Nations Unies

CRC/C/SEN/CO/3-5

Convention relative aux droits de l ’ enfant

Distr. générale

7 mars 2016

Français

Original : anglais

Comité des droits de l ’ enfant

Observations finales concernant les troisième à cinquième rapports périodiques du Sénégal, présentés en un seul document *

I.Introduction

Le Comité a examiné les troisième à cinquième rapports périodiques du Sénégal, présentés en un seul document (CRC/C/SEN/3-5), à ses 2054e et 2056e séances (voir CRC/C/SR.2054 et 2056), les 11 et 12 janvier2016, et a adopté les observations finales ci-après à sa 2104e séance (voir CRC/C/SR.2104), le 29 janvier 2016.

Le Comité accueille avec satisfaction les troisième à cinquième rapports périodiques de l’État partie, présentés en un seul document (CRC/C/SEN/3-5) ainsi que les réponses à la liste de points (CRC/C/SEN/Q/3-5/Add.1), qui lui ont permis de mieux appréhender la situation des droits de l’enfant dans l’État partie. Il se félicite du dialogue constructif qu’il a eu avec la délégation intersectorielle de l’État partie.

II.Mesures de suivi adoptées et progrès réalisés par l’État partie

Le Comité prend note avec satisfaction de la ratification des instruments ci-après :

a)La Convention relative aux droits des personnes handicapées, en 2010;

b)La Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, en 2008;

c)Le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, en 2006;

d)La Convention sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale, en 2011.

Le Comité accueille également avec satisfaction l’adoption des mesures législatives suivantes:

a)Les modifications apportées aux arrêtés ministériels nos3748 à 3750/MFPTEOP/DTSS de 2003 et à l’article L.145 du Code du travail (1997), en 2015;

b)La loi de décentralisation, en 2014;

c)La loi no2013-05 portant modification de la loi no61-10 du 7mars 1961 déterminant la nationalité, le 8 juillet 2013;

d)La loi no2013-10 portant Code général des collectivités locales, le 28décembre 2013;

e)La loi d’orientation sociale, en 2010;

f)La loi no2008-11 portant sur la cybercriminalité, le 25janvier 2008;

g)La loi no2007-01 modifiant le Code Pénal, le 12février 2007.

Le Comité prend aussi note avec satisfaction des mesures institutionnelles et des politiques suivantes:

a)LePlan Sénégal émergent et son plan d’action prioritaire 2014-2018, y compris le Programme national de transferts monétaires ciblant les ménages pauvres, le Programme de couverture maladie universelleet de gratuité des soins de santé pour les enfants de moins 5 ans, et le Programme de promotion de la carte d’égalité des chances pour les personnes handicapées (2016-2018);

b)La création d’un comité intersectoriel national de protection de l’enfant et de comités départementaux de protection de l’enfant (2014);

c)La Stratégie nationale de protection de l’enfant et son plan d’action national (2013-2015);

d)Le Plan national d’action pour éliminer la mendicité des enfants (2013-2015);

e)Le programme concernant la réforme et la réglementation des daaras (2013);

f)Le Plan cadre national de prévention et d’élimination du travail des enfants et son plan d’action (2012-2016);

g)Le Programme d’amélioration de la qualité, de l’équité et de la transparence du secteur de l’éducation et de la formation (2012-2025);

h)Le Plan d’action national de lutte contre la traite des personnes (2012-2014);

i)Le Plan d’action national pour l’accélération de l’abandon des mutilations génitales féminines (2010-2015);

j)Le Plan national stratégique pour la survie de l’enfant (2007-2015);

k)Le Plan d’action national concernant la réforme légale pour l’incrimination des châtiments corporels et de toutes formes de violences faites aux enfants.

III.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

A. Mesures d ’ application générales (art. 4, 42 et 44 (par. 6))

Recommandations antérieures du Comité

Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour donner suite à celles de ses recommandations formulées en 2006 dans ses précédentes observations finales (voir CRC/C/SEN/CO/2) qui n ’ ont pas encore été mises en œuvre ou qui ne l ’ ont pas été dans toute la mesure voulue, en particulier celles concernant la sensibilisation, la formation et la diffusion (par. 20).

Législation

Le Comité note que l’État partie a progressé sur la voie de la mise en conformité de son droit interne avec la Convention. Il note aussi que le projet de code de l’enfant, qui regroupe l’ensemble des dispositions législatives relatives aux droits de l’enfant, a été finalisé et soumis pour adoption. Le Comité demeure néanmoins préoccupé par l’application inadéquate des lois, en particulier dans les zones rurales et reculées, et par le poids que continuent d’avoir les attitudes et pratiques traditionnelles et coutumières qui entravent la mise en œuvre de la Convention.

Le Comité recommande à l ’ É tat p artie de prendre toutes les mesures nécessaires pour :

a) Accélérer le processus d ’ adoption du projet de c ode de l ’ enfant et faire en sorte qu ’ il couvre tous les domaines visés dans la Convention ;

b) É liminer toutes les dispositions législatives ambiguës et contradictoires qui sont incompatibles avec la Convention ;

c) Veiller à l ’ application effective des textes législatifs en vigueur, en particulier le Code du travail de 1997, la loi n o 99-05 de 1999 criminalisant le viol, les mutilations génitales féminines, les coups et violences volontaires et l ’ inceste, et la loi n o 2005-06 de 2005 relative à la lutte contre la traite des personnes et pratiques assimilées et à la protection des victimes, y compris en affectant des ressources humaines, techniques et financières suffisantes à leur mise en œuvre ;

d) Veiller à ce que les pratiques coutumières et traditionnelles n ’ empêchent pas les enfants de jouir des droits énoncés dans la Convention.

Politique et stratégie globales

Le Comité se réjouit de l’adoption de la Stratégie nationale de protection de l’enfant et de son Plan d’action national (2013-2015), ainsi que de son évaluation. Le Comité est toutefois préoccupé par leur faible taux d’exécution, imputable principalement à l’insuffisance des ressources, au chevauchement et à la duplication des interventions, ainsi qu’à un défaut de coordination.

Le Comité appelle l ’ État partie à adopter d ’ urgence le deuxième Plan national d ’ action de la Stratégie nationale de protection de l ’ enfant et à affecter des ressources humaines, techniques et financières suffisantes à son exécution, et à veiller à la bonne mise en œuvre des plans d ’ action, programmes, politiques et stratégies existants.

Coordination

Le Comité prend note de la création du comité intersectoriel national de protection de l’enfant et des comités départementaux de protection de l’enfant aux fins de la coordination de l’application de la Stratégie nationale de protection de l’enfant. Le Comité demeure toutefois préoccupé par :

a)L’imprécision et le chevauchement fréquent des mandats, rôles et responsabilités des institutions de l’État en matière de protection et de promotion des droits de l’enfant, et l’absence de procédures et de mécanismes de coordination transparents entre ces institutions, en particulier entre les entités nationales et les entités décentralisées;

b)L’insuffisance des ressources humaines, techniques et financières affectées aux institutions gouvernementales chargées de promouvoir et protéger les droits de l’enfant.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De veiller à ce que le c omité intersectoriel national et les comités départementaux de protection de l ’ enfant soient dotés d ’ un mandat clair et disposent d ’ une autorité suffisante pour coordonner toutes les activités liées à la mise en œuvre de la Convention aux niveaux intersectoriel, n ational, régional et municipal ;

b) De revoir les mandats, rôles et responsabilités des institutions existantes de protection et de promotion des droits de l ’ enfant, et d ’ établir des procédures et mécanismes clairs de coordination entre ces institutions, en particulier entre les entités nationales et les entités décentralisées ;

c) De faire en sorte que ces institutions soient dotées des ressources humaines, techniques et financières nécessaires à leur bon fonctionnement .

Allocations de ressources

Le Comité accueille favorablement le relèvement des budgets consacrés à l’éducation et à la santé, ainsi que les plans de l’État partie tendant à reconfigurer ses dépenses publiques pour assurer une répartition plus équitable des ressources entre les différentes régions. Le Comité est toutefois préoccupé par la diminution sensible de l’enveloppe budgétaire attribuée au Ministère de la femme, de la famille et de l’enfance par la loi de finances de 2015.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De procéder à une évaluation exhaustive des besoins budgétaires dans le domaine de l ’ enfance, d ’ affecter des ressources budgétaires adéquates à la réalisation des droits de l ’ enfant et de s ’ employer à remédier aux disparités mises en évidence par les indicateurs relatifs aux droits de l ’ enfant ;

b) De recourir à une approche fondée sur les droits de l ’ enfant pour établir le budget de l ’ État, en instituant un système de suivi couvrant l ’ ensemble du budget pour contrôler et évaluer, sous les angles de l ’ adéquation, de l ’ efficacité et de l ’ équité, l ’ affectation et l ’ emploi des ressources destinées à l ’ enfance ;

c) Définir des lignes budgétaires pour les enfants défavorisés ou vulnérables dont la situation pourrait requérir des mesures d ’ action sociale et faire en sorte que ces lignes budgétaires soient protégées même en cas de crise économique, de catastrophe naturelle ou d ’ autre situation d ’ urgence.

