Observations finales concernant le dixième rapport périodique du Portugal *

Le Comité a examiné le dixième rapport périodique du Portugal (CEDAW/C/PRT/10) à ses 1881e et 1883e séances (voir CEDAW/C/SR.1881 et CEDAW/C/SR.1883), les 14 et 15 juin 2022. La liste de points et de questions établie par le groupe de travail de présession figure dans le document CEDAW/C/PRT/Q/10 et les réponses du Portugal, dans le document CEDAW/C/PRT/RQ/10.

A.Introduction

Le Comité sait gré à l’État partie d’avoir soumis son dixième rapport périodique. Il le remercie de son rapport sur la suite donnée aux précédentes observations finales du Comité (CEDAW/C/PRT/CO/8-9/Add.1) et des réponses écrites apportées à la liste de points et de questions établie par le groupe de travail de présession au sujet du dixième rapport périodique. Il remercie également la délégation pour sa présentation orale et les clarifications apportées par écrit en réponse aux questions posées oralement par le Comité dans le cadre du dialogue.

Le Comité remercie l’État partie d’avoir envoyé une délégation de haut niveau conduite par la Secrétaire d’État à l’égalité et aux migrations, Isabel Almeida Rodrigues, et comprenant des représentants de multiples administrations, dont des représentants du Ministère de la présidence, du Ministère des affaires étrangères, du Ministère de l’intérieur, du Ministère de la justice, du Ministère des affaires parlementaires, du Ministère de l’éducation, du Ministère des sciences, de la technologie et de l’enseignement supérieur, du Ministère du travail, de la solidarité et de la sécurité sociale, du Ministère de la santé, du Ministère des infrastructures et du logement, du Ministère de l’agriculture et de l’alimentation et de la Mission permanente du Portugal auprès de l’Office des Nations Unies et des autres organisations internationales à Genève.

B.Aspects positifs

Le Comité salue les progrès accomplis sur le front des réformes législatives depuis l’examen, en 2015, du rapport de l’État partie valant septième et huitième rapports périodiques (CEDAW/C/PRT/8-9), et notamment de l’adoption des textes suivants :

a)Loi no 110/2019, établissant les principes, les droits et les obligations applicables en matière de protection lors de la préconception, de la procréation médicalement assistée, de la grossesse, de l’accouchement et de la période puerpérale (septembre 2019) ;

b)Loi no 101/2019, inscrivant en droit portugais la définition du viol, des relations sexuelles sous contrainte et du harcèlement sexuel figurant dans la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (Convention d’Istanbul) (septembre 2019) ;

c)Loi no 100/2019, portant création du statut de proche aidant, fixant les droits et les obligations de l’aidant et de la personne aidée et prévoyant des mesures de soutien (septembre 2019) ;

d)Loi no 85/2019, supprimant les délais d’attente à respecter avant de se remarier après dissolution d’un mariage, qui étaient de durées différentes pour les femmes et les hommes (septembre 2019) ;

e)Loi no 26/2019, établissant un quota minimum de 40 % pour la représentation des femmes aux postes de direction dans l’administration publique, dans les établissements publics d’enseignement supérieur et dans les associations publiques (mars 2019) ;

f)Loi no 1/2019, portant de 33,3 % à 40 % le quota minimum de candidates sur les listes électorales pour les élections à l’Assemblée de la République, au Parlement européen, aux conseils municipaux et aux conseils paroissiaux (mars 2019) ;

g)Loi no 60/2018, visant à promouvoir l’égalité de rémunération entre les femmes et les hommes pour un travail égal ou de valeur égale (août 2018) ;

h)Loi no 49/2018, portant création du régime juridique du « Maior Acompanhado » pour les personnes qui, pour des raisons de santé ou de handicap, ont besoin d’une assistance pour exercer leurs droits ou accomplir leurs devoirs pleinement et en connaissance de cause et supprimant les régimes d’interdiction et d’incapacité (août 2018) ;

i)Loi no 38/2018, sur les droits des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres et intersexes (août 2018) ;

j)Loi no 4/2018, instaurant le régime juridique des évaluations de l’incidences des actes normatifs en fonction du genre (février 2018) ;

k)Loi no 93/2017, sur la prévention et l’interdiction de la discrimination fondée sur l’origine raciale et ethnique, la couleur, la nationalité, l’ascendance ou le lieu d’origine, et la lutte contre ces formes de discrimination (août 2017) ;

l)Loi no 62/2017, fixant un quota minimum de représentation des femmes dans les conseils d’administration et les organes d’audit des entreprises publiques et cotées en bourse (août 2017) ;

m)Loi no 17/2016, élargissant l’accès à la procréation médicalement assistée à toutes les femmes, indépendamment du diagnostic de stérilité, de l’état civil ou de l’orientation sexuelle, y compris aux couples de femmes (juin 2016) ;

n)Loi no 3/2016, abrogeant les lois nos 134/2015 et 136/2015 et supprimant les frais à la charge de la patiente en cas d’interruption volontaire de grossesse (février 2016) ;

o)Loi no 2/2016, éliminant les obstacles juridiques à l’adoption, au parrainage civil et à toute autre forme de relation familiale légale pour des couples de même sexe (février 2016).

