Nations Unies

CEDAW/C/TCD/1-4

Convention sur l ’ élimination de toutes les formes de discrimination à l ’ égard des femmes

Distr. générale

20 octobre 2010

Français

Original: français

Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes

Examen des rapports présentés par les États parties en vertu de l’article 18 de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes

Rapport initial, deuxième, troisième et quatrième rapports périodiques combinés des États parties

Tchad *

[31 août 2010]

République du Tchad

Unité – Travail − Progrès

Ministère de l’action sociale de la solidarité nationale et de la famille

Rapport initial et deuxième, troisième et quatrième rapports périodiques du Tchad sur la mise en œuvre de la convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes

N’Djamena, août 2010

Table des matières

Paragraphes Page

Liste des abréviations5

Liste des tableaux6

I.Introduction1−217

A.Généralités22−649

a)Situation géographique22−259

b)Situation sociodémographique26−399

c)Situation politique40−4412

d)Situation administrative45−4712

e)Situation économique48−5514

f)Situation sociale56−6415

B.Cadre institutionnel et juridique de protection des droits de l’homme65−11416

a)Cadre institutionnel65−9216

b)Cadre juridique93−11419

i)Lois et règles prises dans le cadre de la protectiondes droits de l’homme93−10419

ii)Harmonisation de la législation nationale par rapportaux instruments internationaux105−10920

iii)Les voies de recours actuelles110−11421

C.Mécanismes de diffusion et de suivi115−15421

a)Médias publics et privés115−12421

b)Autres mécanismes de diffusion125−13323

c)Organes de diffusion, de suivi et d’évaluation des conventionsinternationales relatives aux droits de l’homme134−15424

II.Des différents articles de la Convention155−54526

Article 2:Les dispositions législatives et autres mesures pour luttercontre la discrimination155−23026

Article 3:Les droits civils et politiques231−25134

Article 4:Les mesures discriminatoires positives et les mesures spécialespour les femmes252−26336

Article 5La modification des schémas et des modèles de comportementsocioculturel264−28437

Article 6:Le trafic des femmes et leur exploitation par la prostitution285−28939

Article 7:Les femmes dans la vie politique et publique290−30640

Article 8Les femmes et leur représentation dans les instances internationales307−30942

Article 9:Le droit la nationalité310−31342

Article 10:Le droit à l’éducation et à la formation professionnelle314−34543

Article 11:Le droit de la femme à l’emploi346−37748

Article 12:Le droit à la santé et à la planification familiale378−43751

Article 13:Les droits économiques des femmes et leur accèsaux moyens de production438−46960

Article 14:La femme rurale470−49064

Article 15:Les droits civils et l’égalité devant la loi491−52566

Article 16:L’égalité dans le mariage et le droit de la famille526−54571

III.Conclusion546−55372

Liste des abréviations

ACORD:Association pour la Coopération à la Recherche et le Développement

ADH:Association des Droits de l’Homme

AFJT:Association des Femmes Juristes du Tchad

APLFT:Association pour la Promotion des Libertés Fondamentales au Tchad

ASTBEF:Association Tchadienne du Bien-Être et de la Famille

ATNV:Association Tchadienne de la non-violence

BM:Banque mondiale

CELIAF:Cellule de Liaison et d’Information des Associations Féminines

CEMAC:Commission de la Communauté Économique et Monétaire de l’Afrique Centrale

CILSS:Comité permanent Inter-États de Lutte contre la Sécheresse dans le Sahel

DED:Service Allemand de Coopération

DIU:Dispositif Intra-Utérin

ECOSIT:Enquête sur la Consommation et le Secteur Informel au Tchad

ECOSIT 1:Enquête 1 sur la consommation et le Secteur Informel au Tchad

ECOSIT 2:Enquête 2 sur la Consommation et le Secteur Informel au Tchad

EDST:Enquête Démographique et Santé au Tchad

EIMT:Enquête à Indicateurs Multiples du Tchad

ETMS:Équipe Technique Multisectorielle

FNUAP:Fonds des Nations Unies pour la population

FONAP:Fonds National pour la Promotion de l’Emploi

GTZ:Coopération Technique Allemande

HCC:Haut Conseil de la Communication

IDH:Indice de développement humain

IFD:Intégration de la Femme au Développement

ONRTV:Office National de Radio et Télévision

ONU:Organisation des Nations Unies

PCPF:Projet de code des personnes et de la famille

PNUD:Programme des Nations Unies pour le développement

PPTE: Pays Pauvres Très Endettés

PRONAFET:Programme National pour l’Action en Faveur de l’Enfant Tchadien

RGPHT:Recensement Général de la Population et de l’Habitat au Tchad

RNT:Radiodiffusion Nationale Tchadienne

SDEA:Schéma Directeur de l’Eau et de l’Assainissement

SECADEV:Secours Catholique pour le Développement

TVT:Télévision Nationale Tchadienne

UNICEF:Fonds des Nations Unies pour l’enfance.