Collecte de données

Le Comité prend note des efforts déployés par l’État partie pour améliorer son système de collecte des données, notamment la mise en place d’une base de données relative aux enfants à partir d’indicateurs spécifiques et l’adoption de la Stratégie nationale de développement de la statistique 2014-2019. Le Comité note toutefois avec préoccupation que le mécanisme actuel de collecte des données ne permet pas de rassembler de manière complète et systématique des données ventilées portant sur tous les domaines couverts par la Convention et sur toutes les catégories d’enfants, en particulier sur les enfants en situation de vulnérabilité, pour suivre et évaluer les progrès accomplis et apprécier les résultats produits par les politiques adoptées en faveur de l’enfance.

Compte tenu de son observation générale n o 5 (2003) sur les mesures d ’ application générales, le Comité exhorte l ’ État partie à :

a) Améliorer rapidement son système de collecte de données, y compris en le dotant de ressources humaines, techniques et financières suffisantes pour soutenir le développement en cours de la base de données relative aux enfants ;

b) Veiller à ce que les données portent sur tous les domaines couverts par la Convention et soient ventilées par âge, sexe, handicap, zone géographique, ethnie et situation socioéconomique afin de faciliter l ’ analyse de la situation de tous les enfants ;

c) Communiquer aux ministères concernés les données et les indicateurs et les utiliser pour formuler, suivre et évaluer les politiques, programmes et projets aux fins de l ’ application effective de la Convention ;

d) Tenir compte du cadre conceptuel et méthodologique présenté dans le rapport du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l ’ homme intitulé Les indicateurs relatifs aux droits de l ’ homme : Guide pour mesurer et mettre en œuvre dans la définition, la collecte et la diffusion de l ’ information statistique ;

e) Renforcer sa coopération technique avec, notamment, le Fonds des Nations Unies pour l ’ enfance (UNICEF) et les mécanismes régionaux.

Mécanisme de suivi indépendant

Le Comité note que le processus d’approbation de l’avant-projet de loi relatif à la création d’une institution indépendante, le défenseur des enfants, est en cours. Il note toutefois avec préoccupation qu’en novembre 2012 le Comité sénégalais des droits de l’homme a été rétrogradé au statut « B », à cause principalement du manque de soutien concret de l’État partie, qui ne lui a pas affecté de crédits suffisants, et du défaut de transparence et de pluralisme du processus de nomination de ses membres.

Compte tenu de son o bservation générale n o  2 (2002) concernant le rôle des institutions nationales indépendantes de défense des droits de l ’ homme dans la promotion et la protection des droits de l ’ enfant , le Comité recommande à l ’ État partie de prendre des mesures pour :

a) Adopter rapidement le projet de loi relatif à la création d ’ une institution indépendante, le d éfenseur des enfants, habilitée à recevoir, instruire et régler les plaintes émanant d ’ enfants, dans le respect de leur sensibilité et en garantissant la confidentialité de l ’ identité et la protection des victimes, et à mener des activités de surveillance, de suivi et de vérification en faveur des victimes ; et veiller à l ’ indépendance d ’ un tel mécanisme de surveillance, y compris en ce qui concerne son financement, son mandat et ses immunités  ;

b) Examiner et adopter rapidement le projet de loi portant modification de la loi établissant le Comité sénégalais des droits de l ’ homme afin de répondre aux préoccupations exprimées par le Sous-Comité d ’ accréditation du Comité international de coordination en le mettant en pleine conformité avec les Principes concernant le statut et le fonctionnement des institutions nationales pour la protection et la promotion des droits de l ’ homme (Principes de Paris). À cet effet, le Comité recommande à l ’ État partie de solliciter une assistance auprès, notamment, du HCDH, de l ’ UNICEF et du Programme des Nations Unies pour le développement.

Droits de l’enfant et entreprises

Le Comité est préoccupé par le manque de mesures de protection des enfants contre les violations de leurs droits découlant des activités du secteur du tourisme. Il est aussi préoccupé par le fait que les investissements privés, en particulier dans les industries extractives et le secteur de la pêche, ne profitent pas nécessairement aux communautés locales, notamment aux enfants et sont susceptibles d’avoir des retombées défavorables sur les familles et les enfants, telles que le recours au travail des enfants et l’exposition à des substances nocives. Le Comité note le défaut d’informations sur l’éventuelle existence d’un cadre réglementaire relatif à la responsabilité sociale et environnementale des entreprises commerciales et des industries, tant nationales qu’internationales, aux fins de la prévention d’un possible impact négatif de leurs activités sur les enfants.

Compte tenu de son observation générale n o 16 (2013) sur les obligations des États concernant les incidences du secteur des entreprises sur les droits de l ’ enfant, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De mener des campagnes de sensibilisation sur la prévention du tourisme sexuel pédophile auprès du secteur du tourisme et de la population et de diffuser largement le Code mondial d ’ éthique du tourisme de l ’ Organisation mondiale du tourisme auprès des agences de voyages et du secteur du tourisme ;

b) D ’ instituer une réglementation claire et un cadre législatif au niveau national, y compris par la conclusion entre les entreprises privées et les autorités de l ’ État partie au niveau local d ’ accords exigeant des entreprises qui opèrent dans l ’ État partie qu ’ elles adoptent des mesures pour prévenir et atténuer les retombées défavorables de leurs activités sur les droits de l ’ enfant dans le pays ;

c) D ’ e xiger des entreprises qu ’ elles procèdent à des évaluations des droits de l ’ enfant et à des consultations et rendent publiques dans leur intégralité les retombées de leurs activités s ur l ’ environnement, la santé et les droits de l ’ enfant et les mesures qu ’ elles entendent prendre pour y remédier et promouvoir l ’ intégration d ’ indicateurs et de paramètres relatifs aux droits de l ’ enfant dans leurs rapports sur leurs activités  ;

d) De s ’ inspirer, lors de la mise en œuvre de ces recommandations, du Cadre de référence des Nations Unies « Protéger, respecter et réparer », approuvé à l ’ unanimité par le Conseil des droits de l ’ homme en 2008 .

B.Définition de l’enfant (art. 1er)

Le Comité note avec préoccupation que l’article111 du Code de la famille fixe l’âge minimum du mariage à 16ans pour les filles et à 18ans pour les garçons, et que l’article300 du Code pénal légalise le mariage coutumier et les relations sexuelles avec une fille âgée de 13ans ou plus.

Le Comité encourage l ’ État partie à modifier l ’ article 111 du Code de la famille et l ’ article 300 du Code pénal et à adopter le projet de c ode de l ’ enfant afin de relever l ’ âge du mariage à 18 ans pour les garçons et les filles et à prendre toutes les mesures nécessaires pour éradiquer les mariages d ’ enfants, conformément aux obligations incombant à l ’ État partie en vertu de la Convention.

C.Principes généraux (art. 2, 3, 6 et 12)

Non-discrimination

Le Comité note que le cadre constitutionnel et législatif et les politiques de l’État partie contiennent des dispositions contre la discrimination, mais il constate avec inquiétude qu’une discrimination envers certains groupes d’enfants persiste en droit et dans la pratique.Il constate aussi avec inquiétude que pratiquement aucune mesure systématique n’a été prise, y compris en association avec les chefs religieux, les faiseurs d’opinions et les médias, pour combattre les lois, attitudes et pratiques discriminatoires et les faire évoluer.

Le Comité exhorte l ’ É tat partie à :

a) Revoir l ’ ensemble de sa législation afin de la mettre en pleine conformité avec l ’ article 2 de la Convention, et assurer l ’ application intégrale de toutes les dispositions législatives ;

b) Adopter une stratégie globale pour éliminer toute discrimination de facto envers tous les groupes d ’ enfants vulnérables ou marginalisés , en particulier les filles, les enfants des rues et les talibés , les enfants handicapés , les enfants appartenant aux castes inférieures, les enfants vivant en milieu rural, et les enfants infectés ou touchés par le VIH/sida ;

c) Mener des campagnes globales d ’ information en direction des groupes professionnels travaillant avec et/ou pour les enfants afin de prévenir et de combattre toutes les formes de discrimination .

Intérêt supérieur de l’enfant

Le Comité se réjouit de l’inscription du principe de l’intérêt supérieur de l’enfant dans la Stratégie nationale de protection de l’enfant ainsi que dans d’autres plans d’action et outils connexes, et note que le droit de l’enfant à ce que son intérêt supérieur soit une considération primordiale est énoncé expressément dans le projet de code de l’enfant. Il constate toutefois avec préoccupation que ce droit n’est pas suffisamment pris en considération et n’est pas interprété ni appliqué de façon cohérente au sein de la famille, à l’école et dans le cadre des tribunaux et de diverses institutions travaillant avec ou pour les enfants. Le Comité est préoccupé aussi par le manque d’informations concrètes sur la manière dont l’intérêt supérieur de l’enfant est pris en considération dans l’ensemble des politiques et programmes publics, ainsi que dans le cadre de tous les processus législatifs, administratifs et judiciaires de prise de décisions.

