Nations Unies

CERD/C/KAZ/CO/8-10

Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale

Distr. générale

4 juillet 2022

Français

Original : anglais

Comité pour l’élimination de la discrimination raciale

Observations finales concernant le rapport du Kazakhstan valant huitième à dixième rapports périodiques *

1.Le Comité a examiné le rapport du Kazakhstan valant huitième à dixième rapports périodiques, que l’État partie lui a présenté lorsqu’il l’a rencontré pour la quatrième fois, à ses 2879e et 2880e séances, les 21 et 22 avril 2022. À sa 2885e séance, le 26 avril 2022, il a adopté les observations finales ci-après.

A.Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport de l’État partie valant huitième à dixième rapports périodiques. Il se félicite du dialogue constructif qu’il a eu avec la délégation de l’État partie et la remercie pour les informations qu’elle lui a fournies durant l’examen du rapport et après le dialogue.

B.Aspects positifs

3.Le Comité note avec satisfaction que l’État partie a ratifié les instruments internationaux suivants :

a)Le Deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, visant à abolir la peine de mort, en 2022 ;

b)La Convention relative aux droits des personnes handicapées, en 2015.

4.Le Comité salue les mesures législatives, institutionnelles et générales ci-après prises par l’État partie :

a)La création, en 2020, du Comité pour le développement des relations interethniques, au Ministère de l’information et du développement social, et de l’Institut de recherche ethnopolitique appliquée ;

b)Les modifications apportées en 2019 au Code national du mariage et de la famille, prévoyant l’enregistrement de la naissance de tous les enfants, quel que soit le statut juridique de leurs parents ;

c)La campagne d’identification et de documentation qui a permis, depuis 2020, d’identifier plus de 8 000 personnes sans papiers ;

d)Le rapatriement, depuis 2019, de 669 personnes qui se trouvaient dans des zones de conflit en Afghanistan, en Iraq et en République arabe syrienne, ainsi qu’en Türkiye ;

e)L’adoption, en 2018, de la loi sur le Fonds d’indemnisation des victimes, qui permet aux victimes d’infractions liées à la traite des personnes de recevoir des indemnités financières.

C.Préoccupations et recommandations

Statistiques

5.Le Comité regrette que l’État partie ne lui ait pas fourni assez de statistiques détaillées sur la situation sociale et économique des groupes ethniques vivant sur son territoire, y compris les personnes d’ascendance africaine (art. 1er et 2).

6. Le Comité recommande à l’État partie de mettre en place un dispositif permettant de recueillir régulièrement des statistiques fiables sur la situation sociale et économique, notamment en matière d’éducation, d’emploi, de santé et de logement, des groupes ethniques vivant sur son territoire, y compris les personnes d’ascendance africaine. Il recommande également que ces statistiques soient publiées régulièrement et que l’État partie les fasse figurer dans son prochain rapport périodique.

Législation antidiscrimination

7.Le Comité note que la Constitution et un certain nombre de lois sectorielles contiennent des dispositions interdisant la discrimination raciale, mais il s’inquiète toujours de ce que l’État partie ne dispose pas d’une loi complète de lutte contre la discrimination, comprenant une définition de la discrimination directe et indirecte et incriminant les actes de discrimination raciale dans tous les domaines de la vie. Le Comité s’inquiète également de ce que le Code du travail n’a pas été modifié de manière à interdire expressément la discrimination fondée sur la couleur (art. 1 et 2).

8.Rappelant sa recommandation antérieure , le Comité recommande à l’État partie d’adopter une loi complète de lutte contre la discrimination, comprenant une définition de la discrimination directe et indirecte, conformément au paragraphe 1 de l’article premier de la Convention. Il lui recommande également de modifier le Code du travail de manière à interdire expressément la discrimination fondée sur la couleur.

Place de la Convention dans le droit interne

9.Prenant note de l’information communiquée par l’État partie selon laquelle la Convention est directement applicable dans l’ordre juridique interne, le Comité est toutefois préoccupé par l’absence d’informations sur la manière dont l’État partie assure l’application des dispositions de la Convention qui nécessitent des textes d’application (art. 2).

