’intérêt supérieur des enfants soit déterminé ;

e)L’absence de réglementation et de contrôle des structures d’accueil institutionnelles et familiales ;

f)L’insuffisance de l’aide apportée aux familles d’accueil ;

g)L’absence de programmes de soutien pour les enfants pris en charge, notamment ceux qui présentent des troubles du comportement ;

h)L’insuffisance des informations sur les enfants quittant les structures d’accueil.

28. Appelant son attention sur les Lignes directrices relatives à la protection de remplacement pour les enfants, le Comité recommande à l’État partie :

a) D’élaborer et d’adopter sans plus tarder un cadre juridique de protection de l’enfance visant entre autres à donner aux enfants et aux parents le droit de bénéficier de services d’aide et à définir les compétences des services de protection sociale ;

b) D’allouer des ressources humaines, financières et techniques suffisantes aux services de protection sociale pour renforcer leurs capacités de prévention et d’intervention dans les contextes de séparation familiale, aux niveaux national et local, et de garantir des services et un soutien adaptés aux enfants et fondés sur leur intérêt supérieur ;

c) De recueillir, sur les enfants faisant l’objet d’une protection de remplacement, y compris ceux qui sont placés en famille d’accueil selon des arrangements privés, des données ventilées par âge, sexe, appartenance ethnique, nationalité, handicap et type de prise en charge, d’élaborer à la lumière de ces données une stratégie de désinstitutionnalisation accompagnée d’un plan d’action visant notamment une transformation structurelle des systèmes de prise en charge et de protection des enfants, et de consacrer suffisamment de ressources à leur mise en œuvre ;

d) De fournir un accompagnement et une aide sociale aux parents qui souhaitent placer un enfant en famille d’accueil selon des arrangements privés pour les inciter à continuer de s’occuper de cet enfant et leur en donner les moyens, et de veiller à ce qu’une protection de remplacement ne soit mise en place que si cette mesure n’a pas porté ses fruits et qu’il existe des raisons acceptables et légitimes de recourir à une telle protection ;

e) De veiller à ce que les enfants ne soient séparés de leur famille que si cela sert leur intérêt supérieur et après une évaluation complète de leur situation, et qu’une telle séparation n’ait jamais pour seule justification la pauvreté, le handicap ou l’appartenance ethnique ;

f) D’établir des normes de qualité pour toutes les structures de protection de remplacement, de veiller à ce que le placement d’enfants dans les structures d’accueil institutionnelles et familiales fasse l’objet d’une évaluation périodique et approfondie, et de contrôler la qualité de la prise en charge dans ces structures ;

g) De renforcer encore le soutien apporté aux parents d’accueil et aux personnes qui s’occupent d’enfants en institution, notamment en leur dispensant une formation régulière et adaptée avant et pendant le placement, une attention particulière devant être portée aux besoins particuliers et aux vulnérabilités des enfants ;

h) De mettre en place des programmes d’aide aux enfants placés, notamment des mesures d’accompagnement et des services soutien psychologique et de psychothérapie ;

i) D’apporter l’appui nécessaire aux enfants qui quittent des structures d’accueil, de mettre en place des services de proximité pour les aider à devenir autonomes et de prendre les mesures voulues pour empêcher la stigmatisation des enfants faisant l’objet d’une protection de remplacement.

Adoption

29. Notant avec préoccupation que les modifications devant être apportées à la loi relative à l’adoption sont à l’examen depuis 2013, le Comité prie instamment l’État partie d’accélérer l’adoption de la version révisée de ce texte en veillant à ce que qu’elle soit pleinement conforme à la Convention relative aux droits de l’enfant et à la Convention de La Haye sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale, notamment en ce qui concerne l’interdiction des adoptions privées et la prise en compte de l’intérêt supérieur de l’enfant comme considération primordiale dans les procédures d’adoption.