Compte tenu de son observation générale n o 14 (2013) sur le droit de l ’ enfant à ce que son intérêt supérieur soit une considération primordiale, le Comité recommande à l ’ État partie de renforcer ses efforts pour faire en sorte que ce droit soit intégré de façon adéquate et interprété et appliqué avec cohérence dans l ’ ensemble des procédures et des processus décisionnels d ’ ordre législatif, administratif et judiciaire, ainsi que dans la totalité des politiques, programmes et projets qui présentent un intérêt ou ont des incidences pour les enfants . À cet égard, l ’ État partie est encouragé à élaborer des procédures et des critères en vue de fournir des orientations et une formation à tous les dépositaires d ’ une autorité concernés afin que l ’ intérêt supérieur de l ’ enfant puisse être déterminé dans chaque domaine.

Droit à la vie, à la survie et au développement

Le Comité se réjouit de la baisse constante du taux de mortalité des moins de 5ans observée ces dernières années, qui est l’aboutissement des mesures prises pour lutter contre la rougeole, le paludisme, les maladies diarrhéiques infantiles et les carences en micronutriments. Il est toutefois préoccupé par les points suivants:

a)La baisse du taux de mortalité des enfants n’est pas uniforme. Il existe des disparités géographiques marquées, en particulier entre zones rurales et zones urbaines, qui sont imputables à l’inégalité d’accès et de recours aux services de soins de santé primaires, de nutrition, d’assainissement et d’hygiène sur le territoire de l’État partie;

b)Le taux de mortalité néonatale est allé en s’accroissant;

c)Des proportions élevées d’enfants sont touchées par la malnutrition, la maltraitance, l’exploitation, la pauvreté et les inégalités socioéconomiques, qui toutes compromettent le droit inhérent de l’enfant à la vie, la survie et au développement.

Le Comité recommande à l ’ É tat partie :

a) D ’ intensifier ses efforts pour réduire la mortalité des enfants, y compris la mortalité néonatale , ainsi que les disparités régionales, notamment en améliorant l ’ accès et le recours aux services de santé et de nutrition, à l ’ eau, et aux services d ’ assainissement et d ’ hygiène, en particulier dans les zones rurales et reculées ;

b) De prendre toutes les mesures de prévention et de protection requises pour mettre les enfants à l ’ abri de la malnutrition, de la maltraitance et de l ’ exploitation, de la pauvreté et des disparités.

Respect de l’opinion de l’enfant

Le Comité prend note avec satisfaction des efforts que déploie l’État partie pour mettre en œuvre le principe du respect de l’opinion de l’enfant, notamment la création du Parlement des enfants ainsi que de «gouvernements des enfants» et de «parlements des enfants» dans les écoles, mais il constate à nouveau avec préoccupation (voir CRC/C/SEN/CO/2, par. 28) que les attitudes sociétales traditionnelles semblent limiter la possibilité pour les enfants d’exprimer librement leur opinion au sein de la famille, à l’école, dans la communauté, devant les tribunaux et dans le cadre d’autres institutions. Le Comité constate aussi avec préoccupation qu’un enfant ne peut être entendu devant un tribunal qu’à partir de l’âge de 15ans.

Compte tenu de son observation générale n o 12 (2009) sur le droit de l ’ enfant d ’ être entendu, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De prendre des mesures pour assurer l ’ application effective de la législation reconnaissant à l ’ enfant le droit d ’ être entendu dans le cadre des procédures judiciaires le concernant, y compris l ’ institution de systèmes et/ou de procédures garantissant que les travailleurs sociaux et les tribunaux se conforment à ce principe ;

b) De veiller à ce que chaque enfant, quel que soit son âge, ait le droit d ’ être entendu devant un tribunal ;

c) De mener des programmes et des activités de sensibilisation visant à promouvoir une participation judicieuse et autonome de tous les enfants au sein de leur famille, dans la communauté et à l ’ école, y compris dans les organes consultatifs d ’ élèves, en portant une attention particulière aux filles et aux enfants vulnérables ;

d) D ’ ériger le Parlement des enfants en institution officielle se réunissant régulièrement et de veiller à ce qu ’ il soit investi d ’ un mandat conséquent et doté de ressources humaines, techniques et financières suffisantes, de manière à faciliter l ’ implication effective des enfants dans les processus législatifs nationaux relatifs à des questions ayant des conséquences pour eux .

D.Droits et libertés civils (art. 7, 8 et 13 à 17)

Enregistrement des naissances

Le Comité salue les efforts déployés par l’État partie pour favoriser l’enregistrement des naissances, notamment la campagne d’enregistrement des naissances, la mise en œuvre de la stratégie du Centre national d’enregistrement des naissances, les unités mobiles d’enregistrement des naissances et les campagnes de sensibilisation. Le Comité prend toutefois note avec préoccupation de ce qui suit :

a)Le rythme d’accroissement du taux d’enregistrement des naissances des enfants de moins de 5 ans est insuffisant et des disparités persistent dans ce domaine entre zones urbaines et zones rurales ;

b)Le coût de la procédure d’enregistrement tardif d’une naissance est élevé ;

c)L’activité des services d’enregistrement des naissances connaît régulièrement des interruptions à cause du manque de registres et de cahiers de village aux niveaux décentralisés ;

d)Les enfants dépourvus d’actes de naissance se heurtent à des obstacles pour accéder à l’éducation et aux services sociaux.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ accélérer le processus de modernisation du système d ’ enregistrement des faits d ’ état civil et d ’ allouer des fonds suffisants pour renforcer les initiatives dans le domaine de l ’ enregistrement des naissances ;

b) D ’ assurer la gratuité de l ’ enregistrement des naissances et de la délivrance des actes de naissance pour, au moins, les enfants de moins de 5 ans, en particulier dans les zones rurales et reculées ;

c) De doter les autorités décentralisées au niveau local et les établissements de santé du matériel nécessaire pour enregistrer les naissances et délivrer des actes de naissance ;

d) De renforcer les équipes mobiles d ’ enregistrement des naissances et d ’ étendre leur desserte afin de parvenir à une couverture universelle, en particulier afin d ’ assurer l ’ enregistrement des enfants qui ne sont pas nés dans un établissement de santé et des enfants qui n ’ ont jamais été enregistrés, et de sensibiliser davantage la population à l ’ importance que revêtent l ’ enregistrement des naissances et le dispositif permettant d ’ y procéder  ;

e) De veiller à ce que les enfants dépourvus d ’ acte de naissance aient pleinement accès à l ’ éducation et aux services et sociaux .

Nationalité

Le Comité se réjouit de l’adoption par l’État partie, en juin 2013, du Code de la nationalité révisé, dont ont été supprimées les dispositions discriminatoires au regard du genre concernant la transmission de la nationalité par le mariage, par la filiation et par l’adoption, ainsi que la distinction entre enfants nés dans le cadre du mariage et enfants nés hors mariage en matière d’attribution de la nationalité. Toutefois, le Comité constate avec préoccupation que :

a)Le Code de la nationalité révisé dispose au sujet de l’attribution de la nationalité à un enfant qu’est sénégalais tout individu né au Sénégal d’un ascendant au premier degré qui y est lui-même né (règle du double jus soli) et qu’est sénégalais tout individu né d’un ascendant au premier degré sénégalais (règle du jus sanguinis) ;

b)L’accès à la nationalité par la naturalisation est fermé à tout enfant qui n’est pas reconnu sain d’esprit ou est reconnu comme constituant une charge pour la communauté en raison de son état de santé physique.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De revoir le Code de la nationalité pour le mettre en conformité avec les normes internationales relatives à la prévention et à la réduction des cas d ’ apatridie chez les enfants et à la protection des enfants apatrides ;

b) De procéder à une cartographie de l ’ apatridie afin de mieux prévenir ce phénomène et d ’ assurer la protection des enfants qui sont apatrides ou risquent de l ’ être ;

c) De solliciter une assistance technique auprès du HCR et de l ’ UNICEF, notamment, en vue de la mise en œuvre de ces recommandations.

E.Violence envers les enfants (art. 19, 24 (par. 3), 28 (par. 2), 34, 37 a) et 39)

Châtiments corporels

Le Comité se réjouit des diverses mesures prises par l’État partie pour combattre et éliminer les châtiments corporels envers les enfants. Le Comité prend aussi note avec satisfaction de l’existence d’un service d’assistance téléphonique. Toutefois, le Comité est préoccupé par les points suivants :

a)L’absence d’interdiction expresse et totale des châtiments corporels au sein de la famille, dans les écoles, y compris les daaras, dans les institutions pénales et dans les structures de protection de remplacement ;

b)Le manque de mesures de protection et d’assistance en faveur des enfants victimes de châtiments corporels et d’autres formes de violence ;

c)Le manque de programmes efficaces de sensibilisation contre les châtiments corporels et les autres formes de violence envers les enfants.

