Nations Unies

CRC/C/OPSC/URY/Q/1/Add.1

Convention relative aux droits de l ’ enfant

Distr. générale

25 novembre 2014

Français

Original: espagnol

Comité des droits de l ’ enfant

Soixante- huitième session

12‑30 janvier 2015

Point 4 de l’ordre du jour provisoire

Examen des rapports des États parties

Liste de points concernant le rapport soumis par l’Uruguay en application du paragraphe 1 de l’article 12 du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et lapornographie mettant en scène des enfants

Additif

Réponses de l’Uruguay à la liste de points *

[Date de réception: 14 novembre 2014]

Sigles et acronymes

ANEPAdministration nationale de l’éducation publique

CONAPEESComité national pour l’élimination de l’exploitation sexuelle des enfants et des adolescents à des fins commerciales ou non commerciales

IINInstitut interaméricain de l’enfant

INAUInstitut uruguayen de l’enfance et de l’adolescence

OIMOrganisation internationale pour les migrations

UNICEFFonds des Nations Unies pour l’enfance

Les présentes réponses ont été élaborées sous la coordination du Ministère des relations extérieures à partir des informations fournies par le Ministère du développement social, le Ministère de l’éducation et de la culture, le Ministère de la santé publique, l’Institut uruguayen de l’enfance et de l’adolescence (INAU), le Comité national pour l’élimination de l’exploitation sexuelle des enfants et des adolescents à des fins commerciales ou non commerciales (CONAPEES), le pouvoir législatif et le pouvoir judiciaire.

1.Fournir des données statistiques (ventilées par sexe, âge, groupe ethnique et zone rurale ou urbaine) sur:

a)Le nombre de cas de vente d’enfants, de prostitution d’enfants et de pornographie mettant en scène des enfants, et indiquer les mesures prises à cet égard, notamment pour poursuivre et punir les responsables de tels actes;

D’après les registres, 78 enfants (76filles et deux garçons) ont été victimes d’exploitation sexuelle à ce jour.

b)Le nombre d’enfants victimes de la traite à des fins de vente, de prostitution ou de pornographie, au sens du paragraphe 1 de l’article 3 du Protocole facultatif;

D’après l’analyse des situations rencontrées dans le pays, 23 enfants (uniquement des filles) ont été victimes de la traite, dont 21 à l’intérieur du pays et deux à l’étranger.

c)Le nombre d’enfants qui ont bénéficié d’une assistance en vue de leur rétablissement physique et psychologique et de leur réinsertion sociale, ou de la réparation du préjudice subi, comme le prévoient les paragraphes 3 et 4 de l’article 9 du Protocole facultatif.

Dans tous les cas, une assistance est apportée par les équipes territoriales présentes dans tout le pays. Dans les départements de Montevideo et de Paysandú, des équipes spécialisées s’occupent de ces situations en collaboration avec les équipes territoriales. À Montevideo et à Paysandú, 38 filles ont été prises en charge.

2.Donner des renseignements sur les fonctions exercées par le Comité national pour l’élimination de l’exploitation sexuelle des enfants et des adolescents à des fins commerciales ou non commerciales et sur la contribution de ses activités à l’application du Protocole facultatif, et indiquer comment est assurée la coordination entre les institutions publiques et privées, nationales et internationales, spécialistes de l’enfance à laquelle il est fait référence au paragraphe 37 du rapport de l’État partie.

Le CONAPEES est principalement chargé de planifier et de proposer une politique publique de lutte contre l’exploitation sexuelle des enfants et d’élaborer un plan national d’action, d’au moins cinq ans, visant à prévenir et à éradiquer l’exploitation sexuelle des enfants et des adolescents à des fins commerciales.

Le CONAPEES est composé de représentants de l’INAU, qui en assume la présidence, du Ministère de l’éducation et de la culture, du Ministère de la santé publique, du Ministère de l’intérieur, du Ministère du tourisme et du sport, du Bureau de la planification et du budget, de trois organisations non gouvernementales (ONG), du Ministère pour le développement social, du Conseil de l’enseignement primaire, du Conseil de l’enseignement secondaire, du Conseil de l’enseignement technique professionnel, de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) et de l’Institut interaméricain de l’enfant (IIN).

