Observations finales concernant le rapport soumis par le Turkménistan en application du paragraphe 1 de l’article 12 du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants *

Le Comité a examiné le rapport initial du Turkménistan (CRC/C/OPSC/TKM/1) à sa 1939e séance (voir CRC/C/SR.1939) tenue le 14 janvier 2015, et a adopté les observations finales ci-après à sa 1983e séance (voir CRC/C/SR.1983), tenue le 30 janvier 2015.

I.Introduction

Le Comité accueille avec satisfaction le rapport initial de l’État partie (CRC/C/OPSC/TKM/1), qui contient des renseignements détaillés sur l’exercice des droits consacrés par le Protocole facultatif, ainsi que ses réponses écrites à la liste des points à traiter (CRC/C/OPSC/TKM/Q/1/Add.1). Il regrette toutefois que les rapports ne suivent pas les directives établies pour la présentation des rapports. Le Comité se félicite du dialogue constructif qu’il a eu avec la délégation pluridisciplinaire de l’État partie.

Le Comité rappelle à l’État partie que les présentes observations finales doivent être lues conjointement avec les observations finales concernant les deuxième à quatrième rapports périodiques de l’État partie au titre de la Convention relative aux droits de l’enfant, présentés en un seul document (CRC/C/TKM/CO/2-4), adoptées le 19 janvier 2015, ainsi qu’avec celles concernant le rapport initial de l’État partie au titre du Protocole facultatif concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés (CRC/C/OPAC/TKM/CO/1), adoptées le 30 janvier 2015.

II.Observations générales

Aspects positifs

Le Comité se félicite que l’État partie ait adhéré aux instruments ci-après, y ait succédé ou les ait ratifiés :

a)Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés, en mars 2005;

b)Convention no 182 (1999) de l’Organisation internationale du Travail (OIT) concernant l’interdiction des pires formes de travail des enfants et l’action immédiate en vue de leur élimination, en novembre 2010, et Convention no 138 (1973) de l’OIT concernant l’âge minimum d’admission à l’emploi, en mars 2012;

c)Convention de 1951 et son Protocole de 1967 relatifs au statut des réfugiés, en mars 1998; Convention de 1954 relative au statut des apatrides, en décembre 2011; Convention de 1961 sur la réduction des cas d’apatridie, en août 2012;

d)Protocole visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, et Protocole contre le trafic illicite de migrants par terre, air et mer, additionnels à la Convention des Nations Unies contre la criminalité internationale organisée, en mars 2005;

e)Convention sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants, en novembre 1997;

f)Convention relative à l’esclavage, signée à Genève le 25 septembre 1926, modifiée par son Protocole de 1953, en mai 1997.

Le Comité accueille avec satisfaction les diverses mesures prises par l’État partie dans les domaines relevant de la mise en œuvre du Protocole facultatif, parmi lesquelles :

a)L’adoption de la législation nationale pertinente pour protéger les droits de l’enfant, notamment la loi relative aux garanties des droits de l’enfant (5 juillet 2002), la loi relative à la lutte contre la traite des personnes (14 décembre 2007), la loi sur la protection du droit des jeunes au travail (1er février 2005), le Code de procédure pénale (18 avril 2009), le Code pénal (10 mai 2010), le Code du travail (18 avril 2009), le Code de sécurité sociale (17 mars 2007) et la loi sur le statut juridique des étrangers au Turkménistan (26 mars 2011).

b)Le décret présidentiel de 2005 qui porte interdiction du travail des enfants dans tous les secteurs, et précise que les enfants ne sont pas autorisés à prendre part à la récolte du coton.

III.Données

Collecte des données

Le Comité regrette l’absence de données statistiques ventilées notamment par sexe, âge, nationalité et origine ethnique, zone géographique et situation socioéconomique, couvrant les domaines visés par le Protocole facultatif, ainsi que l’absence de système global de collecte de données permettant d’enregistrer, de transmettre et de suivre l’ensemble des cas relevant du Protocole facultatif.

Le Comité engage l’État partie à améliorer dans les délais les plus brefs son système de collecte de données de façon à ce qu’il couvre tous les domaines visés par le Protocole facultatif. Les données devraient être ventilées notamment par sexe, âge, nationalité et origine ethnique, zone géographique et situation socioéconomique afin de faciliter l’analyse de la situation des enfants à risque et des enfants victimes d’infractions interdites par le Protocole. De plus, le Comité recommande que les données et les indicateurs soient partagés par les ministères concernés et qu’ils soient utilisés pour l’élaboration, le suivi et l’évaluation des politiques, programmes et projets visant à assurer la mise en œuvre efficace du Protocole.