Eu égard à son observation générale n o 8 (2006) sur le droit de l ’ enfant à une protection contre les châtiments corporels et autres formes cruelles ou dégradantes de châtiments, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ a broger toutes les dispositions autorisant les châtiments corporels, y compris l ’ article 285 du Code de la famille qui semble tolérer l ’ usage de la violence physique envers un enfant « dans la mesure compatible avec son âge et l ’ amendement de sa conduite » ;

b) De veiller à ce que les châtiments corporels soient expressément interdits dans tous les cadres, notamment au sein la famille, dans les écoles, y compris les daaras , dans les institutions pénales et dans les structures de protection de remplacement ;

c) De sensibiliser et d ’ éduquer les parents, les tuteurs et les professionnels travaillant avec et pour des enfants en menant des campagnes d ’ information de la population sur les effets préjudiciables des châtiments corporels, et de promouvoir des formes de discipline non violentes et positives ;

d) De s ’ attacher à associer et à faire participer toute la société, y compris les enfants, à la conception et à l ’ application de stratégies pour la prévention du recours aux châtiments corporels envers les enfants .

Maltraitance et négligence

Le Comité note que le Bureau de protection de l’enfance est l’entité chargée spécifiquement de faire face à ce phénomène. Le Comité est toutefois préoccupé par les points suivants :

a)L’article 298 du Code pénal, qui criminalise les violences physiques et la négligence volontaires envers un enfant, n’est pas suffisamment appliqué ;

b)Le retard enregistré dans l’adoption du projet de loi sur la modernisation des écoles coraniques, qui devrait relier les daaras au système d’éducation formelle, contenant des dispositions contre toute implication des daaras dans la maltraitance et l’exploitation d’enfants, notamment la réduction des enfants à la mendicité.

Rappelant les recommandations formulées dans l ’ Étude des Nations Unies sur la violence à l ’ encontre des enfants de 2006 (voir A/61/299), tenant compte de son observation générale n o 13 (2011) sur l e droit de l ’ enfant d ’ être protégé contre toutes les formes de violence et prenant note de l ’ objectif de développement durable 16.2 « Mettre un terme à la maltraitance, à l ’ exploitation et à la traite, et à toutes les formes de violence et de torture dont sont victimes les enfants », le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De veiller au respect effectif de l ’ article 298 du Code pénal, qui criminalise les violences physiques et la négligence volontaire envers un enfant, notamment en affectant des ressources humaines, techniques et financières suffisantes à sa mise en œuvre ;

b) D ’ Accélérer l ’ adoption du projet de la loi sur la modernisation des daaras et d ’ affecter les ressources techniques et financières requises pour assurer le bon fonctionnement du service de l ’ inspection des daaras ;

c) De mettre en œuvre la Stratégie nationale de protection de l ’ enfant afin de prévenir et combattre la maltraitance et la négligence envers les enfants, en renforçant en outre les programmes d ’ éducation et de sensibilisation, y compris les campagnes d ’ information, avec la participation des enfants ;

d) De constituer une base de données nationale sur tous les cas de violence familiale sur enfant, et de procéder à une évaluation complète de l ’ ampleur, des causes et de la nature de cette violence ;

e) De veiller à doter de ressources humaines, techniques et financières adéquates la Direction des droits et de la protection de l ’ enfant pour lui donner les moyens d ’ exécuter des programmes à long terme de lutte contre les causes profondes de la violence et de la maltraitance ;

f) D ’ encourager des programmes à assise communautaire visant à prévenir et à combattre la violence familiale, la maltraitance et la négligence envers les enfants, y compris en faisant appel à la participation d ’ anciennes victimes, de bénévoles et de membres de la communauté et en leur apportant un appui en matière de formation .

Exploitation sexuelle et violences sexuelles

Le Comité salue les efforts déployés par l’État partie pour protéger les enfants contre l’exploitation sexuelle et les violences sexuelles, notamment en établissant des comités départementaux de protection de l’enfant. Il est toutefois vivement préoccupé par :

a)L’application insuffisante de la législation réprimant l’exploitation sexuelle et les violences sexuelles, dont les articles 298 et 300 du Code pénal ;

b)Le manque de mécanismes de plaintes accessibles aux enfants victimes, et le très faible nombre de cas signalés du fait de la peur, de la honte et des obstacles culturels ;

c)Le nombre croissant de filles, en particulier originaires d’autres pays d’Afrique de l’Ouest, soumises à la servitude domestique et à une exploitation sexuelle commerciale, y compris dans le cadre du tourisme sexuel ;

d)L’absence de réglementation du système de parrainage et d’adoption en contrepartie d’argent ou de la fourniture de services à la famille d’accueil − la pratique dite du confiage ou yaar doom − qui rend l’enfant vulnérable à des violences sexuelles de la part de son tuteur ;

e)Les mesures inadaptées de prévention et de soutien psychologique et social, ainsi que le manque d’assistance juridique pour les enfants victimes ;

f)Le défaut de données sur le nombre des cas d’exploitation sexuelle et de violences sexuelles ayant donné lieu à une enquête, à des poursuites et à une condamnation.

40. Le Comité exhorte l ’ État partie à :

a) Veiller à ce que soit effectivement appliquée la législation réprimant l ’ exploitation sexuelle et les violences sexuelles envers les enfants, en particulier les articles 298 et 300 du Code pénal, et à ce que les auteurs de telles infractions soient traduits en justice et condamnés à des peines proportionnées à la gravité de ces infractions ;

b) Intensifier l es actions de sensibilisation contre l ’ exploitation sexuelle des enfants et la stigmatisation des victimes d ’ exploitation sexuelle et de violences sexuelles, y compris l ’ inceste, et mettre à disposition des canaux accessibles, confidentiels, adaptés aux besoins des enfants et efficaces pour le signalement de telles violations ;

c) Mettre en place des mécanismes et des procédures et édicter des directives pour faire respecter l ’ obligation de signaler les cas de violence sexuelle et d ’ exploitation sexuelle à l ’ encontre d ’ enfants ;

d) Adopter et appliquer une réglementation et des mesures de sauvegarde en faveur des enfants concernés par le confiage afin de prévenir cette pratique informelle et de protéger ces enfants contre la maltraitance et les violences sexuelles ;

e) Prendre des mesures pour déterminer les besoins sanitaires, juridiques et psychosociaux des enfants victimes d ’ exploitation sexuelle et de violences sexuelles et y répondre, notamment en leur assurant un hébergement, et s ’ attacher à mettre sur pied des programmes et politiques pour assurer la réadaptation et la réinsertion sociale des enfants victimes, conformément aux documents finals adoptés par le Congrès mondial contre l ’ exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales ;

f) Améliorer l ’ accès aux données sur les victimes d ’ exploitation sexuelle et de violences sexuelles ventilées par sexe, âge et nationalité, et renforcer la coordination entre tous les acteurs du système de protection.

Pratiques préjudiciables

Le Comité accueille avec satisfaction la loi de 1999 portant modification du Code pénal, qui criminalise les mutilations génitales féminines. Le Comité est toutefois préoccupé par la lenteur des progrès sur la voie de l’abandon de cette pratique, dont la prévalence demeure très forte dans certaines régions. Il est aussi préoccupé par le taux élevé de mariages précoces et forcés, notamment dans les zones rurales.

42. Compte tenu de l ’ observation générale conjointe n o 18 sur les pratiques préjudiciables (2014), le Comité exhorte l ’ État partie à :

a) Finaliser le nouveau plan d ’ action national pour l ’ accélération de l ’ abandon des mutilations génitales féminines et affecter des ressources adéquates à son exécution ;

b) Sensibiliser davantage aux conséquences néfastes des mutilations génitales féminines l ’ ensemble des ministères concernés, les policiers et autres agents des forces de l ’ ordre, les chefs traditionnels et religieux, le corps enseignant et d ’ autres groupes professionnels, ainsi que les familles et la population, en particulier les communautés rurales ;

c) Veiller à ce que les cas de mutilations génitales féminines donnent lieu à des enquêtes rapides et à ce que leurs auteurs soient traduits en justice et condamnés en conséquence ;

d) Accélérer le processus de révision du Code pénal en vue de criminaliser la non-dénonciation de mutilations génitales réalisées sur des fillettes ;

e) Instituer des mécanismes et services de protection pour préserver les fillettes exposées au risque de subir des mutilations génitales et veiller à ce que toutes les victimes de cette pratique aient accès à des services sociaux, médicaux, psychologiques et de réadaptation et à des recours juridiques ;

f) A ccélérer l ’ adoption du plan d ’ action pour mettre fin aux mariages d ’ enfants et affecter des ressources adéquates à son exécution ;

g) Définir des mesures efficaces pour prévenir et combattre la pratique du mariage d ’ enfants, notamment des programmes et campagnes de sensibilisation aux risques et dangers inhérents au mariage d ’ enfants ;

h) M ettre en place des systèmes efficaces de surveillance afin d ’ évaluer les progrès accomplis sur la voie de l ’ éradication du mariage d ’ enfants .

F.Milieu familial et protection de remplacement (art. 5, 9 à 11, 18 (par. 1 et 2), 20, 21, 25 et 27 (par. 4))

Milieu familial

Le Comité est préoccupé par l’insuffisance des mesures prises pour aider les parents à éduquer leurs enfants et pour combattre les stéréotypes sexistes concernant les tâches et les rôles revenant aux femmes et aux filles, en particulier au sein de la famille, et pour éradiquer les pratiques discriminatoires/préjudiciables, telles que le lévirat, le sororat, la répudiation et la polygamie.