G.Enfants handicapés (art. 23)

30.Le Comité est vivement préoccupé par :

a)L’approche médicale du handicap dans la législation et la pratique, notamment dans les nouvelles procédures d’évaluation du handicap et de la fonctionnalité, qui conduit à l’exclusion des enfants handicapés, y compris de l’enseignement ordinaire, et perpétue leur stigmatisation ;

b)L’absence de définition uniforme du handicap, qui contraint les enfants à subir plusieurs évaluations éprouvantes et limite leur accès à une aide financière ;

c)Le taux élevé de placement en institution des enfants handicapés et le manque de soutien apporté aux parents pour leur permettre de s’occuper de leurs enfants ;

d)L’accès insuffisant aux soins de santé publics, notamment aux procédures de détection précoce et aux services de réadaptation, qui oblige les parents à recourir à des services de santé privés à leurs propres frais ;

e)Les obstacles à la participation des enfants handicapés et l’absence d’organisation chargée de les représenter ;

f)L’insuffisance des données sur les enfants handicapés, qui empêche d’évaluer dans quelle mesure ils jouissent des droits qu’ils tiennent de la Convention.

31. Compte tenu de son observation générale n o  9 (2006) sur les droits des enfants handicapés, le Comité prie instamment l’État partie d’adopter une approche du handicap fondée sur les droits de l’homme, de se doter d’une stratégie globale d’inclusion des enfants handicapés et :

a) D’harmoniser sa législation avec le modèle du handicap fondé sur les droits de l’homme et de réviser en conséquence les procédures d’évaluation du handicap ;

b) D’adopter une définition uniforme du handicap qui soit conforme à la Convention relative aux droits des personnes handicapées ;

c) De renforcer le soutien aux parents d’enfants handicapés et de garantir le droit de ces enfants de grandir dans un milieu familial, y compris en augmentant l’offre de services de prise en charge précoce, de soins infirmiers à domicile et d’aide d’urgence, en apportant rapidement un soutien socioéconomique suffisant à tous les enfants handicapés, quel que soit leur type de handicap, et en informant mieux les parents des services disponibles ;

d) De garantir l’accès à des soins de santé abordables dispensés rapidement, notamment en mettant en place des programmes de détection précoce, d’intervention et de réadaptation, en créant un réseau de services de soins ambulatoires et de proximité et en formant un nombre suffisant de professionnels de santé ;

e) De faire en sorte que les enfants handicapés puissent donner leur avis sur les questions les concernant, y compris à l’école, et que leur opinion soit prise en compte, de combattre la stigmatisation entravant leur participation et de soutenir la création d’une organisation chargée de les représenter ;

f) D’organiser la collecte de données sur les enfants handicapés afin d’éclairer ses politiques et programmes et de faciliter l’accès des enfants handicapés aux services, notamment à l’éducation, à la santé, à la protection sociale et à un accompagnement.

H.Santé de base et bien-être (art. 6, 18 (par. 3), 24, 26, 27 (par. 1 à 3) et 33)

Soins de santé et services de santé

32. Le Comité salue l’adoption de la stratégie sur les droits des enfants en matière de santé (2017-2025), la participation des enfants au suivi de sa mise en œuvre et les efforts que fait l’État partie pour promouvoir l’allaitement maternel. Eu égard à son observation générale n o  15 (2013) sur le droit de l’enfant de jouir du meilleur état de santé possible et compte tenu des cibles 2.2 et 3.8 des objectifs de développement durable, il recommande à l’État partie :

a) De veiller à ce que tous les enfants et toutes les femmes enceintes aient accès à des soins de santé de qualité, quel que soit leur statut juridique, notamment en appliquant effectivement la circulaire n o  11.11.09(4) du Ministère de la santé, en date du 2 décembre 2011, et en élargissant la couverture du système national de santé ;

b) De renforcer sa législation encadrant la commercialisation des substituts du lait maternel et de continuer à promouvoir et à favoriser l’allaitement maternel pendant les six premiers mois au moins de la vie du nourrisson, notamment en luttant contre les attitudes négatives à l’égard de l’allaitement maternel dans les lieux publics, en adoptant et en mettant en œuvre des politiques relatives à l’allaitement maternel, en procédant à des aménagements sur le lieu de travail pour les mères allaitantes et en proposant des modalités de travail aménagées aux parents dans les secteurs public et privé ;

c) De recueillir systématiquement des données sur la sécurité alimentaire et la nutrition des enfants, y compris des données relatives à l’allaitement maternel, au surpoids, à l’obésité et aux carences en micronutriments, afin d’éclairer ses politiques et ses stratégies.

