Nations Unies

CAT/C/KGZ/3

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr. générale

2 avril 2019

Français

Original : russe

Anglais, espagnol, français et russe seulement

Comité contre la torture

Troisième rapport périodique soumis par le Kirghizistan en application de l’article 19 de la Convention selon la procédure facultative d’établissement des rapports, attendu en 2017*, **

[Date de réception : 31 janvier 2019]

Introduction

1.Le présent rapport est présenté en application du paragraphe 1 de l’article 19 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, et a été établi conformément aux directives générales concernant la forme et le contenu des rapports périodiques devant être soumis par les États parties. Il contient des renseignements sur l’état d’avancement de la mise en œuvre des recommandations finales du Comité contre la torture (CAT/C/KGZ/CO/2), les réponses à la liste de points établie par le Comité contre la torture (CAT/C/KGZ/QPR/3), ainsi que des renseignements complémentaires sur l’état d’avancement de la mise en œuvre de ladite Convention.

2.Le rapport a été élaboré par un groupe de travail interinstitutions créé par une décision du Conseil de coordination pour les droits de l’homme, à partir d’informations fournies par le Service d’État chargé de l’exécution des peines, le Ministère de l’intérieur, la Cour suprême, le Comité d’État à la sécurité nationale, le Comité d’État à la défense, le Ministère de la santé, le Ministère de l’éducation et des sciences et le Ministère du travail et du développement social. Il porte sur la période 2012-2016.

3.Le projet de rapport a été examiné le 18 juillet 2017, lors d’une table ronde organisée par le groupe de travail interinstitutions créé par la décision du Conseil de coordination pour les droits de l’homme auprès du Gouvernement de la République kirghize, avec la participation de représentants d’organes de l’État et d’organisations de la société civile. Sa version définitive a été élaborée à la lumière des recommandations et propositions reçues.

Renseignements sur l’état d’avancement de la mise en œuvre par la République kirghize des obligations lui incombant au titre de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

(Réponses à la liste de points à traiter établie avant la soumission par la République kirghize du troisième rapport périodique relatif à la mise en œuvre des dispositions de la Convention précitée)

Paragraphes 1 a) et b)

4.Conformément aux dispositions de la Constitution, nul ne peut être soumis à la torture ni à d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Toute personne privée de liberté a le droit d’être traitée avec humanité et dans le respect de la dignité humaine (art. 22 de la Constitution).

5.En 2003, le Code pénal a été complété par l’article 3051 relatif à la torture, selon lequel le recours à la torture est passible d’une peine privative de liberté de trois à cinq ans. En d’autres termes, la torture relevait de la catégorie des infractions de moindre gravité.

6.En 2012, l’article en question a été modifié et complété. La définition de la torture qui y figurait a été mise en conformité avec la Convention dans toute la mesure du possible.

7.La torture s’entend du « fait d’infliger intentionnellement des souffrances physiques ou mentales à une personne aux fins d’obtenir d’elle ou d’une tierce personne des renseignements ou des aveux, de la punir d’un acte qu’elle ou une tierce personne a commis ou est soupçonnée d’avoir commis, ainsi qu’aux fins de l’intimider ou de faire pression sur elle ou d’intimider ou de faire pression sur une tierce personne pour qu’elle exécute certaines actions, ou pour tout autre motif fondé sur une forme de discrimination quelle qu’elle soit, lorsque de tels actes sont commis par un agent de l’État ou commis par autrui à son instigation ou avec son consentement exprès ou tacite ».

8.L’infraction en question est passible d’une peine privative de liberté d’une durée comprise entre quatre et quinze ans.

9.L’infraction autonome de torture est ainsi passée de la catégorie des infractions de moindre gravité à celle des infractions particulièrement graves.

Paragraphe 1 c)

10.En application du paragraphe 10 des recommandations finales (CAT/C/KGZ/CO/2), un nouveau Code pénal est en vigueur depuis le 1er janvier 2019. Il dispose que « la torture s’entend du fait d’infliger des souffrances physiques ou mentales à une personne aux fins d’obtenir d’elle ou d’une tierce personne des renseignements ou des aveux, de la punir d’un acte qu’elle ou une tierce personne a commis ou est soupçonnée d’avoir commis, ainsi qu’aux fins de l’intimider ou de faire pression sur elle ou d’intimider ou de faire pression sur une tierce personne pour qu’elle exécute certaines actions, ou pour un motif fondé sur une forme de discrimination quelle qu’elle soit, commis par un agent de l’État ou commis par autrui à son instigation ou avec son consentement exprès ou tacite ». Le seuil maximal de la peine encourue pour cette infraction a été abaissé de cinq ans, la peine maximale pouvant être prononcée par les tribunaux étant non plus de quinze ans, mais de dix ans de privation de liberté (art. 143 de la nouvelle version du Code pénal).

11.Les dispositions concernant la torture, qui figuraient dans la section du Code pénal intitulée « Infractions commises par des agents de l’État », ont été déplacées dans la section « Atteintes aux personnes » du fait que l’État a pour mission première de protéger les valeurs suprêmes que constituent les droits de l’homme et les libertés fondamentales. C’est à l’aune de ces droits et libertés que sont déterminés le sens et la teneur de l’action publique, comme cela est énoncé dans la loi fondamentale de l’État, à savoir la Constitution.

12.En outre, un nouveau Code de procédure pénale est entré en vigueur le 1er janvier 2019. Il prévoit que les dispositions relatives à la libération conditionnelle anticipée et au délai de prescription de l’action pénale ne sont pas applicables aux personnes condamnées pour actes de torture.

13.L’article 4 de la loi du 14 juin 2002 sur les principes généraux relatifs à la grâce interdit l’amnistie des personnes ayant commis des infractions graves et particulièrement graves, quelle que soit la durée de la peine prononcée. Les éléments constitutifs de l’infraction visée à l’article 3051 du Code pénal relèvent également de la catégorie des infractions graves.

14.Le nouveau Code pénal et le nouveau Code de procédure pénale sont en vigueur depuis le 1er janvier 2019. Ils renforcent les garanties fondamentales relatives au droit de ne pas être soumis à la torture au cours de la garde à vue et de l’enquête préliminaire.

Paragraphe 2

15.Des analyses ont été conduites dans le cadre d’un programme de travail de la Cour suprême pour la période 2014-2015. Ces analyses ont porté sur la pratique judiciaire suivie en 2012-2013 dans les affaires pénales concernant des actes de torture et de mauvais traitements, ainsi que sur les pièces judiciaires examinées par les tribunaux en 2013 et pendant les neuf premiers mois de 2014 pour décider de l’adoption de mesures préventives.

16.En 2012 et 2013, le Centre de la Cour suprême pour la formation des juges a mené les activités ci-après en vue d’améliorer les compétences des juges en ce qui concerne les normes internationales relatives à la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales et la protection du droit de ne pas être soumis à la torture ni à d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, et de renforcer le rôle des juges dans la prévention et la répression de la torture et des mauvais traitements à l’égard des personnes privées de liberté :

Un séminaire de deux jours à l’intention des juges des tribunaux locaux, sur le thème « Particularités de l’examen des demandes d’adoption de mesures préventives au titre de la législation nationale et des normes internationales » ;

Un séminaire de trois jours sur le thème « Principes et normes relatifs aux droits de l’homme dans l’administration de la justice » ;

Un séminaire de deux jours sur le thème « Garanties relatives au droit de ne pas être soumis à la torture en République kirghize : problèmes et perspectives », avec la participation de membres du ministère public, d’organes chargés de l’application des lois et d’associations.

17.De plus, dans le cadre d’une collaboration avec le Bureau régional du Haut‑Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH), le Bureau du programme de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) à Bichkek, le Centre d’études politiques Tian Chan et l’entité d’ONU-Femmes chargée de la dimension de genre de la médiation, le Centre de la Cour suprême pour la formation des juges a dispensé du 1er au 4 juin 2015 une formation sur les normes internationales et la législation nationale dans le domaine de la protection des droits de l’homme, y compris le droit de ne pas être soumis à la torture ni à d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ; il a également mené une analyse de la pratique judiciaire suivie dans les affaires pénales concernant des actes de torture et de mauvais traitements.

18.La direction du bureau du Procureur général a conduit plusieurs réunions avec des représentants d’organisations internationales, en particulier le Bureau régional du HCDH, le Bureau du programme de l’OSCE à Bichkek, l’Institut Ludwig Boltzmann pour les droits de l’homme et la fondation Legal Prosperity. Lors de ces réunions, il a été question de l’organisation de tables rondes et de réunions régionales sur le perfectionnement des mécanismes de lutte contre la torture et autres mauvais traitements, et de la tenue de formations et de séminaires à l’intention des agents d’instruction du ministère public ; il a aussi été convenu des dates de ces manifestations.

19.Une attention particulière étant portée à la formation continue des agents d’instruction du ministère public, des formations et des séminaires sur ces questions sont systématiquement organisées par le bureau du Procureur général, avec le concours d’associations et d’institutions internationales de protection des droits de l’homme. Les formateurs sont des agents d’une section chargée de veiller au respect des droits des citoyens pendant la phase préparatoire de la procédure pénale, et des experts d’organisations internationales et non gouvernementales.

20.Pendant la seule année 2016, dans les régions, le bureau du Procureur général a tenu 9 séminaires de formation de deux et trois jours à l’intention des agents des services du ministère public, et donné 28 conférences sur la lutte contre la torture et l’efficacité des enquêtes s’y rapportant. Ces manifestations comprenaient des exercices pratiques sous forme de jeux de rôle et de jeux interactifs.

21.Les services régionaux du ministère public ont organisé 31 séminaires de formation, auxquels ont participé 481 agents d’instruction.

22.Avec le concours d’associations et d’institutions internationales de protection des droits de l’homme, le bureau du Procureur général organise des tables rondes sur des questions d’actualité liées à la lutte contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, et sur les problèmes qui se posent et les moyens de les résoudre ; il y entend les exposés des participants.

23.Ainsi, à l’initiative du bureau du Procureur général, une table ronde a été organisée en décembre 2015 sur le thème « Perfectionnement des mécanismes de lutte contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ». Elle a vu la participation du Procureur général, de députés du Parlement, de membres du Gouvernement, du Médiateur (Akyikatchy), du directeur du Centre national de prévention de la torture et des autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, et de représentants d’organisations internationales et d’organisations non gouvernementales (ONG) œuvrant dans le domaine de la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

24.En 2016, des tables rondes similaires ont été tenues dans les villes de Karakol (région d’Issyk-Koul) et de Djalal-Abad sur le thème de la lutte contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Elles ont rassemblé des délégués régionaux du Médiateur (Akyikatchy) et du Centre national de prévention de la torture et des autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, des responsables de services régionaux du ministère public et des ministères de l’intérieur, de la justice et de la santé, ainsi que des représentants d’ONG menant des activités en rapport avec la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Cette pratique est toujours suivie à l’heure actuelle.

25.Le Ministère de l’intérieur met tout en œuvre pour améliorer la culture juridique et instaurer des traditions de respect inconditionnel de la loi, de l’état de droit et de la moralité. À cette fin, des accords de coopération en matière de perfectionnement et de formation continue ont été conclus avec l’École du Ministère de l’intérieur, l’École publique de droit du Kirghizistan et l’École d’administration publique auprès de la présidence de la République. Des cours de formation ont été suivis par 182 agents des services d’instruction et des services opérationnels du Ministère de l’intérieur, dans le cadre de l’École et du Centre de formation du même ministère.

Paragraphe 3 a)

26.Le défenseur est désigné par le suspect, l’inculpé, le prévenu, le témoin, leurs représentants légaux, ou par d’autres personnes à la demande du suspect, de l’inculpé, du prévenu ou du témoin ou avec son accord. Le droit du suspect, de l’inculpé et du prévenu d’être assisté d’un défenseur pendant la procédure pénale est garanti par l’agent d’instruction et le tribunal. La prise en charge des honoraires d’avocat par l’État s’effectue conformément à un programme d’aide juridictionnelle garantie. Les honoraires d’avocat pris en charge par l’État dans le cadre de ce programme étaient de 1 648 800 soms en 2012, 4 732 800 soms en 2013, 10 552 500 soms en 2014, 18 322 076 soms en 2015 et 19 240 068 soms en 2016.

27.La participation d’un défenseur à la procédure pénale est obligatoire dans les cas ci‑après : il est difficile au suspect, à l’inculpé ou au prévenu d’exercer lui-même son droit à la défense en raison de graves troubles des fonctions langagières, auditives ou visuelles, d’une maladie grave de longue durée, ou d’une déficience intellectuelle, d’une arriération mentale manifeste ou d’autres déficiences physiques ou mentales ; il ne maîtrise pas ou pas suffisamment la langue utilisée dans la procédure pénale ; il n’a pas atteint l’âge de la majorité ; il est suspecté ou inculpé d’une infraction particulièrement grave ; il y a conflit entre les intérêts des suspects, des inculpés ou des prévenus et au moins l’un d’entre eux est assisté d’un défenseur.

28.Tout suspect, inculpé, prévenu ou condamné a le droit de s’entretenir librement et en privé avec son défenseur, sans restriction quant au nombre ou à la durée de ces entretiens (art. 40 et 42 du Code de procédure pénale).

29.En outre, la présence d’un défenseur est obligatoire lorsque le tribunal examine une demande de l’agent d’instruction tendant au placement de l’inculpé en détention provisoire à titre de mesure préventive. Cette prescription s’applique également à la procédure de prolongation de la détention provisoire de l’inculpé (art. 45 et 46 du Code de procédure pénale en vigueur).

30.Les éléments ci-après relèvent de la catégorie des moyens de preuve irrecevables : les déclarations concernant la commission d’une infraction pénale faites pendant l’enquête pénale par un suspect ou un inculpé en l’absence d’un défenseur, y compris lorsque l’assistance d’un défenseur a été refusée, ainsi que les déclarations faites au tribunal par un prévenu en l’absence d’un défenseur ; les déclarations faites par une victime ou un témoin à partir de conjectures, de suppositions ou de rumeurs, de même que les déclarations faites par un témoin qui n’est pas en mesure d’indiquer la source de ses informations, si celles-ci ne sont pas corroborées par l’ensemble des éléments de preuve examinés au cours de l’enquête ou de la procédure judiciaire ; tout autre élément de preuve obtenu en violation des dispositions du Code de procédure pénale (art. 81 du Code de procédure pénale en vigueur).

Paragraphe 3 b)

31.Conformément au Code de procédure pénale en vigueur, lorsqu’un suspect est placé en garde à vue à titre de mesure de contrainte procédurale, l’enquêteur est tenu d’informer un membre de la famille de l’intéressé ou, à défaut, un de ses proches, dans un délai de douze heures. Si l’intéressé est ressortissant d’un autre État, son placement en garde à vue doit, dans le même délai, être notifié à l’ambassade ou au consulat de cet État.

32.À la différence du Code de procédure pénale en vigueur, le nouveau Code de procédure pénale reconnaît à tout suspect les droits ci-après : avoir, sous surveillance, une conversation téléphonique effective et gratuite au moment de son arrestation ; recevoir une explication écrite concernant ses droits ; se défendre lui-même ou avec l’aide d’un avocat choisi par lui ; être assisté d’un défenseur dès le moment où il lui est signifié qu’il est soupçonné d’avoir commis une infraction ou, le cas échéant, dès son placement effectif en garde à vue, et bénéficier de l’aide juridictionnelle garantie par l’État si aucun défenseur n’a été désigné ; demander un contrôle de la légalité et du bien-fondé de sa garde à vue ; passer un examen médical et recevoir les soins d’un médecin après son placement effectif en garde à vue (art. 45 du Code de procédure pénale).

Paragraphe 3 c)

33.Conformément au Code de procédure pénale en vigueur, chaque fois qu’un suspect est placé dans un centre de détention temporaire (IVS), et dans les cas où lui-même, son défenseur ou un membre de sa famille dépose plainte pour des violences physiques commises sur sa personne par des agents d’organes d’enquête ou d’instruction, il fait l’objet d’un examen médical obligatoire qui donne lieu à l’établissement d’un rapport (art. 40 du Code de procédure pénale).

34.En outre, le suspect, l’inculpé, la victime et le témoin ont le droit de faire intervenir en qualité d’experts des personnes désignées par eux parmi les membres de certaines organisations d’expertise judiciaire, et de leur poser des questions afin qu’il y soit répondu dans un rapport d’expertise (art. 199 et 202 du Code de procédure pénale).

Paragraphe 3 d)

35.En vertu de l’article 40 du Code de procédure pénale, tout suspect jouit des droits ci‑après : connaître les soupçons qui pèsent sur lui ; recevoir les copies de l’acte d’introduction de l’action pénale et du procès-verbal d’arrestation ; recevoir une explication écrite concernant ses droits ; être assisté d’un défenseur dès le premier interrogatoire ou, s’il est placé en garde à vue, dès le moment où il est effectivement remis à l’organe d’enquête ; faire des déclarations ou refuser d’en faire ; faire des déclarations dans sa langue maternelle ou dans une langue qu’il maîtrise ; recourir aux services d’un interprète ; produire des éléments de preuve ; formuler des demandes et des récusations ; prendre connaissance du procès-verbal des actes d’instruction auxquels il a participé, et soumettre des observations obligatoirement portées au procès-verbal; participer, avec l’autorisation de l’agent d’instruction, aux actes d’instruction auxquels il est procédé à sa demande ou à celle de son défenseur ou de son représentant légal ; contester les actes d’un agent de l’organe d’enquête, et les actes et décisions de l’agent d’instruction et du procureur.

36.Conformément à l’article 94 du Code de procédure pénale, une personne soupçonnée d’avoir commis une infraction peut être placée en garde à vue aux motifs suivants : 1) elle est prise sur le fait ou immédiatement après la commission de l’infraction ; 2) des témoins oculaires, y compris des victimes, l’identifient formellement comme étant l’auteur de l’infraction ; 3) des traces visibles de l’infraction sont trouvées sur elle, sur ses vêtements, à proximité d’elle ou à son domicile.

37.Une personne qui n’a pas de domicile fixe, dont l’identité n’a pas été établie ou qui a tenté de prendre la fuite peut être placée en garde à vue lorsque d’autres éléments permettent de penser qu’elle a commis une infraction.

38.S’il existe des éléments de preuve suffisants tendant à montrer qu’une personne a commis une infraction, l’agent d’instruction délivre à son égard une ordonnance d’inculpation énonçant les motifs d’une telle inculpation (art. 213 du Code de procédure pénale).

39.L’inculpation est notifiée en présence du défenseur dans un délai maximal de trois jours à compter de la délivrance de l’ordonnance, délai pouvant être dépassé en cas de non-comparution de l’inculpé ou d’absence de son défenseur ; la personne inculpée appelée à comparaître se voit notifier l’inculpation le jour de sa comparution ; l’agent d’instruction, après avoir vérifié l’identité de l’inculpé, porte l’ordonnance à la connaissance de ce dernier et de son défenseur ; l’agent d’instruction est tenu d’expliquer à l’inculpé la teneur de l’inculpation ; une copie de l’ordonnance d’inculpation est remise à l’inculpé ; une copie de l’ordonnance est transmise au procureur (art. 216 du Code de procédure pénale). L’agent d’instruction doit ensuite informer l’intéressé des droits et des obligations des personnes inculpées (art. 217 du Code de procédure pénale).

Paragraphe 3 e)

40.Conformément à l’article 24 de la Constitution et à l’article 110 du Code de procédure pénale, toute personne placée en garde à vue doit, dans les plus brefs délais et en tout état de cause dans les quarante-huit heures suivant son placement en garde à vue, être présentée à un tribunal afin que celui-ci statue sur la légalité de la garde à vue. Toute personne placée en garde à vue doit être immédiatement informée des motifs d’un tel placement ; ses droits, y compris son droit à un examen médical et aux soins d’un médecin, doivent lui être expliqués et garantis.

Paragraphe 3 f)

41.Dans le cadre d’une étroite coopération avec le Service d’État chargé de l’exécution des peines, et avec l’appui financier de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), une base de données recensant les personnes condamnées et visées par des enquêtes (y compris les personnes mineures) a été créée, puis mise en exploitation au moyen du logiciel i2iBase.

42.Du 12 au 23 mai 2015, 26 personnes ont suivi une formation au Centre de formation du Service d’État chargé de l’exécution des peines. Cette formation avait pour thèmes la gestion du registre central (base de données) des personnes placées en garde à vue et en détention provisoire, et l’enregistrement d’informations sur les agents procédant à leur arrestation et à leur remise aux organes chargés de l’application des lois.

Paragraphes 4 a), b), c) et d)

43.En janvier 2018, des panneaux d’affichage comportant des informations en kirghize et en russe sur les droits des personnes retenues ou détenues et les règles leur étant applicables avaient été installés dans tous les lieux de restriction et de privation de liberté du pays.

44.Dans les cas où des personnes privées de liberté ne comprennent pas ou pas suffisamment le kirghize et le russe, les agents des organes chargés de l’application des lois doivent faire intervenir un interprète, ainsi que le prévoit la législation relative aux infractions pénales et à la conduite des procédures administratives.

45.Le 25 décembre 2014, le Ministère de l’intérieur a rendu un arrêté qui a entraîné l’installation, dans chaque cellule des IVS placés sous sa tutelle, de panneaux d’affichage comportant des informations en kirghize et en russe sur les droits des personnes détenues et les règles leur étant applicables.

46.Dès qu’un avocat participe à la procédure, il a le droit de s’entretenir librement et en privé avec son client, que celui-ci soit retenu dans un IVS ou un centre de détention provisoire (SIZO), sans restriction quant au nombre ou à la durée de ces entretiens et sans qu’une autorisation spéciale de l’agent d’instruction ne soit nécessaire (art. 48 du Code de procédure pénale).

47.Il est interdit de s’ingérer dans les activités d’un avocat lorsqu’elles sont exercées conformément à la législation kirghize, ou d’y faire obstacle de quelque manière que ce soit. Les personnes s’ingérant illégalement dans les activités d’un avocat ou faisant obstacle à leur exercice encourent les sanctions prévues par la législation kirghize (art. 29 de la loi sur le barreau et la profession d’avocat).

48.Conformément à l’article 3181 du Code pénal, l’entrave à l’exercice de l’activité professionnelle d’un avocat est passible d’une amende représentant 500 à 1 000 fois l’indice de base, ou d’une peine privative de liberté d’une durée pouvant aller jusqu’à cinq ans assortie d’une interdiction d’exercer certaines fonctions ou activités pendant une période pouvant aller jusqu’à 3 ans.

49.Au cours de la période considérée, aucune personne placée en garde à vue n’a été privée de la possibilité d’exercer ses garanties juridiques fondamentales par des agents d’organes chargés de l’application des lois.

