CERD

Convention internationale

sur l’élimination

de toutes les formes

de discrimination raciale

Distr.GÉNÉRALE

CERD/C/465/Add.11er avril 2005

FRANÇAISOriginal: ANGLAIS

COMITÉ POUR L’ÉLIMINATIONDE LA DISCRIMINATION RACIALE

RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 9 DE LA CONVENTION

Septièmes rapports périodiques des États parties attendus en 2002

Additif

Estonie*, **

[21 décembre 2004]

I. INTRODUCTION

1.Le présent rapport est présenté en application de l’article 9 de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, aux termes duquel les États parties sont tenus de présenter au Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies des rapports périodiques sur les mesures qu’ils ont prises pour donner effet à la Convention et sur les progrès réalisés. La Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale est entrée en vigueur pour l’Estonie le 20 novembre 1991. L’Estonie a présenté son rapport initial et ses deuxième, troisième et quatrième rapports, réunis en un seul document, en février 1999, et son cinquième rapport périodique en mai 2002. Les conclusions du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale relatives au rapport initial de l’Estonie ont été publiées le 19 avril 2000, et celles qui portent sur le cinquième rapport périodique, le 23 août 2002.

2.Le présent rapport rend compte des mesures législatives, administratives ou autres qui ont été adoptées pour mettre en œuvre les droits garantis dans la Convention. Pour l’établissement de ce rapport, l’Estonie s’est inspirée des principes directeurs applicables en la matière. Les questions posées et les recommandations adoptées par le Comité lors de l’examen du cinquième rapport périodique de l’Estonie ont aussi été prises en considération. Une attention particulière a été portée aux préoccupations formulées par le Comité dans ses conclusions.

3.Ont participé à l’élaboration du présent rapport les Ministères de la justice, des affaires sociales, de l’éducation et de la recherche, de l’intérieur et de la culture, et le secrétariat du Ministère des affaires de population. Le Ministère des affaires étrangères a aussi demandé des informations au secrétariat du Chancelier de justice*.

4.Dans ses observations finales concernant le cinquième rapport périodique, le Comité a noté avec satisfaction que, dans le cadre des préparatifs du rapport de l’État partie, des organisations non gouvernementales avaient été invitées à formuler des observations et des commentaires. Le Gouvernement estonien estime en outre que les activités des organisations non gouvernementales revêtent une grande importance dans la société, et a par conséquent continué à coopérer avec diverses organisations non gouvernementales en Estonie, y compris pour l’établissement du présent rapport. Les questions du Comité, traduites en estonien, ont été transmises pour commentaires et proposition à trois organisations non gouvernementales concernées: le Centre d’information juridique sur les droits de l’homme, l’Institut estonien des droits de l’homme et l’Institut Jaan Tõnisson. Les deux premières ont répondu en donnant des avis très utiles. Les renseignements fournis par les organisations non gouvernementales et les problèmes qu’elles ont soulevés ont été pris en compte dans le présent rapport.

5.Dans ses observations finales sur le rapport précédent, le Comité a recommandé à l’État partie de rendre ses rapports périodiques publics dès le moment où ils étaient soumis. Il convient de noter à ce sujet que les rapports soumis par l’Estonie aux organisations internationales sont publiés sur la page d’accueil du Ministère des affaires étrangères (http://www.vm.ee) et peuvent ainsi être consultés par toutes les organisations concernées dès qu’ils ont été soumis.

6.Le Comité a aussi recommandé que ses observations finales soient publiées en estonien et dans les langues des minorités nationales. Le premier rapport ayant été rédigé en grande partie en anglais, il est à la disposition du public sur la page d’accueil du Ministère des affaires étrangères en langue anglaise. Le cinquième rapport périodique, ayant été rédigé à l’origine en estonien puis traduit en anglais, est disponible dans ces deux langues. Les observations finales du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale sont aussi accessibles sur la page d’accueil du Ministère des affaires étrangères en estonien et en anglais.

7.Afin de continuer à donner à la population des informations sur les droits et devoirs découlant de la Convention, les rapports soumis par l’État partie et les observations finales du Comité continueront d’être publiés sur la page d’accueil du Ministère des affaires étrangères. Il convient toutefois de relever que l’État n’est pas en mesure de traduire les rapports et recommandations dans les langues des minorités nationales. Il n’est pas exclu qu’à l’avenir les observations finales du Comité soient traduites dans les langues des minorités nationales, c’est‑à‑dire en russe puisqu’il s’agit de l’Estonie. La proportion des autres minorités nationales en Estonie est en effet très faible et, de plus, la langue maternelle de bon nombre de personnes appartenant à des minorités nationales en Estonie est souvent le russe. Cette langue étant en outre l’une des langues officielles de l’Organisation des Nations Unies, la traduction des conclusions du Comité dans les langues officielles de l’ONU est une question qui pourrait être résolue en coopération avec le Comité, afin de favoriser une utilisation efficace des ressources existantes et d’éviter de multiplier les traductions.

8.Dans un souci de clarté, les questions traitées dans le rapport ont été présentées article par article, et les réponses aux questions du Comité sont insérées dans les paragraphes se rapportant à l’article concerné.

II.  INFORMATIONS CONCERNANT LES ARTICLES 2 À 7

Article 2

9.L’Estonie continue de prêter une attention soutenue à la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales assurée par des mesures législatives et autres. Elle a toujours condamné la discrimination raciale et tenté de favoriser l’élimination de la discrimination raciale. Les principales dispositions législatives régissant la lutte contre le racisme et la discrimination ont été évoquées à propos de l’article 2 dans le précédent rapport de l’Estonie. On trouvera ci‑après une description des nouvelles dispositions législatives qui ont été adoptées depuis la présentation du précédent rapport.

10.Les fondements juridiques de l’interdiction de la discrimination raciale sont disposés dans la Constitution. Les questions de discrimination sont traitées plus spécifiquement dans le Code pénal, la loi sur l’égalité des sexes et d’autres textes législatifs. Il convient de noter que, pendant la période du rétablissement de l’indépendance, l’Estonie a mis en place un nouveau cadre législatif dans un délai relativement bref. Afin de s’assurer de sa compatibilité avec les normes en vigueur, la législation actuelle est en outre régulièrement examinée et, lorsque cela est nécessaire, amendée et précisée.

11.Dans le domaine du droit pénal, il convient de préciser qu’une réforme a été entreprise en 1995, qui consiste à réorganiser entièrement et radicalement le système actuel en vue de créer un nouveau droit pénal conforme aux traditions européennes. Dans le cadre de la réforme, plusieurs instruments ont été adoptés, et notamment le Code pénal, le Code de procédure pénale et le Code de procédure relative aux délits. L’un de ses produits majeurs a été la rédaction du Code pénal, qui introduit une modification radicale des principes du droit pénal. Le Code pénal modifié de la République socialiste soviétique d’Estonie de 1961, qui était en vigueur jusqu’à l’adoption de ce code, ne répondait plus aux exigences actuelles. Le nouveau Code pénal est entré en vigueur le 1er septembre 2002. Il prévoit des peines pour les crimes contre l’humanité (art. 89) et le génocide (art. 90), qui sont applicables non seulement aux auteurs principaux mais aussi au représentant de l’État ou au commandant militaire sur l’ordre ou avec le consentement duquel ces crimes ont été commis, ou qui n’est pas intervenu pour les empêcher alors qu’il en avait le pouvoir (art. 88). Le Code punit aussi l’incitation à la haine sociale (art. 151), les violations du principe d’égalité (art. 152) et la discrimination fondée sur les risques génétiques (art. 153).

12.En vue de mettre en place une politique pénale uniforme, de définir les principes de cette politique et d’en évaluer l’application, le Centre de politique pénale a été créé en 2003 dans le cadre du Ministère de la justice. Ce centre fait des enquêtes sur la criminalité. En coopération avec d’autres organes de l’État, principalement le Ministère de l’intérieur et le Ministère des affaires sociales, il coordonne aussi la mise en œuvre générale d’une politique pénale durable et efficace dans le pays. La création du Centre de politique pénale, organisme ayant une vision globale, était nécessaire pour garantir que les décisions stratégiques en matière de politique pénale soient dûment prises en considération et que les ressources consacrées à l’amélioration de la sécurité et à la réduction de la criminalité dans le pays soient rigoureusement affectées.

13.Le Conseil sur la prévention de la criminalité créé en 1993 par le Gouvernement est toujours en fonctions. En 2003, le «Riigikogu» (Parlement) a approuvé les directives applicables à l’élaboration de la politique de lutte contre la criminalité jusqu’en 2010, qui visent à assurer une application durable des politiques nationales de prévention de la criminalité. Ce document décrit les mesures relatives à la politique pénale, sociales et ponctuelles à appliquer dans la lutte contre la criminalité. La mise en œuvre de la politique pénale relève essentiellement de la compétence des Ministères de la justice, de l’intérieur, des affaires sociales, de l’éducation et de la recherche, et de celui de la culture. Ces ministères doivent associer le plus possible les administrations locales, les entreprises et les organisations non gouvernementales à la mise en œuvre des directives de politique pénale. La supervision de l’exécution des activités prévues dans ces directives est assurée par le Ministère de la justice, qui a aussi pour tâche de dispenser des conseils sur ces questions aux autres institutions pertinentes.

14.Afin d’améliorer les activités de prévention, une information est donnée au public sur les éléments qui favorisent la criminalité, et on lui explique diverses possibilités de participer à la lutte contre la criminalité. Dans le cadre de campagnes organisées à l’intention de divers groupes cibles dans différents comtés, des informations sont données sur les activités de prévention de la police et les possibilités de coopération offertes aux citoyens ordinaires. Afin d’informer la population des régions périphériques, et en particulier les enfants et les adolescents, des activités de prévention utilisant un minibus équipé du matériel nécessaire ont été lancées en 2000. Ce véhicule a été utilisé, avec du matériel annexe (tentes d’exposition, présentoirs portables, etc.) dans des manifestations publiques organisées au cours du mois consacré à la prévention du crime ainsi qu’à d’autres occasions, en divers endroits du pays. Les projets «Murekast» (boîte de petits soucis) et «Murekiri» (lettres de petits soucis) ont été lancés dans les comtés de Rapla, Põlva et Ida‑Viru pour évaluer la violence à l’école et dans la famille ainsi que d’autres délits touchant des enfants et offrir à ces derniers la possibilité de signaler leurs problèmes et leurs préoccupations et de recevoir l’assistance nécessaire. La page Web de la police offre un lien, murelink@pol.ee, qui permet aux enfants de signaler leurs problèmes. Cette possibilité a déjà été utilisée par des jeunes.

15.Depuis quelques années, les compétences du Chancelier de justice ont été considérablement étendues. Depuis l’amendement apporté à la loi sur le Chancelier de justice, le 1er janvier 2004, ce dernier peut connaître des litiges liés à une discrimination prévue dans la Constitution et les lois de droit privé. La loi modifiée sur le Chancelier de justice autorise toute personne qui estime qu’une personne physique ou morale de droit privé a agi de façon discriminatoire à son égard pour des considérations de sexe, de race, de nationalité (origine ethnique), de couleur, de langue, d’origine, de religion ou de convictions religieuses, d’opinions politiques ou autres, de situation de fortune ou sociale, d’âge, de handicap, d’orientation sexuelle, ou pour tout autre motif prévu par la loi, à saisir le Chancelier de justice pour engager une procédure de conciliation. L’accord approuvé par le Chancelier de justice lie les parties à la procédure de conciliation. Il incombe aussi au Chancelier de faire respecter les principes d’égalité et de droit à un traitement égal. Les actes qu’il doit accomplir à cet effet sont précisés dans la loi sur le Chancelier de justice.

16.Les compétences du Chancelier de justice ont aussi été étendues par la loi modifiée, afin de lui permettre de recevoir des plaintes pour violation de libertés et de droits fondamentaux, commises aussi bien par des organismes de l’État que par des institutions ou des organismes ou organes de l’administration locale, des personnes morales de droit public, ou par des personnes physiques ou morales de droit privé, dans l’exercice de fonctions publiques.

17.Dans ses observations finales sur le dernier rapport de l’Estonie, le Comité s’est félicité de l’accès accru aux antennes locales du bureau du Chancelier de justice, et en particulier de l’ouverture d’une nouvelle antenne dans le canton d’Ida‑Viru. Outre le bureau de Tallinn, le Chancelier dispose aussi désormais de bureaux de représentation à Tartu, Narva, Jõhvi et Sillamäe. Des consultations individuelles sont aussi organisées chaque mois à Pärnu et Tartu. Cela a été rendu nécessaire par l’accroissement constant du volume de travail du Chancelier et répond au souci de ce dernier d’être accessible au plus grand nombre. Les bureaux régionaux ont les mêmes fonctions que le Chancelier, à savoir surveiller la constitutionnalité de la législation et exercer la fonction de médiateur (ombudsman) supervisant les activités des organismes publics.

18.Les activités du Chancelier ayant fait l’objet d’une large publicité dans les médias et ailleurs, la population, mieux informée de son action, a de plus en plus recours à ses services, et ses bureaux reçoivent un nombre croissant de plaintes se rapportant à des violations commises par des fonctionnaires de l’État. Le vif intérêt pour l’action du Chancelier se reflète aussi dans le fait qu’il a reçu en 2002 le titre d’Ami des médias, pour avoir rendu son office plus transparent et visible qu’il ne l’avait jamais été. Le Chancelier explique en outre volontiers aux médias les complexités de certains problèmes juridiques et leur présente de possibles solutions.

19.Dans le dernier rapport présenté par l’Estonie, il était aussi fait mention de la loi sur la responsabilité de l’État, qui est entrée en vigueur le 1er janvier 2002. Étant donné que, à l’époque de la présentation de ce rapport, l’expérience de l’application de cette loi était insuffisante, on trouvera dans le présent document des informations supplémentaires sur cette application. Avant l’adoption de cette loi, l’indemnisation d’un préjudice non contractuel était régie par les dispositions du Code civil qui dataient de la période soviétique et qui, de toute évidence, ne satisfaisaient plus aux exigences de l’ordre juridique actuel. La nouvelle loi devait permettre une meilleure réglementation dans ce domaine.

20.La loi sur la responsabilité de l’État a essentiellement pour objectif d’accorder des indemnités à toute personne directement victime d’un préjudice matériel ou d’une perte de revenu causé par un fonctionnaire de l’État. Comme il n’est pas toujours possible d’identifier le fautif, la nouvelle loi prévoit qu’il incombe à l’État et non au fonctionnaire concerné d’indemniser la victime. Une demande d’indemnisation ne peut être déposée que par une personne ou une entreprise dont les droits reconnus par la loi ont été violés par une autorité publique et uniquement pour un préjudice que l’État aurait pu prévenir. Si d’autres voies de recours sont disponibles pour obtenir réparation, par exemple une procédure judiciaire contre la décision administrative, elles doivent être utilisées.

21.Conformément à la loi, toute personne peut demander réparation d’un préjudice matériel et réclamer le remboursement des frais causés par un dommage corporel ou une atteinte à la santé, par exemple des dépenses médicales ou la perte de revenu occasionnée par une incapacité de travail, etc.

22.Une personne physique peut aussi exiger une réparation financière pour préjudice moral en cas d’atteinte à sa santé, de privation de liberté, de violation de domicile ou d’atteinte à sa vie privée, etc. La partie lésée peut aussi demander à l’autorité publique concernée, au lieu d’une réparation financière, d’éliminer les conséquences illégales d’une décision ou d’une mesure administrative qui a été abrogée ou modifiée.

23.En vertu de la loi, toute personne victime d’un préjudice du fait des activités d’une autorité publique peut demander réparation à cette dernière ou saisir un tribunal.

24.La loi sur la responsabilité de l’État joue un rôle important dans la pratique. De l’entrée en vigueur de la loi en 2002 au début de 2004, le tribunal administratif a déclaré partiellement ou totalement illégaux 835 actes ou mesures judiciaires, a rendu 25 ordonnances tendant à assurer l’exécution d’un acte, la réalisation d’un acte ou l’adoption d’une mesure, et a ordonné le paiement de dommages‑intérêts aux requérants dans 19 affaires. Par exemple, il a statué que des intérêts sur une somme retenue abusivement par un organisme de l’État étaient dus au requérant à titre de dédommagement (décision no 3‑123/2003 du tribunal administratif de Tallinn), et qu’un dédommagement devait être versé à la victime d’un acte illégal d’un organe administratif local (décision no 3‑401/2003 du tribunal administratif de Tallinn).

25.L’un des faits nouveaux les plus importants de ces dernières années concernant l’égalité est l’adoption de la loi sur l’égalité des sexes. Cette loi, entrée en vigueur le 1er mai 2004, a pour objectif de garantir l’égalité entre les sexes énoncée dans la Constitution et de promouvoir l’égalité de traitement entre hommes et femmes, qui est un droit fondamental de l’être humain et qui concourt au bien public dans tous les domaines de la vie sociale. Elle interdit la discrimination fondée sur le sexe dans les secteurs privé et public et définit les notions d’égalité, de discriminations directe et indirecte fondées sur le sexe, ainsi que la notion de harcèlement sexuel.

26.Dans ses observations finales, le Comité a jugé importante la création du Conseil de l’égalité des sexes en tant qu’institution nationale de défense des droits de l’homme. Le Comité, créé en vertu de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, a également critiqué dans ses observations finales le fait que le Bureau de l’égalité entre les sexes, relevant du Ministère estonien des affaires sociales, est bien chargé de la promotion de l’égalité entre les sexes mais n’a pas assez de pouvoirs, de ressources financières et humaines et n’est pas assez connu du public pour promouvoir efficacement l’égalité entre les sexes. Le Comité s’est aussi dit préoccupé par le peu d’attention généralement accordée dans le pays aux questions d’égalité (CEDAW/C/SR. 539, 540 et 548).

