Observations finales concernant le rapport valant huitième à dixième rapports périodiques de l’Égypte *

Le Comité a examiné le rapport valant huitième à dixième rapports périodiques de l’Égypte (CEDAW/C/EGY/8-10) à ses 1823e et 1824e séances (CEDAW/C/SR.1823 et CEDAW/C/SR.1824), le 26 octobre 2021. La liste des points et questions soulevés par le groupe de travail de présession figure dans le document CEDAW/C/EGY/Q/8-10, et les réponses de l’ Égypte dans le document CEDAW/C/EGY/RQ/8-10.

A.Introduction

Le Comité accueille avec satisfaction le rapport valant huitième à dixième rapports périodiques de l’État partie mais regrette qu’il ait été présenté avec six ans de retard. Il le remercie également de son rapport de suivi sur les précédentes observations finales du Comité (CEDAW/C/EGY/CO/7/Add.1) et de ses réponses écrites apportées à la liste de points et questions soulevés par le groupe de travail de présession. Il remercie l’État partie, dont la délégation a présenté le rapport oralement, et qui a apporté des éclaircissements complémentaires aux questions posées oralement par le Comité pendant le dialogue.

Le Comité félicite l’État partie pour sa délégation de haut niveau, qui était dirigée par la Présidente du Conseil national des femmes, Maya Morsi, et comprenait des représentants du Ministère de la justice, du Ministère des affaires étrangères, du Ministère de la défense, du Ministère de l’intérieur, du Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique, du Ministère de la solidarité sociale, du Ministère des affaires parlementaires, du Conseil national de la maternité et de l’enfance, du Conseil national des personnes handicapées, du Conseil suprême de la culture et de la Mission permanente de l’Égypte auprès de l’Office des Nations Unies et des autres organisations internationales à Genève.

B.Aspects positifs

Le Comité salue les progrès accomplis depuis l’examen, en janvier 2010, des précédents rapports de l’État partie, ainsi que les progrès décisifs enregistrés depuis 2014 dans les réformes législatives entreprises, en particulier l’adoption des lois suivantes :

a)Constitution de 2014, qui comprend des dispositions sur l’engagement de l’État partie à réaliser l’égalité des genres en matière de droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels, et à assurer la protection des femmes contre toutes les formes de violence, ainsi que l’affirmation que les droits et libertés fondamentaux des citoyens ne peuvent être suspendus ou faire l’objet d’une dérogation, et qu’aucune loi qui régit l’exercice des droits et libertés ne peut les restreindre au point de les vider de sens ;

b)La loi no 30 de 2018 sur l’organisation du Conseil national des femmes ;

c)La loi no 219 de 2017, modifiant certaines dispositions de la loi no 77 de 1943, qui érige en infraction le fait de priver quelqu’un de son héritage ;

d)La loi no 81 de 2016 sur la fonction publique, qui dispose que les citoyens ont le droit d’occuper des emplois dans la fonction publique et interdit toute discrimination fondée sur le genre dans l’application du droit ;

e)La loi no 82 de 2016 sur la migration illégale et le trafic de migrants, qui érige en infraction le trafic de migrants, sa tentative ou sa facilitation, et la peine infligée qui est plus sévère si des femmes sont parmi les migrants faisant l’objet du trafic ;

f)La loi no 11 de 2011, modifiant certaines dispositions du Code pénal, qui renforce les peines pour viol, enlèvement, attentat à la pudeur et harcèlement sexuel dans la rue ;

g)La loi no 64 de 2010 sur la lutte contre la traite des êtres humains.

Le Comité salue les efforts déployés par l’État partie pour améliorer son cadre institutionnel et politique en vue d’accélérer l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et de promouvoir l’égalité des genres, notamment l’adoption ou la mise en place de ce qui suit :

a)Stratégie nationale relative aux droits de l’homme pour la période 2021‑2026 ;

b)Stratégie nationale pour l’autonomisation des femmes égyptiennes pour la période 2016-2030 ;

c)Stratégie nationale et cadre de lutte contre la violence à l’égard des femmes et des filles pour la période 2015-2020 ;

d)Stratégie nationale de lutte contre les mutilations génitales féminines pour la période 2016-2020 ;

e)Stratégie de développement industriel pour améliorer le statut des femmes, adoptée par le Ministère de l’industrie en 2016 ;

f)Stratégie nationale de lutte et de prévention de la traite des êtres humains pour la période 2016-2021 ;

g)Conseil national des droits de l’homme, qui est autorisé à signaler toute violation au ministère public et peut intervenir dans une procédure civile à la demande de la partie lésée ;

h)L’envoi par l’État partie de sa contribution déterminée au niveau national et de sa troisième communication nationale à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques en 2016, à l’appui de ses efforts pour réaliser ses objectifs de développement et économiques et accroître sa capacité d’adaptation aux changements climatiques.

Le Comité note avec satisfaction que, pendant la période ayant suivi l’examen du rapport précédent, l’État partie a adhéré à la Charte arabe des droits de l’homme en 2018.

C.Objectifs de développement durable

Le Comité se félicite du soutien apporté par la communauté internationale aux objectifs de développement durable et préconise le respect de l ’ égalité des genres en droit (de jure) et dans les faits (de facto), conformément aux dispositions de la Convention, dans tous les aspects de la mise en œuvre du Programme 2030. Il souligne l ’ importance de l ’ objectif 5 et de la prise en compte systématique des principes d ’ égalité et de non-discrimination dans la réalisation des 17 objectifs. Il encourage vivement l ’ État partie à reconnaître le rôle moteur des femmes dans le développement durable du pays et à adopter des politiques et des stratégies en conséquence.

D.Parlement

Le Comité souligne le rôle essentiel du pouvoir législatif s ’ agissant de garantir la pleine mise en œuvre de la Convention (voir A/65/38 , deuxième partie, annexe VI). Il invite le Parlement à prendre, dans le cadre de son mandat, les mesures nécessaires pour mettre en œuvre les présentes observations finales avant la soumission du prochain rapport périodique, en application de la Convention.