Santé des adolescents

33. Le Comité se félicite de l’adoption de la stratégie sur la santé et les droits en matière de sexualité et de procréation des jeunes pour la période 2018-2025. Compte tenu de son observation générale n o  4 (2003) sur la santé et le développement de l’adolescent dans le contexte de la Convention, de son observation générale n o  20 (2016) sur la mise en œuvre des droits de l’enfant pendant l’adolescence et de son observation générale n o  3 (2003) sur le VIH/sida et les droits de l’enfant, et eu égard aux cibles 3.3, 3.5, 3.7 et 5.6 des objectifs de développement durable, il recommande à l’État partie :

a) De permettre à tous les enfants d’accéder à des services de santé de manière confidentielle et de lever l’obligation légale d’obtenir le consentement des deux parents pour fournir des services de santé à un enfant ;

b) De faire en sorte qu’enfants et adultes aient accès à des services de santé mentale, notamment au vu des effets de la pandémie de maladie à coronavirus (COVID ‑ 19) sur les adolescents ;

c) De veiller à ce que l’éducation sexuelle et procréative fasse partie du programme scolaire obligatoire et cible les adolescents et les adolescentes ;

d) De faire en sorte que les adolescents puissent accéder en toute confidentialité à des services de dépistage du VIH et d’accompagnement sans devoir obtenir le consentement de leurs parents, que les professionnels fournissant ces services respectent pleinement les droits des adolescents au respect de leur vie privée et à la non ‑ discrimination et que tous les enfants aient accès à la thérapie antirétrovirale indépendamment de leur nationalité ou de leur statut juridique ;

e) De poursuivre ses efforts pour prévenir et combattre la consommation de substances psychoactives chez les adolescents, notamment en menant des campagnes de sensibilisation, en mettant en place des services spécialisés de traitement de la toxicomanie et de réduction des risques qui soient adaptés aux jeunes et en créant un centre pour les enfants et les adolescents touchés par ce problème.

Niveau de vie

34. Le Comité prend note avec préoccupation de l’augmentation du niveau de pauvreté et du risque de pauvreté et d’exclusion sociale des enfants, qui résulte de la crise économique de 2013 et de ses effets durables. Rappelant les cibles 1.1 à 1.3 des objectifs de développement durable, il recommande à l’État partie :

a) D’adopter des mesures ciblées, notamment une stratégie de réduction de la pauvreté, pour venir à bout de la pauvreté des enfants et prévenir les risques d’exclusion sociale des enfants ;

b) De veiller à ce que les enfants en situation de vulnérabilité et leurs familles perçoivent une aide financière suffisante et aient accès sans discrimination à des services gratuits, en prêtant une attention particulière aux enfants handicapés, aux enfants réfugiés, demandeurs d’asile ou migrants et aux familles monoparentales, et de revoir en conséquence sa législation, notamment la loi sur le revenu minimum garanti, ainsi que ses politiques d’aide et de protection sociales ;

c) De donner aux enfants les moyens de faire face aux situations difficiles, comme la crise économique, en complétant les programmes scolaires, en leur permettant de discuter avec leurs pairs et avec des adultes, en particulier des enseignants, et en leur apportant un soutien psychologique.

Salubrité de l’environnement

35. Le Comité recommande à l’État partie de se conformer à ses obligations internationales en veillant à ce que des mesures soient prises pour assurer une transition progressive des industries fondées sur le carbone vers des sources d’énergie durables et renouvelables.

I.Éducation, loisirs et activités culturelles (art. 28 à 31)