50.Aux fins de l’exécution des obligations internationales dans le domaine des droits de l’homme, le Gouvernement a rendu la décision no 630 du 18 novembre 2013, qui a entraîné la création du Conseil de coordination pour les droits de l’homme. Il s’agit d’un organisme consultatif placé sous la tutelle du Gouvernement qui a pour mandat de perfectionner les mécanismes de garantie des droits de l’homme et des libertés fondamentales, et les mécanismes d’exécution des obligations internationales dans le domaine des droits de l’homme. Il est chargé de coordonner l’activité des organes de l’État en ce qui concerne l’établissement des rapports périodiques nationaux devant être présentés par la République kirghize aux organes conventionnels de l’ONU, et au titre de l’Examen périodique universel du Conseil des droits de l’homme (CDH) de l’ONU, au sujet de la mise en œuvre des accords internationaux relatifs aux droits de l’homme.

51.En 2013, comme suite aux recommandations de J. Méndez, Rapporteur spécial de l’ONU sur la torture, les services du ministère public ont élaboré, à l’initiative du Procureur général, un projet de plan d’action pour la lutte contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants en République kirghize (ci-après le « Plan d’action »). Le Plan d’action été approuvé par la décision gouvernementale no 469-r du 23 octobre 2014 après examen et validation par les organes de l’État et les organisations de la société civile concernés.

52.Le document s’articule autour de trois domaines d’action : perfectionnement de la législation, activités d’information et de sensibilisation, et appui organisationnel et technique. Le premier volet du document devait être mis en œuvre avant le premier trimestre de 2015. Les dispositions restantes devaient être appliquées pendant une durée indéfinie. À l’heure actuelle, le Plan d’action est mis à jour aux fins de l’élaboration d’une stratégie unifiée, et de l’exécution d’un ensemble de mesures visant à éliminer la torture dans le pays.

53.La nouvelle version du Code de procédure pénale a renforcé les garanties fondamentales relatives au droit de ne pas être soumis à la torture au cours de la garde à vue et de l’enquête préliminaire.

54.Afin d’établir une coopération et une coordination actives dans le domaine de la lutte contre la torture et les autres mauvais traitements, un mémorandum de coopération en matière de protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales a été conclu le 18 juin 2012 entre le bureau du Procureur général, le Médiateur (Akyikatchy), le Centre national de prévention de la torture et des autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, le Ministère de l’intérieur, le Ministère de la santé, le Ministère de la justice, le Service d’État chargé de l’exécution des peines, l’OSCE et des ONG menant des activités liées à ce domaine. L’instrument prévoit que les représentants des organismes précités ont le droit d’effectuer, à toute heure du jour et de la nuit et sans préavis, des visites et des contrôles conjoints dans tous les lieux de restriction et de privation de liberté du pays.

55.En 2016, les services du ministère public ont réalisé des contrôles inopinés dans des lieux de restriction et de privation de liberté conjointement avec des représentants du Centre national de prévention de la torture et des autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, et des représentants du bureau du Médiateur (Akyikatchy).

56.Ainsi, pendant l’année en question, les services du ministère public, les représentants du Médiateur (Akyikatchy) et ceux du Centre national de prévention de la torture et des autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ont procédé conjointement à 677 contrôles inopinés dans les lieux de restriction et de privation de liberté du pays, dont 488 dans des lieux de restriction de liberté.

57.À partir des faits constatés au cours des contrôles, les services du ministère public ont établi 25 demandes et 3 injonctions visant à faire cesser des violations de la loi, et ont ouvert une procédure pénale au titre de l’article 3051 (torture) du Code pénal.

58.Après examen des actes établis par le ministère public, des sanctions disciplinaires ont été prononcées contre sept agents des services du Ministère de l’intérieur, parmi lesquels un a été renvoyé et deux ont été démis de leurs fonctions ; un a reçu un blâme et six ont reçu un avertissement.

59.Il convient de noter que le nombre de contrôles inopinés effectués par les services du ministère public était de 3 017 en 2012, 3 332 en 2013, 3 220 en 2014, 4 459 en 2015 et 4 189 en 2016.

60.En 2015, les services du ministère public ont établi quatre actes qui ont abouti, après examen, à l’ouverture de poursuites disciplinaires contre un agent.

Paragraphes 5, 17 (b, c, d, e, f, g et h) et 18 (a, b et c)

61.En 2011, le bureau du Procureur général a élaboré des recommandations méthodologiques intitulées « Conduite d’enquêtes sur les actes de torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants », qui sont appliquées de manière effective.

62.En 2012 et 2014, les services du ministère public ont reçu des consignes concernant le recours aux expertises judiciaires psychologiques et médicales, ainsi qu’une brochure sur l’expertise judiciaire psychologique, dans lesquelles il était prescrit aux procureurs d’ordonner des expertises judiciaires psychologiques, en particulier dans le cadre des procédures pénales liées à des actes de torture et à d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Ces prescriptions ont été communiquées non seulement aux membres du ministère public, mais aussi à tous les organes chargés de l’application des lois dont il surveille les activités.

63.En 2015, le bureau du Procureur général a élaboré un manuel pratique intitulé « Lutte contre la torture et conduite d’enquêtes efficaces ». Dans ce manuel, le rôle et les missions des services du ministère public en ce qui concerne la prévention et la détection de la torture et des mauvais traitements, et les enquêtes qui s’y rapportent, sont examinés à la lumière des dispositions législatives en vigueur régissant l’organisation et l’activité des services du ministère public, des missions dévolues aux procureurs en fonction des différents domaines d’action, et des spécificités de la pratique judiciaire actuelle. Le manuel traite également de la méthode à suivre pour réaliser des contrôles dans ce domaine, des particularités de l’examen des requêtes et des communications faisant état d’actes de torture, et des aspects stratégiques des enquêtes pénales concernant les actes de torture et les autres traitements cruels.

64.Dans ce manuel pratique, une grande attention est portée au contenu du Protocole d’Istanbul, qui fait l’objet d’un chapitre entier. Celui-ci est enrichi d’extraits et d’annexes tirés d’un guide pratique intitulé « Collecte efficace d’informations sur les cas de violence, de torture et d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants », qui est destiné aux professionnels de santé travaillant à tous les échelons du système de santé et dans les autres institutions du pays.

65.En outre, le 21 juillet 2015, le bureau du Procureur général a élaboré et mis en application une directive concernant la mise en œuvre du Protocole d’Istanbul. En application de cette directive, des responsables de services régionaux du ministère public ont organisé, avec des responsables d’établissements publics et privés de santé (établissements de soins hospitaliers et ambulatoires, centres de médecine familiale, unités de soins médicaux et obstétriques, unités de premiers soins, services d’urgence, centres médicaux privés) et des responsables d’organismes d’expertise, des réunions qui ont permis d’instaurer des mécanismes de coopération et de coordination en matière d’échange d’informations sur la torture et les autres mauvais traitements, et de désigner les responsables de ces mécanismes.

66.L’activité des services du ministère public en matière de lutte contre la torture a été actualisée et modernisée de façon significative en 2015, par l’adoption de nouvelles normes méthodologiques et d’un mécanisme plus efficace de lutte contre la torture. De plus, en application du Plan d’action national de lutte contre la torture, le bureau du Procureur général a été doté d’une section spécialement chargée de veiller au respect des droits des citoyens au cours de la phase préparatoire de la procédure pénale, dont les activités portent principalement sur la lutte contre la torture et les autres mauvais traitements. Cette section travaille en étroite coopération avec des institutions nationales et internationales œuvrant dans les domaines de la protection des droits de l’homme et de la lutte contre la torture et les autres mauvais traitements. Pendant la courte période qui s’est écoulée depuis sa création, la section en question a accompli un travail considérable, qui a permis de mettre en évidence un ensemble de problèmes et d’engager une série de procédures pénales à fort retentissement, dont certaines ont donné lieu à l’inculpation d’agents des services du Ministère de l’intérieur. Les affaires pénales visant ces personnes ont été portées devant la justice, et une partie d’entre elles se trouve au stade de l’enquête.

67.Le 20 juillet 2016, aux fins de la détection rapide des actes de torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, le bureau du Procureur général a élaboré une directive écrite à l’intention de tous les procureurs des juridictions inférieures. Selon cette directive, lors de l’examen judiciaire d’une demande de placement en détention provisoire à titre de mesure préventive, le procureur partie à l’instance doit s’assurer que l’inculpé ne porte pas de traces visibles de torture, de sévices ou de lésions corporelles, après l’avoir interrogé oralement au cours de cette audience. S’il constate de tels éléments, le procureur partie à l’instance a pour consigne d’effectuer, en application des articles 151 et 155 du Code de procédure pénale, une déclaration écrite ou orale faisant état d’actes de torture ou d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants commis sur la personne de l’inculpé. Cette déclaration est enregistrée et donne lieu à la réalisation d’une enquête minutieuse.

68.Chaque requête faisant état d’actes de torture et d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants est examinée sans distinction de sexe, d’âge, de race, d’appartenance ethnique et d’orientation, et fait l’objet d’une enquête approfondie. Chaque allégation du requérant est vérifiée et les faits qui y sont rapportés sont étudiés de manière objective. Les expertises médico-légales, psychologiques et psychiatriques nécessaires sont ordonnées conformément aux principes énoncés dans le Protocole d’Istanbul et sont pratiquées, au besoin, de façon collégiale ou pluridisciplinaire.

69.S’il est établi que des actes de torture ou d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ont été commis, une procédure pénale est immédiatement ouverte. L’enquête est confiée à un agent d’instruction expérimenté, et son déroulement fait l’objet d’un suivi particulier. Au cours de l’instruction, des poursuites pénales sont engagées contre tous les agents impliqués dans des actes de torture ou d’autres peines ou mauvais traitements, lesquels agents sont démis de leurs fonctions.

70.Dans les autres cas, l’affaire pénale est classée sans suite. Les décisions de classement sans suite sont liées au caractère latent de la torture et des autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. À cet égard, les victimes saisissent la justice après un long intervalle de temps (dépassement du délai de saisine de l’organe d’enquête compétent), alors que les traces de violence ont déjà commencé de disparaître. Au cours des enquêtes, des requérants se concertent et reviennent sur leurs dépositions au profit des suspects, refusent de se soumettre à des expertises médico-légales et évitent de se présenter devant les organes d’instruction et le procureur, ce qui complique considérablement l’établissement de la culpabilité des auteurs d’actes de violence. Par ailleurs, en cas d’indisponibilité des services chargés de pratiquer les expertises médico-légales, psychologiques et psychiatriques pluridisciplinaires et collégiales ayant été ordonnées, des décisions de classement sans suite à titre provisoire sont obligatoirement adoptées. Une fois les expertises réalisées, ces décisions sont annulées par les procureurs qui dirigent la procédure, afin qu’il soit procédé à un complément d’enquête.

71.Chaque décision de classement sans suite doit, dans un délai de dix jours, être minutieusement examinée par le procureur qui dirige la procédure. À l’issue de cet examen, il se prononce quant au bien-fondé ou à l’absence de bien-fondé de la décision.

72.S’il estime que la décision de classement sans suite est fondée, elle est transmise à une instance supérieure du ministère public, qui dispose également d’un délai de dix jours pour vérifier sa légalité. La décision est ensuite transmise au bureau du Procureur général pour examen.

73.Le 6 septembre 2011, le bureau du Procureur général a élaboré la directive no 70-ou pour exécution par les procureurs de tous les échelons. Dans cette directive, les consignes suivantes étaient données aux instances inférieures du ministère public : transmettre au bureau du Procureur général toutes les décisions de classement sans suite, de suspension ou de non-lieu rendues dans les affaires pénales concernant des actes de torture ou d’autres mauvais traitements, afin qu’il en examine le bien-fondé ; se prononcer sans délai quant à la suspension de poste des personnes inculpées de torture et de traitements cruels, conformément aux dispositions de l’article 118 du Code de procédure pénale ; s’il est établi que les actes en question n’ont pas fait l’objet d’enquêtes efficaces conduites dans les délais impartis, décider s’il y a lieu de prononcer des sanctions disciplinaires strictes contre les responsables des services locaux du ministère public qui sont mis en cause, pour manquement à leurs obligations professionnelles.

74.Le nombre de communications enregistrées faisant état d’actes de torture et d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants était de 371 en 2012, 265 en 2013, 220 en 2014, 478 en 2015 et 435 en 2016 ; il est tombé à 418 en 2017.

75.En 2012, les services du ministère public ont engagé des poursuites pénales pour actes de torture et autres mauvais traitements contre 35 agents des services du Ministère de l’intérieur dans le cadre de 20 affaires pénales, qui ont été portées devant la justice pour examen au fond.

76.Les tribunaux ont été saisis de 11 affaires concernant 21 agents en 2013, 7 affaires concernant 24 agents en 2014, 13 affaires concernant 27 agents en 2015, 11 affaires concernant 22 agents en 2016, et 12 affaires concernant 14 agents en 2017.

77.Toutes les personnes inculpées dans les affaires précitées ont été suspendues de leurs fonctions pendant la durée de l’instruction et de la procédure judiciaire.

78.Après examen de ces affaires pénales par les tribunaux, 15 agents ont été reconnus coupables d’actes de torture. Douze d’entre eux ont été placés en détention et condamnés à des peines privatives de liberté d’une durée allant de 7 à 11 ans. Les jugements rendus à l’égard de trois agents ne prévoyaient pas de peine en raison de l’expiration du délai de prescription de l’action pénale (les faits avaient été commis avant 2012, c’est-à-dire avant le durcissement des peines encourues pour les actes de torture).

79.En 2014-2015, les services du ministère public ont engagé des poursuites pénales pour actes de torture commis sur une personne mineure contre 6 agents des services du Ministère de l’intérieur, dont 2 ont été reconnus coupables et condamnés par un tribunal à dix et onze ans de privation de liberté.

80.À l’heure actuelle, une affaire pénale visant quatre agents des services du Ministère de l’intérieur ayant commis des actes de torture sur une personne mineure est en cours d’examen par un tribunal.

81.Par ailleurs, au cours de la période considérée, les tribunaux ont rendu 51 jugements à l’égard de 62 agents de l’État pour d’autres mauvais traitements (autres que la torture), dont 33 jugements à l’égard de 36 militaires.

82.Au 31 décembre 2017, les tribunaux avaient examiné un total de 43 affaires pénales concernant 95 agents des services du Ministère de l’intérieur, ce nombre comprenant les affaires résolues au cours des années précédentes. Vingt-six de ces affaires avaient été engagées au titre de l’article sur la torture contre 57 agents d’organes chargés de l’application des lois.

83.Sur la demande du ministère public, le placement sous contrôle judiciaire de trois agents des services du Ministère de l’intérieur à titre de mesure préventive a été remplacé par un placement en détention provisoire, et les intéressés ont été conduits en SIZO. Ce jugement a été confirmé par les décisions de tribunaux de toutes les instances. Le tribunal a pris cette décision en se fondant sur le fait, établi par le ministère public, que les policiers prévenus avaient commis des actes de menace et d’intimidation à l’égard de victimes de torture. Entre 2012 et 2016, les services du ministère public ont rendu deux décisions garantissant la protection par l’État des victimes A. Tchonakhounov, A. Ermek et E. Ermek, qui avaient saisi la justice pour avoir subi des menaces et des intimidations répétées.

84.L’action des services du ministère public en matière de lutte contre la torture et les autres mauvais traitements est menée de façon transparente. Pendant la seule année 2016, afin d’assurer la transparence de cette action et de faire connaître la législation, le bureau du Procureur général a fait diffuser 26 éléments d’information dans les médias (chaînes de télévision, stations de radio, journaux, revues et sites Web), et les services régionaux du ministère public en ont fait diffuser 24.

85.Entre 2011 et 2016, des sanctions disciplinaires strictes ont été prononcées à l’égard de 68 agents des services du ministère public pour manquement à leurs obligations professionnelles concernant l’examen des cas de torture et autres mauvais traitements et les enquêtes s’y rapportant.

86.Des réformes constitutionnelles ont été menées en République kirghize. Selon la législation, les enquêtes pénales portant sur les infractions commises par des agents de l’État relèvent de la compétence exclusive des services du Comité d’État à la sécurité nationale. L’infraction visée à l’article 3051 (torture) du Code pénal relève aussi de cette catégorie d’infractions. Les poursuites sont généralement engagées à l’égard d’agents de l’État ayant commis des actes de torture.

87.En conséquence, les enquêtes relatives à cette catégorie d’infractions seront conduites par les seuls agents d’instruction du Comité d’État à la sécurité nationale, ce qui permettra également de réduire au minimum le risque de conflit d’intérêts.

88.Toutes les affaires pénales engagées pour actes de torture, qui étaient instruites par les services du ministère public, ont été confiées aux agents d’instruction du Comité d’État à la sécurité nationale, lesquels ont commencé d’enquêter sur ces affaires. Aucune affaire pénale concernant des actes de torture et d’autres traitements cruels n’a été confiée aux organes d’instruction de la police.

Paragraphe 6

89.Conformément au chapitre 6 de la Constitution et à la loi sur le statut des juges, le pouvoir judiciaire est exercé par la voie de procédures constitutionnelles, civiles, pénales, administratives, et d’autres formes d’administration de la justice.

90.Les juges sont indépendants et sont soumis à la seule Constitution et aux seules lois. Ils jouissent d’un droit d’immunité et ne peuvent pas être placés en garde à vue ou mis en état d’arrestation, ni faire l’objet de perquisitions ou de fouilles corporelles, sauf en cas de flagrant délit. Nul n’est en droit d’exiger d’un juge qu’il rende des comptes au sujet d’une affaire judiciaire ou d’une autre. Il est interdit de s’ingérer dans l’administration de la justice de quelque manière que ce soit.

91.Les juges de la Cour suprême sont élus et restent en fonctions jusqu’à ce qu’ils atteignent une certaine limite d’âge. Les juges des tribunaux locaux sont nommés par le Président de la République kirghize sur proposition du Conseil de sélection des juges, initialement pour une durée de cinq ans, puis jusqu’à ce qu’ils atteignent la limite d’âge.

92.Le Conseil de sélection des juges est composé de juges et de représentants de la société civile.

93.L’organisation et le fonctionnement du Conseil de sélection des juges, ses attributions et les modalités de désignation de ses membres sont fixés par la loi du 13 juin 2011 sur le Conseil de sélection des juges.

94.Les modalités d’ouverture de poursuites disciplinaires à l’égard des juges sont établies par la loi relative à la Commission disciplinaire du Conseil de la magistrature.

Paragraphes 7 a), b) et c)

95.La loi sur le Médiateur (Akyikatchy) [ci-après le « Médiateur (Akyikatchy) »] est en vigueur depuis le 31 juillet 2002 et s’applique uniquement aux rapports naissant entre, d’une part, les citoyens kirghizes, les ressortissants étrangers et les apatrides et, d’autre part, les organes de l’État, les collectivités locales et leurs agents, dans l’exercice des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

96.Le Médiateur (Akyikatchy) exerce sa surveillance aux fins suivantes : protéger les droits de l’homme et les libertés fondamentales énoncés dans la Constitution et les lois kirghizes et dans les traités et accords internationaux ratifiés par la République kirghize ; veiller au respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales des citoyens (des ressortissants étrangers et des apatrides) ; prévenir les atteintes aux droits de l’homme et aux libertés fondamentales ou contribuer à leur rétablissement ; promouvoir la mise en conformité de la législation kirghize relative aux droits de l’homme et aux libertés fondamentales avec la Constitution et les normes internationales applicables en la matière ; permettre l’amélioration et l’intensification de la coopération internationale dans le domaine de la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales ; prévenir toutes les formes de discrimination dans l’exercice des droits de l’homme et des libertés fondamentales ; promouvoir l’éducation juridique du public et protéger les données personnelles confidentielles.

97.Le Médiateur (Akyikatchy) est indépendant de tout organe ou agent de l’État. Il est interdit de s’ingérer dans ses activités et d’exercer sur lui une quelconque forme de pression.

98.En 2012, le statut d’accréditation « B » a été octroyé au Médiateur (Akyikatchy) par le Comité international de coordination des institutions nationales des droits de l’homme, ce qui correspondait à une conformité partielle avec les Principes de Paris. Parallèlement à cela, des recommandations visant l’amélioration de la législation relative aux activités du Médiateur ont été adressées à la République kirghize.

99.Les principaux objectifs de ces recommandations étaient d’accroître l’indépendance du Médiateur (Akyikatchy), de lui permettre de coopérer étroitement avec les organisations de la société civile, de lui donner mandat pour promouvoir la ratification d’accords internationaux, et de lui permettre de faire respecter les normes internationales dans le domaine des droits de l’homme.

100.Aux fins de l’amélioration de la loi en vigueur sur le Médiateur (Akyikatchy), un nouveau projet de loi du même nom a été élaboré. Il définit les modalités d’élection et de révocation du Médiateur (Akyikatchy), son statut juridique, ses attributions et l’organisation de ses activités. Ce projet de loi est en cours d’examen par le Jogorkou Kenech (Parlement).

Paragraphes 8 a), b) et c)

101.En vue de promouvoir l’exécution par la République kirghize des obligations qui lui incombent au titre du Protocole facultatif se rapportant à la Convention, ainsi que d’instaurer un système permettant d’empêcher que des actes de torture et d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants soient commis sur des personnes retenues dans des lieux de privation et de restriction de liberté, une loi sur le Centre national de prévention de la torture et des autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants a été adoptée le 12 juillet 2012.

102.Le Centre national de prévention de la torture et des autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants est pleinement opérationnel depuis mars 2014.

103.Le Centre national de prévention de la torture et des autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants mène ses activités en se fondant sur les principes de légalité, d’indépendance, de transparence, d’impartialité et d’absence de discrimination fondée sur le sexe, la race, la langue, l’appartenance ethnique, l’origine, la religion, l’âge, le handicap, les opinions politiques ou autres, l’éducation, la situation patrimoniale ou autre, ou d’autres considérations.

104.Le Centre national de prévention de la torture et des autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants a pour principaux objectifs d’empêcher que des actes de torture et des mauvais traitements soient commis sur des personnes retenues dans les lieux de privation ou de restriction de liberté, et de contribuer à l’amélioration de leurs conditions de rétention.

105.En 2017, les spécialistes employés par le Centre national de prévention de la torture et des autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants comprenaient 17 juristes, 1 médecin, 5 enseignants et 2 économistes, pour un ratio de 8 femmes pour 15 hommes, et de 20 Kirghizes pour 3 Ouzbeks.

106.Tous les organes de l’État et leurs agents ont été informés et sensibilisés au sujet des activités du Centre national de prévention de la torture et des autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants rapidement après la création de celui-ci. En outre, afin de permettre au Centre de fonctionner efficacement et d’exercer ses attributions, une disposition a été spécialement introduite dans le Code pénal. Il s’agit de l’article 1462, qui érige en infraction le fait d’empêcher de quelque façon que ce soit un membre du Conseil de coordination ou un employé du Centre national de prévention de la torture et des autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants d’exercer ses attributions.