E.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Réserves

Par ailleurs, le Comité reste préoccupé face aux réserves que l’État partie continue de formuler aux articles 2 et 16 de la Convention, car elles sont contraires à l’objet et au but de la Convention et portent atteinte à la mise en œuvre du principe fondamental de l’égalité formelle et matérielle entre les femmes et les hommes dans tous les aspects de la vie publique et privée.

Rappelant ses précédentes observations finales ( CEDAW/C/EGY/CO/7 , par .  14), le Comité recommande à l ’ État partie de fixer un calendrier précis pour l ’ examen de ses réserves aux articles 2 et 16 de la Convention, qui sont incompatibles avec le but et l ’ objet de la Convention et entravent la mise en œuvre de l ’ intégralité du texte, en vue de leur retrait. Il exhorte également l ’ État partie à entamer un dialogue avec les chefs religieux et les érudits, en tenant compte des meilleures pratiques dans la région, afin de surmonter la résistance au retrait de ses réserves à la Convention.

Visibilité de la Convention et des recommandations générales du Comité

Le Comité prend note avec satisfaction des divers programmes et campagnes de sensibilisation ciblant les femmes, notamment ceux menés en ligne dans les médias sociaux, ainsi que des programmes de formation dispensés aux juges et aux procureurs sur la violence à l’égard des femmes et les dispositions de la Convention. Le Comité est néanmoins préoccupé par :

a)L’insuffisance des programmes de renforcement des capacités des juges et des avocats concernant la Convention et les recommandations générales du Comité ;

b)Le fait que la Convention n’a pas été directement invoquée, appliquée ou mentionnée dans les procédures judiciaires ;

c)Le fait que les femmes, en particulier celles des zones rurales et reculées et celles qui appartiennent à des groupes défavorisés et marginalisés, ne connaissent pas leurs droits au titre de la Convention et ne disposent donc pas des informations nécessaires pour faire valoir ces droits.

Le Comité recommande à l ’ État partie  :

a) de renforcer systématiquement les capacités des fonctionnaires, des juges, des avocats, des procureurs, des policiers et autres responsables de l ’ application des lois, et de leur dispenser une formation sur la Convention, afin que celle-ci puisse servir de cadre efficace à toutes les lois, décisions de justice et politiques relatives à l ’ égalité des genres et à la promotion des femmes  ;

b) de sensibiliser davantage les femmes aux droits que leur confère la Convention et aux recours dont elles disposent pour dénoncer les violations de ces droits, et de veiller à ce que des informations sur la Convention et les recommandations générales du Comité soient fournies à toutes les femmes, y compris celles des zones rurales et reculées et celles qui appartiennent à des groupes défavorisés et marginalisés.

Lois discriminatoires

Le Comité se félicite de l’interdiction de la discrimination fondée sur le genre, des garanties juridiques du principe de l’égalité des genres prévues par la Constitution, de la création du Comité suprême pour la réforme législative en 2014 et des efforts en cours pour revoir les lois et dispositions discriminatoires à l’égard des femmes. Toutefois, le Comité est préoccupé par la persistance de lois discriminatoires et par le retard et l’absence d’un calendrier précis pour la révision des lois et dispositions discriminatoires, notamment celles contenues dans le Code pénal et la loi relative au statut personnel, qui continuent de priver les femmes de l’égalité des droits avec les hommes. Il regrette également le retard pris dans la mise en place d’une commission de lutte contre la discrimination, conformément à l’article 53 de la Constitution.

Le Comité recommande à l ’ État partie  :

a) d ’ accélérer le processus d ’ examen visant à abroger toutes les dispositions discriminatoires de sa législation, notamment dans le Code pénal et la loi relative au statut personnel, afin de mettre fin à toutes les formes de discrimination à l ’ égard de toutes les femmes et de toutes les filles, avec la participation des organisations de femmes de la société civile et conformément aux articles 1 et 2 de la Convention et à la cible 5.1 des objectifs de développement durable  ;

b) de mettre en place une commission de lutte contre la discrimination conformément à l ’ article 53 de la Constitution et d ’ assurer la participation effective des organisations de femmes de la société civile, notamment celles qui représentent les femmes des zones rurales et reculées et celles qui appartiennent à des groupes défavorisés et marginalisés.

Accès des femmes à la justice

Le Comité prend note des efforts déployés par l’État partie pour améliorer le traitement des plaintes déposées par les femmes auprès du Bureau du médiateur, qui fournit une aide juridictionnelle et des conseils aux femmes. Toutefois, le Comité est préoccupé par la disponibilité limitée de l’aide juridictionnelle et des conseils juridiques gratuits et par l’accès limité aux informations sur les mécanismes et les procédures de recours en cas de violation des droits des femmes et des filles, en particulier celles qui vivent dans des zones rurales et reculées et celles qui appartiennent à des groupes défavorisés et marginalisés.

Se référant à sa recommandation générale n o 33 (2015) sur l ’ accès des femmes à la justice, le Comité recommande que l ’ État partie  :

a) continue de renforcer le programme d ’ aide juridictionnelle et de conseil juridiques du bureau du médiateur en ce qui concerne les plaintes déposées par les femmes, afin de veiller à ce que les femmes aient accès à des services d ’ aide juridictionnelle abordables ou, si nécessaire, gratuits, en particulier les femmes des zones rurales et reculées et celles qui appartiennent à des groupes défavorisés et marginalisés, et de diffuser des informations sur les mécanismes et procédures de recours en cas de violation des droits des femmes et des filles  ;

b) lutte contre la stigmatisation des femmes et des filles qui déposent une plainte pour violation de leurs droits, en sensibilisant davantage le grand public aux droits des femmes  ;

c) continue de renforcer la prise en compte des questions de genre et la sensibilisation aux questions de genre par le système judiciaire, notamment en augmentant le nombre de femmes dans l ’ appareil judiciaire et en renforçant systématiquement les capacités des policiers et des autres représentants de l ’ ordre en ce qui concerne les droits des femmes et les méthodes d ’ enquête tenant compte des questions de genre, afin de prévenir la revictimisation des femmes et de veiller à ce qu ’ elles aient effectivement accès à la justice.