Le Comité salue les efforts faits par l’État partie pour améliorer son cadre institutionnel et stratégique en vue d’accélérer l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et de promouvoir l’égalité des genres, notamment l’adoption des textes suivants :

a)Stratégie nationale pour l’inclusion des personnes handicapées pour la période 2021-2025 (2021) ;

b)Stratégie nationale de lutte contre la pauvreté pour la période 2021-2030 (2021) ;

c)Plan sectoriel de la défense nationale pour l’égalité (2019) ;

d)Quatrième plan d’action national de lutte contre la traite des êtres humains, pour la période 2018-2021 (2018) ;

e)Stratégie nationale pour l’égalité et la non-discrimination pour la période 2018-2030, « Portugal mais Igual », qui comprend trois plans d’action : garantir l’égalité entre les femmes et les hommes ; prévenir et combattre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique ; lutter contre la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle, l’identité de genre, l’expression du genre et les caractères sexuels (2018).

C.Objectifs de développement durable

Le Comité se félicite de l ’ appui international à la réalisation des objectifs de développement durable et appelle à la concrétisation de jure (dans la loi) et de facto (dans les faits) de l ’ égalité entre les genres, conformément aux dispositions de la Convention, dans le cadre du processus de mise en œuvre du Programme de développement durable à l ’ horizon 2030. Il rappelle l ’ importance de l ’ objectif 5 et du respect des principes d ’ égalité et de non-discrimination dans le cadre des 17 objectifs. Il encourage vivement l ’ État partie à reconnaître le rôle moteur des femmes dans le développement durable et à adopter des politiques et des stratégies en conséquence.

D.Parlement

Le Comité souligne que le pouvoir législatif a un rôle central à jouer dans la pleine mise en œuvre de la Convention (voir A/65/38 , partie 2, annexe VI). Il invite l ’ Assemblée de la République à prendre, dans le cadre de son mandat, les mesures nécessaires pour donner suite aux présentes observations finales avant la soumission du prochain rapport périodique, en application de la Convention.

E.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Application de la Convention dans les régions autonomes des Açores et de Madère

Le Comité constate avec préoccupation qu’aucun progrès n’a été réalisé pour appliquer la Convention dans les régions autonomes des Açores et de Madère, pour tous les domaines visés par la Convention. Il constate également avec préoccupation que la loi relative à la parité (loi no 1/2019) n’est pas appliquée aux élections à l’Assemblée législative de la région autonome de Madère et qu’il n’existe pas dans cette région de Direction régionale à l’égalité.

Le Comité renouvelle ses précédentes recommandations ( CEDAW/C/PRT/CO/8-9 , par. 11) et rappelle à l ’ État partie l ’ obligation qui lui incombe d ’ appliquer la Convention sur l ’ ensemble de son territoire, y compris les régions autonomes des Açores et de Madère. Il recommande à l ’ État partie de veiller à l ’ application de la loi sur la parité lors de toutes ses élections, y compris dans la région autonome de Madère, et de créer à Madère une Direction régionale à l ’ égalité dotée de ressources humaines, techniques et financières suffisantes.

Définition de l’égalité et de la non-discrimination

Le Comité constate avec satisfaction que l’État partie a adopté des lois et des stratégies de lutte contre la discrimination fondée sur le genre (loi no 38/2018, loi no 4/2018 et stratégie nationale pour l’égalité et la non-discrimination pour la période 2018-2030) et salue les mesures prises pour introduire les concepts de « formes multiples de discrimination » et de « discrimination par association » dans sa législation (loi no 93/2017) et pour accorder la priorité à la prévention des différentes formes de violence et de discrimination. Il est toutefois préoccupé en particulier par ce qui suit :

a)La Convention, le Protocole facultatif s’y rapportant et les recommandations générales du Comité sont encore insuffisamment connus, ne sont pas invoqués en justice, quel que soit le niveau de juridiction, et ne font l’objet d’aucune formation ;

b)La législation et les stratégies relatives à l’égalité des genres et à la promotion des femmes ne font l’objet d’aucune évaluation qui viserait à s’assurer que l’égalité de fait est instaurée dans tous les domaines couverts par la Convention, en particulier celui concernant la discrimination directe et indirecte ;

c)L’approche adoptée dans la législation et les stratégies entrave les efforts visant à combattre la discrimination de fait dont souffrent les femmes dans tous les domaines couverts par la Convention ;

d)Aucune mesure spécifique n’a été prise pour garantir la pleine et égale participation des femmes au plan de reconstruction faisant suite à la pandémie de maladie à coronavirus (COVID-19) et aux fonds de relance et de résilience mis en place par l’État partie pour lutter contre les répercussions négatives de la pandémie de COVID-19, conformément à la vision stratégique qui préside au Plan de relance économique 2020-2030.

