Nations Unies

CCPR/C/EST/4

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

29 août 2018

Français

Original : anglais

Anglais, espagnol et français seulement

Comité des droits de l’homme

Quatrième rapport périodique présenté par l’Estonie en application de l’article 40 du Pacte, attendu en 2017 * , **

[Date de réception : 2 avril 2018]

Introduction

1.Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, auquel la République d’Estonie a adhéré le 21 octobre 1991, est entré en vigueur à l’égard de cette dernière le 21 janvier 1992. L’Estonie a soumis son troisième rapport en 2009. Le Comité des droits de l’homme a procédé à son examen les 12 et 13 juillet 2010 et a adopté ses observations finales le 27 juillet 2010.

2.Le présent rapport est présenté en application de l’article 40 du Pacte et apporte des réponses à la liste de points à traiter établie avant la soumission du quatrième rapport périodique de l’Estonie et adoptée par le Comité des droits de l’homme lors de sa 116e session qui s’est tenue à Genève du 7 au 31 mars 2016.

3.Le rapport a été établi par le Ministère des affaires étrangères en collaboration avec le Ministère de la culture, le Ministère de la défense, le Ministère de l’éducation et de la recherche, le Ministère des finances, le Ministère de l’intérieur, le Ministère de la justice et le Ministère des affaires sociales.

A.Renseignements généraux sur la situation des droits de l’homme

Point no 1 : Mise en œuvre des recommandations du Comité

4.Les renseignements généraux sur les mesures prises pour mettre en œuvre les recommandations du Comité présentées ici concernent uniquement l’éducation. Les renseignements se rapportant aux mesures prises dans d’autres domaines figurent dans les sous-sections correspondantes de la section B.

5.La Constitution de l’Estonie déclare que les droits fondamentaux sont des valeurs de base de la République d’Estonie. Les droits de l’homme sont des valeurs fondamentales de l’éducation en Estonie qui sont inscrites dans la loi sur l’enseignement élémentaire et secondaire et dans les programmes scolaires.

6.Selon la loi sur l’éducation de la République d’Estonie, les principes fondamentaux de l’éducation reposent également sur la reconnaissance de valeurs universelles et nationales, de la liberté de l’individu et de la liberté de conscience et de religion.

7.L’éducation a pour objectifs :

•De créer des conditions favorables à l’épanouissement de la personne, de la famille et de la nation estonienne, y compris des minorités ethniques, ainsi qu’un cadre propice à la vie économique, politique et culturelle de la société estonienne, notamment en protégeant la nature, dans le contexte de l’économie mondiale et de la culture internationale ;

•De former des personnes qui respectent et appliquent la loi ;

•De donner à tous des possibilités de formation tout au long de la vie.

8.Les droits de l’homme et l’enseignement de ces droits sont aussi étroitement liés aux objectifs de la Stratégie de formation tout au long de la vie 2020 formulée par l’Estonie. C’est le cas, en particulier, des modifications apportées aux modes d’enseignement et d’apprentissage et de l’assurance de l’égalité des chances dans l’éducation, qui impliquent l’expression des droits de l’homme et des valeurs communes dans les enseignements scolaires et la culture à l’école. D’autres documents stratégiques ont été établis sur la base des mêmes principes ; toutes les initiatives poursuivies par l’Estonie ont pour objectif général de promouvoir une société solide et unie.

9.En août 2014, le Gouvernement a approuvé l’apport de modifications aux programmes scolaires nationaux des établissements d’enseignement primaire et secondaire, entre autres pour renforcer la promotion de l’égalité entre les sexes à ces niveaux, notamment dans les sciences sociales, la planification des études, les technologies et l’artisanat. Le programme d’enseignement est basé sur l’acquisition de compétences et l’obtention de résultats. Il énonce les conditions d’enseignement et d’apprentissage, en mettant l’accent, notamment, sur l’obligation pour les écoles de créer et de maintenir un cadre dans lequel les droits de la personne sont respectés, nul n’est victime de discrimination et les élèves participent dans la mesure du possible à la gouvernance scolaire.

10.Une attention importante est, de ce fait, portée à la prévention du harcèlement à l’école et à l’adoption de mesures pour lutter contre celui-ci. Par suite de l’adoption du principe d’une scolarité dénuée de tout harcèlement en 2015, des priorités ont été établies et des activités organisées. Ces dernières sont essentiellement menées par une « coalition pour l’absence de harcèlement », qui est un réseau formé par plusieurs ONG actives en ce domaine et par le Centre de déontologie de l’Université de Tartu.

11.L’enseignement des droits de l’homme dans le cadre d’un apprentissage axé sur les valeurs, les médias et la réflexion critique, est l’une des cibles du Programme d’éducation générale 2016-2019 (qui fait partie de la Stratégie de la formation tout au long de la vie 2020 adoptée par l’Estonie).

12.En 2009, le Ministère estonien de l’éducation et de la recherche a approuvé le Programme national pour la promotion des valeurs dans la société estonienne 2009-2013, qui a été renouvelé pour la période 2015-2020. La promotion des valeurs vise principalement à :

•Encourager la discussion et la formulation d’une vision commune des valeurs, dont l’examen et l’application pourraient permettre de traiter des questions brûlantes pour la société estonienne ;

•Combler l’écart entre les déclarations rhétoriques concernant les valeurs et l’adoption effective de ces valeurs de manière à permettre à la société d’évoluer de la manière souhaitée ;

•Permettre à la nouvelle génération de résoudre les problèmes de société en mettant en lumière et en éliminant les attitudes sources de problèmes au niveau des valeurs ;

•Promouvoir l’enseignement des valeurs aux enfants et aux adolescents dans les établissements préscolaires et scolaires pour assurer leur développement dans un milieu éducatif propice au plein épanouissement de la personne, à une réelle compréhension par chacun de ses valeurs et à l’apprentissage de la collaboration au sein de la société ;

•Encourager la société dans son ensemble à apporter un appui aux établissements préscolaires et scolaires de manière à faire comprendre à tous les membres de la société les possibilités qu’offre l’éducation de régler les problèmes de société et de les exploiter.

13.Le Conseil estonien pour les réfugiés, le Centre de déontologie de l’Université de Tartu, l’ONG Mondo, l’ONG Ethical Links, entre autres entités, mènent différentes activités axées sur les migrants. Par exemple, le Centre de déontologie a conçu et lancé une variante du jeu pour élèves intitulé « À la découverte des valeurs » se rapportant aux migrants et aux réfugiés, et l’ONG Mondo a créé un jeu pour enfants sur le même thème. Une conférence sur le multiculturalisme en milieu scolaire a été organisée à l’automne 2016. Mondo et Ethical Links ont toutes deux préparé des outils d’apprentissage et organisé des formations à l’intention du personnel enseignant, ainsi que d’autres manifestations notamment sur les thèmes de la mondialisation, du multiculturalisme et de la religion.

Point no 2 : Importantes modifications apportées au cadre institutionnel de la promotion et de la protection des droits de l’homme

14.La légalisation du service militaire des femmes est la principale modification enregistrée dans le domaine de la défense nationale. La nouvelle loi, qui est entrée en vigueur le 1er avril 2013, autorise les femmes à faire leur service militaire au même titre que les hommes. Elles ont toutefois la possibilité de mettre un terme à ce dernier dans un délai de quatre-vingt-dix jours à compter de la date à laquelle elles ont été convoquées sous les drapeaux. Quarante et une femmes ont achevé leur service militaire depuis 2013 et 17 femmes poursuivaient le leur en 2016-2017.

Recommandation no 7

15.La description du délit de torture a été dûment complétée dans le Code pénal par suite des modifications apportées à ce dernier au début de 2015, et est maintenant pleinement conforme à la définition internationale (art. 290 semet).

Recommandation no 9c

16.Des dispositions spécifiques concernant la traite des êtres humains ont été incluses dans le Code pénal par suite des modifications apportées à ce dernier, qui sont entrées en vigueur en avril 2012 (art. 133 du Code).

17.L’apport d’un appui à la traite des êtres humains, au proxénétisme, à la prostitution et au commerce des enfants à des fins d’exploitation est également puni par la loi.

Recommandation no 14

18.Aucune modification notable n’a été apportée aux dispositions concernant les procédures de substitution au service militaire depuis la période précédente. Le nombre de personnes optant pour un service de substitution au service militaire était de 53 en 2015 et de 97 en 2016.

Recommandation no 15

19.La nouvelle loi sur la fonction publique, entrée en vigueur le 1er avril 2013, a considérablement réduit la couverture de la définition des fonctionnaires. Une description plus précise du droit de grève est présentée dans la réponse donnée au titre du point 22.

B.Informations spécifiques sur la mise en œuvre des articles 1 à 27 du Pacte

Cadre juridique de l’application du Pacte

Point no 3 : Institution nationale pour la protection des droits de l’homme

20.Les autorités ont récemment fait preuve de la volonté politique et de la détermination requises pour officiellement accréditer l’institution du Chancelier de justice en tant qu’institution nationale des droits de l’homme conformément aux principes de Paris ; les travaux préparatoires nécessaires à l’apport des modifications pertinentes aux textes de loi qui régissent les fonctions du chancelier de justice ont commencé.

Point no 4 : Commissaire à l’égalité des sexes et à l’égalité de traitement

21.Les ressources du budget de l’État affectées à l’institution du commissaire à l’égalité des sexes et à l’égalité de traitement, qui a été créée en octobre 2005, ont été portées de 51 705 euros en 2006 (première année complète d’exercice) à 167 140 euros en 2015. Cette augmentation du budget a également tenu, dans une mesure limitée, à l’attribution de nouvelles fonctions.

22.Le champ des compétences du « Commissaire à l’égalité des sexes », tel que préalablement défini, a été élargi par suite de la loi sur l’égalité des sexes qui est entrée en vigueur le 1er janvier 2009 ; il couvre désormais aussi les questions relatives à l’égalité de traitement indépendamment de l’origine ethnique, de la race, de la couleur de la peau, de la religion ou des opinions politiques, de l’âge, du handicap ou de l’orientation sexuelle.

23.Le Commissaire est également en mesure de solliciter des financements supplémentaires auprès de l’Union européenne et d’autres mécanismes de financement. Durant la période 2013-2016 (premier trimestre), il a poursuivi un projet,coordonné par le Ministère des affaires sociales, pour lequel il a obtenu un montant de 700 000 euros financé par le Programme de dons de la Norvège pour 2009-2014 ; ce projet avait pour objet d’assurer la prise en compte systématique des questions d’égalité des sexes et la promotion de l’équilibre entre la vie professionnelle et la vie personnelle. Les fonds supplémentaires obtenus ont aussi permis de recruter une personne de plus pour assurer la mise en œuvre du projet.

24.Le Commissaire ne peut actuellement que formuler des opinions qui ne sont pas juridiquement contraignantes, mais il est prévu, dans le projet de la nouvelle loi sur l’égalité de traitement que prépare actuellement le Ministère des affaires sociales, d’étendre le champ de ses compétences pour lui donner le droit d’ester en justice en son propre nom ou au nom d’une victime. Il est également envisagé de donner au Commissaire les pouvoirs nécessaires pour jouer un rôle de conciliation dans les affaires de discrimination.

Point no 5 : Diffusion et mise en œuvre des conclusions finales du Comité

25.Les conclusions finales du Comité sont affichées en estonien et en anglais sur le site Web du Ministère des affaires étrangères.

26.Plusieurs formations ont été organisées à l’intention de juges dans les domaines du droit international, du droit de l’Union européenne (UE), du droit interne et de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme. Des juges estoniens ont également participé à différentes formations à l’étranger traitant des conflits entre les normes dans l’application des droits fondamentaux, des droits de l’homme, de l’accès à la justice dans l’Union européenne et de la législation de l’Union européenne relative à l’égalité entre les hommes et les femmes. Ces différentes formations contribuent à l’application des droits consacrés dans le Pacte.

Non-discrimination et interdiction de l’incitation à la haine fondée sur l’origine ethnique, la race ou la religion

Point no 6 : Modifications apportées à la loi sur l’égalité de traitement

27.La loi sur l’égalité de traitement, entrée en vigueur le 1er janvier 2009, a pour objet de garantir la protection des personnes contre toute forme de discrimination fondée sur l’origine ethnique, la race, la couleur de peau, la religion ou d’autres croyances, l’âge, le handicap ou l’orientation sexuelle.

28.Le champ d’application de la loi sur l’égalité de traitement diffère selon les domaines considérés. Alors que l’interdiction de la discrimination fondée sur la religion ou les opinions, l’âge, le handicap ou l’orientation sexuelle ne s’applique que dans des domaines ayant trait à la vie professionnelle et à l’acquisition de qualifications professionnelles (art. 2, par. 2, de la loi), l’interdiction de la discrimination fondée sur l’origine ethnique, la race ou la couleur de la peau s’applique plus largement et protège, notamment, les droits à la protection sociale, à des services et des prestations d’assurance sociale, à des soins de santé, à l’éducation et à l’accès aux biens et services (y compris le logement) offerts à la population (art. 2, par. 1, de la loi).

29.La citoyenneté de l’Union européenne a été ajoutée en tant que motif de discrimination interdit par la loi relative à la citoyenneté européenne par l’adoption d’une modification entrée en vigueur le 6 mai 2017. Cette mesure avait principalement pour objet de mettre le système juridique estonien en conformité avec la Directive 2014/54/UE du Parlement européen et du Conseil relative à des mesures facilitant l’exercice des droits conférés aux travailleurs dans le contexte de la libre circulation des travailleurs.

Point no 7 : Crimes de haine

30.Les modifications au Code pénal prévoyant que tout motif d’infraction fondé sur la race, l’origine ethnique, la citoyenneté, le sexe, l’orientation sexuelle, l’identité de genre ou d’autres motifs similaires est considéré comme une circonstance aggravante n’ont pas encore été adoptées, mais il est toujours prévu de le faire.

31.Les modifications ayant pour objet d’incriminer la justification, le déni ou la propagation de crimes internationaux ou de propagande raciste ou discriminatoire à d’autres égards n’ont, elles non plus, pas encore été adoptées.

32.Un système informatique permettant de signaler les incidents caractérisés ou motivés par la haine lors de l’enregistrement et du traitement des infractions a été mis en place. Il est prévu de dispenser une formation sur les infractions motivées par la haine aux personnes chargées de traiter les dossiers correspondants en collaboration avec l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).

Point no 8 : Réduction de la discrimination à l’égard des minorités

33.Le Ministère de l’intérieur organise des formations à l’intention des membres du Service de la police et des gardes-frontière et du Fonds d’assurance chômage portant sur la manière de détecter la radicalisation. Le Service de la police et des gardes-frontière emploie aussi des agents de police chargés de la surveillance du Web, qui ont pour mission de rechercher les discours haineux et de mener une action en conséquence.

34.Le Service de la police et des gardes-frontière emploie trois agents du Web qui ont pour fonction, au quotidien, de suivre les informations concernant les discours et les crimes de haine sur le Web, d’organiser des conférences sur les crimes de haine pour sensibiliser le public et de répondre aux questions. Ces agents, qui ont reçu une formation spéciale, suivent également les discours racistes en ligne qui visent les minorités et différents groupes d’étrangers. Il est prévu d’accroître leur nombre et d’élargir la portée de la surveillance technique.

35.Le Service de la police et des gardes-frontière a organisé au cours des dernières années des formations à l’intention des agents de police portant sur les différences culturelles, qu’il a l’intention de continuer à assurer. Un projet de détection des signes de radicalisation en détention qui a essentiellement pour objet d’améliorer les compétences en ce domaine et le traitement des affaires de radicalisation, a également été entrepris. Des directives ont été préparées en 2016 dans le but d’aider les enquêteurs à appliquer les dispositions du Code pénal en cas de crimes de haine.