10. Le Comité recommande à l’État partie de revoir sa législation nationale afin que toutes les dispositions de la Convention puissent être appliquées par les tribunaux nationaux ou invoquées devant eux. Il lui recommande également de veiller à ce que les membres du corps législatif, les juges, les magistrats, les avocats et les autres fonctionnaires concernés reçoivent systématiquement des formations sur les dispositions de la Convention.

Formes de discrimination croisée

11.Le Comité est préoccupé par les signalements relatifs à des formes de discrimination croisée fondée sur la race, la couleur, l’ascendance ou l’origine nationale ou ethnique, ainsi que sur d’autres motifs tels que la religion, le genre, l’âge, le handicap et l’orientation sexuelle (art. 1er, 2 et 5).

12. Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures législatives et pratiques pour lutter contre toutes les formes de discrimination raciale, telle que définie à l’article premier de la Convention, qui se croisent avec la discrimination fondée sur d’autres motifs, tels que la religion, le genre, l’âge, le handicap et l’orientation sexuelle.

Institutions nationales des droits de l’homme

13.Le Comité se félicite que l’État partie ait consolidé le mandat du Commissaire aux droits de l’homme (ou Médiateur), mais il demeure préoccupé par les informations selon lesquelles l’institution dirigée par le Commissaire ne serait pas pleinement conforme aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris) et le Commissaire ne serait pas totalement indépendant. Il s’inquiète également de l’insuffisance des activités que mène la Commissaire actuelle pour lutter contre la discrimination raciale (art. 2).

14.Le Comité recommande à l’État partie de renforcer l’indépendance du Commissaire aux droits de l’homme et de veiller à ce qu’il puisse s’acquitter de son mandat dans le plein respect des Principes de Paris. Il lui recommande également de prendre des mesures pour que le Commissaire puisse véritablement examiner le phénomène de la discrimination raciale, y compris la discrimination systémique, et y remédier. Il recommande en outre que le Commissaire contre la discrimination raciale publie régulièrement des rapports sur ses activités.

Liberté d’expression

15.Le Comité craint que les dispositions rédigées en termes trop généraux de l’article 174 du Code pénal, notamment en ce qui concerne l’incitation à la discorde fondée sur l’appartenance sociale, ethnique, tribale ou raciale, la classe ou la religion, ne portent atteinte de manière injustifiée ou disproportionnée au droit à la liberté d’expression, en particulier pour les groupes ethniques minoritaires. Le Comité s’inquiète également que l’article 13 de la loi relative aux médias puisse nuire de manière disproportionnée au droit à la liberté d’expression des médias (art. 4 et 5).

16. Le Comité recommande à l’État partie de définir clairement et de revoir les infractions pénales visées à l’article 174 du Code pénal, et de veiller à ce que les peines prévues ne portent pas atteinte de manière injustifiée ou disproportionnée au droit à la liberté d’expression des défenseurs des droits de l’homme, en particulier ceux issus de groupes ethniques minoritaires. Il lui recommande également de modifier la loi relative aux médias, de sorte que ses dispositions n’entraînent pas de restrictions excessives du droit à la liberté d’expression des médias.

Discours de haine raciale

17.Le Comité constate avec inquiétude que les discours de haine raciale visant des groupes ethniques minoritaires prolifèrent sur Internet et dans les médias sociaux, alimentant les violences ethniques dans l’État partie. Il est également préoccupé par le manque de statistiques rendant compte des discours de haine raciale (art. 4).

18.Le Comité rappelle sa recommandation générale n o 35 (2013) sur la lutte contre les discours de haine raciale et recommande à l’État partie:

a)D’améliorer et de renforcer les mesures destinées à surveiller et à combattre les discours de haine raciale sur Internet et dans les médias sociaux et, selon qu’il convient, à enquêter dessus et à engager des poursuites contre leurs auteurs, tout en veillant à ce que ces mesures respectent le droit à la liberté d’expression, et de travailler avec les fournisseurs d’accès à Internet à cette fin ;

b)D’accélérer l’élaboration prévue de directives sur la lutte contre les discours de haine raciale dans la sphère publique ;

c)De recueillir et d’analyser des statistiques sur les discours de haine raciale et de les présenter dans son prochain rapport périodique.