IV.Mesures d’application générales

Législation

Le Comité accueille avec satisfaction l’adoption de la loi sur la protection des droits de l’enfant, en 2002, et de la loi sur la lutte contre la traite des personnes, en 2007, et note avec satisfaction que la plupart des questions couvertes par le Protocole facultatif ont été intégrées dans la législation nationale de l’État partie. Toutefois, le Comité regrette que la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants ne soient pas spécifiquement définies et interdites dans la législation nationale, comme le prévoient les articles 2 et 3 du Protocole. Le Comité est également préoccupé par le fait que les efforts déployés par l’État partie ont porté presque exclusivement sur la traite et non sur les infractions de vente d’enfants selon la définition qui en est donnée dans le Protocole.

Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir la pleine incorporation du Protocole facultatif dans son droit interne, en particulier dans la loi sur la protection des droits de l’enfant, qui est en cours de révision. Il recommande aussi à l’État partie de veiller à ce que la définition de la vente d’enfants, qui s’apparente mais n’est pas identique à la traite des personnes, soit intégrée à la législation nationale de manière à ce que la disposition relative à la vente figurant dans le Protocole facultatif puisse être dûment mise en œuvre.

Politique et stratégie globales

Le Comité est préoccupé par l’absence de stratégie globale pour la mise en œuvre du Protocole facultatif dans l’État partie.

Le Comité recommande à l’État partie d’élaborer, en consultation avec toutes les parties prenantes, y compris les enfants, les parents et la société civile, une stratégie globale pour mettre en œuvre les dispositions du Protocole facultatif, et de prévoir les ressources humaines, techniques et financières suffisantes pour mettre en œuvre une telle stratégie.

Coordination

Le Comité prend note de l’existence de la Commission interministérielle pour l’exécution des obligations internationales souscrites par le Turkménistan dans le domaine des droits de l’homme et du droit international humanitaire, mais il demeure préoccupé par le fait qu’il n’existe toujours pas d’organe spécialement chargé d’assurer la coordination et l’exécution des obligations qui incombent à l’État partie en vertu du Protocole facultatif.

Le Comité prie instamment l’État partie de créer un organe efficace de haut niveau investi d’une autorité suffisante et doté d’un mandat bien défini pour coordonner l’ensemble des activités liées à la mise en œuvre du Protocole facultatif entre les différents secteurs, aux plans national, régional et local. L’État partie devrait veiller à ce que cet organe de coordination soit doté des ressources humaines, techniques et financières nécessaires à son bon fonctionnement.

Mécanisme de suivi indépendant

Le Comité est préoccupé par l’absence d’institution nationale indépendante chargée de promouvoir et de surveiller l’application du Protocole facultatif, et de recevoir les plaintes d’enfants relatives à la violation de droits énoncés dans le Protocole facultatif et d’enquêter sur ces plaintes.

Compte tenu de ses précédentes recommandations (CRC/C/TKM/CO/1, par. 12), le Comité prie instamment l’État partie de créer sans tarder un mécanisme indépendant chargé de surveiller l’application du Protocole facultatif, de recevoir les plaintes d’enfants relatives à la violation de droits énoncés dans le Protocole facultatif et d’enquêter sur ces plaintes.

Diffusion et sensibilisation

Le Comité accueille avec satisfaction les efforts déployés par l’État partie pour faire mieux connaître la traite des personnes, d’une part, et les droits de l’enfant, d’autre part, et pour y sensibiliser davantage, en recourant pour ce faire à différents supports, notamment des spectacles, des concerts, des séminaires, des ateliers, des sessions de formation, des dépliants et des brochures. Cela étant, le Comité regrette que de telles activités ne soient pas menées à intervalles réguliers et ne mettent pas spécifiquement l’accent sur le droit des enfants d’être protégés de la vente, de la prostitution et de la pornographie.

Le Comité recommande à l’État partie :

a) D’élaborer et de mener, en étroite coopération avec la société civile, les enfants et les enfants victimes, des programmes d’information, de sensibilisation et d’éducation axés sur les mesures de prévention et sur les effets préjudiciables de la vente d’enfants, de la prostitution des enfants et de la pornographie mettant en scène des enfants;

b) De diffuser le Protocole facultatif auprès de tous les groupes professionnels concernés, en particulier les policiers, les juges, les procureurs, les représentants des médias et les travailleurs sociaux.