36.Le 16 janvier 2016, l’Estonie a transposé la directive de l’Union européenne, sur les droits des victimes, qui dispose que toutes les victimes de crimes de haine, en particulier les victimes appartenant à des groupes vulnérables et les victimes d’actes de violence, doivent faire l’objet d’évaluations personnalisées, bénéficier d’une protection et obtenir tout le soutien possible. L’Académie estonienne des sciences de la sécurité a élaboré et organisé, dans le cadre d’une opération pilote, une « formation de sensibilisation » qui sera dispensée, entre autres, aux agents de police. Cette formation a un caractère pratique puisqu’elle vise à apprendre à communiquer avec une victime de manière à prendre ses besoins en considération sans provoquer de victimisation secondaire. La formation a été conçue en étroite coopération avec des fonctionnaires du Ministère de la justice et du Ministère de l’intérieur. Un accord de formation a été conclu avec le Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme (BIDDH) de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) pour apprendre aux agents de police à devenir eux-mêmes des formateurs en Estonie. Cette formation est également offerte à certains procureurs.

37.En 2016, le Gouvernement a appuyé la poursuite d’une campagne contre les discours haineux, coordonnée par le Ministère de l’éducation et de la recherche et mise en œuvre par l’Agence pour la jeunesse de la Fondation Archimedes.

38.Le rapport annuel sur les statistiques de la criminalité en Estonie, qui est préparé par le Ministère de la justice, comporte depuis 2015 un chapitre distinct consacré à la présentation statistique récapitulative des crimes de haine, établi sur le modèle de la Finlande. Le Service de la police et des gardes-frontière a été doté de capacités de collecte de données statistiques sur les crimes de haine en 2016. w

39.Depuis l’automne 2016, il est possible de classer les crimes de haine dans de nouvelles catégories créées dans le système d’information de la police (qui fait partie du système e-File). Les catégories d’incitation à la haine indiquées ci-après ont été ajoutées dans les systèmes informatiques du Ministère de la justice, du Ministère de l’intérieur et du Service de la police et des gardes-frontière :

•Race, religion, origine ;

•Orientation sexuelle et identité sexuelle ;

•Divers.

40.Durant l’automne 2016, la catégorie du « motif de la race ou de l’ethnie » a été remplacée dans le système informatique par une catégorie plus générale intitulée « motif de haine » ce qui permet de considérer également les crimes de haine qui ne sont pas uniquement motivés par ces critères.

41.L’Estonie participe aux groupes de travail de l’Union européenne, du Conseil de l’Europe et du Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme de l’OSCE qui traitent de la déclaration et de l’enregistrement des crimes de haine.

Égalité entre les hommes et les femmes

Point no 9 : Égalité entre les hommes et les femmes

Stéréotypes

42.Des enquêtes de suivi des questions d’égalité entre les hommes et les femmes ont été menées en 2003, 2005, 2009, 2013 et 2016 dans le but d’établir un bilan plus détaillé des attitudes et des opinions des hommes et des femmes au sujet de leur situation et de leur place dans la société. Ces enquêtes nationales, qui sont organisées de manière régulière, servent de base à l’analyse des opinions et des attitudes concernant l’égalité des sexes. Elles couvrent différents sujets et aspects de la vie tels que le pouvoir, l’économie, la vie professionnelle, la vie privée, l’éducation et la violence. Leurs résultats permettent d’évaluer les politiques d’égalité des sexes en vigueur et de mettre au point de nouvelles initiatives pour réduire les inégalités entre les hommes et les femmes.

43.La nouvelle loi sur la publicité, entrée en vigueur en 2008, comporte plusieurs nouvelles réglementations axées sur l’égalité des sexes. En vertu de cette loi, aucune publicité ne doit donner lieu à des manifestations de dénigrement ou de discrimination fondées sur le sexe, faire abstraction du principe de l’égalité entre les hommes et les femmes, critiquer l’un des deux sexes ou le qualifier de dominant ou de subalterne. Elle interdit de surcroît toute publicité dépeignant des personnes en tant qu’objet sexuel, présentant des images de nudité inappropriées, utilisant des expressions ou des images ayant une connotation sexuelle ou contenant des représentations visuelles ou sonores d’actes sexuels. Elle interdit également la publicité d’œuvres à caractère pornographique et la présentation de services pour la satisfaction de désirs sexuels, notamment la prostitution, ainsi que tout message faisant allusion à ce type de service ou facilitant leur obtention.

44.L’État et d’autres parties prenantes, notamment les universités, ont pris diverses mesures concernant l’égalité entre les sexes dans les médias. En 2010 et 2013, de vastes campagnes de sensibilisation ont été menées dans le but de lutter contre les stéréotypes sexistes. Sept clips vidéo portant, entre autres, sur les écarts de rémunération entre les femmes et les hommes, les stéréotypes sexistes, la ségrégation, l’équilibre entre la vie professionnelle et la vie privée, ont été présentés à ces occasions et sont encore utilisés.

45.Des journées d’orientation pour garçons et filles ont été organisées dans le cadre du programme du Fonds social européen durant l’automne 2015. Les sessions, qui se sont déroulées dans un certain nombre d’écoles professionnelles, d’universités et de lieux de travail, avaient pour objet de permettre aux élèves du secondaire d’obtenir directement des informations sur des professions qui, par suite de stéréotypes, étaient considérées comme mieux adaptées aux représentants de l’autre sexe. Au total, 193 élèves âgés de 15 à 19 ans, dont 45 % de garçons et 55 % de filles, ont pris part à ces journées.

46.L’Estonie a célébré la journée de l’égalité salariale le 13 avril 2016. À cette occasion, un concours de littérature a été organisé pour les jeunes, dans le cadre duquel des élèves du secondaire ont pu présenter des essais, des poèmes et des histoires courtes sur le thème de l’égalité salariale et d’autres questions concernant l’égalité des sexes. Le concours a remporté un grand succès : 80 rédactions portant sur différents sujets ont été soumises et les trois meilleures ont été récompensées par un prix. Des groupes de jeunes ont aussi participé à deux débats sur la divulgation des salaires. Des informations ont été distribuées dans différentes villes estoniennes dans le but d’expliquer l’importance de l’égalité salariale, et d’inciter la population à davantage réfléchir à l’égalité entre les femmes et les hommes.

47.Selon une enquête réalisée en 2011, les enseignants, comme la société dans son ensemble, ont des idées relativement stéréotypées sur les élèves de sexe masculin et de sexe féminin, ainsi que sur les hommes et les femmes (en ce qui concerne leurs comportements, leurs besoins, leurs capacités, etc.). La grande majorité des personnes interrogées estiment toutefois que le processus d’évaluation des élèves respecte le principe de l’égalité de traitement et que les mêmes normes sont appliquées pour juger des comportements des garçons et des filles. L’analyse des manuels d’instruction civique et d’histoire réalisée par le centre ENUT (Estonian Women’s Studies and Resource Centre) montre que les hommes et les femmes continuent de ne pas être représentés sur un pied d’égalité et que les stéréotypes sexistes persistent.

48.Depuis 2007, les textes et les illustrations figurant dans les manuels scolaires et d’autres ouvrages éducatifs ne doivent comprendre aucun stéréotype favorisant les préjugés fondés sur le sexe, en application des réglementations du Ministre de l’éducation et de la recherche concernant les manuels pédagogiques dans l’enseignement général et dans l’enseignement professionnel.

49.Plusieurs projets conçus pour promouvoir l’égalité des sexes de la maternelle jusqu’à l’université, entrepris durant la période 2008-2015, se poursuivent. Outre les travaux de recherche et d’analyse qui ont été menés, des formations et d’autres activités de sensibilisation ont été organisées et des directives à l’intention des enseignants, des recommandations pour un enseignement soucieux de l’égalité hommes-femmes et des matériels didactiques ont été préparés. Les projets les plus récents, menés par les centres EWAR et Praxis (Centre estonien de recherche socioéconomique) et financés par le Programme des dons de la Norvège, visent à intégrer les questions relatives à l’égalité des sexes dans les programmes d’études supérieures, notamment les programmes de formation du personnel enseignant.

50.Un certain nombre de programmes et de projets ont été poursuivis par l’État et d’autres parties prenantes, notamment deux vastes programmes du Fonds social européen menés durant la période 2008-2015 pour promouvoir l’égalité des sexes. Ces activités avaient principalement pour objet de faire prendre conscience à certains groupes et au public en général des stéréotypes sexistes ainsi que des droits et des obligations en matière d’égalité des sexes et des avantages de cette dernière. Elles ont donné lieu à des activités de formation et à d’autres activités de sensibilisation, à la formulation de directives à l’intention des employeurs et à l’établissement de documents d’information sur la loi sur l’égalité des sexes destinés aux experts juridiques et au public, à des études et à des campagnes médiatiques à grande échelle, etc. L’écart salarial femmes-hommes, l’équilibre entre la vie professionnelle et la vie familiale, notamment une paternité active, ont fait l’objet de plusieurs activités.

Écart salarial femmes-hommes

51.Un programme axé sur l’intégration de l’égalité des sexes et de l’équilibre entre la vie professionnelle et la vie privée, d’un montant de 2 millions d’euros, a été poursuivi durant la période 2012-2016 grâce à un financement de la Norvège pour la période 2009‑2014, coordonné par le Ministère estonien des affaires sociales. Le programme a donné lieu à la poursuite de différents projets. L’un d’entre eux visait à mettre en place de nouveaux principes de collecte et d’analyse des statistiques de l’écart salarial femmes-hommes par Statistcs Estonia ; un autre avait, entre autres, pour objet de mieux faire connaître les droits des victimes d’actes de discrimination et d’aider directement ces dernières en menant des actions en justice stratégiques et en améliorant le niveau des compétences des effectifs du Bureau du Commissaire à l’égalité des sexes et à l’égalité de traitement.

52.En vertu de la Constitution de la République d’Estonie, tout citoyen estonien a le droit de choisir librement son domaine d’activité, sa profession et son lieu de travail. Les citoyens d’États étrangers et les apatrides résidant en Estonie jouissent aussi de ces droits, au même titre que les citoyens estoniens, à moins que la loi n’en dispose autrement. Il s’ensuit que, en Estonie, la ségrégation sexiste est probablement liée aux attentes et aux stéréotypes sexistes.

53.Le 30 juin 2016, le Gouvernement estonien a adopté le Plan de développement de la protection sociale 2016-2023 et le Plan d’Action pour sa mise en œuvre. Le Plan de développement est le premier document décrivant de manière détaillée la politique sociale et la politique du travail. Il a deux objectifs principaux qui consistent, premièrement, à promouvoir un taux d’emploi élevé et une vie professionnelle de longue durée et de haute qualité et, deuxièmement, à favoriser l’égalité des sexes, accroître l’inclusion sociale et réduire les inégalités et la pauvreté. Il comporte quatre sous-objectifs, dont celui de l’égalité des sexes. Le plan couvre, à ce titre, les questions de l’indépendance économique aussi bien pour les femmes que les hommes ; la diminution des écarts salariaux entre les hommes et les femmes ; une participation équilibrée des femmes et des hommes à tous les niveaux de la prise de décision et des activités de direction dans la sphère politique ainsi que dans les secteurs public et privé ; la réduction de l’incidence négative des stéréotypes sexistes sur les décisions et la vie quotidienne des hommes et des femmes ; le renforcement de la protection des droits concernant l’égalité de traitement des hommes et des femmes et la mise à disposition des capacités institutionnelles nécessaires pour promouvoir l’égalité des sexes, y compris la généralisation d’une perspective antisexiste. Les mesures prévues dans le Plan d’action sont de diverses natures, puisqu’elles couvrent aussi bien des activités de sensibilisation que des initiatives législatives.

54.L’une des principales mesures du Plan d’action pour la mise en œuvre du Plan de développement de la protection sociale 2016-2023, a pour objet de réduire l’écart salarial femmes-hommes au cours des prochaines années en apportant des modifications à la loi sur l’égalité des sexes. Cette dernière donnera à l’Inspection du travail en Estonie le droit de superviser, au niveau de l’État, l’application de l’obligation de rémunérer à niveau égal les femmes et les hommes ainsi que le droit d’ordonner à des employeurs de procéder à un audit pour s’assurer de l’égalité des niveaux de salaire si les inspecteurs du travail ont des raisons de penser que les activités des employeurs considérés peuvent être discriminatoires.

55.Le Ministère des affaires sociales a procédé à une analyse du système de congé parental et de prestations familiales en 2016. Cette analyse présente un examen détaillé des statistiques sur les différents congés parentaux et prestations familiales (sept au total), examine les problèmes et les goulets d’étranglement actuels et formule diverses recommandations, étudie les problèmes et les blocages, et présente différentes recommandations ainsi qu’une étude de leur impact. L’analyse met en relief trois objectifs principaux : encourager une répartition plus équilibrée des congés parentaux et des avantages accordés aux pères et aux mères, assouplir la manière dont les parents peuvent utiliser leurs congés parentaux et recevoir des prestations, et veiller à l’utilité et à la transparence du système de congé parental et de prestations familiales sur le plan juridique. Les principales recommandations concernent l’établissement d’un congé de paternité minimum et la possibilité pour les deux parents de travailler à temps partiel et d’être en congé parental le reste du temps.

Les femmes dans la sphère politique et aux postes de direction

56.Le Commissaire à l’égalité des sexes et à l’égalité de traitement a publié une analyse des positions occupées par les femmes sur les listes électorales avant les élections parlementaires de 2015 afin de susciter un débat sur les possibilités qu’ont ces dernières femmes d’accéder à des fonctions politiques de haut niveau. Il a aussi réalisé une analyse sur la base des résultats des élections.

57.L’un des points relevant de l’objectif subsidiaire de l’égalité des sexes du Plan de développement consiste à assurer une participation équilibrée des femmes et des hommes à tous les niveaux de la prise de décisions politiques. Un indicateur de la composante « pouvoir » de l’indice d’égalité des genres de l’Institut européen pour l’égalité entre les hommes et les femmes sera utilisé pour mesurer les progrès accomplis dans ce domaine. Le Plan d’action prévoit de poursuivre diverses mesures au cours des prochaines années pour faire mieux comprendre aux entrepreneurs la nécessité et les possibilités d’assurer une représentation plus équilibrée des sexes au niveau de la direction. Il prévoit aussi l’organisation d’activités de sensibilisation pour soutenir la mise en place d’un système d’alternance hommes-femmes dans les listes électorales.

58.Le nombre de femmes juges à la Cour suprême est passé de 2 à 5 (sur un total de 19). La situation a également évolué de manière positive au niveau des postes de direction dans les institutions chargées d’assurer le contrôle de constitutionnalité et de légalité. En 2014, le Gouvernement estonien a nommé une femme au poste de procureur général et, en 2015, le Parlement a nommé une femme à la fonction de chancelière de la justice. Des postes tels que ceux d’auditeur général, de président de la Cour suprême, de secrétaire d’État, ou de directeur de la Chancellerie d’État, etc. sont tous occupés par des hommes et aucune mesure spécifique n’est prévue pour améliorer l’équilibre entre les hommes et les femmes aux postes de direction de ces institutions. Depuis 2016, Mme Kersti Kaljulaid est Présidente de la République d’Estonie.