Le Comité engage vivement l ’ État partie à :

a) Prendre toutes les mesures nécessaires pour que la Convention, le Protocole facultatif s ’ y rapportant et les recommandations générales du Comité soient bien connus de l ’ ensemble de la société, en particulier des femmes, dispenser une formation systématique sur les droits des femmes au personnel de l ’ administration de la justice et veiller à ce que la Convention, les recommandations générales du Comité et la jurisprudence que celui-ci a établie relativement au Protocole facultatif soient suffisamment connues et appliquées par le système judiciaire ;

b) Évaluer la législation et les stratégies relatives à l ’ égalité des genres et à la promotion des femmes afin de s ’ assurer que l ’ égalité de fait est instaurée dans tous les domaines couverts par la Convention, en particulier celui concernant la discrimination directe et indirecte ;

c) Veiller à ce que la discrimination à l ’ égard des femmes et ses formes aggravées et croisées soient dûment prises en compte dans la législation et les stratégies de l ’ État partie relatives à tous les domaines couverts par la Convention, dans l ’ intérêt des femmes en situation de vulnérabilité ;

d) S ’ assurer, conformément à la note d ’ orientation sur les obligations des États parties à la Convention dans le contexte de la pandémie de COVID-19, publiée le 22 avril 2020, et à la vision stratégique qui préside au Plan de relance économique 2020-2030 de l ’ État partie, que les fonds de relance et de résilience de celui-ci comprennent des mesures ciblant particulièrement les femmes, affecter un budget suffisant à la mise en œuvre de ces mesures et assurer la pleine participation des femmes au plan de relance faisant suite à la pandémie.

Accès des femmes à la justice

Le Comité note qu’en vertu de la loi no 34/2004, les victimes de violences domestiques et les personnes rescapées de viol, de relations sexuelles sous contrainte, de mutilations génitales féminines et de traite sont exonérées des frais de justice et autres frais associés à la procédure judiciaire et que la Commission pour la protection des victimes de la criminalité offre une compensation financière et un soutien psychologique sur demande. Il constate toutefois avec préoccupation que l’accès à la justice reste entravé par la complexité des procédures et par les conditions d’octroi de l’aide juridictionnelle, en particulier en ce qui concerne les femmes appartenant à des minorités ethniques. Il constate également avec préoccupation que, dans tous les domaines du droit, l’exonération des frais de justice et les services gratuits d’aide juridictionnelle ne sont pas accessibles aux femmes disposant de ressources économiques limitées, notamment à celles qui soumettent des déclarations fiscales annuelles conjointes, et que les femmes ne disposent pas d’informations suffisantes pour faciliter leur dépôt de plainte ou accéder à la justice.

Le Comité demande instamment à l ’ État partie de veiller à ce que toutes les femmes, en particulier celles disposant de ressources limitées et celles appartenant à des groupes défavorisés, aient accès à l ’ aide juridictionnelle, à ce que les procédures administratives soient simplifiées et à ce que les conséquences négatives pour les femmes d ’ une déclaration fiscale conjointe soient réduites au minimum. Le Comité recommande également à l ’ État partie de mettre en œuvre des campagnes de sensibilisation ciblant les femmes des groupes défavorisés, telles que les femmes handicapées, les femmes roms, les femmes migrantes et les femmes âgées, afin de leur donner la capacité de déposer plainte, d ’ accéder à une aide juridictionnelle gratuite et de bénéficier des réparations accordées aux victimes.

Mécanismes nationaux de promotion des femmes et intégration des questions de genre

Le Comité note que la Commission pour la citoyenneté et l’égalité des genres est chargée de veiller à l’application des politiques publiques de promotion de l’égalité des genres et de lutte contre la violence à l’égard des femmes fondée sur le genre et contre la traite des êtres humains. Il est toutefois préoccupé en particulier par ce qui suit :

a)Le nombre croissant de questions thématiques relevant de la Commission et l’absence progressive de mesures pour la promotion des femmes et la promotion des droits humains des femmes dans des conditions d’égalité avec les hommes ;

b)L’insuffisance des dotations budgétaires pour permettre à la Commission de s’acquitter de ses nombreuses missions et le manque de coordination avec le Bureau de la Médiatrice du Portugal, alors même que les deux organes ont pour mandat de recevoir les plaintes pour discrimination et pour violence à l’égard des femmes fondée sur le genre ;

c)L’absence de mécanisme spécial permettant de donner du poids aux organisations de la société civile de défense des femmes et de garantir leur participation véritable à la Commission, même si certaines d’entre elles sont membres de son Conseil consultatif.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De renforcer le mandat de la Commission pour la citoyenneté et l ’ égalité des genres par des mesures en faveur de la promotion des femmes et des droits humains des femmes dans des conditions d ’ égalité avec les hommes ;

b) De doter la Commission de ressources humaines, techniques et financières suffisantes pour lui permettre de s ’ acquitter de son mandat de promotion de l ’ égalité des femmes, de lutte contre la violence à l ’ égard des femmes fondée sur le genre et d ’ intégration des questions de genre, et de désigner un interlocuteur privilégié chargé de la coordination avec le Bureau de la Médiatrice du Portugal en ce qui concerne les plaintes reçues ;

c) D ’ instaurer un mécanisme spécial destiné à donner du poids aux organisations de la société civile de défense des femmes et à garantir leur participation systématique et véritable à la Commission, notamment en leur octroyant des ressources financières, dans le cadre de toutes les initiatives législatives et politiques touchant les femmes.

Mesures temporaires spéciales

Le Comité constate avec satisfaction que des quotas sont désormais prévus dans la législation de l’État partie afin d’accélérer la représentation égale des femmes et des hommes au Parlement et aux postes de décision au Gouvernement, dans les institutions publiques, dans les associations et dans les conseils d’administration des entreprises publiques, comme ceux inscrits dans la loi no 62/2017, la loi no 1/2019 et la loi no 26/2019. Il relève toutefois que, malgré cela, l’État partie ne s’est doté d’aucun système de suivi de l’application de ces quotas et des progrès accomplis, notamment dans les régions autonomes de Madère et des Açores. Il relève également avec inquiétude l’absence de mesures temporaires spéciales, dans la stratégie nationale pour l’égalité et la non-discrimination pour la période 2018-2030 et dans d’autres politiques sectorielles, qui répondent aux besoins des femmes des groupes les plus défavorisés, comme les femmes handicapées, les femmes roms, les femmes migrantes et les femmes âgées.