Formation

Le Comité accueille avec satisfaction les diverses activités de renforcement des capacités et de formation en matière de techniques d’investigation sur la traite des personnes, que l’État partie offre aux membres des forces de l’ordre, en collaboration avec l’Organisation internationale pour les migrations. Le Comité demeure toutefois préoccupé par le caractère non systématique des possibilités de formation appropriée offertes aux professionnels travaillant avec et/ou pour les enfants, en particulier les juges, les procureurs, les membres des forces de l’ordre, les professionnels de l’éducation et de la santé et les travailleurs sociaux, et par le fait que tous les domaines visés par le Protocole facultatif ne sont pas couverts.

Le Comité recommande à l’État partie d’allouer des ressources appropriées à des programmes de formation pluridisciplinaires élaborés dans le cadre d’un processus participatif associant les communautés et toutes les parties prenantes et portant sur l’ensemble des domaines relevant du Protocole facultatif. Ces formations devraient être dispensées à toutes les catégories professionnelles concernées ainsi que dans les ministères et institutions travaillant avec et/ou pour les enfants. Le Comité recommande en outre à l’État partie de faire en sorte que tous les programmes de formation portant sur le Protocole facultatif soient systématiquement évalués en vue d’en améliorer la pertinence et les retombées.

Allocation de ressources

Le Comité regrette que l’État partie n’ait pas fourni de renseignements sur les allocations spécifiques de ressources à la mise en œuvre des dispositions du Protocole facultatif, en particulier en ce qui concerne les travaux de recherche et la collecte de données, la prévention des infractions visées par le Protocole facultatif, les enquêtes pénales, l’assistance juridique et les mesures de réadaptation physique et psychologique à la disposition des enfants victimes.

Le Comité engage l’État partie à s’attacher à allouer des ressources suffisantes à la mise en œuvre de tous les aspects du Protocole facultatif, en fournissant en particulier les ressources humaines, techniques et financières nécessaires, y compris pour les travaux de recherche et la collecte de données, pour l’élaboration et l’exécution de programmes portant sur la prévention, la protection, le rétablissement physique et psychologique et l’insertion sociale des victimes, ainsi que pour les enquêtes sur les infractions visées par le Protocole facultatif et la répression de leurs auteurs.

Coopération avec la société civile

Le Comité prend note des informations selon lesquelles des propositions tendant à réexaminer la loi sur les associations publiques sont actuellement à l’examen, mais il demeure préoccupé par les informations faisant état de restrictions aux activités des organisations de la société civile, y compris celles qui œuvrent en faveur des droits de l’enfant. Le Comité est également préoccupé par le fait que les organisations de la société civile n’ont pas été dûment consultées lors de l’établissement du rapport initial.

Le Comité engage l’État partie à lever les restrictions au fonctionnement des organisations de la société civile indépendantes, y compris celles qui œuvrent en faveur des droits de l’enfant, et d’associer systématiquement les organisations de la société civile dans tous les domaines ayant trait à la mise en œuvre du Protocole facultatif, non seulement en soutenant les efforts qu’elles déploient pour offrir des services adaptés aux enfants victimes, mais aussi en renforçant leur rôle dans l’élaboration, la mise en œuvre, le suivi et l’évaluation des lois, des politiques et des programmes ayant trait aux droits de l’enfant, conformément aux dispositions du Protocole.

V.Prévention de la vente d’enfants, de la prostitution des enfants et de la pornographie mettant en scène des enfants [art. 9 (par. 1 et 2)]

Mesures adoptées pour prévenir les infractions visées par le Protocole facultatif

Le Comité accueille avec satisfaction les mesures prises par l’État partie pour prévenir les infractions visées par le Protocole facultatif, y compris les activités et programmes de renforcement des capacités et de sensibilisation axés sur la prévention de la traite des êtres humains et sur le contrôle des frontières, ainsi que la détermination des groupes vulnérables et des victimes potentielles de la traite, en particulier les enfants privés de soins parentaux, les enfants qui travaillent, les enfants qui sont des ressortissants étrangers ou qui appartiennent à des minorités ethniques, et les enfants qui vivent dans la pauvreté. Le Comité prend note avec satisfaction également de la hausse sensible du taux d’enregistrement des naissances et de l’allongement de la durée de la scolarité obligatoire, jusqu’à l’âge de 12 ans, qui devraient réduire le niveau de vulnérabilité des enfants. Le Comité est toutefois préoccupé par le caractère encore limité des mesures de prévention ciblées contre l’exploitation des enfants, notamment le travail forcé, la prostitution et la pornographie, ainsi que des actions tendant à identifier les causes profondes et l’incidence de ces infractions et à y remédier.

