Nations Unies

CCPR/C/AGO/CO/2

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

8 mai 2019

Français

Original : anglais

Comité des droits de l’homme

Observations finales concernant le deuxième rapport périodique de l’Angola*

1.Le Comité a examiné le deuxième rapport périodique de l’Angola (CCPR/C/AGO/2) à ses 3576e et 3577e séances (CCPR/C/SR.3576 et 3577), les 7 et 8 mars 2019. À sa 3597e séance, le 22 mars 2019, il a adopté les observations finales ci-après.

A.Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le deuxième rapport périodique de l’Angola, qui a été soumis dans les délais, et les renseignements qu’il contient. Il apprécie l’occasion qui lui a été offerte de renouer un dialogue constructif avec la délégation de haut niveau de l’État partie au sujet des mesures prises pendant la période considérée pour appliquer les dispositions du Pacte. Il remercie l’État partie de ses réponses écrites (CCPR/C/AGO/Q/2/Add.1) à la liste de points (CCPR/C/AGO/Q/2), qui ont été complétées oralement par la délégation, et des renseignements supplémentaires donnés par écrit.

B.Aspects positifs

3.Le Comité se félicite des mesures législatives, institutionnelles et gouvernementales suivantes prises par l’État partie :

a)L’adoption, en 2019, du nouveau Code pénal qui incrimine, entre autres, les actes de discrimination fondés sur l’orientation sexuelle ;

b)L’adoption de la loi no 10/16 sur l’accessibilité et le décret présidentiel no 12/16 sur les quotas d’emplois réservés aux personnes handicapées ;

c)L’adoption de la loi no 10/15 sur le droit d’asile et le statut de réfugié, et la mise en place du Conseil national pour les réfugiés, en 2015 ;

d)L’adoption de la loi no 3/14 sur les infractions connexes au blanchiment d’argent et la traite des êtres humains et la création de la Commission intersectorielle contre la traite des êtres humains, en 2014 ;

e)L’élaboration du Plan stratégique pour prévenir et combattre la corruption et la création de la Direction de la lutte contre la corruption au sein de la police judiciaire, en 2018 ;

f)L’adoption de la Politique nationale en faveur de l’égalité des sexes, en décembre 2013 ;

g)L’adoption du Plan exécutif de lutte contre la violence familiale, en mai 2013, et la création d’un conseil multisectoriel chargé de sa mise en œuvre.

4.Le Comité se félicite également de l’adhésion de l’État partie à la Convention relative aux droits des personnes handicapées et au Protocole facultatif s’y rapportant, le 19 mai 2014.

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Mise en œuvre du Pacte dans l’ordre juridique interne et sur le territoire de l’État partie

5.Le Comité salue le fait que les dispositions du Pacte ont été invoquées devant les tribunaux nationaux ou appliquées par ceux-ci, comme en témoignent les affaires citées par la délégation, ainsi que les mesures prises pour mieux faire connaître le Pacte et le premier Protocole facultatif s’y rapportant aux membres de l’appareil judiciaire et aux agents de la force publique. Cependant, il reste préoccupé par le fait qu’un certain nombre de dispositions du droit écrit et du droit coutumier demeurent incompatibles avec les dispositions du Pacte, et inquiet des divergences persistantes entre les différentes sources de droit applicables dans l’État partie, notamment en ce qui concerne l’âge minimum du mariage et la polygamie (art. 2).

6. L’État partie devrait :

a) Poursuivre ses efforts pour mieux faire connaître le Pacte aux juges, aux procureurs, aux avocats et aux autorités traditionnelles afin que les dispositions du Pacte continuent d’être invoquées devant les tribunaux nationaux et les autres organes chargés de l’application des lois et d’être correctement appliquées par eux ;

b) Accélérer l’examen des dispositions du droit écrit et du droit coutumier qui sont incompatibles avec le Pacte, et prendre toutes les mesures possibles pour les rendre conformes au Pacte.

Constatations adoptées au titre du Protocole facultatif

7.Le Comité demeure préoccupé par le manque d’informations sur les mesures prises pour donner suite aux constatations qu’il a adoptées et par l’absence de mécanismes et de procédures efficaces qui permettraient aux auteurs de communications de demander, en droit et en pratique, la pleine et effective mise en œuvre des constatations (art. 2).

8. L’État partie devrait donner suite sans délai aux constatations du Comité et garantir les recours utiles qui y sont énoncés. Il devrait aussi prendre toutes les mesures qui s’imposent pour mettre en place les procédures voulues afin de donner pleinement effet aux constatations adoptées par le Comité, de façon à garantir un recours utile aux personnes dont les droits garantis par le Pacte ont été violés, conformément au paragraphe 3 de l’article 2.

Institution nationale des droits de l’homme

9.Le Comité prend note de l’information, communiquée par l’État partie, selon laquelle la révision de la loi relative au Médiateur est en cours, mais il juge préoccupants le caractère restreint du mandat du Bureau du Médiateur et l’insuffisance des ressources financières qui lui sont allouées, de même que la couverture géographique insuffisante de ses activités. Le Comité s’inquiète également de la faible visibilité des actions du Médiateur et du fait que l’existence de cette institution est peu connue de la population (art. 2).