Législation contre l’incitation à la violence et les organisations extrémistes

19.Le Comité note une nouvelle fois avec inquiétude que le Code pénal de l’État partie n’est pas pleinement conforme aux exigences des alinéas a) et b) de l’article 4 de la Convention (art. 4).

20.Le Comité recommande que, conformément aux alinéas a) et b) de l’article 4 de la Convention, l’État partie révise sa législation de manière à :

a)Interdire l’incitation à la violence contre tout groupe de personnes fondée sur des motifs de race, de couleur, d’ascendance ou d’origine nationale ou ethnique ;

b)Déclarer illégales et interdire les organisations et toutes les activités de propagande ou autre qui incitent à la discrimination raciale et l’encouragent ;

c)Interdire et réprimer la participation à ces organisations ou à ces activités.

Tensions entre groupes ethniques

21.Le Comité est préoccupé par les informations selon lesquelles il y aurait dans l’État partie des tensions entre groupes ethniques et des actes récurrents de violence interethnique. Il constate également avec inquiétude qu’il n’y a pas dans l’État partie de débat ouvert sur la discrimination raciale, les crimes de haine à caractère raciste et les tensions et conflits interethniques. Il prend note du changement d’activité de l’Assemblée du peuple du Kazakhstan, qui est passée de l’organisation de manifestations culturelles à la détection et à la résolution des tensions et conflits interethniques, mais craint que l’Assemblée ne soit pas suffisamment efficace dans l’accomplissement de ces tâches (art. 4 et 7).

22.Le Comité recommande à l’État partie :

a)De reconnaître que les groupes ethniques minoritaires pâtissent d’une discrimination systémique et qu’il existe sur son territoire des tensions entre groupes ethniques, de créer des possibilités de dialogue ouvert entre les différents groupes ethniques et de permettre des débats publics sur les tensions et les conflits ethniques ;

b)De multiplier et de renforcer les mesures visant à promouvoir l’harmonie et la tolérance interethniques et à surmonter les préjugés et les stéréotypes négatifs, notamment dans les écoles et les universités et par l’intermédiaire des médias ;

c)De veiller à ce que les autorités locales et les responsables de l’application de la loi soient formés à la détection et à la résolution des tensions ethniques susceptibles d’entraîner des conflits violents ;

d)De renforcer le pouvoir juridique et politique de l’Assemblée du peuple du Kazakhstan et de lui permettre d’être plus efficace dans la promotion de la coexistence pacifique des groupes ethniques sur le territoire et dans la prévention et la résolution des tensions et conflits ethniques, notamment par la médiation.

Minorité doungane

23.Le Comité prend note des informations selon lesquelles les actes de violence à caractère ethnique qui ont été perpétrés contre des personnes appartenant à la communauté doungane dans le district de Kordaï en février 2020 découlaient de tensions ethniques de longue date. Il constate avec inquiétude que ces tensions persistent, faisant régner la peur dans la communauté doungane, en dépit des efforts que l’État partie a déployés pour y remédier. Il est également préoccupé par les informations selon lesquelles les membres de la communauté doungane n’ont pas bénéficié de procès équitable ni d’indemnités suffisantes pour les dommages causés à leurs biens (art. 4 et 5).

24.Le Comité recommande à l’État partie:

a)De renforcer les mesures prises pour prévenir les actes de violence à caractère ethnique visant des membres de la communauté doungane, notamment en intensifiant ses activités destinées à instaurer la confiance et à établir des relations harmonieuses entre les Dounganes et les communautés voisines ;

b)D’enquêter sur les allégations selon lesquelles des personnes de la communauté doungane ayant fait l’objet d’enquêtes et de procédures pénales liées aux événements violents de février 2020 n’ont pas bénéficié de procès équitable, et d’identifier les responsables de ces violences, notamment les éventuels instigateurs ;

c) D’accorder des indemnités adéquates aux victimes dounganes des événements violents de février 2020, notamment pour les véhicules perdus et le bétail volé.