Conformément à l ’ article 4 (par. 1) de la Convention et à sa recommandation générale n o 25 (2004) sur les mesures temporaires spéciales, le Comité recommande à l ’ État partie de poursuivre ses efforts de mise en place de mesures temporaires spéciales visant à accélérer l ’ instauration d ’ une égalité de fait entre les femmes et les hommes dans la vie politique et publique ou dans tout autre domaine où les femmes restent sous-représentées, assorties d ’ un système de suivi de leur application et des progrès accomplis , y compris dans les régions autonomes de Madère et des Açores. Il recommande également à l ’ État partie d ’ inclure des mesures temporaires spéciales dans sa politique publique d ’ égalité des genres et dans d ’ autres politiques sectorielles afin de répondre aux besoins des femmes des groupes les plus défavorisés, comme les femmes handicapées, les femmes roms, les femmes migrantes et les femmes âgées.

Stéréotypes

Le Comité prend note des efforts déployés par l’État partie pour éliminer les stéréotypes discriminatoires à l’égard des femmes, notamment dans le domaine de l’éducation. Il constate toutefois avec préoccupation la dilution progressive du concept de « sexe » et son remplacement par le concept de « genre » dans les politiques et dans les lois. Il constate également avec préoccupation que l’État partie n’a pas de stratégie globale pour lutter contre les stéréotypes et le sexisme à l’égard des femmes dans les médias et dans le discours politique et public.

Le Comité recommande à l ’ État partie de redoubler d ’ efforts, notamment par des campagnes de sensibilisation du grand public, pour mettre fin aux stéréotypes discriminatoires concernant les rôles et les responsabilités des femmes et des hommes dans la famille et dans la société. Il recommande également à l ’ État partie d ’ éviter d ’ utiliser le concept de « genre » lorsqu ’ il est question des droits des femmes. Il recommande en outre à l ’ État partie de s ’ attaquer aux stéréotypes relatifs aux femmes et aux représentations sexistes des femmes dans les médias et dans le discours politique et public, en instaurant des sanctions adéquates et en dispensant aux professionnels des médias une formation sur les droits des femmes et l ’ égalité entre les femmes et les hommes.

Pratiques préjudiciables

Le Comité constate que les mutilations génitales féminines et le mariage forcé ont été érigés en infractions dans le Code pénal de l’État partie, conformément aux dispositions de la Convention d’Istanbul. Il note toutefois avec inquiétude que la stérilisation forcée, qui est également interdite par la Convention d’Istanbul, n’est pas réprimée par le Code pénal. Il constate également avec préoccupation que seul un faible nombre de cas de mutilations génitales féminines et de mariages forcés ont fait l’objet d’une enquête et que, malgré l’adoption de la loi no 104/2009, portant création du régime de dédommagement des victimes d’infractions violentes et de violences domestiques, aucune demande de dédommagement n’a été présentée depuis 2011.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ ériger expressément en infraction pénale la stérilisation forcée, conformément à l ’ article 39 de la Convention d ’ Istanbul, et de veiller à ce que tous les cas de mutilations génitales féminines, de mariage d ’ enfants, de mariage forcé et de stérilisation non consentie donnent bien lieu à une enquête et à des poursuites. Il recommande également à l ’ État partie de mener des campagnes d ’ information et de sensibilisation ciblant les femmes de groupes défavorisés, comme les femmes handicapées, les femmes roms et les femmes migrantes , afin que les victimes de mutilations génitales féminines, de mariages d ’ enfants, de mariages forcés ou de stérilisation non consentie reçoivent la réparation prévue par le régime de dédommagement des victimes d ’ infractions violentes et de violences domestiques établi par la loi n o  104/2009.

Violence à l’égard des femmes fondée sur le genre

Le Comité prend note de l’adoption de la loi no 55/2020 sur les victimes vulnérables d’infractions violentes, graves et relevant de la criminalité hautement organisée. Il est toutefois préoccupé par l’absence de protocoles tenant compte des questions de genre pour la prise en charge des victimes de la violence à l’égard des femmes fondée sur le genre. Il est préoccupé en particulier par ce qui suit :

a)Le Code pénal ne contient pas de disposition qui érige expressément en infraction la violence à l’égard des femmes fondée sur le genre et il n’existe pas de législation globale qui interdise toutes les formes de violence fondées sur le genre ;

b)Le féminicide n’est pas défini comme une infraction pénale ;

c)Il n’existe que deux cellules de crise pour les victimes de violences sexuelles qui offrent un soutien psychologique et psychosocial spécialisé aux femmes et aux filles victimes de violences sexuelles ;

d)Il n’existe pas de données statistiques complètes sur la violence fondée sur le genre, ventilées par sexe, âge et relation entre la victime et l’auteur des faits ;

e)Aucun mécanisme permanent n’a été mis en place pour assurer une coopération et une coordination efficaces entre les tribunaux des affaires familiales et les tribunaux pénaux afin que les femmes aient un accès immédiat aux ordonnances et injonctions de protection civile contre des partenaires violents.