27.La loi sur l’égalité entre les sexes, entrée en vigueur en 2004, devrait contribuer à améliorer la situation dans ce domaine. Cette loi a une vaste portée réglementaire et couvre tous les domaines de la vie en société − politique, économie, environnement social et culture. Elle prévoit notamment l’institution du Commissaire à l’égalité entre les sexes. Le Commissaire est chargé de suivre l’application de la loi sur l’égalité entre les sexes. Il recevra également des demandes et requêtes émanant de particuliers et donnera des avis sur les affaires de discrimination. La loi prévoit également la mise en place du Conseil de l’égalité entre les sexes, qui sera chargé d’élaborer la politique en matière d’égalité entre les sexes et de contrôler l’application du principe d’égalité entre les sexes dans la mise en œuvre des programmes élaborés par les organes gouvernementaux.

28.Sur la base des recommandations du Comité pour l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et compte tenu de la nécessité de traiter plus largement les problèmes d’égalité entre les sexes, le Département de l’égalité entre les sexes a été créé dans le cadre du Ministère des affaires sociales. Le Département est chargé de planifier les politiques et les mesures relatives à l’égalité entre les sexes visant à réduire les inégalités. Il suivra également l’application du principe d’égalité de traitement dans les secteurs public et privé et coordonnera l’application des mesures pertinentes et la stratégie relative à l’intégration des sexospécificités. Le Bureau de l’égalité entre les sexes traitait déjà auparavant de ces questions, mais vu la nécessité d’attacher davantage d’attention aux questions d’égalité, un département approprié a été mis en place et des spécialistes ont été recrutés.

29.L’Estonie a adhéré aux principales conventions internationales relatives à l’égalité ainsi qu’à d’autres instruments connexes, tels que la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et la Charte sociale européenne révisée. Des instruments également importants ont été adoptés par différents organes du Conseil de l’Europe, tels que la résolution 855 du Conseil de l’Europe relative à l’égalité entre les hommes et les femmes (1986), la recommandation 1229 de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe relative à l’égalité entre les hommes et les femmes (1994), etc. L’Estonie a par ailleurs adhéré aux conventions pertinentes de l’Organisation internationale du Travail.

30.L’Estonie a en outre transposé dans sa législation des directives de l’Union européenne sur l’égalité, par exemple la directive relative à l’harmonisation des lois sur l’application du principe de l’égalité des rémunérations entre les travailleurs masculins et les travailleurs féminins dans les États membres (75/117/EEC), la directive sur la mise en œuvre du principe de l’égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne l’accès à l’emploi, à la formation et la promotion professionnelles, et les conditions de travail (76/207/EEC), etc.

Autres mesures en vue de l’élimination de la discrimination raciale

31.Depuis 1994, un débat s’est engagé dans la société estonienne sur la nécessité de conclure à l’échelle de la nation un contrat social tendant à garantir le développement de la société dans son ensemble, notamment sur les questions touchant l’avenir des zones rurales, ou la culture, l’éducation et l’administration locale. Le Président de l’Estonie, Arnold Rüütel, ainsi que les partis politiques et les organisations du secteur associatif, ont débattu de la nécessité de conclure un contrat social. Le 10 avril 2003 a été créée la Fondation pour le contrat social, chargée de promouvoir l’adoption et l’application du contrat social.

32.Le 20 octobre 2003, les représentants des partis politiques, des patrons et des employés, des universités et des organisations du secteur associatif ont signé le Contrat social estonien, portant sur les domaines de première importance pour le développement durable en Estonie. L’objectif central de développement envisagé dans le Contrat social est d’améliorer le niveau de vie de l’ensemble de la population estonienne − indépendamment de leur nationalité, religion, sexe, langue, origine, fortune et situation sociale − tout en faisant diminuer sensiblement les disparités sociales et régionales. Pour atteindre ces objectifs, les parties au Contrat ont créé un forum pour le Contrat social, qui en suivra l’application et fera des propositions au Gouvernement et au Parlement en vue d’améliorer la situation.

33.Par exemple, le Forum pour le contrat social a lancé des activités ciblées visant à identifier les principaux problèmes liés aux enfants et à y apporter les meilleures solutions possibles. Il a lancé à cette fin le projet «Kallis laps» (Enfant précieux). Cinq tables rondes ont été organisées au niveau des comtés dans le cadre de ce projet afin de relever les différences régionales entre les systèmes d’aide à l’enfance et de rapprocher le débat de ceux qui avaient eu relativement peu d’occasions d’y participer. Les propositions faites par le Forum seront présentées au Parlement, au Gouvernement et aux administrations locales. Par ailleurs, le Forum sur l’éducation et le contrat social, intitulé «Põhihariduseta noor» (Jeunesse sans éducation de base), devrait sensibiliser la société au fait qu’un grand nombre d’enfants ont interrompu leur scolarité de base, aux problèmes qui en découlent et aux solutions pouvant être apportées pour améliorer cette situation. Les propositions faites par le forum ont également été présentées au Gouvernement pour l’élaboration de projets de loi.

Intégration

34.La politique d’intégration estonienne est décrite de manière détaillée dans le cinquième rapport de l’Estonie (par. 44 à 72). Au cours des dernières années, l’État a déployé d’importants efforts pour faire appliquer cette politique. Dans un esprit de tolérance et de dialogue entre les cultures, des actions ont été menées en vue d’intégrer les minorités nationales à la société tout en leur donnant des possibilités de conserver et de développer leur culture nationale.

35.Le 14 mars 2000, le Gouvernement a approuvé le programme national Intégration dans la société estonienne 2000 ‑2007 (disponible en estonien, en anglais et en russe à l’adresse suivante: http://www.riik.ee/saks/ikomisjon).

36.Le 6 mai 2004, le Gouvernement a approuvé les plans d’action pour l’intégration 2004‑2007 visant à maintenir le soutien aux activités qui aident les individus de différentes nationalités à s’adapter à la langue, à la culture et à l’histoire locales tout en contribuant à préserver l’identité culturelle et linguistique des minorités nationales. Ces nouveaux plans d’action mettent l’accent sur l’extension des activités d’immersion linguistique à l’ensemble du pays, l’augmentation de l’aide de l’État aux sociétés culturelles des minorités nationales, et un développement accru des éléments socioéconomiques du Programme d’intégration. Le plan d’action souligne également qu’il importe d’améliorer l’enseignement de la langue officielle de l’État, d’accélérer les procédures de naturalisation et de créer des possibilités de formation professionnelle dans les régions où le taux de chômage est élevé.

37.Il est essentiel de faire des évaluations indépendantes de l’efficacité des mesures d’intégration. On effectue donc des enquêtes annuelles de suivi. Les données issues de l’enquête sur l’intégration en 2002 permettent de conclure que les priorités établies jusqu’alors étaient justifiées. L’enquête a montré que l’attitude de la population à l’égard de la politique d’intégration nationale était devenue plus positive; elle a également constaté une attitude plus positive concernant la nécessité de financer l’intégration.

38.La coopération se poursuit dans le cadre du projet «S’intégrer en Estonie 2002‑2004», financé par l’aide étrangère, qui vise à promouvoir le multiculturalisme. Le budget total de ce projet est de 24,9 millions de couronnes, soit une contribution de 9,7 millions de couronnes versée par l’État estonien et un montant de 15,2 millions de couronnes provenant de l’aide étrangère. Une grande partie des activités de ce projet sont consacrées aux jeunes. Il soutient l’apprentissage de la langue estonienne, notamment par l’immersion linguistique aux niveaux préscolaire et primaire, la promotion de contacts quotidiens entre des jeunes de langue estonienne et russe et entre diverses organisations et écoles. Certaines activités visent aussi à renforcer les compétences linguistiques et professionnelles des non‑Estoniens sur le marché du travail et dans les écoles professionnelles; les non‑Estoniens sont aussi présents dans le secteur des médias, et la question de la motivation et de l’information des non‑Estoniens qui pourraient demander la citoyenneté estonienne est abordée.

39.Quatre projets financés sur les fonds structurels de l’Union européenne ont été élaborés pour la période 2004‑2007 et représentent un budget total de 56 millions de couronnes pour les programmes suivants:

Développement de l’enseignement en langue estonienne dans les écoles professionnelles dont la langue d’apprentissage est le russe;

Échanges professionnels intra‑estoniens visant à favoriser les pratiques linguistiques;

Intégration de la population non‑estonienne au marché du travail;

Lutte contre le chômage des jeunes non‑Estoniens.

40.Dans ses observations finales, le Comité s’est dit préoccupé par la définition étroite de la notion de «minorités nationales» dans la loi de 1993 sur l’autonomie culturelle des minorités nationales. Le Comité a estimé qu’une définition aussi étroite risquait de restreindre la portée du programme d’intégration national et de transformer la politique d’intégration en politique d’assimilation.

41.En ce qui concerne la définition des minorités nationales dans la loi de 1993 sur l’autonomie culturelle des minorités nationales, l’Estonie a fait une déclaration lors de son adhésion à la Convention‑cadre du Conseil de l’Europe pour la protection des minorités nationales, précisant qui elle considérait comme appartenant aux minorités nationales. Étant donné que la Convention ne propose pas de définition des minorités nationales, les États parties ont une certaine latitude d’interprétation pour déterminer quelles personnes appartiennent à des minorités nationales dans leur pays, étant entendu que la définition adoptée doit être conforme au droit international et aux principes établis dans la Convention. Plusieurs États parties ont fait des déclarations analogues d’interprétation lorsqu’elles ont ratifié la Convention.

42.Lorsqu’elle a fait cette déclaration, l’Estonie s’est inspirée des dispositions de la loi sur l’autonomie culturelle des minorités nationales. Aujourd’hui, la déclaration devrait être replacée dans le contexte de la Constitution, de l’ensemble de la législation et de l’évolution politique du pays, surtout en ce qui concerne le programme d’intégration. Les élections au conseil culturel finno‑ougrien qui se sont tenues du 14 au 16 mai 2004 se sont fondées sur les «Règles relatives à l’élection des conseils culturels des minorités nationales» adoptées par le Gouvernement en mai 2003; 58,55 % des personnes appelées à voter ont participé à ces élections. Le Comité central chargé des élections en a confirmé les résultats le 1er juin 2004.

43.En réponse à l’observation du Comité selon laquelle la définition utilisée dans la loi sur l’autonomie culturelle des minorités nationales risquait de restreindre la portée du programme d’intégration, il convient de noter que ce dernier concerne toutes les minorités ethniques vivant en Estonie. Ses principes sont applicables à toute personne qui considère appartenir à une minorité nationale, indépendamment de la taille de cette minorité ou d’autres circonstances, notamment la citoyenneté. Le programme d’intégration insiste sur le fait que la langue, la religion et les relations familiales, tout comme les traditions et les modes de vie, ne doivent pas être les mêmes pour tous les membres de la société. Ces éléments relèvent de la vie privée de chacun, et des moyens ont été créés en vue de permettre leur promotion. L’adoption du programme d’intégration et sa mise en œuvre efficace ont contribué de manière significative au développement de la société en favorisant une meilleure compréhension entre les différentes nationalités. Si, avant l’élaboration du programme, le fait que certains membres des minorités nationales pouvaient se sentir exclus de la société pouvait susciter des critiques, les mesures adoptées au niveau national visent désormais à éliminer les effets d’un tel phénomène.

44.La participation à la vie et à la création culturelles ne peut faire l’objet de restrictions fondées sur la nationalité, la race ou d’autres critères analogues. Toutes les sociétés et associations issues des minorités nationales peuvent solliciter de l’aide pour leurs activités dans des conditions d’égalité. Depuis la restauration de l’indépendance, l’État soutient les sociétés culturelles des minorités nationales. En 2002, une aide de 2 079 000 couronnes a été allouée aux minorités nationales par l’intermédiaire du Ministère de la culture; cette somme a atteint 2,5 millions de couronnes en 2003 et en 2004. On prévoit de leur affecter 3,2 millions de couronnes du budget national en 2005. Les activités culturelles des minorités nationales bénéficient également d’un appui par l’intermédiaire des collectivités locales, de la Fondation pour l’intégration, du Conseil des taxes sur les jeux et d’autres sources.

45.Les représentants des minorités nationales participent de plus en plus activement aux activités des associations sans but lucratif. Ces associations sollicitent d’ailleurs activement des aides pour réaliser leurs projets. Le programme de l’État a notamment pour objectif de permettre aux non‑Estoniens de participer sur un pied d’égalité avec les Estoniens aux activités des organisations du secteur associatif. Il faut souligner que la définition des minorités nationales utilisée dans la déclaration ne restreint aucunement la création d’associations sans but lucratif ou leurs activités, et que ces associations prédominent dans le secteur associatif. Le financement des associations sans but lucratif et des sociétés culturelles nationales n’est soumis, lui non plus, à aucune restriction liée à la déclaration, car chacun peut défendre des projets dans des conditions d’égalité.

46.Il faut aussi souligner que la représentation des minorités nationales dans les associations sans but lucratif et que les activités des minorités visant à préserver et développer leur langue et leur culture ne sont limitées en aucune façon. Les minorités nationales vivant en Estonie bénéficient des possibilités nécessaires pour préserver leur langue et leur identité culturelle, surtout en ce qui concerne l’organisation de l’enseignement et des activités des sociétés dans leurs langues nationales. La société estonienne offre diverses possibilités de promouvoir l’identité culturelle des minorités nationales, et ces activités ne dépendent nullement de la citoyenneté des individus.

Article 3

47.Il n’y a pas de génocide, d’apartheid ni de ségrégation raciale en Estonie. Le Code pénal prévoit des peines pour le génocide et les crimes contre l’humanité.

48.En outre, l’Estonie est partie à plusieurs conventions internationales dans ce domaine, telles que la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, la Convention internationale sur l’élimination et la répression du crime d’apartheid, la Convention sur l’imprescriptibilité des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre, et le Statut de Rome de la Cour pénale internationale.

49.À cet égard, il faut noter que le Code pénal ne contenait pas encore, lors de la présentation du précédent rapport, de disposition distincte tendant à punir le crime de génocide. La répression du génocide était traitée à l’article 611 relatif aux crimes contre l’humanité. Les juridictions inférieures avaient des avis divergents sur la qualification des crimes contre l’humanité ou de génocide. En 2000, dans sa décision (no 1‑1‑31‑00), la chambre pénale de la Cour suprême a attiré l’attention sur les divers éléments entrant dans la définition des infractions pénales aux termes de l’article 611 et a estimé que l’absence de distinction entre le crime de génocide et les autres crimes contre l’humanité avait pour conséquence que les juridictions interprétaient différemment cette disposition du Code pénal.

50.Dans le nouveau Code pénal adopté en 2001, qui remplace le précédent, les amendements nécessaires ont été apportés, et les crimes de génocide et contre l’humanité sont maintenant traités séparément dans différents articles. L’article 89 du Code pénal punit les crimes contre l’humanité, et l’article 90, le crime de génocide.

51.Aucune procédure judiciaire n’a été engagée jusqu’à présent sur la base des articles 89 et 90 du Code pénal.

52.En août 2002, le Gouvernement estonien a décidé de proclamer le 27 janvier «Journée de commémoration des victimes de l’holocauste et d’autres crimes contre l’humanité». Le choix de cette date a été fait en tenant compte de la recommandation du Conseil de l’Europe (27 janvier) et du fait que la Finlande, la Suède, la Norvège et la Grande‑Bretagne l’avaient également choisie. Cette initiative du Gouvernement estonien a notamment été approuvée par la communauté juive d’Estonie.

53.En raison des décisions susmentionnées, les écoles estoniennes attachent désormais une plus grande attention aux questions liées à l’holocauste. Le Ministère de l’éducation et de la recherche a réalisé à l’intention des écoles un dossier d’information sur l’holocauste et autres crimes contre l’humanité. Chaque année, plusieurs enseignants estoniens se rendent en Israël afin de participer à des cours sur l’holocauste. Le matériel d’enseignement est en cours de révision − par exemple, en mai 2003, le Ministère de l’éducation et de la recherche a publié en collaboration avec la Société des Amis d’Israël un livre en estonien intitulé Racontez à vos enfants, qui parle de l’holocauste et qui est également utilisé dans les écoles.

54.Depuis la restauration de l’indépendance, plusieurs monuments dédiés aux victimes de l’holocauste ont été inaugurés. La communauté juive d’Estonie prévoit d’ériger cinq stèles commémoratives en 2005. Le Gouvernement de l’Estonie et le Gouvernement des États‑Unis d’Amérique soutiennent ce projet.

Article 4

55.Le Parlement a adopté le Code pénal le 6 juin 2001. Selon le chapitre 10 du Code, trois infractions au principe d’égalité sont des infractions aux droits politiques et civils: l’incitation à la haine sociale, la violation du principe d’égalité et la discrimination fondée sur les risques génétiques.

56.Suite aux amendements apportés au Code pénal le 1er juillet 2004, des peines plus ou moins lourdes ont été prononcées pour les infractions d’incitation à la haine sociale et de violation du principe d’égalité selon que l’acte comportait ou non des circonstances aggravantes.

Article 134. Enlèvement. 1) Le fait d’entraîner ou de maintenir une personne, par la violence ou la ruse, dans une situation où il est possible de la persécuter ou de l’humilier en raison de sa race, de son sexe ou pour d’autres raisons, et où elle ne dispose pas de protection juridique contre un tel traitement et n’a pas la possibilité de se sortir de cette situation, est passible d’une sanction pécuniaire ou d’une peine d’emprisonnement de cinq ans au plus. 2) Le même acte, s’il est commis: i) à l’encontre de deux personnes ou plus, ou ii) à l’encontre d’une personne de moins de 18 ans, est passible d’une peine d’emprisonnement de deux à dix ans.