Grâce à une meilleure coordination entre les institutions, diverses mesures continuent d’être mises en œuvre. Par exemple, le CONAPEES continue d’organiser régulièrement des réunions, l’IIN a mis en place un cours sur l’exploitation sexuelle des enfants et des adolescents à des fins commerciales, le projet Construyendo puentes (Construire des ponts), qui vise à échanger des expériences au niveau international, est mené chaque année, une étude qualitative des initiatives entrepreneuriales à fort impact socio-économique a été conduite dans la zone ouest de Montevideo, des activités de sensibilisation et de formation ont été réalisées dans plusieurs villes de l’intérieur du pays et des journées de sensibilisation ont été menées par l’intermédiaire du Ministère de la santé publique dans le cadre du plan national d’éducation sexuelle de l’Administration nationale de l’éducation publique (ANEP) à l’intention des acteurs du monde de la santé.

3.Donner des renseignements détaillés sur le contenu du Plan national de prévention et d’élimination de l’exploitation sexuelle des enfants et des adolescents à des fins commerciales ou non commerciales et sur les résultats de sa mise en œuvre. Indiquer en outre s’il existe une stratégie générale et intégrée visant à éliminer la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants.

Le Plan national d’action comprend des sous-programmes de prévention, de formation, de coordination, de protection, de prise en charge, de recherche et de participation des jeunes qui permettent de mener diverses actions chaque année, notamment dans les domaines suivants:

En matière de prévention, de nombreux acteurs ont participé en 2013 à l’organisation et à la coordination de la stratégie régionale (Argentine, Brésil, Paraguay et Uruguay) d’éradication de l’exploitation sexuelle dans les villes frontières, Pair – Mercosul;

Des activités de formation, dont le nombre ne cesse de croître et la qualité d’augmenter, sont organisées à Montevideo et dans tout le pays: a) des formations ont été dispensées avec des experts étrangers et un millier d’agents ont ainsi été formés dans tout le pays ces dernières années; b) en 2013, le cours de l’IIN pour l’Amérique et les Caraïbes, auquel 30 spécialistes ont participé, a été de nouveau dispensé et des ateliers pour spécialistes et travailleurs sociaux ont été menés dans tous les départements, en coordination avec différentes institutions, des autorités locales et des ministères (environ 200 participants); c) trois cours de formation ont été réalisés à Montevideo-Ouest (deux formations pour adultes et une pour adolescents, qui ont respectivement réuni 40 et 15 participants); d) dix éducateurs et experts de directions régionales et du programme de prise en charge ont participé au séminaire sur l’exploitation sexuelle et la traite tenu à Córdoba (Argentine); e) le CONAPEES a organisé des activités et ateliers, certains à visée internationale, notamment Construyendo puentes qui en est à sa sixième édition, dont le but est de former et de sensibiliser les spécialistes, les travailleurs sociaux, les institutions et l’ensemble de la population à la question de l’exploitation sexuelle des enfants et des adolescents à des fins commerciales;

En matière de coordination, on a renforcé les liens entre le CONAPEES et les différents acteurs que sont les commissions parlementaires, la Cour suprême de justice, la Direction générale du Bureau du Défenseur public, les tribunaux spécialisés dans la criminalité organisée, l’Association de la presse uruguayenne et les journalistes de différents médias. Le CONAPEES a en outre été associé à l’élaboration du rapport de l’Uruguay au titre du deuxième Examen périodique universel;

En ce qui concerne la protection, suite à la détection de lacunes dans la législation actuelle, un document de travail a été élaboré pour promouvoirl’adoption d’une loi‑cadre qui inclura des mesures de renforcement des mécanismes de représentation des réseaux. Un dispositif de prise en charge des victimes a été conçu dans le cadre du projet O («Appui à la protection sociale en Uruguay, politique de l’enfance et politique sanitaire»), financé par des organismes de coopération internationale et exécuté par l’OIM, le Ministère du développement social et l’INAU. Les travaux menés dans le cadre de ce projet seront présentés fin 2014;

En ce qui qui concerne la prise en charge des enfants et des adolescents victimes d’exploitation sexuelle à des fins commerciales et non commerciales, l’INAU a mis en place en février 2012 un département spécifique qui compte une équipe territoriale et deux équipes mobiles qui couvrent tout le territoire et qui sont essentiellement chargées d’apporter un premier soutien aux victimes, de constituer un réseau local de ressources, de former des agents territoriaux, ainsi que de systématiser et de traiter les informations;

