Nations Unies

CCPR/C/NIC/4

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

27 septembre 2019

Français

Original : espagnol

Anglais, français et espagnol seulement

Comité des droits de l ’ homme

Quatrième rapport périodique soumis par le Nicaragua en application de l’article 40 du Pacte, attendu en 2012 * , **

[Date de réception : 13 mai 2019]

Introduction

1.Au cours de la période considérée, le Nicaragua a renforcé la mise en œuvre des droits inscrits dans le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (ci-après « le Pacte »). L’article 46 de la Constitution politique de la République du Nicaragua (ci-après « la Constitution ») dispose que « sur le territoire national, chacun bénéficie de la protection de l’État et de la reconnaissance des droits inhérents aux êtres humains, du respect absolu, de la promotion et de la protection des droits de l’homme, ainsi que de la pleine jouissance des droits énoncés dans la Déclaration universelle des droits de l’homme, dans la Déclaration américaine des droits et devoirs de l’homme, dans le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, dans le Pacte international relatif aux droits civils et politiques des Nations Unies et dans la Convention américaine relative aux droits de l’homme de l’Organisation des États américains ». La mise en œuvre des droits sur lesquels porte le présent rapport est donc garantie par la norme suprême. À cet égard, on trouvera ci-après des informations sur les progrès accomplis pendant la période considérée.

Dispositions de fond du Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Article premierDroit des peuples à disposer librement d’eux-mêmes

2.Le droit des peuples à disposer librement d’eux-mêmes fait l’objet d’un cadre réglementaire, dont la Constitution et ses différentes révisions représentent le principal instrument. La Constitution dispose que : l’autodétermination est un droit inaliénable du peuple et le fondement de la nation (art. 1er) ; la souveraineté nationale appartient au peuple, qui l’exerce par des instruments démocratiques pour décider et participer librement à la mise en place et à l’amélioration du système économique, politique, culturel et social de la nation (art. 2) ; le Nicaragua s’engage à favoriser la paix et le développement humain et à lutter contre toute forme d’oppression et de discrimination (art. 3 et 4).

3.L’État respecte le principe de la liberté des peuples à disposer d’eux-mêmes et ses relations internationales sont fondées sur l’amitié et la solidarité entre les peuples et la réciprocité entre les États, ce qui interdit tout type d’agression politique, militaire, économique, culturelle et religieuse et toute intervention dans les affaires internes d’autres États. Le Nicaragua est un État indépendant, libre, souverain, unitaire et indivisible et une république démocratique, participative et représentative (art. 5, 6 et 7 de la Constitution).

4.La souveraineté nationale appartient au peuple, qui exerce son pouvoir démocratique directement par la participation, en élisant ses représentants au suffrage universel, égal, direct et secret sans qu’aucune personne ou aucun groupe de personnes puisse s’arroger ce pouvoir ou cette représentation. Ce pouvoir peut également s’exercer par la voie du plébiscite ou du référendum (art. 2 de la Constitution). Le peuple nicaraguayen est multiethnique (art. 8 de la Constitution) et son territoire est divisé administrativement en régions autonomes de la côte atlantique, en départements et en communes. La ville de Managua est la capitale du Nicaragua et le siège des quatre pouvoirs de l’État (art. 12 de la Constitution).

5.Les articles 23 à 45 de la Constitution consacrent le droit à l’inviolabilité de la vie humaine, à la sécurité, à l’égalité devant la loi, à la liberté de conscience, de pensée et de religion, à la propriété privée et à un procès équitable, le droit d’asile et de refuge et l’interdiction de la servitude et de l’esclavage. Les droits des communautés de la côte caraïbe sont reconnus dans le chapitre VI du titre IV de la Constitution. La fonction sociale des diverses formes de propriété, publique, privée, associative, coopérative et communautaire, est reconnue à l’article 5 de la Constitution. La préservation, la conservation et la sauvegarde des ressources naturelles et de l’environnement sont inscrites à l’article 60 de la Constitution afin de garantir le droit de vivre dans un environnement sain. Les ressources naturelles font partie du patrimoine national ; la conservation, le développement et l’exploitation rationnelle de ces ressources relève de la responsabilité de l’État (art. 102 de la Constitution).

6.Le Ministère de l’environnement et des ressources naturelles, créé conformément aux dispositions du décret exécutif no 1-194, est chargé de coordonner et de diriger la politique de l’État en matière d’environnement. La loi générale no 217 relative à l’environnement et aux ressources naturelles établit les règles visant à conserver, protéger, améliorer et rétablir l’environnement et les ressources naturelles en garantissant leur utilisation rationnelle et durable. Le décret no 9-996 portant règlement d’application de la loi générale relative à l’environnement et aux ressources naturelles dispose que le Ministère de l’environnement et des ressources naturelles est l’autorité compétente en ce qui concerne la réglementation, la législation, le suivi et le contrôle de la qualité de l’environnement, de l’utilisation durable des ressources naturelles renouvelables et de la gestion environnementale des ressources non renouvelables. Le Code pénal régit les infractions contre l’environnement et les ressources naturelles.

7.L’État reconnaît l’existence des peuples autochtones et des peuples d’ascendance africaine, ainsi que leur droit à une identité propre, au sein d’un État unitaire et indivisible (art. 5 de la Constitution). Le statut d’autonomie des régions de la côte caraïbe du Nicaragua et la loi relative au régime de propriété communale des peuples autochtones et des peuples d’ascendance africaine de la côte caraïbe et des rivières Bocay, Coco, Indio et Maíz reconnaissent le droit collectif de ces peuples sur leurs terres, ainsi que leur droit à la consultation préalable, libre et éclairée, prévus par les articles 5, 89, 91 et 181 de la Constitution, par la Convention (no 169) relative aux peuples indigènes et tribaux de l’Organisation internationale du Travail et par la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.

8.À ce jour, en application de ces droits, le Nicaragua a établi les titres de propriété de 23 territoires communaux, représentant 31,16 % du territoire national (37 841,99 km2 sur un total de 121 428 km2), garantissant ainsi leur sécurité juridique. La délimitation et l’établissement des titres de propriété est en cours sur le territoire du Haut Wangki (Jinotega) (4 % du territoire) et la procédure de consultation des communautés autochtones a démarré. Jusqu’en 2018, l’État a établi des titres de propriété au bénéfice de 304communautés ancestrales, représentant 39 531 familles et 227 185 personnes. La procédure d’aménagement foncier a été établie en consultation avec les communautés concernées.

9.Au Nicaragua, les communautés sont parties prenantes aux décisions concernant la mise en œuvre des projets d’investissement publics et privés. Il convient de citer à cet égard les exemples suivants : projet Tumarín, exploration pétrolière et Grand canal interocéanique du Nicaragua. La procédure de consultation en vue du consentement libre, préalable et éclairé du territoire Rama-Kriol a démarré, avec l’approbation des assemblées communales de 9 communautés concernées, sur la base du « Plan de consultation en vue du consentement libre, préalable et éclairé du territoire Rama-Kriol à la mise en œuvre du projet du Grand canal interocéanique du Nicaragua et des infrastructures associées ». Les lois traditionnelles des peuples Rama et Kriol en ce qui concerne la gestion de leurs affaires sont reconnue. Dans le cadre d’un dialogue, d’un consensus et d’alliances visant à faire prévaloir les droits, les devoirs et l’intérêt supérieur du peuple dans la mise en œuvre du projet du grand canal et de ses infrastructures, un accord de consentement préalable à l’utilisation des terres communales pour réaliser le projet de canal a été signé par les représentants des communautés ; il a été officiellement publié le 9 mai 2016.

Article 2Garanties concernant les droits reconnus dans le Pacte et principe d’égalité

10.La Constitution, telle que modifiée en 2014, est la norme suprême de l’ordre juridique nicaraguayen. Le chapitre I (Droits individuels) de son titre IV (Droits, devoirs et garanties du peuple nicaraguayen) consacre des droits civils et des libertés ayant pour finalité de garantir la pleine jouissance des droits de l’homme. Le chapitre II (Droits politiques) de ce même titre garantit les libertés politiques, en conformité avec les dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. L’article 46 de la Constitution dispose que sur le territoire national, chacun bénéficie de la protection de l’État et de la reconnaissance des droits inhérents à la personne, du respect absolu, de la promotion et de la protection des droits de l’homme, ainsi que de la pleine jouissance des droits énoncés dans la Déclaration universelle des droits de l’homme, dans le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et autres instruments, et consacre la reconnaissance constitutionnelle de ces traités internationaux. Les articles 187 à 190 de la Constitution instaurent des contrôles constitutionnels pour assurer le respect des garanties constitutionnelles et la conformité à la Constitution.

11.La loi no 983 relative à la justice constitutionnelle abroge la loi no 49 relative au recours en amparo, le titre XI de la loi no 350 relative à la juridiction du contentieux administratif, ainsi que les articles 34 (par. 5) et 35 (par. 3 et 4) de la loi organique no 260 relative au pouvoir judiciaire de la République du Nicaragua. Elle régit les mécanismes de contrôle de constitutionnalité par l’intermédiaire des voies de recours suivantes : a) recours en habeas corpus ; b) recours en habeas data ; c) recours en protection (amparo) ; d) recours en inconstitutionnalité ; e) recours en inconstitutionnalité dans un cas concret ; et f) recours en inconstitutionnalité par omission, détaillées ci-après.

12.Le recours en habeas corpus (art. 14 à 30) protège la liberté, l’intégrité physique, la sécurité et autres droits connexes lorsqu’ils sont menacés ou atteints par une autorité ou un particulier, que ce soit par action ou par omission. Il peut être formé, quel que soient le jour et l’heure, auprès de la Chambre pénale de la Cour d’appel du pouvoir judiciaire. Un juge de l’exécution accomplit les actes nécessaires pour assurer la protection effective des droits et garanties faisant l’objet du recours, rédige un procès-verbal des actes accomplis et le remet immédiatement à la chambre pénale qui statue sur le recours. Si cette dernière déclare que le recours n’est pas recevable ou que la demande du requérant n’est pas fondée, le requérant dispose de dix jours pour contester cette décision devant la chambre constitutionnelle de la Cour suprême, qui se prononcera dans un délai de vingt-quatre heures.

13.Le recours en habeas data (art. 31 à 42) protège les droits constitutionnels portant sur la vie privée, la vie de famille, l’honneur et la réputation. Il garantit le droit à l’autodétermination informationnelle et permet d’accéder aux données à caractère personnel détenues par tout organisme public ou privé et d’exercer un droit d’opposition, de modification, de suppression, de blocage, d’insertion, de complémentation, de rectification, de retrait ou de mise à jour de ces données lorsqu’elles sont présumées fausses ou attentatoires à des droits constitutionnels. La Chambre constitutionnelle de la Cour suprême est chargée de connaître de ces recours et de statuer ; elle est habilitée à suspendre l’acte, d’office ou à la demande d’une partie. Le recours doit être formé dans un délai de trente jours à compter de l’épuisement de la voie administrative. La procédure est la suivante : cinq jours pour rectifier le recours, s’il y a lieu, quinze jours pour répondre au recours et fournir les documents nécessaires à l’appui (faute de quoi, les allégations du requérant sont présumées exactes). La cour examine ensuite le recours et statue ; elle dispose de quarante-cinq jours pour rendre sa décision et de cinq jours pour la faire exécuter.

14.Le recours en amparo (art. 43 à 60) a pour objet de protéger les droits et garanties énoncés dans la Constitution contre toute disposition, acte, décision, action ou omission d’un fonctionnaire, d’une autorité ou d’un agent portant atteinte ou tentant de porter atteinte à ces droits. La Chambre constitutionnelle de la Cour suprême est chargée de connaître des recours en amparo et de statuer. Afin que ce recours soit accessible dans tout le pays, il peut être formé devant les chambres civiles des cours d’appel des diverses circonscriptions judiciaires, en fonction du domicile du requérant, ce qui permet de rapprocher la justice de la population. Les chambres civiles des cours d’appel sont habilitées à suspendre l’acte, d’office ou à la demande d’une partie. Le recours doit être formé dans un délai de trente jours à compter de la notification ou de la communication de la disposition, de l’acte ou de la décision correspondant à l’épuisement de la voie administrative. Une fois le recours en amparo formé, les salles civiles des cours d’appel peuvent demander que le recours soit rectifié dans un délai de cinq jours. Si aucune suite n’est donnée au recours, le requérant a quinze jours pour comparaître devant la chambre constitutionnelle de la Cour suprême, après obtention des pièces justificatives certifiées, et former le recours en amparo de fait. Si le recours est considéré comme recevable par la chambre constitutionnelle de la Cour suprême, il est notifié dans un délai de cinq jours au défendeur et au Bureau du Procureur général de la République, qui disposent d’un délai de quinze jours pour se porter partie à la procédure, se prononcer et présenter leurs observations (si les observations ne sont pas produites ou sont produites après expiration du délai fixé, les allégations du requérant sont présumées exactes). Le requérant a dix jours pour se porter partie à la procédure, faute de quoi le recours en amparoest considéré comme abandonné. La cour examine le recours et statue ; elle dispose de quarante-cinq jours pour rendre sa décision.

15.Le recours en inconstitutionnalité (art. 61 à 74) est un mécanisme de contrôle abstrait de constitutionnalité des normes. Il a pour objet d’examiner toute loi, tout décret ou tout règlement contraire à la Constitution. L’Assemblée plénière de la Cour suprême est chargée de connaître de ces recours, de les instruire, de rédiger les projets de décision et de statuer. Le délai pour rectifier le recours, si nécessaire, est de dix jours, faute de quoi il est réputé non formé. Le recours est ensuite notifié au défendeur, à savoir la plus haute autorité de l’entité qui a émis la norme contestée, et au Bureau du Procureur général de la République, qui disposent d’un délai de vingt jours pour se porter partie à la procédure, présenter leurs observations et se prononcer. Au terme de ces vingt jours, un magistrat est désigné pour rédiger un projet de décision dans un délai de trente jours ; l’Assemblée plénière de la Cour suprême dispose ensuite de 60 jours pour en débattre et rendre une décision, qui a valeur de chose jugée.

16.Le recours en inconstitutionnalité dans un cas concret (art. 75 à 78) est un mécanisme de contrôle permettant de vérifier la constitutionnalité des normes appliquées dans une procédure judiciaire, formé à l’initiative de l’une des parties à une procédure ou de l’autorité judiciaire qui connaît de celui-ci. L’autorité compétente est, en première instance, le pouvoir judiciaire puis l’Assemblée plénière de la Cour suprême pour confirmation de la décision. Ce recours est formé dans le cadre d’une procédure judiciaire, avant le prononcé de la décision. Il s’agit d’un mécanisme de contrôle à titre incident permettant de vérifier la constitutionnalité des normes appliquées dans une procédure judiciaire. À cet effet, le pouvoir judiciaire se prononce sur la constitutionnalité ou l’inconstitutionnalité de la norme, appliquée au cas d’espèce. La décision est soumise à l’Assemblée plénière de la Cour suprême, qui approuve ou non la déclaration d’inconstitutionnalité. Le délai est de trente jours pour rédiger un projet de décision et de trente jours pour en débattre et rendre une décision.