59.ETNA Estonia est une ONG qui a pour mission de promouvoir et de soutenir l’entrepreneuriat des femmes vivant dans les zones rurales. Elle a mené un projet de microcrédit, cofinancé par Open Estonia Foundation durant la période 2012-2014, dans le but d’offrir un programme de soutien complet aux femmes souhaitant ouvrir une entreprise ou développer la portée de leurs activités actuelles. Ce programme a donné lieu à des services de mentorat, à des formations à l’entrepreneuriat et à l’octroi de prêts destinés aux femmes. Le mécanisme financier est demeuré en place à l’issue du projet.

Chevauchement des mécanismes institutionnels

60.Le risque de chevauchement des compétences du Commissaire à l’égalité des sexes et à l’égalité de traitement et du Chancelier de justice est atténué par les relations de collaboration entre les deux institutions ; aucune autre mesure n’a été jugée nécessaire.

Violence à l’égard des femmes, y compris la violence familiale

Point no 10 : Violence à l’égard des femmes

61.Toutes les formes de violence familiale sont érigées en infraction par le Code pénal estonien.

Section 121. Violences corporelles :

1)Tout acte portant atteinte à la santé d’autrui ou donnant lieu à des violences physiques sources de douleurs est passible d’une amende ou d’une peine pouvant aller jusqu’à un an d’emprisonnement ;

2)Tout acte de cette nature commis dans le cadre d’une relation étroite ou d’un lien de subordination est passible d’une amende ou d’une peine pouvant aller jusqu’à cinq ans d’emprisonnement.

Section 58. Circonstances aggravantes.

62.Circonstances aggravantes :

•L’infraction est commise envers une personne employée, ou financièrement dépendante de l’auteur de l’infraction, préalablement ou actuellement membre de sa famille, vivant avec ce dernier, ou ayant des liens de parenté avec celui-ci ;

•L’infraction est commise envers un mineur et se caractérise par un abus de pouvoir ou de confiance ;

•L’infraction est commise par un adulte en présence d’un mineur.

63.Le projet financé dans le cadre du Programme de dons de la Norvège pour la période 2009-2014, pour lutter contre « la violence familiale et sexiste », a pris fin et le rapport final est en préparation. Il n’est donc pas possible de présenter son analyse à ce stade. Toutes les activités prévues ont toutefois été mises en œuvre (travaux de recherche, formations, campagnes, documents d’information, services, livres, etc.) et un audit a été réalisé en 2016 dans le but de vérifier que le projet avait atteint ses objectifs. Le projet norvégien de dons (2009-2014), intitulé « Violence familiale et violence sexiste », qui a été coordonné par le Ministère des affaires sociales et mis en œuvre de 2012 à 2016, a été évalué par la société privée Civita pour le compte du pays donateur. Le Ministère des affaires sociales a l’intention de présenter un bilan détaillé de la mise en œuvre du programme une fois que le rapport final aura été établi.

64.L’année 2015 a marqué le lancement de la nouvelle stratégie nationale pour la prévention de la violence 2015-2020. Plusieurs campagnes ont été organisées à cette fin, comme la campagne de sensibilisation « Ouvrez les yeux », plus particulièrement destinée aux jeunes, une formation de formateurs et des sessions de formation portant sur l’autonomisation des garçons et des filles. Le festival annuel de danse intitulé « Danse à l’école », qui est organisé de manière coopérative, a été l’occasion d’entrer en contact avec des jeunes sur l’ensemble du territoire estonien pour débattre des rôles des hommes et des femmes et de la violence sexiste. La campagne a permis d’atteindre 73,2 % du groupe cible. Une campagne de lutte contre la violence sexuelle a également été menée dans le but de fournir aux victimes des informations sur les services disponibles et de sensibiliser un plus grand nombre de personnes au problème de la violence sexuelle.

65.En 2015, diverses activités de formation, organisées en collaboration avec plusieurs ONG et institutions publiques, ont visé à éduquer le personnel médical, les membres des services de police, les magistrats et les travailleurs sociaux dans le domaine de la violence à l’égard des femmes. Grâce à plusieurs campagnes d’information et de sensibilisation du public au problème de la violence, davantage de victimes se tournent vers la police et le Conseil des assurances sociales. L’Estonie estime qu’il s’agit là d’une évolution positive, car les victimes sont mieux informées des services de soutien disponibles et se sentent moins stigmatisées par suite de leur situation.

66.L’Estonie a préparé un projet de conférences interinstitutions pour l’évaluation des risques en 2015 en vue de son lancement en 2016. Des réseaux régionaux ont été mis en place et des formations ont été organisées ; le projet doit se poursuivre jusqu’en 2021.

67.Plusieurs modifications ont été apportées à la loi sur la procédure pénale depuis que l’Estonie a entrepris d’appliquer la directive européenne sur les droits des victimes. Il est possible de suivre une démarche plus personnalisée dans le cadre des procédures pénales pour assurer la satisfaction des besoins et le plein respect des droits des victimes.

Formation et établissement de rapports

68.L’Académie estonienne des sciences de la sécurité a entrepris d’organiser des sessions de sensibilisation à l’intention des membres des services de police en 2016. L’académie est une institution publique, qui assure une formation professionnelle aux fonctionnaires (notamment les spécialistes des questions fiscales et douanières, les surveillants de prison et les agents de police) relevant du Ministère estonien de l’intérieur. Il est également prévu de poursuivre ce type de sessions dans le cadre du programme officiel de formation pour couvrir l’ensemble des membres des services de police. Ces derniers suivaient auparavant des cours conçus pour leur apprendre à communiquer avec les victimes et inciter ces dernières à solliciter l’aide de responsables en ce domaine. Soixante-dix séances de formation (sur le traitement spécial des mineurs, l’aide aux victimes, les opérations menées conjointement avec les municipalités et la violence familiale) ont été organisées au cours des cinq dernières années au profit de 780 agents).

69.Le Département de la formation judiciaire de la Cour suprême organise chaque année, outre ses formations judiciaires, des formations couvrant des questions relatives à la violence. La dernière session, qui a eu lieu en mars 2017, était consacrée aux aspects psychologiques de la violence familiale. Un certain nombre de séminaires couvrant diverses questions liées à la violence sont aussi organisés durant l’année.

70.Plusieurs projets ont été formulés dans le but de déterminer les besoins de formation du personnel médical ainsi que les compétences nécessaires pour déterminer si une personne a été victime de violence et lui fournir l’aide nécessaire. L’Estonie a formulé une directive à l’intention des prestataires de soins de santé portant sur l’aide devant être apportée aux victimes de violence sexuelle.

71.Des tables rondes réunissant des travailleurs sociaux, des membres du personnel médical, des agents de police et des juristes ont été organisées dans le cadre du Programme de dons de la Norvège. La faculté de médecine de l’Université de Tartu a également participé à un projet visant à parvenir à une entente sur la définition de la violence, de ses causes et de ses conséquences et a ensuite créé des programmes de formation en ce domaine à l’université.

72.Les auteurs d’actes de violence peuvent participer au programme social lorsque la procédure pénale est annulée sur la base du principe de l’opportunité. Un autre programme, facultatif, a aussi été conçu et devrait être mis en œuvre en 2018. Les prisons offrent aux auteurs de violences familiales et de violences sexuelles la possibilité de participer à différents programmes.

Ressources et services de soutien

73.L’Estonie a réalisé des progrès considérables dans le domaine de l’aide aux victimes d’actes de violence. Les services de soutien aux femmes sont devenus des services officiels à compter du 1er janvier 2017 en vertu de la loi sur l’aide aux victimes, ce qui accroît leur viabilité ainsi que les financements mis à disposition des organisations qui ont l’intention de fournir ces prestations à l’avenir. Ils sont assurés gratuitement à toutes les victimes de sexe féminin et à leurs enfants. La notion de victime de la violence à l’égard des femmes est pour la première fois intégrée dans la législation estonienne. Cela contribuera dans une mesure importante à faire reconnaître l’existence de ce problème et à assurer la fourniture de services de soutien adéquats aux victimes. Les centres d’aide aux femmes fournissent des services particuliers aux victimes de sexe féminin. La plupart des prestataires sont des organisations non gouvernementales ou des organisations féminines. Les foyers d’accueil de femmes fournissent aux victimes un ensemble de services gratuits : consultation psychologique initiale adaptée à la situation de la victime, psychothérapie, conseils juridiques et hébergement, si nécessaire. Les femmes peuvent venir dans les foyers d’accueil avec leurs enfants lorsqu’elles ont besoin d’être logées dans de bonnes conditions de sécurité. Les victimes de violence à l’égard des femmes et les membres de leur famille peuvent également appeler un numéro d’urgence 24 heures sur 24 (les foyers d’accueil sont tous aussi ouverts 24 heures sur 24).

74.La plupart des victimes de violence familiale ont recours au système national d’aide aux victimes. Les responsables de cette aide fournissent des services de soutien, organisent une assistance psychologique et, si nécessaire, assurent aussi le versement d’une indemnisation par l’État aux victimes. Les services d’aide aux victimes donnent des conseils et aident les femmes à communiquer avec les autorités publiques nationales et locales et avec des juristes. Des services spéciaux sont fournis aux victimes de la traite des personnes et aux mineurs victimes d’exploitation sexuelle, notamment des services d’hébergement dans de bonnes conditions de sécurité, des services de restauration, des soins de santé, une aide matérielle et des conseils psychologiques, si nécessaire. L’Estonie a 23 responsables de l’aide aux victimes (ils sont au minimum un par comté), qui sont généralement basés dans les locaux de la police. Tous les comtés ont également un centre d’aide aux femmes.

75.Des services d’aide aux victimes de violences sexuelles ont été mis en place en 2015. L’Association estonienne pour la promotion de la santé sexuelle a mis en œuvre un projet qui a permis de créer un réseau et de doter les hôpitaux des moyens requis pour assurer un soutien spécialisé aux victimes de viol. Depuis novembre 2016, les services sont coordonnés par le Conseil des assurances sociales, ce qui signifie qu’ils font maintenant partie intégrante du système public d’aide aux victimes. L’Estonie continue de développer ces services.

Interdiction de la torture et d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Point no 11 : Torture

76.Les dispositions requises concernant la torture ont été incluses dans le Code pénal dans le cadre des modifications apportées à ce dernier au début de 2015. Le Code applique depuis lors la définition internationale de la torture (art. 290 semel).

77.La rigueur des sanctions imposées correspond à celle des sanctions appliquées à des crimes de même gravité. Il n’est pas prévu de créer un organe distinct pour procéder aux enquêtes sur les affaires de torture ou de maltraitance, qui sont traitées par la police. Les services de contrôle interne du Service de la police et des gardes-frontière sont chargés des affaires de violence policière, et les procédures pénales de détention provisoire peuvent être transférées au Service de sécurité interne par le procureur.

78.Le nombre de crimes de torture déclarés et les chefs d’accusation retenus sont présentés dans les tableaux de l’annexe au rapport. En 2015, trois personnes ont été condamnées conformément aux dispositions de l’article 291 du Code pénal tandis que, en 2016, une personne a été acquittée et aucune n’a été condamnée (voir les tableaux 1 et 2).

Point no 12 : Moyens de contrainte physique dans les établissements pénitentiaires

Utilisation de moyens de contrainte physique

79.Des moyens de contrainte physique ne sont utilisés que dans les cas prévus par la loi sur l’incarcération, à des fins de prévention ou de restreinte, de manière à ne pas violer les droits légaux. Ils ne peuvent en aucune circonstance être employés à des fins punitives et pendant plus de douze heures. Ils cessent d’être utilisés dès que la menace posée par le détenu s’est dissipée.

80.En vertu d’une nouvelle disposition incluse dans la loi sur l’incarcération de 2015, tout détenu ayant fait l’objet des mesures de contrainte physique doit passer une visite médicale de contrôle. Lorsque le détenu a été assujetti à des mesures de coercition directes, un membre de la profession médicale doit s’assurer de son état de santé dans les meilleurs délais si les mesures appliquées ont donné lieu à l’exercice de la force, si le détenu soumet une plainte concernant son état de santé ou si la nécessité d’un tel contrôle devient apparente pour toute autre raison que ce soit. Le détenu doit également faire l’objet d’une visite médicale lorsque des moyens de contrainte ont été utilisés de manière continue pendant plus de quinze minutes, sauf si cette sanction résulte d’un acte jure gestionis ou que les mesures aient consisté à utiliser des menottes ou des entraves durant un déplacement.

81.Si des moyens de contrainte sont utilisés par suite d’un acte jure gestionis, le détenu doit avoir été entendu avant la promulgation dudit acte et doit être informé des raisons pour lesquelles les moyens de contrainte sont employés. S’il n’est pas d’accord avec la teneur et les raisons de l’acte jure gestionis, il peut contester ce dernier et demander que les mesures prises sur la base de cet acte soient considérées illégales. Le Département des établissements pénitentiaires du Ministère de la justice est responsable de la supervision des détenus. La légalité du recours à des moyens de contrainte doit être vérifiée lorsque ces derniers sont appliqués, de manière à identifier toute maltraitance ou utilisation abusive. La légalité et la validité de la mesure prise par l’établissement pénitentiaire sont contrôlées, de même que son enregistrement en bonne et due forme. Lorsqu’une violation est détectée dans le cadre de ce contrôle, l’établissement pénitentiaire reçoit des instructions et des directives pour éviter que de telles violations ne se reproduisent à l’avenir.

82.Soixante-dix-sept pour cent des membres du personnel des établissements pénitentiaires possèdent les compétences professionnelles requises, et savent donc comment utiliser les moyens de contrainte. Ils apprennent également, dans le cadre de formations dispensées en cours d’emploi, les manières de remédier à certaines situations, les fondements juridiques des actions menées et les techniques qui doivent être employées lors de l’utilisation de moyens de contrainte. Grâce à la supervision exercée et à ces formations, ces membres du personnel connaissent les principes régissant l’emploi des mesures de contrainte agréées au plan international et les appliquent. Le Ministère de la justice a entrepris d’établir un règlement précisant les procédures à suivre lors du recours à des moyens de contrainte, qui prend en considération les recommandations des organisations internationales, la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme et les recommandations formulées lors des visites d’inspection du Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT).

Droit de recours des prisonniers

83.La procédure de traitement des lettres et des plaintes de détenus, y compris le délai dans lequel une réponse doit être donnée à une plainte, est régie par la loi. L’imposition d’un délai garantit un traitement rapide des plaintes. Les prisons estoniennes et le Département des établissements pénitentiaires du Ministère de la justice ont également des services de contrôle interne. Les agents chargés de ce dernier ont principalement pour mission de prévenir, de constater et de traiter les infractions commises par les surveillants et autres employés des prisons. Le service de contrôle interne est informé de tout soupçon d’infraction par un surveillant.

84.Le service enregistre et examine tous les faits de l’affaire et demande le lancement d’une procédure pénale, si nécessaire. Il enquête sur les plaintes concernant l’utilisation de moyens de contrainte. Il a pour priorité de détecter et de résoudre les délits commis par des surveillants. Tout détenu déterminant que la prison a violé ses droits dans le cas de la procédure de protection juridique peut saisir la justice. Le tribunal se prononce sur la légalité des activités de la prison. Ces dernières sont également supervisées par le Chancelier de justice, qui publie chaque année le bilan de ses activités.

Régime cellulaire ou isolement

85.Un détenu est séparé des autres détenus lorsqu’il est condamné au régime cellulaire pour purger une peine ou est placé en isolement pour des raisons de sécurité. L’isolement d’un détenu ne résulte pas de la sentence, mais constitue une mesure de sécurité supplémentaire qui n’est prise que dans des cas légitimes, à des fins de prévention. Tout manquement à la discipline donne lieu à la poursuite d’une procédure détaillée donnant lieu à l’évaluation des faits relatifs à l’infraction, du degré de culpabilité et de la gravité de la faute, ainsi qu’à l’imposition d’une mesure disciplinaire au détenu. Le placement d’un détenu en régime cellulaire est la mesure disciplinaire la plus grave et ne doit être effectué que lorsque cela est totalement justifié.