Rappelant sa recommandation générale n o 35 (2017) sur la violence à l ’ égard des femmes fondée sur le genre, portant actualisation de la recommandation générale n o  19, et compte tenu de la cible 5.2 des objectifs de développement durable, à savoir éliminer de la vie publique et de la vie privée toutes les formes de violence faite aux femmes et aux filles, le Comité prie instamment l ’ État partie :

a) De modifier le Code pénal afin d ’ ériger en infractions toutes les formes de violence à l ’ égard des femmes fondée sur le genre, y compris la violence physique, psychologique, sexuelle, économique et domestique, ainsi que la cyberviolence et le féminicide ;

b) De renforcer les services d ’ appui aux femmes victimes de violences fondées sur le genre afin de répondre à la demande, notamment en veillant à ce qu ’ il y ait un nombre suffisant de cellules de crise, qui disposent des moyens financiers nécessaires et fournissent une assistance juridique et psychosociale aux victimes ;

c) De faire en sorte que soient systématiquement collectées des données statistiques sur toutes les formes de violence fondée sur le genre, ventilées par sexe, âge et relation entre la victime et l ’ auteur des faits ;

d) De donner suite à ses précédentes recommandations [ CEDAW/C/PRT/CO/8-9 , par. 23 (al. c) ] l ’ invitant à mettre en place un mécanisme de coopération et de coordination efficaces entre les tribunaux des affaires familiales et les tribunaux pénaux afin que les femmes puissent accéder immédiatement à des recours tels que les ordonnances et injonctions de protection civile contre des partenaires violents, sans avoir à engager une action en justice.

Traite et exploitation de la prostitution

Le Comité prend note des efforts déployés par l’État partie pour éliminer la traite des femmes et des filles, notamment dans le cadre du quatrième plan national de prévention et de lutte contre la traite des êtres humains (2018-2021). Il demeure toutefois préoccupé par les lacunes existantes en matière d’identification des victimes de la traite, en particulier des femmes et filles portugaises victimes de la traite. Le Comité constate que, si de nombreuses activités de renforcement des capacités et campagnes de sensibilisation à l’intention des professionnels sont en place, et ce depuis plusieurs années, elles ne semblent pas permettre une bonne identification des victimes.

Conformément à sa recommandation générale n o 38 (2020) sur la traite des femmes et des filles dans le contexte des migrations internationales, le Comité recommande à l ’ État partie de mettre en place des mécanismes efficaces d ’ identification précoce et d ’ orientation des victimes vers les services appropriés et de renforcer la protection et la réinsertion des femmes et des filles victimes de la traite, notamment en veillant à ce qu ’ elles ne soient pas poursuivies pour des infractions aux lois sur l ’ immigration et à ce qu ’ elles aient accès à la justice et à des permis de séjour temporaires, indépendamment de leur capacité ou de leur volonté de coopérer avec la justice. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ investir dans l ’ amélioration effective des procédures d ’ identification.

Égale participation à la vie politique et à la vie publique

Le Comité constate que la parité femmes-hommes a été atteinte pour la première fois grâce à la nouvelle composition du Gouvernement de l’État partie. Il salue les efforts législatifs qu’a faits l’État partie pour relever le quota minimum de femmes candidates aux élections législatives et de femmes ayant de hautes responsabilités au Gouvernement, dans les institutions publiques et dans les associations, notamment en adoptant la loi no 1/2019 et la loi no 26/2019. Il relève toutefois avec préoccupation que les effets des mesures de quotas prévues par la nouvelle législation demeurent limités au niveau local, en particulier dans les assemblées paroissiales et municipales, ainsi que dans les conseils municipaux, y compris dans les régions autonomes de Madère et des Açores, et que les sanctions prévues en cas de non-respect de ces quotas ne sont pas suffisamment dissuasives. Il relève également avec préoccupation que l’État partie n’a pas adopté de mesures temporaires spéciales pour aider les femmes à se porter candidates à des fonctions politiques et publiques, et ne s’est pas doté d’un cadre juridique permettant de prévenir et combattre le harcèlement politique.

Conformément à ses précédentes observations finales ( CEDAW/C/PRT/CO/8-9 , par. 31), à sa recommandation générale n o 23 (1997) sur la participation des femmes à la vie politique et publique et à la cible 5.5 des objectifs de développement durable, à savoir veiller à ce que les femmes participent pleinement et effectivement aux fonctions de direction à tous les niveaux de décision, dans la vie politique, économique et publique, et y accèdent sur un pied d ’ égalité , le Comité prie instamment l ’ État partie de poursuivre les efforts qu ’ il fait en vue d ’ accroître la participation des femmes à tous les niveaux de la vie politique et publique dans l ’ État partie. Il recommande en particulier à l ’ État partie :

a) D ’ accroître la représentation des femmes dans la vie politique et publique, en particulier au niveau local et dans les régions autonomes de Madère et des Açores, afin que les femmes et les hommes soient représentés à égalité, et de renforcer les sanctions en cas de non-respect des quotas établis ;

b) De mettre en place, conformément à l ’ article 4 (par. 1) de la Convention et à sa recommandation générale n o  25, des mesures temporaires spéciales destinées à soutenir les femmes candidates à des fonctions politiques et publiques et d ’ adopter d ’ urgence un cadre juridique permettant de prévenir et combattre le harcèlement politique ;

c) D ’ instaurer des mécanismes visant à faire participer davantage à la vie politique et publique les femmes marginalisées, telles que les femmes handicapées, les femmes roms et d ’ autres femmes traditionnellement sous-représentées ;

d) D ’ accroître la participation des femmes aux fonctions dirigeantes au niveau international, notamment en qualité de diplomates et de représentantes d ’ organisations internationales.