17.Le recours en inconstitutionnalité par omission (art. 79 à 87) est un mécanisme de contrôle de la primauté de la Constitution qui a pour but de faire en sorte que le pouvoir législatif adopte une loi, dans les cas expressément prévus par la Constitution, en respectant les réserves légales établies par celle-ci. L’Assemblée plénière de la Cour suprême est compétente pour connaître de ces recours et statuer. Une fois le recours formé, le délai prévu pour le rectifier, si nécessaire, est de dix jours, faute de quoi il est réputé non formé. Le recours est ensuite notifié au défendeur et au Bureau du Procureur général de la République, qui disposent d’un délai de vingt jours pour se porter partie à la procédure, présenter leurs observations et se prononcer. Au terme de ces vingt jours, un magistrat est désigné pour rédiger un projet de décision dans un délai de trente jours ; l’Assemblée plénière de la Cour suprême dispose ensuite de soixante jours pour en débattre et rendre une décision et l’Assemblée nationale a cent quatre-vingts jours pour commencer à légiférer.

18.La législation nicaraguayenne donne effet à l’article 2 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et dispose de mécanismes juridiques permettant aux citoyens d’obtenir réparation en cas de violation des droits et garanties qui leur sont reconnus par la Constitution et le Pacte. En effet, l’État reconnaît la personne, la famille et la communauté comme étant l’origine et la finalité de son activité ; il est organisé de façon à assurer le bien commun et à promouvoir le développement humain de tous les Nicaraguayens. À cet égard, l’article 5 de la Constitution dispose que la nation nicaraguayenne applique les principes suivants : liberté, justice, respect de la dignité de la personne, pluralisme politique et social, reconnaissance de l’identité propre des peuples autochtones et des peuples d’ascendance africaine au sein d’un État unitaire et indivisible, reconnaissance des diverses formes de propriété, libre coopération internationale, respect du droit des peuples à disposer librement d’eux-mêmes, valeurs chrétiennes, idéaux socialistes, pratiques solidaires et valeurs et idéaux de la culture et de l’identité nicaraguayennes ; les libertés et les droits civils et politiques consacrés par l’article 2 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques sont reconnus par la Constitution.

Articles 3 et 26Égalité femmes- hommes devant la loi dans la jouissance des droits de l’homme et non-discrimination

19.Concernant le principe d’égalité, l’article 27 de la Constitution dispose ce qui suit : « Toutes les personnes sont égales devant la loi et ont droit à la même protection. La discrimination fondée sur la naissance, la nationalité, les convictions politiques, la race, le sexe, la langue, la religion, les opinions, l’origine, la situation économique ou la condition sociale est interdite. ». Les étrangers sont également protégés puisqu’ils ont les mêmes devoirs et les mêmes droits que les Nicaraguayens, à l’exception des droits politiques ou des autres droits prévus par les lois. L’État est le garant des droits constitutionnels de toutes les personnes présentes sur le territoire national.

20.Afin d’éviter tout type de discrimination, le Nicaragua a adopté la loi no 648 relative à l’égalité des droits et des chances, qui a pour objet de promouvoir l’égalité et l’équité femmes-hommes dans l’exercice des droits de l’homme, des droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels. Des principes généraux et des politiques publiques ont été établis dans le but de garantir l’égalité réelle entre hommes et femmes dans l’application de la loi en vigueur, afin d’assurer le plein épanouissement des femmes et d’instaurer les mécanismes fondamentaux permettant à tous les organes de l’administration publique et des pouvoirs de l’État, ainsi qu’aux autorités régionales et municipales, de garantir l’égalité effective entre hommes et femmes. Le Conseil national pour l’égalité a été créé pour contribuer à la conception, à la formulation, à l’exécution, au suivi et à l’évaluation de la Politique relative à l’égalité, et à l’application des dispositions de la loi précitée, en coordination avec l’Institut nicaraguayen de la femme et le Bureau du Procureur spécial chargé de la femme, qui relève du Bureau du Procureur chargé de la défense des droits de l’homme. L’État a mis en place des stratégies destinées à renforcer la présence des femmes aux postes de direction et à donner davantage de moyens aux 78 295 femmes dirigeantes communautaires, conseillères municipales, maires, maires adjointes, dirigeantes d’entreprises économiques et productives et membres de la fonction publique. Des politiques et des instruments visant à introduire des bonnes pratiques en matière de genre dans les institutions publiques ont été élaborés et des fonds ont été alloués à cet effet.

21.L’État a encouragé et renforcé la politique en faveur de l’égalité femmes-hommes, de manière transversale. Cette action a été reconnue par le Forum économique mondial dont le rapport mondial sur la parité femmes-hommes (2018) place le Nicaragua en cinquième position, après les pays nordiques : Islande (85 %), Norvège (83,5 %), Suède (82,2 %), Finlande (82,1 %), Nicaragua (80,9 %). Le Nicaragua a gagné 4 places en ce qui concerne le taux d’égalité au niveau mondial et occupe actuellement la sixième position du classement. Il arrive en tête des pays américains en matière d’égalité femmes-hommes. Il occupe la cinquième place dans le domaine de la participation des femmes au Parlement et la première place en ce qui concerne le nombre de femmes ministres. La proportion de femmes exerçant des fonctions publiques est actuellement la suivante : 59,7 % des postes du pouvoir judiciaire, 56 % des postes du pouvoir exécutif, 45,7 % des parlementaires, 44 % des maires, 55,55 % des maires adjoints, et 50 % des conseillers municipaux. Des progrès importants ont été obtenus concernant le rôle de la femme dans le développement social, culturel, politique et économique.

22.Dans les institutions publiques, l’égalité des chances professionnelles, sans distinction de sexe et de race, est garantie par : l’attribution des postes, dans des conditions d’égalité, aux hommes et aux femmes ; la création, au sein de chaque organisme public, d’une instance chargée de coordonner, de conseiller et d’évaluer l’application du principe de l’égalité femmes-hommes dans la loi (Unités de parité femmes-hommes) ; la mise en place de programmes éducatifs dans les différentes modalités et divers niveaux du Système éducatif national, en vue de promouvoir la participation équitable et égale des sexes, ainsi que l’obligation inaliénable de l’homme et de la femme d’assurer les soins et l’alimentation des enfants, sous le contrôle de l’État.

23.La loi no 870 (Code de la famille) a été adoptée et promulguée. Elle renforce les mesures de protection spéciale en faveur des femmes victimes de violence et instaure l’obligation de dénoncer la violence domestique ou intrafamiliale. La pleine application de la loi générale no 779 relative à la lutte contre la violence à l’égard des femmes portant modification de la loi no 641 (Code pénal) et de ses révisions est garantie par la formation des fonctionnaires du secteur judiciaire et l’application du principe de l’égalité femmes-hommes à toutes les étapes de la procédure pénale. Pour faire appliquer cette loi : les infrastructures nécessaires ont été créées pour assurer le fonctionnement de 7 juridictions spéciales et de la chambre pénale spécialisée en matière de violence et de justice pénale pour adolescents de la Cour d’appel de Managua ; 14 juges spécialisés dans ce domaine et 3 magistrats de la chambre spécialisée dans les affaires de violence de Managua ont été nommés par le Conseil national de l’administration et de la carrière judiciaire ; 99 commissariats de la femme et de l’enfance et 99 enquêtrices spécialisées ont été mis en place pour garantir une présence directe dans chacune des 153 communes du pays.

24.Concernant l’accès des femmes à la justice, 69 605 affaires pénales ont été examinées et 43 287 (62 %) traitées. Les juridictions disposent d’équipes pluridisciplinaires de spécialistes dans le domaine de la psychologie et du travail social, pour aider les femmes victimes de violence. Les 65 jugements prononcés dans des affaires de féminicide sont tous condamnatoires, ce qui montre bien qu’il n’y a pas d’impunité. L’Institut de médecine légale a procédé à 167 009 expertises dans le cadre d’enquêtes sur des infractions portant atteinte à la vie, à la santé et à l’intégrité physique, psychique et sexuelle, en garantissant un traitement égalitaire dans la prise en charge des femmes (2014-2018). L’Observatoire judiciaire de la violence fondée sur le genre de la Cour suprême a été renforcé pour assurer le suivi et la surveillance de la mise en œuvre des mesures de protection, des mesures de sûreté, des décisions judiciaires et des statistiques judiciaires relatives aux infractions visées par la loi no 779. De son côté, le Gouvernement de réconciliation et d’unité nationale (pouvoir exécutif) a octroyé des microcrédits à 1 533 femmes en situation de risque ou victimes de violence, favorisant ainsi leur développement personnel et entrepreneurial et contribuant à leur réadaptation complète. Des ateliers d’artisanat et des pépinières d’arbres à caoutchouc (tuno),d’espèces ligneuses et d’espèces fruitières ont été remis à des artisanes originaires de la région caraïbe nord.

25.Dans les paragraphes g) et h) de l’article 2 du Code de la famille, l’État prévoit la protection des relations familiales, la participation conjointe du père, de la mère et des enfants, filles et garçons, aux responsabilités familiales, le père et la mère étant tous deux chargés de développer des valeurs d’amour, de solidarité, de respect et d’assistance mutuelle, de responsabilité et d’égalité absolue, et reconnaît l’égalité et la protection du mariage et de l’union de fait stable, favorisant la protection des familles. Concernant la notion juridique de mariage, l’article 54 du Code de la famille dispose que l’homme et la femme âgés de 18 ans révolus sont juridiquement aptes à contracter mariage et que les adolescents âgés de 16 à 18 ans peuvent contracter mariage avec l’autorisation de leurs représentants légaux ; l’article 57 a) de ce même code interdit le mariage et l’union de fait stable des jeunes, garçons et filles, âgés de moins de 16 ans.

26.Le divorce est régi par le titre IV du Code de la famille. Dans le cas du divorce par consentement mutuel (art. 159 à 165) et du divorce à la demande d’un des époux (art. 171 à 184), la protection des droits des époux en matière de garde, d’entretien et de responsabilité des enfants et des personnes handicapées ou juridiquement incapables est garantie.

27.En matière de scolarisation, le Nicaragua met en œuvre des politiques inclusives en ce qui concerne le genre, mais aussi les communautés autochtones et les communautés d’ascendance africaine, la pertinence linguistique et sociale, et la vision du monde des peuples autochtones, dans le respect du cadre juridique national. Le pays agit en faveur d’une éducation égalitaire basée sur la participation des enfants et des adolescents, garçons et filles, de tous les secteurs sociaux, de tous les niveaux économiques, y compris lorsqu’ils ont des capacités différentes. 32 078 enseignants intervenant au niveau préscolaire, primaire, secondaire et spécial ont été formés aux stratégies méthodologiques adaptées à la prise en charge des élèves présentant une déficience auditive, intellectuelle, visuelle, physique ou motrice, des troubles du spectre autistique, des troubles du déficit de l’attention ou une hyperactivité, pour garantir la non-discrimination au sein du système éducatif et offrir une éducation de qualité à tous les enfants et adolescents, filles ou garçons.

28.Des programmes sociaux ont été mis en œuvre pour les élèves des régions moins développées, qui ont pu bénéficier de 2 772 631 kits de fournitures scolaires, 1 995 806 paires de chaussures, 20 000 vélos et 11 541 635 livres. En outre, 5 370 168 élèves ont bénéficié de repas scolaires dans le cadre de la stratégie de sécurité alimentaire et nutritionnelle, ce qui favorise l’inscription et le maintien des élèves à l’école primaire et dans l’enseignement secondaire (2014-2018). L’enseignement secondaire à distance a été mis en place en 2014 en milieu rural, avec l’ouverture de 447 centres dispensant un enseignement aux enfants et adolescents des zones rurales qui vivent dans des régions vulnérables et n’avaient auparavant pas accès à l’éducation. Il existe actuellement 522 centres de ce type.

29.L’article 16 de la Constitution dispose ce qui suit : « Ont la nationalité nicaraguayenne : les personnes nées sur le territoire national, à l’exception des enfants d’étrangers diplomates, de fonctionnaires étrangers au service d’organisations internationales ou envoyés par leurs gouvernements pour accomplir une mission au Nicaragua, sauf s’ils optent pour la nationalité nicaraguayenne ; les enfants de père ou de mère de nationalité nicaraguayenne ; les enfants nés à l’étranger d’un père ou d’une mère ayant eu au départ la nationalité nicaraguayenne, dès lors qu’ils en font la demande lorsqu’ils sont devenus majeurs ou ont été émancipés ; les enfants nés sur le territoire nicaraguayen de parents inconnus, sans préjudice, une fois leur identité connue, des effets qui en découlent ; les personnes nées de parents étrangers à bord d’un aéronef ou d’un navire nicaraguayen, dès lors qu’elles en font la demande. ». En outre, le Code de la famille et la loi no 908 relative à l’inscription tardive des naissances et à la rectification des actes d’état civil garantissent le droit de l’enfant à un nom, à une identité, à une nationalité et à l’inscription immédiate et gratuite de sa naissance ; 20 782 enfants de moins de 12 ans en ont bénéficié sur la période 2014-2018.

30.Concernant l’élimination des pratiques et coutumes traditionnelles portant atteinte à la dignité et à l’intégrité personnelle des femmes et des filles, il convient de préciser que ce type de pratiques et de coutumes n’existe pas au Nicaragua. Cependant, l’État promeut de nouveaux modèles familiaux au sein des foyers nicaraguayens, grâce à la Politique relative à la petite enfance et à la réglementation du Ministère de la famille, qui encouragent les nouvelles formes d’éducation, ainsi que les compétences parentales et le développement des aptitudes familiales à la stimulation précoce, et interdisent le recours à toute forme de châtiment corporel ou de traitement humiliant pour corriger les manquements à la discipline dans les établissements scolaires et les foyers accueillant des enfants. Dans ce cadre, 160 978 visites à domicile ont été réalisées (2014-2018).

Article 4Protection des droits de l’homme pendant l’état d’exception

31.L’article 185 de la Constitution prévoit la possibilité de suspendre les droits et garanties des personnes lorsque la sécurité nationale, les conditions économiques ou une catastrophe l’exigent, sur tout ou partie du territoire national et pour une période déterminée, renouvelable si la situation qui en est la cause persiste. Cette suspension n’est cependant pas possible pour tous les droits et garanties. L’article 186 de la Constitution précise la liste des droits qui ne peuvent, en aucune circonstance, être suspendus. La suspension doit être décrétée par le Président de la République en Conseil des ministres. Le décret doit être transmis à l’Assemblée nationale dans un délai de soixante-douze heures pour ratification ; l’Assemblée dispose de quarante-cinq jours pour modifier ou rejeter le décret (art. 150, par. 9, de la Constitution).