86.Les jeunes et les mineurs ne peuvent demeurer en régime cellulaire ou en isolement que pendant un temps considérablement plus court que les adultes. Le placement d’un détenu dans une cellule verrouillée ou en isolement n’est pas nécessairement synonyme de régime cellulaire. La législation ne prévoit pas qu’un détenu doive être enfermé seul dans une cellule verrouillée ou isolé sans contact avec autrui. Plusieurs détenus peuvent, de fait, être enfermés dans une même cellule. Les prisons font notamment observer que les détenus séparés des autres ont le droit non seulement de communiquer avec des personnes en dehors de la prison (réunions avec des membres de la famille, appels téléphoniques), mais aussi d’avoir des entretiens avec un psychologue et de communiquer avec les surveillants (par exemple un interlocuteur désigné), de participer à des programmes sociaux, à des clubs de loisirs et à d’autres activités sociales.

Droits des personnes handicapées

Point no 13 : Traitement psychiatrique coercitif

87.Un établissement de santé est tenu d’organiser tous les six mois l’examen médical, par au moins deux psychiatres, de toute personne faisant l’objet d’un traitement psychiatrique coercitif afin d’évaluer la nécessité de poursuivre le traitement en question. Si le comité médical détermine qu’il n’est pas nécessaire de le poursuivre, l’établissement de santé doit soumettre au tribunal une demande de cessation du traitement. Un proche, le représentant ou le conseil de la personne faisant l’objet du traitement peut également demander l’arrêt de celui-ci en vertu de l’article 403 du Code de procédure pénale. Un tribunal peut ordonner l’évaluation par un spécialiste supplémentaire de la personne considérée.

Point no 14 : Droits des personnes soumises à un traitement psychiatrique coercitif dans le cadre d’une procédure judiciaire

88.En vertu de l’article 395 du Code de procédure pénale, toute personne faisant l’objet d’une procédure visant à lui faire subir un traitement psychiatrique coercitif participe à ladite procédure et exerce les droits incombant à tout suspect ou accusé si sa santé mentale le lui permet. L’article 400 du Code de procédure pénale dispose en outre que toute personne faisant l’objet d’une demande d’administration d’un traitement psychiatrique coercitif doit, de manière générale, être convoquée devant le tribunal si sa santé mentale le permet.

89.Conformément à l’article 45, paragraphe 2, alinéa 2 du Code de procédure pénale, toute personne qui, en raison d’un handicap mental ou physique, ne peut se défendre elle-même ou dont la défense est compliquée par son handicap doit être accompagnée tout au long des procédures par un conseil. Un avocat, qui participera à la procédure dès le début, sera alors désigné dans le cadre de l’assistance judiciaire.

90.Une formation portant sur la manière de traiter les personnes atteintes de troubles mentaux et d’évaluer leur situation dans le cadre des différentes procédures judiciaires a été organisée à l’intention des magistrats en 2015. Ces derniers ont également reçu une formation générale couvrant les droits de l’homme et, plus particulièrement, la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, dans le cadre de laquelle des décisions de justice pertinente ont été examinées.

Point no 15 : Droits des enfants handicapés

91.La nouvelle loi sur les établissements d’enseignement professionnel, entrée en vigueur le 1er septembre 2013, impose aux établissements scolaires l’obligation de garantir aux élèves un accès à des services de soutien, notamment des services d’orientation professionnelle et d’aide à l’apprentissage ainsi que des services pédagogiques spéciaux et sociaux et des services psychologiques. Les établissements scolaires doivent aussi veiller à ce que les programmes soient accessibles à tous en offrant des options souples à différents groupes cibles.

92.Le nouveau règlement du Ministre de l’éducation et de la recherche portant sur les « Conditions et procédures concernant les personnes ayant des besoins spéciaux dans les établissements d’enseignement professionnel » est entrée en vigueur le 18 mai 2014. L’enseignement professionnel suit désormais une approche axée sur les résultats, ce qui n’était pas le cas lorsque la réglementation précédente régissait l’apprentissage des personnes ayant des besoins spéciaux ; il est de ce fait désormais possible de présenter des informations plus détaillées qu’auparavant sur le nombre d’élèves inscrits qui ont des besoins spéciaux et sur l’appui dont ils bénéficient tout au long de leurs études. Tous les employés des établissements scolaires participent au processus. Les modifications apportées ont pour objet de promouvoir l’indépendance et la responsabilité des apprenants. Le règlement souligne également l’importance de la coopération entre les partenaires : il est conseillé aux établissements scolaires de collaborer non seulement avec les directeurs des établissements et les autorités locales, mais aussi avec les entrepreneurs et d’autres partenaires.

93.La réglementation précise les besoins spéciaux qu’un établissement scolaire peut recenser dans le but de mettre en place un service de soutien ou d’évaluation adapté et de justifier la mise en place de ce service. Tous les établissements scolaires peuvent ainsi classer les besoins spéciaux de la même manière et les élèves ayant les mêmes besoins spéciaux peuvent obtenir des services de soutien similaires.

94.La stratégie de l’Estonie pour une formation tout au long de la vie 2014-2020 définit les cibles d’une éducation inclusive, qui consistent à promouvoir un programme national inclusif axé sur les compétences, l’inclusion des minorités nationales, la formation des enseignants et la fourniture de conseils pédagogiques.

95.Un réseau régional pour l’éducation et l’orientation scolaire, Pathfinders, a été mis en place durant l’automne 2014. Ce réseau permet à tous les élèves et étudiants d’Estonie d’avoir facilement accès à des conseils d’orientation donnés par des professionnels de haut niveau et privilégie les services aux élèves qui ont des besoins éducatifs spéciaux. Un nouveau modèle d’éducation inclusive est en cours d’élaboration.

Élimination de l’esclavage et du travail forcé

Point no 16 : Traite des êtres humains

96.La loi sur l’aide aux victimes a été modifiée le 1er janvier 2017 de manière à permettre de procéder rapidement à l’identification des victimes et de mieux les aider. Il est maintenant possible de fournir pendant soixante jours, par l’intermédiaire du Conseil des assurances sociales, des services aux victimes présumées de la traite d’êtres humains en plus des services aux victimes de crimes établis dans le cadre de procédures pénales.

97.Les spécialistes de différentes institutions suivent régulièrement des formations. Les quatre sessions de formation régionales organisées par le Ministère des affaires sociales en 2015 et en 2016 à l’intention des membres du Service de la police et des gardes-frontière, de l’Inspection du travail, de la Direction des impôts et des douanes et du Bureau du Procureur du District du Nord ont été parmi les plus importantes. Ces sessions, qui étaient consacrées à la traite des êtres humains à des fins d’exploitation par le travail, ont donné lieu à la présentation des obligations qui incombent à l’État aux fins de la prévention de la traite des êtres humains, à l’examen des questions relatives à l’identification des victimes et à l’apport d’une aide à ces dernières, à la coopération entre l’Inspection du travail, le Service de la police et des gardes-frontière (organisation d’opérations conjointes), ainsi qu’au rôle joué par ces institutions dans le cadre de la détection et du traitement des affaires de traite et d’exploitation par le travail.

98.Un juge a participé à une formation à l’étranger sur la traite des êtres humains en 2016. Outre la formation organisée par le Ministère des affaires sociales, plusieurs sessions ont été consacrées notamment, au niveau du Service de la police et des gardes-frontière, aux liens entre les migrations illégales, la contrebande et la traite des êtres humains.

99.Le Conseil des assurances sociales prend les dispositions nécessaires pour aiguiller les victimes présumées et confirmées de la traite des êtres humains vers des services et des prestataires et assure également, entre autres, une aide juridique essentielle. L’apport d’une aide aux victimes n’est pas nécessairement lié à une procédure pénale. Trois prestataires ont conclu des contrats avec l’État pour assurer ces services.

100.En 2016, la plupart des décisions judiciaires ont été rendues à la suite d’une procédure transactionnelle, deux affaires seulement ayant fait l’objet d’une procédure générale. Au total, 11 personnes ayant amené illégalement des Vietnamiens en Union européenne ont été déclarées coupables de traite d’êtres humains (art. 133 bis) dans le cadre de trois procédures judiciaires distinctes. Elles ont été condamnées à des peines d’emprisonnement allant de six mois à cinq ans pour avoir participé à cette opération et commis d’autres infractions, mais les peines n’ont pas été généralement pleinement appliquées, et les condamnés ont bénéficié d’un sursis probatoire allant d’un à cinq ans. Quatre personnes ont, de surcroît, été expulsées d’Estonie à titre de peine complémentaire et il leur est interdit de pénétrer sur le territoire estonien pendant trois ou cinq ans. Les articles utilisés par trois personnes lors de la commission de l’infraction, aussi bien leurs téléphones mobiles que les matériels de randonnées spéciaux, ont été confisqués. L’un des condamnés a été puni pour avoir forcé une autre personne à travailler pour lui à son domicile et à son lieu de travail.

101.La personne condamnée pour avoir fourni son appui à la traite d’êtres humains (art. 133 semel) a participé aux activités menées pour faire traverser illégalement la frontière aux ressortissants vietnamiens et a facilité la traite d’êtres humains. Elle a été condamnée à trois ans de prison, dont un an sans sursis, et à cinq années de sursis probatoire.

102.Les peines prononcées à l’encontre de sept personnes pour proxénétisme (art. 133 bis) sont allées de trois à quatre ans et demi d’emprisonnement, avec sursis probatoire de trois à cinq ans. Deux personnes ont été condamnées à une peine d’emprisonnement sans sursis, l’une pour une période de six mois et la seconde pour une période de deux ans et huit mois. Ces deux individus ont aussi été condamnés à payer une amende de 20 000 euros au cas où ils commettraient une nouvelle infraction avant la fin de leur sursis probatoire de trois ans. Des actifs ont été saisis dans des logements et dans des entreprises, de même que les liquidités, les biens immobiliers et les automobiles appartenant à trois criminels. Le montant total confisqué, soit 278 754 euros, se composait de 226 545 euros de liquidités venant de l’un des criminels et de 52 209 euros d’actifs possédés par un couple marié ayant agi de concert.

103.Les personnes coupables d’exploitation de mineurs ont été frappées de peines de prison allant d’un an et quatre mois à cinq ans. Ces peines d’emprisonnement ont été pleinement appliquées aux coupables qui n’avaient pas purgé de peine au préalable. Les personnes dont la peine a été pleinement appliquée ont été condamnées avec sursis probatoire de deux à cinq ans. Trois personnes ont reçu l’ordre de participer à un programme social durant la période de sursis et deux autres ont été obligées de suivre un programme de traitement ou de consulter un sexologue ou un psychiatre à leurs propres frais. Une personne a été placée sous surveillance électronique pour une période de six mois. Il a été interdit de manière générale à ces individus de communiquer avec des mineurs, y compris des mineurs membres de leur famille, durant la période de leur sursis. Un grand nombre de ces criminels avait également organisé l’obtention de services sexuels de mineurs (art. 145 semel).

104.Deux campagnes visant la traite d’êtres humains ont été organisées :

•Une campagne médiatique en ligne organisée dans le cadre du projet ISEC (Prévenir et combattre la criminalité) financé par l’Union européenne en Estonie, en Lettonie, en Suède, et en Lituanie ;

•Une campagne menée sur le territoire estonien sur le thème de la médiation au travail.

105.Cinquante-deux pour cent des membres du groupe cible ont suivi cette dernière et s’en sont souvenu.

Liberté et sécurité des personnes et traitement humain des prisonniers

Point no 17 : Droits des détenus

106.En vertu du paragraphe 217 de l’article 10 du Code de procédure pénale, tous les détenus ont l’assurance que des tiers seront informés de leur détention à moins que la notification de leur détention ne puisse nuire à la procédure pénale. Dans ce cas, le procureur peut décider de ne pas autoriser la communication de cette information.

107.Tous les droits des prisonniers, y compris le droit de recevoir à tout moment des soins médicaux, s’appliquent aux personnes arrêtées en vertu de l’article 86 de la loi sur l’incarcération. La réglementation adoptée le 27 septembre 2011 par le Ministre de l’intérieur sur les procédures internes de centres de détention dispose également que les détenus doivent passer un examen médical à leur arrivée.

108.Conformément au paragraphe 217 de l’article 10 du Code de procédure pénale, le représentant légal d’un mineur doit être informé de la détention dudit mineur, sauf si cette information peut nuire au mineur ou compromettre la procédure pénale.

109.Conformément au paragraphe 19 de l’article 3 du Code de procédure relative aux délits, tout mineur faisant l’objet d’une procédure judiciaire doit systématiquement être accompagné d’un conseil. La présence de ce dernier est autorisée, mais non obligatoire durant la phase préliminaire. Il importe toutefois de garder à l’esprit qu’une entité chargée des procédures relatives aux délits peut uniquement imposer une amende ; elle n’a pas compétence pour priver de liberté une personne accusée d’un délit ou d’une infraction de faible gravité ou importance. C’est le cas, par exemple, de 75 % des délits commis par des mineurs qui concernent la consommation de tabac ou d’alcool, ou encore l’utilisation des transports publics sans payer. Ces délits sont généralement passibles d’une amende de 10 à 20 euros.

110.Le versement d’une indemnisation collective aux personnes détenues par suite des troubles massifs survenus durant la « Nuit du soldat de bronze » n’a pas encore été effectué. Il semblerait de surcroît que cette indemnisation n’ait pas de base juridique effective, bien qu’elle puisse être justifiée par les dispositions de la loi sur la réparation des dommages causés dans le cadre de poursuites de délits (art. 23, par. 3) qui est entrée en vigueur le 1er mai 2015 et s’applique rétroactivement aux affaires qui n’étaient pas couvertes par la loi précédente.

Point no 18 : Situation dans les prisons

Conditions de vie et services médicaux

111.La législation fixe la superficie minimale des cellules pour éviter la surpopulation carcérale. Les personnes détenues dans une prison de très haute sécurité doivent disposer d’au moins 3 mètres carrés de surface de plancher. Elles bénéficient en fait actuellement de 4 mètres carrés dans ces établissements, seuls les détenus de sexe masculin en régime ouvert à la prison de Tallinn étant logés dans des cellules d’une surface utile de 3 mètres carrés. Les capacités dont dispose un établissement pénitentiaire pour organiser les conditions de vie, le travail, les activités d’apprentissage et les loisirs des prisonniers sont prises en considération dans le cadre de la détermination du nombre maximum de prisonniers autorisé.

112.Les travaux de construction des nouveaux bâtiments de la prison de Tallinn seront achevés en décembre 2018. Les installations seront alors transférées dans les nouveaux locaux, et les anciens seront abandonnés. Chaque détenu disposera d’une surface de plancher de 4 mètres carrés dans la nouvelle prison, qui sera dotée de meilleurs équipements, et offrira de meilleures conditions sanitaires et hygiéniques. La prison de Tallinn s’efforce actuellement d’assurer des conditions de vie décente dans tout l’établissement, ainsi que dans les cellules du bâtiment K1 dans la mesure des ressources disponibles.