Mécanisme national de promotion des femmes

Le Comité se félicite de la création du Conseil national des femmes, de l’adoption de la Stratégie nationale pour l’autonomisation des femmes égyptiennes pour 2016-2030, de la création de l’Observatoire des femmes en tant que mécanisme de suivi de la mise en œuvre de la stratégie, ainsi que de l’élaboration et de l’adoption du plan d’intervention rapide pour répondre aux besoins des femmes pendant la pandémie de maladie à coronavirus (COVID-19). Le Comité est néanmoins préoccupé par le manque d’informations sur l’efficacité et la transparence des mécanismes de suivi permettant d’évaluer les progrès réalisés dans la mise en œuvre de la stratégie nationale pour l’autonomisation des femmes égyptiennes et d’autres stratégies.

Le Comité recommande à l ’ État partie de continuer à élaborer et à adopter un plan d ’ action pour la mise en œuvre de la Stratégie nationale pour l ’ autonomisation des femmes égyptiennes, qui définisse clairement les compétences des autorités nationales et locales et établisse des mécanismes d ’ étude d ’ impact afin de garantir que la stratégie et les autres politiques d ’ égalité des genres soient correctement suivies et évaluées et que leur mise en œuvre soit régulièrement évaluée.

Mesures temporaires spéciales

Le Comité prend note avec satisfaction de l’instauration d’un quota minimum de 25 % de femmes à la Chambre des représentants, 10 % au Sénat et 25 % dans les conseils locaux pour la représentation des femmes au Parlement, ainsi que de la création d’unités d’égalité des chances dans les ministères pour favoriser l’accès des femmes aux postes de direction, et des efforts déployés dans le cadre de la Stratégie nationale pour l’autonomisation des femmes. Le Comité reste néanmoins préoccupé par l’absence de mesures temporaires spéciales visant à instaurer une égalité réelle entre les femmes et les hommes dans l’emploi dans le secteur privé où les femmes sont sous-représentées ou défavorisées.

Conformément au paragraphe 1 de l ’ article 4 de la Convention et rappelant sa recommandation générale n o 25 (2004) sur les mesures temporaires spéciales, le Comité recommande à l ’ État partie d ’ adopter des mesures temporaires spéciales assorties d ’ objectifs assortis de délais, notamment de quotas, et de sanctions en cas de non-respect, afin d ’ accélérer la réalisation de l ’ égalité réelle entre les femmes et les hommes dans tous les domaines où les femmes, y compris les femmes rurales et celles appartenant à des groupes marginalisés, sont désavantagées ou sous-représentées, notamment dans la vie politique et publique, l ’ éducation et l ’ emploi, en particulier dans la fonction publique, le service diplomatique et le service judiciaire.

Stéréotypes discriminatoires

Le Comité prend note des campagnes de sensibilisation qui ont été lancées sur le rôle des femmes et des filles dans la société, y compris celles menées en ligne via les médias sociaux, notamment dans le cadre de la stratégie nationale pour l’autonomisation des femmes. Il n’en reste pas moins préoccupé par la persistance de comportements patriarcaux et de stéréotypes discriminatoires profondément ancrés concernant le rôle et les responsabilités des femmes et des hommes dans la famille et la société, qui mettent l’accent sur le rôle de mère et d’éducatrice des femmes, particulièrement dans les zones rurales et éloignées. Il est particulièrement préoccupé par l’absence d’un plan d’action clair visant à mettre en œuvre les activités prévues par la stratégie, avec la participation effective des organisations de femmes de la société civile, dans un délai précis et avec des mécanismes d’évaluation et de suivi.

Le Comité recommande à l ’ État partie  :

a) d ’ élaborer et d ’ adopter un plan d ’ action global pour éliminer les stéréotypes discriminatoires concernant les rôles et les responsabilités des femmes et des hommes dans la famille et dans la société, qui comprend des efforts de sensibilisation et d ’ éducation visant le grand public, les médias et les communautés rurales et éloignées, avec la participation effective des organisations de femmes de la société civile et des chefs religieux  ;

b) de revoir les programmes scolaires et d ’ intensifier la collaboration avec les médias afin de sensibiliser le public aux stéréotypes sexistes qui persistent à tous les niveaux de la société, en vue de les éliminer.

Violence à l’égard des femmes fondée sur le genre

Le Comité prend note des efforts déployés par l’État partie pour lutter contre la violence fondée sur le genre à l’égard des femmes, notamment la modification du Code pénal en 2014 afin d’introduire des sanctions pour le harcèlement sexuel et l’adoption de plusieurs politiques, telles que la Stratégie nationale de réduction du mariage précoce pour 2015-2020, la Stratégie nationale de lutte contre les mutilations génitales féminines pour 2016-2020 et la Stratégie nationale de lutte contre la violence à l’égard des femmes et des filles pour 2015-2020. Il est toutefois préoccupé par :

a)Les dispositions discriminatoires du Code pénal, en particulier les articles 17 et 60, qui justifient et tolèrent les actes de violence à l’égard des femmes en exigeant que les voies de fait dépassent les « limites acceptées de la discipline » pour faire l’objet d’une action en justice, en prévoyant la défense de « bonne foi », laquelle exonère les hommes de leur responsabilité pénale dans les affaires de violence domestique, ainsi que les articles 237, 274 et 277, qui permettent l’indulgence pour les crimes dits « d’honneur », y compris l’application discriminatoire des sanctions pour adultère, qui perpétuent la violence fondée sur le genre ;

b)L’absence de progrès pour ce qui est de faire en sorte que la violence fondée sur le genre à l’égard des femmes dans la sphère domestique et le viol conjugal soient explicitement incriminés dans la législation nationale, notamment en révisant la définition du viol pour y inclure la pénétration non vaginale ;

c)Le taux élevé de mutilations génitales féminines dans les zones rurales et reculées et les rapports faisant état d’une médicalisation accrue des mutilations génitales féminines, malgré la modification du Code pénal en avril 2021 visant à prévoir des peines plus sévères contre les auteurs, y compris les personnes qui en font la demande et le personnel médical qui commet les violations ;

d)La prévalence de la sous-déclaration des cas de violence fondée sur le genre à l’égard des femmes, en particulier de violence domestique et de harcèlement dans la sphère publique comme dans la rue, en raison des barrières culturelles et de la peur de la stigmatisation, de la revictimisation et de l’impunité, en particulier parmi les femmes rurales et les femmes appartenant à des groupes défavorisés et marginalisés ;

e)La prévalence des mariages forcés d’enfants, en particulier dans les zones rurales et reculées et parmi les filles vivant dans la pauvreté, malgré la loi no 126 de 2008, qui fixe l’âge minimum du mariage à 18 ans pour les femmes et les hommes ;

f)Le nombre et la capacité insuffisants des refuges et des services d’aide aux victimes de la violence fondée sur le genre, y compris la violence domestique, tels que les conseils psychosociaux, l’assistance juridique et les programmes de réadaptation, en particulier pour les femmes des zones rurales et reculées et les groupes de femmes défavorisées et marginalisées ;

g)Le manque d’informations sur les résultats de la mise en œuvre des stratégies de lutte contre la violence fondée sur le genre et sur les efforts en cours pour élaborer de futurs plans d’action avec la participation effective des organisations de femmes de la société civile.