Article 151. Incitation à la haine sociale. 1) Les activités qui incitent publiquement à la haine ou à la violence pour des motifs de nationalité, de race, de couleur, de sexe, de langue, d’origine, de religion, de convictions politiques, de fortune ou de situation sociale, sont passibles d’une amende de 300 unités au plus ou d’emprisonnement. 2) Le même acte, s’il est commis: i) au moins deux fois, ou ii) en lésant gravement les droits ou intérêts d’une personne protégée par la loi, ou l’intérêt général, est passible d’une sanction pécuniaire ou d’une peine d’emprisonnement de trois ans au plus.

Article 152. Violation du principe d’égalité. 1) La restriction illégale des droits des personnes ou le fait d’accorder illégalement des préférences pour des motifs de nationalité, de race, de couleur, de sexe, de langue, d’origine, de religion, de convictions politiques, de fortune ou de situation sociale, est passible d’une amende de 300 unités au plus ou d’emprisonnement. 2) Le même acte, s’il est commis: i) au moins deux fois, ou ii) en lésant gravement les droits ou intérêts d’une personne protégée par la loi, ou l’intérêt général, est passible d’une sanction pécuniaire ou d’une peine d’emprisonnement de un an au plus.

Article 153. Discrimination au motif de risques génétiques. 1) Le fait de restreindre illégalement les droits des personnes ou d’accorder illégalement des préférences au motif de risques génétiques est passible d’une amende de 300 unités au plus ou d’emprisonnement. 2) Le même acte, s’il est commis: i) au moins deux fois, ou ii) en lésant gravement les droits ou intérêts d’une personne protégée par la loi, ou l’intérêt général, est passible d’une sanction pécuniaire ou d’une peine d’emprisonnement de un an au plus.

57.En Estonie, très peu de crimes ont été commis pour des motifs nationaux, culturels, linguistiques ou autres. Les organes gouvernementaux compétents assurent la prévention et le contrôle dans ce domaine.

58.Jusqu’au 1er juillet 2004, l’enquête préliminaire sur les infractions présentant les éléments constitutifs de l’incitation à la haine sociale relevait uniquement de la compétence de la commission de la police de sécurité. Depuis lors, la commission de la police de sécurité enquête sur ce type d’infractions lorsqu’elles comportaient des circonstances aggravantes. L’une des missions de la police de sécurité est la protection de l’ordre constitutionnel. Il en découle qu’elle a le devoir de détecter et de combattre les activités illégales de mouvements, groupes ou personnes extrémistes (notamment ceux qui incitent à la haine nationale ou raciale).

59.Des organisations non gouvernementales, des représentants des minorités nationales et de simples citoyens ont également rendu compte de certains faits relevés dans les médias et d’actes d’individus et d’organisations privées dont certains éléments présentaient selon eux les éléments constitutifs d’une incitation à la haine nationale, raciale ou religieuse. Si un expert indépendant confirme qu’il s’agit d’une incitation à la haine nationale ou raciale, la police de sécurité fait une enquête préliminaire. Toutefois, il arrive aussi que la plainte relative à une infraction s’avère infondée et que les conclusions de l’évaluation d’un expert indépendant ne confirment pas l’accusation d’incitation à la haine. La notification, aux organes chargés de faire appliquer la loi, des manifestations d’incitation à la haine nationale, raciale ou religieuse est un signe que la population est consciente de la nature et du caractère punissable de ces infractions, et qu’elle fait confiance aux organes chargés de faire appliquer la loi.

60.La commission de la police de sécurité informe le public dans ses rapports annuels qui traitent de questions telles que les caractéristiques de l’incitation à la haine sociale et les activités des mouvements extrémistes. Les jeunes sont informés de ces questions principalement dans le cadre des programmes scolaires des établissements d’enseignement général.

61.Les fonctionnaires de la police de sécurité ont participé régulièrement à des activités, séminaires et conférences de formation internationaux. Par exemple, le Département de la justice des États‑Unis et le FBI ont organisé ces dernières années plusieurs cours de formation consacrés aux enquêtes sur les crimes informatiques et l’incitation à la haine raciale. En 2000, quatre fonctionnaires de la police ont suivi un cours de formation de l’Association des écoles de police européennes (AEPC) consacré à la lutte contre les phénomènes sociaux extrémistes. Des fonctionnaires de police ont également participé à plusieurs activités de formation sur les droits de l’homme organisées par le Conseil de l’Europe et d’autres partenaires étrangers.

62.Aucune procédure n’a été engagée jusqu’à présent au titre des articles 134 et 152 du Code pénal. En 2004, trois actions en justice ont été intentées pour incitation à la haine sociale (art. 151); dans l’une de ces affaires, la décision du tribunal a été exécutée et, dans les deux autres, les procédures étaient en cours au moment de l’établissement du présent rapport. En 2003, trois personnes ont été poursuivies au titre de l’article 151 du Code pénal. Elles étaient accusées d’avoir écrit des textes et dessiné des images antisémites incitant à la violence sur les murs d’une maison. La décision no 1‑291/03 du tribunal de Narva en date du 17 juin 2003 a statué que ces individus avaient été membres du mouvement «skinhead» et avaient publiquement incité à la haine nationale et raciale, et ils ont tous été condamnés à une peine d’emprisonnement.

63.En automne 2004, une action a également été intentée contre une personne accusée d’incitation à la haine sociale perpétrée sur un site Web. Durant l’enquête préliminaire, la police de sécurité a confirmé que les documents publiés sur Internet entre 1995 et 2003 constituaient probablement une incitation publique à la haine et à la violence fondée sur les croyances nationales, religieuses ou politiques. Cette affaire concernait un site Internet auquel tout le monde pouvait avoir librement accès. Les accusations ont été portées en vertu de l’article 151 du Code pénal qui stipule que cette infraction est passible d’une peine d’emprisonnement de trois ans. Au moment de la présentation du présent rapport, la procédure relative à cette affaire était en cours.

Article 5

a) Droit à un traitement égal devant les tribunaux et tout autre organe administrant la justice

64.À ce propos, il semble utile en premier lieu de se reporter aux paragraphes 111 à 116 du rapport précédent de l’Estonie et d’avoir à l’esprit quelques principes constitutionnels. La Constitution garantit le droit de chacun de bénéficier de la protection de l’État et de la loi. Toute personne dont les droits et libertés ont été violés a le droit d’avoir recours aux tribunaux. Toute personne peut demander, lors de l’examen judiciaire de son affaire, que toute loi, autre norme juridique ou procédure pertinente soit déclarée contraire à la Constitution. Cette question a été abordée plus en détail dans le rapport précédent de l’Estonie et le Comité n’a formulé aucune recommandation à ce sujet.

65.La justice est rendue uniquement par les tribunaux, qui sont indépendants dans leur activité et rendent la justice conformément à la Constitution et aux lois (art. 146 de la Constitution). La loi sur les tribunaux contient les dispositions régissant l’administration des tribunaux et les services judiciaires. Pour obtenir de plus amples informations sur l’administration des tribunaux, il convient de se reporter aux réponses fournies au titre de l’article 6. La compétence et les activités du Chancelier de justice sont décrites de façon plus détaillée dans les sections traitant des articles 2 et 6.

b) Droit à la sûreté de la personne et à la protection de l’État contre les voies de fait ou les sévices de la part soit de fonctionnaires du Gouvernement, soit de tout individu, groupe ou institution

66.Le Code pénal entré en vigueur en 2002 établit quelles activités entraînent une responsabilité pénale et prévoit les peines applicables aux auteurs d’infractions. À ce stade, seront seulement abordés certains changements apportés au Code pénal par rapport à la loi pénale précédente. Les peines prévues dans le Code pénal pour l’homicide involontaire (art. 113) et la torture (art. 122) sont devenues plus sévères. L’homicide involontaire est passible d’une peine d’emprisonnement de quinze ans au plus et les sévices physiques continus ou très préjudiciables sont passibles d’une sanction pécuniaire ou d’un emprisonnement de cinq ans au plus.

67.Le chapitre sur les atteintes à l’administration de la justice établit la responsabilité du procureur qui inculpe sciemment un innocent (art. 310), rend un jugement ou une décision contraires à la loi (art. 311), ou contraint une personne à présenter un faux témoignage, à établir une fausse expertise ou à faire une traduction ou une interprétation inexacte (art. 322). Le Code établit également la responsabilité de quiconque porte atteinte à la dignité d’un détenu ou d’une personne placée en détention ou en détention préventive, commet une discrimination à l’encontre d’une telle personne ou restreint ses droits de manière illégale (art. 324).

68.La procédure pénale est régie par le Code de procédure pénale, qui a été adopté le 12 février 2003 et est entré en vigueur le 1er juillet 2004.

c) Droits politiques, notamment droit de participer aux élections

69.Aux termes de la Constitution, le pouvoir suprême de l’État est exercé par le peuple en élisant le Parlement et par référendum. Les citoyens estoniens âgés d’au moins 18 ans ont le droit de voter aux élections au Riigikogu. Les citoyens estoniens et de l’Union européenne âgés de 18 ans au moins ont le droit de voter aux élections des conseils des collectivités locales. En outre, les étrangers qui résident en Estonie au titre d’un permis de résidence permanent et qui vivent dans une municipalité rurale ou une ville depuis cinq ans au moins ont le droit de voter aux élections des conseils des collectivités locales. Selon la loi, les électeurs doivent être inscrits au registre de la population estonienne.

70.L’Estonie est l’un des rares pays au monde où les non‑citoyens, indépendamment de leur origine, peuvent participer aux élections des conseils des collectivités locales. Le Comité consultatif du Conseil de l’Europe chargé de la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales a également émis l’avis que le droit des personnes appartenant aux minorités nationales de participer à la vie publique est mieux protégé lorsque les non‑citoyens peuvent voter aux élections des conseils des collectivités locales.

71.Aux termes de la loi sur les élections au Riigikogu et de la loi sur l’élection des conseils des collectivités locales, qui étaient en vigueur jusqu’à 2001, les candidats aux élections devaient avoir une certaine maîtrise de l’estonien. De nombreuses organisations internationales, notamment l’OSCE et le Comité consultatif du Conseil de l’Europe chargé de la Convention‑cadre pour la protection des minorités nationales, ont critiqué l’Estonie en raison des compétences linguistiques exigées par la législation sur les élections. Le Comité consultatif a estimé que ces conditions empêchaient la participation aux élections de personnes appartenant aux minorités nationales, et n’étaient donc pas conformes à la Convention-cadre et devaient être abrogées.

72.Cette question est aujourd’hui résolue et les amendements nécessaires ont été adoptés. En novembre 2001, les lois concernées ont été modifiées et l’exigence relative aux compétences linguistiques des candidats a été supprimée. Ces lois sont maintenant conformes aux normes internationales, notamment à l’article 25 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

73.Les dernières élections aux conseils des collectivités locales ont été organisées le 20 octobre 2002 en application des lois modifiées. Les électeurs participant aux élections aux conseils des collectivités locales ne fondent généralement pas leur choix sur l’appartenance nationale d’un candidat mais plutôt sur sa vision d’ensemble. Les données relatives à la nationalité des individus étant considérées comme des données personnelles sensibles, il n’existe pas de statistiques des résultats des élections des conseils des collectivités locales ventilées selon la nationalité des candidats élus. Toutefois, étant donné que l’on compte un nombre relativement élevé de noms à consonance non estonienne parmi les candidats élus, on peut supposer qu’un certain nombre d’élus appartiennent aux minorités nationales.

74.Dans ses observations finales concernant le rapport précédent de l’Estonie, le Comité a estimé qu’il était important que les organes politiques des villes dont la majorité des habitants est russophone aient la possibilité de mener leurs travaux en russe. Le 1er janvier 2002, est entrée en vigueur la modification apportée à l’article 8 de la loi sur les langues, prévoyant la possibilité d’utiliser d’autres langues pour communiquer avec l’État et les organismes des collectivités locales. Selon les dispositions de cette loi, il est autorisé, si les parties s’accordent sur ce point, d’employer une langue étrangère qu’elles comprennent, s’agissant de communiquer oralement avec des fonctionnaires ou employés des organismes de l’État et des collectivités locales, et dans un office notarial, le bureau d’un huissier ou d’un interprète ou traducteur juré. Les organismes de l’État et des collectivités locales peuvent également recevoir des demandes, des requêtes ou d’autres documents rédigés dans d’autres langues que l’estonien.

75.Cette disposition a donné un fondement juridique à la pratique répandue dans les organismes de l’État et des collectivités locales d’utiliser une langue convenant aux deux parties en présence. La précédente version de la loi sur les langues prévoyait uniquement l’utilisation de l’estonien. Dans la pratique, avant l’entrée en vigueur de cette modification de la loi, on utilisait déjà souvent une langue étrangère pour communiquer avec les personnes qui ne maîtrisaient pas l’estonien. Le texte de cette nouvelle disposition a été rédigé avec souplesse, de manière à ne proscrire l’utilisation d’aucune autre langue. Toutefois, l’autre langue utilisée est habituellement le russe, car la majorité des personnes qui ne savent s’exprimer en estonien sont russophones.

76.Plusieurs organisations internationales et experts se sont dits préoccupés par l’article 23 de la loi sur les langues, qui prévoit que les enseignes publiques, les panneaux de signalisation, les avis, les notifications et les annonces publicitaires doivent, en règle générale, être rédigés en estonien. On a estimé que cette disposition pouvait être interprétée comme une interdiction d’afficher les annonces électorales dans la langue d’une minorité nationale.

77.Bien que l’article 23 de la loi sur les langues puisse être interprété comme rendant obligatoire la diffusion en estonien de toute information destinée au public, au moment de la communication du présent rapport, l’Inspection aux affaires linguistiques et le Chancelier de justice avaient émis l’opinion que les annonces électorales pouvaient également être diffusées dans une autre langue que l’estonien et que l’article 23 de la loi sur les langues ne pouvait pas être interprété comme interdisant l’utilisation d’une autre langue parallèlement à l’estonien.

78.Conformément à la pratique de l’Inspection aux affaires linguistiques, une interprétation aussi stricte de la loi et l’imposition de restrictions ne seraient pas conformes aux engagements internationaux de l’Estonie. Par conséquent, l’Inspection n’a pas estimé qu’il y avait eu violation de la loi lorsqu’une autre langue était employée parallèlement à l’estonien sur les enseignes publiques, les avis ou les annonces publicitaires.

79.Au cours des deux dernières années, l’Inspection aux affaires linguistiques et le Ministère de l’éducation ont envisagé à plusieurs reprises une éventuelle modification de l’article 23 de la loi sur les langues, qui autoriserait explicitement l’emploi d’autres langues parallèlement à l’estonien sur les enseignes publiques, les avis et les annonces publicitaires.

80.En conclusion, tous les citoyens et, au niveau des collectivités locales, tous les résidents permanents ont la possibilité de participer à la vie politique, indépendamment de leur connaissance de la langue estonienne.

81.En ce qui concerne l’observation du Comité sur le fait que seuls les ressortissants peuvent être membres d’un parti politique, il convient de se reporter à l’article 48 de la Constitution, qui dispose effectivement que seuls les citoyens estoniens peuvent être membres d’un parti politique. Étant donné qu’il s’agit d’une norme inscrite dans la Constitution et approuvée par référendum, le Gouvernement ne voit pas de possibilité de modifier ce principe.

d) Autres droits civils

i) Droit de circuler librement et de choisir sa résidence à l’intérieur d’un État

82.En vertu de l’article 34 de la Constitution, toute personne résidant légalement en Estonie a le droit de circuler librement et de choisir sa résidence. Le droit de circuler librement peut être soumis à des restrictions dans les cas et selon les procédures prévues par la loi pour protéger les droits et libertés d’autrui, dans l’intérêt de la défense nationale, en cas de calamité ou de catastrophe, pour empêcher la propagation d’une maladie infectieuse, protéger l’environnement naturel, éviter le départ sans surveillance d’un mineur ou d’une personne déficiente mentale, ou pour assurer le déroulement d’une procédure pénale. Il n’y a pas d’autres restrictions au droit de circuler librement.

83.L’entrée et le séjour des étrangers en Estonie, ainsi que leurs conditions de vie et de travail en Estonie et leur responsabilité juridique sont régis par la loi sur les étrangers. Les modalités relatives à la présence en Estonie des citoyens d’un État membre de l’Union européenne ou de l’Espace économique européen ou des citoyens de la Confédération helvétique et des membres de leur famille sont régies par la loi sur les citoyens de l’Union européenne. Les étrangers séjournant en Estonie ont les mêmes droits et libertés que les citoyens estoniens, sauf en vertu de dispositions contraires énoncées dans les lois ou dans les traités internationaux signés par l’Estonie. En vertu de la loi, les étrangers ont les droits découlant des normes généralement admises du droit international et des coutumes internationales.

84.Le Comité a demandé à l’Estonie de lui communiquer dans son prochain rapport périodique des renseignements sur le regroupement familial. Il convient de noter que des changements ont été apportés à cet égard à la pratique ainsi qu’à la réglementation juridique depuis la présentation du rapport précédent.