Le Comité exhorte l ’ État partie :

a) À concevoir et formuler des stratégies pour dispenser une éducation parentale, renforcer les capacités parentales et améliorer le climat général de l ’ éducation des enfants, et à renforcer le système de protection sociale afin d ’ appuyer les efforts que consentent les familles pauvres pour éduquer et nourrir leurs enfants ;

b) À veiller à ce que les mères et les pères partagent sur un pied d ’ égalité la responsabilité juridique de leurs enfants ;

c) À réviser le Code de la famille de 1999 et à veiller à ce que soient abrogées toutes les dispositions qui sont discriminatoires envers les femmes et ont des répercussions négatives sur leurs enfants, tels que celles autorisant le lévirat, le sororat, la répudiation et la polygamie ;

d) À envisager de ratifier la Convention concernant la reconnaissance et l ’ exécution de décisions en matière d ’ obligations alimentaires, la Convention sur la loi applicable aux obligations alimentaires et la Convention concernant la compétence, la loi applicable, la reconnaissance, l ’ exécution et la coopération en matière de responsabilité parentale et de mesures de protection des enfants.

Enfants privés de milieu familial

Le Comité se réjouit de l’élaboration de normes minimales en matière de soins, dont celles relatives aux conditions de prestation de services et aux modules de formation à l’intention des inspecteurs. Il constate néanmoins avec préoccupation que le phénomène de la séparation familiale touche la moitié des enfants de moins de 18 ans au Sénégal et qu’un enfant sur cinq du groupe d’âge 10-14 ans ne vit plus avec aucun de ses parents biologiques. Le Comité est particulièrement préoccupé par :

a)L’harmonisation insuffisante des lois relatives à la protection des enfants avec les instruments régionaux et internationaux ratifiés par l’État partie ;

b)Le soutien insuffisant apporté aux modalités basées sur la famille pour la prise en charge des enfants privés de leur milieu familial, y compris les réseaux de la famille élargie et les autres membres de la communauté qui prennent des enfants en charge ;

c)Le contrôle et la surveillance inadéquats des institutions résidentielles de prise en charge, ce qui accroît les risques de violations des droits de l’enfant.

46. Appelant l ’ attention de l ’ État partie sur les Lignes directrices relatives à la protection de remplacement pour les enfants, le Comité souligne que la pauvreté matérielle et financière ne devrait jamais être la seule justification pour retirer un enfant à la garde de ses parents, pour admettre un enfant au bénéfice d ’ une protection de remplacement ou pour empêcher la réinsertion sociale d ’ un enfant. À cet égard, le Comité recommande ce qui suit à l ’ État partie :

a) Harmoniser ses lois relatives à la protection des enfants et veiller à leur conformité avec les instruments internationaux et régionaux qu ’ il a ratifiés ;

b) Apporter un soutien aux réseaux de la famille élargie et à d ’ autres membres de la communauté qui prennent en charge des enfants privés de leur milieu familial, ainsi qu ’ aux ménages dirigés par un enfant, en vue de réduire le nombre des placements d ’ enfant s en institution ;

c) Assurer l ’ enregistrement, la certification et l ’ agrément des centres existants de protection de remplacement pour les enfants ;

d) Veiller au réexamen systématique du placement d ’ un enfant en institution ou en famille d ’ accueil et surveiller la qualité des soins qui y sont dispensés, y compris en établissant des dispositifs accessibles de signalement, de suivi et traitement des cas de maltraitance sur enfant .

Adoption

Le Comité prend note des dispositions du Code de la famille qui fixent les conditions d’adoption dans l’État partie, mais il est préoccupé par l’absence d’autorité centrale chargée de superviser les adoptions internationales ainsi que par le retard pris dans l’adoption d’un cadre juridique et procédural pour la mise en œuvre de la Convention de La Haye sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ adopter l ’ arrêté établissant une autorité centrale chargée de superviser les adoptions internationales, ainsi que de mettre rapidement en place un cadre juridique et procédural régissant les adoptions internationales, conformément la Convention de L a Haye de 1993 sur la protection des enfants et la coopération en matière d ’ adoption internationale .

G. Handicap, santé de base et bien-être (art. 6, 18 (par. 3), 23, 24, 26, 27 (par. 1 à 3) et 33)

Enfants handicapés

Le Comité se réjouit de l’adoption de la loi d’orientation sociale et de divers programmes visant à protéger les droits des enfants handicapés, à leur assurer l’égalité de chances et à promouvoir leur éducation inclusive. Il reste toutefois profondément préoccupé par les points suivants :

a)Le très faible taux de scolarisation primaire des enfants handicapés et leur accès limité à l’éducation inclusive et à des enseignants bien formés ;

b)La forte prévalence et l’acceptation généralisée de la maltraitance, des violences, de la stigmatisation et de l’exclusion envers les enfants handicapés, en particulier en milieu rural, surtout contre les enfants atteints de déficiences intellectuelles et psychosociales ;

c)Le fait que les infrastructures en place et le personnel en poste ne suffisent pas à assurer l’accès des enfants handicapés aux soins de santé, aux services sociaux et aux services de réadaptation;

d)L’insuffisance de données sur le handicap et le diagnostic précoce du handicap.

Compte tenu de son observation générale n o 9 (2006) sur les droits des enfants handicapés, le Comité exhorte l ’ État partie à adopter une approche du handicap fondée sur les droits de l ’ homme et à :

a) Renforcer l ’ application de la loi d ’ orientation sociale et des programmes en faveur des enfants handicapés, dont le Programme national de réhabilitation à base communautaire pour les personnes handicapées et le Programme d ’ amélioration de la qualité, de l ’ équité et de la transparence dans le secteur de l ’ éducation et de la formation ;

b) Mettre en place des mesures globales pour développer l ’ éducation inclusive, notamment en formant et nommant des enseignants et des personnels spécialisés et en instaurant un environnement scolaire approprié pour les enfants handicapés ;

c) Enquêter sur les cas de traitements inhumains et dégradants envers des enfants handicapés, notamment à l ’ école, au sein de la famille ou dans une structure de protection de remplacement, et en poursuivre les auteurs ;

d) Concevoir et réaliser des programmes de sensibilisation, notamment des campagnes d ’ information, à l ’ intention des agents de l ’ État, de la population et des familles, afin de combattre la stigmatisation des enfants handicapés et de promouvoir une image positive de ces enfants ;

e) Améliorer les services de soins de santé, les services sociaux et les services de réadaptation pour les enfants handicapés en y affectant les ressources humaines, techniques et financières nécessaires et en mettant en place des infrastructures adéquates ;

f) Mettre sur pied un système efficace de collecte de données et un système efficient de diagnostic précoce du handicap.

Santé et services de santé

Le Comité se réjouit du recul du taux de mortalité des moins de 5 ans, de l’extension de la couverture vaccinale, ainsi que de la diminution relative de la mortalité maternelle et de l’instauration d’une couverture maladie universelles. Toutefois, le Comité reste préoccupé par les points suivants :

a)Le montant total des fonds consacrés au secteur des soins de santé est insuffisant ;

b)Les prestataires de soins de santé qualifiés et expérimentés ne sont pas assez nombreux et leur répartition dans le pays est inégale, ce qui se traduit par des disparités régionales en matière de prestation de services de santé ;

c)La proportion d’enfants bénéficiant d’un allaitement maternel exclusif pendant six mois a diminué pour retomber à un tiers en 2014, et le contrôle de l’application du code de commercialisation des substituts du lait maternel est insuffisant ;

d)Le nombre d’enfants souffrant de malnutrition et présentant un retard de croissance grave est élevé, en particulier dans les zones rurales ;

e)Des taux élevés de mortalité maternelle persistent, y compris chez les adolescentes enceintes et les mères adolescentes ;

f)Des taux élevés de cas de paludisme chez les enfants persistent, en particulier dans les zones rurales.

Le Comité appelle l ’ attention de l ’ État partie sur son observation générale n o 15 (2013) sur le droit de l ’ enfant de jouir du meilleur état de santé possible, et lui recommande ce qui suit :

a) Allouer des ressources financières et humaines suffisantes aux services de santé, en particulier à la santé et à la nutrition des enfants, en assurant un accès effectif à des prestataires de soins de santé formés et qualifiés ;

b) Faire tout le nécessaire pour réduire les taux de mortalité en améliorant les soins prénatals et la prévention des maladies transmissibles ;

c) Continuer de promouvoir et d ’ encourager l ’ allaitement maternel exclusif des enfants jusqu ’ à l ’ âge de 6 mois puis l ’ introduction d ’ une alimentation pour nourrisson adaptée, en vue de réduire la mortalité néonatale et la mortalité des moins de 5  ans ;

d) Renforcer le contrôle de l ’ application du code de commercialisation des substituts du lait maternel, instituer un système dissuasif de sanctions et veiller à ce que les autorité en charge de l ’ alimentation et des médicaments s ’ attachent à faire respecter ce code ;

e) Accélérer l ’ adoption et l ’ exécution du nouveau programme de renforcement de la nutrition ;

f) Continuer de combattre le paludisme, s ’ attaquer aux causes de cette maladie liées à l ’ environnement, accroître la disponibilité des moustiquaires et des insecticides et assurer l ’ accès de tous les enfants à des moustiquaires imprégnées ;

g) Diffuser et appliquer les deux guides techniques du HCDH concernant l ’ application d ’ une approche fondée sur les droits de l ’ homme à la mise en œuvre des politiques et des programmes visant, l ’ un, à réduire et à éliminer la morbidité et la mortalité évitables des enfants de moins de 5 ans (A/HRC/27/31) et, l ’ autre, à réduire la morbidité et la mortalité maternelles évitables (A/HRC/21/22).