Liste des tableaux

Tableau 1:Répartition de la population résidente, selon le type de population et le sexe.

Tableau 2:Structure de la population par milieu de résidence selon le sexe

Tableau 3:Structure par milieu de résidence et le sexe, selon le grand groupe d’âge (%)

Tableau 4:Structure de la population par grand groupe d’âge selon le sexe

Tableau 5:Distribution sectorielle des dépenses sur ressources internes (1)

Tableau 6:Répartition des femmes dans les postes de décision

Tableau 7:Taux brut de scolarisation

Tableau 8:Taux net de scolarisation

Tableau 9:Taux bruts et nets de scolarisation

Tableau 10:Évolution d'une cohorte réelle d'élèves de Mao (cohorte limitée aux élèves qui n’ont pas redoublé)

Tableau 11:Pourcentage des femmes mariées ou en union âgées de 15 à 49 ans qui utilisent actuellement (ou dont le partenaire utilise) une méthode contraceptive, Tchad, 2000

Tableau 12:Pourcentage des femmes âgées de 15 à 49 ans qui connaissent un endroit où elles peuvent aller faire un test du SIDA et qui ont été testées, Tchad, 2000

Tableau 13:Rapport national du Tchad sur la mise en œuvre des plates-formes de Dakar

Tableau 14:Situation des ONG accordant des crédits

I.Introduction

1.Les questions relatives à la condition de vie des femmes et à leur statut ont suscité dans le monde un intérêt particulier depuis l’avènement de l’ONU en 1945 et surtout depuis 1975, année internationale de la femme.

2.En effet, l’année 1975 constitue une étape décisive franchie par les Nations Unies sur ces questions lorsqu’elles ont décrété la Décennie des Nations Unies pour la femme afin de se pencher sérieusement sur les problèmes relatifs notamment à:

Leur participation limitée au processus de développement de leur pays;

Leurs conditions de vie déplorables dues aux rapports d’inégalité liées au genre et à la pauvreté;

Leur difficile accès aux services sociaux de base;

La méconnaissance de leurs apports productifs par le reste de la société;

La prédominance des rapports discriminatoires entre hommes et femmes.

3.Depuis la tenue de la première conférence mondiale en 1975 à Mexico sur le statut des femmes coïncidant avec l’Année internationale de la femme, les Nations Unies ont collaboré avec les États membres pour s’attaquer à ce problème de discrimination des femmes et de non-valorisation de leur rôle dans le développement.

4.A cet effet, des efforts ont été consentis à tous les niveaux dans le sens de l’amélioration des conditions de vie des femmes dans tous les pays du monde.

5.C’est dans ce contexte que la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (ci-après dénommée «Convention») a été élaborée et adoptée par les États membres de l’ONU le 18 Décembre 1979. Elle est entrée en vigueur le 3 septembre 1981 et le Tchad y a adhéré le 20 juillet 1990. Sa ratification a été effective le 20 mai 1995.

6.La discrimination à l’égard des femmes dans le monde est tellement fréquente que les États membres des Nations Unies en élaborant la Convention ont jugé nécessaire d’instituer un comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes qui est chargé de suivre son application au niveau des pays.

7.En prenant l’engagement de se soumettre à cette Convention, l’État tchadien a fait preuve de la ferme volonté de prendre des mesures appropriées pour lutter contre la discrimination à l’égard des femmes tchadiennes conformément aux dispositions contenues dans ladite Convention.

8.Il faut cependant faire remarquer qu’à l’instar de la plupart des pays d’Afrique, le Tchad a hérité de la législation du pays colonisateur et s’efforce autant que possible d’adopter des lois consensuelles pour être en harmonie avec ses pairs.

9.C’est ainsi qu’en attendant la codification des différentes coutumes (environ 200), le pays fonctionne au rythme d’une législation combinant la coutume, les lois religieuses et le droit moderne. De ce fait, la vie juridique et socioéconomique de la femme tchadienne est régie tantôt par les lois coutumières, tantôt par les lois religieuses et le droit moderne. Cette pratique procède du fait que la société tchadienne est de type patriarcal et accorde plus de valeur aux garçons et aux hommes qu’aux filles et femmes qui sont marginalisées dès la petite enfance.

10.D’une manière générale, on constate la prédominance de la tradition sur le principe de l’égalité de l’homme et de la femme, et de la liberté d’opinion. Cette manière de penser réduit le rôle de la femme à celui de procréation, d’éducation des enfants et de préparation de la nourriture pour la famille.

11.Pour ce qui concerne le droit moderne, c’est le Code civil dans sa version de 1958 qui est applicable au Tchad en matière civile. En sus de ce code, le Tchad a pris des mesures internes pour instaurer l’égalité entre l’homme et la femme.