Enfin, en matière de recherche et de savoir, des travaux de recherche et des articles ont été réalisés, soutenus et publiés sur le problème de l’exploitation sexuelle des enfants. Ces écrits ont été repris par les médias nationaux et locaux. Il y a quelques semaines, l’ouvrage Un secreto a voces portant sur cette question dans la zone ouest de Montevideo a été publié. Comme au cours des années précédentes, le CONAPEES et l’INAU ont organisé la campagne Un trato por el buen trato (D’accord pour être bien traité) qui consiste à créer des groupes d’adolescents chargés de promouvoir la lutte contre la violence et contre l’exploitation sexuelle à des fins commerciales et non commerciales. Une centaine d’adolescents sont associés à cette campagne.

4.Expliquer comment est financée la réalisation des activités nécessaires à l’application effective du Protocole facultatif. Indiquer en outre le montant des fonds qui ont été alloués à cette fin au cours des cinq dernières années.

On trouvera ci-après des informations relatives aux coûts des mesures prises (en dollars, coût approximatif):

Recrutement de spécialistes pour des activités telles que séminaires, études et publications: 4 700 dollars des États-Unis par mois;

Recrutement de deux équipes mobiles: 17 700dollars par mois;

Soutien financier à des projets liés aux questions couvertes par le Protocole facultatif: 5 000dollars.

Soutien financier à des campagnes menées par des organismes non gouvernementaux contre l’exploitation sexuelle des enfants et des adolescents à des fins commerciales: No hay excusas (Il n’y a pas d’excuse): l’INAU a apporté les fonds (30 000 dollars) et l’UNICEF a fourni la logistique et l’accès aux médias (40 000 dollars). L’Union européenne a apporté une contribution de 200 000 euros à la campagne Deje de Colaborar (Arrêtez d’y participer) dans le cadre de la coopération internationale.

Il faut reconnaître que les institutions qui composent le CONAPEES devrait contribuer davantage à ses activités, contribution qui s’ajouterait au budget que l’INAU lui alloue, afin de mener une action plus efficace et plus ciblée.

5.Compte tenu des résultats de l’étude réalisée par l’Université catholique d’Uruguay, qui montrent que le téléchargement de matériel pornographique mettant en scène des enfants est une pratique répandue, décrire les programmes de sensibilisation que l’État partie a mis en œuvre pour faire connaître le Protocole facultatif et notamment éliminer les stéréotypes socioculturels qui conduisent à tolérer l’exploitation sexuelle d’enfants et d’adolescents, la prostitution d’enfants et la pornographie mettant en scène des enfants.

Entre mars et octobre 2013 s’est déroulée la campagne No hay excusas conjointement élaborée par l’UNICEF, l’INAU et le CONAPEES. Il s’agissait de la première campagne nationale relayée par les médias (52 entretiens à la radio, 20 à la télévision, 19 dans la presse écrite et sept sur Internet) et visible dans les rues (20 000 affiches et 39 500 prospectus). Le Comité a participé à l’élaboration de la campagne et à la prise de décisions concernant les moyens techniques et opérationnels utilisés pour la diffuser. L’INAU a apporté les fonds et l’UNICEF a fourni la logistique et l’accès aux médias.

On a enregistré 3 532 474 impressions sur Google, 20 004 073 visites de la page Facebook consacrée à la campagne et 17 058 clics. La page Internet du site de la campagne No hay excusas a reçu 20 762 visites. Des activités de sensibilisation ont été également organisées: du matériel pédagogique a été distribué et une course de 5 kilomètres dont les participants portaient des tee-shirts avec le numéro de téléphone gratuit pour porter plainte a été organisée. Des ressources ont été collectées pour que les élèves de l’école de cinéma du centre culturel DODECÁ puissent tourner un film sur la question, intitulé Tan frágil como un segundo (Aussi fragile qu’une seconde), sorti en salles le 4 octobre 2014.