10. L’État partie devrait accélérer l’adoption du cadre juridique requis pour que le Bureau du Médiateur puisse bien respecter les principes relatifs au statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris). Il devrait veiller à ce que les droits civils et politiques soient dûment pris en compte dans son mandat et à ce que des ressources humaines, techniques et financières suffisantes lui soient allouées afin qu’il puisse s’acquitter de son mandat dans tout le pays. L’État partie devrait également prendre toutes les mesures possibles pour mieux faire connaître le mandat et les activités du Médiateur auprès du grand public.

Lutte contre la corruption

11.Le Comité prend acte des diverses mesures de lutte contre la corruption prises par l’État partie, notamment l’introduction, dans le Code pénal de 2019, de dispositions érigeant en infraction pénale les actes de corruption et le détournement de fonds, ainsi que les nombreuses enquêtes pénales ouvertes par le ministère public. Il se déclare toutefois préoccupé parlesinformationsindiquant que la corruption demeure une pratique courante dans l’État partie, en particulier dans le secteur public, que des fonds illicites y circulent à des fins de blanchiment d’argent, que les mesures de prévention et celles visant à protéger les lanceurs d’alerte sont insuffisantes et que le nombre de poursuites et de condamnations pour faits de corruption est encore faible (art. 2, 14 et 25).

12. L’État partie devrait :

a) Intensifier les efforts qu’il déploie pour combattre la corruption et les flux financiers illicites, réviser le cadre juridique et le compléter pour mieux protéger les lanceurs d’alerte, et renforcer les pratiques de bonne gouvernance en surveillant la mise en œuvre de la stratégie anticorruption qui a été adoptée ;

b) Donner au parquet et aux forces de l’ordre des moyens accrus pour lutter contre la corruption, notamment en leur proposant des programmes de formation continue et en leur allouant des ressources suffisantes ;

c) Veiller, par l’application effective des dispositions pertinentes du Code pénal, à ce que tous les actes de corruption fassent l’objet d’enquêtes indépendantes et impartiales et à ce que les responsables, y compris les fonctionnaires au plus haut niveau de l’État partie et d’autres personnalités, soient traduits en justice et, s’ils sont reconnus coupables, sanctionnés comme il convient ;

d) Continuer de mener des campagnes visant à sensibiliser les responsables politiques , les agents de l’État, les entreprises et la population en général aux coûts économiques et sociaux de la corruption.

Lutte contre la discrimination

13.Le Comité se félicite de l’incrimination des actes de discrimination fondée sur l’orientation sexuelle, notamment dans le domaine de l’emploi. Il prend note aussi des mesures prises pour éliminer la discrimination à l’égard des personnes handicapées. Le Comité constate à nouveau avec préoccupation que l’État partie n’a pas encore adopté de loi générale sur l’égalité et la non-discrimination (voir CCPR/C/AGO/CO/1, par. 8). Il est également préoccupé par les informations indiquant que les personnes appartenant à certains groupes, en particulier les peuples autochtones, les ressortissants étrangers, les personnes vivant avec le VIH/sida, les personnes handicapées, les personnes atteintes d’albinisme et les lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres, sont victimes de stigmatisation et de discrimination de fait. Il regrette en outre le manque d’informations sur le nombre de plaintes pour discrimination et sur l’issue de ces plaintes (art. 2 et 26).

14. L’État partie devrait prendre les mesures qui s’imposent pour :

a) Promulguer une législation globale offrant une protection pleine et efficace contre la discrimination dans tous les domaines et contenant une liste exhaustive des motifs de discrimination interdits ;

b) Protéger efficacement les peuples autochtones, les ressortissants étrangers, les personnes vivant avec le VIH/sida, les personnes handicapées, les personnes atteintes d’albinisme et les lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres et garantir leurs droits fondamentaux, tout en veillant à ce que toutes les affaires de discrimination soient dûment examinées ;

c) Mener de vastes campagnes d’éducation et de sensibilisation en faveur de l’égalité, de la tolérance et du respect de la diversité ;

d) Ratifier la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale.

Égalité entre les hommes et les femmes

15.Le Comité salue l’adoption, en 2013, de la Politique nationale en faveur de l’égalité des sexes. Il s’inquiète cependant de la persistance de certains stéréotypes traditionnels concernant le rôle des femmes et des hommes dans la famille et dans la société, qui empêchent les femmes d’exercer leurs droits civils et politiques et d’être présentes et influentes dans la vie publique et politique. Le Comité relève que la loi sur les partis politiques prévoit un taux de représentation féminine d’au moins 30 % sur les listes des partis politiques participant aux élections générales. Il demeure toutefois préoccupé par la faible représentation des femmes aux postes de décision, notamment parmi les gouverneurs de province et au Parlement (art. 3, 25 et 26).

16. L’État partie devrait :

a) Revoir l’application de l’alinéa m) de l’article 20 de la loi n o 22/10 du 3 décembre 2010 sur les partis politiques, qui prévoit un taux de représentation minimum des femmes de 30 % sur les listes des partis politiques, afin de renforcer l’efficacité de cette mesure temporaire spéciale ou de la compléter par d’autres mesures efficaces ;

b) Renforcer les actions d’éducation et de sensibilisation visant à éliminer les préjugés et stéréotypes sexistes concernant les rôles et responsabilités des hommes et des femmes dans la famille et dans la société.