Éducation

Le Comité se félicite de l’instauration de mesures incitatives visant à diversifier les filières d’études et les parcours professionnels choisis par les femmes et les filles, et de la récente prédominance des femmes parmi les étudiants. Il constate toutefois avec inquiétude que ces mesures n’ont pas permis d’augmenter le pourcentage de femmes occupant des postes à responsabilité dans la vie politique, la finance et le monde universitaire. Il constate également avec inquiétude que l’éducation sexuelle à l’école, axée sur la prévention des maladies sexuellement transmissibles et des grossesses précoces, n’aborde pas la question des incidences que les rapports sociaux entre les genres et les attitudes patriarcales ont sur la sexualité des femmes et des filles. Il constate également avec inquiétude le faible taux de scolarisation des filles handicapées dans les écoles publiques.

Conformément à sa recommandation générale n o 36 (2017) sur le droit des filles et des femmes à l ’ éducation et à la cible 4.1 des objectifs de développement durable, à savoir, d ’ ici à 2030, faire en sorte que toutes les filles et tous les garçons suivent, sur un pied d ’ égalité, un cycle complet d ’ enseignement primaire et secondaire gratuit et de qualité les dotant d ’ acquis véritablement utiles, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ encourager encore plus les filles et les femmes à choisir des filières d ’ études et des parcours professionnels non traditionnels, en particulier dans les domaines de la science, de la technologie, de l ’ ingénierie et des mathématiques et des technologies de l ’ information et des communications ;

b) De prendre des mesures afin d ’ augmenter le pourcentage de femmes dans le milieu universitaire, notamment par des processus de sélection ciblés et des quotas, et afin de créer des ponts entre l ’ éducation et l ’ industrie ;

c) De modifier les programmes scolaires d ’ éducation sexuelle pour y inclure une perspective de genre et la question des incidences que les relations de pouvoir inégales et les stéréotypes de genre discriminatoires ont sur la sexualité des femmes et des filles et sur leurs choix sexuels et leurs choix en matière procréation ;

d) D ’ augmenter le nombre de programmes et les allocations budgétaires destinés à mettre en place des bourses et des subventions d ’ études ciblant les femmes et les filles handicapées et de veiller à l ’ accessibilité et aux aménagements raisonnables à tous les niveaux dans les écoles de l ’ État partie.

Emploi

Le Comité constate que l’État partie a adopté des mesures législatives et politiques visant à garantir l’égalité d’accès au marché du travail et l’égalité de rémunération entre les femmes et les hommes pour un travail de valeur égale (loi no 60/2018). Il demeure toutefois préoccupé par la persistance dans l’État partie d’un écart de rémunération entre les femmes et les hommes et par le fait que la charge des soins et travaux domestiques non rémunérés continue de peser de manière disproportionnée sur les femmes. Il est également préoccupé par l’absence d’application effective de la législation relative à la prévention du harcèlement sexuel et à la discrimination sur le lieu de travail.

Le Comité attire l ’ attention sur sa recommandation générale n o 13 (1989) sur l ’ égalité de rémunération pour un travail de valeur égale et sur la cible 8.5 des objectifs de développement durable , à savoir , d ’ ici à 2030, parvenir au plein emploi productif et garantir à toutes les femmes et à tous les hommes, y compris les jeunes et les personnes handicapées, un travail décent et un salaire égal pour un travail de valeur égale, et recommande à l ’ État partie  :

a) De redoubler d ’ efforts pour remédier à l ’ écart de rémunération persistant entre les femmes et les hommes en révisant régulièrement les salaires dans les secteurs où les femmes sont concentrées et en adoptant des mesures visant à combler cet écart, notamment en appliquant des méthodes analytiques de classement et d ’ évaluation des emplois qui soient neutres du point de vue du genre et en réalisant régulièrement des enquêtes sur les salaires, et de promouvoir le partage équitable entre les femmes et les hommes des travaux domestiques et des responsabilités parentales, y compris en élargissant le recours au congé de paternité et l ’ accès aux structures de garde d ’ enfants ;

b) De renforcer l ’ application effective des mesures pénales et administratives visant à prévenir le harcèlement sexuel sur le lieu de travail et de proposer des programmes de renforcement des capacités aux juges et des formations aux services de police afin de faciliter l ’ accès effectif aux mesures de protection des victimes de violence sexuelle et de discriminations fondées sur le sexe sur le lieu de travail.

