Nations Unies

CED/C/GAB/CO/1/Add.1

Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées

Distr. générale

8 novembre 2018

Original : français

Anglais, espagnol et français seulement

Comité des disparitions forcées

Observations finales concernant le rapport soumis par le Gabon en application du paragraphe 1 de l’article 29 de la Convention

Additif

Renseignements reçus du Gabon au sujet de la suite donnée aux observations finales *

[Date de réception : 26 septembre 2018]

Recommandation 26 : L’Etat partie devrait adopter des mesures pour garantir qu’une enquête exhaustive et impartiale soit menée sans tarder, y compris en l’absence de plainte formelle, quant aux événements du 31 août 2016 et que ses résultats soient rendus publics.

1.Suite aux allégations de disparitions forcées et autres faits répréhensibles au lendemain des événements du 31 août 2016, une enquête a effectivement été ouverte dans les différentes unités de police judiciaire début septembre 2016.

2.Ces enquêtes sont toujours en cours, dans la perspective de permettre des dénonciations par quiconque allègue que des personnes ont été victimes de disparitions forcées conformément aux dispositions de l’article 18 du Code de Procédure Pénale. À ce jour, aucune dénonciation de disparition forcée n’a été reçue par les officiers de police judiciaire.

3.Toutefois, la prescription en matière criminelle étant de vingt ans, et en matière délictuelle de dix ans, l’enquête suit son cours.

Recommandation 33 : Le Comité recommande à l’Etat partie d’adopter toutes les mesures nécessaires en vue d’établir un mécanisme national de prévention doté des ressources financières, humaines et techniques nécessaires pour s’acquitter de son mandat avec efficacité.

4.Les mesures adoptées par l’Etat pour l’établissement d’un mécanisme national de prévention de la torture efficace se limitent pour l’heure au projet de loi organique portant création de l’Instance Nationale pour la Prévention de la Torture (INPT) en République Gabonaise.

5.Ledit projet de loi, résultat d’un travail inclusif de 2013 à 2018 avec l’appui constant du Sous-Comité pour la Prévention de la Torture (SPT), de l’Association pour la prévention de la torture (APT) et du Centre des Nations Unies pour les droits de l’Homme et la Démocratie en Afrique centrale est actuellement au Secrétariat du Gouvernement pour transmission et adoption en conseil des ministres.

6.L’Instance Nationale pour la Prévention de la Torture (INPT) officie en tant que Mécanisme National de Prévention de la Torture conformément au Protocole facultatif à la Convention des Nations Unies contre la Torture. Son mandat vise toutes les formes de « torture et autre peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants » et s’applique à tous les lieux de privation de liberté, c’est-à-dire selon l’article 4 du traité « dans tout lieu placé sous sa juridiction ou sous son contrôle où se trouvent ou pourraient se trouver des personnes privées de liberté sur l’ordre d’une autorité publique ou à son instigation, ou avec son consentement exprès ou tacite ».

7.Le champ d’investigation de l’INPT est donc particulièrement large et concerne l’ensemble des lieux privatifs de liberté. Il devra donc également pouvoir accéder aux lieux de détention non officiels, c’est-à-dire à tout endroit où une personne pourrait être détenue pour des raisons liées à une autorité publique, même si la détention n’a pas été formellement ordonnée par un représentant de cette autorité.

8.En conformité de l’article 19 de l’OPCAT, les principales attributions de l’INPT contenues au chapitre 2 sont : examiner régulièrement la situation des personnes privées de liberté, en vue de renforcer, le cas échéant, leur protection contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ; formuler des recommandations afin d’améliorer leur traitement et leur situation et de prévenir la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ; engager un dialogue avec les autorités compétentes au sujet des mesures qui pourraient être prises ; présenter des propositions et des observations au sujet de la législation en vigueur ou des projets de loi en la matière ; rendre public les rapports annuels et les rapports de visite.

9.Sont également garantis l’accès à tous les lieux de détention et la liberté de choisir les lieux qui doivent être visités, le moment d’effectuer ces visites notamment de manière inopinée et les personnes qui pourront être rencontrées ; la possibilité de s’entretenir de manière confidentielle avec toute personne de leur choix, de recueillir des renseignements pertinents concernant les faits dénoncés auprès de toute personne, y compris des agents publics ; l’accès aux informations nécessaires, notamment tous les renseignements concernant le nombre de personnes privées de liberté, ainsi que le nombre de lieux et leur emplacement et des informations personnelles, avec l’accès à tous les renseignements relatifs au traitement de ces personnes et à leurs conditions.

10.Enfin. L’Instance Nationale pour la Prévention de la Torture est une institution nationale de promotion et de protection des droits de l’Homme dotée de la personnalité morale et de l’autonomie administrative et financière.

11.L’indépendance est un critère clé pour le fonctionnement efficace du mécanisme, comme l’atteste notamment le paragraphe 4 de l’article 18 des « principes de Paris » concernant le statut et le fonctionnement des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’Homme. Cette indépendance établie dans les chapitres 3 à 4 du projet de loi est institutionnelle, financière et fonctionnelle afin de protéger le mécanisme de toute pression extérieure, notamment par une procédure de nomination transparente des experts et la détermination dans la loi des critères de nomination, de la durée du mandat, ainsi que des immunités et privilèges, faisant mention expresse des compétences et des connaissances professionnelles requises. Les ressources nécessaires sont dégagées, permettant une autonomie des gestion et l’examen dans les meilleurs délais des allégations de traitements contraires à la Convention.