Rappelant sa recommandation générale n o 35 (2017) sur la violence fondée sur le genre à l ’ égard des femmes, portant actualisation de la recommandation générale n o 19 , le Comité recommande à l ’ État partie  :

a) d ’ abroger les dispositions discriminatoires du Code pénal, notamment les articles 17, 60, 237, 274 et 277, qui tolèrent les actes de violence à l ’ encontre des femmes, tels que la violence domestique et les crimes dits « d ’ honneur », en exemptant leurs auteurs de toute sanction ou en réduisant les peines imposées, ainsi que l ’ article 61, qui exempte de toute sanction les médecins et le personnel médical qui commettent des mutilations génitales féminines sous couvert de chirurgie esthétique ou de la nécessité de protéger un tiers contre un préjudice grave  ;

b) d ’ adopter une législation complète, en consultation avec les organisations de femmes de la société civile, pour incriminer toutes les formes de violence à l ’ égard des femmes, en particulier la violence domestique et sexuelle  ;

c) d ’ enquêter efficacement et d ’ engager des poursuites sur les cas de harcèlement et de mutilation génitale féminine, y compris les cas de médicalisation des mutilations génitales féminines  ;

d) d ’ assurer la mise en œuvre effective de la loi n o 126 de 2008 sur l ’ âge minimum du mariage pour les femmes et les hommes, en particulier dans les cas de mariages d ’ enfants et de mariages forcés, et d ’ imposer des sanctions aux ma ’ zoun en tant qu ’ auteurs pour avoir contracté de tels mariages ou ne pas les avoir signalés  ;

e) de poursuivre l ’ élaboration et l ’ adoption, avec la participation des organisations de femmes de la société civile et des chefs religieux, d ’ une stratégie globale et d ’ un plan d ’ action visant à éliminer toutes les formes de violence fondée sur le genre à l ’ égard des femmes, y compris la violence domestique, et d ’ allouer des ressources suffisantes et durables pour assurer la mise en œuvre intégrale, le suivi et l ’ évaluation de l ’ impact de la stratégie  ;

f) d ’ affecter des ressources suffisantes pour développer et accroître le nombre de refuges gérés par l ’ État pour les femmes victimes de violences fondées sur le genre et veiller à ce que ces victimes bénéficient de services de conseil, de réadaptation et de soutien en vue de leur réinsertion dans la société, en particulier celles qui appartiennent à des groupes de femmes défavorisées, comme les femmes des zones rurales et reculées, les demandeuses d ’ asile et les réfugiées, les femmes handicapées, les migrantes et les travailleuses domestiques.

Traite et exploitation de la prostitution

Le Comité salue les efforts déployés par l’État partie pour lutter contre la traite des personnes grâce à l’adoption de la loi no 64 de 2010 sur la lutte contre la traite des êtres humains, à la création du Comité national de coordination chargé de combattre et de prévenir la migration illégale et la traite des êtres humains en 2017, et à l’adoption de la Stratégie nationale visant à combattre et prévenir la traite des êtres humains pour 2016-2021. Toutefois, le Comité est préoccupé par :

a)Le manque de ressources pour répondre aux besoins des femmes et des filles victimes de la traite ;

b)Le fait que, alors que les victimes de la traite des êtres humains ont accès à des refuges pour victimes de violence fondée sur le genre pour obtenir une assistance médicale et sociale, il n’existe qu’un seul refuge consacré aux femmes et aux enfants victimes de la traite des êtres humains ;

c)Le grand nombre des mariages temporaires, saisonniers et contractuels, qui sont des formes de traite et d’exploitation sexuelle des femmes, malgré la loi no 64 de 2010, notamment dans les zones rurales et reculées et parmi les femmes vivant dans la pauvreté.

Le Comité recommande à l ’ État partie  :

a) de renforcer ses efforts pour prévenir et combattre la traite des femmes et des filles, et de veiller à ce que les cas de traite fassent l ’ objet d ’ une enquête, notamment en allouant des ressources humaines, techniques et financières suffisantes, ainsi qu ’ en fournissant des services adéquats pour assurer la réadaptation et la réintégration des victimes  ;

b) d ’ augmenter le nombre de refuges consacrés aux femmes et aux filles victimes de la traite sur tout le territoire de l ’ État partie  ;

c) de réduire le nombre important des mariages temporaires, saisonniers et contractuels, notamment dans les zones rurales et reculées et parmi les femmes vivant dans la pauvreté, qui sont des formes de traite et d ’ exploitation sexuelle des femmes, et de faire appliquer la loi sur les mariages contractuels.

Participation à la vie politique et publique sur un pied d’égalité avec les hommes

Le Comité prend note avec satisfaction de l’introduction de quotas minimums et de sièges réservés aux femmes, qui a conduit à une représentation accrue des femmes à la Chambre des représentants, au Sénat, au sein du pouvoir exécutif et dans le corps diplomatique. Le Comité est néanmoins préoccupé par le fait que les femmes sont toujours sous-représentées dans le système judiciaire, la fonction publique et les conseils locaux.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ adopter des mesures temporaires spéciales supplémentaires, conformément au paragraphe 1 de l ’ article 4 de la Convention et aux recommandations générales n o 25 et n o 23 (1997) (La vie politique et publique) du Comité, afin de parvenir à une représentation égale des femmes et des hommes, notamment dans le système judiciaire, la fonction publique et les conseils locaux. Il recommande également à l ’ État partie de mettre en place des programmes de renforcement des capacités des femmes candidates en lien avec les campagnes électorales et l ’ exercice de responsabilités politiques, et de les sensibiliser à leur participation à la prise de décisions, en particulier pour les femmes des zones rurales et reculées et celles appartenant à des groupes défavorisés et marginalisés.