Violence à l’égard des femmes

17.Le Comité se félicite des efforts déployés par l’État partie pour prévenir et mettre un terme à la violence à l’égard des femmes, mais demeure préoccupé par :

a)Le fait que toutes les formes de violence sexiste à l’égard des femmes et des filles ne soient pas interdites dans les sphères tant publiques que privées ;

b)La sous-déclaration de la violence sexiste à l’égard des femmes et des filles, en raison de la stigmatisation des victimes, de la crainte de représailles, du manque de connaissances juridiques et du manque de confiance dans les forces de l’ordre ;

c)L’insuffisance de l’aide et des voies de recours offertes aux femmes qui cherchent à échapper à la violence familiale, et le nombre insuffisant de foyers d’accueil (art. 3, 7, 17, 23 et 26).

18. L’État partie devrait :

a) Adopter, en consultation avec la société civile, une loi globale visant à prévenir, combattre et punir toutes les formes de violence à l’égard des femmes et des filles, dans les sphères tant publique s que privée s ;

b) Veiller à l’application effective de la loi n o 25/11 contre la violence familiale par les tribunaux nationaux et les responsables de l’application des lois, et reconduire le Plan exécutif de lutte contre la violence familiale, initialement adopté pour la période 2012 ‑ 2017 ;

c) Encourager les femmes et les filles victimes de violence à le signaler à la police, notamment en sensibilisant les victimes, les professionnels de santé et les agents de la force publique à la nature criminelle de ces actes, et en veillant à ce que tou te s les affaires de violence à l’égard des femmes et des filles donnent lieu à des poursuites et à ce que leurs auteurs soient sanctionnés par des peines appropriées ;

d) Allouer des ressources suffisantes à la mise en œuvre des plans visant à élargir le réseau de centres d’accueil et de services spécialisés à tous les commissariats et hôpitaux du pays, accélérer leur exécution et en assurer l’accessibilité.

Pratiques préjudiciables aux femmes

19.Le Comité se félicite que l’adoption du nouveau Code pénal ait permis d’ériger les mutilations génitales féminines en infraction, et accueille avec satisfaction la mise en place de forums de discussion sur l’égalité des sexes au sein des communautés. Il est néanmoins préoccupé par :

a)La persistance de normes patriarcales ayant un caractère discriminatoire à l’égard des femmes, qui les cantonnent à des rôles reproductifs et légitiment des pratiques néfastes, notamment le mariage précoce et le mariage forcé, la dot (lobolo), la polygamie, le lévirat, les mutilations génitales féminines et l’exclusion sociale des femmes et des filles accusées de pratiquer la sorcellerie ;

b)Le fait qu’en vertu de l’article 24 du Code de la famille, le mariage précoce soit légal et autorisé à titre exceptionnel à partir de 16 ans pour les garçons et de 15 ans pour les filles ;

c)L’absence d’enquêtes, de poursuites et de sanctions en cas de mariage forcé ;

d)Le manque d’informations sur les mariages précoces et les mariages polygames, ainsi que sur les unions de lévirat célébrées en vertu du droit coutumier.

20. L’État partie devrait :

a) Interdire et combattre toutes les pratiques néfastes, notamment le mariage précoce et le mariage forcé, la dot ( lobolo ), la polygamie, le lévirat, l’accusation de sorcellerie et l’exclusion sociale des femmes et des filles accusées de pratiquer la sorcellerie, et enquêter sur les affaires relatives à de telles pratiques afin de poursuivre et de punir tous les adultes auteurs de tels actes ;

b) Renforcer les programmes de sensibilisation du public aux effets préjudiciables de ces pratiques sur l’exercice de leurs droits par les femmes et les filles, en ciblant les chefs coutumiers et religieux et les régions où ces pratiques sont courantes, notamment la région de Malanje ;

c) Accélérer la révision du Code de la famille afin de faire en sorte que l’âge minimum du mariage soit fixé à 18 ans tant pour les filles que pour les garçons, conformément aux normes internationales, et veiller à ce qu’il n’existe aucune exception à l’âge minimum du mariage, y compris au regard du droit coutumier ;

d) Fournir, dans son prochain rapport périodique, des données sur les mariages précoce s et les mariages polygames, ainsi que sur les unions de lévirat célébrées en vertu du droit coutumier.

Interruption volontaire de grossesse et mortalité maternelle

21.Le Comité est préoccupé par le fait que, sauf en de rares circonstances, le nouveau Code pénal sanctionne l’interruption volontaire de grossesse par des peines allant de deux à huit ans d’emprisonnement. Il s’inquiète également de la lourdeur des procédures d’accès à un avortement légal, qui pousse les femmes à faire appel à des services d’avortement clandestins mettant en péril leur vie et leur santé. Il est préoccupé par la stigmatisation dont font l’objet les femmes qui cherchent à s’informer sur les services d’avortement sécurisé, ainsi que par le nombre d’avortements clandestins non sécurisés qui entraînent souvent le décès de la mère. Il s’inquiète également du taux élevé de grossesses chez les adolescentes dans l’État partie, qui est notamment dû à l’accès limité aux services de santé sexuelle et procréative, et particulièrement aux moyens de contraception, ainsi qu’à une information et à une éducation adaptées à l’âge (art. 3, 6, 7, 17 et 26).