32.La loi no 44 relative à l’état d’urgence régit l’application de l’état d’urgence. De rang constitutionnel, elle définit les pouvoirs extraordinaires du Président et encadre la sécurité juridique des citoyens pendant l’état d’urgence. La déclaration officielle de l’état d’urgence doit préciser les motifs sur lesquels elle se fonde, les droits et garanties suspendus, si l’état d’urgence s’applique sur tout ou partie du territoire national et la durée pour laquelle il est décrété. Elle entre en vigueur à compter de sa publication sur un quelconque moyen de communication public.

33.En tant que mécanismes de protection des citoyens, le recours en amparo, pour les droits et garanties non suspendus par le décret, et le recours en habeas corpus, en faveur des personnes détenues, demeurent en vigueur pendant l’état d’urgence. De même, les violences, infractions ou fautes commises par les autorités pendant l’état d’urgence font l’objet d’une enquête et sont punis conformément aux dispositions légales en la matière.

34.Par ailleurs, conformément aux dispositions de l’article 9 de la loi relative à l’état d’urgence, le Président de la République est tenu d’informer le Secrétaire général des Nations Unies et le Secrétaire général de l’Organisation des États américains. Pendant la période couverte par le présent rapport (2008-2019), le Président de la République n’a pris aucun décret suspendant des droits ou des garanties, malgré la grave situation de violence à laquelle le pays a été confronté lors de la tentative de renversement du Gouvernement à partir du 18 avril 2018.

35.Quant aux mesures concernant la législation relative au terrorisme, en réponse à l’évaluation de l’application des 40 recommandations du Groupe d’action financière internationale, qui a questionné le Nicaragua sur l’absence d’application pratique (poursuites) et les limitations de la capacité opérationnelle des autorités compétentes en matière d’infractions concernant le terrorisme et son financement, la loi no 977 relative au blanchiment de capitaux, au financement du terrorisme et au financement et à la prolifération d’armes de destruction massive a été adoptée le 16 juillet 2018 pour garantir le fonctionnement effectif des systèmes de lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et la prolifération d’armes de destruction massive, selon les normes internationales en la matière. À la suite de cette réforme, le Groupe d’action financière d’Amérique latine, lors d’une réunion tenue en décembre 2018, a attribué une meilleure évaluation au Nicaragua en ce qui concerne sa conformité aux normes internationales relatives à la définition et à la répression du financement du terrorisme.

36. Les personnes poursuivies pour terrorisme dans le cadre des événements survenus à partir d’avril 2018 l’ont été conformément à l’article 399 de la loi no 641 (Code pénal), et non conformément à la nouvelle loi no 977 relative au blanchiment de capitaux, au financement du terrorisme et au financement et à la prolifération d’armes de destruction massive. En effet, cette dernière n’étant entrée en vigueur qu’en juillet 2018, conformément à la Constitution et au principe de légalité consacré dans le Code pénal, elle ne peut pas être appliquée puisque les lois n’ont pas d’effet rétroactif, excepté en matière pénale lorsqu’elles sont favorables à la personne poursuivie. Les chefs d’accusation retenus contre les personnes poursuivies sont conformes aux actes répréhensibles qu’elles ont commis et qui sont érigés en infractions par le Code pénal.

Article 5Garanties concernant les droits reconnus dans le Pacte

37.Afin de prévenir toute interprétation erronée ou restrictive des droits reconnus dans le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, l’article 46 de la Constitution reconnaît expressément ledit pacte et l’élève au rang constitutionnel ; la jouissance des droits visés peut être exigée et restituée grâce aux divers mécanismes et recours prévus par l’ordre juridique du Nicaragua.

38.Par ailleurs, l’article 138 (par. 12) de la Constitution dispose que la simple adoption législative des instruments internationaux leur donne légalement effet au Nicaragua et à l’étranger. Il s’ensuit que le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, ayant rang constitutionnel, a les mêmes effets que les règles et les droits fondamentaux énoncés dans la Constitution ; de ce fait, toutes les lois, règles ou dispositions qui lui seraient contraires sont nulles.

39.À cet égard, l’article 182 de la Constitution dispose ce qui suit : « La Constitution est la norme suprême de la République et prime sur toutes les autres lois. Les lois, traités, décrets ou dispositions qui sont contraires ou dérogent à une de ses dispositions sont nuls. ».

40.La jurisprudence de la Cour suprême s’est prononcée sur le sujet en déclarant que « pour qu’une convention internationale ait force de loi, elle doit être approuvée par le pouvoir législatif » et que « dès lors qu’un traité international contient des dispositions qui s’opposent aux lois en vigueur, mais pas à la Constitution, les lois concernées sont tacitement abrogées dès que le traité ratifié est publié au Journal officiel (La Gaceta) ».

Article 6Mesures prises pour empêcher la privation arbitraire de la vie

41.L’article 23 de la Constitution dispose ce qui suit : « Le droit à la vie est inviolable et inhérent à la personne. Le Nicaragua n’applique pas la peine de mort. ». Conformément aux dispositions de la Constitution, la peine de mort n’est pas appliquée. Le Nicaragua est signataire de la Convention américaine relative aux droits de l’homme (1969) et du Deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques (1990), qui disposent que la peine de mort ne sera pas rétablie dans les États qui l’ont abolie. Le décret no 58-2008 du 2 septembre 2008 porte ratification par l’État du Nicaragua du Deuxième protocole facultatif du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, visant à abolir la peine de mort.

42.Grâce à la Stratégie relative à la sécurité souveraine et citoyenne mise en œuvre par le Nicaragua, il n’y a pas de cartels de la drogue, de gangs (maras) et de bandes (pandillas) sur le territoire national, et le taux d’homicides y est le plus bas d’Amérique centrale. Le Rapport régional sur le développement humain (2013-2014) du Programme des Nations Unies pour le développement signale que le Nicaragua s’est imposé comme un modèle en matière de sécurité publique, grâce à la mise en œuvre d’une politique de sécurité citoyenne faisant appel à la communauté, qui a permis de réduire le taux d’homicides. Entre 2014 et 2017, il y a eu en moyenne 7,5 homicides pour 100 000 habitants au Nicaragua, soit quatre fois moins que la moyenne observée en Amérique centrale. Entre 2014 et 2018, le Nicaragua a enregistré en moyenne 478 homicides par an (assassinats, parricides, féminicides et homicides). Le nombre d’homicides baisse de 7,5 % en moyenne (-11,6 % en 2014, -0,2 % en 2015, -13,5 % en 2016 et -4,9 % en 2017). Toutefois, en 2018, il a augmenté de 42 % en raison de la tentative de renversement du Gouvernement. L’efficacité de la police dans les affaires d’homicide est de 77 % : en moyenne, 366 dossiers sur 478 homicides sont transmis au ministère public chaque année.

43.Afin de protéger le droit à la vie et de mettre en œuvre des mesures pour punir les personnes qui y portent atteinte, le chapitre I de la loi no 641 (Code pénal) est consacré aux « Infractions portant atteinte à la vie, à l’intégrité physique et à la sécurité personnelle ». Il existe également une législation spécifique concernant la prévention de la violence à l’égard des femmes, composée de la loi générale no 779 contre la violence à l’égard des femmes et de la loi no 952 qui en porte modification. Le féminicide, notamment, est érigé en infraction et les peines prononcées à l’encontre des agresseurs ont été alourdies à trente ans d’emprisonnement. Une politique publique a été mise en œuvre pour garantir l’application du cadre juridique destiné à protéger les femmes, grâce au renforcement des institutions judiciaires, qui travaillent de façon complémentaire à l’enquête, selon une approche qui prend en compte les questions de genre et vise à prévenir l’impunité.

44.Le ministère public s’est doté d’un protocole relatif aux poursuites pénales prenant en compte les questions de genre, qui oriente la fonction accusatoire. Le pouvoir judiciaire compte des juridictions et des unités spécialisées en matière de violence fondée sur le genre, qui assurent une prise en charge spécialisée de ce type d’affaires, afin de garantir la protection effective des victimes. Entre 2014 et 2018, 300 femmes ont été victimes d’homicide, ce qui représente 12,5 % des actes de ce type commis sur l’ensemble de cette période. L’année 2014 (84 femmes) est celle qui a enregistré le plus de victimes ; en 2018 (43 femmes), le nombre de victimes a diminué de 41 par rapport à 2014. Sur la période 2014-2018, le taux de variation moyen a baissé de 33 %. Sur les 300 meurtres de femmes, 32,3 % correspondent à des féminicides (97) ; 35,4 % à des assassinats (106) ; 27,3 % à des homicides (82) et 5,0 % à des parricides (15). L’efficacité de la police dans les affaires de femmes victimes d’homicide, qui était de 61 % en 2014, a augmenté pour atteindre 85 % d’affaires élucidées en 2017. En 2018, 72 % des affaires ont été élucidées.

45.L’article 7 de la loi no 228 relative à la Police nationale dispose que l’action de la Police nationale est régie par le Code de conduite pour les responsables de l’application des lois, adopté par l’Organisation des Nations Unies, et définit les principes fondamentaux de cette action, parmi lesquels figure l’utilisation rationnelle de la force. Dans l’exercice de leurs fonctions, les membres de la Police nationale utilisent des armes de neutralisation non létales, des armes à munitions non létales et des armes dissuasives (armes assourdissantes, gaz lacrymogènes) afin de réduire le risque de décès et de blessure. La force et les armes à feu ne sont utilisées que dans des circonstances exceptionnelles et de manière proportionnée à la résistance opposée. Conformément aux dispositions de la loi spéciale no 510 relative au contrôle et à la réglementation des armes à feu, munitions, explosifs et autres matériels connexes, publiée au Journal officiel no 20 du 25 février 2005, et de son règlement d’application (décret no 28-2005), seuls les membres de l’armée nicaraguayenne, de la Police nationale et de l’administration pénitentiaire sont autorisés à utiliser certains types d’armes à feu, munitions et accessoires, en fonction des besoins et dans le respect de la réglementation.

46.Depuis 2007, en accord avec les dispositions de la Convention américaine relative aux droits de l’homme et de la Constitution, selon lesquelles « le droit à la vie est inviolable », en vue de protéger ce droit, l’État a mis en place et renforcé la prise en charge médicale gratuite dans les établissements de santé publique. Cela se traduit par l’augmentation du personnel de santé, la construction de nouvelles unités de soins et la délivrance de médicaments coûteux, ainsi que par la mise en œuvre du modèle de santé familiale et communautaire, de la Stratégie nationale de santé sexuelle et procréative et de la Politique nationale relative à la petite enfance, qui protège le développement physique, psychique, social et spirituel des enfants de 0 à 6 ans. Le Ministère de la santé a élaboré un protocole applicable lorsque la santé d’une femme enceinte est en danger. Le nombre de maisons maternelles a augmenté pour atteindre 178, des sages-femmes communautaires ont été certifiées et ont acquis les connaissances techniques nécessaires pour assurer une prise en charge qualifiée des femmes enceintes, ce qui a permis de garantir des accouchements sûrs, de dispenser les soins immédiats au nouveau-né et de réduire la mortalité maternelle, qui est passée de 125 décès en 2006 à 47 en 2018. L’ONU a décerné le prix des Amériques 2011 en reconnaissance du programme de maisons maternelles.

47.Le Nicaragua protège la vie et l’État garantit les droits de l’enfant à naître, en application de la Convention américaine relative aux droits de l’homme et de la Constitution, dont l’article 23 dispose que le droit à la vie est inviolable. Il considère que l’avortement n’est par une méthode de planification familiale ou de contrôle des naissances. Dans le cadre de la politique de prévention des grossesses non désirées, des formateurs du Ministère de la santé interviennent dans les écoles et les communautés pour expliquer aux jeunes les risques liés aux grossesses précoces et à l’avortement et leur présenter les méthodes contraceptives. Les jeunes peuvent poser des questions à des spécialistes sur leurs préoccupations à ce sujet et recevoir une éducation sexuelle adaptée qui leur fera prendre conscience du problème social et familial que constituent les grossesses non désirées et contribuera à lutter contre ce fléau.

Article 7Interdiction de la torture, des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et des expériences médicales ou scientifiques non consenties

48.L’article 36 de la Constitution interdit la torture et les mauvais traitements en ces termes : « Chacun a droit au respect de son intégrité physique, psychique et morale. Nul ne peut être soumis à la torture, ni à des procédés, peines ou traitements inhumains, cruels ou dégradants. La violation de ce droit constitue une infraction punie par la loi. ». Le Code pénal en vigueur (loi no 641) définit la torture comme étant le fait de « causer intentionnellement une douleur ou des souffrances graves, physiques ou psychiques, à une personne placée sous sa garde ou son contrôle ; il n’y a toutefois pas torture lorsque la douleur ou les souffrances résultent uniquement de sanctions légitimes ou en sont une conséquence normale ou fortuite ». La torture physique ou psychique utilisée à des fins d’enquête pénale, comme moyen d’intimidation, de punition personnelle, de mesure préventive, de peine, ou autre, est punie de sept à dix ans d’emprisonnement (art. 486 du Code pénal). Ce même code dispose, en son article 4, que quiconque est poursuivi pour une infraction doit être traité dans le respect de la dignité inhérente à l’être humain. En conséquence, aucune peine ou mesure de sûreté relevant de la torture, de procédés ou de traitements inhumains, cruels, infamants ou dégradants ne peut être imposée.

49.Le Code pénal dispose que toute autorité, fonctionnaire ou agent du service public qui soumet une personne à une quelconque forme de torture physique ou psychique à des fins d’enquête pénale, comme moyen d’intimidation, de punition personnelle, de mesure préventive, de peine, ou autre, encourt une peine de sept à dix ans d’emprisonnement, assortie de huit à douze ans d’interdiction absolue d’exercer une fonction publique. De même, tout fonctionnaire qui n’empêche pas la commission de tels actes alors qu’il en a connaissance et est compétent pour le faire, encourt une peine de cinq à sept ans d’emprisonnement, assortie de cinq à neuf ans d’interdiction spéciale d’exercer ses fonctions. Les fonctionnaires qui n’ont pas compétence pour empêcher ces actes et ne les dénoncent pas à l’autorité compétente dans les quarante-huit heures suivant le moment où ils en ont pris connaissance, encourent une peine identique.

50.Concernant le traitement que les autorités doivent réserver aux personnes poursuivies, le Code de procédure pénale dispose que toute personne mise en examen ou accusée a le droit de ne pas être soumise à la torture ou autres traitements cruels, inhumains ou dégradants pour sa dignité personnelle (art. 94, par. 5). Ce même code interdit également le recours à la torture, aux procédés ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et à tout autre moyen de pression attentatoire à la dignité humaine, lors des enquêtes de police (art. 227, par. 2, du Code de procédure pénale). Concernant les preuves, le Code de procédure pénale garantit le principe de la légalité de la preuve et dispose, en son article 16, que « La preuve n’est valable que si elle a été obtenue par un moyen licite et versée à la procédure conformément aux dispositions du présent Code (...) ». En conséquence, les preuves obtenues en ayant recours à la torture ou aux mauvais traitements ne peuvent pas être versées au dossier.