Éducation, y compris la formation professionnelle

36. Le Comité salue les mesures prises pour renforcer la qualité de l’éducation et l’accès aux services d’éducation pour tous les enfants et promouvoir la tolérance et le respect de la diversité, notamment la mise en place du plan stratégique pour l’inclusion des enfants issus de l’immigration et de la stratégie nationale visant à prévenir et combattre la violence en milieu scolaire (2018-2022). Rappelant les cibles 4.1 à 4.5 et 4.a des objectifs de développement durable et ses recommandations précédentes , il recommande à l’État partie :

a) De s’employer à remédier aux carences d’apprentissage dues à la pandémie de COVID-19 ;

b) De continuer de garantir l’accès à une éducation holistique de qualité sans ségrégation, à tous les niveaux et pour tous les enfants en situation de vulnérabilité, notamment les enfants handicapés, les enfants roms, les enfants appartenant à des groupes ethniques minoritaires, les enfants demandeurs d’asile, réfugiés ou migrants, les enfants issus de familles défavorisées sur le plan socio économique et les enfants faisant l’objet d’une protection de remplacement ;

c) De recueillir et d’analyser des données sur l’abandon scolaire et les enfants non scolarisés, ventilées par âge, sexe, appartenance ethnique, nationalité, handicap, lieu et situation socioéconomique, afin d’éclairer ses politiques et stratégies ;

d) De veiller à ce que tous les enfants handicapés aient accès à une éducation inclusive dans des écoles ordinaires, notamment en mettant sa législation en conformité avec la Convention relative aux droits de l’enfant et la Convention relative aux droits des personnes handicapées et en y inscrivant le droit à l’éducation des enfants handicapés, en adoptant un plan d’action ciblé doté de fonds suffisants, en assurant une formation initiale et continue aux enseignants et en garantissant des aménagements raisonnables en ce qui concerne les infrastructures, le soutien pédagogique, les supports et les méthodes d’apprentissage et les plans d’éducation individualisés ;

e) De faire en sorte, notamment en modifiant la législation, que les diplômes et certificats délivrés par des établissements ou des services spécialisés ou à l’issue d’un apprentissage soient reconnus et garantissent l’accès à un emploi rémunéré sur le marché du travail et dans le cadre des programmes de retour à l’emploi ;

f) De mettre en avant et de renforcer le système d’apprentissage ( Sistima Mathitias ), son programme d’enseignement et la formation dispensée à son personnel enseignant, et de combattre efficacement la discrimination à l’égard des élèves suivant des cours dans ce cadre ;

g) De permettre aux enfants qui le souhaitent de ne pas assister aux cours d’instruction religieuse et de suivre des cours de remplacement appropriés, compte tenu des besoins des enfants appartenant à des minorités religieuses ou issus de familles non croyantes, et de veiller à ce que ces enfants ne soient pas stigmatisés ;

h) De procéder régulièrement au suivi et à l’évaluation de ses réformes éducatives avec la participation des enfants, de veiller à ce que l’opinion des enfants soit entendue et prise en considération, compte tenu de leur âge et de leur degré de maturité et de développement, et d’offrir aux enfants d’autres possibilités de peser concrètement sur les questions relatives à l’éducation, notamment les mesures disciplinaires et les procédures de plainte, en portant une attention particulière aux enfants handicapés et aux enfants réfugiés, demandeurs d’asile ou migrants ;

i) De redoubler d’efforts pour promouvoir une culture de paix, le vivre ‑ ensemble et le respect de la diversité à travers l’éducation, en mettant l’accent sur l’élaboration de formations pédagogiques et de programmes scolaires permettant de lutter contre le racisme, la xénophobie et la discrimination, et de garantir la sûreté et la sécurité dans les écoles ;

j) De garantir à tous les enfants le droit au repos et aux loisirs et le droit de se livrer à des activités récréatives comme la pratique d’un sport.

J.Mesures de protection spéciales (art. 22, 30, 32, 33, 35, 36, 37 (al. b) à d)) et 38 à 40)

Enfants demandeurs d’asile, réfugiés ou migrants

37.Le Comité se félicite des nouvelles dispositions législatives imposant la représentation par le Commissaire aux droits de l’enfant des enfants migrants non accompagnés devant les tribunaux et de la mise en place, avec l’Organisation internationale pour les migrations, de programmes permettant à ces enfants de vivre en semi-autonomie, et prend note des efforts déployés pour accueillir et aider les enfants d’Ukraine. Il demeure toutefois préoccupé par :

a)Les retours forcés, ou renvois, qui entraînent des refoulements et provoquent la séparation de membres d’une même famille ;

b)Le recours fréquent aux procédures médicales pour déterminer l’âge des personnes et l’insuffisance de l’accès aux mécanismes d’appel ;