85.La protection de la vie familiale est énoncée dans deux articles de la Constitution. La première phrase de l’article 26 stipule que toute personne a droit à l’inviolabilité de sa vie familiale et privée; la première phrase de l’article 27 confirme que la famille, étant essentielle à la préservation et l’essor de la nation, et comme fondement de la société, est protégée par l’État. Cette disposition donne à chacun le droit de présumer que les organismes de l’État, les collectivités locales et leurs fonctionnaires ne s’ingèrent pas dans la vie privée et familiale des individus sauf aux fins précisées dans la Constitution. La première phrase de l’article 27 concerne la protection extérieure de la famille et donne aux individus le droit de bénéficier de mesures concrètes de l’État susceptibles de les aider à profiter pleinement de leur vie familiale. L’État est également tenu de garantir le droit des étrangers de jouir pleinement de leur vie familiale en Estonie, mais ce droit n’est pas illimité.

86.Un permis de séjour temporaire peut être délivré à un étranger afin de lui permettre de rejoindre son conjoint, qui est un citoyen estonien résidant en Estonie de manière permanente ou un étranger ayant résidé en Estonie pendant au moins cinq ans au titre d’un permis de séjour permanent, si les conjoints partagent des liens économiques étroits et une relation psychologique, si la famille est stable et le mariage n’est pas fictif, et si la demande de permis de séjour est justifiée.

87.L’article 6 1) de la loi sur les étrangers prévoit que le Gouvernement doit établir un quota annuel d’immigration qui ne doit pas dépasser 0,05 % de la population permanente de l’Estonie. Néanmoins, il y a des personnes qui ont le droit de s’établir en Estonie en dehors du quota d’immigration ou à l’égard desquelles le quota d’immigration n’est pas applicable. Faisant référence aux principes d’égalité et de protection de la vie familiale, la Cour suprême a déclaré inconstitutionnelles plusieurs décisions de refuser l’octroi du permis de séjour lorsque le seul motif évoqué pour le justifier était que le quota d’immigration avait été atteint. À la lumière des décisions de la Cour, le Parlement a adopté, le 12 juin 2002, les amendements de la loi sur les étrangers élargissant l’éventail des personnes auxquelles le quota d’immigration n’est pas applicable. Le quota d’immigration ne s’applique pas au conjoint d’un citoyen estonien ou d’un résident étranger titulaire d’un permis de séjour, ni à l’enfant mineur ou adulte, au parent, au grand‑parent ou au pupille d’un citoyen estonien ou d’un résident étranger titulaire d’un permis de séjour. Cet amendement est entré en vigueur le 1er octobre 2002.

88.Dans sa décision no 3‑4‑1‑2‑01, la chambre de contrôle de légalité de la Cour suprême a déclaré inconstitutionnels la clause 10 de l’article 12 4) et l’article 12 5) de la loi sur les étrangers, parce que ces dispositions ne permettaient pas de prendre en considération le comportement d’un étranger ayant résidé longuement dans le pays alors que cette durée permet d’estimer si cet étranger constitue une menace pour la sécurité nationale, la durée de son séjour permanent, les conséquences d’une expulsion pour les membres de sa famille, et les relations de l’immigré et des membres de sa famille avec leur pays d’origine.

89.Dans le cadre de la préparation de ce rapport, le Centre d’information juridique sur les droits de l’homme a fait remarquer que les dispositions de la loi sur les étrangers relatives au quota d’immigration pourraient constituer une discrimination cachée à l’encontre des non‑citoyens fondée sur leur nationalité ethnique. Étant donné que la loi sur les étrangers a été modifiée à plusieurs reprises dans ce contexte et que le quota d’immigration ne s’applique pas à plusieurs catégories de personnes, notamment au conjoint et aux enfants de moins de 15 ans des résidents étrangers titulaires d’un permis de séjour, le problème soulevé par le Centre d’information juridique ne devrait plus vraiment être d’actualité. Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale a également relevé comme un aspect positif le fait que le quota d’immigration ne s’applique pas à ces catégories de personnes.

90.En 2002, l’Estonie a répondu favorablement à 1 919 demandes en vertu des articles 12 3) et 12 4) de la loi sur les étrangers, relatifs à la réunification familiale. En 2003, 2 383 permis ont été délivrés, et 606 durant les 10 premiers mois de 2004. Au cours de la période 2002‑2004, 7 458 permis de séjour temporaires ont été délivrés à des étrangers dont la demande de permis était fondée sur les dispositions d’un traité international. Comme il n’existe pas de statistiques distinctes indiquant combien de demandes fondées sur un traité international avaient pour motif le regroupement familial, cette information ne peut pas être fournie dans le présent rapport.

91.En outre, il convient de noter que l’amendement de la loi sur les étrangers, entré en vigueur le 16 janvier 2004, visait à éclaircir le régime juridique d’octroi des permis de séjour au personnel retraité des forces armées de la Fédération de Russie et aux membres de leur famille. L’amendement prévoyait la possibilité de délivrer un permis de séjour temporaire aux membres du personnel militaire retraités ainsi qu’à leur conjoint et à leurs enfants mineurs, et de le prolonger s’ils ne constituent pas une menace pour la sécurité nationale estonienne.

92.La situation des réfugiés en Estonie est régie par la loi sur les réfugiés. Les étrangers qui ont une crainte fondée de persécution dans leur pays de nationalité ou de résidence permanente pour des raisons raciales, religieuses, de nationalité ou d’appartenance à un groupe social ou d’opinion politique particulier ont le droit de déposer une demande d’asile. Les étrangers peuvent également faire une demande d’asile au motif que leur retour ou leur expulsion risquerait d’entraîner les conséquences énumérées à l’article 3 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ou à l’article 3 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, ou l’application de la peine de mort dans leur pays d’origine ou de résidence permanente. À la demande d’un réfugié, l’asile peut être également accordé au conjoint ou à l’enfant mineur du réfugié, si celui‑ci réside hors d’Estonie et répond à la définition du réfugié figurant dans la Convention et le Protocole.

93.Depuis la présentation du précédent rapport, quelques modifications ont été apportées à la loi sur les réfugiés. Ces modifications étaient dues à la nécessité de réviser et préciser les dispositions de cette loi, de réglementer de façon plus détaillée les questions liées à l’accueil des demandeurs d’asile et de garantir le traitement rapide des demandes d’asile. La loi a été révisée de façon à ce que les autorités chargées de traiter les demandes d’asile soient habilitées à prendre la décision d’octroyer ou de refuser l’asile ou d’y mettre fin. Le but était également d’accélérer les procédures de manière plus générale.

94.Dans la précédente loi sur les réfugiés, la réglementation concernant plusieurs questions importantes était insuffisante ou il existait des contradictions entre certaines dispositions. Il n’existait pas non plus de procédure uniforme pour la conduite de l’entretien initial et l’approbation de la demande d’asile pour ce qui est de la suite de démarches à accomplir dans le cadre de la procédure accélérée ou ordinaire. Il n’était pas non plus clairement stipulé qui était habilité à prendre la décision de mettre fin au statut de réfugié. Les conditions de séjour des demandeurs d’asile en Estonie et les conditions de séjour dans les centres d’accueil n’étaient pas réglementées. La nouvelle loi sur les réfugiés a remédié à ces lacunes et la loi mentionne les concepts de pays sûr et de pays de résidence permanente qui sont utilisés dans la législation des États membres de l’Union européenne et qui constituent des critères clairs pour l’application de la procédure accélérée. La nouvelle loi prévoit par ailleurs que, durant la procédure accélérée, le demandeur peut quitter le poste frontière s’il a besoin de soins médicaux urgents. La version précédente de la loi ne prévoyait pas cette possibilité et n’était pas conforme aux principes d’humanité communément admis.

95.Entre 1997 et 2004, 94 demandes d’asile ont été présentées à la République d’Estonie et quatre d’entre elles ont été acceptées. Une protection subsidiaire a été accordée à neuf étrangers qui n’étaient pas des réfugiés au sens de la Convention mais pour lesquels il y avait des raisons fondées de croire que leur retour ou leur expulsion risquait d’entraîner les conséquences mentionnées à l’article 3 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ou à l’article 3 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, ou l’application de la peine de mort dans leur pays d’origine ou de résidence permanente. En outre, 12 permis de séjour ont été accordés au motif des liens familiaux que ces demandeurs d’asile avaient noués durant le traitement de leur demande en Estonie. La proportion totale de réponses positives est de 35 % des demandes, ce qui correspond quantitativement à la moyenne européenne.

96.La Commission de la citoyenneté et de l’immigration coopère activement avec plusieurs organisations internationales qui appuient ses activités principales. La Commission participe aux travaux des groupes de travail du Conseil de l’Europe et coopère étroitement avec l’Organisation internationale pour les migrations, et le Haut‑Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés. La Commission entretient depuis longtemps des relations avec des institutions de nombreux pays dont les compétences incluent la mise en œuvre de politiques relatives aux migrations et à l’asile. La Commission participe également aux travaux des organismes internationaux et régionaux de coopération et collabore avec les institutions responsables des questions relatives à l’asile et aux migrations dans d’autres pays. Dans le cadre du programme d’intégration, la Fondation pour l’intégration organise des cours de formation des professeurs portant sur le travail avec les réfugiés dans les établissements d’enseignement général. L’objectif principal de la formation est d’accueillir dans le cadre scolaire des enfants provenant d’un environnement culturel et linguistique différent et de les intégrer à la société.

iii) Droit à une nationalité

97.Dans ses observations finales, le Comité s’est dit préoccupé par le très grand nombre d’apatrides résidant en Estonie.

98.L’acquisition et la perte de la citoyenneté sont régies par la loi sur la citoyenneté. Les dispositions pertinentes du texte de loi ont été examinées de manière plus détaillée aux paragraphes 198 à 205 du cinquième rapport de l’Estonie. Toutefois, depuis la présentation du précédent rapport, la loi sur la citoyenneté a été modifiée, dans le but, en particulier, de réduire la bureaucratie et de raccourcir les procédures de demande de naturalisation.

99.Le 1er mars 2003 est entré en vigueur l’amendement de la loi sur la citoyenneté, qui visait en partie à résoudre les problèmes de citoyenneté qui se posent lorsqu’un enfant mineur étranger est adopté par un citoyen estonien. Cet amendement prévoit que, sur la demande écrite d’un parent adoptif qui est citoyen estonien, l’autorité gouvernementale habilitée pourra décider que l’enfant étranger mineur a acquis la citoyenneté estonienne par la naissance, si le parent adoptif était citoyen estonien au moment de la naissance de l’enfant et si celui‑ci n’a pas la nationalité d’un autre État ou s’il est prouvé qu’il perdra la nationalité de cet État en raison de l’acquisition de la citoyenneté estonienne. Dans la version précédente de la loi, les enfants étrangers adoptés ne pouvaient acquérir la citoyenneté estonienne que par la naturalisation.

100.L’aide fournie par l’État à l’apprentissage de l’estonien a augmenté à partir du 1er janvier 2004. Aux termes de la version de la loi sur la citoyenneté entrée en vigueur le 1er janvier 2004, l’État remboursera la moitié du coût de leurs cours de langues aux personnes qui auront réussi à l’examen de compétences linguistiques et à l’examen de connaissance de la Constitution et de la loi sur la citoyenneté. À l’issue du programme PHARE, le 31 décembre 2005, l’État remboursera 100 % du coût de leurs cours de langues aux personnes qui auront réussi aux examens.

101.Le 20 mars 2004, l’amendement de la loi sur la citoyenneté, réduisant la durée des procédures de demande de naturalisation, est entré en vigueur. En vertu des dispositions précédentes, une personne souhaitant acquérir la citoyenneté estonienne devait, un an après l’enregistrement de sa demande de naturalisation estonienne, envoyer une confirmation écrite à l’autorité gouvernementale habilitée par le Gouvernement de la République qu’elle souhaitait toujours acquérir la citoyenneté estonienne. Suite à l’amendement, le délai de confirmation après l’enregistrement de la demande de naturalisation a été réduit à six mois. L’autorité gouvernementale habilitée soumettra au Gouvernement de la République les documents du requérant ainsi que sa proposition motivée concernant la décision d’octroyer la citoyenneté estonienne dans un délai de trois mois, au lieu des six mois prévus précédemment.

102.En plus de ces dispositions juridiques, les autorités estoniennes ont également prévu un certain nombre de mesures visant à améliorer les possibilités et la motivation des personnes souhaitant demander la citoyenneté estonienne. Des mesures actives ont été prises pour expliquer les possibilités et la nécessité d’acquérir la citoyenneté estonienne aux personnes qui, pour diverses raisons, ne l’ont pas encore demandée. Par exemple, le secrétariat du Ministre de la population a conclu des accords avec les organisations représentant les minorités nationales en vue de diffuser des informations sur les possibilités de demander la citoyenneté. Par ailleurs, les employeurs ont commencé, en coopération avec les organismes de l’État, à informer leurs employés des questions relatives aux demandes de naturalisation.

103.Dans le cadre du programme de transition (Transition Facility programme), le projet «Aide à l’intégration des apatrides» sera lancé en 2005 avec l’appui financier de l’Union européenne. Le projet vise à augmenter la proportion d’apatrides qui demandent la citoyenneté estonienne. Dans ce cadre, on a mis en place des projets destinés à préparer les adultes et les élèves à l’examen nécessaire pour obtenir la naturalisation, à produire et diffuser du matériel d’information visant à promouvoir la valeur de citoyenneté et à sensibiliser à la possibilité de demander la citoyenneté, et à créer un réseau entre les formateurs, les organismes des collectivités locales et les organisations non gouvernementales.

104.La diffusion dans la population d’informations détaillées sur les possibilités d’acquérir la citoyenneté s’est avérée justifiée car le nombre de personnes ayant fait une demande de naturalisation a quelque peu augmenté. Entre 1992 et octobre 2004, 129 404 personnes, dont 26 568 mineurs, ont acquis la citoyenneté par naturalisation. Au début de novembre 2004, il y avait encore en Estonie 155 820 personnes sans nationalité déterminée. Au cours des 10 premiers mois de 2004, 5 747 demandes de naturalisation ont été enregistrées, alors qu’en 2003, 3 916 demandes avaient été enregistrées pendant la même période.

105.Le Comité s’est félicité de ce que la procédure de naturalisation ait été simplifiée pour les enfants et les handicapés. Depuis la présentation du précédent rapport, la Cour suprême a rendu une décision relative à la naturalisation des handicapés. Le 10 décembre 2003, la Cour suprême réunie en formation plénière, dans sa décision no 3‑3‑1‑47‑03, a invalidé la clause 2 de l’article 35 2) de la loi sur la citoyenneté, car elle ne permettait pas d’exempter de l’examen d’aptitude linguistique requise pour la naturalisation des personnes qui, en raison d’un handicap, n’étaient pas en mesure de satisfaire à cette condition. La Cour suprême réunie en formation plénière a également déclaré inconstitutionnel l’article 35 4) de la loi sur la citoyenneté car il exigeait que, pour être exemptée de l’examen de l’aptitude linguistique requise pour la naturalisation, la personne qui, en raison d’une déficience auditive, ne pouvait pas satisfaire à cette condition devait avoir un handicap au moins modéré et que l’existence de ce handicap devait être établie par le comité d’évaluation médicale, conformément à la procédure prévue par la loi sur les pensions de l’État. L’affaire était fondée sur une plainte de V. Fedzhenko, qui avait déclaré qu’en raison d’une déficience auditive il était incapable d’apprendre l’estonien et de satisfaire aux conditions de naturalisation. Les juridictions de rang inférieur ont rejeté la plainte de M. Fedzhenko, mais la Cour suprême l’a autorisé à faire appel et a estimé qu’une personne atteinte de déficience auditive devait être exemptée de l’examen de l’aptitude linguistique requise pour la naturalisation, quelle que soit la gravité de son handicap.

106.Le Comité a également souhaité que l’on apporte une solution au problème de la naturalisation des enfants nés en Estonie de parents résidant en Estonie de longue date et dont le statut juridique est encore indéterminé. À cet égard, il semble utile de présenter une vue d’ensemble de la procédure de naturalisation prévue pour les enfants mineurs.

107.Selon la loi sur la citoyenneté, l’enfant acquiert la citoyenneté estonienne par naissance si au moins l’un de ses parents est Estonien au moment de sa naissance. Comme cela a été indiqué dans le cinquième rapport périodique de l’Estonie, la loi sur la citoyenneté a été modifiée en 2000 de façon à permettre à un enfant né après 1992 et dont les parents ne sont citoyens d’aucun pays d’acquérir la citoyenneté au moyen d’une procédure simplifiée, sur demande de ses parents. En 2004, le délai fixé pour les procédures de naturalisation a été raccourci et, depuis mai 2004, le délai fixé pour le traitement des demandes est de même de trois mois au lieu des six mois prévus précédemment en ce qui concerne les enfants.

108.La naturalisation des enfants mineurs ne pose donc pas de difficultés particulières et la procédure est simple, ce que confirme la tendance positive indiquant que la proportion d’enfants parmi les personnes naturalisées a sensiblement augmenté. La proportion d’enfants de moins de 15 ans était de 10 % en 1996, contre 50 % en 2004. Au cours des 10 premiers mois de 2004, 2 451 demandes de naturalisation d’enfants de moins de 15 ans ont été reçues, soit une augmentation de 46 % par rapport à 2003. Quatre mille neuf cent quatre-vingt-quatre enfants nés après 1992 de parents apatrides résidant en Estonie ont été naturalisés, ce qui représente 18,75 % du nombre total d’enfants.

109.Dans le cadre du projet susmentionné d’«Aide à l’intégration des apatrides», on prévoit de produire et de diffuser des brochures d’information expliquant aux apatrides leur droit de demander la citoyenneté estonienne pour leurs enfants. Ces brochures seront notamment distribuées dans les lieux d’enregistrement des naissances. Ce projet est mis en œuvre par la Fondation pour l’intégration.

110.Actuellement, près de la moitié des personnes demandant la naturalisation sont des enfants, et il n’existe quasiment aucun cas dans lequel une demande de naturalisation concernant un enfant ait été rejetée. Le nombre d’enfants apatrides diminue donc rapidement.