Santé des adolescents

Le Comité se réjouit de l’élaboration et de l’exécution du Plan stratégique national de lutte contre le VIH/sida 2011-2015. Néanmoins, il reste préoccupé par :

a)Le nombre élevé de grossesses d’adolescentes ;

b)L’insuffisance des ressources publiques consacrées à la fourniture d’informations et de services adaptés aux besoins de la jeunesse en matière de santé ;

c)Le défaut d’éducation approfondie relative à la santé sexuelle et procréatrice et aux droits et services en matière de planification familiale, et l’accès limité aux contraceptifs modernes ;

d)La criminalisation de l’avortement (art. 305 du Code pénal) et les conditions restrictives dans lesquelles l’avortement est autorisé eu égard au code de déontologie médicale, ce qui oblige les filles à recourir à des avortements clandestins au péril de leur vie ; et

e)L’inadéquation des services de santé mentale pour adolescents.

Compte tenu de son observation générale n o 4 (2003) sur la santé et le développement de l ’ adolescent, le Comité exhorte l ’ État partie à :

a) Adopter une politique globale en matière de santé sexuelle et procréative des adolescents et à introduire dans les écoles en tant que matière obligatoire du programme d ’ études une éducation relative à la santé sexuelle et procréative et aux droits s ’ y rapportant adaptée à l ’ âge des destinataires ; mener des campagnes de sensibilisation sur les méthodes modernes de contraception dans les langues locales ; accroître l ’ accès à des contraceptifs sûrs et abordables dans l ’ ensemble du pays en portant une attention particulière à la prévention des grossesses précoces et des infections sexuellement transmissibles ;

b) Élaborer et appliquer une politique visant à protéger les droits des adolescentes enceintes, des mères adolescentes et de leurs enfants et à combattre la discrimination envers ces personnes ;

c) Prendre des mesures pour faire connaître et promouvoir la paternité et les comportements sexuels responsables, s ’ adressant en particulier aux garçons et aux hommes ;

d) Modifier l ’ article 305 du Code pénal, le c ode de déontologie médicale et les dispositions législatives pertinentes pour dépénaliser l ’ avortement dans toutes les circonstances, dans le souci de garantir l ’ intérêt supérieur des adolescentes enceintes ;

e) Renforcer les services de conseil en santé mentale s ’ adressant aux adolescents et les faire connaître et les rendre accessibles aux adolescents .

Abus de drogues et de substances

Le Comité prend note de l’adoption de la loi no 2007-31, qui criminalise les infractions liées à la drogue, mais il s’inquiète de la consommation accrue par les enfants et les jeunes de drogues et de substances provoquant une addiction.

Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre toutes les mesures requises pour faire face au phénomène de la consommation de drogues par les enfants et les adolescents, notamment en leur fournissant des informations précises et objectives ainsi qu ’ en leur dispensant un enseignement sur les compétences de vie courante axé sur la prévention de l ’ abus de drogues et de substances, ainsi que de mettre en place des services de traitement de la toxicomanie et de réduction des risques accessibles et adaptés aux jeunes .

Niveau de vie

Le Comité salue l’adoption du Plan Sénégal émergent, notamment son programme national de transferts monétaires ciblant les ménages pauvres, et la mise en œuvre de la Stratégie nationale de protection sociale 2005-2015, mais il reste vivement préoccupé par les points suivants :

a)Près de la moitié des enfants du pays vivent dans des familles à revenu modique (inférieur au seuil national de pauvreté) et les mesures structurelles et à long terme visant à préserver les familles de la pauvreté sont insuffisantes, les régions rurales étant les plus défavorisées ;

b)Les programmes sociaux ciblant les familles les plus vulnérables, dont les programmes donnant accès gratuitement à l’éducation et aux services de santé, sont fortement tributaires de la coopération internationale ;

c)Les systèmes décentralisés ne sont pas assez bien équipés ou financés pour assurer la fourniture adéquate de services sociaux de base au niveau local.

Le Comité exhorte l ’ État partie à :

a) S ’ attaquer plus systématiquement au problème des enfants pauvres et aux disparités régionales, en intégrant des indicateurs sur les enfants pauvres au cadre harmonisé de suivi du Plan Sénégal émergent et en faisant en sorte que la prestation décentralisée de services repose sur des diagnostics, une planification, une budgétisation et des rapports centrés sur le problème des enfants pauvres ;

b) Réduire l ’ effet de la dépendance à l ’ égard de la coopération extérieure ;

c) S ’ assurer que, dans le contexte de la décentralisation, les mécanismes de transferts intergouvernementaux répondent aux besoins prioritaires des régions les plus pauvres ;

d) Veiller à ce que les critères de ciblage, le mécanisme de réduction de la pauvreté et les mesures de protection sociale tiennent tous compte des enfants, et recueillir des données sur le nombre d ’ enfants vivant dans des ménages pauvres qui sont ciblés par des mesures de protection sociale et en bénéficient ;

e) Répertorier et évaluer les plans d ’ action en faveur des investissements publics au regard de leur impact sur la baisse du nombre d ’ enfants pauvres, notamment en accordant à bon escient la priorité aux projets les plus susceptibles de faire sortir des enfants de la pauvreté en créant de la croissance, de l ’ emploi et des revenus dans les secteurs intéressant le plus les familles pauvres avec enfants eu égard à leurs caractéristiques types .

H.Éducation, loisirs et activités culturelles (art. 28 à 31)

Éducation, y compris la formation et l’orientation professionnelles

Le Comité prend note des diverses mesures prises par l’État partie pour favoriser l’accès à l’éducation, mais il reste préoccupé par :

a)L’impact négatif des coûts indirects de l’éducation (achat de livres, d’uniformes et d’autres fournitures scolaires) sur l’accès des enfants à l’éducation, en particulier des enfants qui vivent dans la pauvreté ;

b)Les faibles taux d’inscription dans les degrés préprimaire, secondaire et tertiaire de l’enseignement, en particulier des filles du fait des mariages précoces, de la préférence des parents pour l’éducation de leurs fils et des grossesses d’adolescentes ;

c)La forte proportion de filles exposées à la violence sexuelle et au harcèlement sexuel sur le chemin de l’école, sur le chemin du retour de l’école ou à l’école, y compris de la part d’enseignants ;

d)Les taux élevés d’abandon à tous les niveaux de l’éducation ;

e)Le taux d’analphabétisme bien plus élevé que la moyenne chez les filles, en particulier dans les zones rurales ;

f)La piètre qualité de l’éducation à tous les niveaux ;

g)Le manque d’information sur les initiatives et les programmes mis en œuvre pour faciliter l’accès à l’éducation pour les enfants en situation de vulnérabilité ;

h)L’absence de politique définie et cohérente visant à relever le niveau des daaras pour les intégrer au système formel.

  Compte tenu de son observation générale n o 1 (2001) relative aux buts de l ’ éducation, le Comité recommande ce qui suit à l ’ État partie :

a) Assurer la pleine application de la loi n o 2004-37 en éliminant les coûts directs et indirects de l ’ éducation ;

b) Assurer aux filles l ’ égalité d ’ accès et de rétention à tous les niveaux de l ’ éducation, en droit et dans la pratique, en renforçant les mesures destinées à inciter les parents à envoyer leurs filles à l ’ école, en éliminant les mariages précoces, en assurant la sécurité des trajets vers et depuis l ’ école et en sensibilisant les communautés, les familles, les élèves, les enseignants et les chefs communautaires à l ’ importance que l ’ éducation revêt pour les filles ;

c) Appliquer une politique de tolérance zéro envers la violence sexuelle et le harcèlement sexuel à l ’ école et sur le chemin vers ou depuis l ’ école et veiller à ce que les auteurs des faits, y compris les enseignants, soient punis de façon appropriée ;

d) Prendre des mesures pour dispenser des cours d ’ alphabétisation aux femmes et aux filles, en particulier dans les zones rurales ;

e) Prendre les mesures voulues pour améliorer la qualité de l ’ éducation , notamment en dispensant une formation de qualité aux enseignants ;

f) Accélérer la réforme des daaras sur les plans de la pertinence, de la structure et de la gestion, notamment en introduisant dans leur programme des matières scientifiques et techniques et une instruction civique ;

g) Assurer le suivi et l ’ application de la circulaire n o 004379 du 11 octobre 2007 pour assurer aux filles enceintes et aux jeunes mères l ’ accès à l ’ éducation et la réintégration dans le système éducatif ordinaire ;

h) Fournir dans son prochain rapport périodique des informations sur les initiatives et programmes mis en œuvre pour faciliter l ’ accès à l ’ éducation aux enfants en situation de vulnérabilité, notamment les orphelins, les enfants de famille monoparentale, les enfants des rues, les enfants en conflit avec la loi, les enfants appartenant à une minorité ethnique et les enfants réfugiés ou demandeurs d ’ asile.