Défenseuses des droits humains et organisations de la société civile

Le Comité prend note des informations fournies par l’État partie sur les garanties constitutionnelles et juridiques en matière de procès équitables, y compris pendant les enquêtes. Il prend également note des informations relatives à l’adoption de la loi no 149 de 2019 sur les organisations non gouvernementales et des initiatives qui seront prises dans le cadre de la stratégie en matière de droits de l’homme pour garantir le droit à la liberté d’association. Toutefois, le Comité est profondément préoccupé par les informations selon lesquelles des défenseuses des droits humains, y compris des employées d’organisations de la société civile, ont fait l’objet de restrictions, de détentions arbitraires, de détentions provisoires prolongées, de mauvais traitements en détention et d’interdictions de voyager en raison de leur engagement civique.

Le Comité recommande à l ’ État partie de respecter ses obligations conformément aux traités internationaux relatifs aux droits de l ’ homme en ce qui concerne l ’ exercice du droit à la liberté d ’ expression et d ’ association par les défenseuses des droits humains et leurs organisations. Le Comité recommande également à l ’ État partie d ’ enquêter systématiquement sur les cas de représailles, de harcèlement et de restrictions à l ’ encontre des défenseuses des droits humains, y compris les violences fondées sur le genre et les mauvais traitements en détention infligés par les forces de l ’ ordre.

Nationalité

Le Comité note que la citoyenneté est un droit détenu par toute personne née d’un père ou d’une mère égyptiens, conformément à l’article 6 de la Constitution et à la loi no 154 de 2004. Toutefois, il est préoccupé par les informations selon lesquelles les mères égyptiennes rencontrent des difficultés pour transmettre leur nationalité à leur mari étranger, contrairement aux hommes égyptiens, qui ont le droit de le faire après deux ans de mariage. Il s’inquiète également du fait que les femmes égyptiennes mariées à des étrangers rencontrent toujours des obstacles pour transmettre leur nationalité à leurs enfants.

Rappelant sa recommandation précédente ( CEDAW/C/EGY/CO/7 , par .  38), le Comité recommande à l ’ État partie de garantir l ’ égalité des genres en éliminant tout obstacle ou retard auquel se heurtent les Égyptiennes pour transmettre leur nationalité à leur mari et à leurs enfants étrangers et pour enregistrer la naissance de leurs enfants.

Éducation

Le Comité prend note avec satisfaction de l’augmentation du taux de scolarisation des femmes et des filles à tous les niveaux de l’enseignement, de la fixation du montant minimum des dépenses d’éducation à 4 % du produit intérieur brut, conformément à l’article 19 de la Constitution, ainsi que de l’adoption du Plan stratégique pour le développement de l’enseignement pré-universitaire, qui vise à assurer à toute la population d’âge scolaire le même droit d’être scolarisée, en particulier dans les zones pauvres et à améliorer la qualité des services éducatifs. Il note également que les décrets ministériels no 43 et 44 d’avril 2021 ont abrogé la restriction interdisant aux femmes d’effectuer un travail de nuit et de travailler dans certaines professions. Toutefois, le Comité reste préoccupé par :

a)L’analphabétisme, y compris l’analphabétisme numérique, et les taux d’abandon scolaire plus élevés chez les femmes et les filles, en particulier dans les zones rurales et reculées et chez les femmes et les filles appartenant à des groupes défavorisés et marginalisés ;

b)Le fait que l’augmentation des taux de scolarisation ne se traduit pas par des possibilités d’autonomisation économique pour les femmes, le taux de participation des femmes au marché du travail est deux fois moins élevé que le taux mondial (22 %), et les femmes et les filles ont tendance à se concentrer dans des domaines d’études traditionnellement féminins et sont sous-représentées dans les sciences, les technologies, l’ingénierie et les mathématiques ;

c)Il n’existe pas de mesures efficaces pour protéger les femmes et les filles contre la violence sexuelle et le harcèlement en milieu scolaire, ni de mécanisme de plainte et de recours ;

d)L’éducation sur l’égalité des genres est inexistante dans les programmes scolaires pour lutter contre les stéréotypes négatifs et toutes les formes de discrimination et de violence fondées sur le genre, telles que les mutilations génitales féminines, les mariages d’enfants et les mariages forcés, et le harcèlement sexuel dans les sphères privée et publique.

Rappelant sa recommandation générale n o 36 (2017) sur le droit des filles et des femmes à l ’ éducation, le Comité recommande à l ’ État partie  :

a) d ’ intensifier ses efforts pour lutter contre les taux d ’ analphabétisme et d ’ abandon scolaire chez les femmes et les filles, en particulier dans les zones rurales et reculées et chez les femmes et les filles appartenant à des groupes défavorisés et marginalisés, y compris les femmes et les filles handicapées, tout en procédant à des évaluations systématiques de l ’ impact de ses stratégies et de ses politiques pour en garantir l ’ efficacité  ;

b) de s ’ attaquer aux stéréotypes discriminatoires et aux obstacles structurels susceptibles de dissuader les filles de faire des études dans des domaines où les hommes sont traditionnellement majoritaires, tels que les sciences, la technologie, l ’ ingénierie, les mathématiques et les technologies de l ’ information et des communications, et de veiller à ce qu ’ elles aient un accès égal à l ’ enseignement et à la formation techniques et professionnels, y compris dans les filières autres que celles dans lesquelles elles s ’ engagent traditionnellement  ;

c) d ’ adopter une politique de tolérance zéro en cas de violence sexuelle et de harcèlement à l ’ égard des femmes et des filles dans les écoles et les universités, de veiller à ce que les responsables soient poursuivis en justice et dûment sanctionnés, et d ’ apporter une assistance psychologique, médicale et juridique aux victimes  ;

d) d ’ encourager l ’ intégration dans les programmes scolaires d ’ une formation obligatoire en matière de santé sexuelle et reproductive et droits connexes, adaptée à l ’ âge des filles et des garçons, comprenant du matériel pédagogique sur la planification familiale, les formes modernes de contraception et les pratiques sexuelles responsables  ;

e) d ’ élaborer et d ’ intégrer dans les programmes scolaires des contenus inclusifs et accessibles sur l ’ égalité des genres, y compris sur les droits des femmes, afin de sensibiliser les enfants aux stéréotypes liés au genre, à la discrimination et à la violence fondées sur le genre, ainsi qu ’ aux pratiques néfastes telles que les mutilations génitales féminines, les mariages d ’ enfants et les mariages forcés, et le harcèlement sexuel dans les sphères privée et publique.