22. L’État partie devrait revoir sa législation de façon à s’assurer qu’elle ne réglemente pas la grossesse ou l’avortement d’une manière contraire à l’obligation qui lui incombe de veiller à ce que les femmes et les filles n’aient pas à recourir à des avortements non sécurisés, et supprimer tout obstacle qui oblige à recourir à des avortements clandestins susceptibles de mettre en danger la vie ou la santé des femmes. Il devrait en particulier :

a) Veiller à ce que des sanctions pénales ne soient pas imposées aux femmes qui choisissent de se faire avorter ou aux prestataires de services de santé qui les accompagnent dans cette démarche ;

b) Garantir que les femmes et les filles disposent de soins de santé prénatals et postavortement de qualité, sur l’ensemble du territoire de l’État partie, et y aient effectivement accès ;

c) Veiller à ce que les femmes et les hommes, et en particulier les filles et les garçons, aient accès à une information et une éducation de qualité et factuelle sur la santé sexuelle et procréative, ainsi qu’à une large gamme de méthodes contraceptives abordables.

Peine de mort

23.Le Comité se félicite de l’abolition de la peine de mort en droit interne, mais relève que l’État partie a signé le deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte en 2013 mais qu’il ne l’a pas encore ratifié (art. 6).

24. L’État partie devrait entreprendre toutes les démarches nécessaires pour accélérer le processus de ratification du deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte, visant l’abolition de la peine de mort.

Usage excessif de la force et comportement des agents de la force publique

25.Le Comité relève que le cadre législatif régissant le maintien de l’ordre public, en particulier le Règlement de 1996 sur la discipline dans la police nationale, n’est pas conforme aux normes internationales. Il s’inquiète aussi de ce que, selon des informations crédibles, des agents de la force publique ont souvent fait un usage excessif de la force, en particulier lors de manifestations, qui s’est soldé par des blessés et des morts. Il s’inquiète vivement de ce que les agents responsables de morts et de blessés parmi les manifestants sont rarement poursuivis pour de tels actes, ce qui a créé un climat d’impunité de fait (art. 6, 7, 9, 17 et 21).

26. L’État partie devrait :

a) Veiller à ce que les principes de nécessité et de proportionnalité régissant l’usage de la force soient dûment pris en compte dans la législation et les politiques et à ce qu’ils soient respectés dans la pratique, conformément aux Principes de base sur le recours à la force et l’utilisation des armes à feu par les responsables de l’application des lois ;

b) Renforcer la formation dispensée aux membres des forces de l’ordre sur les normes internationales relatives au recours à la force, et sensibiliser les juges, les procureurs et les avocats à cette question ;

c) Faire en sorte que tous les cas d’usage excessif de la force par les forces de sécurité donnent lieu sans tarder à des enquêtes impartiales et efficaces, que les responsables soient traduits en justice et condamnés à des peines appropriées, et que les victimes disposent de recours utiles.

Contrôle des armes légères et efforts de déminage

27.Le Comité prend acte des progrès accomplis par la Commission nationale pour le désarmement de la population civile en matière de lutte contre la prolifération des armes légères, en particulier des campagnes de sensibilisation menées pour lutter contre la possession et l’utilisation illégales d’armes légères, ainsi que des progrès importants réalisés en matière de déminage par l’Institut national de déminage, grâce à la mise en œuvre de son Programme pour l’élimination des mines terrestres en Angola. Il constate néanmoins avec préoccupation :

a)Que l’État partie n’est pas encore parvenu à réduire comme il convient les grandes quantités d’armes légères détenues illégalement par les résidents depuis la fin de la guerre civile, et qu’il n’a pas fourni de données statistiques sur le nombre de crimes commis à l’arme légère et sur les mesures pour protéger la population face à l’insécurité causée par les armes légères (CCPR/C/AGO/CO/1, par. 12) ;

b)Qu’il reste encore des mines terrestres sur tout le territoire de l’État partie, en particulier dans les zones rurales, ce qui crée des situations dangereuses (art. 6).

28. L’État partie devrait :

a) Intensifier l’action menée pour collecter les armes légères détenues par la population et réduire l’insécurité sur son territoire, notamment en recensant et supprimant les obstacles qui empêchent la pleine mise en œuvre des opérations de collecte d’armes légères, qu’elles soient volontaires ou obligatoires, et en renforçant sa législation en vue de lutter contre la détention et l’utilisation illégales des armes légères (CCPR/C/AGO/CO/1, par. 12) ;

b) Redoubler d’efforts en vue de protéger les civils, en particulier les enfants, contre les mines terrestres, notamment en achevant la mise en œuvre du Programme pour l’élimination des mines dans les délais convenus, en faisant en sorte de recenser toutes les zones où la présence de mines est soupçonnée et en menant des programmes de déminage avec l’armée, des entreprises commerciales et des organisations humanitaires, ainsi que des programmes de sensibilisation aux dangers des mines et des programmes de réadaptation physique des victimes.

Torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

29.Le Comité prend note de l’introduction, dans le nouveau Code pénal, de dispositions érigeant expressément la torture en infraction pénale. Il regrette toutefois le manque d’informations sur la pleine conformité de ces dispositions avec l’article 7 du Pacte. En outre, il est préoccupé par :

a)La clémence des sanctions prévues par le Code pénal pour le crime de torture ;

b)Les informations indiquant que la torture et les mauvais traitements seraient pratiqués par des membres de la police ou des forces de sécurité lors d’arrestations ou d’interrogatoires, dans des commissariats et d’autres lieux de détention ;

c)Le manque d’informations détaillées sur le nombre d’enquêtes menées et de condamnations prononcées pour des actes de torture ;

d)L’absence de mécanisme indépendant chargé d’enquêter sur les actes de torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (art. 7 et 9).