51.Par ailleurs, l’article 39 de la Constitution dispose que le système pénitentiaire du Nicaragua est humain et vise à faire du détenu une personne capable de se réintégrer dans la société. La loi no 473 relative au régime pénitentiaire précise que le Système pénitentiaire national est basé sur la reconnaissance de la dignité de la personne et le respect des droits de l’homme et qu’en aucun cas les détenus ne peuvent être soumis à la torture, ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Les mauvais traitements physiques ou psychologiques, ainsi que tout autre procédé attentatoire à la dignité humaine du détenu sont interdits (art. 7). La procédure administrative permettant de dénoncer des actes de torture ou des mauvais traitements commis par les fonctionnaires pénitentiaires est prévue par la loi no 473 relative au régime pénitentiaire et à l’exécution des peines, qui dispose que « Sans préjudice du droit de formuler des demandes et des plaintes devant les autorités compétentes, les détenus peuvent adresser celles-ci au directeur de l’établissement pénitentiaire, pour les questions relevant strictement de la compétence de l’administration pénitentiaire... ».

52.La loi no 745 relative à l’exécution des peines, aux remises de peine et au contrôle juridictionnel des sanctions pénales précise que toute personne privée de liberté doit être traitée dignement et dans des conditions d’égalité (art. 3) et que l’État est tenu de garantir son intégrité physique, morale ou psychologique, sans qu’elle puisse être soumise à la torture, ni à des procédés, peines ou traitements inhumains, cruels ou dégradants.

53.Le Nicaragua a ratifié la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (décret no 30-2005) ; il a signé le protocole facultatif s’y rapportant le 14 mars 2007. Au Nicaragua, le Bureau du Procureur chargé de la défense des droits de l’homme est chargé de protéger les droits de l’homme des personnes, de contrôler les autorités de l’État, de recevoir les plaintes pour violation des droits de l’homme et de formuler des recommandations concernant les mesures à prendre pour réparer les dommages causés et rétablir les droits. Cette institution a été désignée (décret présidentiel no 04-2012) pour mettre en place le Mécanisme national de prévention de la torture, organe créé pour donner effet aux obligations établies dans le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et dans les Directives concernant les mécanismes nationaux de prévention.

54.La Direction des affaires internes de la Police nationale reçoit les plaintes concernant l’action des membres de l’institution et applique les sanctions administratives qui s’imposent, telles que l’exclusion temporaire de fonctions, la révocation ou la rétrogradation, entre autres. Le système de formation de la Police nationale du Nicaragua comporte trois sous-systèmes. Le respect des droits de l’homme fait partie de ses axes transversaux et la question des droits de l’homme figure parmi les matières dont l’enseignement est obligatoire.

55.L’article 22 du Code de procédure pénale dispose que « Quiconque a connaissance de la commission d’une infraction entraînant la mise en mouvement de l’action publique peut en informer le ministère public ou la Police nationale, oralement ou par écrit ». Le Code pénal (titre VI) consacre la responsabilité civile résultant des infractions et le Code de procédure pénale décrit la procédure permettant de déterminer la responsabilité civile devant le juge pénal, lorsqu’une condamnation prononcée a acquis force de chose jugée.

56.Concernant les mécanismes de contrôle des expériences médicales ou scientifiques sur les êtres humains mis en place par l’État, la loi générale no 423 relative à la santé dispose qu’aucun patient ne peut faire l’objet d’expériences impliquant l’administration de médicaments ou l’utilisation de méthodes diagnostiques, thérapeutiques ou pronostiques, sans être dûment informé qu’il s’agit d’une expérimentation, sans connaître les risques encourus et sans avoir au préalable donné son consentement écrit, personnellement ou par l’intermédiaire de son représentant légal, s’il y a lieu ou s’il se trouve dans l’impossibilité de le faire (art. 8, par. 6 et 7). Le règlement d’application de la loi générale relative à la santé dispose que l’établissement de santé doit « informer le patient, ses proches ou son représentant légal, de son intention de réaliser une expérience biomédicale modifiant les soins ou le traitement, le consentement écrit et éclairé du patient étant indispensable à cet effet » (art. 7, par. 17).

57.Concernant les mesures prises par le Nicaragua pour garantir qu’aucun citoyen ne soit extradé de son territoire, la Constitution dispose que « Les Nicaraguayens ne peuvent pas être extradés du territoire national » (art. 43, par. 2) ; ils ne peuvent en aucun cas être remis à un autre État.

Article 8Interdiction de l’esclavage, de la servitude, du travail forcé et de la traite des êtres humains

58.L’esclavage, la servitude, le travail forcé ou obligatoire et toute forme de traite des êtres humains sont interdits au Nicaragua (art. 40 et 86 de la Constitution). Chacun a le droit de choisir sa profession ou son métier et de l’exercer librement, dans le lieu de son choix, sans autres contraintes que d’être titulaire du diplôme nécessaire et d’accomplir une fonction sociale (art. 44 du Code du travail). La législation du travail prévoit le droit de changer d’emploi après en avoir dûment informé son employeur. Concernant le travail domestique forcé, le Nicaragua a ratifié la Convention no 189 de l’Organisation internationale du Travail (OIT).

59.Dans le cadre des efforts accomplis pour harmoniser la législation des pays d’Amérique centrale et des Caraïbes, le Nicaragua a adopté en 2015 la loi no 896 relative à la lutte contre la traite des êtres humains visant à prévenir, enquêter sur, poursuivre et réprimer cette infraction, ainsi qu’à protéger et à garantir une prise en charge globale des victimes et à protéger les personnes qui interviennent au niveau de l’enquête et de la procédure pénale, y compris lorsqu’il s’agit de ressortissants nicaraguayens déplacés à l’extérieur du territoire ou d’étrangers, indépendamment de leur statut migratoire. Cette loi donne une définition large de l’infraction, réprime toutes les formes de traite des êtres humains et inclut des concepts essentiels et des types d’exploitation qui vont au-delà des normes internationales minimales. Elle protège aussi bien les hommes et les femmes qui peuvent être victimes de cette infraction, prévoit des peines de dix à quinze ans d’emprisonnement, ainsi que des sanctions administratives, et dispose qu’en aucun cas le consentement de la victime n’exclut ou n’atténue la responsabilité pénale de l’auteur de l’infraction. Elle prévoit une peine plus lourde, de dix-neuf à vingt ans d’emprisonnement, lorsque les victimes sont des enfants, des adolescents, des personnes âgées, autochtones, d’ascendance africaine ou handicapées. Elle prévoit des stratégies pour la prise en charge primaire et secondaire des victimes, leur intégration dans la société et la réparation des dommages causés.

60.Parmi les mesures concrètes prévues par cette loi figure la création de la Coalition nationale contre la traite des êtres humains et du Registre national unique d’information sur la traite des êtres humains. La Coalition regroupe 25 institutions de l’État, des communes et des organismes qui travaillent dans le domaine de l’enfance ; elle compte 17 comités départementaux et formule des propositions concernant notamment les politiques publiques et les protocoles d’action interinstitutionnels. Entre 2014 et 2018, la Coalition a promu 8 619 activités de prévention et de diffusion, qui ont touché 467 863 personnes et ont permis de former 44 232 fonctionnaires (21 364 hommes et 22 868 femmes) ; une formation diplômante sur la restitution internationale d’enfants et d’adolescents a été organisée pour les fonctionnaires du pouvoir judiciaire. Parallèlement aux actions de prévention, le nombre de victimes, de plaintes et d’affaires de traite des êtres humains portées devant la justice a diminué. Pendant la période considérée : 64 personnes ont fait l’objet d’une enquête dans 30 affaires ; 22 affaires ont été portées devant la justice, 20 personnes ont été déclarées coupables et 2 non coupables ; 8 affaires sont en cours ; 73 victimes ont été libérées (13 hommes et 60 femmes) dont 10 enfants, 28 adolescents et 35 adultes.

61.Concernant le travail en tant que sanction pénale, parmi les peines non privatives de liberté, le Code pénal prévoit la possibilité d’effectuer des travaux d’intérêt général. Ce type de peine ne peut pas être imposé sans le consentement de la personne concernée et consiste à effectuer, sans recevoir de rémunération, des activités physiques ou intellectuelles d’utilité sociale ne portant pas atteinte à sa dignité et n’excédant pas huit heures par jour, pendant une durée qui peut aller de un jour à un an. Le travail effectué par les personnes privées de liberté dans les établissements pénitentiaires est imputé sur la durée de la peine, à raison d’un jour de privation de liberté pour un jour travaillé. Si la personne fait l’objet d’une mesure de sûreté sous la forme d’une détention provisoire, le temps travaillé est déduit de la durée de la peine à raison de deux jours de privation de liberté pour chaque jour travaillé. Conformément aux dispositions de la loi no 745 relative à l’exécution des peines, aux remises de peine et au contrôle juridictionnel des sanctions pénales, le juge de l’exécution et du contrôle pénitentiaire veille à la bonne exécution de la peine prononcée et contrôle l’application du régime pénitentiaire et le respect des objectifs constitutionnels et légaux des peines et des mesures de sécurité.

Article 9Droit à la liberté et à la sécurité personnelle

62.La Stratégie relative à la sécurité citoyenne et humaine adoptée par le Nicaragua est basée sur la sécurité des personnes, des communautés et des familles. Mobilisant toutes les institutions de l’État, elle met l’accent sur la communauté et la question du genre et met en œuvre des actions pluridisciplinaires, globales, équilibrées, éducatives et préventives, privilégiant la réadaptation, le traitement et la réinsertion sociale des personnes, ainsi que la rénovation des espaces publics et le rétablissement du droit de vivre dans un environnement sain et sûr.

63.L’article 25 de la Constitution consacre le droit à la liberté et à la sécurité personnelle ; son article 3 dispose que « Nul ne peut être privé de sa liberté si ce n’est pour des motifs et conformément à la procédure prévus par la loi ». Cette procédure est établie par la loi no 406 (Code de procédure pénale), en vigueur depuis 2001. La privation de liberté est prévue par la législation nicaraguayenne. Le Code de procédure pénale dispose ce qui suit : en cas de flagrance, toute personne a le droit d’arrêter l’auteur d’une infraction ; la Police nationale peut arrêter une personne sans présenter de mandat judiciaire si celle-ci est prise sur le fait, pendant la commission de l’infraction ; tout commissaire de la Police nationale peut ordonner une arrestation lorsqu’il existe des raisons sérieuses de craindre la commission d’une infraction passible de la privation de liberté ; dans tous les autres cas le mandat d’arrêt doit être délivré par les autorités judiciaires. Toutes ces modalités d’arrestation sont légales et légitimes. Afin de prévenir et de réprimer toute privation de liberté illicite et illégitime, telle que la séquestration notamment, celle-ci est érigée en infraction dans le titre II (Infractions portant atteinte à la liberté) de la loi no 641 (Code pénal).

64.L’article 34 de la Constitution établit le droit qu’a toute personne poursuivie de connaître sans délai les motifs de sa garde à vue. Le Code de procédure pénale (art. 95, 231 et 232) définit la procédure à suivre : informer la personne des faits qui lui sont reprochés, informer ses proches de sa garde à vue, informer la personne de son droit d’être assistée par l’avocat de son choix, d’être examinée par un médecin avant d’être présentée au juge et d’être remise à l’autorité compétente dans un délai de quarante-huit heures à compter de sa garde à vue, entre autres garanties.

65.Conformément aux dispositions de la loi no 228 relative à la Police nationale et de son règlement d’application (décret no 26-96), les fonctionnaires de police doivent respecter et faire respecter les lois, protéger la vie des personnes et assurer la sécurité des biens qui, pour quelque raison que ce soit, sont en danger ; ils sont autorisés à enquêter sur tout type d’infraction et, en fonction de la gravité de celle-ci, à en arrêter l’auteur, qui doit être informé des motifs de sa garde à vue et de ses droits dans une langue qu’il comprend et présenté au juge compétent dans le délai fixé par la Constitution. Les mécanismes établis pendant la garde à vue sont définis par les articles 134 et 135 du Code de procédure pénale. Lorsqu’un détenu est accusé d’une infraction grave, la décision doit être prononcée dans un délai de trois mois à compter de la première audience ; en cas d’infraction moins grave, ce délai est d’un mois. L’instruction de certaines affaires pénales est complexe en raison de la nature des faits examinés, de la gravité des infractions commises, de la complexité de l’enquête, du nombre d’éléments de preuves, de victimes et d’auteurs qui caractérisent l’affaire. En ce qui concerne la durée pendant laquelle il est possible de détenir des personnes soupçonnées d’avoir commis des actes de terrorisme avant de les mettre en examen, l’ordre juridique nicaraguayen ne fait pas de distinction. Les procédures et les délais sont fixés par la Constitution, la loi no 228 relative à la Police nationale et le Code de procédure pénale.

66.Au Nicaragua, le régime de la détention au secret n’existe pas ; tous les détenus ont le droit de recevoir la visite de leurs proches. En outre, la Constitution (art. 45 et 189) instaure le recours en habeas corpus en faveur de toute personne dont la liberté, l’intégrité physique et la sécurité est violée ou menacée de l’être. Le Code de procédure pénale nicaraguayen dispose que les tribunaux de district et les cours d’appel sont compétents pour connaître des recours contre les ordonnances et les jugements et que la chambre pénale de la Cour suprême est compétente pour connaître des arrêts des cours d’appel associés à des privations de liberté.

Article 10Droits des personnes privées de liberté

67.L’article 36 de la Constitution dispose ce qui suit : « Chacun a droit au respect de son intégrité physique, psychique et morale. Nul ne peut être soumis à la torture, ni à des procédés, peines ou traitements inhumains, cruels ou dégradants. La violation de ce droit constitue une infraction punie par la loi. ». L’article 39 de la Constitution dispose que la peine a un caractère rééducatif et que le système pénitentiaire est humain et vise à faire du détenu une personne capable de se réintégrer dans la société. Il établit les modalités d’exécution de la peine en précisant que « le caractère progressif du système permet de promouvoir l’unité familiale, la santé, le progrès éducatif et culturel et l’occupation productive rémunérée... ».

68.Les personnes privées de liberté sont gardées en prison dans le système pénitentiaire national. Toutefois, un petit pourcentage d’entre elles est privé de liberté temporairement dans les locaux de la Police nationale, qui dispose, sur l’ensemble du territoire, de 468 cellules de détention provisoire pouvant accueillir 2 777 détenus, au niveau desquelles la surpopulation est de 1,6 %. Ces chiffres permettent de constater que la situation s’est améliorée, avec une réduction significative de la surpopulation dans les cellules de la police. Les détenus sont placés dans des locaux séparés selon leur situation juridique et leur sexe. Les enfants ne peuvent pas être placés en détention dans les locaux de la police. L’alimentation est assurée par le commissariat de police mais, s’ils le souhaitent, les proches des détenus peuvent leur apporter tous les jours de la nourriture pour améliorer leurs conditions de vie. Les visites familiales sont autorisées deux fois par semaine dans les commissariats départementaux et une fois par semaine dans les commissariats des districts de Managua. Les soins médicaux sont dispensés en fonction des besoins du détenu, en coordination avec les centres de santé, les hôpitaux et l’Institut de médecine légale des commissariats. Pour délivrer les soins spécialisés nécessaires, il faut demander l’autorisation du juge saisi de l’affaire. D’autres services, tels que l’aide juridique aux détenus nicaraguayens et l’assistance consulaire aux détenus étrangers sont fournis dans les locaux de la police.