c)Le fait que les enfants non accompagnés et les enfants séparés ne bénéficient d’une représentation légale à aucun moment de la procédure d’asile et le retard pris dans le traitement de leurs demandes de protection internationale et de regroupement familial, l’intérêt supérieur de l’enfant étant rarement pris en compte ;

d)Les mauvaises conditions de vie dans les centres d’accueil surpeuplés tels que Pournara et Kofinou comme dans les refuges, où l’accès aux soins de santé, à l’éducation et aux loisirs est insuffisant, et la violence physique et sexuelle, qui s’est aggravée dans le contexte de la pandémie de COVID-19 ;

e)L’absence de procédure de détection précoce et de renvoi vers des services spécialisés pour les enfants en situation de vulnérabilité ou ayant des besoins particuliers ;

f)L’exclusion des enfants demandeurs d’asile des régimes d’allocations sociales et d’invalidité et les dispositions selon lesquelles les bénéficiaires de la protection internationale doivent justifier de cinq ans de résidence dans le pays ;

g)Le soutien insuffisant apporté aux enfants non accompagnés entrant dans l’âge adulte ;

h)L’absence de stratégie et de plan d’action visant à intégrer la population migrante, y compris les enfants.

38. Rappelant l’observation générale conjointe n o  3 du Comité pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille et n o  22 du Comité des droits de l’enfant (2017) et l’observation générale conjointe n o  4 du Comité pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille et n o  23 du Comité des droits de l’enfant (2017), qui portent sur les droits de l’homme des enfants dans le contexte des migrations internationales, ainsi que son observation générale n o  6 (2005) sur le traitement des enfants non accompagnés et des enfants séparés en dehors de leur pays d’origine, le Comité prie instamment l’État partie :

a) De mettre fin à la pratique des retours forcés, ou renvois, de familles et d’enfants, de faire respecter le principe de non-refoulement dans la gestion des frontières, de veiller à ce que les enfants bénéficient d’une protection appropriée, aient accès aux procédures d’asile et reçoivent une assistance juridique et humanitaire, conformément aux articles 6, 22 et 37 de la Convention, d’enquêter sur les renvois et de faire en sorte que les responsables rendent des comptes ;

b) De faire en sorte que la procédure de détermination de l’âge soit pluridisciplinaire, fondée sur des données scientifiques, respectueuse des droits des enfants et harmonisée entre les autorités d’exécution, d’accorder le bénéfice du doute aux personnes soumises à une telle évaluation, de tenir compte des pièces justificatives ou autres disponibles et de garantir l’accès à des mécanismes de recours efficace, notamment en informant les demandeurs des motifs de la décision les concernant ;

c) De veiller à ce que les enfants séparés ou non accompagnés soient représentés par des avocats compétents tout au long de la procédure d’asile, de réduire les délais de traitement des demandes d’asile et de regroupement familial et de faire en sorte que l’intérêt supérieur de l’enfant soit une considération primordiale dans toutes les décisions relatives aux enfants demandeurs d’asile, notamment en mettant en place une procédure officielle de détermination de l’intérêt supérieur ;

d) De fournir à tous les enfants réfugiés, demandeurs d’asile ou non accompagnés un hébergement durable et de qualité dans des structures ouvertes qui leur offrent un espace de vie suffisant, où ils ont accès à des soins de santé, à des services psychosociaux, à l’éducation et aux loisirs et dont le personnel est dûment formé à travailler auprès d’enfants, d’enquêter sur les cas signalés de violence et de poursuivre et traduire en justice les auteurs de ces violences ;

e) D’établir une procédure officielle complète permettant de déterminer, d’évaluer et de satisfaire les besoins particuliers des enfants demandeurs d’asile, y compris en assurant un suivi, et de leur apporter des solutions durables ;

f) De garantir le repérage rapide des enfants non accompagnés ou séparés et des enfants réfugiés ou demandeurs d’asile ayant des besoins particuliers et leur orientation rapide vers des services de réadaptation spécialisés et une prise en charge psychosociale, en ciblant particulièrement les enfants victimes de la traite, les enfants atteints de maladies graves, les enfants handicapés et les enfants victimes de violences, notamment de mutilations génitales féminines ou d’enrôlement forcé ;

g) D’apporter un soutien aux enfants migrants non accompagnés qui entrent dans l’âge adulte, notamment en développant les programmes favorisant l’autonomie de vie et en mettant en place des plans de réinsertion adaptés ;

h) D’adopter une stratégie et un plan d’action visant à faciliter l’intégration des enfants réfugiés, demandeurs d’asile ou migrants dans la société.