30. L’État partie devrait :

a) Revoir son cadre législatif pour faire en sorte que le Code pénal donne une définition de l’acte de torture pleinement conforme aux dispositions de l’article 7 du Pacte et que les peines soient proportionnées à la gravité de l’infraction ;

b) Faire en sorte que tous les cas présumés de torture ou de mauvais traitements fassent l’objet d’enquêtes approfondies, que les auteurs présumés de tels actes soient poursuivis et, s’ils sont reconnus coupables, condamnés à des peines appropriées, et que les victimes obtiennent réparation ;

c) Mettre en place un mécanisme national de prévention de la torture et un mécanisme indépendant chargé d’enquêter sur toutes les allégations de torture ou de peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ;

d) Ratifier la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, ainsi que son Protocole facultatif.

Conditions de détention

31.Le Comité prend acte des mesures prises pour réduire la surpopulation carcérale et améliorer les conditions de détention, notamment des projets de construction de nouveaux établissements et de l’adoption de la loi no 25/15 relative aux mesures conservatoires en procédure pénale. Il trouve toutefois inquiétantes les informations indiquant que les prisons restent surpeuplées, en partie en raison du grand nombre de détenus en attente de jugement, et que les conditions de détention sont extrêmement éprouvantes, notamment en ce qui concerne l’accès à l’alimentation, aux installations sanitaires et aux soins de santé. Le Comité s’inquiète également des informations selon lesquelles certaines prisons ne séparent pas les adultes des mineurs, ni les accusés des condamnés (art. 7, 9 et 10).

32. L’État partie devrait :

a) Mettre effectivement en œuvre des mesures visant à réduire la surpopulation carcérale, notamment des mesures de substitution à la détention telles que la mise en liberté sous caution et l’assignation à résidence, comme le prévoit la loi n o 25/15 relative aux mesures conservatoires en procédure pénale ;

b) Veiller à ce que le recours à la détention provisoire soit exceptionnel , conformément à l’article 9 du Pacte ;

c) Garantir le droit de toutes les personnes privées de liberté à être traitées avec humanité et dignité et faire en sorte que les conditions de détention de tous les établissements respectent l’Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus (Règles Nelson Mandela), notamment les règles concernant l’accès aux soins de santé, aux installations sanitaires et à l’alimentation ;

d) Prendre les mesures nécessaires pour séparer les détenus selon l’âge, le sexe et les motifs de détention.

Traite des personnes

33.Le Comité salue les mesures prises par l’État partie pour lutter contre la traite des êtres humains. Il demeure cependant préoccupé par :

a)Le retard prolongé pris dans l’adoption d’un plan d’action visant à lutter contre la traite des personnes ;

b)Le faible nombre de poursuites et de condamnations visant les auteurs de traite des êtres humains, ainsi que par les informations faisant état de la complicité d’agents des forces de l’ordre dans des actes de traite ;

c)L’absence de dispositifs normalisés de repérage précoce et d’orientation des victimes de la traite ;

d)L’insuffisance des ressources humaines, techniques et financières allouées à la protection des victimes de la traite, en particulier de refuges et de services juridiques, médicaux et psychologiques ;

e)L’insuffisance des efforts entrepris pour lutter contre le travail forcé, notamment le travail des enfants, en particulier dans le secteur minier (art. 7, 8 et 24).

34. L’État partie devrait :

a) Accélérer l’adoption d’un plan d’action national de lutte contre la traite des personnes et dégager des ressources suffisantes pour sa mise en œuvre ;

b) Faire appliquer la législation relative à la lutte contre la traite en menant des enquêtes tenant compte du sexe et de l’âge, en veillant à ce que les trafiquants, y compris les agents publics complices de la traite, soient poursuivis et sanctionnés par des peines appropriées ;

c) Former les membres des forces de l’ordre sur les normes relatives au repérage précoce des victimes de la traite et à leur orientation vers des services appropriés d’aide et de réadaptation ;

d) Affecter des ressources suffisantes à la création de refuges qui soient facilement accessibles dans toutes les provinces du pays et à la fourniture d’une assistance juridique, médicale et psychosociale adéquate dans ces refuges ;

e) Prendre toutes les mesures voulues pour éliminer le travail forcé et toutes les formes d’exploitation du travail des enfants, en particulier dans le secteur minier, en renforçant notamment les moyens dont disposent les inspecteurs du travail et en allouant des ressources suffisantes à l’inspection du travail.

Détention arbitraire

35.Le Comité constate avec préoccupation que l’État partie n’a pas donné de renseignements sur :

a)Les cas présumés d’arrestations et de détentions arbitraires, de détentions au secret et de détentions par les militaires et les forces de police ou de sécurité, en particulier de sympathisants du Front de la libération de l’enclave du Cabinda et de militants des droits de l’homme soupçonnés d’atteinte à la sûreté de l’État ;

b)Les informations indiquant que des personnes auraient été détenues pendant de longues périodes sans bénéficier des garanties légales, telles que la présentation à un juge, la possibilité de s’entretenir avec un avocat et d’être examiné par un médecin et le droit d’informer leur famille, et que des détenus condamnés n’auraient pas été libérés après avoir purgé leur peine (art. 9, 10 et 14).