Le Comité encourage l’État partie à :

a) Mener des travaux de recherche sur l’ampleur et les causes profondes de l’exploitation des enfants, notamment le travail forcé, la prostitution et la pornographie, afin d’identifier les enfants à risque et d’évaluer la gravité du problème;

b) Adopter des mesures ciblées de prévention, notamment contre l’exploitation sur l’Internet, et coopérer avec des organisations internationales intergouvernementales et non gouvernementales pour la mise en œuvre de campagnes de sensibilisation dans tous les domaines couverts par le Protocole facultatif ;

c) Accorder une plus grande attention à la mise en œuvre des programmes de développement social et économique et des stratégies de réduction de la pauvreté, notamment en allouant des ressources financières suffisantes à la prévention de toutes les formes d’exploitation telles que définies dans le Protocole facultatif.

VI.Interdiction de la vente d’enfants, de la pornographie mettant en scène des enfants et de la prostitution des enfants et questions connexes (art. 3, 4 (par. 2 et 3), 5, 6 et7)

Lois et réglementations pénales en vigueur

Le Comité accueille avec satisfaction l’introduction dans le Code pénal d’une disposition sur la traite des êtres humains, y compris des enfants, ainsi que l’incrimination de la plupart des infractions visées par le Protocole facultatif. Le Comité demeure toutefois préoccupé par le fait que, dans le cadre juridique interne, tous les éléments des articles 2 et 3 du Protocole ne sont pas incriminés, en particulier :

a)L’article 129 du Code pénal ne couvre pas suffisamment la vente d’enfants aux fins du travail forcé, conformément à l’alinéa a i) c du paragraphe 1 de l’article 3 du Protocole facultatif;

b)L’article 164 du Code pénal n’interdit pas explicitement la possession de matériels pornographiques mettant en scène des enfants, conformément à l’alinéa aii) c du paragraphe 1 de l’article 3 du Protocole facultatif;

c)Le fait d’obtenir indûment, en tant qu’intermédiaire, le consentement à l’adoption d’un enfant, en violation des instruments juridiques internationaux relatifs à l’adoption, n’est pas clairement interdit dans le Code pénal;

d)L’utilisation de l’Internet pour la diffusion de matériels pornographiques mettant en scène des enfants ou d’autres formes d’exploitation sexuelle (par exemple le recrutement à des fins de prostitution) n’a pas été suffisamment prise en compte et n’est pas explicitement incriminée.

Le Comité recommande à l’État partie :

a) De revoir les dispositions pertinentes du Code pénal en vue de les mettre en pleine conformité avec le Protocole facultatif, en y apportant des modifications ou en incorporant de nouvelles dispositions;

b) De mener une étude approfondie sur l’utilisation de l’Internet pour la diffusion de la pornographie mettant en scène des enfants ou d’autres formes d’exploitation sexuelle (par exemple le recrutement à des fins de prostitution), et d’adopter des dispositions législatives spécifiques pour lutter contre ces phénomènes, notamment l’obligation pour les fournisseurs d’accès Internet de coopérer pleinement en la matière.

Impunité

Le Comité prend note de l’enregistrement, ces dernières années, d’un petit nombre d’infractions pénales commises contre des mineurs, notamment du recrutement de mineurs aux fins de la prostitution, et de la production et distribution de matériels pornographiques mettant en scène des enfants. Le Comité demeure préoccupé toutefois par le manque d’informations concernant le nombre de cas ayant fait l’objet d’une enquête en bonne et due forme et le nombre de responsables poursuivis et condamnés à des peines proportionnées à la gravité de leurs actes.

Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir que tous les cas de vente d’enfants, de prostitution d’enfants et de pornographie mettant en scène des enfants font l’objet d’enquêtes effectives et que les responsables sont traduits en justice et punis de peines appropriées.