Roms

25.Le Comité note que la loi confère les mêmes droits à tous les citoyens de l’État partie et que les autorités n’ont reçu aucune plainte pour discrimination raciale à l’égard des Roms, mais il regrette de ne pas avoir reçu de renseignements sur la situation sociale et économique des membres de cette communauté, qui pourraient indiquer s’ils souffrent de discrimination dans les faits (art. 5).

26. À la lumière de sa recommandation générale n o 27 (2000) sur la discrimination à l’égard des Roms, le Comité recommande à l’État partie de définir et de promouvoir des modalités appropriées de communication et de dialogue entre les communautés roms et les autorités centrales et locales, dans l’optique de recevoir des informations fiables sur toute forme de discrimination visant les Roms. Il lui recommande également d’inclure dans son prochain rapport périodique des statistiques relatives aux communautés roms relevant de sa juridiction, en particulier des statistiques ventilées par sexe sur la participation des Roms à la vie politique et sur leur situation économique, sociale et culturelle.

Identité kazakhe

27.Le Comité apprend avec inquiétude qu’il existe un discours officiel, y compris dans les programmes scolaires, qui établit une distinction entre les Kazakhs de souche autochtones et les groupes ethniques minoritaires, ces derniers étant qualifiés « d’hôtes », ce qui leur donne un sentiment d’exclusion. Il apprend également avec préoccupation qu’une politique encourageant les Kazakhs de souche à se réinstaller dans certaines régions du pays créerait des tensions (art. 2, 4 et 5).

28. Le Comité recommande à l’État partie de ne pas promouvoir un discours officiel qui divise la population et qui suscite des sentiments d’exclusion dans certains groupes ethniques. Il lui recommande également de veiller à ce que ses programmes de réinstallation des Kazakhs de souche n’entraînent aucune discrimination, d’anticiper toute tension ethnique pouvant résulter de ces réinstallations et d’y remédier efficacement.

Participation des minorités à la vie politique et à la conduite des affaires publiques

29.Le Comité est préoccupé par le fait que les minorités ethniques sont mal intégrées et ne sont pas représentées de façon proportionnelle dans les organes publics de décision et dans la fonction publique (art. 5).

30. Le Comité recommande à l’État partie de faire en sorte que les minorités ethniques, y compris les femmes qui en sont issues, soient représentées de manière juste et équitable dans les organes publics de décision et dans la fonction publique, notamment en prenant des mesures concrètes et en repérant et éliminant les obstacles auxquels les membres de ces minorités se heurtent en la matière. Il lui recommande également de sensibiliser les membres des minorités ethniques à l’importance de leur participation à la vie politique et de leur présence dans la fonction publique.

Enseignement

31.Le Comité est préoccupé par les informations selon lesquelles les enfants dont les parents ne possèdent pas de documents d’enregistrement ou d’autres documents valides ont des difficultés à accéder à l’enseignement primaire et secondaire. Il constate également avec inquiétude qu’il y a peu d’étudiants issus de minorités ethniques inscrits dans l’enseignement postsecondaire (art. 5).

32. Le Comité recommande à l’État partie de faire en sorte que tous les enfants se trouvant sur son territoire jouissent en pratique du droit à l’éducation, sans discrimination, que leurs parents soient ou non en situation régulière sur le territoire. Il lui recommande également de prendre des mesures pour aider les étudiants issus de minorités ethniques à accéder à l’enseignement postsecondaire et d’évaluer périodiquement l’efficacité de ces mesures.

Langues minoritaires

33.Le Comité constate que l’État partie promeut le trilinguisme (kazakh, russe et anglais), mais il craint néanmoins que cette politique ait conduit à marginaliser les langues des minorités ethniques. Il est en outre préoccupé par le nombre insuffisant d’écoles maternelles et de jardins d’enfants offrant un enseignement dans les langues de ces minorités (art. 5).