111.Le Comité s’est également dit préoccupé par le fait qu’il existe un décalage entre le nombre de personnes ayant réussi à l’examen d’aptitude linguistique et le nombre de personnes ayant présenté une demande de naturalisation et obtenu la citoyenneté. Le Centre juridique pour les droits de l’homme a également mentionné ce fait durant la préparation du présent rapport.

112.En 2003, 6 165 personnes se sont présentées à l’examen d’aptitude linguistique de base nécessaire pour acquérir la citoyenneté, et 5 026 personnes (77 %) ont réussi à cet examen avec une note d’au moins 60 points. La même année, 3 706 personnes ont acquis la citoyenneté par naturalisation, y compris 1 895 enfants de moins de 15 ans. Le nombre de personnes qui se présentent à l’examen d’aptitude linguistique est donc supérieur à celui des postulants à la naturalisation. Cela peut s’expliquer par plusieurs facteurs. Depuis que l’examen d’aptitude linguistique à pratiquer l’estonien des personnes demandant la naturalisation et l’examen général d’aptitude linguistique ont été regroupés en 2000, il n’est plus possible de déterminer pour quelle raison une personne s’est présentée à l’examen. En vertu de la loi sur les langues, il est nécessaire d’avoir une certaine maîtrise de la langue nationale pour pouvoir occuper certains postes. Cela signifie que se présentent également aux examens d’aptitude à pratiquer la langue nationale un grand nombre de personnes qui, pour diverses raisons, n’ont pas l’intention de demander la citoyenneté estonienne. La raison peut en être, par exemple, qu’elles ont déjà la citoyenneté estonienne mais que, ayant acquis cette citoyenneté à la naissance ou pendant leur enfance, elles n’avaient aucune raison de se présenter à l’examen d’aptitude linguistique auparavant. Selon les renseignements fournis par le Centre national des examens et qualifications, un bon nombre des personnes qui se présentent à l’examen d’aptitude linguistique sont également des ressortissants d’autres pays qui souhaitent étudier ou travailler en Estonie et veulent donc recevoir un certificat d’aptitude à parler l’estonien. Le Centre national des examens n’établit pas de statistiques exactes sur les raisons pour lesquelles les candidats se présentent à l’examen ou sur la citoyenneté de ces personnes.

113.Cela étant, le Gouvernement s’est toujours efforcé de favoriser l’intégration des non‑Estoniens à la vie sociale, politique et économique du pays, tout en considérant la réduction du nombre d’apatrides et l’augmentation du nombre de citoyens estoniens comme un objectif important. En mai 2004, le Gouvernement a approuvé les plans d’action du Programme d’intégration pour 2004‑2007. Un des objectifs de ces plans d’action est d’accueillir au moins 5 000 nouveaux citoyens par naturalisation chaque année. Il est particulièrement important d’améliorer les conditions dans lesquelles les écoliers peuvent demander et acquérir la citoyenneté. On peut par exemple mentionner l’initiative du Centre national des examens et des qualifications visant à organiser les examens sur la connaissance de la Constitution et de la loi sur la citoyenneté ainsi que les consultations avant les examens effectuées sur place, dans les écoles.

114.Le modèle de l’examen pour obtenir la nationalité a également été modifié. Le 14 janvier 2002, le Gouvernement a adopté la directive no 14 relative à «la procédure applicable à la conduite de l’examen sur la Constitution estonienne et la loi sur la citoyenneté ouvert aux postulants à la naturalisation». Cette directive établit une nouvelle procédure d’examen des connaissances des postulants à la naturalisation relatives à la Constitution estonienne et à la loi sur la citoyenneté. Depuis le remaniement de l’examen, les questions ont été modifiées et le pourcentage de réponses correctes nécessaire pour réussir a été réduit. Concernant le choix des nouvelles questions, on a jugé important qu’elles reflètent le caractère démocratique de la Constitution estonienne, aient un caractère positif, reflètent les principes d’état de droit, de liberté et d’égalité, qu’elles mettent l’accent sur la nature de l’État, traitent de ce qu’on appelle les situations typiques, et soient utiles pour la vie quotidienne d’un citoyen estonien.

115.Dans ses observations finales, le Comité a constaté avec préoccupation que des obstacles empêchent les militaires de l’ex‑Union soviétique résidant en Estonie d’acquérir la nationalité estonienne.

116.En ce qui concerne la question des militaires retraités, il convient de se reporter brièvement à la décision du Comité des droits de l’homme, en date du 26 juillet 2004, concernant la plainte de Vyatcheslav Borzov (CCPR/C/81/D/1136/2002).

117.Officier militaire à la retraite, V. Borzov a adressé au Comité des droits de l’homme, le 2 novembre 2001, une plainte dans laquelle il estimait que le refus de l’État de lui accorder la citoyenneté estonienne avait constitué une discrimination envers lui fondée sur son origine sociale, ce qui était contraire à l’article 26 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Le plaignant a affirmé que l’article 21 1) de la loi sur la nationalité imposait une restriction injustifiable et déraisonnable aux droits de la personne, fondée sur l’origine ou la situation sociale. Le Comité des droits de l’homme a adopté sa décision relative à cette plainte le 26 juillet 2004, concluant qu’il ne pouvait constater aucune violation de l’article 26 du Pacte.

118.Le Comité a noté que, en l’espèce, l’État partie avait conclu que l’octroi de la nationalité à l’auteur poserait de manière générale des problèmes de sécurité nationale, compte tenu de la durée et du niveau de la formation militaire de l’auteur, de son grade et de ses années de service dans les forces armées de ce qui était alors l’URSS. L’auteur possède aussi un permis de séjour délivré par l’État partie et il continue de percevoir sa pension tout en vivant en Estonie. Le Comité a également constaté que la non‑obtention de la citoyenneté estonienne aurait une incidence sur la jouissance par l’auteur de certains droits garantis par le Pacte, notamment au titre de l’article 25, mais il a relevé que ni le Pacte ni le droit international en général n’énonçaient des critères spécifiques pour l’octroi de la nationalité par la naturalisation, et que l’auteur avait eu effectivement le droit de faire réexaminer par les juridictions de l’État partie le rejet de sa demande de nationalité. Le Comité a conclu que l’auteur n’avait pas démontré que la décision prise par l’État partie à son égard n’était pas fondée sur des motifs raisonnables et objectifs.

iv) Droit de se marier et de choisir son conjoint

v) Droit de toute personne, aussi bien seule qu’en association, à la propriété

vi) Droit d’hériter

119.Aucun changement notable n’a été apporté à la législation estonienne concernant ces droits. Les principaux textes juridiques régissant ces questions et la pratique qui s’y rapporte ont été commentés dans la section du précédent rapport consacrée à l’article 5.

vii) Droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion

120.La liberté de religion en Estonie est garantie par la Constitution, la loi sur les Églises et les congrégations, et d’autres textes législatifs. Les principaux textes juridiques régissant ces questions et la pratique qui s’y rapporte ont été commentés dans la section du précédent rapport consacrée à l’article 5.

121.La nouvelle loi sur les Églises et les congrégations est entrée en vigueur le 1er juillet 2002. Elle a pour objet de définir le fondement juridique des activités des Églises, des congrégations, des associations de congrégations, des monastères et des sociétés religieuses. Le changement le plus important sur le fond par rapport à la loi de 1993 est l’introduction du principe selon lequel le registre des Églises est tenu par les tribunaux, comme les autres registres. En rédigeant cette loi, le législateur a pris en considération les articles de la Constitution définissant la liberté de religion, ainsi que la loi sur les associations sans but lucratif et la loi sur la protection des enfants. Il a également tenu compte du fonctionnement pratique de la précédente loi sur les Églises et les congrégations.

122.Aucun changement fondamental n’a été apporté en ce qui concerne la liberté de religion des particuliers. Contrairement à la loi de 1993, qui prévoyait que les enfants de moins de 12 ans ne pouvaient appartenir qu’à la même congrégation que leurs parents, la loi de 2002, pour mieux garantir la liberté de religion des enfants, prévoit que les enfants de moins de 15 ans peuvent également appartenir à une autre congrégation avec la permission d’un parent ou tuteur.

123.Le 17 avril, le Ministère de l’intérieur a enregistré l’Église orthodoxe estonienne du Patriarcat de Moscou et les statuts de ses trois congrégations, à la suite de quoi cette Église a acquis le statut de personne morale. À la date du 1er juillet 2002, chacune des 31 congrégations de l’Église était inscrite au registre. L’enregistrement avait été retardé principalement par des différends qui ont été résolus par la négociation, et l’enregistrement de l’Église a mis fin à la situation précédente dans laquelle une grande communauté religieuse d’Estonie était dépourvue de bases juridiques.

124.Le 1er octobre 2002, le Gouvernement a approuvé le protocole d’intentions de la République d’Estonie et de l’Église orthodoxe estonienne, et le projet de protocole d’intentions relatif à l’organisation des relations de propriété entre la République d’Estonie et l’Église orthodoxe estonienne du Patriarcat de Moscou. Le 4 octobre 2002, les protocoles susmentionnés ont été signés par le Ministre de l’intérieur et les Églises orthodoxes. L’État estonien a mis 18 églises et lieux de culte à la disposition de l’Église orthodoxe estonienne du Patriarcat de Moscou pour un bail de 50 ans. L’Église orthodoxe estonienne du Patriarcat de Moscou a donc obtenu le droit de disposer de tous les bâtiments qu’elle avait demandés. Conformément au protocole d’intentions conclu avec l’Église orthodoxe d’Estonie, l’Église orthodoxe de Moscou a donné gratuitement à l’État les églises et lieux de culte dont elle avait l’usage de fait et de destination. Selon le protocole, l’État prendra à sa charge les coûts de la rénovation de 28 églises et autres lieux sacrés de l’Église orthodoxe d’Estonie pour un montant de 35,5 millions de couronnes.

125.Le 24 novembre 2002, l’Église orthodoxe estonienne du Patriarcat de Moscou est également devenue membre du Conseil estonien des Églises. Le Conseil estonien des Églises est une association indépendante et bénévole d’Églises et de congrégations chrétiennes. Les membres du Conseil des Églises sont notamment l’Église luthérienne évangélique d’Estonie, l’Union des Chrétiens et Baptistes évangéliques d’Estonie, l’Église méthodiste estonienne, l’Administration apostolique estonienne de l’Église catholique romaine, l’Église chrétienne pentecôtiste estonienne, la Conférence estonienne de l’Église adventiste du septième jour, la Congrégation estonienne de Saint‑Grégoire de l’Église apostolique arménienne, l’Église orthodoxe estonienne, l’Église orthodoxe estonienne du Patriarcat de Moscou et, avec le statut d’observateur, l’Église épiscopale charismatique d’Estonie.

126.Le Conseil estonien des Églises reçoit des subventions régulières prélevées sur le budget de l’État. Un montant de 3,9 millions de couronnes lui avait été alloué sur le budget de 2003 et de 5,1 millions sur celui de 2004. En 2003, le Gouvernement a alloué au Conseil un crédit additionnel de 1,3 million de couronnes au titre des coûts supplémentaires liés à l’adhésion de l’Église orthodoxe estonienne du Patriarcat de Moscou. Le Conseil estonien des Églises utilise l’argent alloué par l’État pour entretenir les lieux sacrés et les biens culturels qui y sont conservés, pour développer les activités éducatives des Églises et pour promouvoir une morale, une éthique, une éducation et une culture œcuméniques.

127.En 2001, des associations religieuses non chrétiennes ont créé, sous la direction de Maavalla Koda, la Table ronde d’associations religieuses. Les membres de la Table ronde, outre Maavalla Koda, sont la Congrégation bouddhiste estonienne du Centre Drikung Kagyu Ratna Shri, la Congrégation estonienne du bouddhisme tibétain Nyingma, la Congrégation islamique estonienne, la Congrégation conscience de Krishna de Tallinn et la Congrégation Baha de Tallinn. L’objectif de la Table ronde est de contribuer au développement de la tolérance religieuse et à la promotion de la liberté de religion en Estonie. Actuellement, la Table ronde d’associations religieuses n’est pas enregistrée en tant que personne morale.

128.Des tableaux fournissant des renseignements sur les Églises, les congrégations et les associations enregistrées en Estonie, ainsi que des informations séparées sur les congrégations des minorités nationales ont été présentés dans le précédent rapport, dans la section consacrée à l’article 5.

129.Les amendements à la loi sur la famille entrés en vigueur le 1er décembre 2001 prévoient que le Ministre de l’intérieur peut déléguer le droit de prononcer le mariage aux ministres du culte d’une Église, d’une congrégation ou d’une association de congrégations ayant reçu la formation adéquate. Le Ministère de l’intérieur, en coopération avec les services des statistiques de l’état civil et la Commission de la citoyenneté et de l’immigration, a organisé en 2001 un cours de formation destiné aux ministres du culte, et deux autres en 2002. Le quatrième cours de formation, consacré à la prononciation du mariage, s’est tenu le 30 septembre 2003. Au total, 134 ministres du culte enregistrés au Ministère de l’intérieur ont obtenu le droit de prononcer le mariage. Grâce à ces fonctions supplémentaires acceptées volontairement par les ministres du culte, les mariages civils et religieux sont maintenant prononcés conjointement et la procédure est devenue plus simple pour les futurs époux.

130.Les ministres du culte ayant reçu la formation appropriée doivent obtenir un certificat attestant de leur connaissance de la loi sur la famille et de leur aptitude à remplir les documents de mariage. Entre le 1er décembre 2003 et le 1er juin 2004, les ministres du culte ont prononcé 1 024 mariages: 12 mariages en décembre 2001, 465 en 2002, 470 en 2003, et 77 durant les cinq premiers mois de 2004.

viii) Droit à la liberté d’opinion et d’expression

131.La liberté d’expression est garantie en Estonie par l’article 45 de la Constitution, et le droit de recevoir des informations est garanti par l’article 44. Ces dispositions ainsi que d’autres dispositions qui s’y rapportent ont été décrites de manière détaillée dans le précédent rapport de l’Estonie.

132.La supervision de la presse est assurée par le Conseil de la presse estonienne, qui a été créé en 2002 par l’Association de la presse estonienne. Le Conseil de la presse est un organisme d’autoréglementation de la presse qui offre aux lecteurs la possibilité d’un règlement extrajudiciaire en cas de différend avec la presse. Le Conseil de la presse est un organisme largement établi qui comprend également des représentants de secteurs extérieurs à la presse. Il connaît des plaintes formulées par des lecteurs à propos d’articles publiés dans la presse écrite. Comparées à celles des tribunaux, les procédures du Conseil de la presse sont rapides et gratuites. Toute personne physique ou morale qui est mécontente d’un article publié à son sujet dans la presse peut s’adresser au Conseil de la presse.

133.À titre d’exemple, l’affaire suivante a été tranchée par le Conseil de la presse. Dans l’affaire concernée, la nationalité russe avait été évoquée de façon offensante dans la presse. En 2002, des membres du Parlement ont soumis au Conseil de la presse une plainte concernant des annonces publicitaires qui avaient été publiées dans le quotidien Eesti Päevaleht, accompagnées du slogan «Ei loe Päevalehte? Järelikult tibla» («Vous ne lisez pas le Päevaleht? Vous êtes donc sûrement un tibla!»). Selon les plaignants, le mot tibla est un terme péjoratif du langage courant utilisé par les Estoniens pour désigner une personne de nationalité russe. Cette expression était insultante et son utilisation dans une publicité constituait une incitation à la haine nationale. Le défendeur a expliqué qu’en utilisant le mot tibla il avait surtout voulu faire référence aux colons et aux personnes qui avaient exécuté des déportations. Le Conseil de la presse a estimé, dans son opinion, que le mot tibla était effectivement utilisé le plus souvent pour désigner l’«homo soveticus» (c’est‑à‑dire les Soviétiques), dont le comportement se caractérisait par le manque d’éducation et de culture et par des idées impérialistes. Toutefois, il y avait également dans la publicité considérée les mots: «Ole õige eestlane ja loe kindlasti» («Soyez un vrai Estonien, rejoignez nos lecteurs»), qui créaient une opposition fondée sur la nationalité. Dans ce contexte, le mot tibla établissait une distinction contrastée entre les Estoniens et les ressortissants d’autres nations, lesquels dans ce contexte pouvaient être perçus comme étant essentiellement des Russes (ou des Slaves de l’Est). Les communications publiques, y compris les annonces publicitaires, ne doivent insulter personne. Le Code d’éthique de la presse souligne qu’il n’est pas convenable de mettre l’accent sans raison sur la nationalité, la race ou la religion, et moins encore en termes péjoratifs. Par conséquent, le Conseil de la presse a conclu que cette publicité n’était pas conforme aux règles de bonne pratique.

ix) Droit à la liberté de réunion et d’association pacifiques

134.Les réunions publiques sont réglementées en Estonie par la loi sur les réunions publiques. L’objet de la loi est de garantir le droit des personnes de se rassembler et de tenir des réunions en respectant les droits, libertés, devoirs et principes fondamentaux d’un pays démocratique et d’un État de droit. La loi prévoit également de soumettre l’organisation et la tenue des réunions publiques à des restrictions qui sont nécessaires pour protéger la sécurité nationale, l’ordre public, la moralité publique, la sécurité de la circulation et celle des participants à une réunion, ou pour empêcher la propagation d’une maladie infectieuse.

135.La loi sur les réunions publiques interdit les réunions qui incitent à la haine, la violence ou la discrimination nationale, raciale, religieuse ou politique entre les groupes sociaux. Selon le Code pénal, l’organisation d’une réunion publique non autorisée, ou le fait d’inciter à la participation à une telle réunion, sont passibles d’une sanction pécuniaire ou d’une peine d’emprisonnement d’un an au plus (art. 265).