Emploi

Le Comité prend note des efforts entrepris par l’État partie pour promouvoir l’accès à l’emploi pour les femmes. Toutefois, le Comité reste préoccupé par :

a)La ségrégation verticale et horizontale des emplois, la persistance de l’écart de rémunération entre les femmes et les hommes malgré le fait que le Code du travail interdise la discrimination salariale fondée sur le genre, et la concentration des femmes dans les secteurs informel et agricole ;

b)Le peu de garderies d’enfants d’un coût abordable et d’aménagements pour l’allaitement maternel prévus sur les lieux de travail, en particulier dans le secteur privé ;

c)Le manque d’informations sur l’application de la loi no 39 de 1975 sur le quota de 5 % pour les femmes handicapées ;

d)Le fait que le Code pénal n’incrimine pas expressément le harcèlement sexuel sur le lieu de travail.

Rappelant sa recommandation précédente ( CEDAW/C/EGY/CO/7 , par .  34) et conformément à sa recommandation générale n o 13 (1989) sur l ’ égalité de rémunération pour un travail de valeur égal, ainsi qu ’ à la cible 8.5 des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l ’ État partie  :

a) de garantir la mise en œuvre effective des dispositions du Code du travail relatives à l ’ interdiction de la discrimination salariale et de modifier les dispositions légales en matière d ’ emploi afin d ’ introduire et d ’ appliquer explicitement le principe d ’ égalité de rémunération pour un travail de valeur égale  ;

b) d ’ intensifier ses efforts pour faire disparaître la ségrégation horizontale et verticale des emplois, et pour améliorer l ’ accès des femmes, y compris les femmes handicapées, au marché du travail formel, ainsi que ses efforts pour accroître leur représentation aux postes à responsabilité, notamment dans le secteur privé  ;

c) d ’ augmenter le nombre de structures de garde d ’ enfants abordables et accessibles dans l ’ ensemble de l ’ État partie  ;

d) de modifier le Code pénal afin d ’ incriminer de manière explicite le harcèlement sexuel sur le lieu de travail, conformément aux normes internationales applicables en matière de droits humains, et de garantir que les victimes de harcèlement sexuel sur le lieu de travail aient accès à des procédures de plainte efficaces, indépendantes et confidentielles, assorties de recours effectifs, et que toutes les plaintes fassent l ’ objet d ’ enquêtes efficaces, que les auteurs soient poursuivis et dûment sanctionnés et que les victimes soient protégées contre les représailles  ;

e) de mener des campagnes de sensibilisation et des sessions de formation ciblant les secteurs public et privé, les avocats, les juges et les responsables de l ’ application des lois sur la prévention du harcèlement sexuel sur le lieu de travail  ;

f) de ratifier la Convention de 2019 sur la violence et le harcèlement ( n o 190) de l ’ Organisation internationale du Travail (OIT), la Convention de 2000 sur la protection de la maternité ( n o 183) et la Convention de 1981 sur les travailleurs ayant des responsabilités familiales ( n o 156) de l ’ OIT.

Travailleuses domestiques

Le Comité prend note de la mise en place du contrat de travail facultatif pour les travailleurs domestiques égyptiens à titre de mesure temporaire et de l’information selon laquelle la Chambre des représentants examine un projet de loi sur l’emploi domestique ainsi que des amendements au Code du travail.

Se référant à sa recommandation précédente ( CEDAW/C/EGY/CO/7 , par .  36), le Comité recommande à l ’ État partie d ’ accélérer l ’ adoption du projet de loi sur la réglementation des travailleurs migrants afin de leur assurer le même niveau de protection et de prestations qu ’ aux autres travailleurs, de les protéger contre la maltraitance et la violence, et d ’ élaborer et mettre en œuvre des mesures en matière d ’ inspection du travail, de mise en application et de sanctions. Le Comité recommande également à l ’ État partie de ratifier la Convention de l ’ Organisation internationale du Travail ( n o 189) sur les travailleuses et travailleurs domestiques (2011).

Santé

Le Comité prend note des mesures adoptées pour améliorer les services de santé destinés aux femmes et aux filles, en particulier les soins de santé maternelle et la planification familiale, ainsi que de l’adoption de la loi relative à la couverture médicale universelle et de la stratégie nationale pour la protection de l’enfance et de la maternité. Le Comité est néanmoins préoccupé par :

a)Le fait que seulement 20 % des femmes dans l’État partie ont une assurance maladie ;

b)Les informations sur l’augmentation du nombre de cas de VIH/SIDA et l’absence de politiques visant à garantir la fourniture de services de santé sexuelle et reproductive adaptés à l’âge et de traitements, et à combattre la stigmatisation et la violence à l’égard des femmes et des filles vivant avec le VIH/SIDA ;

c)Le fait que l’avortement continue d’être érigé en infraction dans l’État partie, sauf lorsqu’il s’agit de sauver la vie de la femme ;

d)Le fait que les femmes et les filles handicapées rencontrent des obstacles pour accéder aux services de soins de santé, et que le système de soins de santé leur est peu accessible et manque d’aménagements raisonnables ;

e)L’insuffisance des services de santé mentale pour les femmes, y compris les traitements contre la toxicomanie.