I.Mesures de protection spéciales (art. 22, 30, 32, 33, 35, 36, 37 b) à d)) et 38 à 40)

Enfants demandeurs d’asile et enfants réfugiés

Le Comité est préoccupé par l’insuffisance des capacités et ressources disponibles pour faire face au flux de réfugiés, principalement des Mauritaniens, en particulier pour leur fournir de la nourriture et des services de base. Il est aussi préoccupé par le manque de données statistiques ventilées sur la situation des enfants réfugiés, ainsi que sur les résultats de la campagne lancée en 2012 par le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) en partenariat avec le Gouvernement sénégalais en vue d’enregistrer les réfugiés mauritaniens et de leur délivrer des cartes d’identité biométriques.

Le Comité exhorte l ’ État partie à se doter d ’ un cadre juridique complet relatif aux réfugiés et aux demandeurs d ’ asile qui soit conforme aux normes internationales et à établir un mécanisme de coopération efficace avec le HCR afin de détecter les enfants ayant besoin d ’ une protection, en particulier les enfants non accompagnés demandeurs d ’ asile, de les aider et de faciliter leur intégration dans la société sénégalaise, y compris leur accès à l ’ éducation, à la santé et aux services sociaux.

Enfants touchés par le conflit armé

Le Comité se réjouit du cessez-le-feu unilatéral annoncé par le Mouvement des forces démocratiques de Casamance en avril 2014 et de l’amélioration consécutive de la situation en matière de sécurité en Casamance. Le Comité accueille avec satisfaction la création de l’Agence nationale de relance des activités économiques et sociales en Casamance, ainsi que les mesures prises pour protéger les enfants touchés par le conflit armé, notamment en améliorant la prévention des accidents causés par les mines terrestres et en apportant aux enfants victimes d’une mine un soutien psychosocial et matériel. Le Comité reste toutefois préoccupé par le fait qu’il n’est pas suffisamment répondu aux besoins physiques, psychologiques et sociaux des enfants vivant dans la région et que les mines terrestres posées du temps du conflit constituent toujours une menace.

Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre toutes les mesures voulues, y compris en recourant à la coopération internationale, pour répondre davantage aux besoins physiques, psychologiques, sociaux et en matière de réintégration des enfants touchés par le conflit et de poursuivre ses efforts pour déminer les anciennes zones de conflit, notamment en veillant à la bonne exécution du programme de déminage humanitaire et en dotant de ressources humaines, techniques et financières adéquates le Centre national d ’ action antimines au Sénégal.

Exploitation économique, notamment le travail des enfants

Le Comité prend note avec satisfaction des informations fournies par l’État partie concernant les différentes mesures et initiatives prises pour lutter contre le travail des enfants, ainsi que de l’adoption et du lancement, en juillet 2013, du Plan cadre national de prévention et d’élimination du travail des enfants. Le Comité prend toutefois note avec une profonde préoccupation des points suivants :

a)De nombreux enfants travaillent avant d’avoir atteint l’âge minimum d’admission à l’emploi et sont affectés à des tâches qui les exposent à des dangers, en particulier dans l’agriculture, l’industrie minière et la pêche, le travail domestique et la vente dans la rue ;

b)En vertu des dispositions de l’arrêté ministériel no 3750/MFPTEOP/DTSS (2003), des garçons de moins de 16 ans peuvent être autorisés à travailler dans les mines souterraines, les carrières et le secteur de la pêche ;

c)Le nombre grandissant de filles soumises à la pratique du confiage ou travaillant comme domestiques (petites bonnes), qui sont ainsi exposées à une exploitation économique et voient compromises leur santé, leur intégrité physique et leur éducation.

Le Comité exhorte l ’ État partie à :

a) Modifier et réviser le Code du travail, qui autorise des dérogations à l ’ âge minimum d ’ admission à l ’ emploi en vertu d ’ un arrêté du Ministre du travail (art .  L.145 du Code du travail), et veiller à ce que les enfants de moins de 18 ans ne puissent être embauchés pour travailler dans les mines souterraines, les carrières et le secteur de la pêche, et à ce que les conditions prévues au paragraphe 3 de l ’ article 3 de la Convention soient entièrement garanties pour les jeunes travailleurs âgés de 16 à 18 ans affectés aux tâches visées dans l ’ arrêté ministériel n o 3750 du 6 juin 2003 ;

b) Veiller à ce que l ’ âge minimum d ’ admission à l ’ emploi (fixé à 16 ans) soit respecté aussi dans le secteur informel, en prenant des mesures pour étendre la couverture du service de l ’ inspection du travail et le renforcer de manière à assurer le contrôle du travail des enfants dans l ’ économie informelle et à garantir à ces enfants la protection prévue par la Convention ;

c) Prendre toutes les mesures nécessaires pour sensibiliser aux menaces pesant sur les filles soumises à la pratique du confiage ou placées comme domestiques ;

d) Établir des mécanismes et services de protection pour éviter que les enfants à risque ne soient réduits à travailler, en particulier à effectuer des tâches dangereuses, et garantir aux enfants victimes de ces pratiques l ’ accès aux services sociaux, médicaux, psychologiques et de réadaptation et à des recours juridique s ;

e) Prendre des mesures pour s ’ attaquer aux facteurs socioéconomiques qui concourent au travail des enfants ;

f) Envisager de ratifier la Convention de l ’ Organisation internationale du Travail n o 189 (2011) relative aux travailleuses et aux travailleurs domestiques ;

g) Renforcer la collaboration et la coopération avec le Programme international pour l ’ abolition du travail des enfants de l ’ OIT, à cet égard .

Enfants des rues et talibés

Le Comité se réjouit des initiatives prises par l’État partie pour assurer une protection aux enfants des rues. Le Comité demeure néanmoins vivement préoccupé par :

a)L’augmentation du nombre d’enfants des rues dans l’État partie ;

b)Les conditions d’apprentissage et de vie précaires des enfants des rues, qui, selon certaines sources, sont mal nourris, maltraités et vulnérables aux maladies.

Le Comité exhorte l ’ État partie à faire respecter les droits et à répondre aux besoins des enfants des rues et à faciliter leur réinsertion sociale en prenant les mesures suivantes :

a) Procéder à une étude et à une analyse statistique poussées des causes profondes et de l ’ ampleur du phénomène des enfants des rues dans l ’ État partie ;

b) Élaborer une stratégie nationale et un plan d ’ action national et affecter à leur mise en œuvre des ressources financières, humaines et techniques suffisantes pour soutenir les enfants des rues et remédier aux désavantages socioéconomiques et aux autres causes profondes de la vulnérabilité des enfants des rues, ainsi qu ’ à la violence à laquelle ils sont parfois exposés, y compris de la part d ’ agents des forces de l ’ ordre ;

c) Veiller à la bonne mise en œuvre des initiatives visant à assurer aux enfants des rues une alimentation adéquate, des vêtements, un toit, des soins de santé et des possibilités d ’ éducation, en particulier d ’ éducation informelle et de formation aux compétences de vie courante, pour favoriser leur plein épanouissement et, quand tel est leur intérêt supérieur, leur réintégration dans leur famille et leur communauté ;

d) Fournir, au besoin, des services de réinsertion et de rétablissement aux enfants des rues victimes de violences physiques ou sexuelles ou d ’ addiction à des substances.

Le Comité prend note des mesures prises par l’État partie pour prévenir la mendicité forcée. Il félicite l’État partie d’avoir mis en œuvre le Plan cadre national pour l’élimination de la mendicité 2013-2015. Toutefois, il se dit à nouveau vivement préoccupé par :

a)La législation actuelle, qui autorise certaines formes de mendicité si elles sont pratiquées « dans les lieux et dans les conditions consacrés par les traditions religieuses » ;

b)Les pratiques actuelles dans les écoles coraniques dirigées par des marabouts, qui consistent à utiliser à grande échelle les talibés à des fins économiques en les envoyant dans la rue pour mendier ou effectuer d’autres travaux illégaux rapportant de l’argent, ce qui les empêche d’avoir accès à la santé, à l’éducation et à de bonnes conditions de vie;

c)La prévalence croissante de la mendicité forcée dans les grandes villes du Sénégal, qui concerne principalement des talibés de moins de 12 ans victimes de la traite venus des zones rurales du pays ou de pays voisins ;

d)Les taux très faibles de poursuite et de condamnation des personnes exploitant et maltraitant des enfants, y compris les enseignants coraniques.