136.On peut citer en exemple la décision de la Cour suprême en date du 29 mai 2000, dans laquelle la Cour a annulé les décisions des juridictions de rang inférieur qui avaient condamné des personnes en application de l’article 76 1) du Code pénal pour avoir organisé une réunion publique illégale. Les défendeurs avaient été condamnés à payer une amende par lesdites juridictions. Ils étaient accusés d’avoir organisé cinq réunions illégales, car ils n’avaient pas obtenu de l’organisme gouvernemental local compétent l’autorisation d’organiser ces réunions publiques.

137.La chambre de droit pénal de la Cour suprême a estimé que, dans le cas considéré, la loi sur les réunions publiques avait été violée aussi bien par les responsables municipaux que par les défendeurs. La première infraction, qui était aussi la plus grave, avait été commise par les responsables de la municipalité, qui avaient tardé à répondre à la demande d’autorisation d’organiser une réunion. La Cour a constaté que les réunions avaient été paisibles, qu’elles n’entraient pas dans la catégorie des réunions interdites par la loi et qu’elles ne s’étaient pas déroulées dans un lieu prohibé par la loi. Leur illégalité tenait uniquement à ce qu’elles n’avaient pas été enregistrées. La Cour a estimé que malgré la présence d’éléments, formels, d’infraction pénale dans la conduite des défendeurs, l’application d’une sanction pénale contre ces actes serait disproportionnée et inutile dans une société démocratique.

e) Droits économiques, sociaux et culturels, notamment:

i) Droits au travail, au libre choix de son travail, à des conditions équitables et satisfaisantes de travail, etc.

138.Le droit au travail est garanti par la Constitution, qui dispose qu’un citoyen estonien a le droit de choisir librement son domaine d’activité, sa profession et son lieu de travail. Les citoyens d’États étrangers et les apatrides résidant en Estonie jouissent de ce droit dans des conditions d’égalité avec les citoyens estoniens, sauf disposition contraire de la loi. La loi sur les contrats de travail, la loi sur les services d’aide à l’emploi, la loi sur les salaires et autres textes réglementent l’interdiction de la discrimination de manière plus détaillée. Le précédent rapport périodique de l’Estonie donne un aperçu du contenu de ces lois.

139.Selon une enquête de 2003 sur la population active, 594 300 des personnes âgées de 15 à 74 ans avaient un emploi, 66 200 personnes étaient au chômage et 387 400 étaient inactives. Le chômage est relativement élevé dans l’ensemble de l’Estonie puisqu’en mai 2004 il touchait 10 % de la population en âge de travailler. La proportion de chômeurs de longue durée est en augmentation constante. Le chômage des jeunes, des personnes handicapées et des personnes n’ayant pas la nationalité estonienne est supérieur à la moyenne.

140.Le chômage présente des écarts considérables selon les régions. Le taux de chômage peut ainsi tripler d’un comté à l’autre, allant de 5 % dans le comté de Rapla à 18,2 % dans le comté d’Ida‑Viru. Outre le nord‑est de l’Estonie, tout au long de la période de transition le taux de chômage des comtés du sud‑est du pays a été supérieur à la moyenne estonienne.

141.Le taux de chômage est très élevé (16,8 %) parmi les non‑Estoniens qui ne parlent pas la langue estonienne. Souvent, l’incapacité de parler la langue officielle de l’État empêche également ces personnes de trouver un emploi loin de leur domicile. C’est pourquoi un grand nombre de personnes sans emploi restent dans le canton d’Ida‑Viru où le taux de chômage est l’un des plus élevés du pays depuis le début de la période de transition. Le taux élevé de chômage dans le nord‑est du pays est dû à la réorganisation de l’économie et du marché du travail pendant la période de transition, qui a causé la fermeture ou la restructuration d’entreprises publiques.

142.En Estonie, c’est le Ministère des affaires sociales qui élabore la politique de l’emploi. Ce ministère a pris des mesures nécessaires en matière de prestations de services d’aide à l’emploi afin qu’une attention particulière soit accordée aux régions où le chômage est plus important.

143.Entériné par le Gouvernement le 10 avril 2001, le programme d’emploi du comté d’Ida‑Viru a été conçu de telle façon que les moyens d’action économiques, sociaux et pédagogiques dont dispose l’État pour réduire le chômage soient mis en œuvre de façon intégrée. Le programme d’emploi a été élaboré sous la direction du Ministère de l’économie et des communications en coopération avec le Ministère des affaires sociales et le Ministère de l’éducation.

144.L’organe d’exécution chargé de la mise en œuvre des mesures adoptées par le Ministère de l’économie est l’agence de la Fondation Enterprise Estonia dans le comté d’Ida‑Viru. Conformément à l’accord conclu entre le Ministère de l’économie et la Fondation, 25 % des ressources consacrées à la promotion de l’entreprise seront affectées au comté d’Ida‑Viru. Des investissements par l’intermédiaire du programme PHARE et de programmes régionaux ainsi que d’autres mesures sont également prévus. Afin d’attirer des investissements, on a estimé nécessaire d’offrir des avantages supplémentaires − par la création d’infrastructures et la formation des employés − aux entreprises qui investissent dans la région. Au‑delà des initiatives menées auprès des investisseurs, le programme a également pour but de venir en aide aux petites entreprises locales, de moderniser le système de formation professionnelle, de mettre en place un système d’orientation professionnelle pour les jeunes et de fournir une formation complémentaire et une formation de reconversion aux personnes sans emploi.

145.Le principal organe chargé de la mise en œuvre de la politique de l’emploi en Estonie est le Conseil du marché du travail, qui administre 16 bureaux régionaux d’emploi. Les bureaux d’emploi fournissent des services concernant l’emploi, enregistrent les chômeurs et leur versent les allocations payées par l’État. Diverses mesures ont été adoptées ces dernières années afin d’accroître l’efficacité du système national pour l’emploi: de nouveaux consultants ont été embauchés par les bureaux d’embauche, et les capacités du service d’orientation professionnelle ont été augmentées. Le nouveau système d’information sur le marché de l’emploi a été lancé à la fin de 2002 et un système d’information librement accessible a été mis en place à la fin de 2003. En dépit de ces mesures, le nombre de demandeurs d’emploi enregistrés par chaque employé de bureau d’emploi est relativement élevé en Estonie (228) et la capacité de répondre à l’ensemble des personnes ayant besoin d’une orientation professionnelle est aussi insuffisante.

146.Afin d’augmenter le nombre d’emplois, les agences nationales de l’emploi mettent en œuvre des mesures actives d’aide à l’emploi au bénéfice des personnes qui cherchent du travail − préparation au marché du travail, aide sur le marché du travail à la création d’entreprises par les personnes sans emploi, et aide visant à inciter les employeurs à embaucher des personnes sans emploi peu compétitives. Seuls 14,1 % des demandeurs d’emploi enregistrés ont bénéficié de mesures actives d’aide à l’emploi en 2001. Selon les directives de l’Union européenne relatives à l’emploi, l’objectif est que 20 % au moins des personnes sans emploi puissent bénéficier de ces mesures. En 2000, les durées moyennes de la préparation au marché du travail et de la formation de reconversion ont été respectivement de 24,7 et de 41,5 jours. Selon une étude de 2001 sur la formation des adultes, 63 % des personnes qui avaient suivi une formation ont ensuite trouvé un emploi.

147.L’un des objectifs du programme d’intégration de l’État et de ses plans d’action pour 2004‑2007 est d’améliorer, parallèlement à la maîtrise de la langue nationale, la connaissance de la langue estonienne acquise à des fins professionnelles par les personnes sans emploi et les employés qui ne sont pas des ressortissants estoniens pour leur permettre de réussir leur intégration dans le marché du travail. À cette fin, un crédit de 3,4 millions de couronnes estoniennes est prévu pour 2004. Cette somme sera portée à 10 millions de couronnes estoniennes au cours des années suivantes.

148.Dans ses observations finales, le Comité s’est dit préoccupé par l’étendue des exigences en matière de compétences linguistiques fixées dans la loi sur les langues, en particulier dans le secteur privé, et a été d’avis qu’elles pourraient se traduire par une discrimination contre les minorités. Nous souhaiterions indiquer qu’en vertu de l’amendement à la loi sur les langues entré en vigueur le 1er juillet 2001, seules les questions d’intérêt public relèvent du champ d’application de la loi. Il en résulte qu’en dehors du domaine public (organismes publics nationaux et locaux, tribunaux, forces de défense nationale) l’usage de la langue estonienne n’est soumis à réglementation que si l’intérêt public le justifie.

149.Il faut entendre par intérêt public, aux fins de la loi sur les langues, la sécurité publique, l’ordre public, l’administration, la santé publique, la protection de la santé, la protection du consommateur ainsi que la sécurité au travail. La loi sur les langues dispose également que les règles concernant la connaissance et l’utilisation de l’estonien par les personnes employées dans les entreprises privées doivent être justifiées et proportionnées à l’objectif recherché, et ne doivent pas altérer les droits qu’elles tendent à restreindre. Il en résulte que la pratique de la langue dans la vie privée n’entre pas dans le champ d’application de la loi sur les langues et que c’est seulement dans l’intérêt public strictement défini que les exigences linguistiques peuvent être imposées aux entrepreneurs et aux employés des entreprises privées.

150.Dans ses observations finales, le Comité a également demandé des informations sur la situation des femmes sur le marché de l’emploi.

151.La situation des femmes sur le marché de l’emploi reste plus difficile que celle des hommes. Les femmes représentent approximativement les deux tiers des travailleurs à temps partiel; il existe une importante ségrégation horizontale et verticale entre les femmes et les hommes; le salaire moyen des femmes est inférieur d’environ 25 % à celui des hommes.

152.La loi sur les salaires garantit le droit à une rémunération égale et interdit la discrimination fondée sur le sexe en matière de salaires. Toutefois, le taux relativement élevé du chômage a contraint les femmes à chercher du travail dans le secteur informel où leurs salaires sont bas et où elles n’ont pas de protection sociale. Afin de remédier à cette situation, une série de mesures telles que des visites conjointes et des visites de suivi de l’Inspection du travail et d’autres organismes ont notamment été adoptées. En outre, des plans d’action en faveur de l’emploi pour 2001‑2003 ont été établis en vue d’intégrer l’égalité entre les femmes et les hommes dans le domaine de l’emploi et des mesures de formation professionnelle, de soutenir la création d’emplois et d’assurer l’égalité des chances entre les femmes et les hommes.

153.À cet égard, l’une des priorités du Gouvernement dans le domaine de l’emploi est d’élaborer des politiques d’égalité des chances entre les femmes et les hommes. La loi sur l’égalité des sexes interdit la discrimination et exige que les organismes de l’État, des collectivités locales et des employeurs promeuvent l’égalité entre les femmes et les hommes. Cette législation constitue la base juridique sur laquelle l’État peut se fonder pour mener une action cohérente en vue de réduire les inégalités entre les sexes et promouvoir l’égalité.

154.Plusieurs activités de formation et séminaires ont été organisés afin de mieux sensibiliser les fonctionnaires de l’État et des collectivités locales et la population en général aux questions liées à la réduction des inégalités et à la promotion de l’égalité entre les sexes. Quatre manuels ont ainsi été publiés sur ce thème: l’«ABC des droits des femmes qui travaillent et égalité entre les sexes» et «La femme âgée et l’emploi» − qui doivent servir de documents de formation sur la lutte contre la discrimination fondée sur l’âge et favoriser l’intégration des femmes âgées à la vie active −, «Différentes mais égales» − qui explique les principales questions et notions de l’égalité entre les sexes − et «L’entreprenariat féminin en tant que possibilité création d’emplois et la coopération entre les associations de femmes et les collectivités locales pour la promotion de l’esprit d’entreprise des femmes».

155.Le Comité a également souhaité obtenir des informations sur le niveau des salaires des différents groupes ethniques. Or, étant donné que les données statistiques ne sont pas recueillies selon l’origine ethnique, il n’est pas possible de fournir une telle information au Comité. Les données relatives à la nationalité ethnique étant considérées comme des données personnelles sensibles, leur collecte est interdite par la loi. Les données relatives au niveau des salaires ne sont recueillies que par domaine d’activité.

ii) Droit de fonder des syndicats et de s’affilier à des syndicats

156.La création de syndicats et leurs activités sont régies par la loi sur les syndicats. Les personnes ont le droit de fonder librement des syndicats sans autorisation préalable et de s’affilier ou non aux syndicats. Il est interdit aux membres des forces armées en service actif de fonder des syndicats ou d’y adhérer. Les syndicats ont le droit de constituer des fédérations et des centrales et d’y adhérer afin de représenter les droits et les intérêts des salariés. Les syndicats ont le droit d’adhérer à des organisations internationales de salariés. Les questions relatives aux syndicats ont également été abordées par le précédent rapport de l’Estonie dans la section consacrée à l’article 5 de la Convention.

157.La grève organisée par le syndicat des conducteurs de locomotives en octobre 2004 est un exemple des activités des syndicats et de leur rôle dans la société. Dix mois de négociations infructueuses entre le syndicat des conducteurs de locomotives et la Compagnie estonienne des chemins de fer ont conduit à la grève des conducteurs de locomotives. Pour obtenir une convention collective qui garantisse des salaires plus justes et de meilleures conditions de travail, 23 syndicats ont décidé de soutenir les grévistes en faisant circuler une pétition écrite et en organisant des manifestations. La Confédération des syndicats estoniens a alors proposé à la Confédération des employeurs estoniens de créer une commission de conciliation en vue de régler le conflit du travail, les conducteurs de locomotives et la Compagnie des chemins de fer estonienne étant incapables de parvenir à un accord. Les négociations ont permis d’aboutir à un accord prévoyant des augmentations du salaire horaire des conducteurs de locomotives allant de 9 à 15 % en fonction de la nature du travail effectué.

iii) Droit au logement

158.Aucun changement important n’étant intervenu dans ce domaine depuis la présentation du précédent rapport périodique, le Comité est prié de se reporter aux informations relatives au sous‑paragraphe pertinent de l’article 5, présentées dans le précédent rapport.

iv) Droits à la santé, aux soins médicaux, à la sécurité sociale et aux services sociaux

159.L’assurance maladie et la sécurité sociale ont été présentées de manière détaillée dans le précédent rapport de l’Estonie. Depuis lors, aucun changement important n’est intervenu dans ces domaines.

160.Les prestations de sécurité sociale ne sont pas fonction de l’origine raciale ou de la nationalité ethnique. L’enregistrement des allocataires dans le système de pension ne tient pas compte de la race ou de la nationalité.

161.En 2002, un régime d’assurance chômage obligatoire régi par la loi sur l’assurance chômage a été mis en place. En 2002 a commencé le prélèvement de primes d’assurance chômage, dont le montant est fixé par la loi à 2 % du salaire et autres rémunérations. Le versement des prestations a débuté en 2003. En application de la loi sur l’assurance chômage, trois types de prestations sont payées: les prestations d’assurance maladie, des indemnités en cas de licenciement pour motifs économiques et des indemnités en cas d’insolvabilité de l’employeur.

162.Les prestations familiales sont versées aux résidents permanents en Estonie et aux étrangers résidant en Estonie au titre d’un permis de séjour temporaire. Les prestations familiales comprennent des indemnités pour enfant à charge, des allocations d’entretien, des prestations aux familles qui comptent trois enfants ou plus ou aux familles qui élèvent des triplés, des allocations de scolarité, des allocations monoparentales, etc.

163.Le 1er janvier 2004, la loi sur les prestations parentales est entrée en vigueur. Elle a pour but de compenser la perte de revenu subie par un parent du fait de la naissance et de la garde d’un enfant au cours de la première année de sa vie. Une prestation parentale d’un montant équivalent au taux général, qui était de 2 200 couronnes estoniennes par mois en 2004, est versée aux parents qui ne travaillent pas. Les prestations parentales sont versées aux résidents permanents en Estonie et aux étrangers résidant en Estonie au titre d’un permis de séjour temporaire.

v) Droit à l’éducation et à la formation professionnelle

164.Le droit à l’éducation est régi par la loi sur l’éducation, la loi sur l’enseignement primaire et sur l’enseignement secondaire du deuxième cycle, la loi sur les écoles professionnelles, la loi sur les établissements d’enseignement supérieur appliqué ainsi que la loi sur les universités.

165.Toute personne résidant en Estonie a le droit et le devoir d’atteindre le niveau obligatoire d’éducation. Chacun a un droit égal d’acquérir une formation secondaire, professionnelle, universitaire, et le droit de participer à des loisirs éducatifs. En vertu de la loi sur l’éducation, l’instruction est obligatoire pour les enfants d’âge scolaire. Les enfants des ressortissants étrangers et des apatrides résidant en Estonie sont également soumis à la scolarité obligatoire.

166.À l’heure actuelle, il est possible de faire ses études primaires, secondaires et professionnelles en estonien, en russe et en anglais (dans les écoles privées). Pendant l’année scolaire 2002/2003, l’Estonie comptait 636 écoles d’enseignement général de jour, dont 65 écoles maternelles, 52 écoles primaires, 279 écoles élémentaires, 240 écoles secondaires et écoles secondaires du deuxième cycle. Parmi ces établissements scolaires, 525 utilisaient l’estonien comme langue d’enseignement, 89 le russe et 21 l’estonien et le russe, et une école utilisait l’estonien et le finnois. Cinq cent soixante‑douze étaient des écoles municipales, 32 des écoles publiques et 32 des écoles privées. On dénombrait 45 écoles pour les enfants ayant des besoins particuliers.