36. Le Comité réitère sa recommandation précédente (CCPR/C/AGO/CO/1, par. 18) et invite l’État partie :

a) À prendre les mesures voulues pour qu’aucune personne relevant de sa juridiction ne fasse l’objet d’une arrestation ou d’une détention arbitraire ni d’une détention au secret, conformément aux dispositions pertinentes du Pacte ;

b) À enquêter sur les cas de détention arbitraire, en particulier ceux qui concernent des sympathisants du Front de libération du Cabinda et des militants des droits de l’homme ;

c) À garantir que les détenus bénéficient de toutes les garanties légales, conformément aux articles 9 et 14 du Pacte.

Indépendance du pouvoir judiciaire et administration de la justice

37.Le Comité se félicite des efforts de décentralisation des tribunaux entrepris dans le sillage de l’adoption, en 2015, de la loi no 2/15 établissant les principes et règles de l’organisation et du fonctionnement des tribunaux de droit commun. Il demeure toutefois préoccupé par les informations faisant état de défaillances persistantes dans l’administration de la justice, en particulier du manque d’indépendance du pouvoir judiciaire et du nombre insuffisant de juges, procureurs et avocats formés, ce qui peut empêcher de nombreux citoyens d’accéder à la justice (art. 14).

38. L’État partie devrait poursuivre ses efforts de réforme du système judiciaire et veiller à ce que toutes les procédures judiciaires se déroulent dans le plein respect des garanties d’une procédure régulière stipulées à l’article 14 du Pacte. Il devrait en particulier :

a) Renforcer l’indépendance du pouvoir judiciaire et du parquet ;

b) Intensifier ses efforts en vue d’éliminer la corruption qui sévit dans l’appareil judiciaire, notamment en poursuivant et sanctionnant les personnes, y compris les juges et les procureurs, qui pourraient en être complices ;

c) Poursuivre l’action menée pour accroître le nombre de juges, de procureurs et d’avocats formés, par des mesures d’éducation et de formation, et pour assurer leur affectation dans les zones rurales ;

d) Accélérer l’exécution de la réforme judiciaire pour faire en sorte que les cours et tribunaux nouvellement créés (au niveau des municipalités et des provinces) aient leur effectif au complet et soient pleinement opérationnels de façon à garantir une justice accessible pour tous, en particulier pour les personnes défavorisées et les habitants des zones rurales ;

e) Garantir la possibilité de bénéficier gratuitement des services d’un avocat dans toutes les affaires où l’intérêt de la justice l’exige.

Demandeurs d’asile et réfugiés

39.Le Comité prend note avec satisfaction de la politique de l’État partie visant à accueillir un grand nombre de migrants et de demandeurs d’asile sur son territoire et des efforts qu’il a engagés pour enregistrer les enfants nés de parents réfugiés originaires de la République démocratique du Congo. Il déplore toutefois l’absence de mécanismes d’application pour la loi sur le droit d’asile et le statut de réfugié adoptée en 2015 et, en particulier, l’absence de procédures d’asile. Il est également préoccupé par :

a)Les informations faisant état d’expulsions massives de migrants et de demandeurs d’asile, y compris de personnes ayant besoin d’une protection internationale, sans qu’il soit procédé aux évaluations individuelles requises ;

b)Le grand nombre de demandeurs d’asile et de réfugiés qui se retrouvent sans papiers du fait de la suspension des procédures d’enregistrement et qui sont souvent automatiquement placés en détention pour séjour illégal dans l’État partie ;

c)Le fait que les demandeurs d’asile hébergés dans des centres d’accueil ont un accès limité aux services sociaux essentiels et sont obligés de séjourner, tout au long de la procédure de détermination de leur statut, dans des centres pour migrants, dans des conditions précaires ;

d)Les obstacles pratiques à l’enregistrement, à la naissance, des enfants nés de parents étrangers, notamment de parents réfugiés et demandeurs d’asile, ce qui expose ces enfants à un risque d’apatridie ;

e)Les informations persistantes faisant état de torture, de mauvais traitement, de placement en détention, de harcèlement et d’autres atteintes des droits de l’homme de la part des forces de sécurité contre des réfugiés, enregistrés ou non, en particulier ceux d’origine congolaise (art. 2, 6, 7, 10 et 13).

40. L’État partie devrait :

a) Garantir l’application de la loi sur le droit d’asile et le statut de réfugié et mettre en place des procédures d’asile équitables et efficaces, offrant une protection effective contre le refoulement ;

b) Délivrer des papiers d’identité aux demandeurs d’asile et aux réfugiés et renouveler ponctuellement leurs documents pour faciliter leur accès aux services sociaux essentiels et empêcher qu’ils ne fassent l’objet d’une détention arbitraire ;

c) Garantir que la détention des demandeurs d’asile et des réfugiés ne soit utilisée qu’en dernier ressort et que les personnes détenues dans des centres d’accueil bénéficient des garanties légales, de l’assistance d’un conseil et de services d’interprétation ;

d) Instituer des mesures de substitution à la détention pour les enfants et les familles avec enfants ;

e) Améliorer les conditions matérielles dans les centres d’accueil et faire en sorte que les demandeurs d’asile qui y séjournent bénéficient de conditions de vie décentes et aient accès aux services sociaux essentiels ;

f) Modifier la législation et les politiques de façon à supprimer l’obligation faite aux demandeurs d’asile de résider dans des centres d’accueil fermés ;

g) Redoubler d’efforts pour éliminer les obstacles pratiques qui s’opposent à l’enregistrement systématique de tous les enfants nés en Angola de parents étrangers, y compris de parents réfugiés ou demandeurs d’asile ;

h) Veiller à ce que les responsables de l’application des lois se conforment aux dispositions des articles 6 et 7 du Pacte lorsqu’ils expulsent des étrangers, notamment en contrôlant leurs activités, en enquêtant sur les violations des droits de l’homme commises, en poursuivant les auteurs de tels actes et en les sanctionnant par des peines appropriées.