113.La médecine pénitentiaire a notablement évolué au cours des dernières années. Elle fait partie du système général de santé et a pour objectif de garantir aux détenus les mêmes services que ceux assurés par la médecine civile et de maintenir les temps d’attente pour obtenir des soins de santé généraux et spécialisés à des niveaux similaires à ceux observés pour la médecine civile. Cet objectif a été atteint en 2016. Le service médical des prisons garantit aux détenus des services de santé généraux et spécialisés ambulatoires et peut aussi assurer, si nécessaire, des soins infirmiers dans tous les établissements. Les détenus atteints de tuberculose sont soignés dans l’hôpital spécial de la prison de Tallinn à Maardu. Un détenu peut aussi être transféré dans un hôpital civil si cela est nécessaire. Les frais médicaux des détenus sont couverts par le budget de l’État par l’intermédiaire du Ministère de la justice.

Communications en langues étrangères

114.Toutes les communications, en quelque langue que ce soit, sont reçues et enregistrées par le service des prisons. L’estonien est la langue officielle et la langue de l’administration publique de la République d’Estonie en vertu de la législation nationale. Lorsqu’une partie à une procédure ou son représentant ne parle pas la langue dans laquelle le dossier est traité, les parties à la procédure peuvent requérir les services d’un interprète ou d’un traducteur. Les possibilités d’obtention de l’aide d’un traducteur pouvant être limitées dans les prisons, un prisonnier qui n’a aucune connaissance de la langue estonienne, n’a pas les moyens de payer une traduction, n’a pas eu la possibilité d’apprendre l’estonien en prison, mais soumet des documents dont la traduction revêt de l’importance pour la protection de ses droits et de ses libertés n’est pas tenu, à titre exceptionnel, de fournir lui-même une traduction. En règle générale, les surveillants de prison parlent suffisamment bien le russe et l’anglais pour pouvoir communiquer avec les détenus qui ne parlent pas la langue nationale et, si nécessaire, les aider à comprendre la teneur des documents rédigés en estonien.

115.Les prisons font appel à des organismes d’enseignement de l’estonien, qui sont chargés de déterminer le niveau d’aptitude linguistique des prisonniers, d’encourager ces derniers à apprendre l’estonien, de leur enseigner cette langue et de coordonner les cours externalisés. La méthode de contrôle des connaissances de la langue nationale, les normes et les programmes de formation linguistique ont été mis au point et des manuels d’apprentissage de l’estonien ont été conçus pour les prisons. Les cours assurés en prison vont jusqu’au niveau B2 (C1 dans la prison de Tartu). Les détenus sont payés pour apprendre l’estonien.

Séparation des détenus et visites de longue durée

116.Les mineurs et les adultes, les hommes et les femmes, les personnes condamnées et les personnes arrêtées sont détenus dans des locaux distincts dans les lieux de détention estoniens.

117.Conformément à la loi sur l’incarcération, le coût des visites de longue durée est assumé par le détenu ou le visiteur. Les frais de visite comprennent les frais d’hébergement et d’alimentation du visiteur ainsi que le coût de ses produits de toilette. Le coût moyen d’une visite d’une durée de vingt-quatre heures est d’environ 35 euros.

Point no 19 : Durée des procédures

118.Les modifications apportées au Code de procédure pénale entrées en vigueur le 1er septembre 2016 ont raccourci la durée de la période de détention provisoire autorisée dans le cadre d’une procédure pénale (elle peut aller jusqu’à six mois dans le cas d’un meurtre au premier degré, jusqu’à quatre mois pour un meurtre au second degré et jusqu’à deux mois dans le cas des mineurs) ; le procureur doit également requérir son prolongement tous les deux mois. Les procédures pénales concernant des personnes placées en détention provisoire sont poursuivies en priorité ; la période d’examen est déterminée aussi rapidement que possible (art. 2681, par. 2, du Code) et il est possible de présenter une demande de procédure accélérée à la Cour (art. 2741 du Code).

119.L’article 15 de la loi sur la responsabilité de l’État dispose qu’une personne ne peut prétendre à une indemnisation au titre des préjudices causés par une procédure judiciaire, y compris une décision de justice, que si le juge a commis une infraction pénale dans le cadre de la procédure. Elle n’est donc dédommagée que dans ce cas.

Traitement des étrangers, y compris les réfugiés et les demandeurs d’asile

Point no 20 : Traitement des réfugiés et des demandeurs d’asile

Admission de réfugiés

120.Conformément aux dispositions de l’article 3, paragraphe 4 de la loi sur l’octroi d’une protection internationale aux étrangers, les demandes de protection internationale sont reçues et traitées par le Service de la police et des gardes-frontière. En vertu de l’article 14, paragraphe 41 de cette même loi, toutes les demandes sont enregistrées et traitées immédiatement ou dans un délai maximum de trois jours ouvrables. Le Service de la police et des gardes-frontière garantit aussi, conformément aux dispositions de l’article 14, paragraphe 3 semel de la loi que des informations sur la possibilité de faire une demande de protection internationale sont fournies aux étrangers se trouvant dans des centres de détention ou détenus aux postes situés aux frontières internationales, y compris dans les zones de transit, s’il existe des raisons de penser que ces derniers peuvent souhaiter faire une demande à cet effet.

121.Les droits et les obligations de tout bénéficiaire d’une protection internationale sont expliqués aux étrangers détenus dans les meilleurs délais et dans une langue qu’ils comprennent dans le but de leur assurer une protection juridique effective. L’article 10, paragraphe 2, alinéa 1, de la loi sur l’octroi d’une protection internationale aux étrangers dispose qu’un demandeur de protection internationale a le droit de recevoir dans les meilleurs délais et au plus tard dans les quinze jours suivant la soumission de sa demande de protection internationale, oralement et par écrit dans une langue qu’il comprend, des informations sur ses droits et ses obligations, y compris des informations sur l’aide juridictionnelle et sur l’assistance dont il peut bénéficier à son arrivée, sur les organisations qui peuvent lui procurer des informations, sur les délais de traitement des demandes de protection internationale et sur les conséquences de manquements aux obligations. Il leur est possible d’obtenir à la frontière, entre autres, des services d’interprétation et une assistance médicale.

122.Les membres du Service de la police et des gardes-frontière opérant aux frontières ont reçu une formation qui leur permet de déterminer quelles sont les personnes qui peuvent souhaiter demander une protection internationale. Toute indication par la personne étrangère que le retour dans son pays est impossible suffit à garantir l’enregistrement et l’acceptation de la demande. Les agents peuvent, outre leur formation, également utiliser des documents et des listes de contrôle pour appuyer leurs actions concernant l’acceptation de demandes de protection internationale, l’organisation de services d’hébergement et d’autres procédures.

123.La formation de ces agents est organisée avec l’appui du Fonds Asile, Migration et Intégration (FAMI). Par exemple, des formations régulières portant sur la protection internationale ont été assurées aux agents et aux officiers de réserve du Service de la police et des gardes-frontière. Elles ont permis d’améliorer les connaissances et les compétences des gardes-frontière dans le domaine des procédures de protection internationale.

124.Une formation a été dispensée à environ 75 agents en 2010 ; quelque 150 gardes-frontière ont reçu une formation interne portant sur l’asile ; 70 gardes-frontière ont participé à une formation organisée par l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) et une dizaine d’agents responsables ont participé à des voyages de formation en 2011 et 2012. Plusieurs ateliers consacrés à l’amélioration de la qualité des procédures, notamment aux frontières, ont été organisés en 2013. Environ 200 réservistes ont reçu une formation et 11 agents ont participé à des voyages de formation en 2015 et 2016.

Recours contre un ordre d’expulsion

125.Conformément à l’article 10, paragraphe 1 de la loi sur l’octroi d’une protection internationale aux étrangers, toute personne soumettant une demande de protection internationale se voit garantir les droits et libertés découlant de la Constitution, des lois et autres textes législatifs ainsi que des traités auxquels la République d’Estonie est partie, de la législation de l’Union européenne et des normes généralement reconnues du droit et des coutumes internationales. L’article 25, paragraphe 2 de la loi dispose que, lorsqu’un demandeur de protection internationale fait appel de la décision concernant sa demande, le demandeur en question a les droits et les obligations spécifiés dans la loi pendant la période du recours et de la procédure judiciaire, y compris le droit de demeurer sur le territoire estonien jusqu’à ce que la décision finale ait été rendue.

126.Dans le cas des décisions prises sur la base de l’article 25, paragraphes 3 et 4 semel, le tribunal peut, dans certains cas, juger du droit de la personne étrangère à rester dans le pays. Le requérant est toutefois autorisé à demeurer sur le territoire estonien jusqu’à ce que le tribunal ait rendu sa décision. Toute personne dont le droit de demeurer dans le pays durant la procédure judiciaire a été restreint par un tribunal a toujours le droit de faire appel.

127.Conformément à l’article 126, paragraphe 3 du Code de procédure administrative, les questions de protection internationale sont examinées en priorité par le tribunal. Cette nouvelle disposition permet d’assurer des poursuites judiciaires plus rapides et plus efficaces.

128.Le centre de détention du Service de la police et des gardes-frontière et les centres d’hébergement emploient également des conseillers juridiques avec l’appui de financements du Fonds Asile, Migration et Intégration. Ces conseillers ont suivi des cours de formation internationaux sur le terrain, notamment une formation en cours d’emploi de vaste portée sur l’acquis et le droit administratif concernant les étrangers en 2017. Ils ont pour mission d’expliquer de manière professionnelle et impartiale aux demandeurs leurs droits et leurs obligations ainsi que la procédure judiciaire, et de les aider à communiquer avec diverses autorités. Les demandeurs ont systématiquement accès à ces conseillers à compter de la date de la soumission de leur demande jusqu’à la fin de la procédure. Ceux qui vivent en dehors d’un centre d’hébergement peuvent aussi obtenir gratuitement des conseils juridiques.

129.En vertu de l’article 10, paragraphe 2, alinéa 10 de la loi sur l’octroi d’une protection internationale aux étrangers, ces derniers peuvent saisir les tribunaux lorsque leurs droits et libertés ont été violés. En vertu des dispositions de l’article 25 semel, paragraphe 1 de la loi, la décision de rejeter une demande ou de révoquer une protection internationale peut être contestée devant le tribunal administratif dans les dix jours qui suivent l’annonce de la décision. L’article 10, paragraphe 2, alinéa 9 de la loi dispose qu’un étranger peut obtenir une aide juridique gratuite pour contester la décision. Comme indiqué précédemment, les conseillers juridiques ont le devoir d’aider les demandeurs à prendre contact avec le barreau afin de bénéficier d’une aide judiciaire gratuite durant la procédure judiciaire. La brièveté du délai de recours garantissant l’efficacité de la procédure ne fait ainsi pas obstacle à l’obtention par les demandeurs d’une protection juridique satisfaisante.

Expulsion des personnes bénéficiant d’une protection internationale

130.En vertu de l’article 50, paragraphe 1 de la loi sur l’octroi d’une protection internationale aux étrangers, un réfugié ne peut pas être expulsé ou refoulé vers un État où sa vie ou sa liberté est menacée en raison de sa race, de son origine ethnique ou de sa religion, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques. L’article 17 de la loi sur l’obligation de quitter le territoire et l’interdiction d’y revenir dispose qu’un étranger ne peut pas être expulsé si ladite expulsion peut entraîner les conséquences énoncées à l’article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ou à l’article 3 de la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, ou l’exposer à la peine de mort. L’expulsion d’un étranger doit s’effectuer conformément aux dispositions des articles 32 et 33 de la Convention des Nations Unies relative au statut des réfugiés (et du Protocole relatif au statut des réfugiés du 31 janvier 1967).

Politique de détention

131.En vertu de la modification apportée à la loi sur l’octroi d’une protection internationale aux étrangers entrée en vigueur le 1er janvier 2014, toute personne demandant à bénéficier d’une protection internationale peut être détenue durant le déroulement de la procédure primaire si cela est jugé nécessaire au maintien de l’ordre public ou à la sécurité nationale. La détention d’un demandeur d’asile n’est justifiée que si l’application d’autres mesures de supervision ne permet pas de garantir l’ordre public, la sécurité nationale ou le traitement efficace de la demande de protection internationale et que la détention est une mesure appropriée, nécessaire et proportionnée compte tenu des circonstances majeures concernant la personne. La détention d’une personne soumettant une demande de protection internationale peut être proposée sur la base des motifs de détention énoncés dans la Directive 2013/33/UE du Parlement européen et du Conseil.

132.Le Service de la police et des gardes-frontière a, de surcroît, le droit de détenir un demandeur de protection internationale afin de poursuivre les démarches préliminaires pendant une période ne pouvant pas dépasser quarante-huit heures à compter de l’acceptation de la demande de protection internationale. Au-delà de ce délai, le demandeur ne peut pas être détenu sans l’autorisation d’un tribunal administratif. Le Service de la police et des gardes-frontière peut demander à un tribunal administratif d’autoriser la détention du demandeur pour une période pouvant aller jusqu’à deux mois pour les motifs énoncés au paragraphe 36 semel de la loi sur l’octroi d’une protection internationale aux étrangers, à condition qu’une telle mesure soit nécessaire pour les raisons prévues par la loi. Le Service de la police et des gardes-frontière procède systématiquement à un examen approfondi de la situation de chaque personne pour déterminer si une mesure de détention s’impose, mais c’est un tribunal administratif qui décide de la nécessité et du caractère proportionnel de la détention d’un demandeur de protection internationale.

Conditions de détention

133.Les mineurs non accompagnés ne sont pas placés dans un centre de détention, mais sont immédiatement placés dans une famille de substitution. La détention d’une famille (parent accompagné d’un mineur) est décidée sur la base du principe de proportionnalité, et uniquement si d’autres mesures de supervision ne peuvent pas être appliquées de manière efficace. Les membres de la famille sont logés ensemble dans le centre de détention. Ce dernier a les moyens nécessaires pour organiser des activités de loisirs adaptés à l’âge des mineurs.

134.Quel que soit le lieu d’hébergement des mineurs, l’accès à l’éducation est garanti à tous les enfants ayant l’âge de la scolarité obligatoire, conformément à la procédure énoncée dans la loi sur l’enseignement primaire et secondaire.

Droit à la vie privée et à la vie de famille

Point no 21 : Stockage des données

Statut juridique

135.L’Estonie n’a pas encore pris de mesures concrètes pour modifier les normes régissant le stockage et l’utilisation des données sur les communications. La Cour suprême et le Chancelier de justice ont déterminé que la loi en vigueur protège de manière adéquate les droits des individus et est conforme à la Constitution de la République d’Estonie. La législation estonienne est également conforme aux dispositions de l’article 17 du Pacte.

136.Une analyse de la réglementation du stockage et de l’utilisation des données relatives aux communications a été entreprise par suite de l’évolution de la situation dans l’Union européenne et des affaires récemment décidées par la Cour de justice de l’Union européenne dans le but de renforcer la protection des droits des personnes et de formuler des normes plus précises en ces domaines.

137.Le droit estonien dispose qu’il est nécessaire d’obtenir une autorisation pour engager une procédure et procéder à une surveillance dans le cadre de poursuites pénales et d’opérations sécuritaires pour éviter que les institutions ne se livrent à des activités de surveillance non autorisées ou mènent des enquêtes secrètes. Il dispose aussi que, le parquet, les tribunaux et le Parlement peuvent déterminer si la surveillance demandée dans le cas de poursuites pénales est justifiée et légale. Les services de sécurité sont placés sous le contrôle des autorités publiques, du pouvoir judiciaire et du Parlement.

138.Les personnes dont les droits ont été violés par suite d’enquêtes secrètes doivent en être informées dans les limites définies par le champ d’application des procédures pénales et des activités des services de sécurité. Toute personne peut, par ailleurs, demander aux autorités publiques de lui indiquer les données collectées ou conservées à son sujet. Elle a aussi le droit de demander à un tribunal de protéger ses droits si ces derniers ont été violés. Elle a en outre la possibilité de contacter le Chancelier de justice, qui peut engager une procédure pour déterminer si les autorités ont agi de manière illégale et si les droits de la personne ont été enfreints. La loi relative au Chancelier de justice accorde, à cette fin à ce dernier le droit d’exiger des autorités des explications et des pièces justificatives.