34. Le Comité recommande à l’État partie de faire en sorte que les enfants issus de minorités ethniques aient suffisamment de possibilités d’enseignement et d’éducation dans leur langue maternelle, notamment dans les écoles maternelles et les jardins d’enfants, en veillant à ce qu’il y ait assez d’établissements, de professionnels et de manuels scolaires.

Travailleurs migrants

35.Le Comité apprend avec inquiétude que des travailleurs migrants subiraient des mauvais traitements et travailleraient dans des conditions médiocres et dangereuses. Il est également préoccupé par le fait que les migrants en situation irrégulière et sans papiers, y compris les enfants et les femmes enceintes, n’ont accès aux soins de santé qu’en cas d’urgence (art. 5).

36. Le Comité recommande à l’État partie de renforcer les mesures visant à prévenir et à combattre les mauvais traitement infligés aux travailleurs migrants et leur exploitation, notamment en intensifiant les activités d’inspections du travail. Il lui recommande également de veiller à ce que tous les travailleurs migrants, quel que soit leur statut, aient accès à un minimum de services, notamment à des soins de santé suffisants, de sorte que leurs droits économiques, sociaux et culturels soient respectés.

Traite des personnes

37.Le Comité constate avec préoccupation qu’il n’existe pas de loi consacrée à la lutte contre la traite des personnes dans l’État partie. Il note également avec inquiétude que, malgré les efforts que l’État partie déploie pour lutter contre ce fléau, le nombre de personnes soumises au travail forcé ou à l’exploitation sexuelle continue d’augmenter. Il est en outre préoccupé d’apprendre que des agents de la force publique seraient complices de faits relevant de la traite des personnes (art. 5).

38. Le Comité recommande à l’État partie d’élaborer et d’adopter une loi destinée à prévenir et à combattre la traite des personnes. Il lui recommande également de continuer à renforcer et d’appliquer effectivement la législation et les mesures existantes de lutte contre l’esclavage et les pratiques assimilées, notamment en veillant à ce que les affaires de traite fassent l’objet d’enquêtes et de poursuites efficaces, y compris à l’égard des agents de la force publique.

Réfugiés et demandeurs d’asile

39.Le Comité est préoccupé par :

a)Les informations selon lesquelles les demandes d’asile soumises par des personnes de certaines nationalités sont parfois refusées sur la base de considérations politiques et de motifs de sécurité ;

b)L’absence de renseignements sur l’existence d’un dispositif pratique permettant aux autorités frontalières d’adresser les réfugiés à l’organisme d’État compétent sur le territoire de l’État partie ;

c)L’absence de dispositions relatives à la protection complémentaire des personnes qui ne se voient pas accorder le statut de réfugié, mais qui ne peuvent pas retourner dans leur pays d’origine parce que des raisons impérieuses s’y opposent, ce qui les empêche d’exercer un certain nombre de droits humains sans discrimination ;

d)Le fait que les réfugiés ne se voient accorder qu’un séjour temporaire d’un an, ce qui leur donne des difficultés s’agissant de trouver un emploi dans le secteur structuré de l’économie et de bénéficier d’un certain nombre de prestations de l’État (art. 5).

40.Le Comité recommande à l’État partie :

a)De prendre des mesures pour que toutes les demandes d’asile, quelles que soient la nationalité et l’origine du demandeur, soient traitées conformément au droit international, en particulier au principe de non-refoulement ;

b)D’établir une procédure d’orientation à l’intention des services de la police des migrations et des services des garde s  frontière de tous les postes frontière, comme il l’a précédemment recommandé et conformément aux règles et normes internationales ;

c)D’adopter des dispositions législatives et de prendre des mesures pratiques pour que les demandeurs d’asile déboutés et toutes les personnes qui ne sont pas officiellement reconnues comme des réfugiés, mais ne peuvent pas retourner dans leur pays d’origine parce que des raisons impérieuses s’y opposent, puissent rester dans le pays jusqu’à ce que leur retour soit sans danger et puissent exercer leurs droits économiques, sociaux et culturels sans discrimination ;

d) D’envisager d’accorder le statut de réfugié pour une durée d’au moins trois ans.