167.À notre connaissance, aucune affaire de discrimination fondée sur la nationalité et la langue ne s’est produite dans les écoles estoniennes.

168.En vertu de la loi sur l’enseignement primaire et l’enseignement secondaire de deuxième cycle, toute langue peut être la langue d’enseignement dans les écoles élémentaires estoniennes. S’il s’agit d’une école municipale, la décision relève du conseil municipal sur proposition du conseil d’administration de l’école, et du Ministre de l’éducation et de la recherche s’il s’agit d’une école publique. Cela signifie que les parents d’élèves ont le droit, par l’intermédiaire du conseil d’administration, d’intervenir dans le choix de la langue d’enseignement de chaque école élémentaire. Il est également possible d’ouvrir des classes dont la langue d’enseignement n’est pas celle de l’ensemble de l’établissement.

169.En ce qui concerne l’enseignement supérieur, le Ministère de l’éducation et de la recherche a créé un système qui permet aux élèves des écoles secondaires de deuxième cycle dont la langue d’enseignement est le russe, ayant intégré un établissement d’enseignement supérieur, de prolonger d’un an la durée normale de leurs études. Les jeunes qui n’ont pas acquis une connaissance suffisante de la langue estonienne à l’école secondaire peuvent ainsi suivre des cours d’estonien au cours de leur première année universitaire, et peuvent par conséquent poursuivre leurs études dans un groupe où l’enseignement est dispensé en estonien. Même en pareil cas, ils peuvent, en accord avec le professeur, passer leurs examens et rédiger leurs travaux en russe.

170.En vertu de la loi, le passage à l’estonien comme langue d’enseignement des établissements publics et municipaux d’enseignement secondaire de deuxième cycle se fera au plus tard pendant l’année scolaire 2007/2008. À cet égard, il convient de noter que l’estonien sera la langue d’enseignement qui couvrira 60 % au moins du programme d’étude.

171.Le Centre d’information juridique sur les droits de l’homme a critiqué la réforme susmentionnée, dont l’objet est de faire de l’estonien la langue d’enseignement dans les écoles publiques et municipales d’enseignement secondaire de deuxième cycle, car elle risquait selon lui d’accroître le nombre des abandons scolaires parmi les jeunes de langue russe. Le Gouvernement partage l’avis selon lequel la transition devrait se faire selon un plan de mise en œuvre soigneusement étudié qui fixe des mesures nécessaires et réalistes pour le passage à l’estonien comme langue d’enseignement. Par conséquent, le programme d’étude et l’organisation de l’enseignement dans les écoles qui ont une langue d’enseignement autre que l’estonien doivent garantir à chaque élève qui achève sa scolarité élémentaire une connaissance de l’estonien suffisante pour lui permettre de poursuivre ses études dans cette langue.

172.Pour atteindre cet objectif, il convient de commencer d’y préparer les élèves de l’enseignement élémentaire. Des enquêtes pertinentes montrent que de plus en plus de parents russophones sont à la recherche de solutions qui permettent à leurs enfants de s’en sortir aussi bien dans les deux langues. Ces enquêtes ont montré que les parents préféreraient que l’enseignement soit partiellement en estonien et en russe. Dès lors, il est important de développer le programme d’immersion linguistique. Fondé sur la réussite du programme d’immersion linguistique précoce, un programme d’immersion linguistique tardive a ainsi été lancé en 2003.

173.Au cours de l’année scolaire 2000/2001, un programme d’immersion linguistique a été mis en œuvre dans quatre écoles ayant le russe comme langue d’enseignement, à Kohtla‑Järve, Narva et Tallinn. Au cours des années scolaires 2001/2002 et 2002/2003, ce programme a été mis en œuvre dans sept écoles d’enseignement en russe à Kohtla‑Järve, Maardu, Narva, Tallinn et Valga. En 2003, l’immersion linguistique précoce a été pratiquée dans sept écoles d’enseignement en russe et l’immersion linguistique tardive dans quatre autres écoles. À l’automne de 2004, l’immersion linguistique tardive a été étendue à 15 autres écoles. Dans 64 des 89 écoles où l’enseignement se fait en russe, certaines matières ont été enseignées en estonien. Par l’adoption d’une telle approche, les écoles ont respecté les vœux des parents ainsi que les objectifs fixés dans le programme national d’intégration et ont saisi les possibilités indiquées dans le plan de développement en vue de les atteindre.

174.Chaque année, différentes formules d’études linguistiques périscolaires sont financées dans le cadre du sous‑programme «Éducation» du programme national d’intégration. L’une des plus populaires est celle des camps d’étude de la langue estonienne et des séjours linguistiques dans les familles. D’une part, ce système représente pour les enfants une formule efficace d’apprentissage de la langue et, d’autre part, il offre à des enfants de nationalités différentes la possibilité de nouer des contacts et de découvrir leurs coutumes et leur culture respectives. En 2002, 60 camps et séjours linguistiques dans des familles ont été financés et 2 900 enfants en ont bénéficié.

Éducation aux droits de l’homme

175.Il est stipulé dans le programme national que les cours d’éducation civique doivent aider les enfants à devenir des membres responsables de la société, recherchant épanouissement personnel et attentionnés à l’égard d’autrui. L’un des objectifs de ces cours est de promouvoir des principes démocratiques tels que ceux de justice, d’égalité, de responsabilité, de liberté, de diversité et de tolérance.

176.La discrimination fait partie des sujets abordés dans le cadre des cours d’éducation civique et des programmes de sciences humaines. Des outils didactiques pertinents abordent également la question. Le milieu virtuel d’apprentissage MIKSIKE propose d’autres ouvrages didactiques portant sur la tolérance (www.miksike.ee). En outre, des traductions en russe et en estonien de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ont été distribuées dans les écoles.

177.Élaborée en 2003, la compilation intitulée Enseigner l’éducation civique contient également un cours facultatif sur les droits de l’homme destiné aux écoles élémentaires, ainsi que des textes relatifs aux droits de l’homme s’adressant aux écoles secondaires de deuxième cycle. Ces derniers donnent une présentation générale de la définition, de la nature, des sujets, des principaux instruments et de la protection des droits de l’homme.

178.À l’automne 2004, le Centre national des examens et des qualifications a mis en œuvre, en coopération avec la Fondation pour l’intégration, un projet intitulé «Améliorer les conditions de l’étude en russe de la Constitution estonienne dans les écoles d’enseignement général et dans les écoles secondaires d’enseignement général». Son objectif était de soutenir l’enseignement de la Constitution estonienne dans les écoles d’enseignement général en russe et dans les écoles de formation professionnelle dispensant un enseignement général secondaire, en mettant à leur disposition des documents supplémentaires qui expliquent la Constitution et en leur permettant de se former. Il s’agissait d’améliorer la qualité de l’enseignement de la Constitution et d’aiguiser la conscience sociale des élèves. Dans le cadre du projet, une publication en estonien et en russe (Aide à l’enseignement de la Constitution estonienne) spécifiquement prévue pour les écoles d’enseignement général a été éditée. En outre, les professeurs d’éducation civique de Tallinn et Narva ont pu suivre des cours de formation adaptés.

179.Divers ouvrages ont été publiés afin de mieux faire comprendre les droits de l’homme. En 2001, un guide intitulé Les droits de l’homme sur le plan international et leur protection et un guide sur les droits de l’homme et le droit humanitaire à l’intention de la police et des forces de sécurité intitulé Teenida ja kaitsta (Servir et protéger) ont également été publiés. En 2003, un ouvrage contenant des commentaires de la Convention européenne des droits de l’homme ainsi que la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme a été publié avec le soutien de la Fondation Open Estonia.

vi) Droit de prendre part dans des conditions d’égalité aux activités culturelles

180.Le droit de participer dans des conditions d’égalité aux activités culturelles est abordé de manière plus détaillée dans la partie du rapport consacrée à l’article 7.

f) Droit d’accès à tous lieux et services destinés à l’usage du public, tels que moyens de transport, hôtels, restaurants, cafés, spectacles et parcs

181.Ces droits ont été abordés de manière plus détaillée dans le précédent rapport et aucun changement important n’est intervenu en la matière depuis lors.

Article 6

182.La Constitution dispose que toute personne dont les droits et les libertés ont été violés a le droit d’intenter un recours devant les tribunaux. Toute personne a également droit à la réparation de préjudices moraux et matériels causés par l’action illégale de quiconque. La justice n’est administrée que par les tribunaux. Les tribunaux sont indépendants et administrent la justice conformément à la Constitution et aux lois.

183.Le droit des personnes d’intenter un recours devant les tribunaux, et les autres instances compétentes, et l’appareil judiciaire en général ont été abordés de manière plus détaillée dans la partie du précédent rapport consacrée à l’article 6 de la Convention. Les paragraphes suivants décrivent les principaux changements intervenus en la matière.

184.L’administration des tribunaux est régie par la loi sur les tribunaux adoptée le 19 juin 2002. Les contentieux civil et pénal ainsi que les infractions mineures relèvent de la compétence des tribunaux de comté et des tribunaux municipaux. Il y a actuellement en Estonie 16 tribunaux de comté et municipaux. Les tribunaux itinérants sont compétents pour juger en appel des décisions des tribunaux de comté, des tribunaux municipaux et des tribunaux administratifs. Il y a trois cours d’appel en Estonie.

185.En 2000, dans le cadre de la réforme des tribunaux administratifs, des tribunaux administratifs autonomes siégeant en première instance ont été institués. Ils sont compétents pour trancher les différends de droit public et autoriser les actes administratifs dans les cas prévus par la loi. Il y a quatre tribunaux administratifs en Estonie.

186.La nouvelle loi sur la procédure de contrôle de constitutionnalité adoptée le 13 mars 2002 régit la compétence, la saisine et la procédure de la Cour suprême en tant que juridiction chargée du contrôle de constitutionnalité.

187.En 2004, le Gouvernement a rédigé un projet de loi sur la fusion des compétences territoriales des tribunaux afin de répartir le volume de travail entre les différents tribunaux, d’accélérer les procédures dans les domaines problématiques et d’améliorer l’administration de la justice.

188.Le plan de fusion des compétences territoriales des tribunaux prévoit le regroupement des tribunaux municipaux et des tribunaux de comté existants en quatre districts − Nord, Sud, Viru et Ouest. Tous les tribunaux seront conservés et rebaptisés «palais de justice». Cette solution suit l’évolution subie par d’autres organes chargés de l’application des lois, à savoir que la réforme en vertu de laquelle quatre juridictions territoriales ont été instituées en Estonie a également été appliquée en 2004 à la police et au parquet. L’objectif de ces changements est d’accélérer les procédures de justice et de les assouplir au profit des justiciables en permettant une réaffectation des moyens au sein d’un tribunal selon la charge de travail. Si cette charge est inégale, les affaires peuvent être confiées à un juge auquel une charge de travail moins lourde a été attribuée.

189.Ces changements sont justifiés par l’important décalage qui existe actuellement entre le volume de travail des différents tribunaux − l’écart entre le nombre d’affaires d’un tribunal à un autre peut aller de 1 à 3 et la durée des procédures de 1 à 8. En 2003, la durée des procédures était de plus de 12 mois dans 7 % des affaires pénales. Au cours du premier semestre 2004, la durée des procédures était de plus de 18 mois dans 8 % des affaires civiles (et de plus de 18 mois dans 26 % des affaires traitées par le tribunal municipal de Narva), et de plus de deux mois dans 35 % des affaires administratives (39 % des affaires jugées à Tallinn).

190.Il est essentiel que le fusionnement des compétences territoriales opéré dans le cadre de la refonte de la carte juridictionnelle permette aux juges de se spécialiser dans un domaine donné (la délinquance juvénile, la violence familiale ou la délinquance économique, par exemple), ce qui aidera à équilibrer les jugements prononcés par les tribunaux et à en améliorer la qualité. Le nombre de décisions modifiées par les tribunaux itinérants d’appel est le signe de leur qualité inégale. En 2002, 68,1 % des décisions contestées des tribunaux municipaux ou des tribunaux de comté en matière pénale ont été confirmées par les tribunaux itinérants d’appel, contre 47,1 % seulement en matière civile.

Droit de recourir à d’autres juridictions

191.Le Chancelier de justice est l’une des institutions que peuvent saisir les citoyens lorsqu’ils ont été victimes d’une violation de leurs droits et libertés. Le Chancelier de justice contrôle la constitutionnalité de la législation d’application générale et est le gardien des droits et libertés individuelles. En vertu de la Constitution, la principale attribution du Chancelier de justice est de vérifier la conformité à la Constitution et aux lois des dispositions adoptées par les pouvoirs législatif et exécutif au niveau local (lois et règlements). Le Chancelier de justice est compétent pour s’assurer de la constitutionnalité des restrictions légales à l’exercice des droits et libertés des personnes.

192.Il est possible de demander au Chancelier de justice de contrôler les activités des organismes publics nationaux ou locaux, et notamment en ce qui concerne la protection des droits et libertés constitutionnels de la personne. Par conséquent, le Chancelier de justice est habilité à s’assurer qu’une loi ou un règlement est conforme à la Constitution et qu’un organisme public ou un fonctionnaire n’a pas violé les droits fondamentaux d’une personne.

193.Hormis les cas de violation des lois, le Chancelier de justice examine les fautes administratives qui ne sont pas nécessairement des délits. Il faut entendre par faute administrative un manquement aux principes de bonne gouvernance et de bonne pratique, le fait de ne pas s’acquitter de sa tâche, la négligence, les délais injustifiés, l’impolitesse, le fait de donner de faux renseignements, et autres agissements du même genre.

194.Le Chancelier de justice peut également vérifier si des personnes de droit public et de droit privé chargées de fonctions publiques violent les droits fondamentaux et les libertés d’individus.

195.Depuis le 1er janvier 2004, le Chancelier de justice est également habilité à régler les différends liés à la discrimination entre particuliers, conformément à la Constitution et aux lois. Chacun peut demander au Chancelier de justice de mettre en œuvre une procédure de conciliation.

196.Le Chancelier de justice ne collecte pas de statistiques sur les requêtes dont les auteurs prétendent faire l’objet d’une discrimination. La question de la discrimination peut être soulevée dans le cadre d’une procédure de contrôle normatif, des procédures de l’ombudsman ou de procédures de conciliation engagées dans des circonstances extrêmement variées. La violation du principe d’égalité de traitement n’étant souvent qu’un des motifs cités parmi d’autres par le plaignant, il est difficile de recueillir des statistiques qui ne concerneraient que ce problème. Le Chancelier de justice n’a reçu que rarement des plaintes concernant seulement la discrimination raciale.

197.Le Chancelier de justice a reçu une requête lui demandant de mettre en œuvre une procédure de conciliation, dans laquelle le plaignant prétendait qu’une condition d’octroi de la citoyenneté était discriminatoire au motif de la situation sociale. Étant donné que les procédures de conciliation sont facultatives et que l’intéressé a refusé d’y participer, elles ont été interrompues et aucune opinion n’a été formulée sur le fond au sujet d’une éventuelle discrimination.

198.Nous présenterons dans la partie suivante quelques exemples de problèmes qui ont été soulevés en rapport avec la discrimination raciale. En 2002, un détenu a fait appel au Chancelier de justice, estimant avoir subi une discrimination commise par le directeur adjoint de l’établissement pénitentiaire qui l’aurait invité, propos insultants à l’appui, à aller purger sa peine en Russie. Le plaignant estimait que de tels propos étaient insultants pour lui‑même et pour les Russes en général. Au cours des vérifications du Chancelier de justice, il est apparu que la plainte était infondée. Selon ses explications, le directeur adjoint de la prison avait dit au prisonnier que s’il ne souhaitait pas purger sa peine en Estonie, il pouvait demander son transfert en Russie. Il n’avait été fait mention ni de la nationalité russe ni de la langue russe. Les explications du directeur adjoint ont été corroborées par un témoin présent lors de la conversation. Vu les faits, le Chancelier de justice a estimé que la plainte dénonçant un comportement indécent ou insultant et discriminatoire du directeur adjoint était infondée.

199.En 2004, le Chancelier de justice a reçu une requête dans laquelle un particulier le priait de contrôler les activités de fonctionnaires préposés au contrôle aux frontières. Il s’estimait victime d’une discrimination fondée sur la couleur car ces fonctionnaires lui avaient fréquemment fait subir des fouilles complètes à la frontière. Il est résulté de l’enquête menée par le Chancelier de justice que l’examen minutieux de cette personne était dû à des raisons objectives, car des informations indiquaient qu’elle avait déjà franchi illégalement la frontière estonienne ou avait tenté de le faire à plusieurs reprises. En outre, le requérant était soupçonné d’être lié à des personnes impliquées dans le trafic d’êtres humains et le trafic de stupéfiants. Dans cette affaire, le Chancelier de justice a estimé que la plainte relative à une discrimination fondée sur la couleur était infondée.

200.Dans le cadre de la promotion du principe d’égalité, le Chancelier de justice a estimé qu’il était important de développer la coopération avec le secteur associatif. Une table ronde à laquelle ont participé des représentants du secteur associatif s’est tenue en mars 2004 afin d’analyser des problèmes liés à l’égalité de traitement dans la société estonienne et d’expliquer les compétences qui sont reconnues au Chancelier de justice pour traiter les questions qui se posent dans ce domaine.

201.Prochainement, il sera possible de saisir le Commissaire à l’égalité entre les sexes en cas de discrimination fondée sur le sexe. La création de cette instance est prévue par la loi sur l’égalité des sexes. Le Commissaire à l’égalité entre les sexes sera un expert indépendant et impartial qui recevra des requêtes émanant de particuliers, et formulera des opinions concernant des cas possibles de discrimination et analysera les lois fondées sur le principe d’égalité. La loi sur l’égalité entre les sexes n’étant entrée en vigueur qu’en mai 2004, le Commissaire à l’égalité entre les sexes n’a pas encore été nommé. Il le sera probablement au début de 2005.