Paragraphes 9 a), b), c), d), e) et f)

107.Les efforts visant à lutter contre la violence familiale ont été intensifiés.

108.Le 27 avril 2017, une loi sur la protection contre la violence familiale a été adoptée. En application de cette loi, un formulaire d’ordonnance de protection a été approuvé par la décision gouvernementale no 642 du 3 octobre 2017, et une instruction sur l’organisation des activités des services du Ministère de l’intérieur dans le domaine de la protection contre la violence familiale a été approuvée par un arrêté (no 970) du Ministère de l’intérieur en date du 14 novembre 2017.

109.Par ailleurs, aux fins de l’application effective des dispositions de cette loi, le Ministère de l’intérieur a pris un arrêté par lequel il a approuvé des formulaires de notifications administratives relatives à la délivrance d’ordonnances de protection, aux auteurs de violences familiales et aux victimes de telles violences. Il a également émis des instructions concernant les modalités d’établissement des notifications administratives statistiques en question.

110.En outre, le Ministère de l’intérieur a créé un groupe chargé de mettre en place, au sein de l’école de ce ministère, un cours spécialisé intitulé « Prévention de la violence sexiste ». Le même ministère a élaboré un manuel méthodologique sur la prévention de la violence sexiste et familiale destiné à être utilisé dans son école, ainsi qu’un programme d’enseignement en vue de la tenue d’une série de séminaires de formation. D’après les résultats enregistrés entre février et avril 2018, une formation a été dispensée à un total de 527 commissaires de police de proximité, inspecteurs de police chargés des affaires relatives aux mineurs, et agents des postes de police de 9 régions du pays.

111.En mai 2018, aux fins de la mise en œuvre de la loi précitée, le Ministère de l’intérieur et l’Association des centres d’accueil d’urgence ont, en collaboration avec le Ministère du travail et du développement social, entrepris des travaux visant la création de comités chargés de la protection contre la violence familiale dans des zones pilotes (district Аlа-Boukinsky et ville de Kerben (région de Djalal-Abad), district Nookatsky et ville de Kara-Souou (région d’Och), district Djeti-Ogouzsky (région d’Issyk-Koul) et district Pervomaïsky de la ville de Bichkek).

112.Entre mai et juin 2018, des ateliers ont été organisés dans les districts pilotes à l’intention des agents des services du Ministère de l’intérieur. Ces ateliers avaient pour objet de faire mieux connaître la loi en question, d’examiner des projets visant à mettre en place des comités chargés de la protection contre la violence familiale, et d’analyser la situation en ce qui concernait les crimes et délits contre les femmes et les actes de violence familiale commis en 2017.

113.En 2015, un site Web du Ministère de l’intérieur (http://gender.mvd.kg) consacré à l’application de la politique d’égalité des sexes a été créé avec l’appui d’un programme de l’ONUDC. Des informations relatives à la lutte contre la violence familiale et à l’application de la politique d’égalité des sexes dans les services du Ministère de l’intérieur sont régulièrement publiées sur ce site.

114.Des informations destinées à prévenir la violence familiale sont publiées sur le site du Ministère de l’intérieur.

115.En mai 2018, des vidéos éducatives visant à prévenir la violence familiale ont été mises en ligne sur le site officiel du Ministère de l’intérieur. Entre mai et juillet 2018, elles ont été diffusées sur la chaîne nationale de télévision à raison de trois fois par semaine. Ces vidéos de sensibilisation étaient intitulées « El tchetinde, Joo betinde » et « Information du public sur les nouveautés introduites par la loi sur la protection contre la violence familiale ».

116.En application d’un plan global de prévention des mauvais traitements et de la violence contre les enfants pour 2015-2017, approuvé par la décision gouvernementale no 125-r du 25 mars 2015, 78 lignes d’assistance téléphonique ont été ouvertes dans l’ensemble des services du Ministère de l’intérieur, afin de permettre au public de signaler des mauvais traitements et des actes de violence commis sur des personnes mineures.

117.En 2018, 51 signalements d’actes de violence commis sur des enfants ont été faits par l’intermédiaire des lignes d’assistance téléphonique. Vingt-huit cas de violence et de mauvais traitements sur des personnes mineures ont été constatés ; 16 procédures pénales ont été ouvertes ; 8 affaires pénales ont été portées devant la justice ; 25 ordonnances provisoires de protection ont été délivrées.

118.Aux fins de la prévention de la délinquance juvénile, 15 971 manifestations ont été tenues en 2017 et pendant les 4 premiers mois de 2018, notamment des séminaires, des tables rondes, des débats, des rencontres et des discussions avec des élèves et leurs parents.

119.Du 22 mai au 8 juin 2018, des missions d’étude ont été menées par le Ministère de l’intérieur dans la ville et la région d’Och et la région d’Issyk-Koul, en collaboration avec le Centre de recherche sur les processus démocratiques, dans la perspective d’élaborer un manuel pratique sur l’accompagnement des victimes de violence sexiste destiné aux agents des unités d’instruction de ce ministère.

120.S’agissant des données statistiques relatives à la violence familiale, le nombre de cas enregistrés à cet égard était de 2 580 en 2012, 2 542 en 2013, 3 126 en 2014, 3 524 en 2015 et 7 053 en 2016.

121.Les cas précités ont entraîné l’ouverture de 183 procédures pénales en 2012. Ce nombre était de 175 en 2013, 243 en 2014, 238 en 2015 et 199 en 2016.

122.Le nombre d’actes administratifs ayant été établis était de 1 163 en 2012, 1 303 en 2013, 1 624 en 2014, 2 381 en 2015 et 4 901 en 2016.

123.Les données statistiques relatives aux différentes formes de violence familiale s’établissent comme suit :

Cas de violence physique : 2 009 en 2012, 2 014 en 2013, 2 408 en 2014, 2 675 en 2015 et 4 846 en 2016 ;

Cas de violence psychique : 566 en 2012, 517 en 2013, 712 en 2014, 840 en 2015 et 2 204 en 2016 ;

Cas de violence sexuelle : 5 en 2012, 11 en 2013, 6 en 2014, 9 en 2015 et 3 en 2016.

124.Le 1er octobre 2012, le Ministère de l’intérieur et le centre d’accueil d’urgence Sezim ont conclu un mémorandum fixant les modalités d’une coopération dans le domaine de la lutte contre le rapt nuptial et la violence familiale.

125.Les 550 centres sociaux de prévention qui ont été mis en place jouent un grand rôle dans la prévention de la violence familiale. Ils rassemblent 10 000 représentants du public et comprennent notamment 574 conseils de femmes, composés de 2 833 membres, ainsi que 570 conseils de la jeunesse, composés de 2 798 membres.

126.En 2016, le Ministère de l’intérieur a procédé au suivi de l’application des articles 154 et 155 du Code pénal, par l’intermédiaire d’un groupe de travail interinstitutions.

127.Le 28 juin 2012, afin de perfectionner la législation relative à la lutte contre la violence familiale, et d’accroître l’efficacité de la protection juridique contre celle-ci, des modifications ont été apportées à l’article 663 du Code des infractions administratives. Ces modifications prévoyaient le placement en garde à vue des auteurs de violence familiale, et leur détention administrative pour une durée pouvant aller jusqu’à cinq jours.

128.Parallèlement à cela, les dispositions des articles 154 et 155 du Code pénal relatives aux peines prévues pour l’imposition d’un mariage de fait à une personne âgée de moins de 17 ans et le rapt d’une personne âgée de moins de 17 ans ont été modifiées et complétées le 25 janvier 2013. Les peines encourues pour l’imposition d’un mariage de fait ont été durcies pour atteindre cinq à dix ans de privation de liberté (art. 154 du Code pénal).

129.Les peines encourues pour le fait de forcer une femme à se marier ou à poursuivre la vie conjugale, ou d’enlever une femme pour l’épouser contre sa volonté, ont également été alourdies. Ce type d’infraction est passible de cinq à sept ans de privation de liberté (art. 155 du Code pénal).

130.Les actes criminels précités sont ainsi passés de la catégorie des infractions de moindre gravité à celle des infractions graves. De ce fait, les procédures pénales sont ouvertes sans que la partie lésée en fasse la demande, la personne inculpée ne peut pas être exemptée de peine en cas de réfutation de l’accusation par la victime, et les procédures pénales ne peuvent pas faire l’objet d’un non-lieu.

131.D’après les données du Ministère de l’intérieur, en 2011, les agents d’instruction des services de ce ministère ont enquêté sur 16 affaires pénales engagées au titre de l’article 154 du Code pénal. Ce nombre était de 16 en 2012, 8 en 2013, 12 en 2014, 5 en 2015 et 6 en 2016.

132.Parmi ces affaires pénales, le nombre de celles qui ont été portées devant la justice était de 9 en 2011, 12 en 2012, 4 en 2013, 6 en 2014, 3 en 2015 et 4 en 2016.

133.En 2011, les agents d’instruction des services du Ministère de l’intérieur ont enquêté sur 32 affaires pénales engagées au titre de l’article 155 du Code pénal. Ce nombre était de 37 en 2012, 32 en 2013, 36 en 2014, 33 en 2015 et 27 en 2016.

134.Parmi ces affaires pénales, le nombre de celles qui ont été portées devant la justice était de 14 en 2011, 17 en 2012, 23 en 2013, 20 en 2014, 23 en 2015 et 15 en 2016.

135.Les services du Ministère de l’intérieur œuvrent à la prévention du rapt nuptial en s’attachant particulièrement à mener des actions en la matière auprès de personnes mineures.

136.Un projet de décision gouvernementale portant approbation d’un plan d’action relatif à la mise en œuvre de la résolution 1325 du Conseil de sécurité de l’ONU, qui concerne le rôle des femmes dans le maintien de la paix et de la sécurité, a été élaboré et se trouve actuellement en phase d’approbation. Ce projet a été mis au point par un groupe de travail interinstitutions créé en application d’un ordre du Cabinet gouvernemental en date du 3 octobre 2017 (no 23-37868), et conformément à un arrêté du Ministère de l’intérieur en date du 7 décembre 2017 (no 1038).

137.Il convient de souligner que ce projet de plan d’action porte sur la période 2018‑2020. Son élaboration a été rendue nécessaire par le dépassement des délais prévus dans le plan d’action précédent, qui avait été approuvé par la décision gouvernementale no 560 du 17 novembre 2015. Un nouveau projet de plan d’action a été élaboré afin d’assurer la continuité de la mise en œuvre de la résolution 1325 du Conseil de sécurité de l’ONU (ci-après le « Conseil de sécurité ») en République kirghize.

Paragraphes 10 а), b), c), d) et e)

138.L’esclavage et la traite des personnes sont interdits en République kirghize (art. 23 de la Constitution).

139.Selon la législation pénale, la traite des personnes s’entend des actes consistant à recruter, transporter, receler, réceptionner, transférer, acheter ou vendre une personne, ou conclure toute autre transaction illégale, avec ou sans le consentement de cette personne, par voie de contrainte, de chantage, d’escroquerie, de tromperie ou de rapt, à des fins d’exploitation ou d’autres profits (art. 124 du Code pénal).

140.La disposition pénale en question est conforme à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, ainsi qu’au protocole y relatif visant à lutter contre la traite des personnes (2000), qui a été ratifié par la loi no 74 du 15 avril 2013.

141.Aux fins de l’adoption de mesures efficaces de lutte contre la traite des personnes, un arrêté du Ministère de l’intérieur en date du 18 août 2017 a entraîné la création, au sein du Service de police judiciaire de ce ministère, d’une section chargée d’organiser la lutte contre l’enlèvement et la traite des personnes.

142.Le Service de police judiciaire du Ministère de l’intérieur a élaboré un manuel (module) de formation sur la lutte contre la traite des personnes à l’intention des agents des organes chargés de l’application des lois.

143.En 2016, un total de 128 agents des services du Ministère de l’intérieur ont suivi une formation intitulée « Cadre organisationnel, juridique et stratégique de la prévention de la traite des personnes et de la lutte contre celle-ci ». Ils étaient 140 en 2017.

144.En 2012, 9 cas de traite des personnes ont été enregistrés ; ce nombre était de 10 en 2013, 19 en 2014, 9 en 2015 et 7 en 2016.

145.Parmi ces affaires, le nombre de celles qui ont été portées devant la justice était de 6 en 2012, 8 en 2013, 18 en 2014, 7 en 2015 et 7 en 2016.

Paragraphes 11 a), b), c), d), e) et f)

146.Entre 2012 et 2016, les autorités compétentes d’États étrangers ont accédé à des demandes d’extradition faites par la République kirghize à l’égard de 368 personnes (99 en 2012, 87 en 2013, 58 en 2014, 49 en 2015 et 75 en 2016). Pendant la même période, la République kirghize a accédé à des demandes d’extradition faites par des États étrangers à l’égard de 77 personnes (11 en 2012, 17 en 2013, 18 en 2014, 20 en 2015 et 11 en 2016). En outre, aucun refus d’extradition n’a été opposé par la République kirghize à des États étrangers, ou réciproquement, au motif d’un recours possible à la torture.

147.L’article 19 de la Constitution dispose que la République kirghize, conformément à ses obligations internationales, accorde l’asile aux ressortissants étrangers et aux apatrides victimes de persécutions politiques ou de violations des droits de l’homme ou des libertés fondamentales.

148.La loi sur les réfugiés, entrée en vigueur le 25 mars 2002, a été modifiée et complétée le 17 mars 2012 afin de mettre les modalités d’octroi du statut de réfugié en conformité avec les normes internationales.

149.Conformément à la loi modifiant et complétant la loi du 17 mars 2012 sur les réfugiés, le deuxième alinéa de son préambule se lit désormais comme suit :

« La République kirghize accorde à tous les réfugiés un statut égal en vertu de la loi, sans aucune distinction fondée sur le sexe, la race, la langue, l’appartenance ethnique, la religion, l’âge, les opinions politiques ou autres, l’éducation, le pays d’origine, la situation patrimoniale ou autre, ou d’autres considérations. ».

150.Dans l’article premier, le libellé « qui a été contrainte de quitter le lieu où elle avait sa résidence habituelle sur le territoire d’un autre pays » a été remplacé par le libellé « qui se trouve hors du pays dont elle a la nationalité ou dans lequel elle avait sa résidence habituelle ».

151.L’alinéa 6 de l’article 2 définit un demandeur du statut de réfugié comme une personne qui n’a pas la nationalité kirghize et qui exprime le souhait d’obtenir le statut de réfugié selon les critères prévus à l’article premier de cette même loi (le terme « réfugié » s’entend d’une personne qui n’a pas la nationalité kirghize et qui sollicite des autorités kirghizes qu’elles lui reconnaissent le statut de réfugié, qui se trouve hors du pays dont elle a la nationalité ou dans lequel elle avait sa résidence habituelle parce qu’elle craint avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de ses opinions politiques ou de son appartenance à un certain groupe social, ou parce qu’elle risque réellement d’être persécutée dans le cadre d’un conflit armé interethnique, et qui ne peut ou ne veut, en raison de cette crainte, solliciter la protection du pays dont elle est ressortissante).

152.L’article 3 a été reformulé comme suit :

« Article 3. Législation relative aux réfugiés. En République kirghize, les questions afférentes aux réfugiés sont régies par la Constitution, la présente loi et d’autres instruments normatifs, par les accords internationaux auxquels la République kirghize est partie et qui sont entrés en vigueur selon les modalités prévues par la loi, ainsi que par les principes et normes universellement reconnus du droit international. Les dispositions des accords internationaux relatifs aux droits de l’homme ont une incidence directe et priment sur celles des autres accords internationaux. ».

153.La formule suivante a été ajoutée à l’alinéa 6 de l’article 4 : « dont la durée est prolongée jusqu’à l’adoption de la décision finale, y compris dans le cadre d’une procédure de recours ».

154.L’alinéa 2 de l’article 11 se lit désormais comme suit :

« Une personne à qui le statut de réfugié est refusé ou retiré ne peut en aucun cas être expulsée vers un pays dans lequel sa vie et sa liberté seraient menacées, ou dans lequel elle risquerait de subir des actes de torture ou des traitements cruels ou inhumains. ».

155.Au cours de la période considérée, c’est-à-dire entre 2012 et 2016, 947 personnes ont demandé à obtenir le statut de réfugié en République kirghize (elles étaient 126 en 2012, 243 en 2013, 212 en 2014, 176 en 2015 et 190 en 2016). Parmi elles, 102 ont obtenu le statut de réfugié (0 en 2012, 12 en 2013, 42 en 2014, 176 en 2015 et 24 en 2016).

156.Le statut de réfugié a été refusé à 515 personnes (23 en 2012, 80 en 2013, 150 en 2014, 126 en 2015 et 136 en 2016).

157.Le statut de réfugié est refusé lorsque les demandes sont injustifiées et ne satisfont pas aux critères d’octroi de ce statut tels qu’ils sont énoncés dans la Convention de l’ONU relative au statut des réfugiés (1951) et dans la loi sur les réfugiés.

158.En 2012, les tribunaux ont été saisis de 61 recours en annulation contre des décisions de refus du statut de réfugié rendues par l’organe compétent. Le nombre de tels recours était de 43 en 2013, 157 en 2014, 179 en 2015 et 175 en 2016. Les tribunaux ont toutefois rejeté la totalité de ces recours.

159.Aucun demandeur d’asile n’a été renvoyé de force dans son pays ou dans un autre pays de manière injustifiée.

Paragraphe 12

160.Aucune demande d’extradition d’individus soupçonnés d’avoir commis des actes de torture n’a été faite par la République kirghize à d’autres États, ou réciproquement.

Paragraphe 13 a)

161.Voir paragraphe 2.

Paragraphes 13 b) et c)

162.Voir paragraphes 5, 17 (b, c, d, e, f, g et h) et 18 (a, b et c).

Paragraphe 14 a)

163.Les bâtiments de la majorité des établissements ont été construits dans les années 1960-1970. Néanmoins, avec l’appui d’organisations donatrices, et dans le cadre du budget du Service d’État chargé de l’exécution des peines, des travaux de réfection sont réalisés chaque année dans tous les établissements relevant de ce service.

164.Chaque année, le Service d’État chargé de l’exécution des peines communique au Ministère des finances, pour inclusion dans le projet de budget, l’état estimatif des dépenses afférentes à l’entretien courant et aux gros travaux de réfection des bâtiments et des installations, au maintien des conditions sanitaires, et à l’achat d’équipements médicaux, d’instruments et de médicaments.

165.En 2015, afin d’améliorer les conditions de salubrité et d’hygiène dans les établissements du système pénitentiaire, les travaux ci-après ont été réalisés dans les établissements nos 2, 3, 8, 10, 21, 31 et 27 du Service d’État chargé de l’exécution des peines : création de zones de promenade ; remise en état de bains à l’usage de condamnés ; achèvement de la construction de sanitaires à l’usage de condamnés purgeant une peine d’emprisonnement à vie ; achèvement de gros travaux de réfection de bâtiments collectifs, de sanitaires, d’une cantine, et de l’enceinte d’un quartier d’isolement disciplinaire.

166.En 2016, dans le cadre du budget, les travaux ci-après ont été réalisés dans les établissements nos 1, 2, 3, 8, 10, 14, 16, 47, 21, 23, 24 et 25 du Service d’État chargé de l’exécution des peines : gros travaux de réfection du réseau d’assainissement ; réfection partielle du système de chauffage ; gros travaux de réfection de la toiture d’une école et d’un bâtiment collectif ; réfection partielle de la toiture d’un service de traitement des maladies infectieuses, d’un bâtiment abritant des services administratifs, du système de chauffage de l’hôpital central, et d’une cantine ; réfection du réseau d’alimentation en eau ; remplacement de câbles électriques ; réfection partielle d’une enceinte principale.

Services de santé

167.Conformément à l’article 31 de la loi sur les modalités et les conditions de détention provisoire des personnes soupçonnées ou inculpées d’infraction, les inculpés et les condamnés sont placés dans les cellules des SIZO en considération de leur personnalité et de leur compatibilité psychologique, dans des cellules collectives ou individuelles. Le placement des personnes malades s’effectue sur avis médical.

168.Les personnes susceptibles d’être atteintes de maladies infectieuses sont placées dans des cellules de quarantaine. La durée de quarantaine est déterminée sur avis médical.

169.La prestation de soins médicaux aux personnes visées par des enquêtes, aux prévenus et aux personnes condamnées à des peines privatives de liberté est assurée par les services médicaux des établissements (unité médicale, centre médico-pénitentiaire, centre de traitement et de prévention) mis en place à cet effet, ou par des organismes nationaux et municipaux de soins.

170.Le volume des prestations de soins médicaux est fixé par un programme de soins médicaux garantis par l’État aux citoyens kirghizes.

171.Les personnes visées par des enquêtes, les prévenus et les condamnés peuvent recevoir des soins curatifs et préventifs complémentaires dans le cadre du programme de soins médicaux garantis par l’État aux citoyens kirghizes, ou à leurs propres frais au-delà d’un certain volume.

172.Les services médicaux en question sont assurés par des spécialistes d’organismes nationaux ou municipaux de soins, dans les mêmes conditions que dans les centres médico‑pénitentiaires ou les centres de traitement et de prévention, qui relèvent du système pénitentiaire.

173.La protection des droits des personnes atteintes de tuberculose et des personnes vivant avec le VIH/sida est garantie conformément à la loi du 18 mai 1998 sur la protection de la population contre la tuberculose et la loi du 13 août 2005 sur le VIH/sida.

174.Dans les établissements du Service d’État chargé de l’exécution des peines, les personnes susceptibles d’être atteintes de tuberculose ont accès à tous les types de soins de santé, dépistages et traitements antituberculeux.

175.L’achat des traitements antituberculeux est financé par le Fonds mondial.

176.Dans le cadre d’un programme de lutte contre la tuberculose, le Service d’État chargé de l’exécution des peines travaille en partenariat avec le Comité international de la Croix-Rouge, le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et le Centre national de lutte contre la tuberculose, qui apportent un appui financier et technique.

177.Les droits des personnes vivant avec le VIH/sida sont protégés par la législation kirghize. Ces personnes ont accès à tous les types de soins de santé, et reçoivent une quantité adéquate d’informations sur le VIH/sida et les moyens de le prévenir. Elles ont la possibilité de participer à des programmes de prévention (projets conduits dans les établissements du Service d’État chargé de l’exécution des peines), mais également de recevoir une assistance juridique, psychologique et sociale.

178.Avec l’appui du Comité international de la Croix-Rouge, les actions ci-après ont été menées aux fins de l’amélioration des services de santé : un nouveau laboratoire pourvu des équipements nécessaires a été créé dans l’établissement no 21 (SIZO no 1) ; une unité médicale a été dotée de matériel médical de pointe ; une action visant le plein accès des personnes atteintes de tuberculose aux traitements médicamenteux a été entreprise, et se poursuit.