Conformément à sa recommandation générale n o 24 (1999) sur les femmes et la santé, le Comité recommande à l ’ État partie  :

a) d ’ augmenter le budget alloué aux soins de santé et d ’ accélérer la mise en œuvre de la loi relative à la couverture médicale universelle afin de garantir la fourniture de services de soins de santé accessibles et abordables à toutes les femmes et les filles, en particulier aux femmes des zones rurales et reculées et à celles qui appartiennent à des groupes défavorisés et marginalisés  ;

b) d ’ adopter des mesures pour lutter contre la discrimination, la violence et la stigmatisation dont sont victimes les femmes vivant avec le VIH/sida et les femmes toxicomanes, pour veiller à ce qu ’ elles aient accès à des services de santé adéquats, y compris des services de santé sexuelle et reproductive et des traitements contre le VIH et la toxicomanie, et pour recueillir des données, ventilées par sexe, sur la prévalence du VIH et des infections sexuellement transmissibles, tout en respectant le caractère confidentiel des informations qui concernent les patients  ;

c) d ’ adopter des mesures pour garantir la disponibilité et la qualité de services de santé mentale accessibles ainsi que des traitements contre la toxicomanie  ;

d) de légaliser l ’ avortement en cas de viol, d ’ inceste, de risque pour la santé physique ou mentale de la femme enceinte et de malformation grave du fœtus, et veiller à ce que des méthodes modernes d ’ avortement médicalement sûres soient disponibles et accessibles.

Avantages économiques et sociaux

Le Comité prend note des initiatives prises par l’État partie pour promouvoir l’esprit d’entreprise et les possibilités d’emploi pour les femmes, et du fait que les femmes bénéficient du programme de protection sociale existant. Il note néanmoins avec inquiétude que les femmes du secteur informel ne sont pas couvertes par les services de sécurité sociale et qu’aucune évaluation de l’impact de ces projets et initiatives n’est réalisée.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ allouer des ressources suffisantes pour garantir l ’ accès des femmes des secteurs informels aux programmes nationaux de sécurité sociale et de procéder à une évaluation de l ’ impact de ces programmes en vue de les renforcer.

Femmes rurales

Le Comité note que la Stratégie nationale pour l’autonomisation des femmes égyptiennes pour 2016-2030 met l’accent sur les femmes rurales et les efforts déployés pour accroître la délivrance de cartes d’identité aux femmes rurales. Toutefois, il note avec préoccupation :

a)que les femmes peuvent difficilement posséder de la terre et qu’elles n’ont qu’un accès limité aux institutions formelles de crédit et de prêt, alors qu’elles constituent la principale main-d’œuvre du secteur agricole ;

b)que les femmes rurales ont une représentation très faible dans la vie politique et aux postes à responsabilité ;

c)que les taux d’analphabétisme sont élevés, notamment les taux d’analphabétisme numérique, et d’abandon scolaire chez les filles et les femmes, et que leur accès aux soins de santé et aux services de planification familiale est limité.

Conformément à sa recommandation générale n o 34 (2016) sur les droits des femmes rurales et à la cible 5.a des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l ’ État partie  :

a) de faire appliquer la loi n o 219 de 2017 pour assurer la protection des droits des femmes rurales en matière d ’ héritage et de propriété foncière, et de mettre en place un mécanisme de plainte pour enquêter rapidement sur les cas de traite de femmes et de filles, poursuivre et punir leurs auteurs comme il se doit, et accorder réparation aux victimes  ;

b) d ’ adopter et mettre en œuvre des mesures juridiques et des orientations pour veiller à ce que les femmes rurales aient effectivement accès à l ’ éducation, aux soins de santé, à l ’ emploi, au microfinancement et au microcrédit à faible taux d ’ intérêt, au logement et aux services de planning familial, ainsi qu ’ à l ’ égalité des chances en matière de participation à la vie politique et publique.

Groupes de femmes défavorisées

Le Comité est préoccupé par les informations selon lesquelles les femmes handicapées, les femmes réfugiées, les demandeuses d’asile et les travailleuses migrantes font toujours l’objet de formes de discrimination multiples et croisées.

Le Comité recommande à l ’ État partie  :

a) S ’ agissant des femmes handicapées  :

i) de garantir l ’ accès des femmes et des filles handicapées à une éducation inclusive, à l ’ emploi, à la justice, aux services publics et à des soins de santé adéquats, ainsi que leur accès à l ’ environnement physique, aux transports, ainsi qu ’ à l ’ information et aux communications  ;

b) S ’ agissant des réfugiées, des demandeuses d ’ asile et des travailleuses migrantes  :

i) de fixer un calendrier précis pour les processus de délivrance et de renouvellement des documents officiels et des permis de séjour pour les femmes réfugiées, les demandeuses d ’ asile et les travailleuses migrantes  ;

ii) d ’ adopter des mesures pour garantir l ’ accès des demandeuses d ’ asile, des femmes réfugiées et des travailleuses migrantes à l ’ emploi et aux services de santé de base, y compris aux soins prénatals et postnatals  ;

iii) de renforcer ses efforts d ’ identification des demandeuses d ’ asile et de détermination de leur statut de réfugié, qui devraient tenir compte des questions de genre ainsi que de l ’ âge et de la culture des personnes concernées, afin de pouvoir repérer rapidement les femmes et les filles qui sont victimes de violences fondées sur le genre ou risquent de l ’ être et leur fournir une assistance appropriée.

Femmes en détention

Le Comité prend note des informations fournies par la délégation de l’État partie selon lesquelles la stratégie en matière de droits de l’homme pour 2021-2026 accorde une attention particulière à la situation dans les prisons et les centres de détention. Toutefois, il est profondément préoccupé par les informations faisant état d’un manque de soins médicaux et de conditions insalubres dans les prisons, où les femmes détenues seraient fréquemment soumises à des fouilles corporelles et à un isolement prolongé à titre de punition. Il est également préoccupé par les conclusions de la procédure d’enquête prévue à l’article 20 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (A/72/44, par. 58 à 71).

Le Comité recommande à l ’ État partie  :

a) d ’ adopter et de mettre en œuvre des mesures visant à améliorer les conditions dans les centres de détention et de garantir aux détenues un accès adapté aux soins de santé et aux articles d ’ hygiène personnelle, conformément aux Règles des Nations Unies concernant le traitement des détenues et l ’ imposition de mesures non privatives de liberté aux délinquantes (Règles de Bangkok).

b) d ’ enquêter rapidement sur tous les cas présumés de violence à l ’ égard des femmes en détention, conformément aux recommandations formulées dans le rapport d ’ enquête du Comité contre la torture ( A/72/44 , par .  70).