Depuis novembre 2013, la campagne Deje de Colaborar sert à sensibiliser l’opinion publique au problème grâce aux médias et aux différents acteurs présents sur le terrain, ainsi qu’à des images et à des ateliers de formation et de communication. Dans le cadre de la campagne, des ateliers ont été organisés à l’intention de différents publics, des affiches ont été imprimées et d’autres documents d’information ont été élaborés. Récemment, un lieu de promenade de Montevideo a accueilli une exposition de photographies représentant des lieux du quotidien, souvent des espaces publics, où des actes d’exploitation sexuelle d’enfants et d’adolescents à des fins commerciales se produisent, ainsi que présentant le témoignage de personnes (aujourd’hui adultes) qui ont été victimes d’exploitation sexuelle à des fins commerciales dans leur enfance et qui ont accepté de raconter leur expérience. Cette exposition, fruit d’un travail de recherche de plus d’une année, vise à marquer les esprits et à inscrire ce problème dans le programme social et politique du pays. La Fundación Visionair, l’ONG el Paso et le CONAPEES ont participé à ce projet.

6.Décrire les mesures que l’État partie a prises pour faire en sorte que les personnes chargées de l’administration de la justice (avocats, procureurs et juges), le personnel de l’Institut uruguayen de l’enfance et de l’adolescence et les autres professionnels qui travaillent pour et avec des enfants dans les divers domaines visés par le Protocole facultatif, aussi bien la répression des infractions que la réadaptation et la réinsertion des enfants victimes, connaissent et comprennent les dispositions du Protocole.

S’agissant du pouvoir judiciaire, le Centre d’études judiciaires a mis en place des cours à l’intention des juges, des élèves-juges, des membres du ministère public et des défenseurs publics, comme détaillé ci-après. En 2012, dans le domaine de la formation initiale, les modules suivants ont été organisés:

«Droits de l’homme: application des instruments internationaux et constitutionnels relatifs à la protection», formation de 18 heures dispensée par MM. Fernando Cardinal et Julio César Chalar;

«Adolescents délinquants», formation de douze heures dispensée par M. Eduardo Cavalli et MmeMariana Malet;

«Violence conjugale», formation de neuf heures coordonnée par Mme María del Carmen Díaz;

«Famille», formation de neuf heures dispensée par M. Ricardo Pérez Manrique et MmeMabel Rivero.

Dans le domaine de la formation continue, les cours suivants ont été organisés en 2012:

«Traite des personnes», les 14, 16 et 17 mai, formation de six heures dispensée par MM. Julio Olivera et Gastón Chaves et MmeVirginia Ginares;

«Sévices sexuels sur mineurs»: formation de 18 heures organisée par le ministère public, avec le soutien de l’UNICEF, autour des modules suivants:

«Cadre théorique des sévices sexuels sur mineurs et enfants témoins», module I, organisé avec l’UNICEF et dispensé les 11 et 12 mai par MM. Jorge Díaz et Egidio Crotti et MmePaula Moreno;

«Sévices sexuels sur mineurs: le récit des enfants et des adolescents – rapports médico-légaux», module II, dispensé les 17 et 18 août par MmePaula Moreno (Argentine);

«Les enfants et les adolescents dans la procédure judiciaire», module III, dispensé les 9 et 10 novembre par M. Hernán Fernández (Chili).

En 2013:

Le cours «sévices sexuels sur mineurs», articulé en trois modules, a été de nouveau organisé les 10 et 11 mai, les 6 et 7septembre et les 8 et 9 novembre;

La formation de six heures sur la violence conjugale a été dispensée les 11, 12 et 13juin par MM. Ricardo Pérez Manrique et Eduardo Cavalli et Mme María Elena Emmenengger;

Une visioconférence sur la protection intégrale de l’enfant et de l’adolescent – projet de réforme du Code de l’enfance et de l’adolescence – a été organisée par le Centre national d’études juridiques et le ministère public, avec l’appui de l’Union européenne. Animée par MM. Ricardo Pérez Manrique, Eduardo Cavalli et Gilberto Rodríguez, elle a eu lieu le 1eraoût;

Une visioconférence sur la Convention relative aux droits de l’enfant et les Lignes directrices relatives à la protection de remplacement pour les enfants, animée par Mme Ema Carozzi et M. Miguel Cillero (Chili), s’est déroulée le 30 octobre à Montevideo à l’intention d’institutions nationales;

Le 7 décembre, MM. Ricardo Pérez Manrique et Eduardo Cavalli et MmeMariana Malet ont dirigé un séminaire sur la procédure pénale pour mineurs;

Le 5 octobre, MM. Ricardo Pérez Manrique et Eduardo Cavalli et MmeMariana Malet ont mené un séminaire sur la procédure pénale pour mineurs à Salto.