Aide aux victimes

202.Le précédent rapport périodique de l’Estonie décrit de manière approfondie le système de paiement de dommages-intérêts aux victimes de la criminalité (par. 29 à 43). Au moment où était soumis le précédent rapport périodique, ce domaine était régi par la loi sur l’indemnisation par l’État des victimes de criminalité. Compte tenu de la nécessité d’améliorer l’aide aux victimes, le Gouvernement a décidé d’élaborer une nouvelle loi qui régirait l’organisation de ce service et l’indemnisation par l’État des victimes de la criminalité. La loi sur l’aide aux victimes est entrée en vigueur le 1er janvier 2004, mais sa partie relative au service d’aide aux victimes n’entrera en vigueur qu’à compter du 1er janvier 2005. L’éventail de personnes ayant droit à des services d’aide aux victimes et à une mesure d’indemnisation a été élargi par rapport à la législation précédente.

203.En vertu de la nouvelle loi, toute personne victime de négligence, de mauvais traitements ou de violences physiques, psychologiques ou sexuelles a droit à l’aide aux victimes. La commission effective d’une infraction pénale n’est pas une condition préalable à l’octroi de l’aide. L’éventail des personnes ayant droit à une indemnisation a été également élargi. À l’heure actuelle, les victimes d’un crime violent reçoivent également une indemnité (seules les victimes de crimes intentionnels étaient auparavant indemnisées).

204.Les citoyens estoniens et les résidents étrangers titulaires d’un permis de séjour temporaire ou permanent ont le droit d’être indemnisés. Aux termes de la nouvelle loi, les ressortissants de l’Union européenne ont également le droit d’être indemnisés, quel que soit leur régime de résidence, ainsi que les ressortissants de pays ayant ratifié la Convention européenne relative au dédommagement des victimes d’infractions violentes qui résident en Estonie. Toutefois, les ressortissants des États parties à la Convention ne seront titulaires de ce droit qu’après la ratification de la Convention par l’Estonie.

205.La loi sur l’aide aux victimes a augmenté le montant des prestations versées aux personnes à la charge de la victime lorsque celle-ci décède. Un autre changement important par rapport à la précédente loi est qu’en plus du dédommagement des frais de rééducation physique, les dépenses liées à la rééducation psychologique, comme les consultations psychologiques et la psychothérapie, seront également indemnisées.

206.Le montant des prestations versées aux victimes de la criminalité en vertu de la loi augmente d’année en année. En 2001, le montant total des prestations versées s’élevait à 48,1 millions de couronnes estoniennes; en 2002 et 2003 les sommes étaient respectivement de 273,5 et 361,6 millions de couronnes estoniennes. Au cours des huit premiers mois de l’année 2004, 308,9 millions de couronnes estoniennes ont été versées au titre des prestations.

207.La partie de la loi sur l’aide aux victimes relative aux services d’aide aux victimes entrera en vigueur le 1er janvier 2005. À partir du 1er janvier 2005, 35 prestataires d’aide aux victimes dûment formés commenceront à travailler pour le compte des caisses d’assurance sociale dans 16 régions de l’Estonie. Les prestataires de l’aide aux victimes apporteront un soutien moral aux victimes et leur fourniront des informations sur les possibilités d’assistance supplémentaires telles que l’accompagnement psychologique ou l’aide juridique, etc. Les prestataires de l’aide aux victimes assisteront également les personnes dans leurs démarches auprès des organismes et organisations. Afin d’améliorer l’aide aux victimes, les prestataires chargés de leur porter assistance coopéreront avec les réseaux régionaux pertinents, et notamment avec les collectivités locales, la police, les services de secours, les écoles, les établissements de soins et les volontaires auprès des victimes de la criminalité.

208.Le service d’aide aux victimes a fait l’objet de la Conférence «Märka ja toeta» (Signalement et assistance), tenue en septembre 2001. Plusieurs activités de formation et séminaires ont été organisés afin d’assurer le suivi de la Conférence. Parmi les plus importants, ont figuré le «Séminaire sur la coopération en réseau pour les victimes de la criminalité et les enfants en situation de risque» et le «Séminaire sur la rédaction et la gestion des projets pour les fonctionnaires des collectivités locales participant aux réseaux».

209.Une page Web consacrée à l’aide aux victimes, www.ohvriabi.ee, a été créée. La Société d’aide aux victimes de la criminalité a élaboré et révisé la brochure d’information sur l’aide aux victimes, qui sera distribuée à toutes les institutions d’aide sociale et à la police. La brochure d’information est disponible en estonien et en russe.

Article 7

210.Le programme d’intégration de l’État contient un sous-programme intitulé «Éducation et culture des minorités ethniques», dont l’objectif est de créer et de garantir les conditions de l’accès des groupes minoritaires à l’éducation en langue maternelle et de préserver leur culture. L’idée maîtresse du programme d’intégration est de prendre pour cible des groupes qui sont des minorités nationales déjà anciennes et des minorités ethniques qui ont émigré en Estonie au cours de la seconde moitié du XXe siècle. Le programme d’intégration ne vise pas à assimiler les nationalités ethniques, mais à sensibiliser la population au multiculturalisme en Estonie en donnant à chacun la possibilité de conserver et développer sa langue maternelle et sa culture.

211.Le programme d’intégration définit, en tant qu’activités distinctes, l’obligation de soutenir les sociétés culturelles nationales et les écoles du dimanche pour préserver la langue et la culture des minorités ethniques; l’obligation de faciliter la coopération entre les sociétés culturelles nationales en vue de rechercher notamment l’appui du secteur privé et des sources de financement étrangères, d’organiser et d’améliorer la diffusion de l’information; ainsi que l’obligation d’appuyer les activités des écoles d’enseignement élémentaire en langue nationale.

212.Le maintien et le développement de la langue et de la culture des minorités reposent sur le succès de la mise en œuvre du programme d’intégration. L’attitude générale de la société à l’égard du multiculturalisme et des relations entre les nationalités détermine dans une large mesure la possibilité qu’ont les minorités de développer l’éducation et la culture dans leur langue nationale. L’évaluation des activités menées au cours des premières années permet d’affirmer que l’attitude de la population estonienne à l’égard du multiculturalisme s’est améliorée. La sous‑section du rapport sur la mise en œuvre du programme d’intégration en 2001 et 2002 intitulée «Éducation et culture des minorités ethniques» donne un aperçu de l’évolution des attitudes sociales (http://www.meis.ee).

213.Le rapport de 2001 montre que l’attitude de la population à l’égard de l’intégration en tant que modalité des relations entre les nationalités a connu une évolution positive. Environ la moitié de la population estonienne est favorable à la fois à l’État‑nation et au multiculturalisme estonien, opinion majoritaire chez les non‑ressortissants. L’analyse des résultats du suivi de l’intégration permet d’affirmer que les éléments essentiels à l’adoption de l’idée d’une société multiculturelle gagnent du terrain chez les Estoniens. Ainsi, 84 % des Estoniens estiment que des nationalités même très différentes peuvent très bien cohabiter et coopérer dans le même pays, et 70 % pensent que la diversité des langues et des cultures est source d’enrichissement de la société. Néanmoins, le rapport conclut que pour maintenir cette évolution positive il faudrait s’attacher davantage à faire reconnaître l’idée d’une société estonienne multiculturelle.

214.Le rapport sur la mise en œuvre du programme d’intégration montre que l’attitude de la population à l’égard des écoles d’enseignement en langue estonienne est généralement favorable à l’apprentissage de la langue, de la littérature et de la culture russes, et de la culture et des coutumes des autres minorités nationales. Selon l’enquête sur l’intégration en 2002, 87 % des personnes interrogées estiment que l’enseignement du russe devrait être maintenu et 72 % partagent cette même opinion en ce qui concerne la littérature et la culture russes. Cinquante trois pour cent des Estoniens pensent que l’enseignement de la culture et des traditions des autres minorités nationales vivant en Estonie est nécessaire. Parmi les non‑ressortissants, 96 % sont favorables au maintien de l’enseignement de la langue russe, 91 % au maintien de l’enseignement de la littérature et de la culture russes, et 70 % à celui de la culture et des traditions des autres minorités nationales.

215.L’une des conditions préalables à la préservation de la culture des minorités nationales en Estonie est l’absence de conflits graves fondés sur la nationalité ethnique. Si au début des années 90 la plupart des Estoniens et des non‑Estoniens estimaient que les relations entre les différentes nationalités vivant en Estonie laissaient à désirer, la perception des conflits a fortement diminué. Selon l’enquête sur l’intégration en 2002, seul un faible pourcentage de la population a connu personnellement des conflits au cours des années récentes.

216.Afin de poursuivre la mise en œuvre du programme d’intégration, le Gouvernement en a approuvé, le 6 mai 2004, les plans d’action des sous-programmes pour 2004-2007. Les plans d’action prévoient notamment l’augmentation progressive des subventions allouées aux sociétés culturelles des minorités nationales en vue de pérenniser le financement des organisations représentatives de ces minorités par prélèvement sur le budget de l’État. Un autre objectif est de créer les conditions permettant d’assurer l’autonomie culturelle des minorités nationales grâce à des fonds prélevés sur le budget de l’État, à compter de 2005.

217.Les minorités qui vivent en Estonie se voient garantir les moyens de préserver la spécificité de leur langue et de leur culture, à commencer par le moyen d’organiser l’enseignement en langue maternelle et leur vie sociale, ainsi que la possibilité de faire connaître leur spécificité culturelle à la société estonienne. En Estonie, le but de l’intégration est l’adaptation culturelle des différentes minorités ethniques du pays. La réussite de l’intégration suppose deux processus simultanés: d’une part la préservation des particularités linguistiques et culturelles des groupes ethniques et, de l’autre, le ralliement de ces groupes autour d’un solide tronc commun à la société estonienne.

218.L’une des tâches du programme d’intégration est de diversifier le traitement des sujets relatifs à l’intégration par les médias de langue estonienne et russe, afin de créer et de développer un tronc commun des médias de langue estonienne et russe, d’accroître l’interactivité des médias de langue russe, et d’améliorer l’accès aux informations officielles et pratiques diffusées par les médias ainsi que leur qualité. Afin d’atteindre cet objectif, des crédits ont été affectés à la formation des journalistes, à l’élaboration de programmes de télévision saisonniers en estonien, en russe et en version bilingue, et au financement de programmes de radio en russe traitant de questions sociales et de l’intégration.

219.Le sous-programme «Aptitude à la vie sociale» du programme d’intégration de l’État vise à promouvoir la tolérance et le dialogue interculturel dans la société, et plus précisément à faire prendre conscience du potentiel des non‑Estoniens, à les associer aux processus de décision et aux programmes de développement, à sensibiliser la population au multiculturalisme et à faire découvrir la culture des minorités nationales.

220.Dans le cadre du sous-programme, deux projets axés sur les médias et un séminaire pour les journalistes estoniens intitulé «Règles de déontologie journalistique des médias estoniens et russes» ont été financés en 2002 et 2003. Au cours de ce séminaire, un document intitulé Règlement des conflits journalistiques a été publié en estonien et en russe. Dans le cadre d’un appel d’offres pour des programmes de télévision en russe et en version bilingue, les séries télévisées suivantes ont été financées: Unetus, Parim rahvaintegraator, Loomakliinik, Kevad Narvas, Uudistaja, Subboteja+Press, See olen mina, Inter-Aktiiv et Subjektiiv. Dans le cadre d’un appel d’offres concernant des programmes de radio, une série d’émissions conçues en coopération par des stations de radio en estonien et en russe a été diffusée au cours de la saison 2002/2003: Seriaal, programme bilingue de Radio Ruut et Radio Kuma, et Päevavargad/Zevaki, programme bilingue de Radio Kuku et Radio 100 FM. Une série de Radio 4 en ukrainien, destinée aux enfants et aux adultes, ainsi qu’une série en biélorusse ont également été financées. Au cours de la saison 2003/2004, des programmes destinés à la communauté juive ont été également soutenus.

221.L’une des missions du programme d’intégration est de renforcer la communication entre les Estoniens et les non‑Estoniens, afin de mettre en place et de promouvoir le dialogue interculturel. À cette fin, un appel d’offres a été lancé afin de concevoir des programmes de télévision et du matériel vidéo d’apprentissage des langues. Suite à cet appel d’offres, un ensemble de programmes d’apprentissage des langues destinés aux étudiants indépendants adultes de niveau intermédiaire a été produit en 2003. En outre, un ensemble vidéo d’apprentissage des langues comprenant des documents méthodologiques a été réalisé. Dans le cadre d’activités de publications bilingues, la parution des périodiques Ruupor, qui traite des activités du secteur associatif, et Laagrileht, qui présente un aperçu des camps ou de séjours d’études en famille, a été financée.

222.Dans le cadre du programme d’intégration de l’État, le sous-programme en milieu périscolaire «Éducation» finance chaque année différentes formules d’études linguistiques. L’une des plus populaires est l’apprentissage de l’estonien dans le cadre de camps ou de séjours en famille. C’est non seulement une formule efficace d’apprentissage de la langue s’adressant aux enfants, mais également l’occasion pour les enfants de nationalités différentes de nouer des contacts et de découvrir leurs coutumes et culture respectives. En 2002, un total de 60 projets de camps et de séjours linguistiques en famille auxquels ont participé 2 900 enfants ont été financés. Le programme a été reconduit en 2003.

223.Dans le cadre du sous‑programme «Éducation et culture des minorités ethniques», un appui a été fourni à des projets d’initiation au multiculturalisme et à des projets émanant des sociétés culturelles des minorités nationales, notamment, en rapport avec l’appel d’offres «Estica», le projet de réalisation de photographies sur la culture des Vieux croyants du lac Peipsi; en rapport avec un appel d’offres public, le projet «Folklore international estonien, russe et izhor dans les districts frontaliers»; en rapport avec l’appel d’offres des sociétés culturelles des minorités nationales, le festival culturel «Belaruskaje padvorje» des Biélorusses d’Estonie, les journées de la culture polonaise, le festival culturel ukrainien international «Trembita», une soirée littéraire avec des écrivains estoniens et bashkirs à Tallinn, des journées de la langue et de la culture ossètes en Estonie, et de nombreuses autres manifestations. Une présentation complète des projets qui ont été financés est proposée sur le site de la Fondation pour l’intégration (http://www.meis.ee).

224.L’un des objectifs des plans d’action du programme de l’État pour 2004-2007 est d’organiser des cours d’encouragement à la tolérance à l’intention de 2 000 élèves et de 200 professeurs d’établissements d’enseignement secondaire en estonien et en russe. Un autre objectif est de promouvoir les écoles multiculturelles et la coopération linguistique et culturelle entre les écoles, afin d’améliorer les compétences linguistiques des élèves et de développer la tolérance à l’égard des autres cultures. À cet égard, deux activités sont prévues: l’organisation d’activités d’élèves et l’élaboration de matériel de promotion de la tolérance et du multiculturalisme et de perfectionnement des professeurs (y compris des responsables des activités périscolaires), portant sur la prise en compte des particularités de chaque nationalité à l’école.

225.La loi sur l’audiovisuel impose aux organismes publics de radiodiffusion et de télévision l’obligation d’établir des plans de développement. Le plan de développement doit fixer clairement le cadre des activités des organismes publics de radiodiffusion et de télévision, notamment celles de la Télévision estonienne et de la Radio estonienne.

226.La Télévision estonienne et la Radio estonienne sont des personnes morales de droit public qui, en vertu de la loi sur l’audiovisuel, sont tenues de répondre aux besoins d’informations de tous les groupes de la population, y compris les minorités. Le plan de développement de la Télévision estonienne et de la Radio estonienne a été approuvé par le Parlement le 18 juin 2002. Ce plan indique qu’en raison d’une situation constante de sous-financement, la Télévision estonienne et la Radio estonienne n’ont pas été à même d’accomplir leurs tâches de façon adéquate. Aussi, ne sont‑elles pas parvenues, par exemple, à répondre aux besoins de la société, s’agissant de certains types de programmes. En particulier, les programmes destinés aux enfants et aux groupes minoritaires ainsi que les programmes éducatifs et culturels ont été insatisfaisants. Pour remédier à ces insuffisances, on continue de s’attacher, conformément au plan de développement, à identifier les besoins des différents groupes sociaux, et on accorde davantage d’attention aux plus petits groupes minoritaires. En outre, il est envisagé de développer les programmes interactifs grâce aux méthodes de communication bilingues.

227.En 2003, la Télévision estonienne a diffusé 230 heures d’émission destinées spécifiquement aux non‑Estoniens (notamment des informations en russe et des émissions répétitives), sur lesquelles 197 heures étaient consacrées à des programmes bilingues et à des programmes autoproduits en russe et 23 heures à des émissions en estonien sous‑titrées en russe. En outre, la Télévision estonienne a diffusé 10 heures d’émission consacrées principalement à des programmes d’apprentissage linguistique s’adressant aux non‑Estoniens, réalisés par des producteurs estoniens indépendants. La proportion des programmes autoproduits diffusés en russe, en version bilingue ou avec des sous‑titres russes représentait 7,1 % de l’horaire total de programmation (3 098 heures par an). En 2003, 54 heures d’émission consacrées à des programmes d’information et à des films achetés à l’étranger (en Fédération de Russie) ont été diffusées.

228.Au total, en 2003, la Télévision estonienne a diffusé 284 heures d’émission en russe, en version bilingue ou en estonien avec des sous‑titres russes, soit 4,8 % de l’horaire total de programmation (5 863 heures).

-----