Vente, traite et enlèvement

39. Le Comité salue l’adoption de la loi sur la prévention et la répression de la traite et de l’exploitation des personnes et sur la protection des victimes, telle que modifiée en 2019, qui prévoit des peines plus lourdes en cas de traite des êtres humains, notamment lorsque les victimes sont des enfants, et accueille avec satisfaction la mise en place du mécanisme national d’orientation et d’un système de contrôle systématique des demandeurs d’asile récemment arrivés, ainsi que l’adoption du plan d’action national contre la traite (2019-2021). Notant avec préoccupation que les enfants non accompagnés et les enfants de parents migrants, roms ou demandeurs d’asile risquent particulièrement d’être victimes de la traite à des fins d’exploitation sexuelle et de travail forcé et rappelant la cible 8.7 des objectifs de développement durable et ses recommandations précédentes , il recommande à l’État partie :

a) De mettre en adéquation la législation relative à la lutte contre la traite des êtres humains et la législation relative à l’asile afin de pouvoir établir des ponts entre les deux et d’assurer l’accès des enfants migrants victimes de la traite aux droits, notamment au droit de séjour, et à des garanties procédurales ;

b) D’adopter un plan d’action national en faveur des enfants victimes de la traite et de veiller à ce qu’il soit appliqué de manière coordonnée par les autorités compétentes ;

c) De renforcer les mécanismes permettant de détecter rapidement les victimes de la traite, de les évaluer et de les orienter vers les services appropriés, ainsi que la formation professionnelle dans ce domaine, en accordant une attention particulière aux enfants non accompagnés, aux enfants de parents migrants, roms ou demandeurs d’asile et aux autres enfants en situation de vulnérabilité ;

d) De mettre en place un numéro d’urgence pour les victimes de la traite, d’allouer les ressources nécessaires à son bon fonctionnement, de former le personnel à offrir une assistance adaptée aux enfants et tenant compte de leurs besoins et de faire en sorte que les enfants sachent comment contacter le service ;

e) De garantir l’accès des enfants victimes à des services spécialisés (hébergement, soins de santé et soutien financier notamment) ainsi qu’à une indemnisation et d’aider les organisations non gouvernementales qui leur fournissent une assistance ;

f) D’affecter des ressources suffisantes au service de police chargé de la lutte contre la traite des personnes afin qu’il puisse enquêter efficacement sur les cas de traite d’enfants, engager des poursuites et faire en sorte que les responsables soient dûment condamnés, y compris pour complicité d’agents de l’État, tout en réduisant les délais de procédure ;

g) De faire en sorte que les dispositions relatives à la protection des victimes et des témoins soient appliquées et que les poursuites soient centrées sur les victimes et adaptées aux enfants et tiennent compte des questions de genre, et de former les juges, les procureurs et les membres des forces de l’ordre sur ces questions ;

h) De réaliser une étude sur l’exploitation économique des enfants ;

i) De mener des activités visant à sensibiliser les parents et les enfants aux dangers de la traite.

Administration de la justice pour enfants

40. Compte tenu de son observation générale n o  24 (2019) sur les droits de l’enfant dans le système de justice pour enfants, de l’étude mondiale des Nations Unies sur les enfants privés de liberté et de ses précédentes recommandations , le Comité note avec satisfaction que la loi sur les enfants en conflit avec la loi a été adoptée en 2021 et prie instamment l’État partie :

a) D’appliquer la loi portant création d’un système de justice pour enfants, qui prévoit notamment la mise en place de tribunaux pour enfants et de procédures spécialisées et la mobilisation des ressources humaines, techniques et financières nécessaires à cette fin, et de désigner et de former des juges pour enfants ;

b) D’adopter une approche préventive face au problème des enfants en conflit avec la loi ;

c) De faire en sorte que la détention soit une mesure de dernier ressort imposée pour la période la plus courte possible et réexaminée à intervalles réguliers en vue d’être levée, et que les enfants ne soient pas détenus avec des adultes ;

d) D’encourager la déjudiciarisation, la médiation et l’accompagnement pour les enfants accusés d’infractions pénales et de promouvoir autant que possible l’application de peines non privatives de liberté telles que la mise à l’épreuve ou les travaux d’intérêt général ;

e) De veiller à ce que les enfants n’aient pas affaire au système de justice pour adultes.