En 2014, le cours «sévices sexuels sur mineurs» a de nouveau été organisé en trois modules, les 9 et 10 mai, les 5 et 6 septembre, et les 7 et 8 novembre.

7.Donner des renseignements concernant les mécanismes utilisés pour repérer les enfants particulièrement exposés aux infractions visées par le Protocole facultatif, notamment les enfants vivant dans la pauvreté, les enfants des rues et les enfants vivant dans des zones rurales reculées. Décrire également les mesures concrètes prises pour remédier aux causes structurelles qui favorisent les pratiques visées par le Protocole facultatif, telles que la pauvreté, l’exclusion sociale, la ségrégation dans le logement et l’éducation, la violence intrafamiliale et la discrimination à l’égard des adolescents.

Parmi les mesures prises, outre les activités de sensibilisation et d’échange avec des acteurs du monde de l’enfance, des activités sont coordonnées avec des services qui s’occupent expressément des enfants pauvres et des enfants des rues. Des problèmes particuliers se posent dans les petites communautés et dans les zones rurales où la banalisation de l’exploitation sexuelle est profondément ancrée.

Afin de combattre la pauvreté, l’exclusion sociale et la violence familiale, entre autres pratiques, des programmes spéciaux ont été élaborés pour réduire au minimum les conséquences de ces phénomènes, avec la collaboration d’équipes spécialisées le cas échéant. En 2013, compte tenu de la situation à Montevideo-Ouest, le CONAPEES a lancé plusieurs chantiers avec des habitants et des représentants du monde universitaire, qui ont conduit au recrutement temporaire d’une équipe de huit spécialistes chargée de conduire des travaux de recherche et de former des acteurs locaux à ces questions. Ces travaux, tous coordonnés au niveau institutionnel et associant diverses organisations présentes sur le territoire, ont jeté les bases d’un plan territorial d’action qui comprendra des activités de sensibilisation, de formation des acteurs locaux, de prévention et de prise en charge des victimes et, plus fondamentalement, un dispositif spécialisé de prise en charge des enfants et des adolescents exploités afin de les restaurer dans leurs droits.

8.Donner un complément d’information concernant les mesures mises en œuvre pour prévenir le tourisme sexuel, en précisant s’il existe des mécanismes d’évaluation de ces mesures et quels en ont été les résultats.

Le 13 décembre 2013, le pouvoir exécutif a adopté le décret no398/013 en vertu duquel les prestataires de services touristiques doivent prendre des mesures pour s’acquitter de leur obligation de participer à la prévention de l’exploitation sexuelle des enfants et des adolescents à des fins commerciales dans le tourisme. Ils doivent notamment:

a)Adopter dans leur entreprise un code de conduite contenant des mesures de contrôle visant à rendre effectives les obligations découlant de la Constitution de la République, des diverses lois relatives à l’exploitation sexuelle des enfants et des adolescents à des fins commerciales et, en particulier, des dispositions du Protocole facultatif concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants;

b)Empêcher que leurs employés et leurs intermédiaires offrent aux touristes des services sexuels impliquant des enfants et des adolescents;

c)Dénoncer au Ministère du tourisme et du sport et au CONAPEES les actes d’exploitation sexuelle d’enfants et d’adolescents à des fins commerciales sans que cela se substitue à l’obligation de dénoncer ces actes auprès des autorités compétentes;

d)S’abstenir d’offrir, expressément ou tacitement, dans leurs programmes de promotion touristique, la possibilité d’exploiter sexuellement un enfant ou un adolescent à des fins commerciales;

e)Prévoir des espaces pour faire connaître les mesures de prévention des situations d’exploitation sexuelle d’enfants et d’adolescents à des fins commerciales.

En 2014, des activités itinérantes de diffusion du décret mentionné plus haut ont été organisées dans les différents départements du pays, en coordination avec les autorités compétentes, lors de réunions avec des prestataires de services touristiques, des policiers, des travailleurs de santé, des membres du corps enseignant et des représentants du Ministère du développement social et des membres de la société civile en général.

À ce jour, plus d’un millier de prestataires ont affiché le logo et le slogan «Nous sommes une entreprise responsable. Nous condamnons l’exploitation sexuelle des enfants et des adolescents.».