69.Le système national pénitentiaire est régi par la loi no 473 relative au régime pénitentiaire et à l’exécution des peines, qui fixe les règles générales de fonctionnement du système pénitentiaire national. L’article 7 de cette loi dispose ce qui suit : « Le Système pénitentiaire national est basé sur la reconnaissance de la dignité de la personne et le respect des droits de l’homme. En aucun cas les détenus ne peuvent être soumis à la torture, ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Les mauvais traitements physiques ou psychologiques, ainsi que tout autre procédé attentatoire à la dignité humaine du détenu sont interdits. ». Il existe huit établissements pénitentiaires au Nicaragua. Ils sont situés dans les départements d’Estelí, Chinandega, Managua (un établissement pour hommes à Tipitapa et un établissement pour femmes), Granada et Matagalpa et dans les villes de Juigalpa et Bluefields. Afin de ne pas déplacer les femmes privées de liberté de leur juridiction naturelle et de pouvoir assurer la proximité avec leur famille, des moyens matériels ont été mis en œuvre pour garantir la séparation des femmes et des hommes dans les établissements pénitentiaires. Le personnel de maintien de l’ordre intérieur dans les quartiers où sont détenues les femmes est de sexe féminin, à l’exception toutefois du personnel qui assure la sécurité et les transferts. De même, les jeunes détenus âgés de 15 à 18 ans sont incarcérés dans des bâtiments indépendants et totalement séparés des adultes dans les établissements pénitentiaires de Tipitapa et de Granada ; dans les autres établissements, pour assurer la séparation entre les mineurs et les adultes, des quartiers et des cellules distincts sont réservés aux mineurs.

70.Le Système pénitentiaire applique un modèle de traitement à caractère rééducatif (art. 39 de la Constitution), basé sur un système progressif de régime pénitentiaire, qui prévoit plusieurs modalités et étapes pour l’exécution de la peine, de telle sorte que le détenu puisse progressivement accéder et participer à divers programmes et activités et passer d’un régime fermé à un régime de plus en plus ouvert, le but étant de réussir sa réinsertion sociale et de prévenir la récidive. À cet effet, les activités suivantes sont organisées : activités scolaires dans leurs diverses modalités éducatives (alphabétisation, enseignement primaire, secondaire et universitaire) ; formation technique destinée à donner aux détenus un outil utile à leur bonne réinsertion sociale (menuiserie, ébénisterie, mécanique, soudure, plomberie, pâtisserie, artisanat, entre autres possibilités) ; pratique du sport (11 disciplines sportives) ; activités culturelles visant à transmettre et à protéger des valeurs morales, éthiques et socialement acceptables ; travail pénitentiaire et social communautaire, comme moyen de rétribuer la société ; débats sur la prévention des infections sexuellement transmissibles, du VIH-sida, de la tuberculose, etc. ; débats sur les droits de l’homme et l’environnement, entre autres thèmes ; soins médicaux ; prise en charge psychologique ; aide à l’exercice du culte religieux ; visites familiales et conjugales visant à maintenir et à encourager l’unité familiale.

71.Afin de garantir l’application des dispositions de la loi no 473 relative au régime pénitentiaire et à l’exécution des peines, en conformité avec le Code de procédure pénale et la loi no 745 relative à l’exécution des peines, aux remises de peine et au contrôle juridictionnel des sanctions pénales, les juges de l’exécution et du contrôle pénitentiaire se rendent dans les établissements pénitentiaires pour vérifier le respect des droits fondamentaux et des droits pénitentiaires des détenus et statuent, dans le cadre des incidents d’exécution sur les demandes et les plaintes des détenus au sujet des atteintes portées à leurs droits par le régime et le traitement pénitentiaires.

72.L’emploi et l’utilisation de la force et des armes à feu obéit au principe de rationalité et de proportionnalité et est strictement limité aux situations de légitime défense ou de défense d’autrui lorsqu’il existe un danger imminent de mort ou de blessures graves.

Article 11Absence de responsabilité pénale pour dettes contractuelles

73.L’article 41 de la Constitution dispose ce qui suit : « Nul ne peut être détenu pour dettes. Ce principe ne limite pas les pouvoirs de l’autorité judiciaire compétente en cas de non-respect des obligations alimentaires. Tous les citoyens, nationaux et étrangers, sont tenus de payer leurs dettes. ». La contrainte par corps est interdite en matière civile. Le Code de la famille en vigueur depuis 2014 régit le droit de recevoir des aliments, définis comme étant les biens nécessaires à la vie, ainsi que les services garantissant une meilleure qualité de vie, tels que les soins médicaux, l’éducation, le logement, la culture et les loisirs (art. 36), l’obligation découlant des relations familiales. Il définit également la procédure concernant son application et son interprétation. Le Code de la famille dispose que l’obligation alimentaire est personnelle, imprescriptible, inaliénable, non négociable et incessible (titre I, quatrième livre). Les aliments sont insaisissables et ne peuvent être compensés par une quelconque forme de dette. Ils constituent, dans tous les cas, un droit privilégié, qui prime sur toute autre obligation du débiteur d’aliments. Ils ne peuvent pas être saisis par les créanciers du bénéficiaire (art. 307), afin de protéger les moyens de subsistance familiale. De ce fait, la contrainte par corps existe en matière de pension alimentaire car il s’agit d’une responsabilité de nature familiale et non civile.

74.La loi no 676 précisant les modalités d’application de la contrainte par corps en matière de crédits avec garantie personnelle et portant modification de l’article 13 de la loi no 146 relative aux gages commerciaux a été adoptée par le Nicaragua en 2009. Son article premier dispose ce qui suit : « Conformément à l’article 41 de la Constitution et au chapitre unique du titre IX du troisième livre du Code civil nicaraguayen, tous actes ou décisions judiciaires ou préjudiciels imposant la contrainte par corps comme conséquence directe d’une obligation non exécutée et échue sont dépourvus de valeur légale et d’effet juridique et que tout juge ou magistrat contrevenant aux dispositions de la Constitution, de la présente loi et des autres lois relatives à la contrainte par corps en matière civile se rend coupable de prévarication » (art. 463 du Code pénal).

Article 12Libre circulation des personnes

75.La Constitution dispose (art. 31) que les citoyens nicaraguayens ont le droit de circuler et de choisir leur résidence librement sur tout le territoire national, d’entrer et de sortir librement du pays et qu’aucune condition ou formalité ne leur est imposée pour établir leur résidence en tout endroit du territoire. Le Code civil dispose que « le domicile d’une personne correspond au lieu où elle réside habituellement et que toute personne de passage en un lieu est considérée comme y résidant temporairement » (art. 25), situation qui n’est soumise à aucune obligation légale vis-à-vis de l’administration publique.

76.La résidence des étrangers sur le territoire national est soumise à d’autres règles. La loi générale no 761 relative aux migrations et aux étrangers dispose que tout étranger souhaitant établir sa résidence au Nicaragua doit en faire la demande auprès de la Direction générale des migrations et des étrangers s’il se trouve sur le territoire national ou auprès des missions diplomatiques et des postes consulaires nicaraguayens s’il se trouve hors du territoire national (art. 28) ; la résidence, temporaire ou permanente, peut être demandée par des investisseurs ou motivée par une parenté, un lien conjugal ou une union de fait. L’article 26 de la loi no 761 précise les dispositions applicables aux réfugiés et prévoit qu’il incombe à la Direction générale des migrations et des étrangers de délivrer des papiers aux étrangers auxquels la Commission nationale a accordé le statut de réfugié, par décision administrative, conformément aux dispositions de la loi no 655 relative à la protection des réfugiés. L’article 27 de cette même loi dispose qu’il incombe à la Direction générale des migrations et des étrangers de délivrer des papiers aux étrangers auxquels le pouvoir exécutif a accordé l’asile politique, conformément aux dispositions des instruments internationaux ratifiés par le Nicaragua.

77.Concernant le droit d’entrer et de sortir du pays, la loi générale no 761 relative aux migrations et aux étrangers régit l’entrée des citoyens nicaraguayens et des étrangers sur le territoire national, ainsi que le séjour des étrangers au Nicaragua. En matière de visas, le Nicaragua a signé la Convention relative à la création d’un visa unique centraméricain destiné à faciliter la libre circulation des étrangers entre les républiques d’El Salvador, du Guatemala, du Honduras et du Nicaragua. Concernant l’exemption ou l’obligation de visa, selon leur pays d’origine et le type de document de voyage dont ils sont titulaires, les étrangers relèvent de la catégorie A, B ou C. Pour entrer sur le territoire national : les personnes qui relèvent de la catégorie A n’ont pas besoin de visa ; celles qui relèvent de la catégorie B doivent obtenir un visa consulaire, délivré sans qu’il soit nécessaire de consulter les autorités migratoires ou visa frontalier ; et celles qui relèvent de la catégorie C doivent obtenir un visa délivré après consultation et autorisation de la Direction générale des migrations et des étrangers et doivent à cet effet satisfaire aux exigences fixées par la législation applicable en la matière. L’appartenance aux catégories A, B et C est déterminée par les conventions bilatérales, les conventions homologuées par l’Accord CA-4 et les accords de dispense de visa signés entre la République du Nicaragua et d’autres États, ainsi que par les conventions de l’Organisation des Nations Unies et de l’Organisation des États américains auxquelles le Nicaragua est partie.

78.En ce qui concerne les documents de voyage, la réglementation, la délivrance et l’utilisation des documents migratoires (art. 75 de la loi no 761), il appartient au Ministère de l’intérieur, par l’intermédiaire de la Direction générale des migrations et des étrangers, de gérer les divers types de documents migratoires des ressortissants nicaraguayens (art. 70 de la loi no 761) : a) passeport ordinaire, conformément aux dispositions de l’article 19 du décret no 31-2012 portant règlement d’application de la loi générale no 761 relative aux migrations et aux étrangers ; b) passeport officiel (art. 22 de ce même décret) ; c) passeport de service (art. 26 de ce même décret) ; d) passeport diplomatique (art. 25 de ce même décret) ; e) laissez-passer (art. 27 de ce même décret) ; f) autorisation collective, délivrée pour une durée limitée, dans le cadre d’un accord avec les autorités migratoires du pays de destination ; g) passe frontalier, délivré à tout ressortissant habitant dans la région frontalière et se rendant dans le pays voisin pour y travailler ou rendre visite à des proches, valable pour un seul déplacement ; h) autorisation de voyage dans les pays limitrophes délivrée aux habitants du secteur âgés de plus de 18 ans, pour qu’ils puissent se rendre dans la localité la plus proche du pays voisin, valable pour un seul déplacement ; i) carte d’identité, document officiel attestant de l’identité des citoyens et pouvant être utilisé comme document de voyage pour se rendre dans les pays avec lesquels le Nicaragua a signé des instruments internationaux permettant à ses ressortissants de circuler librement et à des fins migratoires.

79.En ce qui concerne les autorisations de sortie du territoire, la loi no 761 dispose que pour pouvoir sortir du pays, les citoyens nicaraguayens doivent posséder un passeport ou tout autre type de document migratoire délivré à leur nom par la Direction générale des migrations et des étrangers, valable pendant au moins six mois. Ils doivent également présenter la carte d’entrée et de sortie correspondante au moment d’entrer ou de sortir du territoire.

80.En ce qui concerne la reconduite à la frontière et autres mesures, lorsque l’entrée ou le séjour d’un étranger au Nicaragua sont déclarés irréguliers par la Direction générale des migrations et des étrangers, celle-ci peut, selon les cas : 1) lui demander de régulariser son statut migratoire ; 2) le placer en rétention et lui ordonner de quitter le pays dans un délai déterminé ; et 3) le placer en rétention et ordonner sa reconduite à la frontière, après examen du dossier (art. 159 de la loi no 761). Les migrants en situation irrégulière sont retenus dans des centres d’hébergement de migrants, locaux exclusivement réservés à cet effet, gérés et contrôlés par les autorités de la Direction générale des migrations et des étrangers. Les normes et mesures de sécurité pertinentes doivent être appliquées jusqu’à la reconduite à la frontière à destination du pays d’origine ou de provenance, qui aura lieu dès que les migrants auront reçu du consulat de leur pays les documents requis et qu’ils auront obtenu leur billet de retour. À l’issue du délai fixé pour le séjour en centre d’hébergement, la Direction générale des migrations et des étrangers, sur demande du migrant ou de l’organisme, gouvernemental ou non gouvernemental, qui travaille auprès des migrants, remet l’intéressé sous la tutelle et le contrôle de ce dernier, sous peine de responsabilité civile et pénale, après avoir dûment présenté le dépôt de garantie, conformément aux dispositions de la présente loi (art. 161 de la loi no 761).

81.En ce qui concerne les sanctions encourues par les entreprises de transport international qui conduisent sur le territoire d’un État des personnes n’ayant pas les papiers requis à cet effet, l’article 318 du Code pénal définit le trafic de migrants illégaux et dispose que quiconque, dans le cadre d’un trafic de personnes, fait entrer, facilite la sortie ou le séjour, transfère, embauche ou héberge des migrants illégaux en connaissant leur situation, est puni de cinq à huit ans d’emprisonnement et de cinq cents à mille jours-amende ; si l’infraction est commise par imprudence, la peine prévue est de trois à cinq ans d’emprisonnement.

Article 13Protection des étrangers contre les expulsions arbitraires

82.L’article 27 de la Constitution garantit le respect des droits reconnus par la Constitution à toute personne se situant sur le territoire du Nicaragua et relevant de sa juridiction. L’article 11 de la loi générale no 761 relative aux migrations et aux étrangers dispose que les étrangers jouissent des mêmes droits et garanties individuels et sociaux que les Nicaraguayens, sauf limitations prévues dans la Constitution et les lois de la République.

83.L’article 12 de la loi no 761 précise que les étrangers ont, au même titre que les Nicaraguayens, des obligations telles que le paiement de l’impôt et des cotisations sociales, conformément aux dispositions de la législation en vigueur dans ce domaine. Ils doivent en outre procéder aux dépôts exigés par la loi en fonction de leur statut migratoire ; informer la Direction générale des migrations et des étrangers de tout changement d’état civil, de domicile et d’activité professionnelle ; conserver et présenter, à la demande de l’autorité compétente, les documents délivrés par le pays d’origine ou de provenance établissant leur identité ainsi que leur statut migratoire au Nicaragua ; les étrangers qui se trouvent sur le territoire national et demandent à y résider sont tenus de solliciter une prolongation de séjour tant qu’ils n’ont pas reçu l’attestation de la décision concernant leur demande et ne sont pas inscrits sur le Registre national des étrangers ; les étrangers non-résidents ne peuvent pas exercer un travail ou une activité rémunérés à leur compte, excepté s’ils y sont autorisés dans certaines circonstances particulières (artistes, sportifs, participants à des spectacles publics, etc.). Les autorisations concernant les diverses catégories de travailleurs migrants sont accordées en consultation avec le Ministère du travail.