179.Il est actuellement procédé à un dépistage massif (prélèvement d’échantillons) de la tuberculose et des maladies somatiques auprès des condamnés de tous les établissements du système pénitentiaire, afin d’évaluer et d’analyser la situation réelle en ce qui concerne la morbidité et la prévalence des maladies infectieuses dans ces établissements, mais aussi en vue de traiter les malades.

Fourniture de produits alimentaires

180.Conformément à la norme établie concernant la ration alimentaire quotidienne, la fourniture de produits alimentaires aux personnes condamnées à une peine privative de liberté, ainsi qu’aux personnes retenues dans les SIZO du système pénitentiaire, est assurée à proportion de 100 %. Le nombre de plats proposés est de 19 dans les établissements pénitentiaires, et de 26 dans les établissements médico-pénitentiaires.

181.Dans les cas où les établissements ne disposaient pas de l’ensemble des produits alimentaires prévus par les normes relatives à la ration alimentaire, ils ont remplacé les produits manquants par d’autres produits équivalents en application de la décision gouvernementale no 42 en date du 8 février 2008.

182.Selon les normes relatives à la ration alimentaire, la nourriture est préparée trois fois par jour, pour les repas suivants : petit-déjeuner, déjeuners (premier et deuxième) et dîner. La préparation et la distribution de la nourriture est contrôlée par l’administration des établissements pénitentiaires conformément au règlement intérieur.

Renseignements sur l’adoption de mesures concernant le surpeuplement dans les SIZO

183.Le 26 juin 2016, le SIZO no 53 a été mis en service dans la ville de Djalal-Abad. Il a été conçu pour accueillir des personnes mineures et des femmes à hauteur de 60 places.

184.L’établissement a été construit conformément aux normes internationales, avec l’appui du Bureau du programme de l’OSCE à Bichkek et du Comité international de la Croix-Rouge.

185.Au total, 14 134 personnes sont actuellement détenues dans les établissements du Service d’État chargé de l’exécution des peines. Au moment de l’établissement du présent rapport, 2 164 personnes étaient retenues dans des SIZO, la limite étant fixée à 2 307 personnes.

Paragraphe 14 b)

186.À l’heure actuelle, une grande partie des condamnés à l’emprisonnement à vie a été transférée dans l’établissement no 19, dans un nouveau bâtiment offrant des conditions de détention conformes aux normes internationales.

187.Les activités menées auprès des condamnés à l’emprisonnement à vie sont régies par une instruction relative aux modalités de détention des condamnés à l’emprisonnement à vie dans les SIZO et les quartiers séparés à régime spécial des établissements pénitentiaires du Service d’État chargé de l’exécution des peines, approuvée le 16 novembre 2011 par une décision de ce service (no 480).

188.Par ailleurs, en vue d’améliorer le cadre juridique applicable dans ce domaine, un projet d’instrument a été élaboré avec l’appui d’un expert du Comité international de la Croix‑Rouge afin de réglementer les conditions de détention des condamnés à l’emprisonnement à vie d’une manière conforme aux normes internationales.

189.Par la décision no 107 en date du 6 mars 2016, le Service d’État chargé de l’exécution des peines a approuvé une instruction relative à l’organisation du travail psychologique auprès des condamnés et des personnes placées en détention provisoire dans les établissements du système pénitentiaire kirghize. Cette instruction met en évidence les particularités du travail auprès des femmes visées par des enquêtes ou condamnées et d’autres groupes vulnérables, y compris des condamnés à l’emprisonnement à vie détenus dans les établissements du Service d’État chargé de l’exécution des peines.

190.Deux règlements intérieurs concernant respectivement la détention des condamnés mineurs et la rétention des personnes mineures dans les SIZO ont été élaborés et se trouvent actuellement en phase d’examen juridique.

191.Il convient de faire observer qu’afin de détecter et réprimer rapidement les violations de la loi, y compris le recours à la torture par les agents des établissements et des organes d’instruction, mais aussi afin de surveiller en permanence les détenus et d’éventuels actes illicites du personnel, des caméras de vidéosurveillance à enregistrement sur disque dur ont été installées dans les quartiers spéciaux des SIZO, à savoir dans les établissements nos 21, 23, 24, 25, 50 et 53, et dans l’établissement no 19, où sont détenus des condamnés à l’emprisonnement à vie.

192.En outre, le système de vidéosurveillance de l’établissement no 21 (SIZO no 1, ville de Bichkek) a été externalisé de façon qu’une surveillance soit assurée 24 heures sur 24 par l’administration centrale du Service d’État chargé de l’exécution des peines.

193.À l’heure actuelle, des négociations et des réunions sont organisées avec des organisations donatrices aux fins du financement de l’achat et de l’installation, dans les autres établissements du Service d’État chargé de l’exécution des peines, des équipements supplémentaires nécessaires.

194.Par ailleurs, il faut souligner qu’en application d’une décision gouvernementale du 14 juin 2016, l’établissement pénitentiaire semi-ouvert no 29, qui était situé dans le district Kara-Bouourinsky (région de Talas), a été fermé.

195.L’entretien du système pénitentiaire est partiellement financé par le budget de l’État. Au cours de la période considérée, ce financement a couvert entre 31,3 % et 40 % des besoins.

196.Chaque année, 6 800 000 soms sont alloués à l’achat de médicaments, ce qui représente 14 % du total des besoins annuels. Les conditions de salubrité des établissements du Service d’État chargé de l’exécution des peines font l’objet de contrôles annuels programmés, qui sont effectués sur place par des agents de la direction des affaires médicales de ce service. En tout, entre 2012 et 2016, 39 injonctions ont été établies (12 en 2012, 5 en 2013, 7 en 2014, 9 en 2015 et 6 en 2016).

197.Afin de détecter la tuberculose à un stade précoce et d’en prévenir la propagation, un dépistage est effectué selon des méthodes actives et passives dans tous les établissements du Service d’État chargé de l’exécution des peines. Dans les établissements nos 21 et 31, le diagnostic de la tuberculose s’effectue rapidement, par la réalisation de tests d’échantillons d’expectorations sur un appareil Xpert MTB/RIF. Des examens radiographiques et fluorographiques sont également pratiqués chaque année. Entre 2012 et 2016, un total de 36 370 examens ont été réalisés, et 758 cas de tuberculose ont été recensés.

Paragraphe 15 a)

198.Selon des données du Service d’État chargé de l’exécution des peines, 132 cas de décès de personnes retenues dans les établissements de ce service ont été enregistrés entre 2012 et 2016 (27 en 2012, 21 en 2013, 27 en 2014, 30 en 2015 et 27 en 2016). Parmi ces personnes, 112 étaient inscrites sur le registre des personnes malades de l’établissement no 47 de ce service (hôpital central). Dans tous les autres cas, sauf en ce qui concerne trois personnes (T. Joumanov, M. Joumaliev et B. Kenjegoulov), les affaires ont été légitimement classées sans suite.

199.T. Joumanov, M. Joumaliev et B. Kenjegoulov, qui étaient placés en détention provisoire et qui s’étaient évadés en tuant un agent du SIZO no 50, sont décédés les 20 et 21 octobre 2015 dans l’établissement no 21 (SIZO no 1) du Service d’État chargé de l’exécution des peines, après avoir été arrêtés.

200.En conséquence, le 2 décembre 2015, le service du ministère public chargé de veiller au respect des lois dans les organes et les établissements du système pénitentiaire a ouvert une procédure pénale (no 183-15-238) au titre de l’alinéa 4 de l’article 104 (atteinte grave et intentionnelle à la santé d’autrui) du Code pénal.

201.Cependant, l’instruction a été suspendue pour non-identification de l’auteur présumé de l’infraction.

202.Par ailleurs, cinq cas de décès ont été enregistrés dans les lieux de privation de liberté des services du Ministère de l’intérieur, dont trois dans un IVS (Т. Bekbatyrov, S. Sapojnikov et J. Mourzakarimov) et deux dans une cellule d’internement administratif (N. Toktakounov et А. Seïtkaziev). Un cas de décès dans la salle d’un tribunal destinée aux prévenus (N. Koubanytchbekov) a également été enregistré.

203.Parmi les six cas de décès précités, trois (Т. Bekbatyrov, N. Toktakounov et А. Seïtkaziev) ont donné lieu à l’ouverture d’une procédure pénale. La procédure concernant le décès de N. Toktakounov a été engagée au titre de l’article 119 (manquement du personnel médical à ses obligations professionnelles) du Code pénal contre R. Alakhounova, assistante médicale dans un centre de médecine familiale du district At‑Bachinsky (région de Naryne) ; la procédure concernant le décès d’А. Seïtkaziev a été engagée au titre des articles 304 (abus d’autorité), 102 (faits menant au suicide) et 3131 (acceptation de pots-de-vin) du Code pénal contre N. Bektoursounov, E. Issakov et S. Assygaliev, agents du service du Ministère de l’intérieur du district Djoumgalsky (région de Naryne).

204.La procédure pénale engagée contre R. Alakhounova a fait l’objet d’un non-lieu au titre de l’article 66 (exonération de la responsabilité pénale en cas d’entente avec la victime) du Code pénal ; celle concernant le décès de T. Bekbatyrov a également fait l’objet d’un non-lieu pour absence de fait constitutif d’infraction ; celle visant N. Bektoursounov, E. Issakov et S. Assygaliev est en instance devant le tribunal municipal de Naryne.

Paragraphe 15 b)

205.Le 24 juin 2013, une loi relative à l’expertise judiciaire a été adoptée. Elle fixe le cadre juridique, les modalités d’organisation et les principaux objectifs des activités d’expertise judiciaire, et régit les rapports juridiques naissant de l’exercice de ces activités.

206.Aux termes des articles 12, 13 et 24 de la loi précitée, les expertises portent sur les éléments ci-après : preuves matérielles ; documents ; objets ; cadavres ou parties de cadavres ; animaux ; échantillons d’analyse comparative ; systèmes ; technologies ; ensembles de données ; éléments du dossier dans le cadre duquel l’expertise judiciaire est effectuée.

207.Les organismes d’expertise judiciaire peuvent être publics ou privés. Les organismes d’expertise judiciaire publics sont des établissements spécialisés (entités des organes chargés de l’application des lois) qui sont placés sous l’autorité des organes compétents de l’État. Ils ont pour mission d’organiser et réaliser des expertises judiciaires afin que les tribunaux, les organes d’enquête, les agents d’instruction et les procureurs puissent exercer leurs attributions.

208.La qualité d’organisme d’expertise judiciaire privé est reconnue aux organismes ayant l’expertise judiciaire pour activité principale. Le personnel des organismes d’expertise judiciaire doit se composer d’experts qui y exercent à titre d’emploi principal et dont le niveau de qualification est attesté par un certificat de compétence délivré selon les modalités établies.

209.Les organismes d’expertise judiciaire publics et privés de même spécialité mènent leurs activités d’organisation et de réalisation d’expertises judiciaires en se fondant sur une démarche scientifique et méthodologique commune en ce qui concerne la pratique des expertises, la formation professionnelle et la spécialisation des experts.

Paragraphe 15 c)

B. Akounov

210.Le 14 avril 2007, K. Mambetov, directeur du lycée no 87 de la ville de Naryne et B. Mambetaliev, agent de la section des affaires intérieures de la ville, étaient de garde à la mairie de Naryne. Le même jour, vers 19 h 30, B. Akounov, habitant de la localité d’Orto‑Nour (district Narynsky), est entré dans la salle d’accueil de la mairie de Naryne alors qu’il se trouvait en état d’ébriété et, tout en injuriant les agents de garde, leur a demandé d’appeler le maire de la ville et le gouverneur de la région de Naryne. B. Akounov n’a pas réagi lorsque les agents de garde lui ont intimé de cesser ses actes de vandalisme. Les agents de garde ont donc appelé la police, sur quoi l’intéressé est sorti de la mairie et s’est éloigné dans une direction inconnue.

211.K. Mambetov et B. Mambetaliev ont écrit au chef de la section des affaires intérieures de la ville de Naryne pour demander que des mesures soient prises à l’égard des actes illicites de B. Akounov. Le même jour, aux alentours de 22 h 00, B. Akounov a été arrêté par S. Kourmanakounov, adjoint au chef de la section des affaires intérieures de la ville. Il a ensuite été transféré au poste de police où, vers 22 h 45, un spécialiste de l’addictologie a procédé à un examen médical et constaté l’état d’ébriété, ce qui a été consigné dans le rapport médical no 507.

212.Par la suite, B. Akounov est sorti en courant du bâtiment de la section des affaires intérieures et, sur la voie publique, a commencé d’opposer une résistance active. A. Karybaï, B. Kylytchbek, O. Ryskoulbekov et O. Аssanaliev, agents de ladite section, l’ont alors conduit par la force dans une cellule d’internement administratif, en application des articles 12 et 13 de la loi sur les services du Ministère de l’intérieur. L’agent de la section O. Аssanaliev a établi un procès-verbal faisant état de la commission d’une infraction administrative visée à l’article 364 du Code des infractions administratives.

213.Le jour suivant, à savoir le 15 avril 2007, vers 12 h 30, le bureau du procureur de la ville de Naryne a reçu une communication dans laquelle il était indiqué que B. Akounov s’était pendu avec sa chemise dans sa cellule d’internement administratif.

214.Le 16 avril 2007, le bureau du procureur de la ville de Naryne s’est saisi de cette affaire et a ouvert une procédure pénale au titre de l’alinéa 2 de l’article 316 (négligence) du Code pénal. Selon un rapport d’expertise médico-légale collégiale en date du 5 juillet 2007, B. Akounov était décédé d’une compression de son cou par une corde. Les éléments ci-après ont également été constatés sur le corps de B. Akounov : des éraflures au niveau du front, de la cage thoracique, du dos et des membres supérieurs et inférieurs ; des ecchymoses à l’épaule, à l’avant-bras et au coude gauche ; une hémorragie modérée au niveau des tissus mous de la région pariétale droite du cuir chevelu ; une hémorragie localisée au niveau des tissus cérébraux ; une hémorragie mineure au niveau du cervelet ; une légère déchirure de la surface du foie.

215.Au cours de l’instruction, le 19 avril 2007, B. Kojomberdiev et B. Jounouchbaev, policiers adjoints à la section des affaires intérieures, ont été arrêtés et placés dans un IVS pour avoir commis des manquements à leurs obligations professionnelles ayant entraîné le décès de B. Akounov. Le 21 avril 2007, ils se sont vu notifier leur inculpation au titre de l’alinéa 2 de l’article 316 du Code pénal, et une caution personnelle a été ordonnée en tant que mesure préventive.

216.L’instruction de cette affaire a été menée dans le strict respect des principes d’objectivité et d’exhaustivité. Il a été procédé à tous les actes d’instruction nécessaires, ainsi qu’à toutes les expertises judiciaires graphologiques, criminologiques et médicales correspondantes. Environ 50 témoins ont été entendus.

217.L’instruction a permis d’établir que B. Akounov était décédé d’une compression de son cou par une corde (pendaison), et que les lésions corporelles précitées avaient été causées par la force dont il avait été fait usage au moment où l’intéressé avait opposé une résistance active aux ordres légitimes des agents de la section des affaires intérieures de la ville de Naryne, et par des convulsions intervenues lors d’une asphyxie mécanique.

218.Le 15 février 2008, l’instruction a été achevée et l’affaire pénale a été portée à l’examen du tribunal municipal de Naryne. Par un jugement de ce tribunal en date du 4 avril 2008, B. Kojomberdiev a été reconnu coupable et condamné à un an de privation de liberté avec sursis, et B. Jounouchbaev a été mis hors de cause pour absence de fait constitutif d’infraction. Ce jugement a été confirmé le 7 mai 2008 par une décision du tribunal du district Narynsky, et le 2 septembre 2008 par un arrêt de la Cour suprême de la République kirghize.

219.Le 10 juin 2010, comme suite à une requête formulée par K. Djaïloev, avocat, et O. Akounov, représentant de la victime, au sujet des lésions corporelles infligées à B. Akounov, le bureau du Procureur général de la République a ouvert une procédure de reprise d’instance pour découverte de nouveaux éléments. Le 17 juillet 2010, à l’issue de vérifications, le bureau du procureur de la région de Naryne a rendu une décision de reprise d’instance qui a été portée à l’examen de la Cour suprême. Par un arrêt du 7 octobre 2010, la Cour suprême a rejeté ladite décision de reprise d’instance pour découverte de nouveaux éléments.

Paragraphe 15 d)

220.En ce qui concerne les personnes ayant demandé à obtenir le statut de réfugié en République kirghize, voir paragraphes 11 a), b), c), d), e) et f).

221.S’agissant de la communication no 1756/2008 du Comité de l’ONU, des renseignements sont fournis ci-dessous.

222.Conformément au chapitre 46 du Code de procédure pénale, l’État répare intégralement le préjudice causé par les mesures suivantes, si elles sont illégales : garde à vue, détention provisoire, assignation à résidence, destitution de fonctions, placement en établissement médical, condamnation et mesures coercitives à caractère médical, et cela quelle que soit la responsabilité de l’organe d’enquête, de l’agent d’instruction, du procureur et du tribunal.

223.En cas de décès de la personne, le droit à réparation du préjudice est transféré à ses héritiers selon les modalités établies par la loi. Si la personne recevait des pensions et des allocations dont le paiement a été suspendu, celles-ci sont reversées aux membres de sa famille appartenant à la catégorie des bénéficiaires de la pension pour perte du soutien de famille.

224.La réparation du préjudice matériel porte sur les éléments ci-après : salaires, pensions, allocations et autres revenus dont la personne a été privée du fait d’actes illégaux ; biens que l’État a confisqués ou s’est appropriés de façon illégale en application d’un jugement ou d’une décision judiciaire ; amendes et frais de justice payés en application d’un jugement illégal ; frais d’assistance juridique et autres. Les demandes en réparation du préjudice matériel sont tranchées par un tribunal.

225.Afin de donner suite aux constatations formulées par le Comité des droits de l’homme au sujet de l’affaire Djoumabaeva c. République kirghize, dans lesquelles il était indiqué qu’il n’avait pas été enquêté de façon efficace sur le décès de T. Moïdounov, survenu par suite d’actes illicites commis par des agents de la section des affaires intérieures du district Bazar‑Korgonsky, des tribunaux du pays ont ordonné à l’État de verser 200 000 soms à la sœur de Moïdounov, à titre de réparation du préjudice moral.

Paragraphe 16 a)

226.À l’heure actuelle, il n’existe pas de cellules souterraines destinées à la détention des condamnés ou des prévenus dans les établissements du Service d’État chargé de l’exécution des peines.

Paragraphe 16 b)

227.Les établissements du Service d’État chargé de l’exécution des peines comprennent une seule colonie de rééducation, l’établissement no 14 pour condamnés mineurs de sexe masculin, qui est située dans la localité de Voznessenovka (district Panfilоvsky). Cette colonie est dotée d’un SIZO pour prévenus mineurs et pour femmes.

228.Les mesures ci-dessous ont été prises afin d’améliorer les conditions de vie dans la colonie de rééducation et dans l’école de réadaptation sociale pour condamnés mineurs :

Des fenêtres en matière plastique ont été posées dans les locaux d’habitation et les salles de classe. Les sols ont été remplacés et des travaux de plâtrerie et de peinture ont été réalisés dans les pièces d’habitation ;

L’infrastructure matérielle et technique a été améliorée, et les équipements suivants ont été achetés et mis à la disposition des mineurs : mobilier, téléviseur, lecteur DVD, lave-linge, radiateurs, appareil de cuisson électrique, rideaux, ustensiles de cuisine et linge de lit ;

Dans le cadre de programmes individuels de réadaptation des mineurs, qui sont en train d’être mis en place, 10 ordinateurs ont été achetés et installés dans le centre de réadaptation de la colonie de rééducation. Vingt-deux détenus de la colonie suivent des cours d’informatique ;

Un projet social de micro-boulangerie visant à initier les détenus de la colonie à la boulangerie et à la pâtisserie a été lancé. Afin d’optimiser les activités de la colonie, la boulangerie a été déplacée dans une zone industrielle. Un mini-four à étages polyvalent a été acheté pour cuire le pain.

229.Le bâtiment a été remis en état et pourvu des équipements nécessaires.

Le projet s’étant achevé, les activités de boulangerie et de pâtisserie sont actuellement suspendues.

Une salle de classe a été créée dans le SIZO de la colonie de rééducation pour permettre aux détenus de suivre un enseignement secondaire général, conformément à une instruction relative à l’organisation de l’enseignement donnée le 24 février 2016 par l’établissement. Quatre pièces sont équipées pour servir de salle de classe. Des enseignants y dispensent des cours (de 45 minutes) dans les 12 disciplines suivantes : algèbre, géométrie, langue kirghize, littérature kirghize, biologie, histoire du Kirghizistan, langue russe, littérature russe, chimie, géographie, histoire mondiale et physique.

Un centre d’adaptation baptisé « Na polpouti domoï » (À mi-chemin de la maison) a été créé à l’intention des mineurs sans domicile fixe purgeant une peine privative de liberté, et des membres de leur famille souhaitant les accueillir.

Des livrets de poche sur l’auto-assistance ont été publiés et distribués aux condamnés mineurs, et un manuel méthodologique sur le travail pédagogique, psychologique et éducatif auprès des condamnés mineurs a été publié et distribué aux mineurs en instance de libération. Tous les détenus ont bénéficié de services consultatifs et d’une assistance sociale et juridique.

Dans le cadre d’un programme intitulé « École de préparation à la libération », et avec le concours de représentants du Comité international de la Croix-Rouge, des cours, des conférences et des activités à caractère social sont organisés auprès des condamnés mineurs pendant la période de préparation à la libération conditionnelle anticipée.

Des points d’information juridique et des panneaux d’affichage d’informations sur les droits des enfants ont été installés dans les quartiers où vivent les condamnés mineurs. Ces supports visuels ont été produits avec l’appui du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) et de la fondation caritative Pokolenie Insan (Génération Insan).

La colonie comprend un centre de rééducation, qui consiste en une salle de psychothérapie pourvue des équipements nécessaires (pupitres, chaises, canapés et fauteuils, ordinateur, téléviseur, magnétoscope). Des activités à caractère éducatif, social et psychologique y sont menées auprès des détenus : conférences, jeux de questions-réponses, tests, projection de films documentaires pédagogiques, discussions individuelles et collectives sur divers sujets, lecture de livres, dessin, karaoké, jeux (dames, échecs).

La colonie collabore avec les collectivités locales et des associations dans le cadre d’un programme d’aide à l’adaptation et à la réinsertion sociales des condamnés mineurs, qui a été élaboré de façon conjointe.

230.Un groupe de travail est composé de représentants des entités suivantes : direction des affaires sociales et section chargée de la protection des droits des enfants auprès du Ministère du travail et du développement social ; section de district chargée des affaires éducatives auprès du Ministère de l’éducation et des sciences ; Commission pour l’enfance auprès de l’aïylny aïmak (subdivision rurale) du district Panfilovsky ; section de l’inspection pénitentiaire du Service d’État chargé de l’exécution des peines du district Panfilovsky. Les membres du groupe de travail comprennent également le médecin-chef de l’hôpital du district Panfilovsky et l’adjoint au chef de la section des affaires intérieures de ce district.