Divulgation de données personnelles et communications de ces données à des pays tiers

139.Le chapitre 8 du Code de procédure pénale établit le règlement concernant l’entraide judiciaire en matière pénale entre les États membres de l’Union européenne. La loi prévoit l’obligation de garantir la protection des données personnelles lorsque les données sont échangées entre les États dans le cadre de la coopération en matière de procédure pénale. La transmission de données à caractère personnel reçues dans le cadre de cette entraide aux autorités compétentes de pays tiers et d’organisations internationales et la transmission des données personnelles obtenues d’un État membre dans le cadre de cette entraide à un particulier sont aussi réglementées.

140.Une enquête secrète peut être autorisée par écrit par le parquet ou par le juge chargé d’une enquête préliminaire. Le juge en question rend sa décision sur la base de la demande motivée soumise par le parquet. Il examine cette dernière et accorde ou refuse l’autorisation de procéder à une enquête secrète par voie de décision.

141.Lorsque la vie d’une personne, son intégrité physique, sa liberté ou un avantage personnel de haute valeur est compromis et qu’une demande d’autorisation ne peut pas être présentée en temps voulu, il est possible de procéder à une enquête secrète exigeant normalement l’autorisation d’un tribunal sur la base uniquement d’une permission donnée sous une forme pouvant être ultérieurement validée par écrit. Les demandes et les autorisations écrites sont établies dans les vingt-quatre heures suivant le début des enquêtes secrètes.

142.La durée d’une enquête secrète menée sur une personne particulière dans le cadre de poursuites déterminées ne peut pas dépasser un an à moins que le procureur général ou le tribunal n’ait autorisé la prolongation de ce délai à titre exceptionnel. Le parquet peut autoriser la surveillance secrète d’une personne, d’un actif ou d’une zone aux fins de la collecte d’informations de référence et de la poursuite d’une enquête préliminaire ainsi que l’examen secret de l’actif. Le parquet peut repousser la date d’expiration de la permission de deux mois au maximum.

143.Il est possible de divulguer les données durant la période précédant la procédure de jugement dans l’intérêt des poursuites pénales, du public ou de la personne concernée si cette divulgation ne cause pas un préjudice excessif aux droits de ladite personne ou de tiers, notamment lorsqu’il s’agit de données personnelles sensibles. En vertu de la législation sur l’application de la loi, la divulgation de données personnelles n’est autorisée que si et dans la mesure où cette divulgation est absolument nécessaire à la notification d’une présomption de menace, d’une menace ou d’un trouble.

Atteinte à la vie privée

144.Le Code de procédure pénale définit la procédure à suivre pour notifier à une personne qu’elle a fait l’objet d’une enquête secrète. Si cette personne estime que ses droits ont été violés au niveau du traitement de ses données personnelles, elle est en droit de prendre contact avec le service d’inspection pour la protection des données ou le tribunal, à moins qu’une procédure de contestation différente ne soit prévue par la loi.

145.Si les droits de la personne concernée ont été violés dans le cadre du traitement de ses données personnelles, ladite personne a le droit de demander une indemnisation pour le préjudice causé :

•Pour les motifs et conformément à la procédure prévue dans la loi sur la responsabilité de l’État si les droits ont été violés dans le cadre de l’exercice d’une fonction publique ;

•Pour les motifs et conformément à la procédure prévue par la loi sur les obligations si les droits ont été violés dans le cadre d’une relation soumise au droit privé.

Liberté d’association

Point no 22 : Droit de grève

146.La loi sur la fonction publique, qui est entrée en vigueur le 1er avril 2013, interdit aux fonctionnaires de faire la grève. Ces derniers ne sont pas non plus autorisés à participer à des actions menées dans le but d’exercer des pressions collectives portant atteinte à l’exercice des fonctions assurées en application de la loi par l’autorité qui les a recrutés ou par toute autre autorité. Une action menée dans le but d’exercer des pressions est considérée comme une action collective si au moins la moitié des fonctionnaires relevant de l’autorité y participent. Un fonctionnaire est une personne occupant un poste au sein d’une administration nationale ou locale, dont les activités relèvent du droit public et donnent lieu à l’exercice d’un pouvoir officiel. L’exercice du pouvoir officiel s’entend de l’exercice des fonctions ci-après :

•La direction d’une autorité ;

•L’exercice d’une fonction de supervision publique et administrative ainsi que la réalisation d’audits internes ;

•Le maintien de la sécurité et de l’ordre constitutionnel de l’État ;

•La défense militaire permanente de l’État et les activités de préparation nécessaires à cette fin ;

•La poursuite d’infractions ;

•La représentation diplomatique de la République d’Estonie dans le cadre des relations extérieures ;

•La prise des décisions nécessaires à l’exercice des fonctions principales du Riigikogu, du Président de la République, de la Cour des comptes, du Chancelier de la justice et des tribunaux, la préparation des éléments nécessaires à la prise de ces décisions ou leur exécution ;

•La préparation technique ou la mise en œuvre des décisions relevant de la compétence du Gouvernement de la République, des administrations locales, des administrations municipales ou des collectivités territoriales ;

•Les activités qui, dans l’intérêt du renforcement et du développement du pouvoir public, ne peuvent pas être confiées à une personne dont les relations avec l’administration sont régies par le droit privé.

147.Conformément à la loi sur l’incarcération, les surveillants pénitentiaires ne peuvent pas participer à des grèves, piquets de grève ou autres activités exercées en vue d’exercer des pressions concernant leur service. Il s’ensuit que les personnes n’exerçant pas de fonctions officielles au sens de la loi sur la fonction publique ont le droit de faire grève.

148.L’article 18 de la loi sur le règlement collectif de conflits du travail dispose que les employés et leurs associations ou fédérations ont le droit d’organiser des grèves d’avertissement pouvant durer jusqu’à une heure. Ils peuvent aussi mener une grève de solidarité avec d’autres grévistes. La durée de cette dernière est décidée par le représentant, l’association ou la fédération des employés ayant pris la décision d’organiser la grève, mais elle ne peut pas durer plus de trois jours. Le représentant, l’association ou la fédération des employés doit soumettre par écrit un préavis de grève à l’employeur, à l’association ou à la fédération des employeurs ainsi qu’à la collectivité territoriale. Ce préavis doit être déposé au moins trois jours à l’avance pour une grève d’avertissement et au moins cinq jours à l’avance pour une grève de solidarité.

Droits des familles et des enfants

Point no 23 : Droits des enfants

Incidences de la nouvelle loi sur la protection de l’enfance

149.L’adoption en 2014 de la nouvelle loi sur la protection de l’enfance est la mesure qui a le plus contribué à promouvoir les droits de l’enfant. Cette loi, qui est entrée en vigueur au début de 2016, assure une solide base au respect de ces droits non seulement dans le secteur social, mais aussi dans les domaines de la santé et de l’éducation et dans le système juridique. Elle met l’accent sur la prévention, l’intervention précoce et la coopération intersectorielle et définit expressément les responsabilités des différentes parties prenantes afin d’assurer le plein respect de ces principes.

150.Premièrement, toutes les personnes publiques ou privées doivent assumer un certain nombre de responsabilités. L’une d’entre elles consiste à considérer en premier lieu l’intérêt supérieur de l’enfant avant de prendre une décision quelconque le concernant et de solliciter et de tenir compte de l’opinion de celui-ci pour déterminer son intérêt supérieur. Deuxièmement, toute personne proposant une mesure quelconque concernant un enfant doit coopérer avec d’autres parties pertinentes afin de garantir les meilleurs résultats possible pour l’enfant visé. Troisièmement, quiconque sait qu’un enfant a besoin d’aide a l’obligation expresse d’aviser la collectivité territoriale ou d’alerter le service d’assistance téléphonique. Ce dernier transmet immédiatement l’information aux autorités locales et, le cas échéant, offre des conseils à la personne qui a appelé.

151.La loi insiste par ailleurs sur le fait que la famille est le milieu naturel nécessaire à l’épanouissement et à la croissance de l’enfant. La loi estonienne sur la protection de l’enfance, comme celle de nombreux autres pays, interdit expressément d’infliger aux enfants des châtiments corporels et de mauvais traitements psychologiques, notamment en les humiliant et en les effrayant. D’importantes mesures ont été prises afin d’assurer l’application concrète de ces dispositions et d’aider les parents à élever leurs enfants sans violence. Plusieurs organisations non gouvernementales encouragent l’adoption de pratiques parentales positives et enseignent ces dernières depuis quelques années tandis que le Gouvernement poursuit, à titre d’opération pilote, un programme d’éducation parentale fondé sur les faits et mène une vaste campagne publique. Un site Web est consacré à cette dernière, sur lequel figurent des vidéos qui aident les parents à surmonter les problèmes auxquels ils sont le plus couramment confrontés dans le cadre de leurs interactions avec leurs enfants d’une manière adaptée aux besoins de ces derniers.

152.La loi sur la protection de l’enfance établit une conception globale du bien-être de l’enfant. Le représentant des autorités locales responsable de la protection de l’enfant est la personne qui revêt le plus d’importance lorsqu’un enfant a besoin d’aide. Il doit immédiatement évaluer l’état physique, médical, psychologique et émotionnel de ce dernier, ses capacités cognitives, son niveau d’instruction et sa situation économique ainsi que les compétences parentales de la personne qui l’élève. Les autorités locales doivent procéder à une évaluation et, sur cette base, proposer des mesures d’aide qui sont fonctions des besoins de l’enfant, conforter les relations entre celui-ci et la personne ou les personnes qui l’élèvent, et assurer des services accessibles, prompts, efficaces et ayant des effets positifs durables sur ses capacités d’adaptation sociale.

Lutte contre la violence à l’encontre des enfants

153.L’Université de Tartu a mené une « Enquête sur la propagation des violences sexuelles contre les enfants et les jeunes » en 2015 sur ordre du Ministère de la justice. Cette enquête avait pour objet de déterminer l’ampleur des violences sexuelles dont font l’objet les jeunes Estoniens âgés de 16 à 18 ans, leurs facteurs de risque, leurs conséquences et les moyens d’obtenir de l’aide lorsqu’elles se produisent. L’enquête a mis en lumière les facteurs liés aux relations au sein de la famille et aux comportements sexuels et à risque des jeunes qui ont pour effet d’accroître ou de réduire la probabilité, pour un enfant ou un jeune d’être victime d’agressions sexuelles ou de s’en rendre coupable. Les répercussions que peuvent avoir les agressions sexuelles sur la santé mentale des jeunes ont aussi été étudiées.

154.L’enquête montre que 32 % de jeunes âgés de 16 à 18 ans ont fait, au moins une fois, l’objet d’un acte pouvant être considéré comme une agression dans un environnement autre que l’Internet. Trente pour cent des jeunes ont subi au moins un acte de harcèlement sexuel, essentiellement par attouchement (25 %) ou exposition à la nudité (11 %). Un jeune sur 10 a subi des violences sexuelles et 5 % des victimes ont été forcées d’avoir des rapports sexuels. Il est important de noter que, aux fins de l’enquête, les agressions sexuelles couvrent à la fois les actes d’agression et de harcèlement sexuel.

155.Les activités visant à prévenir ces violences sont décrites dans la Stratégie de prévention de la violence 2015-2020 qui couvre, notamment, la violence contre les enfants et la maltraitance de ces derniers. Les progrès vers la réalisation de l’objectif consistant à réduire la violence sont mesurés par la probabilité d’être victime d’un acte de violence qui est établie sur la base d’enquêtes et de statistiques. La stratégie a pour objectifs subsidiaires de donner aux membres de la population des informations leur permettant de mieux éviter les situations de violence, de les détecter et d’intervenir lorsqu’elles surviennent ; d’assurer une protection aux victimes de la violence en fonction de leurs besoins et de leur offrir de meilleures garanties de soutien ; de traiter les affaires de violence en suivant une approche répondant aux besoins des victimes ; de traiter de manière plus efficace les auteurs des actes de violence et de réduire la probabilité de récidive.

156.Afin de détecter les comportements sexuels qui sont normatifs, auxquels il faut prêter attention ou qui exigent une intervention immédiate, le Ministère de la justice a publié un baromètre des comportements sexuels des enfants qui ne correspondent pas à leur âge (c’est-à-dire un baromètre des comportements sexuels des enfants et des jeunes pouvant poser problème). Le baromètre des comportements fournit des directives qui aident à déterminer si le comportement d’un enfant ou d’un adolescent doit être jugé préoccupant et à décider à quel moment intervenir. Il a principalement pour objet de prévenir les agressions sexuelles et les mauvais traitements d’enfants et d’adolescents perpétrés par d’autres enfants et adolescents, ainsi que les comportements sexuels d’enfants et d’adolescents problématiques. Le Ministère de la justice a publié des vidéos en estonien et en russe sur les actions pouvant être menées à titre de prévention.

157.Le Ministère de la justice et le Ministère de l’intérieur ont préparé un « Manuel des entretiens avec les enfants » à l’intention de tous les spécialistes qui travaillent avec ces derniers et doivent aborder avec eux des sujets difficiles. Ce manuel permet de mieux comprendre les besoins et les moyens d’expression des enfants tout en donnant la priorité absolue à leur sécurité. Il présente de nouvelles informations et aide les spécialistes à appliquer les connaissances qu’ils ont acquises dans le cadre de leur formation dans les domaines de la psychologie des enfants, de leur développement et de la manière de leur parler en fonction des besoins et de l’objectif de la conversation. L’ouvrage conforte leurs connaissances théoriques et les incite à élargir le champ de leurs compétences pour pouvoir mieux garantir les droits de l’enfant. Le Ministère de la justice a formulé des directives pratiques à l’intention des parents, des spécialistes qui travaillent avec des enfants et des établissements qui accueillent ces derniers. Le financement accordé pour la prévention de la criminalité en 2015 (50 000 euros), qui a pour objet de prévenir les violences sexuelles contre des enfants âgés de moins de 10 ans a été réparti entre deux projets.

158.L’Union estonienne pour la protection de l’enfance prépare actuellement un livre illustré sur la prévention des violences sexuelles perpétrées à l’encontre d’enfants ainsi que des directives actualisées destinées aux parents ; ces matériaux ont été conçus de manière à se compléter et à fournir des informations complètes dans un but de prévention. Les matériaux destinés aux enfants et aux parents seront publiés sur papier et accessibles en ligne, et le livre destiné aux enfants aura une interface audio. Le livre, les directives et l’interface audio seront disponibles en estonien et en russe. Le projet a pour objectif général d’aider les enfants âgés de 6 à 10 ans à acquérir une image positive d’eux-mêmes en leur donnant des informations appropriées concernant leur développement physique, en les aidant à établir des limites et à en assurer le respect pour leur éviter d’être victimes de violences sexuelles. D’autres projets sont actuellement consacrés à la protection de l’enfant.

159.Vihjeliin est un service en ligne assuré par l’Union estonienne pour la protection de l’enfance, qui permet de soumettre des informations sur les contenus illicites publiés sur le Web, comme les agressions sexuelles et la traite d’enfants. Ces informations peuvent être fournies de manière anonyme sans que la personne qui les communique soit identifiée ou que ses données personnelles soient enregistrées. La lutte contre les violences sexuelles à l’encontre d’enfants exige des mesures différentes et une étroite coopération aux niveaux national et international. L’Union estonienne pour la protection de l’enfance coopère étroitement avec d’autres organisations nationales, notamment les forces de l’ordre, les fournisseurs de services Internet, différentes ONG et les réseaux internationaux INSAFE et INHOPE pour empêcher la diffusion de contenus décrivant des agressions sexuelles contre des mineurs.