Santé

Le Comité prend note de l’adoption de la loi no 3/2016 relative à l’interruption volontaire de grossesse, qui rend celle-ci gratuite, et de la loi no 17/2016, qui rend la procréation médicalement assistée accessible à toutes les femmes. Toutefois, il constate avec inquiétude l’augmentation du taux de mortalité maternelle et les nombreux cas d’accouchements très médicalisés et de césariennes, parfois sans le consentement libre et éclairé des femmes concernées, ainsi que l’application inégale de la loi sur l’avortement. Il est également préoccupé par le fait que les services de soins obstétricaux d’urgence et de santé mentale ne sont pas accessibles facilement sur tout le territoire de l’État partie, notamment dans les régions autonomes de Madère et des Açores.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De poursuivre ses efforts pour réduire la mortalité maternelle, notamment en évaluant et en enregistrant la cause des décès et en prévoyant des garanties adéquates pour que les procédures d ’ accouchement hautement médicalisées, telles que les césariennes, fassent l ’ objet d ’ une évaluation approfondie et ne soient pratiquées que si elles sont nécessaires et avec le consentement libre et éclairé de la femme concernée, conformément aux recommandations de l ’ Organisation mondiale de la Santé ;

b) De veiller à l ’ application effective de la loi sur l ’ avortement dans toutes les régions et pour toutes les femmes ;

c) De veiller à l ’ accessibilité des services de soins obstétricaux d ’ urgence et des services de santé mentale de proximité sur l ’ ensemble du territoire.

Émancipation économique

Le Comité constate que l’État partie a adopté une stratégie nationale de lutte contre la pauvreté pour la période 2021-2030, une politique du logement nouvelle génération et le programme Radar social pour soutenir les personnes âgées et renforcer les services à domicile. Il constate également que l’État partie a adopté la loi no 100/2019 portant création du statut de « proche aidant », qui régit les droits et obligations de l’aidant et de la personne aidée et prévoit des mesures de soutien. Il relève toutefois avec inquiétude que la loi et les politiques mentionnées ci-dessus ne prévoient pas de mesures concrètes en faveur des femmes et que les femmes se heurtent à des barrières structurelles d’inégalité renforcées par la pandémie de COVID-19, notamment en ce qui concerne l’accès aux prestations familiales, y compris s’agissant des soins, du logement et des crédits financiers.

Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre toutes les mesures nécessaires, par la voie des fonds pour le redressement et la résilience et de l ’ ensemble des lois et des politiques publiques, pour lever les barrières structurelles d ’ inégalité auxquelles se heurtent les femmes en ce qui concerne l ’ accès aux prestations familiales, y compris s ’ agissant des soins, du logement et des crédits financiers. Il recommande également à l ’ État partie, conformément à l ’ article 4 (par. 1) de la Convention et à sa recommandation générale n o  25 , de définir et d ’ appliquer des mesures temporaires spéciales pour garantir l ’ accès des femmes à un logement convenable, en particulier de celles qui appartiennent à des groupes défavorisés comme les femmes handicapées, les femmes roms, les femmes migrantes, les mères célibataires, les jeunes femmes et les femmes âgées, notamment en leur accordant une allocation d ’ aide au logement et un accès prioritaire aux logements publics dans les plans municipaux.

Femmes rurales

Le Comité prend note des programmes de développement rural adoptés par l’État partie destinés à soutenir les projets d’entrepreneuriat menés par des femmes dans les zones rurales, à faciliter l’accès aux prêts et à renforcer le rôle des groupes de femmes sous-représentés dans les associations agricoles. Il constate toutefois avec préoccupation que, dans l’État partie, les femmes rurales ont un accès limité à l’éducation, à l’emploi et aux soins de santé, notamment aux services de santé sexuelle et procréative.

Conformément à sa recommandation générale n o 34 (2016) sur les droits des femmes rurales et à la cible 5.a des objectifs de développement durable, à savoir entreprendre des réformes visant à donner aux femmes les mêmes droits aux ressources économiques, ainsi que l ’ accès à la propriété et au contrôle des terres et d ’ autres formes de propriété, aux services financiers, à l ’ héritage et aux ressources naturelles, dans le respect de la législation interne, le Comité recommande à l ’ État partie de poursuivre ses efforts pour soutenir et financer l ’ entrepreneuriat des femmes rurales et améliorer l ’ accès des femmes rurales à l ’ éducation, à l ’ emploi et aux soins de santé, y compris les services de santé sexuelle et procréative.

Femmes roms

Le Comité prend note de la stratégie nationale pour l’intégration des communautés roms pour la période 2013-2022, qui contient deux mesures spéciales visant à améliorer la participation des femmes et des filles roms à la vie civique, politique et communautaire et à faciliter leur accès au marché du travail et aux activités professionnelles. Il est toutefois préoccupé par le fait que les femmes roms, en particulier celles qui vivent dans des zones rurales, se heurtent à l’exclusion sociale et ont un accès limité à l’éducation, à l’emploi, aux soins de santé et au logement. Il est particulièrement préoccupé par le taux d’abandon scolaire des filles roms en raison des mariages d’enfants, des mariages forcés et des grossesses précoces, souvent ignorés par les autorités.

Le Comité recommande à l ’ État partie de redoubler d ’ efforts dans le cadre de la future politique nationale d ’ intégration des communautés roms pour faire en sorte que les femmes roms aient un accès adéquat à l ’ éducation, à l ’ emploi, aux soins de santé et au logement. Il recommande également à l ’ État partie de prendre d ’ urgence des mesures axées sur les filles roms afin de prévenir et de réduire les mariages d ’ enfants, les mariages forcés et les grossesses précoces, et d ’ encourager leur maintien dans le système éducatif, notamment en leur offrant des bourses d ’ études, des programmes d ’ éducation sexuelle et un accès aux services de planification familiale, et de prendre des mesures pour sensibiliser la communauté rom aux effets néfastes du mariage d ’ enfants et de l ’ union précoce.