Apatrides

41.Le Comité est préoccupé par les informations selon lesquelles il est difficile pour les apatrides sans papiers de prouver qu’ils n’ont pas de nationalité et, par conséquent, ces personnes et leurs enfants ne peuvent pas jouir d’un certain nombre de droits fondamentaux, notamment en matière d’emploi, d’éducation et de soins de santé. Il est également préoccupé par le fait que la loi sur la nationalité présente des lacunes et comprend des dispositions susceptibles d’entraîner des cas d’apatridie, notamment les dispositions relatives à la déchéance de nationalité introduites en 2017 (art. 5). Il regrette que l’État partie n’ait pas ratifié la Convention de 1954 relative au statut des apatrides ni la Convention de 1961 sur la réduction des cas d’apatridie.

42.Le Comité recommande à l’État partie :

a)De poursuivre ses efforts visant à identifier et à fournir des documents d’identité aux personnes de nationalité indéterminée et de simplifier la procédure de constatation de l’apatridie ;

b)De revoir et de modifier la loi sur la nationalité, notamment ses dispositions relatives à la déchéance de nationalité, afin que son application n’entraîne pas de cas d’apatridie ;

c)De mettre pleinement en œuvre son plan d’action national adopté dans le cadre du Plan d’action global visant à mettre fin à l’apatridie (2014-2024) ;

d) De ratifier la Convention de 1954 relative au statut des apatrides et la Convention de 1961 sur la réduction des cas d’apatridie.

Accès à la justice

43.Le Comité craint que le faible nombre de plaintes et de décisions de justice administrative, civile ou pénale concernant des actes de discrimination raciale ne soit révélateur du fait que les victimes ne disposent pas d’informations suffisantes sur leurs droits, qu’elles craignent la réprobation sociale ou les représailles, que celles dont les ressources sont limitées redoutent le coût et la complexité des procédures judiciaires, ou qu’il existe un manque de confiance à l’égard des autorités de police et de justice. Le Comité est également préoccupé par le fait que les traductions de la législation de l’État partie, qui est généralement rédigée en russe, comportent parfois des erreurs, ce qui peut avoir des incidences néfastes sur l’accessibilité de ces lois pour les non-russophones (art. 6).

44.Le Comité recommande à l’État partie de mener des activités de sensibilisation pour amener le public, en particulier les membres des minorités ethniques, à prendre conscience des actes qui relèvent de la discrimination raciale et des recours judiciaires disponibles, notamment des services gratuits d’aide juridictionnelle. Il lui recommande également de faire en sorte que les responsables de l’application des lois soient formés aux moyens d’examiner dûment les plaintes pour discrimination raciale et d’enquêter efficacement à leur sujet, et de prévenir et punir toute mesure de représailles visant quiconque dénonce des actes de discrimination raciale. Il lui recommande enfin d’allouer des ressources suffisantes pour que des traductions rigoureuses de ses lois soient disponibles dans les principales langues parlées dans le pays.

D.Autres recommandations

Ratification d’autres instruments

45. Compte tenu du caractère indissociable de tous les droits de l’homme, le Comité encourage l’État partie à envisager de ratifier les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme auxquels il n’est pas encore partie, en particulier ceux dont les dispositions intéressent directement les communautés qui peuvent faire l’objet de discrimination raciale, comme la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.

Amendement à l’article 8 de la Convention

46. Le Comité recommande à l’État partie d’accepter l’amendement au paragraphe 6 de l’article 8 de la Convention, adopté le 15 janvier 1992 à la quatorzième Réunion des États parties à la Convention et approuvé par l’Assemblée générale dans sa résolution  47/111 .