Le Comité exhorte l ’ État partie à :

a) Modifier les lois pertinentes afin d ’ interdire expressément toutes les formes de mendicité dans tous les cadres, y compris en revoyant et modifiant l ’ article 245 du Code pénal, qui autorise certaines formes de mendicité si elles sont pratiquées « dans les lieux et dans les conditions consacrés par les traditions religieuses » ;

b) Renforcer les mesures visant à soustraire les enfants talibés au contrôle des enseignants coraniques qui les exploitent et les maltraitent et appliquer pleinement la législation qui interdit l ’ exploitation de la mendicité d ’ autrui, y compris en ouvrant sans tarder des enquêtes et des poursuites contre les auteurs de tels actes et en les condamnant en conséquence ;

c) Adopter de nouvelles mesures pour garantir aux talibés , y compris ceux originaires de pays voisins, l ’ exercice effectif de leurs droits fondamentaux et pour protéger ces enfants contre toute forme d ’ exploitation et de discrimination ;

d) Entreprendre des efforts en vue d ’ établir un système permettant à l ’ État partie de surveiller avec efficacité la situation des talibés , en étroite coopération avec les chefs religieux et communautaires ;

e) Instituer des programmes d ’ aide aux familles, ainsi que des campagnes de sensibilisation, en vue de favoriser la réinsertion de ces enfants dans leur famille.

Vente, traite et enlèvement

Le Comité prend note des diverses mesures prises par l’État partie pour combattre la traite des personnes, mais il est vivement préoccupé par le très faible pourcentage des cas de traite, de mendicité forcée, de prostitution des enfants ou de travail forcé des enfants donnant lieu à l’ouverture d’enquêtes et de poursuites et à la condamnation des auteurs des faits. Le Comité constate en outre avec regret que la loi no 2005-06 relative à la lutte contre la traite des personnes et pratiques assimilées et à la protection des victimes, qui interdit et criminalise la traite des personnes, ne définit ni n’interdit la vente d’enfants. Le Comité est de plus préoccupé par l’absence :

a)De données sur l’exploitation sexuelle, y compris le tourisme sexuel et la traite des enfants, dans l’État partie ;

b)De dispositif de protection et d’aide à la réadaptation pour les enfants victimes d’exploitation sexuelle ;

c)De dispositions législatives protégeant les enfants contre l’exploitation sexuelle, y compris le tourisme sexuel.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De faire appliquer la l oi n o 2005-06 relative à la lutte contre la traite des personnes et pratiques assimilées et à la protection des victimes, et la disposition du Code pénal qui interdit les relations sexuelles avec une fille de moins de 12 ans ;

b) De réviser le Code pénal en vue d ’ y inclure une définition expresse de la vente d ’ enfant s , conformément au Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l ’ enfant concernant la vente d ’ enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants et de prévoir des peines pour les auteurs de cette infraction  ;

c) De renforcer les mesures juridiques qui protègent les enfants victimes d ’ exploitation sexuelle par la traite, la pornographie, la prostitution et le tourisme sexuel, notamment ;

d) De faire une priorité de l ’ aide à la réadaptation et de veiller à ce qu ’ une éducation, une formation, une aide psychologique et des conseils soient fournis aux enfants victimes, et prévenir le placement en institution des victimes qui ne peuvent pas retourner dans leur famille ;

e) De dispenser aux agents des forces de l ’ ordre, aux travailleurs sociaux et aux procureurs une formation sur la façon de recueillir les plaintes, de les suivre et de les instruire en respectant la sensibilité et la vie privée des enfants victimes ;

f) De mettre en œuvre des politiques et programmes aux fins tant de la prévention que de la réadaptation et de la réinsertion des enfants victimes, conformément à la déclaration et au programme d ’ action et à l ’ engagement mondial adoptés lors du Congrès mondial de 2001 contre l ’ exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales .

Administration de la justice pour mineurs

Le Comité prend note de la création de 14 tribunaux pour enfants dans le pays, ainsi que des efforts entrepris pour réviser le Code pénal et le Code de procédure pénale pour faire en sorte de donner aux enfants de 13 à 18ans qui sont en conflit avec la loi la possibilité de bénéficier d’une aide et d’une protection, ainsi que de certaines mesures de substitution à la détention. Le Comité reste toutefois préoccupé par les points suivants:

a)Le Code pénal en vigueur est imprécis au sujet des mesures d’aide sociale et de protection en faveur des enfants en conflit avec la loi, ainsi qu’au sujet des mécanismes spéciaux destinés à appuyer les enfants et les familles pour leur assurer le bénéfice de ces mesures ;

b)La justice pour mineurs manque de juges spécialisés et le nombre d’éducateurs sociaux correctement formés est limité;

c)La privation de liberté n’est pas utilisée en dernier recours et des enfants ont été détenus dans des prisons pour adultes.

Compte tenu de son observation générale n o 10 (2007) sur les droits de l ’ enfant dans le système de justice pour mineurs, le Comité exhorte l ’ État partie à mettre son système de justice pour mineurs en pleine conformité avec la Convention et avec les autres normes pertinentes. En particulier, le Comité exhorte l ’ État partie à :

Accélérer l ’ adoption des versions révisées du Code pénal et du Code de procédure pénale ;

b) Assurer la fourniture d ’ une aide juridictionnelle par des personnes qualifiées et indépendantes aux enfants en conflit avec la loi à un stade précoce de la procédure et tout au long de la procédure judiciaire ;

c) Établir dans l ’ ensemble du pays des juridictions spécialisées pour administrer la justice pour mineurs, en les dotant de ressources humaines, techniques et financières suffisantes, et continuer de dispenser une formation sur les normes internationales pertinentes aux personnes chargées d ’ administrer le système de justice pour mineurs ;

d) Promouvoir des mesures de substitution à la détention, telles que la déjudiciarisation, la probation, la médiation, le conseil et le travail d ’ intérêt général, chaque fois que possible, et veiller à ce que la détention ne soit utilisée que comme mesure de dernier recours, soit d ’ une durée aussi brève que possible et fasse l ’ objet d ’ un réexamen régulier en vue de sa levée ; veiller, dans les cas où la détention est inévitable, à ce que les enfants ne soient pas détenus avec des adultes et à ce que les conditions de détention soient conformes aux normes internationales, notamment en ce qui concerne l ’ accès à l ’ éducation et aux services de santé  ;

e ) Mettre à la disposition des personnes de moins de 18 ans condamnées ou libérées des possibilités de formation, notamment des cours de formation professionnelle et des cours sur les compétences de vie courante, ainsi que des services de réadaptation et de réinsertion sociale ;

f ) À cet égard, le Comité recommande à l ’ État partie d ’ utiliser les outils d ’ assistance technique mis au point par le Groupe interinstitutions sur la justice pour mineurs et ses membres, notamment le HCDH, l ’ Office des Nations Unies contre la drogue et le crime, l ’ UNICEF et des organisations non gouvernementales, et de solliciter l ’ assistance technique des membres du Groupe dans le domaine de la justice pour mineurs.

J.Ratification du Protocole facultatif établissant une procédure de présentation de communications

Le Comité recommande à l ’ État partie, en vue de renforcer encore l ’ exercice des droits de l ’ enfant, de ratifier le Protocole facultatif établissant une procédure de présentation de communications .

K.Ratification des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme

Le Comité recommande à l ’ État partie, en vue de renforcer encore l ’ exercice des droits de l ’ enfant, de ratifier les principaux instruments relatifs aux droits de l ’ homme auxquels il n ’ est pas encore partie, à savoir le Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, le deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, visant à abolir la peine de mort, et le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits des personnes handicapées.

Le Comité exhorte l ’ État partie à s ’ acquitter de ses obligations en matière de soumission de rapports au titre du Protocole facultatif concernant l ’ implication d ’ enfants dans les conflits armés et du Protocole facultatif concernant la vente d ’ enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, en soumettant les rapports qui étaient attendus au plus tard le 3 avril 2006 et le 5 décembre 2005, respectivement.

L.Coopération avec les organismes régionaux

Le Comité recommande à l ’ État partie de coopérer avec le Comité africain d ’ experts sur les droits et le bien-être de l ’ enfant de l ’ Union africaine en vue de la mise en œuvre de la Convention et des autres instruments relatifs aux droits de l ’ homme, dans l ’ État partie comme dans d ’ autres États membres de l ’ Union africaine.

IV.Mise en œuvre et soumission de rapports

A.Suivi et diffusion

Le Comité recommande à l ’ État Partie de prendre toutes les mesures propres à garantir la pleine application des présentes recommandations. Le Comité recommande en outre que le rapport valant troisième à cinquième rapports périodiques et les réponses écrites de l ’ État partie ainsi que les recommandations s ’ y rapportant et les présentes observations finales soient largement diffusés dans les langues du pays.

B.Prochain rapport

80. Le Comité invite l ’ État partie à soumettre en un seul document ses sixième et septième rapports périodiques le 1 er mars 2021 au plus tard et à y faire figurer des renseignements sur la suite donnée aux présentes observations finales. Ces rapports devront être conformes aux directives spécifiques à l ’ instrument adoptées le 31 janvier 2014 ( CRC/C/58/Rev.3) et ne pas dépasser 21 200 m ots, conformément au paragraphe  16 de la résolution 68/268 de l ’ Assemblée générale. Si l ’ État partie soumet un rapport dont le nombre de mots excède la limite fixée, il sera invité à en réduire la longueur de manière à se conformer à la résolution susmentionnée. S ’ il n ’ est pas en mesure de remanier son rapport et de le soumettre à nouveau, la traduction de ce rapport aux fins d ’ examen par le Comité ne pourra être garantie .