Recommandation 35 : L’Etat partie devrait adopter les mesures nécessaires pour faire en sorte que nul ne soit détenu au secret, notamment en veillant à ce que toute personne privée de liberté jouisse, de jure et de facto, dès le début de la privation de liberté, de toutes les garanties juridiques fondamentales énoncées à l’article 17 de la Convention et dans les autres instruments relatifs aux droits de l’Homme auxquels le Gabon est partie.

12.Bien que n’étant pas défini dans le droit gabonais, la détention secrète est prohibée par les effets de la loi qui détermine de façon précise les hypothèses dans lesquelles une personne peut être privée de liberté par une autorité habilitée. Toutefois, la notion de disparition forcée et l’incrimination y relative ont été prises en compte dans le cadre du processus législatif de révision des lois pénales engagées par le Gabon pour se conformer aux engagements internationaux et recommandations des différents mécanismes internationaux et régionaux des droits de l’Homme.

13.Conformément à l’article 50 du Code de Procédure pénale, les mesures de garde à vue sont décidées soit par l’officier de police judiciaire, soit par le procureur de la République. Les mesures de garde à vue s’effectuent uniquement dans les locaux de la gendarmerie, de la police ou de tout autre force de sécurité investie de pouvoirs de police judiciaire tandis que l’emprisonnement se fait dans les établissements pénitentiaires soit dans le cadre d’une détention préventive, soit à la suite d’une décision de condamnation.

Recommandation 35 a): Toutes les personnes privées de liberté aient un accès raisonnable à un avocat dès le début de la privation de liberté et puissent s’entretenir sans délai avec leur proches ou avec toute autre personne de leur choix et, s’il s’agit d’étrangers, avec leurs autorités consulaires.

14.Le Code de procédure pénal prévoit en ses articles 51, 52, 53, 54 et 55 que toute personne privée de liberté jouisse, de jure et de facto, dès le début de la privation de liberté, de toutes les garanties juridiques fondamentales énoncées à l’article 17 de la Convention.

15.Aux termes de l’article 51 du Code de la Procédure Pénale, l’officier de police judiciaire est tenu d’informer la personne gardée à vue de ses droits notamment :

Le droit de communiquer avec son conseil (art. 54) ; s’il n’en a pas, il peut demander qu’il lui en soit commis un d’office par le bureau de l’assistance judiciaire ;

Le droit d’informer une personne de sa famille ou toute autre personne de son ; les personnes privées de liberté reçoivent effectivement la visite de leurs familles et d’autres personnes de leurs choix, à chaque fois que celles-ci en font la demande. Ce droit s’exerce à tous les niveaux de privation de liberté.

Recommandation 35 b): Toute personne ayant un intérêt légitime puisse avoir rapidement et facilement accès au minimum aux renseignements énumérés au paragraphe 1 de l’article 18 de la Convention, y compris pendant la garde à vue.

16.Les informations prévues à l’article 18, paragraphe 1, de la Convention figurent sur les procès verbaux joints au dossier d’enquête, auquel l’avocat a accès et dont il peut recevoir une copie. Par ailleurs, ces informations peuvent être communiquées à toute « personne de la famille du gardé à vue, de son entourage ou de son employeur ».

Recommandation 35 c): Toutes les privations de liberté soient sans exception, inscrites dans les registres et / ou dossiers uniformes dans lesquels figurent au moins les informations requises en vertu du paragraphe 3 de l’article 17 de la Convention.

17.Conformément aux prescriptions de l’article 17, paragraphe 3, de la Convention, un registre est tenu, sur lequel sont consignées l’ensemble des informations concernant les personnes privées de liberté.

18.Lesdits registres sont sur demande mis à la disposition de toute autorité judiciaire ou toute autre institution habilitée par la législation.

Recommandation 35 d): Les registres et/ou dossiers des personnes privées de liberté soient remplis et tenus à jour avec précision et sans retard et fassent l’objet de vérifications régulières, et qu’en cas d’irrégularité les fonctionnaires responsables soient dûment sanctionnés.

19.La loi fait obligation aux OPJ de tenir un registre de garde à vue mentionnant le début et la fin de la garde à vue, en passant par la précision des heures de repos, la nature de l’infraction et le motif de la garde à vue. Le procès-verbal de garde à vue est aussi dressé par l’officier de police judiciaire qui a pris la mesure. L’identité de celui-ci, sa fonction et le lieu de garde à vue y sont clairement mentionnés.

20.Pour veiller au respect de toutes ces normes juridiques, le parquet de la République, conformément à son mandat effectue régulièrement des visites dans les unités de police judiciaire.

21.Des sessions de renforcement de capacités sont également organisées deux (2) fois par an à l’endroit des personnels exerçant dans des lieux de privation de liberté sur le respect des normes internationales des droits de l’Homme (notamment la torture) par l’administration de la Justice et des droits humains. Pour le compte de l’année 2018, ces sessions ont eu lieu dans les provinces de l’Ogooué-Maritime et de la Nyanga et ont concerné 16 lieux de privation de liberté, y compris les prisons.

22.Par ailleurs, le monitoring des lieux de privation de liberté de la province de l’Estuaire a été initié au mois de mai 2018, et est réalisé conjointement par le Parquet, la Commission Nationale des Droits de l’Homme, la Direction Générale des Droits de l’Homme et l’UNOCA selon un chronogramme bien établi. L’objectif de ces visites est d’analyser le fonctionnement des lieux privatifs de liberté et de formuler des recommandations visant à améliorer le traitement et les conditions des personnes détenues.

23.À ce jour, quatre lieux de privation de liberté (1 Commissariat de Police, 2 Brigades de gendarmerie et l’Etat Major des Polices d’investigations judiciaires) ont fait l’objet de ces visites.

24.Toutes ces mesures contribuent à une amélioration progressive des droits des personnes privées de liberté tels qu’énoncés à l’article 17 de la Convention.