231.Conformément à une instruction sur le travail social destiné à préparer les condamnés à leur libération des établissements du système pénitentiaire, qui a été approuvée par une décision du Service d’État chargé de l’exécution des peines en date du 10 janvier 2013 (no 8), aux fins de l’adoption de mesures nécessaires à la réinsertion sociale des détenus mineurs, la libération de ces derniers est notifiée six mois à l’avance aux collectivités locales, aux services du Ministère de l’intérieur et aux agences d’emploi de leur lieu de résidence.

Paragraphe 16 c)

232.Aucune pratique consistant à menotter les détenus à titre de punition n’a cours dans les lieux de restriction et de privation de liberté relevant du Service d’État chargé de l’exécution des peines, du Ministère de l’intérieur et du Comité d’État à la sécurité nationale.

Paragraphe 16 d)

233.L’hôpital central de l’établissement no 47 du Service d’État chargé de l’exécution des peines abrite un service de psychiatrie où travaillent deux médecins psychiatres qualifiés. En cas de nécessité, il est fait appel à des médecins psychiatres du Centre national de santé mentale, qui est placé sous l’autorité du Ministère de la santé.

Paragraphes 16 e) et f)

234.Conformément aux articles 20 et 22 de la Constitution, il est interdit de soumettre une personne à une expérience psychologique sans son libre consentement dûment exprimé et établi.

235.Le 17 juin 1999, une loi sur les soins psychiatriques et les garanties relatives aux droits des citoyens recevant ces soins a été adoptée. Elle a été modifiée et complétée le 20 mars 2002, les 15 juillet et 18 décembre 2003, les 8 juin et 4 juillet 2005, le 6 juillet 2016 et le 20 février 2017.

236.La loi en question s’applique aux citoyens kirghizes recevant des soins psychiatriques, ainsi qu’à tous les établissements et soignants prodiguant de tels soins sur le territoire kirghize.

237.Dans le cadre d’une prise en charge psychiatrique, les ressortissants étrangers et les apatrides se trouvant sur le territoire kirghize jouissent de l’ensemble des droits énoncés dans cette loi, au même titre que les citoyens kirghizes.

238.Les soins psychiatriques sont prodigués sur la demande de l’intéressé ou avec son consentement, sauf dans les cas prévus par la loi précitée.

239.Les mineurs de moins de 18 ans, de même que les personnes reconnues incapables selon les modalités établies par la loi, peuvent recevoir des soins psychiatriques sur la demande de leur représentant légal, ou avec l’accord de celui-ci, selon les modalités fixées par la loi.

240.Les personnes souffrant de troubles mentaux jouissent de l’ensemble des droits et libertés garantis aux citoyens par la Constitution. La restriction de ces droits et libertés au motif d’un trouble mental est autorisée dans les seuls cas prévus par la législation.

Paragraphe 17 a)

241.La coparticipation intentionnelle de deux personnes ou plus à la commission d’une infraction constitue une complicité d’infraction. Sont considérés comme complices d’une infraction l’exécutant, ainsi que l’organisateur, l’instigateur et le facilitateur de l’infraction.

242.Est considérée comme exécutant la personne ayant directement commis l’infraction ou y ayant directement participé avec le concours de tiers, ainsi que la personne ayant commis l’infraction par l’intermédiaire d’un tiers reconnu pénalement irresponsable en vertu de la loi.

243.Est considérée comme organisateur la personne ayant organisé la commission de l’infraction ou dirigé son exécution, de même que la personne ayant fondé une association de malfaiteurs ou une organisation criminelle, ou la personne dirigeant une telle association ou organisation.

244.Est considérée comme instigateur la personne ayant incité à la commission de l’infraction.

245.Est considérée comme facilitateur la personne qui participe à la commission de l’infraction en fournissant des conseils, des indications, des renseignements, des biens ou des fonds ou en levant certains obstacles, ainsi que la personne ayant promis d’avance de cacher l’auteur de l’infraction ou de dissimuler les armes ou les autres moyens utilisés pour commettre l’infraction, les traces de l’infraction ou les objets acquis de façon frauduleuse, et la personne ayant promis d’avance d’acquérir ou d’écouler de tels objets.

246.L’organisateur, l’instigateur et le facilitateur tombent sous le coup du même article de la Section spéciale du Code pénal que l’exécutant.

247.Les dispositions de l’article 3051 du Code pénal définissent les éléments constitutifs de la complicité dans la commission d’actes de torture par un exécutant et par d’autres complices à son instigation ou avec son consentement exprès ou tacite.

Paragraphes 17 b), c), d), e), f), g) et h)

248.Voir paragraphes 5, 17 (b, c, d, e, f, g et h) et 18 (a, b et c).

Paragraphes 18 a), b) et c)

249.En collaboration avec des organisations internationales non gouvernementales et la société civile, et conformément au Protocole d’Istanbul, le Ministère de la santé a élaboré un guide pratique relatif à la collecte d’informations sur toutes les formes de violence, de torture et de traitements cruels et inhumains. Ce manuel a été approuvé par un arrêté dudit ministère en date du 9 décembre 2014.

250.Le manuel énonce les objectifs ci-après : collecte d’informations médicales appropriées et exhaustives ; enregistrement des cas de violence, de torture et de mauvais traitement ; orientation des victimes vers des organismes à même de leur offrir une prise en charge pluridisciplinaire ; information des victimes ; recensement et enregistrement officiels des cas dans un délai de vingt-quatre heures suivant leur découverte ; amélioration de la qualité des expertises judiciaires médicales et psychiatriques ; adaptation de la méthode aux personnes appartenant à des groupes vulnérables.

251.Le guide s’adresse au personnel médical intervenant dans le domaine des soins médicaux aux victimes de violence, de torture et d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, y compris au personnel médical des organes chargés de l’application des lois, des lieux de privation et de restriction de liberté et d’autres entités gouvernementales et non gouvernementales.

252.Afin d’assurer la pleine application du guide, le Ministère de la santé a approuvé des plans d’action pour 2015 et 2016 les 19 février 2015 et 25 mars 2016. Ces plans prévoient, en des termes précis, l’adoption de mesures aux fins suivantes : faire connaître le guide du Ministère de la santé aux responsables de tous les échelons des institutions, organes chargés de l’application des lois et services répressifs, que cela soit au niveau de l’administration centrale, des régions ou des districts ; former les spécialistes médicaux et non médicaux des institutions aux normes concernant la collecte efficace d’informations ; diffuser, à partir de l’administration centrale, des documents normalisés de collecte d’informations médicales (comptes rendus, formulaires, directives, fiches d’information et certificats) ; établir une coopération interinstitutions et veiller à l’application effective du guide.

253.L’exécution des plans d’action du Ministère de la santé donne des résultats satisfaisants. Le guide est actuellement mis en œuvre de façon volontariste ; des formulaires de notification statistique, d’examen médical, d’expertise judiciaire médicale, psychologique et psychiatrique ont été approuvés ; des séances d’information et de formation sont régulièrement organisées à l’intention des procureurs, des juges, des membres des forces armées, des agents des sections des affaires intérieures de la ville de Bichkek et de la région d’Issyk-Koul, des avocats, du personnel des centres d’accueil d’urgence, ou encore des journalistes.

254.Dans les locaux du Centre national d’expertise médico-légale et du Centre national de santé mentale, des cabinets spécialement conçus pour les expertises médico-légales ont été entièrement équipés de manière que la confidentialité soit assurée, c’est-à-dire que l’examen médical soit effectué en la seule présence de la personne examinée (paroi translucide, équipements médicaux et mobilier).

255.Tous les centres d’expertise médico-légale des régions et de Bichkek ont été équipés de matériel photographique, de règles chromatiques, de matériel didactique, de projecteurs, d’imprimantes couleur, de fournitures de bureau et d’autres équipements destinés à l’enseignement.

256.En collaboration avec l’organisation internationale Physicians for Human Rights (Médecins pour les droits de l’homme) et le centre de rééducation Empatiya (Empathie), une formation interrégionale a été organisée en Géorgie à l’intention des personnes chargées de former les experts nationaux au Protocole d’Istanbul.

257.Afin que le guide soit appliqué au niveau institutionnel, un programme de formation et des manuels didactiques concernant la collecte d’informations médicales sur les cas de violence, de torture et de mauvais traitement ont été élaborés à l’intention des enseignants de l’Institut médical national de perfectionnement et de formation continue. Il est également prévu de mettre à disposition des projecteurs et des ordinateurs portables. Avec le concours d’ONG membres de la coalition contre la torture, des travaux ont été organisés au sein de cet institut sur le thème de la formation régulière des enseignants et des spécialistes médicaux à la collecte d’informations selon le guide pratique.

258.Un manuel méthodologique sur la formulation des questions pendant les expertises judiciaires médicales et psychiatriques ordonnées dans les affaires pénales a été mis au point en collaboration avec des experts du Centre national d’expertise médico-légale et du Centre national de santé mentale. Quatre vidéos sur la lutte contre la torture ont été produites et diffusées sur des chaînes de la télévision centrale. Des modules de formation intitulés « Collecte d’informations médicales sur les cas de violence et de torture » et des programmes d’activités et de cours sur le Protocole d’Istanbul ont été élaborés et mis en place dans des établissements d’enseignement médical supérieur et secondaire.

259.Cela étant, il est à noter que la pleine application des principes énoncés dans le Protocole d’Istanbul se heurte à un certain nombre de problèmes. Les questions à l’examen concernent le financement du coût total, la formation du personnel, les ressources nécessaires au maintien des capacités des experts pratiquant les expertises médico-légales pluridisciplinaires et collégiales, et la coopération interinstitutions.

260.Il ressort de la pratique que seuls les spécialistes médicaux du Ministère de la santé exerçant dans les régions du centre du pays et, dans quelques cas, les spécialistes d’ONG, se conforment au manuel précité lorsqu’ils examinent des victimes de torture et de mauvais traitements. Les autres spécialistes médicaux (professionnels de santé, experts exerçant dans des régions éloignées, spécialistes du Comité d’État à la sécurité nationale, du Service d’État chargé de l’exécution des peines, du Ministère de l’intérieur et du Comité d’État à la défense, médecins du secteur privé) n’utilisent malheureusement pas ce manuel, du fait qu’ils n’y sont pas obligés.

261.En conséquence, afin de résoudre ce problème, le Conseil de coordination pour les droits de l’homme a approuvé, par une décision du 22 décembre 2016, la composition d’un groupe de travail interinstitutions chargé de la mise en œuvre du Protocole d’Istanbul.

262.Par la suite, le 22 mars 2017, le groupe de travail interinstitutions a recommandé au Conseil de coordination pour les droits de l’homme auprès du Gouvernement que le Ministère de la justice procède à l’examen juridique du guide du Ministère de la santé, et que ce guide soit approuvé par une décision gouvernementale afin d’être mis en œuvre à tous les niveaux du système de santé, toutes formes juridiques et tous régimes de propriété confondus. Cette proposition du groupe de travail a été approuvée par le Conseil de coordination pour les droits de l’homme et est en cours de réalisation.

263.Le 3 octobre 2016, le Ministère de la santé a donné pour instruction aux coordonnateurs de santé des régions de signaler sans délai aux organes chargés de l’application des lois tous les cas de violence psychologique et physique, de menace, de pression, de persécution et de coups à l’égard de membres du personnel médical, y compris les actes commis par des agents d’organes chargés de l’application des lois.

264.Il convient d’indiquer qu’une conférence internationale sur la mise en œuvre des principes et normes énoncés dans le Protocole d’Istanbul s’est tenue les 21 et 22 septembre 2016 sous l’égide du Gouvernement. Elle a réuni des représentants et experts de l’ONU, de l’OSCE et d’environ 25 pays étrangers, des représentants d’organisations internationales œuvrant dans le domaine de la santé, et des rédacteurs du Protocole d’Istanbul. Le bureau du Procureur général a contribué à l’organisation de cette manifestation, qui a donné lieu à l’établissement de rapports par les responsables de différentes entités. La conférence a servi de cadre à des échanges de données d’expérience, à des discussions sur les problèmes existants et les moyens d’y remédier, et à l’adoption de recommandations et résolutions en rapport avec ces questions.

Paragraphe 19 a)

265.Voir paragraphe 23 c).

Paragraphes 19 b) et c)

266.Aucune lésion corporelle n’a été constatée lors du placement et de l’examen médical d’A. Askarov dans une cellule de quarantaine de l’établissement no 21.

267.Toutefois, le 22 janvier 2013, l’intéressé a été examiné dans l’hôpital central de l’établissement no 47 par une commission médicale composée de quatre médecins du Centre national de cardiologie et de médecine générale, qui est rattaché au Ministère de la santé. Cet examen a donné lieu à l’établissement d’un rapport (coronaropathie, angor d’effort, cardiopathie fonctionnelle de classe III, athérosclérose de l’aorte et des artères coronaires et cérébrales, blocage incomplet de la branche antérieure gauche du faisceau de His associé à un syndrome vestibulaire, surdité neurosensorielle droite, fibrose pulmonaire modérée du lobe inférieur droit, gastrite superficielle et cholécystite chronique).

268.Sur les recommandations de cette commission, les examens ci-après ont été réalisés au Centre national de cardiologie et de médecine générale du Ministère de la Santé : électrocardiographie (rythme sinusal, fréquence cardiaque de 68, déviation gauche de l’axe électrique du cœur) ; échographie cardiaque (absence de trouble de la contractilité locale, absence d’atteinte du péricarde) ; échographie des organes internes (atteintes hépatiques diffuses) ; échographie de la glande thyroïde (absence d’anomalie) ; radiographie des organes thoraciques (absence d’atteinte localisée dans la région pulmonaire) ; électroencéphalographie ; échoencéphalographie (examens neurophysiologiques du cerveau réalisés dans le service de neurochirurgie de l’hôpital national du Ministère de la santé).

269.Il n’a pas été constaté d’atteinte pathologique posant un risque vital, ni de déplacement des structures cérébrales médianes.

270.Dosages sanguins du taux de cholestérol et de glucose, tests hépatiques (valeurs situées dans l’intervalle de référence).

271.Une consultation a été réalisée auprès d’un médecin urologue de l’hôpital national du Ministère de la santé.

272.Une hypertrophie diffuse de la prostate a été constatée. Un traitement a été prescrit et administré à l’intéressé conformément aux indications du médecin, sous la surveillance continue des médecins de l’hôpital central de l’établissement no 47.

273.Un médecin otorhinolaryngologue de l’hôpital national du Ministère de la santé a été consulté. Les éléments suivants ont été constatés : surdité mixte droite de niveau 3-4 ; bouchon de cérumen dans l’oreille droite ; symptômes précurseurs d’une névrite cochléaire de l’oreille gauche ; surdité neurosensorielle de niveau 1. Un traitement a été administré à l’intéressé conformément aux indications du médecin, sous la surveillance continue des médecins de l’hôpital central de l’établissement no 47.

Paragraphe 19 d)

N. Tourdieva

274.Le 18 janvier 2006, N. Tourdieva a saisi le bureau du procureur de la région de Djalal-Abad d’une requête concernant des violences physiques commises sur sa personne le 14 janvier 2006 par A. Magueev, agent d’instruction à la direction des affaires intérieures de la même région, à la suite desquelles elle aurait failli faire une fausse couche. Dans le même temps, N. Tourdieva a contacté l’organisation de protection des droits de l’homme Spravedlivost (Justice), qui a fait paraître dans son bulletin Pravo dlya vsekh (La justice pour tous) un article intitulé « Daje byout beremennykh jenchtchin » (Même les femmes enceintes sont battues).

275.Une expertise médico-légale a été ordonnée dans le cadre de l’enquête. D’après le rapport d’expertise en date du 1er février 2006, N. Tourdieva ne présentait aucune lésion corporelle, et le risque de fausse couche était la conséquence d’une anémie. Du 14 au 23 janvier 2006, N. Tourdieva a été soignée à la maternité de l’hôpital régional de Souzak, duquel elle est sortie dans un état satisfaisant.

276.L’enquête n’a pas permis de confirmer les allégations de N. Tourdieva. En conséquence, le 12 mai 2006, l’affaire pénale visant A. Magueev a été classée sans suite par le bureau du procureur de la région de Djalal-Abad pour absence de fait constitutif d’infraction.

277.Le 16 mars 2006, A. Magueev a déposé plainte auprès du tribunal municipal de Djalal-Abad contre l’organisation de protection des droits de l’homme Spravedlivost, l’accusant d’avoir porté atteinte à son honneur et à sa dignité par voie médiatique, et lui réclamant 1 million de soms de dommages-intérêts à titre de réparation du préjudice moral. Le 27 avril 2006, il a saisi le même tribunal d’une requête tendant à l’ouverture d’une procédure pénale pour calomnie contre A. Charipov, V. Gritsenko et M. Abdoujaparov, membres de ladite organisation, ainsi que contre N. Tourdieva.

278.Les parties s’étant conciliées à l’initiative de l’organisation de protection des droits de l’homme Spravedlivost, le tribunal a prononcé un non-lieu dans l’affaire engagée par A. Magueev. En août 2006, N. Tourdieva a donné naissance à un enfant sain et sans malformation. En d’autres termes, les allégations concernant le risque de fausse couche n’ont pas été confirmées.

D. Khaïdarov

279.Le 12 juin 2010, pendant les troubles civils qui sont survenus dans la ville et la région d’Och, des personnes non identifiées ont amené à la morgue du bureau d’expertise médico-légale de la région d’Och les cadavres de K. Chadybekov, policier rattaché au Ministère de l’intérieur, et K. Abdyldaev, militaire rattaché au Service des garde-frontières, qui présentaient des traces de mort violente sous la forme d’une blessure par balle située du côté gauche de la poitrine.

280.En outre, le 12 juin 2010, à proximité du magasin « Doubaï » situé dans la localité de Narimane (district Kara-Souïsky), des personnes non identifiées d’origine ouzbèke ont tiré à l’arme automatique sur A. Issabekov, M. Tabaldiev et S. Toktogoulov, militaires rattachés au Ministère de la défense, qui faisaient route en direction de la ville d’Och depuis le district Kara-Souïsky à bord d’un véhicule blindé de combat d’infanterie. Des coups de feu ont également été tirés sur un véhicule des pouvoirs publics de modèle VAZ-21074, à bord duquel se trouvaient K. Sooronbaev et d’autres militaires du Service des garde‑frontières, qui se rendaient sur leur lieu de garnison. Des blessures par balles ont ainsi été infligées à A. Issabekov, M. Tabaldiev, S. Toktogoulov et K. Sooronbaev.

281.Plus tard, le 13 août 2010, 1 grenade à main RGD-5 et 120 cartouches de calibre 5,45 mm ont été trouvées et saisies lors d’une perquisition effectuée dans le cadre d’une autre affaire pénale dans la maison de S. Absatarov, située au numéro 106 de la rue Narimane de la localité du même nom.

282.En outre, des mesures de recherche opérationnelle ont permis d’établir que le 12 juin 2010, pendant les troubles civils survenus dans la ville et la région d’Och, un habitant de la localité de Narimane (district Kara-Souïsky) nommé M. Chadmanov a opposé résistance à des agents de la section des affaires intérieures et du Ministère de la défense en faisant usage d’une arme à feu, à proximité du magasin Doubaï.

283.Les 14 juin, 7 juillet, 14 août, 21 septembre et 13 octobre 2010, les faits précités ont entraîné l’ouverture de procédures pénales au titre des dispositions suivantes du Code pénal : article 340 (meurtre d’un agent d’un organe chargé de l’application des lois ou d’un militaire) ; alinéa 2 de l’article 341 (acte de violence à l’égard d’un représentant des autorités) ; articles 28 et 340 (tentative de meurtre d’un agent d’un organe chargé de l’application des lois ou d’un militaire) ; alinéa 1 de l’article 241 (acquisition, transfert, commerce, détention, transport ou port illicites d’armes à feu, de munitions ou de matériels ou dispositifs explosifs) ; alinéa 2 de l’article 233 (troubles civils). Ces affaires pénales ont été jointes en une seule procédure le 13 octobre 2010.

284.Au terme de l’enquête, le 13 octobre 2010, S. Apsatarov et D. Kadyrov (absent) se sont vu notifier leur inculpation au titre des dispositions suivantes du Code pénal : alinéas 1 et 2 de l’article 233 ; paragraphes 4, 5, 9 et 15 de l’alinéa 2 des articles 30 et 97 (meurtre) ; articles 28 et 340. Leur placement en détention provisoire a été ordonné en tant que mesure préventive.

285.Le jour suivant, à savoir le 14 octobre 2010, M. Chadmanov (absent) s’est vu notifier son inculpation au titre des dispositions suivantes du Code pénal : alinéas 1 et 2 de l’article 233 ; paragraphes 4, 5, 9 et 15 de l’alinéa 2 des articles 30 et 97 ; articles 28 et 340. Son placement en détention provisoire a été ordonné en tant que mesure préventive.

286.Le 23 novembre 2010, S. Absatarov et B. Jamaldinov (absent) se sont vu notifier leur inculpation au titre des dispositions suivantes du Code pénal : alinéas 1 et 2 de l’article 233 ; paragraphes 4, 5, 9 et 15 de l’alinéa 2 des articles 30 et 97 ; articles 28 et 340. Leur placement en détention provisoire a été ordonné en tant que mesure préventive.

287.Le 9 décembre 2010, D. Khaïdarov s’est vu notifier son inculpation au titre des dispositions suivantes du Code pénal : alinéas 1 et 2 de l’article 233 ; paragraphes 4, 5, 9 et 15 de l’alinéa 2 des articles 30 et 97 ; paragraphe 2 de l’alinéa 2 des articles 30 et 174 (destruction ou dégradation intentionnelle de biens) ; articles 28 et 340. Son placement en détention provisoire a été ordonné en tant que mesure préventive. Après achèvement de l’instruction, l’affaire pénale a été portée à l’examen du tribunal du district Kara-Souïsky.

288.Le 21 janvier 2011, le tribunal du district Kara-Souïsky a rendu un jugement par lequel il a condamné D. Khaïdarov à huit ans de privation de liberté. Toutefois, compte tenu de l’annulation de ce jugement par des tribunaux d’instance supérieure, le 26 mars 2014, à l’issue d’une longue procédure judiciaire, le tribunal régional d’Och a ordonné l’amnistie de D. Khaïdarov en vertu de la loi du 21 janvier 2014 sur l’amnistie. Cela a entraîné la levée des mesures préventives qui avaient été prises à l’égard de l’intéressé et d’autres de ses complices, et leur libération de détention provisoire.

289.La décision judiciaire précitée a été annulée par un arrêt de la Cour suprême en date du 4 juin 2014, et l’affaire pénale a été renvoyée pour réexamen devant le tribunal municipal d’Och.