9.Préciser si la vente d’enfants et la prostitution d’enfants constituent des infractions distinctes au regard du droit pénal et si les faits d’exploitation sexuelle d’enfants, de transfert d’organes d’enfants à titre onéreux, de travail forcé d’enfants et d’adoption illégale sont définis comme des formes de vente d’enfants. Indiquer en outre si la possession de matériel pornographique et le tourisme sexuel sont punis par la loi et quelles mesures ont été prises pour que ces pratiques soient expressément érigées en infractions pénales.

La prostitution d’enfants, la vente d’enfants et le tourisme sexuel n’ont pas été érigés en infraction pénale en droit pénal uruguayen. Les faits d’exploitation sexuelle d’enfants, de transfert d’organes d’enfants à titre onéreux, de travail forcé d’enfants et d’adoption illégale n’ont pas été définis comme des formes de vente d’enfants. Toutefois, la vente d’enfants existe dans le cadre juridique national: elle est interdite et sanctionnée dans le cadre d’autres infractions.

S’agissant de la prostitution d’enfants et de la pornographie, la loi no 17815, conformément aux engagements internationaux contractés par l’État suite à l’adoption du Protocole facultatif, établit une série d’infractions qui sanctionnent les faits précités concernant des mineurs dans le cadre d’un régime spécifique distinct des dispositions générales définies dans le Code pénal.

Ainsi, la loi no17815 dispose que l’exploitation sexuelle de mineurs ou de personnes incapables et la participation à un fait d’exploitation sexuelle sont des infractions autonomes. Elle inclut l’élaboration de matériel pornographique impliquant un mineur ou une personne incapable soit en utilisant son image soit en l’associant autrement à la production dudit matériel. Il convient néanmoins de souligner que la possession (simple stockage) n’est pas un élément matériel de l’infraction et que, par conséquent, la simple possession de matériel pornographique ne constitue pas une infraction, sauf si elle a une visée commerciale.

De même, l’article 4 de la loi précitée érige en infraction la «rétribution de mineurs ou de personnes incapables contre des actes sexuels ou érotiques de quelque nature qu’ils soient, ou la promesse de rétribution faite à ces personnes si elles accomplissent ces actes». Cette disposition sanctionne non seulement l’exécution d’un acte sexuel ou érotique de quelque nature qu’il soit avec un mineur ou une personne incapable mais également la promesse d’un bénéfice pour la victime. Cette infraction couvre également les actes qui pourraient constituer un acte de prostitution de mineurs, y compris les actes préparatoires, ce qui englobe les actes liés au tourisme sexuel.

Enfin, le recrutement, le transport, le transfert, l’accueil de personnes aux fins de prélèvement d’organes ou de travail ou de services forcés sont désormais des éléments matériels de l’infraction de traite, en vertu de l’article 78 de la loi no18250. Ainsi, toutes les personnes impliquées dans un acte de traite, quel que soit leur degré de participation, sont considérées comme des trafiquants. Il convient également de souligner que, même si la loi précitée vise à réglementer la migration, dans l’article à l’examen, elle ne mentionne pas les migrants mais «toutes les personnes», expression qui se réfère à l’ensemble de lapopulation, y compris les mineurs. Ce délit permet de sanctionner les agissements qui impliquent la traite de mineurs à des fins d’exploitation sexuelle dans le cadre d’activités de pédotourisme, y compris la vente d’enfants si la traite vise à exploiter ces enfants de l’une quelconque des modalités prévues par la loi.

10.Indiquer si la législation de l’État partie établit la responsabilité pénale des personnes morales pour les infractions visées par le Protocole facultatif.

Le système de droit pénal uruguayen ne prévoyant pas la responsabilité pénale des personnes morales, il ne la prévoit pas pour les infractions visées par le Protocole facultatif. Le projet de nouveau Code pénal qui devrait être adopté sous peu ne prévoit pas non plus la responsabilité pénale des personnes morales.

11.Indiquer si l’État partie a établi sa compétence extraterritoriale à l’égard des infractions visées par le Protocole facultatif et, le cas échéant, sous quelles conditions celle-ci s’exerce. Indiquer également si, en l’absence de traité bilatéral, le Protocole facultatif peut constituer la base juridique de l’extradition de l’auteur présumé d’une infraction visée par le Protocole.