Femmes handicapées

Le Comité se félicite de l’adoption de la loi no 49/2018 portant création du régime juridique du « Maior Acompanhado », qui abolit les procédures d’interdiction et d’incapacité visant les personnes handicapées et garantit le droit de se marier ou de former des unions de fait, le droit à la procréation, le droit à l’adoption et le droit à la garde des enfants. Il constate également l’adoption de la stratégie nationale pour l’inclusion des personnes handicapées pour la période 2021-2025, qui confie notamment au Réseau national d’aide aux victimes de la violence domestique le soin d’apporter des réponses ciblées aux femmes handicapées qui le consultent. Il est toutefois préoccupé par ce qui suit :

a)Bien que 20,6 % des femmes de l’État partie soient handicapées, aucune mesure n’a été prise pour réduire l’inégalité structurelle à laquelle se heurtent ces femmes dans l’accès à l’éducation, au marché du travail, aux soins de santé, aux programmes d’émancipation économique et aux prestations familiales, entre autres domaines ;

b)On compte actuellement 110 femmes handicapées qui résident en hôpital psychiatrique et 1 694 autres qui vivent dans des établissements de services sociaux gérés par un ordre religieux ;

c)Les femmes et les filles handicapées sont particulièrement exposées au risque de subir une stérilisation forcée pratiquée sous le prétexte de soins médicaux légitimes ou avec le consentement de personnes parlant en leur nom.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De prendre toutes les mesures nécessaires pour réduire l ’ inégalité structurelle qui défavorise les femmes et les filles handicapées dans l ’ accès à l ’ éducation, au marché du travail, aux soins de santé, aux programmes d ’ émancipation économique et aux prestations familiales, entre autres domaines, et de garantir la consultation et la participation effectives des femmes handicapées, en particulier au Conseil consultatif de la Commission pour la citoyenneté et l ’ égalité des sexes ;

b) D ’ adopter des mesures efficaces destinées à garantir le droit des femmes handicapées de vivre dans la société, de s ’ y intégrer et d ’ y participer pleinement, en veillant en particulier à ce qu ’ elles aient la possibilité de choisir où et avec qui elles veulent vivre, de disposer d ’ un logement décent et accessible, et de bénéficier d ’ un ensemble d ’ aides à domicile, notamment d ’ une aide personnelle ;

c) De veiller au parfait consentement, libre et éclairé, des femmes handicapées pour toute intervention ou tout traitement médical, de former les professionnels de santé aux droits humains, à la dignité, à l ’ autonomie et aux besoins des femmes handicapées, et d ’ établir des règles déontologiques à l ’ intention des acteurs des secteurs public et privé de la santé.

Mariage et rapports familiaux

Le Comité relève toutefois avec préoccupation que, par défaut, l’âge minimum du mariage est fixé à 16 ans (avec l’autorisation des parents) dans l’État partie.

Le Comité rappelle la recommandation générale conjointe n o  31 du Comité pour l ’ élimination de la discrimination à l ’ égard des femmes et observation générale n o  18 du Comité des droits de l ’ enfant sur les pratiques préjudiciables , adoptées conjointement (2019), et prie instamment l ’ État partie de modifier l ’ article 1612 du Code civil, qui autorise les mariages d ’ enfants de plus de 16 ans avec l ’ approbation des parents, et de porter l ’ âge légal minimum de mariage à 18 ans pour les femmes et les hommes, sans aucune exception.

Déclaration et Programme d’action de Beijing

Le Comité invite l ’ État partie à s ’ appuyer sur la Déclaration et le Programme d ’ action de Beijing et à continuer d ’ évaluer la réalisation des droits consacrés par la Convention dans le contexte de l ’ examen, après 25 ans, de la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d ’ action de Beijing en vue de parvenir à une égalité réelle entre les femmes et les hommes.

Diffusion

Le Comité demande à l ’ État partie de veiller à la diffusion rapide des présentes observations finales, dans sa langue officielle, auprès des institutions publiques pertinentes de tous niveaux (national, régional et local), en particulier du Gouvernement, des ministères, du Parlement et de l ’ appareil judiciaire, afin d ’ en assurer l ’ application intégrale.

Ratification d’autres traités

Le Comité souligne que l ’ adhésion de l ’ État partie aux neuf principaux instruments internationaux relatifs aux droits humains contribuerait à favoriser l ’ exercice effectif par les femmes de leurs droits humains et de leurs libertés fondamentales dans tous les aspects de la vie. Il encourage par conséquent l ’ État partie à ratifier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, à laquelle il n ’ est pas encore partie.

Suite donnée aux observations finales

Le Comité prie l ’ État partie de lui communiquer par écrit, dans un délai de deux ans, des informations sur les mesures qu ’ il aura prises pour appliquer les recommandations énoncées aux paragraphes 11 c), 15 a), 23 d) et 41 c).

Établissement du prochain rapport

Le Comité invite l ’ État partie à soumettre son onzième rapport périodique en juillet 2026, comme prévu. Le rapport doit être soumis dans les délais et couvrir la période allant jusqu ’ à la date à laquelle il sera soumis.

Le Comité invite l ’ État partie à se conformer aux directives harmonisées pour l ’ établissement de rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits humains, englobant le document de base commun et les rapports pour chaque instrument ( HRI/GEN/2/Rev.6 , chap. I).