Enfants victimes ou témoins d’infractions

41. Le Comité rappelle que l’État partie devrait faire en sorte que tous les enfants victimes ou témoins d’infractions bénéficient d’une protection, ainsi que le prévoit la Convention, et assurer l’application de la loi établissant des normes minimales concernant les droits, le soutien et la protection des victimes de la criminalité.

K.Suite donnée aux précédentes observations finales et recommandations du Comité portant sur l’application des Protocoles facultatifs à la Convention

Protocole facultatif concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés

42. Le Comité regrette que l’État partie ne lui ait pas fourni d’informations sur la suite donnée à ses observations finales concernant le rapport qu’il a soumis au titre de l’article 8 ( par.  1) du Protocole facultatif et lui demande instamment :

a) De mettre fin à l’enrôlement forcé d’enfants dans les forces armées et à l’utilisation d’enfants dans des hostilités, notamment en modifiant la loi relative à la Garde nationale ;

b) D’établir sa compétence extraterritoriale pour les actes interdits par le Protocole facultatif et de supprimer la condition de la double incrimination ;

c) De mettre en place des mécanismes de repérage rapide des enfants demandeurs d’asile originaires de zones de conflit, de recueillir des données ventilées sur ces enfants et de renforcer l’appui matériel et psychologique qui leur est apporté ;

d) De dispenser une formation sur le Protocole facultatif et les droits de l’enfant aux enfants, à leur famille et à tous les professionnels travaillant au contact ou au service des enfants.

L.Ratification d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme

43. Le Comité recommande à l’État partie d’envisager de ratifier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.

44. Le Comité demande instamment à l’État partie de s’acquitter des obligations qui lui incombent en matière de soumission de rapports au titre du Protocole facultatif concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, sachant qu’il aurait dû soumettre son rapport au plus tard le 6 mai 2018.

M.Coopération avec les organismes régionaux

45. Le Comité recommande à l’État partie de continuer de coopérer avec le Conseil de l’Europe aux fins de la mise en œuvre de la Convention et des autres instruments relatifs aux droits de l’homme, aussi bien sur son territoire que dans les autres États membres du Conseil de l’Europe.

V.Mise en œuvre et soumission de rapports

A.Suivi et diffusion

46. Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures voulues pour que les recommandations figurant dans les présentes observations finales soient pleinement appliquées et pour qu’une version adaptée soit diffusée auprès des enfants, y compris les plus défavorisés d’entre eux, et leur soit largement accessible. Il recommande également que le rapport valant cinquième à sixième rapports périodiques, les réponses écrites de l’État partie et les présentes observations finales soient largement diffusés dans les langues du pays.

B.Prochain rapport

47. Le Comité invite l’État partie à soumettre son rapport valant septième à huitième rapports périodiques le 8 mars 2027 au plus tard et à y faire figurer des renseignements sur la suite donnée aux présentes observations finales. Ce rapport devra être conforme aux directives spécifiques à l’instrument et ne pas dépasser 21 200 mots . Si l’État partie soumet un rapport dont le nombre de mots excède la limite fixée, il sera invité à en réduire la longueur. S’il n’est pas en mesure de remanier son rapport et de le soumettre à nouveau, la traduction de ce rapport aux fins d’examen par le Comité ne pourra pas être garantie.

48. Le Comité invite en outre l’État partie à soumettre un document de base actualisé qui ne dépasse pas 42 400 mots et soit conforme aux prescriptions applicables aux documents de base figurant dans les directives harmonisées concernant l’établissement des rapports à présenter en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, englobant le document de base commun et les rapports pour chaque instrument , et au paragraphe 16 de la résolution 68/268 de l’Assemblée générale.