Suite donnée à la Déclaration et au Programme d’action de Durban

47. À la lumière de sa recommandation générale n o  33 (2009) sur le suivi de la Conférence d’examen de Durban, le Comité recommande à l’État partie de donner effet à la Déclaration et au Programme d’action de Durban, adoptés en septembre 2001 par la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, en tenant compte du document final de la Conférence d’examen de Durban, tenue à Genève en avril 2009, quand il applique la Convention. Le Comité demande à l’État partie d’inclure dans son prochain rapport périodique des renseignements précis sur les plans d’action qu’il aura adoptés et les autres mesures qu’il aura prises pour mettre en œuvre la Déclaration et le Programme d’action de Durban au niveau national.

Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine

48. À la lumière de la résolution  68/237 de l’Assemblée générale proclamant la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine pour 2015-2024 et de la résolution 69/16 sur le programme d’activités de la Décennie, le Comité recommande à l’État partie d’élaborer et de mettre en œuvre un programme adapté de mesures et de politiques, en collaboration avec des organisations et des personnes d’ascendance africaine. Le Comité demande à l’État partie d’inclure dans son prochain rapport des renseignements précis sur les mesures concrètes qu’il aura adoptées dans ce cadre, compte tenu de sa recommandation générale n o  34 (2011) sur la discrimination raciale à l’égard des personnes d’ascendance africaine.

Consultations avec la société civile

49. Le Comité recommande à l’État partie de poursuivre et d’élargir le dialogue avec les organisations de la société civile qui travaillent dans le domaine de la protection des droits de l’homme, en particulier celles qui luttent contre la discrimination raciale, notamment les organisations représentatives des groupes les plus exposés à la discrimination raciale, dans le cadre de l’élaboration du prochain rapport périodique et du suivi des présentes observations finales.

Diffusion d’information

50. Le Comité recommande à l’État partie de mettre ses rapports à la disposition du public dès leur soumission et de diffuser également les observations finales du Comité qui s’y rapportent auprès de tous les organes de l’État chargés de la mise en œuvre de la Convention, y compris les municipalités, ainsi que de les publier sur le site Web du Ministère des affaires étrangères dans les langues officielles et les autres langues couramment utilisées, selon qu’il conviendra.

Document de base commun

51. Le Comité encourage l’État partie à mettre à jour son document de base commun, qui date du 4 janvier 2019, conformément aux directives harmonisées pour l’établissement de rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, en particulier celles concernant le document de base commun, adoptées à la cinquième réunion intercomités des organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme tenue en juin 2006 . À la lumière de la résolution  68/268 de l’Assemblée générale, le Comité demande instamment à l’État partie de respecter la limite de 42 400 mots fixée pour ce document.

Suite donnée aux présentes observations finales

52. Conformément au paragraphe 1 de l’article 9 de la Convention et à l’article 65 de son règlement intérieur, le Comité demande à l’État partie de fournir, dans un délai d’un an à compter de l’adoption des présentes observations finales, des renseignements sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations figurant dans les paragraphes 18 b) (discours de haine raciale) et 32 (enseignement).

Paragraphes d’importance particulière

53. Le Comité souhaite appeler l’attention de l’État partie sur l’importance particulière des recommandations figurant dans les paragraphes 16 (liberté d’expression), 22 (tensions entre groupes ethniques), 28 (identité kazakhe) et 42 (apatrides), et lui demande de faire figurer dans son prochain rapport périodique des renseignements détaillés sur les mesures concrètes qu’il aura prises pour y donner suite.

Élaboration du prochain rapport périodique

54. Le Comité recommande à l’État partie de soumettre son rapport valant onzième à quatorzième rapports périodiques, d’ici au 25 septembre 2025, en tenant compte des directives pour l’établissement du document se rapportant spécifiquement à la Convention adoptées par le Comité à sa soixante et onzième session et en traitant de tous les points soulevés dans les présentes observations finales. À la lumière de la résolution  68/268 de l’Assemblée générale, le Comité demande instamment à l’État partie de respecter la limite de 21 200 mots fixée pour les rapports périodiques.