Responsabilité pénale des personnes morales

Le Comité constate avec satisfaction que les personnes physiques et les personnes morales impliquées dans des infractions de traite de personnes sont tenues responsables conformément à l’article 20 de la loi relative à la lutte contre la traite des personnes. Il est préoccupé, toutefois, par le fait que les particuliers et les personnes morales, y compris les sociétés, peuvent ne pas être pénalement responsables, selon la législation de l’État partie, pour toutes les infractions visées par le Protocole facultatif.

Le Comité recommande à l’État partie de revoir son Code pénal afin d’établir la responsabilité pénale pleine et directe des personnes morales pour toute infraction visée par le Protocole facultatif.

Compétence extraterritoriale

Le Comité est préoccupé par le fait que, en vertu de l’article 8 du Code pénal, la condition de la double incrimination aux fins de l’engagement de poursuites au niveau national pour des infractions qui auraient été commises à l’étranger empêche de poursuivre les auteurs des infractions visées à l’article premier et à l’article 2 du Protocole facultatif.

Le Comité recommande à l’État partie, lorsqu’il exerce sa compétente extraterritoriale, de supprimer la condition de la double incrimination aux fins de l’engagement de poursuites pour les infractions commises à l’étranger visées par le Protocole facultatif.

Extradition

Le Comité encourage l’État partie à envisager d’inscrire, dans la législation nationale ainsi que dans tout traité d’extradition en vigueur ou conclu ultérieurement avec d’autres États parties, toutes les infractions visées au paragraphe 1 de l’article 3 du Protocole facultatif en tant que cas d’extradition. En outre, l’État partie pourrait souhaiter considérer le Protocole facultatif comme constituant la base juridique de l’extradition vers un autre État partie en ce qui concerne lesdites infractions.

VII.Protection des droits des enfants victimes [art. 8 et 9 (par. 3 et 4)]

Mesures adoptées pour protéger les droits et les intérêts des enfants victimes d’infractions visées par le Protocole facultatif

Le Comité constate avec inquiétude que les mesures en place pour protéger les droits et les intérêts des enfants victimes des infractions relevant du Protocole facultatif se bornent en général à la traite et sont donc insuffisantes. Il constate aussi avec inquiétude que ces mesures n’ont pas été adéquatement institutionnalisées.

À la lumière du paragraphe 3 de l’article 9 du Protocole facultatif, le Comité recommande à l’État partie :

a) De créer des mécanismes et des procédures pour la détection rapide des enfants victimes d’infractions visées par le Protocole facultatif, y compris en établissant des mécanismes de coopération entre les organes répressifs et les ministères concernés. Il recommande en outre que les groupes professionnels chargés d’assurer cette détection, notamment les juges, les procureurs, les policiers, les travailleurs sociaux, les membres du personnel médical et de tout autre groupe professionnel travaillant avec et/ou pour des enfants, soient formés aux droits de l’enfant, à la protection de l’enfant et aux techniques d’entretien;

b) De donner clairement instruction à tous les procureurs de mener activement les poursuites dans les affaires concernant des infractions visées par le Protocole facultatif;

c) De veiller à ce que des mécanismes de plainte soient disponibles et facilement accessibles pour les enfants dont les droits peuvent avoir été violés .

Mesures de protection dans le système de justice pénale

Le Comité juge positives les mesures prises par l’État partie, au regard du Code de procédure pénale, tendant à garantir la protection légale des enfants victimes et/ou témoins et la confidentialité tout au long de la procédure pénale. Le Comité juge préoccupant, toutefois, que l’État partie ne dispose pas d’un programme officiel pour assurer la protection des victimes et/ou témoins des infractions visées par le Protocole facultatif. De plus, le Comité est préoccupé par le fait que les dispositions de l’article 8 du Protocole n’ont pas été dûment intégrées dans la législation pertinente de l’État partie et, en particulier, par le fait que la législation ne prévoit pas de sanctions claires en cas de pressions physiques et psychologiques exercées au cours des interrogatoires.

Conformément aux obligations découlant de l’article 8 du Protocole facultatif, le Comité recommande à l’État partie de veiller, moyennant des dispositions législatives et réglementaires appropriées, à ce que tous les enfants victimes d’infractions, par exemple les enfants victimes de sévices, d’exploitation sexuelle et économique, d’enlèvement et de traite, ainsi que les enfants témoins de telles infractions, bénéficient de la protection prévue par le Protocole facultatif, et de prendre pleinement en considération les Lignes directrices en matière de justice dans les affaires impliquant les enfants victimes et témoins d’actes criminels (résolution 2005/20 du Conseil économique et social, annexe).