290.Par une décision du tribunal municipal en date du 28 avril 2015, un avis de recherche a été lancé contre plusieurs personnes, dont D. Khaïdarov, et la procédure pénale a été suspendue.

291.S’agissant des allégations de l’intéressé selon lesquelles il aurait été battu par des policiers, il a été décidé de tenir les audiences dans le foyer de l’unité militaire no 703 du Ministère de l’intérieur afin d’assurer la sécurité des participants à la procédure judiciaire, et celle des parties aux affaires pénales liées aux événements survenus en juin 2010 dans la ville et la région d’Och.

292.Par ailleurs, le 30 septembre 2010, des informations faisant état de violations de la loi commises pendant l’examen judiciaire d’affaires pénales ont été publiées sur le site Internet 24.kg. Il était rapporté que dans certains tribunaux, des prévenus en cause dans des affaires liées aux événements d’Och avaient été battus par des membres des familles des victimes, et des agents de leur escorte. À cet égard, le bureau du procureur de la région d’Och a procédé aux vérifications nécessaires.

293.Ainsi, le 1er septembre 2010 à 09 h 00, G. Sadykjanov et D. Khaïdarov, qui étaient placés en détention provisoire, ont été conduits sous escorte à une audience du tribunal du district Kara-Souïsky, avant d’être reconduits au SIZO no 5 le même jour, à 18 h 00. Les prévenus ont affirmé que le 15 septembre 2010, vers 10 h 00, des membres des familles des victimes les avaient battus et leur avaient jeté des pierres à l’extérieur du tribunal du district Kara-Souïsky.

294.Des vérifications ont toutefois permis d’établir qu’aucune audience n’avait été fixée au 15 septembre 2010 dans le cadre de l’affaire pénale en question, et que ce jour-là, les détenus G. Sadykjanov et D. Khaïdarov n’avaient pas été conduits à l’extérieur du SIZO no 5.

295.Le bureau du procureur de la région a néanmoins ordonné une expertise médico‑légale le 1er octobre 2010. Selon le rapport d’expertise en date du 5 octobre 2010, aucune lésion corporelle n’a été constatée sur le corps des prévenus. La vérification des informations qui avaient été publiées sur le site Internet de l’agence de presse 24.kg n’a pas non plus permis de confirmer les allégations selon lesquelles des victimes avaient battu G. Sadykjanov et D. Khaïdarov et leur avaient jeté des pierres.

296.Au cours des enquêtes et des procédures judiciaires concernant les affaires pénales précitées, les services régionaux du ministère public n’ont ni reçu ni examiné de plaintes émanant des inculpés, de leurs représentants légaux ou de leurs défenseurs faisant état d’actes illicites commis par des personnes chargées des enquêtes ou des enquêtes préliminaires.

Paragraphes 20 a) et b)

297.Les organes chargés de l’application des lois de la région d’Och ont ouvert 1 303 procédures pénales en rapport avec les événements survenus dans la région en juin 2010. Ces procédures ont permis de mettre en lumière 138 infractions (10,5 %).

298.Au terme de l’enquête, 102 affaires concernant 212 personnes (33 Kirghizes, 174 Ouzbeks et 5 personnes d’une autre origine) ont été portées devant la justice et ont abouti à la condamnation de 209 personnes (30 Kirghizes, 174 Ouzbeks et 5 personnes d’une autre origine).

299.Par ailleurs, 629 affaires pénales concernant des dégradations intentionnelles de biens commises par l’intermédiaire de pogroms et d’incendies volontaires ont été jointes en une seule procédure après réalisation d’une opération de recensement.

300.La procédure a été suspendue dans le cadre de 559 affaires, dont 26 au titre du paragraphe 1 de l’alinéa 1 de l’article 221 du Code de procédure pénale (non-détermination du lieu où se trouve l’inculpé), et 533 au titre du paragraphe 3 du même alinéa (non‑identification de l’auteur présumé de l’infraction). Toutes les dispositions nécessaires sont prises aux fins de l’élucidation des faits.

301.Un non-lieu a été prononcé dans 13 affaires pénales, dont 4 affaires de disparition au titre du paragraphe 2 de l’alinéa 1 de l’article 28 du Code de procédure pénale, 7 affaires de prise de possession illégale d’un véhicule motorisé au titre du paragraphe 10 du même alinéa, et 2 affaires de vol d’arme.

302.À l’heure actuelle, les organes d’instruction ne traitent pas d’affaire pénale ayant fait l’objet d’une reprise d’instance.

303.Dans le cadre du réexamen au titre de la procédure de contrôle (nadzor), les services du ministère public ont étudié toutes les affaires pénales en cours de traitement par les organes chargés de l’application des lois de la région. À cet égard, les services en question ont établi 561 directives et 12 demandes visant à faire cesser des violations de la loi, et ont ouvert 4 procédures disciplinaires.

304.Dans le cadre de la suspension d’affaires pénales au titre du paragraphe 3 de l’alinéa 1 de l’article 221 du Code de procédure pénale, les procureurs locaux prennent rapidement connaissance de l’ensemble des actes d’instruction qui ont été accomplis. Chaque fois qu’ils constatent des insuffisances, ils donnent des directives afin qu’il soit procédé à des actes d’instruction supplémentaires en vue d’identifier les auteurs de l’infraction.

305.La non-élucidation d’infractions liées aux événements de juin 2010 tient au dépassement par les victimes du délai de saisine des organes chargés de l’application des lois, à la disparition des traces des infractions, à l’absence de témoins des infractions, et au fait que des actes d’enquête opérationnelle ont été accomplis de façon incomplète et en dehors des délais impartis.

306.Des procédures de recherche sont actuellement conduites à l’égard de 47 personnes dans le cadre de 26 affaires pénales engagées par des organes chargés de l’application des lois pour des actes commis pendant les événements de juin 2010. S’agissant des affaires pénales suspendues au titre du paragraphe 3 de l’alinéa 1 de l’article 221 du Code de procédure pénale, 215 procédures de recherche opérationnelle sont en cours et ont donné lieu à l’élaboration de plans de recherche opérationnelle aux fins de l’élucidation des faits.

307.Après avoir examiné les procédures de recherche et de recherche opérationnelle, le bureau du procureur de la région d’Och a établi 28 directives écrites demandant l’intensification et la mise en œuvre de mesures de recherche opérationnelle nécessaires à la localisation et à l’arrestation des personnes recherchées, et a établi 2 demandes visant à faire cesser des violations de la loi.

308.Par ailleurs, en ce qui concerne les disparitions survenues pendant les troubles civils survenus dans la région d’Och, un total de 46 requêtes concernant 46 personnes ont été enregistrées. Parmi ces personnes, 19 ont été retrouvées mortes et 12 ont été retrouvées vivantes après que des mesures ont été prises. À l’heure actuelle, sept personnes sont portées disparues (15,2 %), et huit demandes d’extension de compétence territoriale ont été soumises à l’examen du bureau du procureur de la ville d’Och.

309.Toutes les disparitions survenues pendant les événements de juin 2010 ont entraîné l’engagement de poursuites pénales et la réalisation d’opérations d’investigation par la Brigade interinstitutions d’investigation opérationnelle de la région d’Och. Au total, ces disparitions ont donné lieu à l’ouverture de 2 procédures de recherche et 13 procédures de recherche opérationnelle. Chacune de ces procédures a fait l’objet d’un réexamen au titre de la procédure de contrôle, et de directives écrites données par les services du ministère public.

310.En outre, il a été demandé au chef de la Direction des affaires intérieures de la région d’Och d’intensifier les activités de recherche des personnes ayant disparu lors des événements de juin.

311.L’examen des procédures de recherche précitées a permis d’établir que les services opérationnels de la Direction des affaires intérieures de la région d’Och prenaient des mesures suffisantes aux fins de la localisation des personnes recherchées.

312.Au terme de l’examen, il a été demandé au chef de la Direction des affaires intérieures de la région d’Och de faire cesser des infractions à la loi, et d’engager des poursuites disciplinaires contre des agents de la section chargée des enquêtes criminelles auprès de ladite direction. Il a ensuite été mis fin à ces violations.

313.Les organes chargés de l’application des lois de la région d’Och ont lancé, par l’intermédiaire d’Interpol, un avis de recherche international visant 17 personnes impliquées dans 12 procédures pénales. Toutes les informations concernant les autres personnes ont été communiquées au Ministère de l’intérieur aux fins du lancement d’un avis de recherche international (ces personnes ont ensuite fait l’objet d’un avis de recherche communautaire).

Paragraphe 20 c)

314.Voir paragraphes 5, 17 (b, c, d, e, f, g et h) et 18 (a, b et c).

Paragraphe 20 d)

315.Depuis 2010, les services du ministère public ont enregistré 18 communications faites par des citoyens ou leurs représentants au sujet d’actes de torture et de violence commis sur leur personne par des agents d’organes chargés de l’application des lois. Ces services ont aussi enregistré un article en ligne en date du 30 septembre 2010, qui faisait état d’actes de violence commis sur des prévenus par des représentants de victimes dans le cadre d’affaires pénales liées aux événements de juin 2010.

316.Les services du ministère public ont examiné des requêtes formulées par A. Askarov, K. Chermatov, D. Raimjanov, C. Youldachev et M. Maksoudov, A. Tachirov, C. Iminov, O. Kholmirzaev, M. Bizouroukov, K. Amanbaev, D. Bazarov, C. Osmonov, K. Kadyrov, R. Jeenbekov, M. Soliev, E. Talant, A. Atajanov, Y. Goulyamov, et F. Aliev ; ils ont également examiné l’article en ligne.

317.Après examen des requêtes de C. Youldachev, M. Maksoudov, O. Kholmirzaev, K. Amanbaev, K. Kadyrov et R. Jeenbekov, cinq procédures pénales ont été ouvertes. Parmi ces procédures, trois ont été engagées contre sept agents des services du Ministère de l’intérieur, qui ont été mis hors de cause ; une (intentée par K. Kadyrov) a été suspendue au titre du paragraphe 3 de l’alinéa 1 de l’article 221 du Code de procédure pénale ; une (intentée par R. Jeenbekov) a fait l’objet d’un non-lieu au titre du paragraphe 2 de l’alinéa 1 de l’article 28 du même code.

318.Les affaires concernant les autres requêtes ont été classées sans suite pour absence de fait constitutif d’infraction, les allégations des requérants n’ayant pas été confirmées.

Paragraphes 21 a) et b)

319.Le chapitre 46 du Code de procédure pénale en vigueur traite des procédures en réparation des préjudices découlant d’actes illégaux de tribunaux et d’organes chargés des procédures pénales.

320.L’État répare intégralement le préjudice causé par les mesures suivantes, si elles sont illégales : garde à vue, détention provisoire, assignation à résidence, destitution de fonctions, placement en établissement médical, condamnation et mesures coercitives à caractère médical, et cela quelle que soit la responsabilité de l’organe d’enquête, de l’agent d’instruction, du procureur ou du tribunal.

321.En cas de décès de la personne, le droit à réparation du préjudice est transféré à ses héritiers selon les modalités établies par la loi. Si la personne recevait des pensions et des allocations dont le paiement a été suspendu, celles-ci sont reversées aux membres de sa famille appartenant à la catégorie des bénéficiaires de la pension pour perte du soutien de famille.

322.La réparation du préjudice matériel porte sur les éléments ci-après : salaires, pensions, allocations et autres revenus dont la personne a été privée du fait d’actes illégaux ; biens que l’État a confisqués ou s’est appropriés de façon illégale en application d’un jugement ou d’une décision judiciaire ; amendes et frais de justice payés en application d’un jugement illégal ; frais d’assistance juridique et autres. Les demandes en réparation du préjudice matériel sont tranchées par un tribunal. La législation nationale prévoit la possibilité de demander des dommages-intérêts dans le cadre de la procédure pénale comme de la procédure civile. Dans ce dernier cas, l’action civile exercée dans le cadre de la procédure pénale est portée devant une juridiction civile si elle n’a pas été formée ou tranchée au cours de la procédure pénale (art. 33 du Code de procédure civile).

Paragraphe 21 c)

323.Dans le cadre d’un programme de réadaptation des victimes de torture, un centre de réadaptation baptisé « Alter-Ego » a été ouvert en 2017 dans la ville de Bichkek. La fondation Golos svobody (La voix de la liberté) travaillait à cela depuis 2007.

324.La principale mission du centre est d’apporter une aide médico-psychologique à des victimes de torture et de mauvais traitements, ainsi qu’aux membres de leur famille. Environ 600 personnes y ont suivi une réadaptation depuis sa création. Le centre et le programme sont financés par des subventions.

325.En outre, des établissements médicaux publics portent un appui et une assistance aux activités du centre en prodiguant des soins et une assistance psychologique aux victimes de torture et de mauvais traitements.

326.À l’heure actuelle, une ONG de la coalition contre la torture et des organes de l’État envisagent la création de services spécialisés de réadaptation des victimes de torture, qui seront financés par l’État.

Paragraphe 21 d)

327.Conformément au Code de procédure pénale, s’il existe des raisons suffisantes de croire qu’une victime, un témoin ou une autre partie à la procédure, ainsi que des membres de leur famille ou d’autres parents proches, sont menacés de violences, de la destruction ou de la dégradation de leurs biens, ou d’autres actes illicites graves, le tribunal, le procureur, l’agent d’instruction et l’organe d’enquête prennent, dans les limites de leurs attributions, les mesures prévues par la loi pour protéger la vie, la santé, l’honneur, la dignité et les biens de ces personnes.

328.Les modalités d’adoption de mesures de protection à l’égard des personnes ayant saisi la justice pour avoir subi des actes de torture et d’autres mauvais traitements sont fixées par l’article 19 de la loi sur la protection des droits des témoins, des victimes et des autres parties à la procédure pénale.

329.Le tribunal (le juge), le procureur, le chef de l’organe d’enquête ou l’agent d’instruction qui reçoit une requête (une communication) signalant qu’une personne est menacée de mort, de violences, de la destruction ou de la dégradation de ses biens ou d’un autre acte illicite grave, doit vérifier ces informations, et décider sous trois jours (ou immédiatement dans les cas urgents) s’il convient de prendre des mesures de protection à l’égard de cette personne. Cela donne lieu à l’établissement d’une décision motivée qui est remise le jour même, pour exécution, à l’organe chargé de l’application des mesures de protection, ainsi qu’à la personne faisant l’objet de la décision.

330.L’organe chargé de l’application des mesures de protection décide des mesures de protection qui doivent être prises en application de la loi précitée, et détermine les moyens de leur mise en œuvre.

331.L’organe en question notifie l’adoption et la modification de mesures de protection, l’application de nouvelles mesures et le résultat de leur mise en œuvre au tribunal (au juge), au procureur, au chef de l’organe d’enquête ou à l’agent d’instruction qui a reçu la requête (la communication) ou qui a été saisi de l’affaire pénale, et lui demande l’autorisation de lever les mesures de protection en cas d’élimination de la menace pesant sur la sécurité de la personne protégée.

332.Le Ministère de l’intérieur dispose actuellement d’une unité spéciale de protection des témoins.

333.Entre 2012 et 2016, les services du ministère public ont rendu deux décisions garantissant la protection par l’État des victimes A. Tchonakhounov, A. Ermek et E. Ermek, qui avaient saisi la justice pour avoir subi des menaces et des intimidations répétées.

Paragraphe 21 e)

334.L’article 96 de la Constitution dispose que la Cour suprême est la plus haute juridiction compétente pour trancher les affaires civiles, pénales, économiques, administratives et autres ; elle réexamine les décisions des tribunaux sur recours des parties à l’instance selon les modalités fixées par la loi.

335.Le chapitre 43 du Code de procédure pénale régit les rapports juridiques relatifs à la reprise d’instance pour survenance de faits nouveaux ou découverte de nouveaux éléments.

336.Ainsi, il est possible d’annuler un jugement, une ordonnance ou un arrêt exécutoires, et de reprendre l’instance pour survenance de faits nouveaux ou découverte de nouveaux éléments.

Paragraphe 22 a)

337.Selon l’article 81 du Code de procédure pénale, les éléments ci-après relèvent de la catégorie des moyens de preuve irrecevables : les déclarations d’un témoin, suspect ou inculpé obtenues pendant la phase préparatoire de la procédure pénale par la torture, la violence, la menace, la tromperie ou tout autre acte illicite, et par des mauvais traitements ; les déclarations obtenues de lui à la suite d’actes de torture commis sur sa personne ; les déclarations faites par une personne ayant été reconnue inapte, selon les modalités établies par le même code, à comprendre et restituer correctement les faits présentant une importance pour l’affaire pendant l’interrogatoire ; les informations obtenues dans le cadre d’un acte de procédure accompli par une personne non habilitée à cet effet ou avec la participation d’une personne visée par une récusation ; tout autre élément de preuve obtenu en violation des dispositions du même code.

Paragraphe 22 b)

338.Le 20 juillet 2016, aux fins de la détection rapide des actes de torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, le bureau du Procureur général a élaboré des instructions écrites à l’intention de l’ensemble des procureurs des juridictions inférieures. Selon ces instructions, lorsqu’un tribunal examine une demande de placement en détention provisoire à titre de mesure préventive, le procureur partie à l’instance doit s’assurer que l’inculpé ne porte pas de traces visibles de torture, de sévices ou de lésions corporelles, après l’avoir interrogé oralement au cours de cette audience. S’il constate que de tels actes ont été commis, le procureur partie à l’instance a pour consigne d’effectuer, en application des articles 151 et 155 du Code de procédure pénale, une déclaration écrite ou orale faisant état d’actes de torture ou d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants commis sur la personne de l’inculpé. Cette déclaration est enregistrée et donne lieu à la réalisation d’une enquête minutieuse (voir paragraphes 2, 5 et 17 au sujet des cours portant sur ces questions).

Paragraphe 22 c)

F. Gapirov

339.Le 16 juin 2010 vers 16 h 30, F. Gapirov, habitant du district Kara-Souïsky, et M. Makhkamov, une de ses connaissances, ont été arrêtés au poste de contrôle du périmètre d’un aéroport alors qu’ils faisaient route en direction de la localité de Jiydelik (ville d’Och) depuis la localité de Narimane, à bord d’une voiture Hyundai Accent appartenant à l’intéressé. La fouille de la voiture a permis de saisir 2 paquets de munitions contenant un total de 32 munitions pour pistolet Makarov de calibre 9 mm. Ces faits ont entraîné, le même jour, l’ouverture d’une procédure pénale au titre des alinéas 1 et 2 de l’article 233 (troubles civils) et des alinéas 1 et 2 de l’article 241 (acquisition, transfert, commerce, détention, transport ou port illicites d’armes à feu, de munitions ou de matériels ou dispositifs explosifs) du Code pénal.

340.Au terme de l’enquête, le 14 août 2010, F. Gapirov et M. Makhkamov se sont vu notifier leur inculpation et l’affaire a été portée à l’examen du tribunal municipal d’Och.

341.Pendant l’instruction, les inculpés F. Gapirov et M. Makhkamov ont déclaré au sujet des munitions qui avaient été trouvées dans la voiture qu’ils les transportaient vers la localité de Staline. Toutefois, pendant le procès, ils ont contesté l’ensemble de leurs déclarations en arguant avoir été battus par des policiers au cours de l’enquête préliminaire. Devant le tribunal, M. Makhkamov a déclaré que F. Gapirov ignorait totalement l’existence des munitions qui avaient été trouvées dans sa voiture.

342.Ainsi, par un jugement du tribunal précité en date du 26 octobre 2010, M. Makhkamov a été reconnu coupable au titre des alinéas 1 et 4 de l’article 241 du Code pénal, et condamné à quatre ans de privation de liberté, tandis que F. Gapirov a été mis hors de cause et libéré de détention provisoire le 6 novembre 2010. Ce jugement a été confirmé par les décisions de tribunaux d’instance supérieure.

343.Il importe de noter que les allégations de F. Gapirov selon lesquelles il avait été battu par des policiers ont été vérifiées. En conséquence, le 3 juin 2011, le bureau du procureur de la ville d’Och a ouvert une procédure pénale au titre de l’article 3051 du Code pénal (« Torture »).

344.Au cours de l’instruction, F. Gapirov a indiqué qu’au poste de contrôle, pendant que les policiers fouillaient la voiture, l’un d’entre eux l’avait frappé à la partie droite du visage avec la crosse d’un fusil d’assaut. Il a également déclaré que des policiers en tenue de camouflage qui les conduisaient vers le bâtiment administratif de la Direction des affaires intérieures de la ville d’Och leur avaient mis un sac sur la tête et les avaient frappés à coups de matraque sur la plante des pieds et sur tout le corps. Il a indiqué, en outre, qu’il ne serait pas en mesure de reconnaître les policiers.

345.Bien que tous les actes d’instruction nécessaires aient été accomplis dans le cadre de cette procédure pénale, il n’a pas été possible d’identifier les auteurs de l’infraction. Le 3 septembre 2011, l’instruction de l’affaire a été suspendue pour non-identification de l’auteur présumé de l’infraction.

Paragraphes 22 d), e) et j)

346.Voir paragraphes 5, 17 (b, c, d, e, f, g et h), 18 (a, b et c) et 22 a).

Paragraphe 22 f)

347.Conformément à l’article 81 du Code de procédure pénale, les éléments de preuve en matière pénale s’entendent de toutes les conclusions factuelles à partir desquelles l’agent d’instruction, le procureur et le tribunal établissent, selon les modalités fixées par la loi, la commission ou la non-commission d’un acte visé par le Code pénal, la commission ou la non‑commission de cet acte par le suspect, l’inculpé ou le prévenu, la culpabilité ou l’innocence du prévenu, ainsi que toute autre circonstance déterminante pour juger l’affaire de manière adéquate.

348.Les conclusions en question sont établies sur la base des éléments ci-après :

Déclarations du suspect, de l’inculpé, du prévenu, de la victime et du témoin ;

Rapports d’expertise ;

Preuves matérielles ;

Procès-verbaux des actes d’instruction et des actes judiciaires ;

Résultats de mesures de recherche opérationnelle obtenus selon les modalités établies par la loi ;

Autres documents.

349.Les éléments de preuve obtenus en violation des dispositions du Code de procédure pénale sont irrecevables, n’ont pas de valeur légale et ne sauraient fonder une décision sur l’affaire, ni servir à étayer l’existence d’un fait ou d’une circonstance quelconques.

350.Les éléments suivants relèvent de la catégorie des moyens de preuve irrecevables :

Les déclarations concernant la commission d’une infraction pénale faites pendant l’enquête pénale par un suspect ou un inculpé en l’absence d’un défenseur, y compris lorsque l’assistance d’un défenseur a été refusée, ainsi que les déclarations faites au tribunal par un prévenu en l’absence d’un défenseur ;

Les déclarations faites par une victime ou un témoin à partir de conjectures, de suppositions ou de rumeurs, de même que les déclarations faites par un témoin qui n’est pas en mesure d’indiquer la source de ses informations, si celles-ci ne sont pas corroborées par l’ensemble des éléments de preuve examinés au cours de l’enquête ou de la procédure judiciaire ;

La déclaration établie en application de la loi relative à l’établissement et à la soumission de la déclaration d’impôts unique ;

Tout autre élément de preuve obtenu en violation des dispositions du Code de procédure pénale.