Liberté d’expression et protection des journalistes et des défenseurs des droits de l’homme

41.Le Comité s’inquiète des informations selon lesquelles les médias angolais sont en grande partie contrôlés par le Gouvernement et par le Mouvement populaire pour la libération de l’Angola (Movimento Popular de Libertação de Angola). Il est aussi préoccupé par les informations indiquant que l’ensemble de textes législatifs sur la communication sociale (Pacote legislativo da comunicação social) a été adopté à l’issue d’un débat sommaire, malgré l’opposition du syndicat des journalistes et d’autres syndicats, et qu’il limite en fait la liberté d’expression en conférant notamment au Ministère de la communication sociale le pouvoir de contrôler la manière dont les médias appliquent les décisions éditoriales et d’imposer une amende aux contrevenants ou de suspendre leurs activités (art. 9, 7 et 19). Le Comité est particulièrement préoccupé par l’article 82 de la loi sur la presse, qui érige en infraction toute publication d’un texte ou d’une image ayant un caractère offensant pour les personnes, ainsi que par l’introduction dans le nouveau Code pénal de dispositions sur la diffamation susceptibles d’être invoquées pour réduire au silence la dissidence et sanctionner des déclarations faites par des représentants des médias.

42. À la lumière de l’observation générale n o 34 (2011) du Comité au sujet de la liberté d’opinion et d’expression, l’État partie devrait :

a) Veiller à ce que toutes les dispositions de sa législation soient mises en conformité avec l’article 19 du Pacte et, entre-temps, garantir que nul ne soit emprisonné pour diffamation ;

b) Revoir toutes les restrictions imposées à la presse et aux médias de fa ç on à ce qu’elles soient strictement conformes aux dispositions du paragraphe 3 de l’article 19 du Pacte ;

c) Protéger les journalistes et les médias contre toute forme d’ingérence, de harcèlement et d’agression injustifiée, enquêter rapidement sur toutes les agressions de ce type et traduire leurs responsables en justice.

Liberté d’association

43.Le Comité prend note de la décision de la Cour constitutionnelle de juillet 2017, déclarant inconstitutionnel le décret présidentiel no 74/15 sur la réglementation des organisations non gouvernementales (ONG), et salue le forum qui s’est tenu avec les ONG en novembre 2017. Il est toutefois préoccupé par les informations faisant état de retards dans l’enregistrement des organisations non gouvernementales et de pressions exercées contre celles qui soulèvent des questions politiques sensibles. Il s’inquiète aussi de voir qu’il n’existe pas de possibilités d’échange direct avec les représentants des organisations locales de la société civile en vue de l’instauration d’un dialogue et que l’État partie ne met pas pleinement à profit la contribution des ONG pour promouvoir les droits civils et politiques (art. 9, 19, 21 et 22).

44. L’État partie devrait :

a) Adopter et mettre en œuvre sans tarder des mesures effectives pour protéger les organisations de la société civile, en particulier celles qui défendent les droits de l’homme, et leur permettre de se faire enregistrer et de mener leurs activités librement et sans crainte de faire l’objet ou d’être menacées de harcèlement, de violence ou d’intimidation, et veiller à ce que les auteurs de tels actes soient traduits en justice ;

b) Collaborer avec les organisations de la société civile pour l’élaboration, l’application et le suivi de politiques, programmes et mesures visant à promouvoir les droits civils et politiques, ainsi que pour la préparation des rapports au Comité.

Liberté de réunion

45.Le Comité trouve préoccupantes les allégations d’emploi excessif de la force, dont le recours à des chiens, à des mesures d’intimidation et à la détention arbitraire, contre des manifestants pacifiques. Il déplore également l’insuffisance des informations communiquées par l’État partie concernant les enquêtes menées, les poursuites engagées et les condamnations prononcées pour de telles violations.

46. L’État partie devrait :

a) Veiller à ce que toutes les restrictions aux manifestations pacifiques qui ne sont pas strictement nécessaires et proportionnées au sens de l’article 21 du Pacte soient levées ;

b) Enquêter sur toutes les allégations d’emploi excessif de la force, d’intimidation et de détention arbitraire contre des manifestants pacifiques, et veiller à ce que les auteurs de tels actes soient dûment poursuivis et condamnés et à ce que les victimes reçoivent une indemnisation adéquate.