84.En cas de manquement à ces obligations, il existe des mécanismes légaux qui permettent la reconduite à la frontière, l’expulsion et l’extradition des étrangers (titre XV de la loi no 761) pour des motifs prévus par la loi. L’article 171 de la loi générale relative aux migrations et aux étrangers précise que la reconduite à la frontière est un acte administratif décidé par le Directeur général du service des migrations et des étrangers, ordonnant l’éloignement d’un étranger du territoire national, notamment pour les motifs suivants : être entré sur le territoire à un endroit non autorisé ; être entré ou avoir séjourné au Nicaragua grâce à de faux papiers ou à une déclaration frauduleuse ; avoir séjourné sur le territoire national après l’expiration ou le retrait de son autorisation de résidence ou de séjour au Nicaragua ; avoir été condamné pour des infractions graves ou moins graves dès lors que l’étranger n’a pas de lien d’alliance ou de consanguinité avec un citoyen nicaraguayen ; représenter un danger pour la sécurité des citoyens et l’ordre public ; pratiquer le vagabondage de manière habituelle, sous réserve que cela soit dûment établi. Lorsqu’un étranger a été reconduit à la frontière, il ne peut pas revenir sur le territoire national pendant deux ans, excepté dans les circonstances prévues à l’article 172 de la loi no 761. La décision et l’exécution de la reconduite à la frontière font l’objet de décisions administratives dûment motivées, conformément aux dispositions de la loi générale relative aux migrations et aux étrangers et de son règlement d’application (art. 173 de la loi no 761).

85.L’article 174 de la loi no 761 précise que l’expulsion correspond à une décision prise par le Ministère de l’intérieur ou par les autorités judiciaires, conformément au Code pénal, ordonnant à l’étranger, résident ou non résident, de quitter le territoire national dans un délai déterminé, lorsque ses activités sont considérées comme attentatoires à l’ordre public, à la sécurité des citoyens ou à la souveraineté nationale. Les motifs qui peuvent justifier une expulsion sont énoncés à l’article 175 de la loi générale relative aux migrations et aux étrangers. Lorsqu’un étranger a été expulsé, il ne peut pas revenir sur le territoire national pendant cinq ans (art. 176 de la loi no 761) ou dix ans si l’expulsion a été motivée par la commission d’une infraction contre une personne mineure, d’une agression ou d’une infraction portant atteinte à la vie d’une femme, d’une personne ayant des capacités différentes ou d’une personne âgée. Lorsqu’un étranger est expulsé, il perd son statut migratoire légal (art. 177 de la loi no 761). Dans le cas où une action pénale a été engagée, l’expulsion intervient au terme de l’exécution de la peine d’emprisonnement prononcée (art. 178 de la loi no 761).

86.Au Nicaragua, l’extradition ne peut être fondée sur des motifs politiques ni sur la commission d’infractions de droit commun en lien avec des motifs politiques, telles qu’elles sont prévues par la loi (art. 179 de la loi no 761). L’extradition est soumise à la loi et aux instruments internationaux ratifiés par le Nicaragua. Si l’étranger concerné a le statut de résident, le Ministère de l’intérieur doit au préalable lui retirer son autorisation de résidence.

87.Les décisions administratives de la Direction générale des migrations et des étrangers sont susceptibles de recours en rétractation et en appel (art. 181 et 182 de la loi no 761), ce qui entraîne une suspension de la décision de reconduite à la frontière ou d’expulsion. Le recours en appel est recevable dans les cas suivants : 1) atteinte aux intérêts des étrangers en lien avec leur statut migratoire légale ; 2) refus injustifié du séjour légal d’un étranger ; et 3) reconduite à la frontière ou expulsion injustifiées.

88.En ce qui concerne la prise en charge des réfugiés et des demandeurs d’asile, la Constitution dispose (art. 42) que le Nicaragua reconnaît le statut de réfugié et garantit l’asile politique dans le seul cas des personnes persécutées du fait de leur lutte pour la démocratie, la paix, la justice et les droits de l’homme. L’article 26 de la loi générale relative aux migrations et aux étrangers prévoit qu’il incombe à la Direction générale des migrations et des étrangers de délivrer des papiers aux étrangers auxquels la Commission nationale pour les réfugiés a accordé le statut de réfugié, conformément aux dispositions de la loi no 655 relative à la protection des réfugiés, qui régit également la cessation, le retrait et la révocation du statut de réfugié, ainsi que la délivrance d’un document de voyage à ces personnes. Selon l’article premierde la loi relative à la protection des réfugiés, un réfugié est une personne à qui les autorités ont accordé ce statut dans les circonstances suivantes : la personne a une crainte fondée d’être persécutée notamment en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son sexe, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques ; elle se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays. Le statut de réfugié est également accordé à toute personne qui, en raison de circonstances survenues dans son pays d’origine ou de résidence habituelle alors qu’elle se trouvait à l’étranger, a une crainte fondée d’y être persécutée pour les raisons visées aux paragraphes A, B et C de l’article premier précité. Les dispositions de la loi n° 655 sont applicables à ces personnes qui, de ce fait, ne relèvent pas de la législation migratoire ordinaire. Ne peuvent pas bénéficier du statut de réfugié : les personnes qui ont commis un crime contre la paix, un crime de guerre ou un crime contre l’humanité, tels que ces crimes sont définis dans les instruments internationaux ; les personnes qui ont commis une infraction de droit commun grave en dehors du pays d’accueil avant d’y être admises comme réfugiés ; et les personnes qui se sont rendues coupables d’agissements contraires aux buts et aux principes des Nations Unies.

89.La Commission nationale pour les réfugiés a été créée pour assurer une prise en charge adéquate des réfugiés. Elle réunit des représentants de la Direction générale des migrations et des étrangers, du Ministère de la famille, de l’adolescence et de l’enfance, du Ministère des relations extérieures, de l’Agence sociale des programmes du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés au Nicaragua, de l’Église catholique et de l’Église évangélique. Y participent également, sans droit de vote : le Bureau du Procureur chargé des droits de l’homme, la Commission permanente des droits de l’homme, l’Association nicaraguayenne pour les droits de l’homme, le Centre nicaraguayen des droits de l’homme et le Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés (art. 14 de la loi no 655).

90.En ce qui concerne l’asile, l’article 27 de la loi no 761 dispose qu’il incombe à la Direction générale des migrations et des étrangers de délivrer des papiers aux étrangers auxquels le pouvoir exécutif, par l’intermédiaire du Ministère des relations extérieures, a accordé l’asile politique, conformément aux dispositions des instruments internationaux ratifiés par le Nicaragua. La cessation, le retrait et la révocation du statut de bénéficiaire de l’asile politique sont régis par les dispositions des instruments internationaux ratifiés par le Nicaragua.

Article 14Égalité devant la loi, garantie d’un procès équitable et principes régissant l’administration de la justice

91.Conformément aux dispositions de la loi organique no 260 relative au pouvoir judiciaire de la République du Nicaragua, la Cour suprême, composée de 16 magistrats élus par l’Assemblée nationale, est l’organe suprême du pouvoir judiciaire. Ce pouvoir compte également des juges chargés de rendre la justice dans les communes, départements et régions autonomes du Nicaragua. Le pouvoir judiciaire est organisé sur le plan judiciaire et administratif. Sa structure hiérarchique est pyramidale avec, à la base, des juridictions locales et, à un deuxième niveau, les tribunaux de district, présents dans chaque département et dans les régions autonomes de la côte caraïbe. Certains départements, dont celui de Managua, ont plusieurs tribunaux de district, en raison de leur population importante. Au troisième niveau de la pyramide se trouvent les cours d’appel, présentes dans chacune des circonscriptions judiciaires. Leur siège se situe dans le chef-lieu d’un des départements constituant la circonscription judiciaire concernée.

92.Le Conseil national de l’administration et de la carrière judiciaire a été créé pour coordonner, planifier et exécuter la politique administrative et financière du pouvoir judiciaire. Constitué de 4 magistrats de la Cour suprême, il assure notamment les fonctions suivantes : organiser et proposer la nomination des juges et des magistrats des cours d’appel ; gérer le régime disciplinaire ; enquêter, avec l’appui du service d’inspection judiciaire, sur les fautes disciplinaires qui auraient été commises les avocats, les notaires et les juges nicaraguayens ; approuver la nomination, la mutation ou le licenciement du personnel administratif.

93.La carrière judiciaire comprend les catégories de fonctionnaires suivantes : défenseur commis d’office, greffier, greffier de chambre, greffier de cour d’appel, officier notificateur, juge local, juge de district, magistrat de cour d’appel, greffier de la Cour suprême, exerçant leurs fonctions dans les cours et les tribunaux. La carrière judiciaire est ouverte à tous les Nicaraguayens dans des conditions d’égalité, sans distinction fondée sur le sexe, la couleur de peau, les opinions politiques ou religieuses ou tout critère autre que le mérite et la compétence. Pour intégrer la carrière judiciaire, il faut réussir les épreuves du concours organisé par le Conseil national de la carrière judiciaire, conformément aux dispositions de la loi organique relative au pouvoir judiciaire et de la loi relative à la carrière judiciaire. Pour la période 2014-2018, l’État nicaraguayen a inscrit l’égalité femmes-hommes et l’avancement des femmes parmi les thèmes prioritaires de l’action des pouvoirs publics et a mis en place des instruments juridiques garantissant l’accès des femmes à des fonctions publiques et à des postes de responsabilité.

94.Le tableau d’avancement des fonctionnaires judiciaires est approuvé par l’Assemblée plénière de la Cour suprême, sur proposition du Conseil national de la carrière judiciaire. L’avancement n’est pas obligatoire : lorsqu’il y a lieu de promouvoir la personne la mieux située sur le tableau, s’il est établi qu’elle réunit les conditions requises, le poste lui est proposé, mais elle peut accepter ou refuser la promotion. Les postes vacants sont ouverts, en une proposition unique, à tous les membres titulaires de la carrière judiciaire correspondant au groupe professionnel et à la catégorie recherchés, avant d’être affectés par voie de promotion, sans préjudice des recrutements par voie extraordinaire, s’il y a lieu. L’arrêté du Conseil portant proposition du poste vacant fixe le délai dans lequel les personnes intéressées peuvent soumettre leur candidature. Le poste est attribué au candidat le mieux placé sur le tableau d’avancement s’il ne fait pas l’objet d’une évaluation négative (art. 47.3 de la loi relative à la carrière judiciaire).

95.La carrière judiciaire prend fin dans les cas suivants : décès ; incapacité physique ou mentale permanente incompatible avec l’exercice des fonctions concernées ; retraite ; démission ; destitution ; incompatibilité survenue et autres situations prévues par la loi relative à la carrière judiciaire. En cas de réintégration dans la carrière judiciaire, le fonctionnaire concerné jouit des bénéfices liés au régime accumulés à la date de sa réintégration.

96.Les fonctionnaires judiciaires sont civilement responsables des dommages qu’ils causent, conformément aux dispositions des lois en vigueur en la matière. Ils sont également responsables des infractions qu’ils commettent dans l’exercice de leurs fonctions. Les sanctions disciplinaires concernant les fonctionnaires relevant de la carrière judiciaire sont examinées et déterminées conformément aux dispositions de la loi organique relative au pouvoir judiciaire et de la loi relative à la carrière judiciaire. La loi relative à la carrière judiciaire établit la gradation de la responsabilité et des sanctions. Les sanctions applicables aux fonctionnaires judiciaires pour les fautes disciplinaires commises dans l’exercice de leurs fonctions sont les suivantes : avertissement ; amende ne dépassant pas 10 % du montant du salaire mensuel ; exclusion pour une durée de un mois à un an sans solde ; destitution.

97.Les enquêtes et plaintes à caractère disciplinaire à l’encontre des fonctionnaires judiciaires relèvent en première instance de la Commission disciplinaire de la Cour suprême, avec l’assistance de l’Inspection disciplinaire judiciaire, chargée de l’instruction, et, en deuxième instance, de l’Assemblée plénière de la Cour suprême. S’il y a lieu, compte tenu de la faute disciplinaire commise, de prononcer la destitution du fonctionnaire concerné, la Commission disciplinaire propose l’adoption de cette sanction à l’Assemblée plénière de la Cour suprême, qui rend une décision insusceptible de recours.

98.La juridiction militaire fait partie des juridictions relevant de la Cour suprême. Elle est exercée par le contrôleur général, avec le concours des organes judiciaires militaires établis par la loi. Ces organes sont exclusivement habilités à juger et à exécuter les décisions rendues dans les affaires relevant de leur compétence. Ils sont composés de membres de l’armée nicaraguayenne, agissant dans le respect des garanties et des principes constitutionnels. La juridiction militaire est seule compétente pour connaître des infractions militaires commises par les membres de l’armée nicaraguayenne et prévues par le Code pénal militaire. Elle est également compétente pour prononcer des sanctions disciplinaires par voie judiciaire à l’encontre de tous ceux qui interviennent dans les procédures judiciaires militaires ou qui ne respectent pas ou perturbent l’ordre de la procédure, conformément aux dispositions de la loi.

99.Le Forum économique mondial, dans son rapport mondial sur la parité femmes-hommes 2017, reconnaît que le Nicaragua a accompli des progrès notables en matière d’égalité femmes-hommes et le place en tête des pays américains dans ce domaine. Au niveau mondial, le Nicaragua occupe la sixième place du classement et se trouve parmi les six pays qui ont réduit de plus de 80 % les inégalités femmes-hommes. Le Nicaragua est également le deuxième pays en termes de participation des femmes à la vie politique. La parité femmes-hommes est respectée depuis 2014 en ce qui concerne les postes de ministres et la proportion de femmes parlementaires a augmenté jusqu’à atteindre 46 %, le cinquième plus fort pourcentage au niveau mondial. En ce qui concerne le pouvoir judiciaire, le nombre de magistrates a augmenté de 31 % au sein de la Cour suprême et de 47 % au sein des cours d’appel. De même, 64 % des postes relevant de la carrière judiciaire sont occupés par des femmes. Au niveau national, l’État a assuré la présence politique des femmes, en tant qu’élément de développement, dans les gouvernements locaux. Le principe de la parité a été appliqué lors des élections municipales de 2017 : 65 femmes maires et 88 femmes maires-adjointes ont été élues, ce qui correspond à 153 femmes élues sur 306 postes électifs locaux.