160.L’âge minimum est fixé à 18 ans pour les atteintes à l’autodétermination sexuelle. L’âge minimum de 14 ans ne s’applique par conséquent qu’aux relations consensuelles. Il n’est pas impossible qu’une nouvelle modification de l’âge minimum soit de nouveau débattue sur la base des résultats d’études sociologiques.

Harcèlement à l’école

161.Les activités, les buts et les principes concernant spécifiquement les brimades s’inscrivent dans le cadre établi pour une « Éducation sans harcèlement » par le Ministère de l’éducation et de la recherche qui a été approuvé en 2017. Il s’agit là du premier cadre présentant une vision complète de prévention du harcèlement fondée sur des programmes permettant de poursuivre ces activités à l’école maternelle et dans les établissements scolaires. Il décrit les programmes de prévention des brimades conçus pour l’école maternelle et pour les établissements d’enseignement primaire, secondaire et professionnel, qui peuvent choisir les activités de prévention les mieux adaptées à leurs besoins. Les efforts déployés en ce domaine appuient la poursuite des stratégies formulées par l’Estonie pour une formation tout au long de la vie et pour la prévention de la violence. Les ressources dégagées à cette fin sont quatre fois plus importantes qu’auparavant. Il a également été décidé de poursuivre certaines lignes d’action et, notamment, de mettre en place des activités de lutte contre les brimades dans tous les établissements scolaires et non plus seulement ceux de langue estonienne, ainsi que dans les centres de formation professionnelle et d’y associer les parents ; de faire une plus grande place à l’acquisition de compétences dans les domaines de la communication et du règlement des conflits dans les programmes des instituts de formation des enseignants et dans le cadre de la formation en cours d’emploi de ces derniers ; de concevoir un modèle de financement de programmes de lutte contre le harcèlement ; d’accroître les capacités d’intervention en cas de harcèlement en ligne ; et d’étendre la portée du réseau pour une éducation sans harcèlement.

162.Les membres de ce réseau poursuivent des programmes d’intervention comme KiVa (abréviation d’une expression signifiant « arrêt aux brimades »). Un jeu faisant appel à des compétences comportementales appelé VEPA ainsi que des exercices pour promouvoir la tranquillité d’esprit ont été créés ; les principes d’une éducation fondée sur des valeurs sont mis en relief ; et les élèves sont associés à l’établissement d’un cadre d’apprentissage sécurisé (dans le cadre du mouvement de soutien aux élèves TORE et de la tolérance à l’école).

163.Les services de supervision publique ont pour priorité depuis plusieurs années d’assurer un cadre scolaire offrant de bonnes conditions de sécurité. En 2016, les indicateurs de résultats des établissements scolaires ont été complétés par des indicateurs de la mesure dans laquelle les élèves sont satisfaits de leur école et de leur expérience en ce qui concerne le harcèlement. Grâce à l’inclusion de ces indicateurs et à la collecte de données, il est maintenant possible d’observer la prévalence du harcèlement et les différentes formes qu’il peut revêtir, et à l’État et aux établissements scolaires de reconnaître le problème. L’action menée a essentiellement pour objet de produire des informations et des observations pour déterminer comment le harcèlement des élèves évolue au cours du temps et comparer les effets de mesures d’intervention. Ces efforts permettront également aux établissements scolaires d’évaluer leur situation à celle observée aux niveaux national et régional et, par conséquent, de mieux comprendre leur propre situation. Il n’est pas fait de distinction entre les causes des brimades, car il n’est pas possible de vérifier ces informations en procédant à une collecte centralisée des données. Il importe toutefois de les déterminer lorsqu’un soutien est fourni au cas par cas. D’autres institutions et organisations considèrent également le problème du harcèlement, comme le Service de la police et des gardes-frontière, les responsables des programmes de lutte contre le harcèlement, tels que KiVa, l’Union estonienne pour la protection de l’enfance, et d’autres entités.

Point no 24 : Retrait d’enfants de leur famille

164.Jusqu’au 1er janvier 2016, date à laquelle la loi sur la protection de l’enfance est entrée en vigueur, aucune règle ne régissait la période de temps pendant laquelle un enfant en danger pouvait être tenu à l’écart de sa famille ni ne définissait les critères devant être remplis pour qu’un enfant soit considéré en danger. La loi dispose désormais clairement qu’un enfant est en danger lorsqu’il se trouve dans une situation qui compromet sa vie ou sa santé, ou lorsqu’il met en danger sa vie ou sa santé ou celles d’autrui par son comportement. Elle a donc réduit l’éventail des situations dans lesquelles un enfant peut être considéré comme étant en danger.

165.Avant l’adoption de cette loi, aucune limite n’était imposée à la période de temps pendant lequel un enfant pouvait être séparé de sa famille en attendant l’émission d’une ordonnance du tribunal, de sorte que cette séparation pouvait durer des mois. La loi limite maintenant à soixante-douze heures le délai dans lequel la décision judiciaire ordonnant la séparation d’un enfant de sa famille doit être obtenue. Si ce délai n’est pas respecté, l’enfant doit retourner dans sa famille.

Droit à la citoyenneté et droit de prendre part à la vie politique et à la direction des affaires publiques, et absence de restrictions aux droits des minorités

Point no 25 : Droit de vote des détenus

166.Le Ministère de la justice a analysé la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme concernant le droit de vote des détenus et a entrepris de formuler les principes nécessaires à la préparation d’une modification à la loi sur les élections.

Point no 26 : Apatrides

167.Au 1er janvier 2017, l’Estonie comptait, selon le registre démographique 1 352 291 habitants : 1 139 400 citoyens estoniens, 133 453 ressortissants d’autres pays (dont 90 224 ressortissants de la Fédération de Russie, 7 832 Ukrainiens, 7 651 Finlandais, 4 233 Lettons) et 79 438 personnes de nationalité indéterminée. Selon le Service de la police et des gardes-frontière, 82 594 personnes de nationalité indéterminée détenaient un permis ou un droit de séjour valide à cette date.

168.Au 1er janvier 2017, la population était constituée de 84,2 % de citoyens estoniens, de 9,9 % de ressortissants étrangers et de 5,9 % de personnes de nationalité indéterminée. Le nombre de personnes de nationalité indéterminée était six fois moins élevé qu’en 1992 (année durant laquelle l’Estonie comptait 500 000 apatrides qui représentaient 30 % de la population). Le Gouvernement continue d’encourager les personnes de nationalité indéterminée à demander la nationalité estonienne en leur fournissant des informations à ce sujet, en leur proposant des cours gratuits pour apprendre l’estonien ou améliorer leurs compétences en ce domaine et en leur offrant de plus amples possibilités de pratiquer cette langue.

169.Au total 160 679 personnes ont acquis la citoyenneté estonienne par voie de naturalisation entre 1992 et 2016. Le nombre de personnes demandant la nationalité estonienne a augmenté lorsque l’Estonie est devenue membre de l’Union européenne. Il a diminué pendant la période 2006-2008, les personnes de nationalité indéterminée ayant alors l’autorisation de se déplacer dans l’espace Schengen et en Fédération de Russie sans avoir à obtenir de visa (voir le tableau 3).

170.Les modifications apportées à la loi sur la citoyenneté ont été adoptées en 2015 et la plupart d’entre elles sont entrées en vigueur le 1er janvier 2016. Par suite de ces modifications, la nationalité estonienne est attribuée par voie de naturalisation depuis le 1er janvier 2016 aux enfants de nationalité indéterminée âgés de 0 à 14 ans. Depuis 2016, les enfants âgés de 0 à 14 ans de parents de nationalité indéterminée qui sont nés en Estonie ou arrivés dans le pays immédiatement après leur naissance acquièrent la nationalité estonienne par voie de naturalisation à leur naissance.

171.En vertu de la loi sur la citoyenneté, toute personne âgée d’au moins 15 ans et n’ayant pas la citoyenneté estonienne peut demander à obtenir cette dernière si elle le souhaite. Toute personne âgée de 15 à 18 ans peut demander la citoyenneté estonienne.

172.Par suite de la modification apportée à la loi, il n’est plus possible de révoquer la citoyenneté estonienne d’un mineur. Toute personne citoyenne d’un pays donné ayant acquis ou reçu la citoyenneté estonienne alors qu’elle était mineure doit renoncer à sa citoyenneté estonienne ou à celle de l’autre pays dans un délai de trois ans à compter de son dix-huitième anniversaire. L’examen de langue qui doit être passé pour obtenir la nationalité a été simplifié pour les personnes âgées de 65 ans ou plus, lesquelles ne doivent passer qu’un examen oral. La procédure a également été simplifiée.

173.Les modifications apportées à la loi sur la citoyenneté ont permis de réduire le nombre de personnes dont la nationalité est indéterminée. Le nombre de mineurs qui ont reçu la nationalité estonienne en 2016 par suite desdites modifications se décompose comme suit :

•Mineurs nés en Estonie avant le 1er janvier 2016, âgés de moins de 15 ans et de citoyenneté indéterminée − 757 ;

• Mineurs ayant obtenu la citoyenneté estonienne par naturalisation à leur naissance − 204.

174.D’après l’enquête sur l’intégration dans la société estonienne, 57 % des personnes de nationalité indéterminée souhaiteraient devenir des citoyens estoniens, 28 % seraient satisfaites de la situation existante et 7 % préféreraient devenir ressortissants de la Fédération de Russie. La même enquête montre qu’une personne est d’autant plus susceptible d’être citoyenne de l’Estonie que ses liens avec le pays sont durables ; 31 % de la première génération d’immigrants, 65 % de la deuxième génération et 81 % de la troisième génération sont des citoyens estoniens.

Point no 27 : Droits des minorités ethniques

Compétences linguistiques et emploi

175.Dans sa recommandation no 16, le Comité invite l’État partie à renforcer les mesures visant à intégrer la minorité russophone dans le marché du travail, notamment en ce qui concerne la formation professionnelle et les cours de langue. Il juge aussi nécessaire de prendre des mesures pour accroître la confiance de la population russophone vis-à-vis de l’État partie et de ses institutions publiques.

176.L’objectif fixé dans le plan de développement « Intégration dans la société estonienne 2020 » consiste à améliorer les connaissances et les compétences dont les résidents permanents en âge de travailler dont la langue maternelle n’est pas l’estonien ont besoin pour pouvoir s’intégrer de manière fructueuse dans le marché du travail. Le plan vise également à promouvoir l’égalité de traitement sur le marché du travail et à faire prendre conscience aux employeurs des avantages que présente un environnement multiculturel.

177.Le « Plan de développement de la protection sociale 2016-2023 » mis en œuvre par le Ministère des affaires sociales vise également à accroître l’emploi des résidents qui parlent d’autres langues, à réduire leur risque de chômage et à améliorer leur situation sur le marché du travail, notamment en leur permettant d’acquérir une bonne maîtrise de la langue estonienne. Le Fonds d’assurance chômage continuera d’assurer des services pour l’emploi de manière à répondre à des besoins particuliers en attirant des personnes d’autres nationalités et en aidant ces dernières à trouver un travail.

178.Le Fonds d’assurance chômage propose actuellement 20 services qui ont pour objet de faciliter l’entrée sur le marché du travail. Ces services sont fournis à titre individuel, quelles que soient les compétences linguistiques des personnes considérées, et ont pour objet de déterminer les besoins de chaque chômeur ainsi que ses possibilités d’emploi. Les personnes qui ne parviennent pas à trouver du travail parce qu’elles ne parlent pas suffisamment bien l’estonien ont la possibilité de suivre des cours de langue ou des formations professionnelles comportant un module linguistique dispensés par le Fonds.

179.Le Fonds d’assurance chômage fournit des services pour l’emploi (tels que formations, exercices pratiques, orientation professionnelle, centre de recherche d’emploi, club d’emploi, conseils psychologiques, et emplois particuliers) en langue russe. La pratique de l’estonien est incluse dans ces services. Des conseils sont aussi proposés en russe et en anglais, si nécessaire.

180.Les chômeurs d’autres nationalités ayant souvent des difficultés à se déplacer, le Fonds d’assurance chômage fournit une aide à la mobilité pour améliorer leurs capacités d’emploi. Les personnes qui ont été inscrites au chômage pendant au moins six mois consécutifs et qui trouvent un emploi situé à plus de 30 kilomètres de leur logement (sauf s’ils sont dans la zone urbaine de Tallinn) peuvent solliciter une aide à la mobilité. Cette dernière est versée à toute personne qui commence à travailler sur la base d’un contrat d’une durée indéterminée, ou pour une durée de six mois au minimum, et est versée pendant les quatre premiers mois qui suivent la date d’embauche.

181.Le taux de chômage est tombé de 16,7 % en 2010 à 6,2 % en 2015. L’écart entre le taux de chômage des Estoniens et celui des personnes ayant une autre langue maternelle a aussi nettement diminué. Le taux de chômage des Russes (8,5 % en 2015) demeure toutefois supérieur à celui des Estoniens (5,4 %). Celui des personnes d’autres origines ethniques (à l’exception des Russes) est similaire à celui des Estoniens (5,6 %). Le taux de chômage des personnes dont la langue maternelle n’est pas l’estonien, mais qui maîtrisent bien cette langue était de 5,3 % en 2015 soient un taux comparable à celui des Estoniens. Au niveau des comtés, les taux de chômage les plus élevés sont enregistrés dans le comté d’Ida-Viru, qui est essentiellement habité par des russophones (25,6 % en 2010 et 11 % en 2015) et dans celui de Põlva (15,3 % et 10,6 %, respectivement). Le plan de développement prévoit de poursuivre de préférence des projets dans les régions affichant les taux les plus élevés de manière à réduire le chômage dans le comté d’Ida-Viru.

182.Il ressort d’une comparaison des différentes communautés linguistiques que les Estoniens et les personnes ayant une autre langue maternelle étaient représentés dans les mêmes proportions dans les trois quintiles de revenu intermédiaire entre 2004 et 2014, mais que des disparités pouvaient être observées dans la tranche de revenu inférieure et dans la tranche de revenu supérieure. Les pourcentages d’Estoniens et de personnes ayant une autre langue maternelle étaient de, respectivement, 23 % et 13 % dans la tranche supérieure et de 18 % et 24 % dans la tranche inférieure en 2014.

183.D’après l’enquête sur l’intégration dans la société estonienne menée en 2015, la discrimination fondée sur l’origine ethnique sur le lieu de travail a considérablement diminué puisqu’elle est tombée, selon les estimations, de 37 % en 2008 à 12 % en 2015.

184.Statistics Estonia a achevé en 2015 la mise en place de la base de données des indicateurs d’intégration demandée par le Ministère de la culture, qui permet de mieux évaluer le degré de cohésion de la société et facilite la formulation de la politique d’intégration. La base de données est constamment élargie et mise à jour grâce à l’inclusion de nouvelles données et d’options supplémentaires.