Droits de l’enfant

47.Tout en prenant note des mesures adoptées pour faciliter l’enregistrement des naissances, notamment en exemptant les ressortissants angolais des droits d’enregistrement pour les premières demandes, le Comité demeure préoccupé de voir que le taux d’enregistrement des naissances reste très faible dans l’État partie, en particulier dans les zones rurales. Il constate aussi avec préoccupation que toutes les formes de châtiments corporels ne sont toujours pas interdites dans tous les contextes. Il exprime une nouvelle fois son inquiétude au sujet de la pratique consistant à accuser des enfants de sorcellerie et des mauvais traitements dont ces enfants sont victimes (CCPR/C/AGO/CO/1, par. 24) (art. 2, 7, 16 et 24).

48. L’État partie devrait redoubler d’efforts pour parvenir à un enregistrement universel des naissances de façon à garantir que les enfants jouissent des droits consacrés par le Pacte et ne risquent pas de devenir apatrides. Il devrait en particulier assurer l’accès à un enregistrement gratuit dans tout le pays et renforcer cet accès dans les zones rurales, notamment en recourant davantage aux unités d’enregistrement mobiles. L’État partie devrait prendre des mesures concrètes, en particulier d’ordre législatif, pour mettre un terme à toutes les formes de châtiment corporel dans tous les contextes. L’État partie devrait aussi redoubler d’efforts pour protéger les enfants accusés de sorcellerie contre les mauvais traitements et les abus et mener, en particulier dans les zones rurales, des actions de sensibilisation aux conséquences néfastes de ces accusations.

Droits des minorités

49.Le Comité s’inquiète de la discrimination dont seraient victimes les minorités ethniques et les peuples autochtones en ce qui concerne l’accès à l’alimentation, à l’eau, à la santé et à l’éducation. Tout en prenant note des initiatives récentes visant à reconnaître le droit de certaines minorités de posséder et d’exploiter des terres, le Comité est néanmoins préoccupé par le fait que des San continuent de se heurter à des obstacles les empêchant d’avoir un accès continu à leurs terres et que des pasteurs du sud-ouest du pays ont été chassés des pâturages et dépossédés par la force de leurs terres. Il s’inquiète également de ce que certaines activités de développement empêchent certaines minorités ethniques et autochtones d’accéder à la terre et menacent leurs modes de vie traditionnels, et de l’absence de cadre juridique pour la consultation des communautés affectées avant la mise en œuvre de telles activités. Le Comité est également préoccupé par l’attitude restrictive adoptée par l’État partie à l’égard de l’application des normes relatives à la protection des droits des peuples autochtones reconnues à l’échelon international (art. 25, 26 et 27).

50. L’État partie devrait :

a) Mettre en œuvre les programmes adoptés récemment ayant pour but de donner des moyens d’action aux membres des minorités et de renforcer leur participation effective aux processus de prise des décisions, et renforcer les mesures législatives et administratives nécessaires pour garantir les droits des minorités ethniques et des peuples autochtones, en particulier en assurant la protection de leurs droits fonciers existants ;

b) Renforcer les programme s de soutien existants réservés aux minorités, en particulier ceux destinés aux enfants, et adopter des mesures spécifiques de nature à améliorer l’accès des minorités ethniques et des peuples autochtones aux services sociaux ;

c) Obtenir le consentement libre, préalable et éclairé des peuples autochtones avant d’octroyer des concessions à des entreprises souhaitant exercer des activités économiques sur des territoires que les peuples autochtones possèdent ou occupent traditionnellement ou qu’ils utilisent ;

d) Reconsidérer l’approche adoptée à l’égard de l’application des normes relatives à la protection des droits des peuples autochtones et des membres des communautés minoritaires reconnues à l ’ échelon international.

D.Diffusion et suivi

51. L’État partie devrait diffuser largement le texte du Pacte, de son deuxième rapport périodique, des réponses écrites à la liste de points établie par le Comité et des présentes observations finales auprès des autorités judiciaires, législatives et administratives, de la société civile et des organisations non gouvernementales présentes dans le pays, ainsi qu’auprès du grand public, y compris les membres des minorités, afin de les sensibiliser aux droits consacrés par le Pacte. L’État partie devrait faire en sorte que le rapport, les réponses écrites et les présentes observations finales soient traduits dans sa langue officielle.

52. Conformément au paragraphe 1 de l’article 7 5 du Règlement intérieur du Comité, l’État partie est invité à faire parvenir, avant le 29 mars 2021, des renseignements sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations formulées aux paragraphes 22 (interruption volontaire de grossesse et mortalité maternelle), 26 (usage excessif de la force et conduite des agents de la force publique) et 46 (liberté de réunion).

53. Le Comité demande à l’État partie de lui soumettre son prochain rapport périodique le 29 mars 2023 au plus tard et d’y faire figurer des renseignements précis et à jour sur la suite qu’il aura donnée aux autres recommandations formulées dans les présentes observations finales et sur l’application du Pacte dans son ensemble. Il demande également à l’État partie, lorsqu’il élaborera ce rapport, de tenir de vastes consultations avec la société civile et les organisations non gouvernementales présentes dans le pays. Conformément à la résolution 68/268 de l’Assemblée générale, ce document ne devra pas compter plus de 21 200 mots. Le Comité engage tous les États parties à opter pour la procédure simplifiée de présentation des rapports. Si l’État partie opte pour la procédure simplifiée, celui-ci est prié d’en aviser le Comité dans un délai d’un an à compter de la réception des présentes observations finales. Les réponses de l’État partie à la liste des points établie par le Comité en vertu de la procédure simplifiée constitueront le prochain rapport périodique à soumettre en application de l’article 40 du Pacte.