Mariage et rapports familiaux

Le Comité prend note des efforts et de l’engagement de l’État partie à revoir toutes les lois discriminatoires relatives au statut personnel concernant le mariage et les rapports familiaux. Il prend note des informations concernant l’élaboration d’un projet de loi visant à modifier le Code du statut personnel et ses dispositions relatives au mariage, au divorce, à la tutelle et à la garde des enfants, ainsi que la préparation d’un projet de loi visant à interdire le mariage d’enfants. Toutefois, le Comité est préoccupé par :

a)Le fait que les hommes ont le droit de divorcer unilatéralement de leur épouse (talaq), y compris verbalement avec un délai d’une semaine pour l’enregistrement officiel du divorce, ce qui laisse de nombreuses femmes dans des situations précaires, alors que les femmes qui demandent le divorce par résiliation unilatérale de leur contrat de mariage (khula) en vertu de la loi no 1 de 2000 ne peuvent obtenir un tel divorce que si elles renoncent à la pension alimentaire et rendent leur dot ;

b)La tutelle du mariage des femmes, qui accorde aux hommes le droit de s’opposer au mariage d’une femme ;

c)Le fait que, même si les femmes conservent la garde des enfants après le divorce jusqu’à ce qu’ils aient 15 ans, les pères sont les tuteurs des enfants même si la mère en a la garde, et que les femmes se voient refuser la garde de leurs enfants en cas de remariage ;

d)La discrimination à l’égard des femmes et des filles en matière de droit successoral, en tant que filles ou que veuves ;

e)La persistance des mariages d’enfants dans le cadre de mariages contractuels, en particulier dans les zones rurales et reculées, en dépit du fait qu’en vertu de la loi no 126 de 2008, l’âge minimum du mariage est de 18 ans pour les femmes et les hommes.

Rappelant ses précédentes observations finales ( CEDAW/C/EGY/CO/7 , par .  48 et 50), sa recommandation générale n o 21 (1994) sur l ’ égalité dans le mariage et les rapports familiaux et sa recommandation générale n o 29 (2013) sur les conséquences économiques du mariage, des rapports familiaux et leur dissolution, le Comité recommande à l ’ État partie  :

a) d ’ accélérer l ’ adoption de l ’ amendement à la loi relative au statut personnel, avec un calendrier précis, afin qu ’ il garantisse  : l ’ égalité des droits des femmes et des hommes dans toutes les questions relatives au mariage et aux rapports familiaux en interdisant la polygamie  ; de veiller à ce que les femmes et les hommes jouissent des mêmes droits en matière de divorce, y compris lorsqu ’ il est question des motifs et des procédures pour l ’ obtention du divorce  ; d ’ accorder des droits égaux aux deux parents concernant la tutelle après la dissolution du mariage, dans l ’ intérêt supérieur de l ’ enfant, que la femme se remarie ou non  ;

b) d ’ abroger les dispositions discriminatoires de la législation interne, notamment la loi n o 77 de 1943, afin de garantir l ’ égalité des droits des femmes et des hommes en matière d ’ héritage  ;

c) d ’ accélérer l ’ élaboration et l ’ adoption du projet de loi visant à interdire le mariage d ’ enfants, d ’ appliquer de manière effective la loi n o 126 de 2008 sur l ’ âge minimum du mariage, et de mener des campagnes de sensibilisation sur les conséquences négatives de ces mariages d ’ enfants et forcés.

Collecte et analyse des données

Le Comité est préoccupé par l ’ absence générale de données statistiques ventilées par sexe, âge, appartenance ethnique, handicap, emplacement géographique et situation socioéconomique, qui sont indispensables pour évaluer avec précision la situation des femmes, déterminer l ’ ampleur et la nature de la discrimination, élaborer des politiques éclairées et ciblées et assurer le suivi systématique et l ’ évaluation des progrès accomplis dans la réalisation de l ’ égalité réelle entre femmes et hommes dans tous les domaines visés par la Convention.

Protocole facultatif à la Convention et amendement au paragraphe 1de l’article 20 de la Convention

Le Comité encourage l ’ État partie à ratifier le Protocole facultatif à la Convention.

Déclaration et Programme d’action de Beijing

Le Comité invite l ’ État partie à s ’ appuyer sur la Déclaration et le Programme d ’ action de Beijing et à continuer d ’ évaluer la réalisation des droits consacrés par la Convention dans le contexte de l ’ examen, après 25 ans, de la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d ’ action de Beijing en vue de parvenir à une égalité réelle entre les femmes et les hommes.

Diffusion

Le Comité demande à l ’ État partie de veiller à diffuser rapidement les présentes observations finales, dans la ou les langue(s) officielle(s) de l ’ État partie, aux institutions publiques compétentes à tous les niveaux (national, régional et local), en particulier au Gouvernement, au parlement et au corps judiciaire, afin d ’ en permettre la pleine application.

Ratification d’autres traités

Le Comité constate que l ’ adhésion de l ’ État partie aux neuf principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme contribuerait à favoriser l ’ exercice effectif par les femmes de leurs droits individuels et de leurs libertés fondamentales dans tous les aspects de la vie. Il l ’ invite donc à ratifier la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées à laquelle il n ’ est pas encore partie.

Suivi des observations finales

Le Comité invite l ’ État partie à fournir dans un délai de deux ans des informations écrites sur les mesures qu ’ il aura prises pour appliquer les recommandations contenues dans les paragraphes 18, 24 a) et d) et 32 ci-dessus.

Établissement du prochain rapport

Le Comité invite l ’ État partie à soumettre son onzième rapport périodique en novembre 2025. Le rapport devra être présenté dans les délais et couvrir toute la période écoulée, jusqu ’ à la date à laquelle il sera soumis.

Le Comité invite l ’ État partie à se conformer aux directives harmonisées pour l ’ établissement de rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits humains, englobant le document de base commun et les rapports pour chaque instrument ( HRI/GEN/2/Rev.6 , chap. I).