185.L’emploi de la langue officielle n’est requis que dans l’intérêt général pour assurer un accès aux informations et aux services publics en estonien. Le règlement du Gouvernement de la République intitulé « Prescriptions en matière de maîtrise et d’utilisation de la langue estonienne par les fonctionnaires, les salariés et les travailleurs indépendants », qui est basé sur la loi relative à la langue nationale, définit les niveaux de langue requis en fonction de la nature des activités, des contextes dans laquelle la langue est utilisée et des fonctions occupées. Les prescriptions relatives aux principales catégories de postes et aux aptitudes linguistiques se présentent comme suit : une maîtrise élémentaire de la langue (A2-B1) est requise pour les emplois plus simples qui donnent lieu à des communications peu exigeantes (gardes, personnels de service, etc.). Une maîtrise plus poussée de la langue (B2-C1) est requise pour les fonctions plus exigeantes (médecins, enseignants et agents de l’État). Ces dernières nécessitent toutefois aussi généralement un niveau d’instruction élevé sanctionné par un diplôme universitaire. La maîtrise de la langue estonienne constitue une partie indissociable des qualifications professionnelles, et plus les compétences requises par un poste sont importantes plus le niveau d’aptitude linguistique exigée est élevé.

186.Selon les enquêtes sur l’intégration dans la société estonienne qui sont réalisées à des intervalles de trois à quatre ans, la maîtrise de la langue estonienne par la population russophone s’améliore, un plus grand respect est accordé à la valeur symbolique de la langue estonienne et les Estoniens commencent à accorder davantage de valeur à la maîtrise de la langue russe. En 2015, 37 % de personnes d’autres nationalités estimaient qu’elles avaient une connaissance active de l’estonien, 48 % considéraient qu’elles avaient une connaissance passive de cette langue et 15 % déclaraient n’avoir aucune connaissance de cette langue. Le niveau des compétences en langue estonienne des personnes d’autres nationalités a augmenté en moyenne par rapport à 2011 ; la proportion de personnes ne connaissant pas l’estonien a également diminué et la proportion de personnes possédant une connaissance active de la langue a augmenté. Les personnes d’autres nationalités qui savent lire en estonien constituent le groupe le plus important (58 %) ; il est suivi par celui des personnes qui comprennent les communications orales en estonien (54 %) et enfin par celui des personnes qui peuvent écrire et parler correctement l’estonien (environ la moitié). Parmi les résidents d’autres nationalités du comté d’Ida-Viru, 26 % n’ont aucune connaissance de l’estonien et 19 % ont une connaissance active de la langue. Les autres n’en ont qu’une connaissance passive. La proportion de personnes ne parlant pas l’estonien dans le comté d’Ida-Viru a toutefois considérablement diminué par rapport à 2011 (elle est tombée de 34 % à 26 %).

187.La connaissance de l’estonien des résidents d’autres nationalités s’accroît également au fil des générations : 20 % des migrants de la première génération indiquent avoir une connaissance active de l’estonien tandis que cette proportion est de 40 % pour les migrants de la deuxième génération et de 60 % pour ceux de la troisième génération

188.La perception de l’importance que revêt la maîtrise de la langue estonienne a également été évaluée : environ 60 % des résidents d’autres nationalités et des Estoniens estiment qu’il est nécessaire de maîtriser l’estonien pour trouver un bon emploi. À l’inverse, 40 % des Estoniens et des personnes d’autres nationalités pensent qu’un spécialiste compétent ou une personne ayant de bonnes relations peut toujours trouver un emploi même s’il ne parle pas l’estonien. La proportion de personnes estimant qu’il est possible d’obtenir un emploi sans parler l’estonien a quelque peu augmenté, tandis que la proportion des personnes d’autres nationalités estimant qu’il est nécessaire de posséder des compétences en estonien pour trouver un bon emploi a diminué de plus de 20 %. Il semble donc qu’il soit devenu plus facile au cours des dernières années de trouver un bon emploi en Estonie sans bien maîtriser la langue.

189.Grâce à l’appui du Fonds social européen, les adultes dont la langue maternelle n’est pas l’estonien ont diverses possibilités de suivre des formations linguistiques qui peuvent les aider à acquérir les compétences linguistiques nécessaires à la vie quotidienne et aux communications officielles. Un programme d’échange axé sur les agents du comté d’Ida-Viru ne maîtrisant pas suffisamment l’estonien a été mis en place en collaboration avec les collectivités territoriales. Des programmes éducatifs prônant le multiculturalisme, donnant lieu à des projets de coopération et à la poursuite de manifestations conjointes ont également été poursuivis. Un programme pour l’adaptation destiné aux nouveaux immigrants, un système de personnes-ressources et des cours de préparation aux examens de langue et de citoyenneté estoniennes ont été conçus et seront mis en place avec l’appui du Programme européen d’intégration des ressortissants de pays tiers. Le processus d’élaboration de programmes pour l’adaptation, y compris l’établissement d’un réseau de personnes-ressources, se déroulera de 2014 à 2020 avec le soutien du Fonds social européen et du Fonds Asile, Migration et Intégration.

190.Plus de 1 500 personnes ont participé aux cours de langues gratuits offerts dans le cadre du Programme d’intégration dans la société estonienne 2008-2013 avec l’appui du Ministère de la culture et du Fonds européen d’intégration des ressortissants de pays tiers. Des cours de langue estonienne ont été proposés à 11 000 employés du secteur public (notamment des enseignants, des agents de police, des professionnels de la santé et des bibliothécaires), élèves d’établissements d’enseignement professionnel et d’enseignement supérieur, et employés du troisième secteur souffrant de déficiences visuelles et auditives par le Ministère de l’éducation et de la recherche avec l’appui des programmes du Fonds social européen « Développement des cours de langue 2007-2010 » et « Développement des cours de langue 2010-2013 ».

191.Cent quatre-vingt-quinze enseignants travaillant dans le comté d’Ida-Viru ont suivi des cours de langue gratuits de niveau B2 et C1 en 2015, qui ont été financés par le Ministère de l’éducation et de la recherche et coordonnés par la fondation Integrations and Migration Foundation Our People (MISA). Le Ministère de la justice rémunère depuis 2007 les adultes incarcérés qui achèvent de manière satisfaisante des cours d’apprentissage de la langue estonienne.

192.Les personnes qui ne sont pas des citoyens estoniens, mais qui ont réussi deux examens, à savoir l’examen d’aptitude linguistique en estonien (niveau B1, B2 ou C1 et niveau débutant, intermédiaire ou avancé) et l’examen de contrôle des connaissances de la Constitution et de la loi sur la citoyenneté de la République d’Estonie, peuvent, en vertu de la loi sur la citoyenneté, demander à être indemnisées du coût des cours de langues à hauteur d’un montant fixé par le Gouvernement (qui peut atteindre 384 euros par niveau d’aptitude). Les personnes inscrites à l’examen linguistique par l’Inspection des compétences linguistiques peuvent demander à recevoir une indemnité de même montant. Les personnes qui ne peuvent pas prétendre à obtenir une indemnisation au titre de leurs frais en vertu de la loi sur la citoyenneté ou la loi sur les langues, mais qui ont réussi l’examen d’aptitude linguistique en estonien de niveau A2, B1, B2 ou C1, peuvent déposer une demande d’indemnisation à hauteur de 320 euros par niveau d’aptitude lorsqu’ils reçoivent leur certificat.

193.La fondation MISA offre des cours de langues gratuits consistant en 120 leçons données par des professeurs aux niveaux A2, B1 et B2 avec le soutien du Fonds social européen depuis 2015. Environ 6 000 personnes se sont inscrites à ces cours en 2015 : 2 201 d’entre elles ont suivi des cours de niveau B2, 1 909 des cours de niveau B1 et 1 851 des cours de niveau A2. Parmi les inscrits, 3 873 vivaient à Tallinn et 1 665 résidaient dans le comté d’Ida-Viru. Toutes les personnes qui s’inscrivent peuvent suivre gratuitement des cours de langues adaptés à leurs besoins au lieu et durant la période qui leur convient une fois que leur niveau d’aptitude a été établi.

194.Le Ministère de l’éducation et de la recherche a créé un site Web www.keeleklikk.ee, qui permet aux personnes qui le souhaitent de travailler avec un enseignant pour obtenir les connaissances requises aux niveaux d’aptitude A1 et A2. Les mêmes possibilités seront bientôt offertes pour le niveau d’aptitude B1.

195.Soixante clubs de culture et de langue estoniennes ont été ouverts entre 2016 et 2017 à Tallinn, Tartu, Sillamäe, Jõhvi, Kohtla-Järve (y compris Ahtme), Narva et Pärnu.

196.Les enquêtes sur l’intégration dans la société estonienne ont révélé que, bien que la confiance accordée de manière générale aux institutions publiques ait augmenté, et ce, dans une plus large mesure encore parmi les résidents de différentes nationalités, la dernière enquête, réalisée en 2015 (sur le modèle des enquêtes de 2008 et de 2011) indique que les personnes d’autres nationalités ont moins confiance que les Estoniens dans l’État estonien et ses institutions. Elles ont plus confiance que les Estoniens dans l’église et dans les collectivités territoriales, tandis que les Estoniens ont plus confiance dans les autres institutions publiques. Cet écart est plus particulièrement marqué dans le cas des Forces de défense et du Président. Il est toutefois encourageant de noter que les jeunes d’autres nationalités âgés de 15 à 24 ans ont davantage confiance dans les institutions estoniennes du pouvoir − le Président, le gouvernement et le Riigikogu − que les membres de la génération précédente et qu’ils ont autant confiance dans ces institutions que les Estoniens du même âge.

197.Les réponses données par les résidents russophones d’Estonie indiquent, de manière générale, que leur sentiment d’identité nationale est essentiellement fonction de caractéristiques démographiques telles que la région, l’âge et le sexe. La région la plus problématique dans ce domaine est celle du comté d’Ida-Viru, qui compte le pourcentage le plus élevé de personnes ayant un faible sentiment d’identité nationale (46 %) et le pourcentage le plus faible de personnes ayant un fort sentiment d’identité nationale (3 %). Les femmes sont bien mieux intégrées et elles constituent un pourcentage bien plus faible du groupe ayant un faible sentiment d’identité nationale et un pourcentage bien plus élevé du groupe exprimant un fort sentiment d’identité nationale. Les Russes âgés de plus de 60 ans se distinguent nettement de tous les autres groupes d’âge : la proportion de personnes de ce groupe ayant un faible sentiment d’identité nationale est environ deux fois plus faible que dans les autres groupes tandis que la proportion de celles qui ont un fort sentiment d’identité nationale est approximativement deux fois plus élevée.

198.Le plan de développement « Intégration dans la société estonienne 2020 » a pour objectif de créer une société estonienne cohésive sur le plan social composé de collectivités partageant les mêmes valeurs démocratiques et participant activement à la vie sociale. Il a pour objectifs subsidiaires de renforcer les attitudes propices à l’intégration dans la société et à la participation des résidents permanents d’origine étrangère qui sont peu intégrés dans la société en les aidant à obtenir la citoyenneté estonienne et à acquérir de nouvelles connaissances sociales.

199.Des activités médiatiques qui appuient la cohésion sociale, l’ouverture et la compréhension mutuelle seront poursuivies dans le but de promouvoir les objectifs du plan de développement. Des projets de coopération et d’inclusion seront mis en œuvre, des ONG seront habilitées à participer au processus de prise de décisions au niveau local et des efforts seront déployés dans le but de promouvoir la coopération entre les collectivités territoriales comptant une forte proportion de russophones et les organisations du troisième secteur opérant dans ces collectivités dans le but d’encourager la participation active à la société et la formation d’une identité nationale partagée. Il sera ainsi possible d’intensifier les contacts entre des personnes de diverses origines culturelles vivant dans des régions différentes et de renforcer leur inclusion dans la vie de la société.

Point no 28 : Exigences linguistiques

Inspection des compétences linguistiques

200.La modification apportée au Code pénal et aux textes connexes dans le but de dépénaliser les cas d’insuffisance linguistique et de mettre un terme à l’imposition d’amendes par l’Inspection des compétences linguistiques est entrée en vigueur le 1er janvier 2015. Une maîtrise insuffisante de la langue nationale n’est plus un délit administratif. L’inspecteur des compétences linguistiques doit prévoir un temps suffisant et réaliste avant de déterminer si le niveau de langue correspond au niveau nécessaire à une certaine fonction. Aucune peine n’a été imposée en 2015. L’Inspection a donc désormais un plus grand rôle de supervision : depuis le 1er juillet 2015, elle supervise les demandes déposées par les entreprises privées souhaitant organiser des cours de langue. Le droit des employés à suivre des études de langues de haute qualité est, de ce fait, mieux garanti.

201.L’article 23 de la loi relative à la langue nationale énonce les critères de compétence et d’utilisation de la langue estonienne que doivent respecter les employés aussi bien dans le secteur public que dans le secteur privé. Le Gouvernement a publié une réglementation fondée sur l’article 23, paragraphe 4, qui énonce les niveaux de maîtrise de la langue estonienne que doivent posséder les employés dans différents secteurs. Ces niveaux sont établis en fonction de la nature de l’emploi et de l’utilisation de la langue sur le lieu de travail.

202.L’article 2, paragraphe 2 de la loi relative à la langue nationale impose des restrictions linguistiques notables dans le secteur des entreprises. L’utilisation de la langue par les personnes morales en droit privé et par les entreprises privées est réglementée si cela est nécessaire à la protection des droits fondamentaux des personnes physiques ou si cela est dans l’intérêt public. Aux fins de la loi relative à la langue nationale, l’intérêt public s’entend de la sécurité de la société, de l’ordre public, de l’administration publique, de la santé, de la protection du consommateur et de la sécurité au travail. L’obligation d’utiliser et de maîtriser la langue estonienne doit être justifiée et proportionnelle à l’objectif, et ne doit pas modifier la nature des droits concernés par les restrictions.

203.Les critères de compétences linguistiques des employés ont été définis pour différents niveaux dans le Cadre européen commun de références pour les langues du Conseil de l’Europe :

•A2 : Employés dont les communications avec le public ou la clientèle sont générales et simples (personnel auxiliaire des organismes, gardes, conducteurs de train) ;

•B1 : Employés en contact avec le public ou la clientèle (secouristes, soldats en service actif, employés de service et vendeurs, prestataires de soins, chauffeurs de véhicules de transport public) ;

•B2 : Personnel enseignant, personnel infirmier, gardes de sécurité garantissant l’ordre public et employés de l’État et des collectivités territoriales ;

•C1 : Représentants de l’État, directeurs d’organismes publics et de collectivités territoriales, médecins, psychologues, pharmaciens, professeurs d’estonien, juges, procureurs et agents de police ;

•C2 : La loi relative à la langue nationale n’indique aucune fonction auquelle ce niveau de compétences linguistiques est requis.

204.Aucun critère de maîtrise de la langue estonienne n’a été établi pour les membres du Riigikogu et des conseils des collectivités territoriales. Il a toutefois été décidé en 2011 que les partis et les coalitions électorales devaient faire en sorte que leurs publicités politiques dans l’espace public soient en estonien. Ces dernières peuvent comporter une traduction en une autre langue, mais les caractères utilisés pour la traduction ne doivent pas être d’une taille supérieure à celle des caractères employés pour le texte en estonien.

Éducation en langue russe

205.Le russe est la seule langue minoritaire en laquelle un enseignement scolaire est assuré. Toutefois, lorsque plus de 10 représentants d’une autre langue fréquentent une école ou vivent dans une municipalité, cette dernière est tenue d’assurer des leçons en cette langue. À cet égard, l’État finance aussi les écoles du dimanche. Il existe environ 20 écoles du dimanche en Estonie qui permettent d’étudier différentes langues et cultures le week‑end.

206.Les frais des études de langues sont remboursés à toutes les personnes qui réussissent les examens d’estonien de niveaux A2, B1, B2 ou C1. L’État assure également des cours de langues gratuits aux employés du secteur privé. Il existe des programmes gratuits d’apprentissage de l’estonien en ligne jusqu’au niveau A2 qui sont présentés en russe ou en anglais. Des efforts sont actuellement déployés pour élargir le champ de ces options.