Le principe de la territorialité prévaut en matière pénale, ce qui implique que le droit pénal est exclusivement appliqué au niveau national, aux infractions commises sur le territoire uruguayen, que leurs auteurs soient uruguayens ou étrangers. Par conséquent, les infractions commises à l’étranger, que leurs auteurs soient uruguayens ou étrangers, ne sont pas sanctionnées en application du droit pénal uruguayen, sauf exception expresse. Cela découle de la souveraineté nationale et de l’idée que les juridictions sont délimitées par la frontière.

Des exceptions à ce principe sont prévues et concernent les cas où s’appliquent les principes de la défense ou de la tutelle, de la nationalité, de la personnalité juridique et de la justice universelle. La réglementation en vigueur ne prévoit pas expressément la compétence judiciaire extraterritoriale pour les infractions visées par le Protocole facultatif mais, selon les dispositions normatives, elle pourrait s’appliquer dans certains cas.

Ainsi, les infractions commises par un Uruguayen à l’étranger pourront être sanctionnées en application du droit national en cas de double incrimination, lorsque la personne réside sur le territoire uruguayen et qu’aucun État n’a demandé son extradition. Les infractions commises par un étranger à l’étranger aux dépens d’un Uruguayen pourront être jugées en Uruguay si l’auteur se trouve sur le territoire national et que l’État où il y a commis l’infraction ne demande pas son extradition. En pareil cas, la loi des deux États la plus clémente sera appliquée. Par conséquent, lorsqu’il n’existe pas de réglementation spécifique pour les infractions visées par le Protocole facultatif et que la réglementation générale s’applique, en vertu des paragraphes 5 et 6 de l’article 10 du Code pénal, les tribunaux uruguayens pourront connaître des infractions commises à l’étranger, en sus des cas dans lesquels s’appliquent les dispositions juridiques ou les instruments internationaux qui prévoient la compétence extraterritoriale des tribunaux uruguayens.

Quant à l’extradition, l’Uruguay ne la subordonne pas à l’existence de traités ni ne la limite au motif de la nationalité du mis en cause. En l’absence de traité avec le pays également concerné par le cas, les dispositions de l’article 32 du Code de procédure pénale s’appliquent:

«(Régime de l’extradition) – En l’absence de traité, l’extradition n’est accordée que dans les cas suivants:

A)S’il s’agit d’infractions passibles d’au moins deux ans de prison;

B)Si la demande d’extradition est adressée par le gouvernement de l’État concerné au pouvoir exécutif et accompagnée d’un arrêt de condamnation, ou d’un mandat d’arrêt, et des pièces mentionnées dans la législation nationale afin de procéder à l’arrestation de la personne visée;

C)Si la déclaration judiciaire établit qu’il sera procédé à l’extradition après audience de l’inculpé et du ministère public au pénal.».

Par conséquent, compte tenu de l’existence d’une disposition juridique expresse relative aux demandes d’extradition émanant de pays avec lesquels l’Uruguay n’a conclu aucun accord en la matière, cette même disposition s’appliquera sans qu’il soit nécessaire d’invoquer le Protocole facultatif.

12.Indiquer si des programmes ont été mis au point et adoptés pour protéger et aider les enfants victimes et témoins d’infractions visées par le Protocole facultatif tout au long de la procédure judiciaire. Indiquer également si ces programmes sont mis en œuvre dans tout le pays et de quelle façon ils tiennent compte des besoins spécifiques des enfants victimes et témoins d’infractions visées par le Protocole facultatif.

Quant à la commission présumée d’infractions visées par le Protocole facultatif, la législation uruguayenne prévoit que la juridiction pénale et la juridiction spécialisée de la famille s’appliquent en même temps pour déterminer la responsabilité du mis en cause, d’une part, et pour adopter des mesures de protection contre les menaces pesant sur les droits des enfants et des adolescents et des mesures de restitution en cas d’atteinte à ces droits, d’autre part.

Ce système prévoit une procédure d’urgence dont le délai de quarante-huit heures maximum est garanti par la Constitution. Au cours de cette brève période qui démarre au moment de la mise en détention, il sera déterminé si le mis en cause doit être poursuivi au pénal ou non. Sous ce régime, les actes de l’instruction qui risquent de porter atteinte aux droits de l’enfant et de l’adolescent doivent être effectués avec la plus grande diligence. La durée de l’interrogatoire se trouve ainsi raccourcie du fait des délais qui s’appliquent à la protection des personnes détenues. Ainsi, dans la pratique, l’enfant peut être interrogé en urgence par le juge, le procureur et le défenseur. Parallèlement à cela, la juridictionspécialisée en matière familiale lance le processus de restitution ou de sauvegarde des droits de l’enfant atteints. La pratique prévoit que le juge, le procureur et le défenseur interrogent l’enfant concerné.