351.L’article 89 du Code de procédure pénale dispose qu’un document est considéré comme étant un élément de preuve s’il contient des informations intéressant l’affaire pénale fournies ou attestées par un organisme, un agent de l’État ou un particulier.

352.Les informations contenues dans de tels documents peuvent se présenter sous une forme tant écrite qu’orale. Ces documents peuvent également être des supports d’information, des photographies, des films et des enregistrements audio et vidéo obtenus, utilisés ou présentés conformément aux modalités prévues par le Code de procédure pénale, et reconnus comme éléments de preuve dans l’affaire.

353.Les documents sont versés au dossier et conservés aussi longtemps que celui-ci. Si des documents ayant été saisis et versés au dossier sont demandés à des fins de tenue de registre, d’établissement de rapports et d’autres fins légitimes, ils peuvent être rendus ou prêtés à leur propriétaire légal si cela n’est pas préjudiciable à l’affaire, ou lui être transmis en copie.

354.Sont reconnus comme preuves matérielles les objets dont il existe des raisons de penser qu’ils ont servi à commettre l’infraction, qu’ils portent des traces de l’infraction ou qu’ils ont fait l’objet d’actes délictueux, ainsi que l’argent et les objets, documents et autres objets de valeur susceptibles de permettre de mettre en lumière l’infraction, d’établir les circonstances de l’affaire, d’identifier des coupables, de mettre des personnes hors de cause ou d’atténuer leur responsabilité.

355.Selon l’alinéa 7 de l’article 3 et l’article 6 du Code de procédure pénale, l’admission des éléments de preuve en matière pénale s’effectue conformément à la législation en vigueur au moment de leur réception. Il est interdit d’utiliser, aux fins de l’administration de la justice, des éléments de preuve obtenus en violation de la législation régissant la conduite des procédures pénales.

Paragraphes 23 a) et b)

356.Au cours de la période considérée, il n’a pas été enregistré de cas d’intimidations, de coups et blessures ou d’autres violences à l’égard de défenseurs des droits de l’homme et d’avocats.

357.Deux cas concernant des journalistes ont toutefois été enregistrés auprès des organes chargés de l’application des lois de la région d’Och.

358.Le 25 mars 2015, la Direction du Comité d’État à la sécurité nationale pour la ville et la région d’Och a reçu de la Direction des affaires intérieures de la ville d’Och des renseignements sur Umar Farooq, journaliste ressortissant des États-Unis d’Amérique né en 1984, qui collectait des informations sur les relations interethniques et l’extrémisme en République kirghize.

359.Le même jour, U. Farooq a été convoqué à la Direction du Comité d’État à la sécurité nationale pour la ville et la région d’Och où il a expliqué, en présence de son interprète K. Akbarova, qu’il était journaliste et travaillait avec plusieurs organismes internationaux de presse et d’édition, notamment le Los Angeles Times. Il a aussi indiqué qu’il menait une enquête journalistique sur les relations interethniques dans le sud du pays, et sur la situation dans la région frontalière située entre la République kirghize et la République d’Ouzbékistan.

360.Des vérifications ont permis d’établir qu’U. Farooq n’avait pas été accrédité en tant que journaliste auprès des services de l’immigration de la République kirghize et que, de ce fait, il collectait des informations sans y être autorisé.

361.U. Farooq a ensuite été soumis à une fouille corporelle en présence des avocats K. Jounousbaev et M. Abdouraoupova, ainsi qu’en présence de témoins. Les éléments ci‑après ont été trouvés en sa possession lors de la fouille : 3 disques compacts (CD) sur lesquels figuraient des enregistrements vidéo de discours à caractère religieux prononcés par des individus asiatiques en arme, des extraits de scènes de combat, et des plans où apparaissaient des drapeaux et des symboles d’organisations religieuses ; 1 carte mémoire (Kingston 2 Gb) ; 16 feuilles de format А4, dont 2 décisions d’inculpation rendues par E. Soultanov, agent d’instruction de la section chargée de l’instruction auprès de la Direction générale du Comité d’État à la sécurité nationale pour la ville et la région d’Och, à l’égard d’A. Youssoupov (au titre des articles 28 et 375 du Code pénal) et d’I. Salibaev (au titre des article 375, 168 et 241 du Code pénal) ; une copie de la traduction d’un rapport d’expertise théologique portant sur des supports d’information contenant des discours prononcés par R. Kamalov, imam d’une mosquée du district Kara-Souïsky ; des textes provenant d’Internet intitulés « Zabloudivchiessya voïny islama » (Les guerres perdues de l’islam) ; 4 feuilles de format А4 sur lesquelles figuraient des textes écrits en arabe ; un ordinateur portable Apple MacBook ; un appareil photographique SONY ; un bloc-notes noir mazzumber 1991, un bloc-notes marron à couverture rigide ; un cahier bleu Hotber ; la facture acquittée d’un séjour à l’hôtel Och-Nourou allant du 12 au 25 mars 2015 ; les cartes de visite des avocats V. Vakhitov et K. Saliev.

362.L’intéressé ayant refusé de donner des explications sur la provenance de ces objets, il lui a été proposé de les mettre volontairement à disposition afin qu’il soit procédé à une expertise en vue de déterminer si ces objets contenaient des informations à caractère extrémiste. Il y a consenti et, en présence de ses défenseurs, a volontairement mis à disposition l’ensemble des objets précités.

363.Selon un rapport d’expertise judiciaire théologique en date du 26 mars 2015, les CD contenaient des vidéos dont le fond était contraire à l’ordre constitutionnel et aux instruments normatifs de la République kirghize. Ils contenaient également une vidéo de discours religieux dans lesquels l’imam Kamalov et un imam dénommé Abdouvali incitaient au djihad (guerre sainte) et à l’hostilité religieuse.

364.En conséquence, le 26 mars 2015, la Direction du Comité d’État à la sécurité nationale pour la ville et la région d’Och a engagé une procédure pénale au titre des dispositions suivantes du Code pénal : alinéa 2 de l’article 28 ; article 297 (tentative d’appels publics au renversement par la force de l’ordre constitutionnel) ; alinéa 1 de l’article 2992 (acquisition, élaboration, détention, diffusion, transport et envoi de contenus extrémistes et utilisation intentionnelle de symboles ou d’attributs d’organisations extrémistes ou terroristes).

365.Le même jour, le tribunal municipal d’Och a été saisi d’une demande tendant à faire reconnaître le bien-fondé et la légalité de la fouille corporelle pratiquée sur U. Farooq, et de l’acte par lequel celui-ci avait volontairement mis ses affaires à disposition. Le tribunal a donné suite à cette demande.

366.Pendant l’interrogatoire, U. Farooq a déclaré s’être procuré les décisions rendues par l’agent d’instruction E. Soultanov auprès des avocats V. Vakhitov et K. Saliev, qui avaient participé aux affaires concernées en qualité de défenseurs au nom du mouvement de protection des droits de l’homme Bir Douïno Kyrgyzstan.

367.Par la suite, il a indiqué qu’il était journaliste indépendant, qu’il travaillait avec plusieurs organismes internationaux de presse et d’édition, notamment le Los Angeles Times et IRIN News, et qu’il s’était rendu sur le territoire kirghize pour mener une enquête journalistique sur les relations interethniques et interreligieuses dans le pays, et la situation à ses frontières. Il a fait enquête auprès des habitants du district Kara-Souïsky (région d’Och) au sujet de R. Kamalov, membre actif d’une organisation extrémiste.

368.Le 26 mars 2015, compte tenu du fait que des traces visibles d’infraction avaient été trouvées sur U. Farooq, et qu’il s’agissait d’un ressortissant étranger ne résidant pas de façon permanente sur le territoire de la République kirghize, U. Farooq a été arrêté en tant qu’auteur présumé des infractions précitées et conduit dans le SIZO de la Direction du Comité d’État à la sécurité nationale pour la ville et la région d’Och.

369.Le 27 mars 2015, aux fins de l’objectivité de l’instruction, des perquisitions ont été conduites au domicile des avocats V. Vakhitov et K. Saliev, ainsi que dans le bureau de représentation de Bir Douïno Kyrgyzstan, avec l’autorisation du tribunal municipal d’Och. Les éléments suivants ont été trouvés et saisis lors de la perquisition du bureau : les décisions de l’agent d’instruction E. Soultanov évoquées ci-dessus ; la décision d’ouverture de la procédure pénale no 52-15-61 à l’égard de Rachod Kamalov ; 6 CD en rapport avec une affaire visant D. Djoumabaev, membre de l’organisation religieuse extrémiste Hizb ut‑Tahrir ; 15 CD contenant des discours religieux prononcés par un dénommé Rachodkhon kori ; 3 cartes mémoire ; 2 dictaphones ; 5 ordinateurs portables. Une carte de visite du ressortissant américain sur laquelle figurait le nom « Farooq Umar » a été trouvée au domicile de V. Vakhitov. Les éléments suivants ont été trouvés et saisis au domicile de K. Saliev : 2 CD contenant divers enregistrements à caractère religieux ; 55 tracts comportant des textes à caractère religieux ; 2 cartes mémoire ; 1 livret composé de 186 feuilles.

370.Pendant la perquisition du domicile de K. Saliev, le frère de celui-ci, un certain D. Saliev né en 1985, a déclaré qu’il était le propriétaire des tracts précités, et qu’il les détenait à des fins d’usage privé sans intention de les diffuser.

371.Selon un rapport d’expertise théologique, les objets saisis au domicile de K. Saliev ne présentaient pas de caractère extrémiste. Parmi les objets saisis dans le bureau de Bir Douïno Kyrgyzstan, un CD comportait des contenus à caractère extrémiste visant à inciter à l’hostilité religieuse et à renverser par la force l’ordre constitutionnel de la République kirghize.

372.Les pièces rassemblées ont permis d’établir qu’U. Farooq, sans être titulaire d’une accréditation et du visa nécessaire, collectait dans la région d’Och des informations sur l’extrémisme et les relations interethniques et interreligieuses dans le pays, et la situation à ses frontières. Il menait cette activité de façon confidentielle et avait l’intention de collecter des informations pour les transmettre à la maison d’édition IRIN News. Les pièces du dossier n’ont pas permis d’établir de quelle manière ces informations devaient être utilisées par la suite.

373.Ainsi, les actes commis par l’intéressé ne comprenaient pas d’éléments constitutifs de l’exécution publique d’actes visant à appeler au renversement par la force de l’ordre constitutionnel de la République kirghize, lesquels constituent un aspect indispensable de l’élément objectif de l’infraction réprimée par l’article 297 du Code pénal.

374.Par ailleurs, selon le rapport d’expertise théologique précité, des vidéos dont le fond était contraire à l’ordre constitutionnel et aux instruments normatifs de la République kirghize figuraient sur les CD qui avaient été trouvés en la possession d’U. Farooq. Ces vidéos contenaient des discours religieux à caractère extrémiste.

375.Conformément à la législation en vigueur, la reconnaissance du caractère extrémiste d’une organisation se fait uniquement sur décision judiciaire.

376.Les vidéos en question ne comportaient pas d’éléments d’information et de propagande se rapportant précisément à une organisation extrémiste dont l’activité était interdite sur le territoire kirghize. De ce fait, U. Farooq ne pouvait pas non plus être visé par des poursuites pénales au titre de l’alinéa 1 de l’article 2992 du Code pénal.

377.En conséquence, les actes commis par U. Farooq ont été requalifiés en infraction administrative (non-respect par un ressortissant étranger des modalités d’admission au séjour sur le territoire kirghize).

378.Le 28 mars 2015, le tribunal municipal d’Och a reconnu la légalité et le bien-fondé de l’arrestation de l’intéressé et a décidé de l’expulser du territoire kirghize à titre de sanction administrative. U. Farooq a ensuite été remis à l’ambassade des États‑Unis d’Amérique à Bichkek pour organisation de l’exécution de la décision judiciaire, et a quitté le territoire kirghize depuis l’aéroport Manas de Bichkek le 29 mars 2015.

379.Il est à noter qu’afin de juger l’affaire pénale de façon objective, il convenait d’identifier les personnes responsables de l’élaboration et de la diffusion des contenus à caractère extrémiste.

380.Le 19 juillet 2015, il a été décidé de suspendre l’instruction de l’affaire pénale pour non-identification de l’auteur présumé de l’infraction.

381.Le 4 octobre 2015, le service du Ministère de l’intérieur du district Alaïsky a été saisi d’une requête par A. Bolchevikov, journaliste à la chaîne de télévision Och Pirim TV. Celui-ci y affirmait s’être fait bousculer par B. Adamov, habitant de la localité de Goultcha (district Alaïsky), qui s’était opposé à ce que les élections des députés au Jogorkou Kenech (Parlement) soient filmées.

382.Après examen de la requête, le 7 octobre 2015, le service du Ministère de l’intérieur du district Alaïsky a décidé de classer l’affaire sans suite pour absence de fait constitutif d’infraction. Cette décision était fondée sur le fait qu’A. Bolchevikov avait refusé de se soumettre à une expertise médico-légale et, partant, ne présentait aucune lésion corporelle.

Paragraphe 23 c)

A. Askarov

383.Lors de heurts interethniques survenus entre des personnes d’origines kirghize et ouzbèke, le 12 juin 2010 vers 22 h 00, dans la localité de Bazar-Korgon, environ 400 à 500 personnes d’origine ouzbèke se sont rassemblées au croisement des rues Saïdoullaev et Jalal-Abad, et à peu près autant de personnes d’origine kirghize se sont rassemblées au croisement des rues Jalal-Abad et Abdouraimov. Ces personnes se sont dispersées à l’issue d’une opération d’information effectuée par les responsables des autorités locales et des organes locaux chargés de l’application des lois.

384.Le jour suivant, à savoir le 13 juin 2010, vers 08 h 00, environ 400 à 500 personnes d’origine ouzbèke munies d’armes à feu, de barres de fer, de bâtons et de couteaux se sont à nouveau rassemblées dans la localité de Bazar-Korgon, sur un pont situé sur la voie rapide reliant Och à Bichkek, et ont bloqué ladite voie.

385.Là-bas, A. Askarov, directeur de l’organisation de protection des droits de l’homme Vozdoukh (Air), et C. Mirzalimov, stomatologue à la clinique stomatologique de Bazar‑Korgon, ont commencé à insulter publiquement les membres de l’ethnie kirghize en les traitant entre autres de « chiens de kirghizes », incitant ce faisant à l’hostilité ethnique ; ils ont appelé à l’éclatement de troubles civils, et ont encouragé la foule à désobéir activement aux ordres légitimes des représentants des autorités qui s’étaient rendus sur les lieux pour veiller au maintien de l’ordre public et à la sécurité des citoyens. À la suite de ces appels, des membres du groupe ethnique ouzbek ont érigé des barricades improvisées dans les rues de la localité de Bazar-Korgon.

386.Afin de faire cesser les actes délictueux des personnes précitées, une équipe d’enquête opérationnelle de la section des affaires intérieures du district Bazar-Korgonsky, composée de 10 à 15 agents non armés, a été envoyée sur les lieux. Persistant dans ses actes délictueux, A. Askarov a appelé les personnes qui s’étaient rassemblées à « capturer le chef de la police et tuer les autres agents ». Sur les ordres criminels d’A. Askarov, plusieurs hommes d’origine ouzbèke, dont S. Moulavkhounov, I. Abdouraimov, D. Rozoubaev, A. Rozoubaev et M. Youldachev, ont alors attaqué les agents de la section des affaires intérieures du district, infligeant des lésions corporelles à 13 d’entre eux, et ont tué M. Soulaïmanov, membre de l’équipe d’enquête opérationnelle et inspecteur de police de proximité au sein de ladite section, d’une manière particulièrement cruelle. Ils ont ensuite brûlé son cadavre et l’ont abandonné à 100 mètres de la voie rapide, non loin du salon de thé Sakhyl.

387.Le même jour, le bureau du procureur du district Bazar‑Korgonsky s’est saisi de l’affaire et a ouvert une procédure pénale au titre des articles 97 (meurtre), 299 (incitation à l’hostilité ethnique, raciale, religieuse ou régionale), 233 (troubles civils) et 340 (meurtre d’un agent d’un organe chargé de l’application des lois ou d’un militaire) du Code pénal.

388.A. Askarov a été arrêté le 16 juin 2010. Le 17 juin 2010, il s’est vu notifier son inculpation, et un placement en détention provisoire a été ordonné par un tribunal en tant que mesure préventive. Au terme de l’instruction, A. Askarov s’est vu notifier son inculpation au titre des articles 227 (prise d’otages), 241, 2992, 299, 233, 97 et 340 du Code pénal, et l’affaire pénale a été portée à l’examen du tribunal.

389.Le procès s’est tenu dans le tribunal du district Nookensky pour des raisons de sécurité. Par un jugement de ce tribunal en date du 15 septembre 2010, A. Askarov a été condamné à l’emprisonnement à vie. Ce jugement a été confirmé par les décisions de tribunaux d’instance supérieure.

390.Le 25 mai 2012, le bureau du Procureur général a reçu de T. Ismailova, directrice du centre de protection des droits de l’homme Grajdane protiv korrouptsii (Citoyens contre la corruption), une demande de reprise d’instance pour découverte de nouveaux éléments. Dans cette demande, il était indiqué que l’affaire n’avait pas été instruite de façon objective et que, pendant les événements de juin, les 12 et 13 juin 2010, A. Askarov et d’autres personnes avaient prêté assistance aux blessés, en avaient conduits à l’hôpital, et avaient filmé les événements, ce qui pouvait être confirmé par des témoins qui n’avaient pas été interrogés dans le cadre de l’affaire.

391.Par conséquent, le 5 juin 2012, en vue de vérifier ces allégations, le bureau du procureur de la région de Djalal-Abad a ouvert une procédure afin qu’une enquête soit menée sur les nouveaux éléments qui avaient été découverts. Au terme de l’enquête, un non-lieu a été prononcé le 15 juin 2012, les allégations de T. Ismailova n’ayant pas été confirmées.

392.Par ailleurs, le 18 février 2013, le bureau du Procureur général a reçu du Ministère des affaires étrangères la copie de communications individuelles adressées par A. Askarov, V. Gritsenko, B. Djaparova, l’avocat de N. Toktakounov et A. Abdirasoulova au Comité des droits de l’homme de l’ONU au titre du premier Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, dans lesquelles il était notamment allégué que l’enquête concernant A. Askarov n’avait pas été menée de façon objective, que sa condamnation était illégale, qu’il n’avait pas commis les actes qui lui étaient reprochés et qu’il avait subi des actes de torture.

393.Le 6 mai 2013, afin qu’il soit procédé à une enquête objective sur les allégations figurant dans les communications individuelles d’A. Askarov et des autres personnes, et dans un souci d’exhaustivité, le bureau du Procureur général a annulé la décision précitée qui avait été rendue le 15 juin 2012 par le bureau du procureur de la région de Djalal-Abad, et a repris l’instance pour découverte de nouveaux éléments.

394.Toutefois, les informations selon lesquelles A. Askarov avait été « battu » et « torturé » par des policiers émanaient du seul intéressé, et rien ni personne ne les a confirmées. Presque toutes les allégations faites par A. Askarov, même celles qui n’avaient pas trait à la teneur de l’inculpation, étaient infondées.

395.Toutes les allégations figurant dans les communications ont donc été minutieusement vérifiées au cours de l’enquête. Celle-ci n’a pas permis de mettre en évidence des motifs sur lesquels la Cour suprême aurait pu s’appuyer pour ordonner, conformément aux dispositions de l’article 384 du Code de procédure pénale, une reprise de l’instance pénale pour découverte de nouveaux éléments.

396.Au terme de l’enquête, le 5 février 2014, un non-lieu a à nouveau été prononcé dans le cadre de la procédure de reprise d’instance pour découverte de nouveaux éléments.

397.En novembre 2012, les avocats d’A. Askarov ont déposé plainte auprès du Comité des droits de l’homme de l’ONU au titre du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques. En avril 2016, le Comité des droits de l’homme de l’ONU a adopté ses constatations (2231/2012), indiquant que des dispositions des articles 2, 7, 9, 10 et 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques avaient été violées.

398.Dès lors, le 11 juillet 2016, la Cour suprême a commencé d’examiner l’affaire pénale concernant A. Askarov à la lumière des faits nouveaux, en se fondant sur une requête formulée par le condamné lui-même et sur la décision rendue à ce sujet par le Comité des droits de l’homme de l’ONU. L’affaire a été examinée publiquement, et l’audience a vu la participation de défenseurs des droits de l’homme, d’observateurs internationaux et de représentants de plusieurs organisations et médias internationaux. Le 12 juillet 2016, la Cour suprême a annulé la décision qu’elle avait rendue, ainsi que la décision judiciaire qui avait été prise en deuxième instance dans l’affaire A. Askarov, et a renvoyé celle-ci devant le tribunal régional de Tchouïsk pour qu’il statue à nouveau sur celle-ci.

399.Le procès s’est tenu publiquement en présence de représentants de toutes les ambassades présentes sur le territoire kirghize, et de représentants d’organisations internationales et de journalistes qui avaient exprimé le souhait d’y assister. Le Médiateur (Akyikatchy) a également assisté au procès. Celui-ci a été couvert dans son intégralité par des médias et des portails d’information en ligne. Parmi les membres du ministère public figurait S. Kamolidinov (d’origine ouzbèke), procureur principal de la direction du bureau du Procureur général.

400.Au cours du procès, les déclarations des témoins et des victimes, les rapports d’expertise et les preuves matérielles ont permis d’établir pleinement la culpabilité d’A. Askarov. Les allégations du prévenu selon lesquelles il avait été torturé pendant l’instruction ont été examinées par le tribunal et n’ont pas été confirmées. Les lésions corporelles que présentait A. Askarov avaient été infligées par M. Makhmoudjanov (d’origine ouzbèke) alors qu’ils partageaient la même cellule d’internement administratif. A. Askarov n’a pas été en mesure de réfuter les déclarations faites au tribunal par M. Makhmoudjanov, qui a affirmé avoir causé ces lésions. Selon un rapport d’expertise médico-légale, les lésions avaient été infligées à A. Askarov pendant un intervalle de temps correspondant au moment où M. Makhmoudjanov l’avait frappé.

401.Le 24 janvier 2017, le tribunal régional de Tchouïnsk a à nouveau reconnu A. Askarov coupable d’incitation à l’hostilité ethnique et du meurtre du policier M. Soulaïmanov, confirmant ainsi le jugement du 15 septembre 2010 par lequel le tribunal du district Bazar‑Korgonsky avait condamné A. Askarov à l’emprisonnement à vie. À ce jour, il n’a pas été fait appel de la décision rendue par le tribunal régional de Tchouïnsk.