Article 15Principe de non-rétroactivité de la loi

100.Au Nicaragua, la loi n’a pas d’effet rétroactif, sauf en matière pénale, si elle est favorable à la personne poursuivie. L’article 2 de la loi no 641 (Code pénal) consacre le principe de non-rétroactivité de la loi et dispose que si, postérieurement à la commission d’une infraction, une nouvelle loi entre en vigueur, la loi applicable en l’espèce est celle qui est la plus favorable à la personne poursuivie. Le principe de non-rétroactivité s’applique également aux personnes condamnées qui doivent encore exécuter tout ou partie de leur peine ; les faits commis sont jugés conformément à la loi en vigueur lors de leur commission, sauf s’il ressort le contraire, sans ambiguïté possible, des dispositions d’une loi adoptée ultérieurement. L’article 3 du Code pénal dispose que si une nouvelle loi adoptée avant l’exécution de la peine est favorable à la personne condamnée, le juge ou le tribunal compétent est tenu de modifier sa décision pour rendre la peine ou les mesures de sûreté prononcées conformes à cette nouvelle loi. Il précise également que si la condamnation résulte d’un fait considéré comme une infraction par la loi en vigueur au moment de sa commission mais qui n’est plus considéré comme tel par la nouvelle loi, le juge ou le tribunal compétent doit ordonner la mise en liberté immédiate de la personne poursuivie ou condamnée. En cas de doute pour déterminer quelle est la loi la plus favorable, la personne condamnée doit être entendue.

101.La loi no 566 (Code pénal militaire) consacre également ce principe et dispose, en son article 2, que la loi n’a pas d’effet rétroactif, sauf en matière pénale, si elle est favorable à la personne poursuivie. Elle indique en outre que, même si la loi ne le formule pas expressément, les lois pénales militaires postérieures à la commission de l’infraction ont un effet rétroactif dès lors qu’elles sont favorables à la personne poursuivie, y compris dans le cas où au moment de leur entrée en vigueur une décision ayant force de chose jugée a été rendue et la personne concernée exécute sa peine. En cas de doute pour déterminer quelle est la loi la plus favorable, la personne poursuivie doit être entendue.

Article 16Droit à la reconnaissance de la personnalité juridique

102.Le Code civil dispose qu’aucune association ou corporation n’est dotée de la personnalité juridique si elle n’a pas été créée ou autorisée par la loi (art. 76). Toutes les associations ou corporations dotées de la personnalité juridique peuvent exercer tous les droits civils relatifs à leurs intérêts légitimes. Les associations qui n’ont pas d’existence légale en tant que personnes morales sont considérées comme de simples associations civiles ou commerciales, selon leur objet propre. La loi générale relative aux personnes morales à but non lucratif dispose que les personnes souhaitant obtenir la personnalité juridique doivent en faire la demande auprès de l’Assemblée nationale en joignant un exposé des motifs justifiant la constitution de la personne morale et précisant son importance et ses effets sur la vie civile ou religieuse du pays, ainsi que l’acte notarié constitutif. L’Assemblée nationale (art. 6 et 7) décide d’attribuer la personnalité juridique ; dans le cas contraire, la demande est retournée en précisant les irrégularités qui doivent être rectifiées (art. 10). L’inscription au Registre des personnes morales doit être demandée en indiquant la date et le numéro du Journal officiel où figure la décision d’attribution de la personnalité juridique. Les organisations à but non lucratif ayant obtenu la personnalité juridique sont tenues de poursuivre les objectifs et les finalités pour lesquels elles ont été créées, conformément à leur acte constitutif. Leur action est réglementée et contrôlée par le Département du contrôle et de l’enregistrement des associations, relevant du Ministère de l’intérieur.

103.En ce qui concerne le retrait de la personnalité juridique, l’article 24 de la loi no 147 dispose qu’il ne peut être décidé que par l’Assemblée nationale, selon la même procédure que pour son attribution, après consultation du Ministère de l’intérieur, et précise les motifs justifiant le retrait de la personnalité juridique, à savoir : a) l’association est utilisée pour commettre des actes illicites ; b) elle est utilisée pour troubler l’ordre public ; c) ses activités ne correspondent pas à l’objet pour lequel elle a été constituée ; et d) elle entrave le contrôle et la surveillance exercés par le Département du contrôle et de l’enregistrement des associations.

Article 17Droit à la vie privée, à l’inviolabilité du domicile et à la protection de la correspondance privée

104.L’article 26 de la Constitution reconnaît que toute personne a droit au respect de sa vie privée, de son honneur et de sa réputation, ainsi qu’à l’inviolabilité de son domicile, de sa correspondance et de ses communications de tous types ; elle a également le droit d’accéder à toute information la concernant enregistrée par des organismes privés ou publics et de savoir pourquoi et à quelle fin cette information est détenue. Le Code de procédure pénale définit les motifs et les procédures permettant aux autorités d’interférer sur ces droits aux fins d’enquête et de recherche de preuves. Le Procureur général de la République ou le Directeur de la Police nationale peuvent, sur autorisation judiciaire : 1) Intercepter les communications téléphoniques ou autres formes de télécommunications, en précisant, dans la demande d’autorisation, la durée de la mesure, qui ne doit pas excéder trente jours, et les personnes qui auront accès aux communications (Code de procédure pénale, art. 213, par. 3 et 4) ; 2) Procéder à la perquisition et à la fouille du lieu d’habitation et de ses dépendances, d’un établissement commercial ou de bureaux entre six heures et dix-huit heures (Code de procédure pénale, art. 217, par. 1) ; 3) Obtenir des renseignements sur les opérations financières en possession de toute institution financière, publique ou privée (Code de procédure pénale, art. 211) ; 4) Intercepter les communications écrites, télégraphiques et électroniques, sur commission rogatoire du juge, et verser à l’enquête les contenus ayant un rapport avec l’infraction (Code de procédure pénale, art. 214) ; 5) Procéder à des examens physiques raisonnables et sans risques (analyse de fluides biologiques, entre autres) effectués par les experts de l’Institut de médecine légale en suivant des procédures techniques et scientifiques (Code de procédure pénale, art. 236, 237 et 238).

105.Le recours en habeas data est un mécanisme juridictionnel qui permet de protéger les droits à l’autodétermination informationnelle et complète les mécanismes de contrôle constitutionnels établis par la loi no 831 modifiant et complétant la loi no 49 relative au recours en amparo.

Article 18Liberté de pensée, de conscience et de religion

106.L’État protège la liberté de pensée, de conscience et de religion. L’article 14 de la Constitution dispose que le Nicaragua est un État laïc et n’a pas de religion officielle, ce qui garantit le principe d’égalité, la consolidation de la démocratie et l’action des fonctionnaires au service de l’ensemble de la population, indépendamment des convictions religieuses des individus. Dans le même ordre d’idées, l’article 29 dispose ce qui suit : « Toute personne a droit à la liberté de conscience, de pensée et de religion. Nul ne peut faire l’objet de mesures coercitives restreignant ces droits ni être contraint de déclarer sa foi, son idéologie ou ses convictions ». Ces dispositions permettent à tous les citoyens de choisir librement leurs propres convictions. Historiquement, le catholicisme a été la religion dominante de la population nicaraguayenne. En 2017, 40 % des Nicaraguayens étaient catholiques, 32 % évangélistes ou protestants, 25 % athées et 3 % adeptes d’une autre religion. Ces chiffres montrent bien que la population pratique librement sa religion, en accord avec sa conscience.

107.L’article 69 de la Constitution dispose que chacun a le droit d’exprimer ses convictions religieuses, tant en public qu’en privé, par le culte, les pratiques et l’enseignement, ce qui ne le dispense pas du respect de la loi. L’éducation est laïque et ce principe se reflète dans les programmes scolaires et les méthodes d’enseignement ; l’État reconnaît toutefois aux établissements d’enseignement privés le droit d’enseigner la religion en tant que matière extrascolaire (art. 124 de la Constitution). En ce qui concerne les droits des communautés de la côte caraïbe, l’article 180 de la Constitution dispose que l’État garantit la préservation de leurs cultures, de leurs langues, de leurs religions et de leurs coutumes. Le Code pénal punit quiconque empêche ou perturbe le déroulement de cultes ou de cérémonies religieuses (art. 190), tout comme il réprime la discrimination fondée sur la religion (art. 427).

Article 19Le droit à la liberté d’opinion et d’expression

108.La Constitution garantit aux citoyens nicaraguayens le droit de rechercher, de diffuser et de recevoir des informations et des opinions, par divers moyens et sans aucune forme de censure. Le droit d’informer est une responsabilité sociale ; il ne peut être entravé par la censure, mais comporte des responsabilités prévues par la loi. Dans le cadre de leur fonction sociale, les médias doivent contribuer au développement de la nation (art. 66, 67 et 68).

109.La loi générale no 200 relative aux télécommunications a pour objet de réglementer les services de télécommunications et les services postaux, de définir les droits et les devoirs des usagers et des opérateurs et de garantir la qualité, l’équité et la sécurité. D’autre part, le décret no 19-2016 portant règlement d’application de la loi no 200 dispose, en son article 2, que l’Institut nicaraguayen des télécommunications et des services postaux, en tant qu’organisme régulateur, participe à la gestion des moyens opérationnels, délivre les licences, permis et concessions et gère le registre des prestataires de services de télécommunications. Ce décret définit également les motifs qui justifient l’attribution, la révocation ou le retrait des autorisations de prestation de services (art. 68).

110.L’État garantit le plein exercice du droit à la liberté d’expression, sans censure préalable ni restriction d’aucune sorte. Les journalistes peuvent suivre, étudier et critiquer les politiques et l’action de l’administration publique. L’accès à l’information publique est garanti grâce à des bureaux créés à cet effet et aux sites Internet des institutions de l’État. L’indépendance et le pluralisme des médias sont respectés. Les deux seuls médias écrits diffusés dans tout le pays et les deux qui sont diffusés dans la capitale appartiennent à des groupes privés, ainsi que les chaînes de télévision, à l’exception de Canal 6, qui est détenue par l’État. Il existe au total 377 stations de radiodiffusion du son (FM et AM) et 29 chaînes de télévision en clair (UHF et VHF), proposant des contenus très variés. Toutes les communes sont couvertes par un réseau de téléphonie mobile et 85 % de la population a accès à l’Internet mobile.

111.La loi no 621 relative à l’accès à l’information publique a été adoptée le 16 mai 2007. Elle définit le cadre réglementaire qui garantit le droit des citoyens d’obtenir à tout moment des informations sur le budget des institutions, les rémunérations, les rapports annuels, les nominations, les appels d’offres et les contrats. Elle réglemente l’accès à l’information publique contenue dans les documents, les archives et les bases de données des institutions de l’État, des sociétés d’économie mixte, des sociétés subventionnées par l’État et des entités privées qui administrent ou gèrent les ressources publiques, facilitant ainsi les enquêtes des journalistes sur l’administration des biens et ressources de l’État, ainsi que le suivi et le contrôle exercés par les citoyens sur la gestion publique.

112.Quiconque, par ses paroles ou ses actes, porte atteinte à la dignité d’autrui et nuit à son renom, à son image, à sa réputation, à son honneur ou à sa considération peut être poursuivi pour injure, infraction réprimée par le Code pénal, et encourt une peine aggravée si l’information est diffusée publiquement. Quiconque impute mensongèrement à autrui la commission d’une infraction ou la participation à la commission d’une infraction, peut être poursuivi pour calomnie. Le Code de procédure pénale dispose, en son article 53, que ces infractions ne peuvent donner lieu à des poursuites que si la victime porte plainte.

Article 20Interdiction de toute propagande en faveur de la guerre et de tout appel à la haine nationale, raciale ou religieuse

113.L’article 32 de la loi no 641 (Code pénal) érige en infraction le fait de louer le crime ou d’en célébrer l’auteur et les coauteurs, directement ou indirectement, par des moyens susceptibles de diffuser efficacement de tels propos auprès d’un ensemble de personnes. Le Code pénal (art. 427 et 428) réprime la promotion des actes de discrimination empêchant l’exercice d’un droit ou d’une prérogative prévus par la Constitution ou les autres lois, pour des motifs fondés sur la situation économique, sociale, religieuse, politique, personnelle ou autre.

Article 21Droit de réunion pacifique

114.La Constitution reconnaît le droit de se réunir pacifiquement, l’exercice de ce droit n’étant pas soumis à autorisation préalable (art. 53) ; elle reconnaît également la liberté de réunion publique, de manifestation et de mobilisation, exercée en conformité avec la loi (art. 54).

115.L’article 7 de la loi no 872 relative à l’organisation, aux fonctions, à la carrière et au régime spécial de sécurité sociale de la Police nationale dispose qu’il incombe à la Police nationale de délivrer les permis et les autorisations nécessaires à l’organisation d’événements ou d’activités spéciales perturbant la libre circulation des personnes et des véhicules ou étant susceptibles de troubler la vie normale de la population et de définir des horaires, des zones, des trajets, des mesures et des règles spéciales à respecter.

Article 22Droit de s’associer librement, y compris de constituer des syndicats

116.L’article 87 de la Constitution consacre l’existence d’une entière liberté syndicale au Nicaragua. Les travailleurs peuvent se regrouper volontairement en syndicats, constitués conformément aux dispositions de la loi. Aucun travailleur n’est tenu de s’affilier à un syndicat déterminé, ni de renoncer à celui auquel il est affilié. La loi no 185 (Code du travail) définit les organisations syndicales comme étant des associations de travailleurs ou d’employeurs, constituées pour représenter et défendre leurs intérêts respectifs. La constitution de syndicats n’exige aucune autorisation préalable. Le décret no 5597 relatif au règlement des associations syndicales a été modifié par le décret no 93-2004.

117.Un manuel pour la constitution, la mise à jour et la restructuration des organisations syndicales a été publié et diffusé en 2008 pour informer et aider les travailleurs à s’organiser en syndicats. Le Registre des associations syndicales, qui auparavant ne fonctionnait qu’à Managua, a été décentralisé et est désormais accessible sur tout le territoire pour faciliter et/ou accélérer les démarches dans ce domaine et favoriser la création d’organisations syndicales.

118.Parmi les conventions internationales de l’Organisation internationale du Travail ratifiées par le Nicaragua, il convient de citer la Convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, qui régit le droit, librement exercé par les travailleurs et les employeurs sans distinction aucune, de constituer des syndicats pour promouvoir et défendre leurs intérêts respectifs et de s’y affilier sans autorisation préalable. La Convention (no 169) de l’OIT relative aux peuples indigènes et tribaux, 1989, a été ratifiée le 25 août 2010.

119.La constitution des associations est réglementée par la loi générale no 147 relative aux personnes morales à but non lucratif, qui dispose, en son article 6, que la personnalité juridique est attribuée et retirée par décision de l’Assemblée nationale. L’article 24 de cette même loi dispose que le retrait de la personnalité juridique ne peut être décidé que par l’Assemblée nationale, selon la même procédure que pour son attribution, après consultation du Ministère de l’intérieur lorsque l’association concernée est utilisée pour commettre des actes illicites, lorsque le nombre de ses membres est inférieur au minimum légal, lorsque ses activités ne correspondent pas à l’objet pour lequel elle a été constituée et lorsqu’elle elle entrave le contrôle et la surveillance exercés par le Département du contrôle et de l’enregistrement des associations.