À Montevideo, les tribunaux de la famille sont dotés d’un dôme Gesell et les fonctionnaires qui y travaillent ont appris à l’utiliser. La Commission de suivi mise en place a néanmoins noté que le dôme était utilisé de manière irrégulière et inappropriée, tout du moins jusqu’en 2013. La Cour suprême de justice a maintenu la Commission afin de proposer des améliorations et les mesures à prendre à cette fin sont à l’examen.

Par ailleurs, il convient de noter que la situation varie selon les départements et qu’elle ne permet pas toujours aux enfants ou aux adolescents de prendre part à la procédure du fait de retards, de locaux inappropriés et du risque qu’ils soient en contact avec des personnes liées à l’auteur de l’infraction.

L’article 11 du Code de l’enfance et de l’adolescence dispose que tout enfant a droit au respect de sa vie privée, à ce que son image ne soit pas utilisée sous forme lascive et à ce qu’aucune information lui étant préjudiciable et pouvant le singulariser ne soit publiée. Le Code général de procédure prévoit quant à lui que le tribunal peut prononcer le secret de la procédure pour protéger la partie civile. Ainsi, la loi no 17514 sur la violence familiale fait de la prévention de la victimisation secondaire un «principe recteur». Elle interdit la confrontation entre la victime et l’agresseur dans les affaires concernant des enfants et des adolescents de moins de 18 ans et leur audition conjointe. Cette interdiction est absolue et s’applique directement aux situations de violence familiale et également aux juridictions pénales et juridictions familiales spécialisées dans les cas prévus par le Protocole facultatif.

Il convient de souligner que la Cour suprême de justice a accordé rang normatif aux Règles de Brasilia sur l’accès à la justice des personnes vulnérables qui visent à garantir l’accès effectif des personnes vulnérables à la justice sans aucune discrimination. On considère qu’une personne est vulnérable lorsque, du fait de son âge, de son sexe, de sa santé physique ou mentale, ou de circonstances sociales, économiques, ethniques et/ou culturelles, il lui est particulièrement difficile de faire pleinement valoir ses droits devant la justice.

Enfin, l’organe judiciaire suprême, en réglementant les questions relatives à la violence familiale, a disposé que:

«Les magistrats doivent prendre les mesures nécessaires pour garantir le respect de l’article 18 de la loi no 17514 (art. 3, 6 et 8 de la Convention interaméricaine sur la prévention, la sanction et l’élimination de la violence contre la femme et règle no67 des Règles de Brasilia sur l’accès à la justice, décision no7647), éviter la confrontation ou la comparution conjointe de la victime et de son agresseur dans tous les cas qui concernent des moins de 18 ans et, dans les cas qui concernent les plus de 18 ans, la permettre à titre exceptionnel à la demande de la victime, à condition que l’équipe technique ait préalablement certifié que la victime était en mesure de comparaître en même temps que son agresseur. Il convient de garder à l’esprit que l’interdiction prévue par l’article 18 de la loi no 17514 s’étend aux contacts visuels ou aux échanges dans les tribunaux ou durant l’enquête.».

13.Donner des informations sur les mesures que l’État partie a prises pour faire en sorte que les enfants victimes d’infractions visées par le Protocole facultatif ne soient pas traités comme des délinquants ni stigmatisés. Décrire les mesures concrètes prises pour prévenir leur exclusion sociale et faciliter leur réinsertion et leur rétablissement physique et psychologique.

Les mesures appliquées visent la restauration des droits (à la santé et à l’éducation) des victimes grâce à leur réinsertion dans le système scolaire et à la promotion de leur prise en charge dans les établissements de santé. Étant donné leur essor, il est envisagé d’appliquer ces mesures aux programmes d’orientation professionnelle. Au niveau communautaire, on collabore avec les adultes référents et/ou les travailleurs sociaux, telles les équipes territoriales, qui apportent soutien et continuité aux soins dispensés par les équipes spécialisées.