402.Condamné à l’emprisonnement à vie, A. Askarov fait actuellement l’objet d’un suivi médical dans l’établissement no 21 du Service d’État chargé de l’exécution des peines, au titre des diagnostics suivants : coronaropathie, cardiosclérose athérosclérotique, angor d’effort, cardiopathie fonctionnelle de classe II-III, polyarthrite et ostéochondrose de la colonne vertébrale.

403.L’état de santé d’A. Askarov est satisfaisant ; il est placé sous la surveillance du personnel médical de l’établissement no 21 du Service d’État chargé de l’exécution des peines et reçoit un traitement symptomatique régulier.

Renseignements sur l’agression de T. Tomina et d’autres défenseurs et les menaces proférées lors de procès pénaux liés aux événements survenus en 2010 à Och

404.Pendant les tragiques événements d’Och, B. Aïdarov et B. Baïkichiev, agents de la Direction des affaires intérieures de la ville d’Och, ont disparu le 14 juin 2010 alors qu’ils étaient dans l’exercice de leurs fonctions. Plus tard, le 2 juillet 2010, leurs corps ont été trouvés enterrés dans le sous-sol d’une maison inachevée située au numéro 168 de la rue Mominov. Ils présentaient de nombreuses blessures infligées par arme blanche.

405.En conséquence, une procédure pénale a été ouverte le 18 juin 2010. Au terme de l’enquête, plusieurs personnes, dont S. Nizamkhodjaev, N. Kassymov, S. Oumarov et J. Djouraev se sont vu notifier leur inculpation pour meurtre, troubles civils et destruction de biens d’autrui. L’affaire pénale a été portée à l’examen du tribunal municipal d’Och le 18 août 2010.

406.Le tribunal a fixé l’examen de cette affaire pénale au 13 octobre 2010 à 14 h 00. À la date et à l’heure prévues, l’inculpé S. Nizamkhodjaev, qui était placé sous contrôle judiciaire, s’est rendu au tribunal en compagnie de membres de sa famille proche, afin d’y comparaître. Entre 35 et 40 membres des familles des personnes assassinées sont alors venus à sa rencontre et ont soudainement commencé à le frapper, ainsi que les membres de sa famille, à côté de l’entrée de l’unité militaire no 703 du Ministère de l’intérieur, située au numéro 36 de la rue Nourmatov, à Och. La défenseuse D. Tourdieva, qui se trouvait sur les lieux, a tenté de s’interposer. Toutefois, les membres de la famille d’une des personnes assassinées se sont mis à la frapper elle aussi, ce qui l’a contrainte à se mettre à l’écart.

407.Les membres des familles des personnes assassinées n’en sont pas restés là et se sont précipités vers la défenseuse T. Tomina en proférant des menaces. Ils ont commencé à la pousser en direction de la foule et à l’attraper par le coude, ce qui l’a contrainte à se mettre à l’écart à son tour.

408.Il a également été établi qu’au même endroit, les personnes en cause ont commis des actes de vandalisme en frappant M. Kassimov, et en brisant la lunette arrière et une vitre latérale d’une voiture de modèle Daewoo Nubira appartenant à I. Issamidinov.

409.Le même jour, aux environs de 15 h 30, les agents du bureau du procureur de la ville ont reçu de l’hôpital territorial d’Och une communication faisant état de cet incident. Les avocates T. Tomina et D. Tourdieva ont été convoquées devant le procureur de la ville. Au cours de cet entretien, elles ont refusé de se soumettre à un examen médico-légal. Cela étant, leurs requêtes ont été acceptées et une expertise médico-légale a été ordonnée. Le même jour, leurs requêtes ont été transmises à la Direction des affaires intérieures de la ville d’Och afin qu’il soit procédé à des vérifications et à l’adoption d’une décision conformément aux dispositions légales régissant la conduite des procédures pénales.

410.Le 15 octobre 2010, à l’issue des vérifications, la Direction des affaires intérieures de la ville d’Och a engagé une procédure pénale au titre des paragraphes 1 et 4 de l’alinéa 2 de l’article 234 (vandalisme) du Code pénal.

411.L’instruction de l’affaire a été suspendue à plusieurs reprises pour non-identification de l’auteur présumé de l’infraction. La dernière décision de suspension de l’instruction a été rendue le 14 mars 2011.

412.L’avocate T. Tomina a adressé seulement une demande aux services du ministère public de la région, le 26 octobre 2011. Cette demande, motivée par le fait que sa cliente M. Mamadalieva se plaignait de douleurs rénales, tendait à faire transférer celle-ci depuis l’IVS de la section des affaires intérieures de la ville de Tach-Koumyr, où elle avait été placée provisoirement pendant l’examen judiciaire de l’affaire, vers l’IVS du service des affaires intérieures de la ville de Djalal-Abad, où les femmes étaient détenues dans de meilleures conditions. L’avocate ne signalait pas d’actes de torture ou de coups subis par M. Mamadalieva.

413.Plus tard, le 2 décembre 2012, le bureau du procureur de la région de Djalal-Abad a été saisi d’une requête par laquelle les avocats T. Tomina et O. Ousmanov demandaient l’ouverture d’une procédure pénale contre des agents des organes chargés de l’application des lois de cette région, arguant que ces agents avaient recouru à des méthodes d’instruction inadmissibles et à la torture, et avaient porté atteinte aux droits de M. Mamadalieva et E. Rassoulov, qui étaient placés en garde à vue dans le district Bazar-Korgonsky dans le cadre d’une affaire pénale liée à des troubles civils. Cette requête a été portée à l’examen du procureur du district Bazar‑Korgonsky.

414.Le 14 décembre 2012, après vérification de la requête des avocats T. Tomina et O. Ousmanov, le bureau du procureur du district Bazar-Korgonsky a classé l’affaire sans suite une seconde fois, au motif que les agents des services du Ministère de l’intérieur de la région n’avaient pas commis de faits constitutifs d’infraction.

415.Les allégations faites par les défenseurs à propos du fait que T. Tomina n’aurait pas eu la possibilité de s’entretenir en privé avec ses clients, et que ceux-ci auraient été battus de façon quotidienne, n’ont pas été confirmées.

416.Il convient de noter que pendant l’examen de cette affaire pénale, les services du ministère public et les autres organes chargés de l’application des lois n’ont pas reçu de M. Mamadalieva et E. Rassoulov, dont les intérêts étaient représentés par l’avocate T. Tomina, de requête ou de plainte dénonçant un recours à des méthodes d’instruction inadmissibles ou à la torture.

Paragraphe 23 d)

417.En mai 2018, aucune loi dont des dispositions pourraient entraver les activités des organisations et groupes de protection des droits de l’homme n’avait été adoptée en République kirghize.

Paragraphe 23 e)

418.Aucun individu ou groupe ne fait l’objet de poursuites en représailles de sa coopération avec l’ONU ou d’autres organisations ou organismes internationaux, régionaux ou nationaux de protection des droits de l’homme.

Paragraphe 23 f)

419.La République kirghize est en train d’examiner la demande de visite du Rapporteur spécial de l’ONU sur la situation des défenseurs des droits de l’homme dans le pays, et fera connaître la décision qui aura été prise.

Paragraphes 24 a) et b)

420.Par une décision du 25 mars 2015, le Gouvernement a approuvé un plan global de prévention des mauvais traitements et des violences contre les enfants pour 2015-2017, dont la mise en œuvre a été confiée aux responsables des ministères et des administrations, aux représentants plénipotentiaires du Gouvernement dans les régions, ainsi qu’aux responsables des administrations publiques locales et des collectivités locales.

421.Le plan prévoit l’adoption de mesures visant la réalisation des objectifs ci-après : conduire une campagne nationale d’information et de sensibilisation aux fins de la prévention des mauvais traitements et des violences contre les enfants ; organiser des travaux aux fins du repérage rapide des familles et des enfants en difficulté ; accroître l’efficacité de l’action des organes de l’État et des collectivités locales en ce qui concerne la prévention des mauvais traitements et des violences contre les enfants ; garantir l’accès à une assistance dans les cas de mauvais traitements et de violences contre les enfants, et accroître l’efficacité de cette assistance.

422.Par une décision gouvernementale du 16 janvier 2014 portant modification de certaines décisions gouvernementales, les dépenses alimentaires réglementaires des établissements sociaux résidentiels ont été doublées à compter de 2014, atteignant 100 soms par jour pour les personnes âgées et les personnes handicapées, et 110 soms par jour pour les enfants handicapés. Afin de veiller à ce que les résidents des établissements sociaux aient accès à tous les médicaments nécessaires, les dépenses réglementaires de médicaments ont été pratiquement doublées à partir du 1er octobre 2015, passant de 6,50 à 12,50 soms pour les personnes âgées, de 6,70 à 12,70 soms pour les personnes handicapées, et de 6,80 à 12,80 soms pour les enfants handicapés.

423.Le Ministère du travail et du développement social est en train d’élaborer, à l’intention des établissements sociaux résidentiels, un projet d’instruction concernant la prévention de la torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants à l’égard des résidents.

424.Aux fins du repérage rapide des enfants victimes de mauvais traitements et de violences, le Gouvernement a approuvé, par une décision du 22 juin 2015, un règlement relatif aux modalités de repérage des enfants et des familles en difficulté.

425.Dans le cadre d’un mémorandum conclu entre le Ministère du travail et du développement social, des collectivités locales et le bureau de l’UNICEF au Kirghizistan, des centres d’assistance psychologique et juridique aux enfants victimes de mauvais traitements et de violences ont été créés dans la localité de Tioup et les villes de Karakol et Talas, afin de permettre aux enfants victimes de mauvais traitements et de violences d’accéder à des services sociaux et à d’autres services. En 2016, ces centres ont fourni des services sociaux à 532 enfants en difficulté, dont des enfants victimes de mauvais traitements et de violences.

426.Depuis 2014, conformément à la loi sur la commande sociale publique, le Ministère du travail et du développement social a contribué au financement de 21 centres fournissant des services sociaux, juridiques et de réadaptation à des enfants en difficulté. Un appui a notamment été apporté aux centres d’accueil d’urgence Sezim (ville de Bichkek) et Ak‑Jourok (ville d’Och). En 2017, il était prévu de contribuer à leur financement à hauteur d’au moins 5 %. Il convient de noter que les dépenses prévues au titre de la commande publique, qui étaient de 4 320 soms en 2008, ont atteint 22 500 soms en 2015.

427.En outre, le pays compte 35 centres qui ont été créés sous le statut d’organisation à but non lucratif et fournissent des services sociaux et de réadaptation à des enfants en difficulté, ainsi que 13 centres d’accueil d’urgence pour femmes.

428.Aux fins de la qualité des services de garde fournis aux enfants en difficulté par les établissements de placement pour enfants, le Ministère du travail et du développement social a accrédité 13 établissements comme respectant les normes minimales relatives à la garde, à l’éducation et à la socialisation des enfants placés dans les établissements fournissant des services sociaux aux enfants en difficulté.

429.Afin de réagir rapidement aux actes de mauvais traitement et de violence contre les enfants et dans les familles, et en vue de fournir une aide d’urgence en temps voulu, un centre d’appel a été créé pour gérer la ligne 111 d’assistance téléphonique pour l’enfance ; il s’agit d’un organisme public rattaché au Ministère du travail et du développement social. En 2016, le centre d’appel de la ligne 111 a reçu 711 appels, dont 575 ont été passés par des adultes et 136 par des enfants. Parmi ces communications, 485 ont donné lieu à la formulation de conseils et de recommandations, et 226 ont été transmises pour suite à donner aux organes compétents, en fonction de leur nature.

Paragraphes 25 a), b) et c)

430.Voir paragraphes 5, 17 (b, c, d, e, f, g et h) et 18 (a, b et c).

Paragraphe 25 d)

Z. Tokhtonazarova

431.Dans la nuit du 9 septembre 2005, Z. Tokhtonazarova et E. Mamajanova se sont introduites dans le kiosque d’A. Osmonova et y ont volé des objets d’une valeur de 1 580 soms. En conséquence, le service des affaires intérieures du district Bazar‑Korgonsky a engagé une procédure pénale le 11 septembre 2005. Au terme de l’enquête, l’affaire a été portée à l’examen du tribunal.

432.En outre, le 15 juin 2005, Z. Tokhtonazarova a volé chez O. Mirzaeva, son ex‑belle‑mère, un chiot d’une valeur de 50 dollars des États-Unis, 5 poules, 1 paire d’espadrilles et 1 magnétophone. En conséquence, le service des affaires intérieures du district Bazar‑Korgonsky a engagé une autre procédure pénale le 18 novembre 2005. L’instruction de cette affaire a cependant été suspendue pour non-détermination du lieu où se trouvait Z. Tokhtonazarova.

433.L’instruction a été reprise le 14 janvier 2006 ; elle a été achevée le 24 février 2006 et l’affaire pénale a été portée à l’examen du tribunal du district Bazar-Korgonsky.

434.Le 15 mai 2006, les inculpées Z. Tokhtonazarova et E. Mamajanova ayant failli à comparaître, le tribunal a ordonné qu’elles soient recherchées, et placées en détention provisoire à titre de mesure préventive de substitution.

435.Le 16 juin 2006, Z. Tokhtonazarova et Е. Mamajanova ont été arrêtées et conduites à l’IVS de la section des affaires intérieures du district Nookensky.

436.Par un jugement du 21 juillet 2006, le tribunal du district Bazar-Korgonsky a condamné Z. Tokhtonazarova à cinq ans de privation de liberté pour vol, et E. Mamajanova à un an de privation de liberté avec sursis.

437.Le 16 octobre 2005, le bureau du procureur du district Bazar-Korgonsky a été saisi d’une requête présentée par l’organisation de protection des droits de l’homme Vozdoukh au nom de Z. Tokhtonazarova. Il y était affirmé que celle-ci avait été battue et violée par M. Jamankoulov, agent d’instruction à la section des affaires intérieures du même district. Le 10 avril 2006, Z. Tokhtonazarova a déposé une requête similaire en son nom propre.

438.Par ailleurs, l’organisation de protection des droits de l’homme Vozdoukh a fait paraître, dans son bulletin mensuel Pravo dlya vsekh (no 3, mars 2006), un article intitulé « Gorbatogo moguila ispravit » (Bois tordu ne se redresse pas) qui avait été écrit par le défenseur des droits de l’homme A. Askarov. Ce dernier s’y faisait l’écho de faits qui avaient été rapportés dans un article du journal Kyrgyz Roukhou (26 octobre 2003) intitulé « Mentter tirouou tovardy kantchaga satychat?, je IVStegui seksoualdyk koultchoulouk » et dans des articles du bulletin mensuel intitulés « Bit ili ne bit, vot v tchem vopros » (Battre ou ne pas battre, telle est la question) (no 9, mars 2003) et « Kto vinovat v smerti novorojdennogo? » (Qui a causé la mort du nourrisson ?) (no 18, septembre 2003).

439.A. Askarov, rédacteur en chef du bulletin précité, rapportait dans son article que le 9 septembre 2005, Z. Tokhtonazarova avait été arrêtée par des agents de la section des affaires intérieures du district Bazar-Korgonsky et placée en IVS, où elle était restée jusqu’au 16 septembre 2005 sans l’autorisation du procureur. Il indiquait également que l’agent d’instruction M. Jamankoulov l’avait injuriée sur tous les tons et forcée à avouer des actes qu’elle n’avait pas commis, l’avait menacée de lui jeter de l’eau bouillante, et lui avait par sept fois enfoncé des aiguilles sous les ongles.

440.En outre, le 4 avril 2006, l’agence de presse ouzbèke Fergana a publié sur son site Internet un article intitulé « Prava tcheloveka: Popav v SIZO na yougue Kirguizii, mojno zaberemenet, rodit, pokhoronit rebenka i byt podvergnoutym pytkam » (Droits de l’homme : dans un SIZO du sud du Kirghizistan, on peut tomber enceinte, accoucher, enterrer son enfant et être torturée).

441.Comme suite à la publication d’informations faisant état d’une violation présumée de la loi, et à des fins d’objectivité et d’exhaustivité, le procureur du district Bazar‑Korgonsky a ouvert une procédure pénale le 13 avril 2006 au titre du paragraphe 3 de l’alinéa 2 de l’article 305 (abus d’autorité) du Code pénal.

442.De plus, le 2 mai 2006, dans le contexte de la publication en ligne de l’article en cause, F. Koulov, Premier Ministre d’alors, a pris un arrêté qui a entraîné la création d’une commission chargée de vérifier les informations publiées par les médias en ligne. Les membres de cette commission étaient K. Ibraimov, président de la commission et chef de la direction de la sécurité publique auprès du Ministère de l’intérieur, T. Tchalov, inspecteur principal au sein de ladite direction, et B. Karatalov, responsable de la section chargée des affaires de défense et de maintien de l’ordre auprès du Cabinet du Premier Ministre.

443.La commission en question a effectué des vérifications sur place, en se rendant dans le district Bazar‑Korgonsky. Ces vérifications n’ont pas permis de confirmer les informations qui avaient été publiées dans le bulletin Pravo dlya vsekh ; leurs résultats ont été communiqués au bureau du procureur du district afin d’être versés au dossier pénal.

444.Pendant qu’il était procédé aux vérifications, l’auteur A. Askarov s’est soustrait à tout entretien avec les membres de la commission, en invoquant diverses raisons.

445.Plus tard, le 5 avril 2006, le procureur du district Bazar-Korgonsky a reçu la copie d’une requête qui avait été adressée au Procureur général de la République kirghize au nom de Z. Tokhtonazarova. Le bureau du procureur du district a enregistré ladite requête. Le 7 avril 2006, Z. Tokhtonazarova a été convoquée et, en présence de sa mère, a fait les déclarations suivantes : elle avait communiqué avec le journaliste A. Askarov à une seule reprise, en septembre 2005, au sujet des coups portés par l’agent d’instruction M. Jamankoulov ; elle n’avait pas écrit les autres requêtes qui avaient été adressées au Procureur général ; les signatures n’étaient pas les siennes ; la requête avait été tapée en kirghize à la machine à écrire alors qu’elle ne maîtrisait pas cette langue et ne possédait pas une telle machine.

446.Selon un rapport d’expertise judiciaire graphologique en date du 5 juillet 2006, la signature figurant sur la requête du 5 avril 2006, qui avait été écrite au nom de Z. Tokhotonazarova à l’intention du Procureur général et du procureur du district Bazar‑Korgonsky, avait été apposée par une autre personne.

447.Les agents d’instruction de la section des affaires intérieures du district Bazar‑Korgonsky qui avaient mené l’enquête dans le cadre des procédures pénales concernant Z. Tokhtonazarova, à savoir A. Abdykalykova et M. Jamankoulov, ont démontré que tous les actes d’instruction qui avaient été conduits à l’égard de Z. Tokhtonazarova avaient été accomplis conformément à la loi et sans qu’il soit fait usage de la moindre violence, et qu’en présence de son avocat, l’intéressée avait pleinement reconnu avoir commis les faits qui lui étaient reprochés.

448.A. Askarov, interrogé en qualité de témoin dans l’affaire, a affirmé s’être fondé sur des propos tenus par Z. Tokhtonazarova elle-même pour publier les informations selon lesquelles elle avait été frappée par les agents d’instruction A. Abdykalykova et M. Jamankoulov et avait fait l’objet d’actes de violence commis par des policiers.

449.Les allégations figurant dans l’article écrit par A. Askarov, dans les autres articles et dans les requêtes présentées au nom de Z. Tokhtonazarova, à propos du fait que celle-ci aurait subi des actes illicites dans un IVS et aurait été frappée et violée dans une cellule de cet IVS, ont ainsi été entièrement démenties par les résultats de l’instruction. Un non-lieu a été prononcé le 21 juillet 2006, au terme de l’instruction, pour absence de fait constitutif d’infraction.

Paragraphe 25 e)

450.Jusqu’à présent, le pouvoir législatif n’a adopté aucune loi régissant les rapports juridiques relatifs à l’apologie des orientations sexuelles non traditionnelles.

Paragraphe 26

451.En mai 2018, 17 ONG du réseau ou coalition contre la torture menaient des activités de surveillance relatives à la torture et aux autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, et plus de 15 centres d’accueil d’urgence apportaient une assistance aux victimes de violence contre les enfants et de violence familiale, sexuelle et sexiste. En outre, conformément à la loi du 21 juillet 2008 sur la commande sociale publique, 14 centres de services sociaux aux enfants en difficulté ont été créés entre 2014 et 2016.

Paragraphe 27

452.La loi sur la lutte contre le terrorisme, qui est en vigueur depuis le 8 novembre 2006, définit les éléments ci-après : principes fondamentaux de la lutte contre le terrorisme ; cadre organisationnel et juridique de la prévention du terrorisme et de la lutte contre celui-ci ; atténuation maximale des conséquences du terrorisme ; modalités de la coordination de l’action des organes de l’État engagés dans la lutte contre le terrorisme ; droits et obligations des personnes physiques et des personnes morales, tous régimes de propriété confondus, en matière de lutte contre le terrorisme ; modalités de la coopération internationale dans le domaine de la lutte contre le terrorisme.

453.Le cadre juridique de la lutte contre le terrorisme comprend la Constitution, le Code pénal, le Code de procédure pénale et d’autres instruments normatifs, les accords internationaux auxquels la République kirghize est partie et qui sont entrés en vigueur selon les modalités prévues par la loi, ainsi que les principes et normes universellement reconnus du droit international.

454.L’organe chargé de la lutte contre le terrorisme est le Comité d’État à la sécurité nationale. Il coordonne l’action des organes de l’État engagés dans la lutte contre le terrorisme, afin d’assurer la cohérence des activités que ces derniers mènent pour prévenir, détecter et réprimer les actes terroristes, et identifier et éliminer les causes et circonstances favorisant la préparation et la commission d’actes terroristes. Le président de l’organe chargé de la sécurité nationale est personnellement responsable de la coordination de l’action des organes de l’État.

455.Afin de perfectionner le cadre législatif de la lutte contre le terrorisme, des dispositions ont été modifiées et/ou ajoutées les 6 février 2009, 17 mars 2009, 26 juillet 2011, 29 mai 2013, 27 décembre 2013, 2 août 2016 et 13 mai 2017.

Paragraphe 28

456.Les instruments suivants ont été adoptés le 24 janvier 2017 et sont entrés en vigueur le 1er janvier 2019 : nouveau Code pénal ; nouveau Code de procédure pénale ; nouveau Code d’application des peines ; nouveau Code des infractions mineures ; loi sur les fondements et les modalités de l’amnistie.

457.Des activités de grande ampleur sont actuellement menées dans tout le pays pour informer le public de l’entrée en vigueur de ces instruments, et pour former les agents des organes chargés de l’application des lois, de l’administration de la justice et de la gestion du système pénitentiaire.