120.Au Nicaragua, les partis politiques sont régis par la loi électorale (loi no 331). Cette loi dispose que les partis politiques sont des personnes morales de droit public constituées par des citoyens nicaraguayens et définit la procédure de constitution des partis politiques. La loi no 790 portant modification de la loi électorale précise les conditions requises pour obtenir la personnalité juridique.

Article 23Protection de la famille et mariage

121.La Constitution précise que la famille est le noyau fondamental de la société et joue un rôle essentiel dans le Plan pour le développement humain de la nation. Le Code de la famille, adopté par l’État, a mis à jour le modèle juridique familial. Il dispose que la protection, le développement et le renforcement de la famille sont des principes qui doivent être mis en œuvre par l’État, la société et les familles pour améliorer la qualité de vie et qu’ils doivent être fondés sur des relations d’amour, de solidarité, d’aide et de respect mutuel. Parmi les principes établis par le Code de la famille, figurent : l’égalité et la protection du mariage et de l’union de fait ; la protection des femmes chefs de famille ; l’obligation pour les institutions de l’État de prévenir et d’éliminer la violence familiale ; la parentalité responsable, ainsi que la constitution du domicile familial, l’égalité des droits, des devoirs et des opportunités de l’homme et de la femme, la participation des enfants, garçons et filles, aux responsabilités familiales et la responsabilité partagée de tous les membres de la famille. Les époux ont les mêmes droits et les mêmes responsabilités (art. 79).

122.L’homme et la femme âgés de 18 ans révolus sont juridiquement aptes à contracter mariage. Toutefois, les adolescents âgés de 16 à 18 ans peuvent contracter mariage avec l’autorisation de leurs représentants légaux. Le mariage peut être dissous par consentement mutuel ou à la demande d’une des parties (art. 72 de la Constitution), selon une procédure définie par le Code de la famille.

123.L’État, par l’intermédiaire du pouvoir judiciaire, a créé 28 tribunaux spécialisés dans les affaires familiales sur l’ensemble du pays (26 tribunaux de district et 2 juridictions locales), ce qui a permis d’améliorer la couverture et l’accès à la justice pour les familles nicaraguayennes. Les tribunaux spécialisés dans les affaires familiales sont épaulés par des conseils techniques consultatifs, composés de spécialistes dans le domaine de la psychologie et du travail social, qui assistent les fonctionnaires judiciaires dans la prise de décisions. Entre 2014 et 2018, 143 784 affaires familiales ont été traitées. La plupart d’entre elles concernent la dissolution du lien conjugal, mais portent généralement aussi sur des questions connexes telles que les soins et la garde des enfants, la pension alimentaire, le droit de correspondance et de visite, l’usage et l’habitation de biens immeubles et, assez fréquemment, sur le partage des biens.

Article 24Droits de l’enfant et protection de ces droits

124.La politique publique relative au renforcement de la famille nicaraguayenne et à la prévention de la violence, adoptée et mise en œuvre par le Nicaragua, assure la protection et le rétablissement des droits de l’homme des familles, des femmes, des enfants et des adolescents, afin de leur garantir une vie sans violence. L’État reconnaît que, dès sa naissance, l’enfant a droit à la nationalité nicaraguayenne, conformément aux dispositions et aux procédures prévues par la Constitution et par la loi en la matière ; il a également le droit d’avoir un nom, de connaître sa mère et son père et d’être élevé par eux. L’État garantit le respect du droit de l’enfant et de l’adolescent à préserver son identité, y compris sa nationalité, son nom et ses liens familiaux, conformément à la loi ; lorsqu’un enfant ou un adolescent est privé illégalement de son identité, en tout ou partie, l’État lui apporte l’aide et la protection nécessaires au rétablissement de celle-ci. Les enfants sont inscrits à l’état civil dans les délais fixés par la loi. À cet effet, l’État garantit des mécanismes rapides et facilement accessibles et délivre gratuitement la première copie d’acte de naissance.

125.Les principaux instruments internationaux ratifiés par le Nicaragua en vigueur et de plein effet à l’intérieur comme à l’extérieur du territoire national en matière de rétablissement et de protection des droits des enfants sont reconnus et inscrits dans la Constitution et les autres lois en la matière.

126.Des stratégies sont mises en œuvre pour favoriser les soins et le suivi de la croissance des enfants dès leur conception. Le Programme urbain en faveur du bien-être des enfants vivant dans l’extrême pauvreté, le Projet pour le bien-être social et le Programme pour le suivi et la mise en œuvre de la politique nationale relative à la petite enfance entrent dans ce cadre. Le Code de la famille régit les questions relatives à la restitution des enfants déplacés illégalement dans tout pays étranger. Le réseau des centres de développement infantile a été étendu, passant de 60 à 270 centres au niveau national. Le Système d’alerte précoce pour la prévention de la violence a été mis en place et 42 073 personnes ont été prises en charge et suivies par les structures d’accompagnement familial. Ces quatre dernières années, une formation a été délivrée à 2 913 fonctionnaires du Système national chargé du bien-être social ; 1 169 979 carnets d’amour aux tout-petits ont été distribués pour promouvoir les soins et le suivi de la croissance des enfants depuis leur conception jusqu’à l’âge de 6 ans. De nouvelles formes d’éducation sont encouragées par la Politique relative à la petite enfance et la réglementation du Ministère de la famille, de l’adolescence et de l’enfance ; 160 978 visites à domicile ont été effectuées à cet effet.

127.La loi no 896 relative à la lutte contre la traite des êtres humains a été adoptée en 2015. Elle porte création de mécanismes spécifiques et effectifs pour la protection, la tutelle et le rétablissement du droit à la liberté, à l’intégrité, à la santé, à l’éducation, à la sécurité et au libre développement des personnes, et notamment des enfants et des adolescents. La Coalition nationale contre la traite des êtres humains, chargée de garantir les droits et la protection spéciale des enfants et des adolescents, a été créée en vertu de cette loi, de même que le Guide pour la détection et la prise en charge des enfants et des adolescents victimes d’exploitation sexuelle à des fins commerciales au Nicaragua.

128.La loi no 779 et le Code de la famille répriment la maltraitance physique des enfants et des adolescents commise par les parents, les tuteurs ou toute autre personne, laquelle ne peut être justifiée par le droit de corriger les manquements à la discipline. La réglementation interdit aux enseignants, aux autorités, aux fonctionnaires, aux employés et aux personnes travaillant dans le système éducatif de recourir à toute mesure ou sanction abusive.

129.Le Nicaragua, par l’intermédiaire du pouvoir judiciaire, a privilégié l’accès à la justice, en particulier pour les femmes, les enfants et les adolescents. Il a développé et renforcé les 75 tribunaux spécialisés dans les affaires familiales, la violence et l’adolescence, ainsi que le Système de facilitateurs judiciaires, l’Institut de médecine légale et ses cliniques pour femmes et enfants et le laboratoire d’analyse de l’ADN. Le ministère public a adopté le Protocole d’action applicable au Procureur spécialisé en matière de justice pénale pour adolescents, ce qui a permis de faire progresser la justice réparatrice pour mineurs. La Réglementation du système de justice pénale spécialisé pour adolescents est également entrée en vigueur, ainsi que le Manuel pour les défenseurs commis d’office en faveur des adolescents, qui permet de former les fonctionnaires judiciaires à la justice réparatrice et à la non revictimisation.

130.Le Nicaragua applique les Règles de Brasilia sur l’accès à la justice des personnes vulnérables, notamment en assurant l’accompagnement des enfants et des adolescents dans les procédures judiciaires, en veillant à ce que les juges ne portent pas la robe, que des paravents soient utilisés et que des mécanismes interinstitutionnels soient mis en place pour que les affaires soient jugées avec diligence et que les décisions soient rendues dans un délai raisonnable.

Article 25Droits politiques et droit de prendre part à la direction des affaires publiques

131.L’article 51 de la Constitution dispose que les citoyens ont le droit d’élire leurs représentants et d’être élus par la voie d’élections périodiques, ainsi que de postuler aux emplois publics, sauf limitations prévues dans la Constitution. Ce droit est régi par la loi électorale, la loi relative aux municipalités et la loi relative à l’égalité des droits et des chances qui visent à améliorer la participation, l’inclusion, la représentation, l’équité, la proportionnalité et la parité femmes-hommes.

132.Les élections générales (2016), les élections municipales (2017) et les élections des conseils régionaux des peuples autochtones et des peuples d’ascendance africaine (2014) se sont déroulées par l’exercice libre du droit de vote, au suffrage direct et à bulletin secret, du peuple nicaraguayen, avec la participation de 18 partis politiques. En 2016, le commandant Daniel Ortega Saavedra a été élu Président de la République, avec 72,44 % des suffrages exprimés. L’Organisation des États américains a supervisé le processus électoral et en a validé les résultats. La délivrance de papiers d’identité a progressé : le nombre de citoyens possédant une carte d’identité leur permettant de voter aux élections municipales de 2017, a augmenté de 17,74 %. Quant au nombre de bureaux de vote, en milieu urbain comme en milieu rural, il a augmenté de 2,0 %, passant de 12 960 lors des élections générales de 2011 à 13 206 lors des élections municipales de 2017.

Article 27Droits des minorités ethniques, religieuses et linguistiques

133.La Constitution dispose que la nation nicaraguayenne applique les principes de reconnaissance de l’identité propre des peuples autochtones et des peuples d’ascendance africaine au sein d’un État unitaire et indivisible et de reconnaissance des diverses formes de propriété. Elle consacre un chapitre spécifique aux droits des communautés de la côte caraïbe et dispose qu’elles font indissolublement partie du peuple nicaraguayen, qu’elles ont les mêmes droits et devoirs et qu’elles ont le droit de préserver et de développer leur identité culturelle dans le cadre de l’unité nationale, de se doter de leurs propres formes d’organisation sociale et d’administrer leurs affaires locales conformément à leurs traditions. Dans le cadre de la Constitution et des lois spécialisées en la matière, l’objectif juste et solidaire du rétablissement des droits ancestraux des communautés autochtones et des communautés d’ascendance africaine du Nicaragua a été et continue d’être pour l’État un engagement prioritaire et une politique fondamentale.

134.L’État reconnaît et donne effet au droit des peuples à disposer librement d’eux-mêmes ou à l’autodétermination des peuples autochtones et des peuples d’ascendance africaine de la côte caraïbe. Ces peuples ont le droit de choisir leur propre mode d’organisation et de gouvernement, de conduire leur développement économique, social et culturel comme ils l’entendent et de s’organiser librement sans ingérences extérieures. L’État reconnaît également les formes communales de propriété, de jouissance et d’usage des eaux et forêts des terres communales, ainsi que les droits de ces peuples à s’exprimer librement et à préserver leur langue, leur art et leur culture. Il reconnaît en outre les diverses formes d’organisation sociale des communautés autochtones et des communautés d’ascendance africaine, lesquelles possèdent leurs gouvernements et leurs autorités communales. Ces communautés sont regroupées en 24 gouvernements territoriaux autochtones et d’ascendance africaine autonomes qui exercent leurs compétences conformément aux dispositions des textes suivants : Constitution ; loi no 28 relative au statut d’autonomie des régions de la côte atlantique du Nicaragua ; loi no 445 relative au régime de propriété communale des peuples autochtones et des communautés ethniques des régions autonomes de la côte atlantique du Nicaragua et des fleuves Bocay, Coco, Indio et Maíz ; loi no 757 relative au traitement digne et équitable des peuples autochtones et des peuples d’ascendance africaine.

135.Durant les douze dernières années, les citoyens nicaraguayens, en particulier ceux qui appartiennent à des peuples autochtones ou d’ascendance africaine, ont pu constater les importants progrès accomplis pour reconnaître et rétablir leurs droits économiques, politiques et sociaux, ainsi que leurs droits en matière d’infrastructures. Ces progrès, réalisés dans le cadre du Plan National pour le développement humain et de la Stratégie de développement de la côte caraïbe et de la région du Haut Wangki-Bocay, renforcent le rôle de la population multiethnique de la région caraïbe, qui s’achemine vers le développement humain équitable et respectueux de son identité.

136.La région caraïbe et la zone de régime spécial du Haut Wangki-Bocay représentent 49 % du territoire national. Au niveau national, 31,4 % du territoire bénéficie d’un titre de propriété communale et correspond à 23 territoires autochtones et d’ascendance africaine (28,26 % pour les régions autonomes de la côte caraïbe et 3,14 % pour la zone de régime spécial du Haut Wangki-Bocay). Les titres de propriété attribués concernent 304 communautés comptant 205 317 habitants.

137.L’État garantit la sécurité des citoyens des communautés autochtones avec le concours de la Police nationale, de l’armée et du ministère public. Les commissariats de la côte caraïbe travaillent en coordination permanente et étroite avec les autorités communautaires, municipales, régionales et nationales pour prévenir les infractions et assurer la sécurité des personnes et de leurs biens. L’armée nicaraguayenne poursuit l’exécution du Plan de normalisation de la situation entre les colons et les membres des communautés de la côte caraïbe : de petites unités ont été déployées pour mettre en place des mesures de protection et de sécurité, saisir les armes à feu illégales, rechercher et arrêter les personnes liées à la criminalité organisée, au trafic de stupéfiants et à des infractions de droit commun. Des missions sont déployées aux postes de contrôle écologique, en coordination avec le Ministère de l’environnement et des ressources naturelles, pour lutter contre le trafic illicite des espèces animales et végétales et promouvoir l’éducation environnementale et l’éducation communautaire.

138.L’un des axes stratégiques de la Cour suprême pour la décennie à venir vise à faciliter l’accès à la justice pour tous les citoyens nicaraguayens, sans discrimination aucune, à améliorer la couverture des services sur l’ensemble du territoire et à garantir l’accès et la protection judiciaire effective, sans discrimination et dans des conditions d’égalité, afin d’apporter une réponse judiciaire rapide pour protéger les droits des peuples autochtones, des peuples d’ascendance africaine et de toutes les personnes vulnérables. Respectueux des traditions culturelles, l’État reconnaît les modalités et les pratiques utilisées par les communautés pour rendre la justice, ainsi que leurs autorités communales. Ainsi, 90 % des affaires portées devant la justice sont réglées selon le principe d’opportunité (accords, médiations, conciliations), les membres de la communauté participant à la résolution des litiges.

139.Le pouvoir judiciaire a également renforcé les capacités des autorités traditionnelles, en reconnaissant les accords conclus par les membres des communautés devant le juge communal (wi h ta) et en formant les autorités traditionnelles (w i htas, anciens, syndics, pasteurs, etc.) sur diverses questions telles que la violence fondée sur le genre, la traite des êtres humains, la famille, la propriété, la médiation et la conciliation.