Rétablissement et réinsertion des victimes

Le Comité constate que les filles et garçons qui ont été victimes d’infractions, notamment des infractions de vente d’enfants, de prostitution d’enfants et de pornographie mettant en scène des enfants, peuvent être présentés devant les commissions locales chargées de la protection de l’enfance ou de la tutelle et curatelle. Malgré cela, le Comité juge préoccupant que les mesures de rétablissement et de réinsertion des victimes prises par l’État partie se limitent aux victimes de la traite et ne tiennent pas dûment compte des besoins des enfants victimes des infractions de vente d’enfants, de prostitution d’enfants et de pornographie mettant en scène des enfants visées par le Protocole facultatif.

Le Comité recommande à l’État partie :

a) De prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer aux enfants victimes d’infractions visées par le Protocole facultatif une aide appropriée, y compris pour garantir pleinement leur réinsertion sociale et leur réadaptation physique et psychologique, notamment en veillant à l’élaboration et à la bonne exécution de programmes visant à fournir aux victimes de la traite des services de conseil, d’hébergement et d’aide juridictionnelle et d’autres services de réadaptation;

b) De garantir l’accès de tous les enfants victimes, y compris les enfants qui ne sont pas des nationaux ou des résidents de l’État partie, à des procédures adéquates permettant, sans discrimination, de demander réparation du préjudice subi aux personnes juridiquement responsables, conformément au paragraphe 4 de l’article 9 du Protocole facultatif, et d’établir un fonds pour l’indemnisation des victimes, pour les cas où elles ne peuvent obtenir réparation auprès de l’auteur de l’infraction;

c) De prendre des mesures pour assurer la disponibilité de ses programmes de réadaptation et de retour dans des conditions de sécurité sur tout son territoire.

Permanence téléphonique

Le Comité juge préoccupant que l’État partie n’ait pas mis en place de permanence téléphonique couvrant toutes les infractions visées par le Protocole facultatif.

Le Comité recommande à l’État partie de créer une permanence téléphonique nationale pour toutes les infractions relevant du Protocole facultatif, en veillant à ce que ce service couvre l’ensemble du territoire, soit accessible à toute heure, soit joignable par un numéro d’appel à trois ou quatre chiffres facile à mémoriser et soit doté des ressources financières et techniques nécessaires ainsi que d’un personnel formé pour répondre aux enfants et analyser les appels afin d’y donner suite comme il convient.

VIII.Assistance et coopération internationales (art. 10)

Accords multilatéraux, régionaux et bilatéraux

À la lumière du paragraphe 1 de l’article 10 du Protocole facultatif, le Comité encourage l’État partie à continuer de renforcer la coopération internationale dans le cadre d’accords multilatéraux, régionaux et bilatéraux, en particulier avec les pays voisins, notamment en renforçant les procédures et mécanismes de coordination de la mise en œuvre de ces accords, afin de mieux prévenir tout acte visé dans le Protocole facultatif, d’en identifier les auteurs, d’enquêter sur eux, de les poursuivre et de les sanctionner.

IX.Ratification du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant établissant une procédure de présentation de communications

Le Comité recommande à l’État partie de ratifier le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant établissant une procédure de présentation de communications, en vue de renforcer encore le respect des droits de l’enfant.

X.Suivi et diffusion

Suivi

Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures voulues pour assurer la pleine application des présentes recommandations, notamment en les communiquant au Président, aux ministères concernés, au Parlement, à la Cour constitutionnelle et aux autorités régionales et locales, pour examen et suite à donner.

Diffusion des observations finales

Le Comité recommande que le rapport initial et les réponses écrites de l’État partie ainsi que les observations finales adoptées à leur sujet par le Comité soient largement diffusés, notamment – mais non exclusivement – par l’Internet, auprès du grand public, des organisations de la société civile, des mouvements de jeunesse, des groupes professionnels et des enfants, afin de susciter le débat et une prise de conscience concernant le Protocole facultatif, son application et son suivi.

XI.Prochain rapport

Conformément au paragraphe 2 de l’article 12 du Protocole facultatif, le Comité invite l’État partie à donner un complément d’information sur la mise en œuvre du Protocole facultatif et des présentes observations finales dans le prochain rapport périodique qu’il doit soumettre au titre de la Convention relative aux droits de l’enfant, attendu au plus tard le 28 janvier 2018, conformément à l’article 44 de la Convention.