12.À titre d’exemple, l’article 13 de la Constitution du Tchad adopté le 31 mars 1996 fait de l’égalité entre les Tchadiens de tout sexe un droit fondamental.

13.La plupart des textes nationaux convergent dans ce sens dans leurs différentes dispositions, par exemple la Déclaration de la politique de population de 1994 et la Déclaration de la politique d’intégration de la femme au développement de1995.

14.Dans tous les programmes et projets adoptés par le Tchad, on remarque une mention faite à la question relative à l’amélioration des conditions de vie de la population. C’est une priorité à travers laquelle les problèmes liés à la santé, à l’éducation, à la pauvreté et à la situation de la femme sont mis en relief et considérés comme une priorité pour le Gouvernement.

15.L’analyse de certains textes juridiques relatifs aux programmes et politiques en faveur de la femme démontre la volonté du Gouvernement dans la mise en œuvre de la Convention.

16.A cet effet, on peut citer l’adoption par le Gouvernement en 1995de la politique de l’intégration de la femme au développement.

17.La mise en œuvre de la politique d’intégration de la femme au développement (IFD) au Tchad a donné des résultats satisfaisants dans certains domaines de la vie des femmes. Mais il reste d’autres domaines à couvrir. Pour remédier à ce manque, une nouvelle orientation a été donnée à la politique de l’IFD, à savoir la prise en compte du concept genre dans les programmes et projets de développement. Ainsi, le Tchad entend satisfaire les besoins de la population en général et des femmes en particulier dans l’optique de la transformation des rapports socioéconomiques et de la répartition des tâches de façon juste et équitable entre l’homme et la femme.

18.En intégrant l’approche genre dans ses programmes et projets de développement, le Tchad a également décidé de prendre en compte les intérêts stratégiques des femmes dans leurs relations avec les hommes.

19.L’examen des mesures politiques, économiques et sociales prises par le Tchad ne peut se faire qu’après celui du statut de la femme tchadienne à l’heure actuelle, de manière à faire l’état des lieux de sa situation réelle avant et après la ratification de la Convention.

20.Le rapport qui présente l’état d’application de la Convention depuis sa ratification a pour but de donner un aperçu des mesures prises par le Gouvernement en vue de la rendre effective au niveau interne, d’une part, et d’évaluer la performance du pays dans la promotion des droits de la femme et l’amélioration de sa condition de vie, d’autre part.

21.Il s’articule autour de deux parties conformément aux directives révisées adoptées en 2002 par le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes:

La première partie est réservée à la présentation du Tchad, son aspect physique et démographique, son mode d’organisation politique et le cadre général de protection des droits de l’homme;

La deuxième fait le point sur les mesures législatives, administratives et judiciaires prises par l’État tchadien par rapport à chaque disposition de la Convention; et les progrès réalisés par lui ainsi que les autres acteurs de la vie publique et privée dans la mise en œuvre de cette Convention. Elle a également pour objet d’ôter les freins qui empêchent l’application complète des droits des femmes au Tchad.

A.Généralités

a)Situation géographique

22.Situé au cœur du continent Africain entre le 8ème et le 23ème degré de latitude Nord, et entre le 14ème et le 24ème de longitude Est, le Tchad est un pays complètement enclavé qui s’étend sur 1 500 km du Nord au Sud et 1000 km de l’Est à l’Ouest. Le Tchad couvre une superficie de 1 284 000 km2 et partage ses frontières avec six pays: la Libye au nord, le Soudan à l’est, le Niger, le Nigéria et le Cameroun à l’ouest et la République centrafricaine (RCA) au sud. Le Tchad est partagé en trois principales zones agroclimatiques énoncées ci-dessous.

23.Le climat est saharien au Nord avec des courbes isohyètes comprises entre 0 mm et 250 mm de pluie par an. Cette zone qui représente 60,8 % du territoire (780 000 km2) concerne toute la partie nord du territoire tchadien. Elle est caractérisée par une aridité quasi permanente car les pluies y sont rares. Les activités agricoles et pastorales possibles ne s’organisent qu’autour des ouadis.

24.La zone sahélienne d’une superficie de 374 000 km² correspond à la portion du territoire tchadien comprise entre la zone saharienne et le bassin versant du Logone Chari limité entre N’Djamena et Bongor. Les précipitations moyennes annuelles sont comprises entre 300 mm et 650 mm. Au plan climatique, la zone sahélienne correspond au climat sahélien stricto sensu. L’activité principale est le pastoralisme.

25.La zone Soudanienne d’une superficie de 130 000 km² correspond à la fraction tchadienne du bassin versant du Chari et de son principal affluent, le Logone. Elle couvre 10,2 % du territoire. Les précipitations moyennes annuelles se situent entre 650 mm et 1000 mm. La zone est favorable aux activités agricoles.

b)Situation sociodémographique

Données démographiques

26.La population du Tchad était estimée en 2009 à 11 175 915 millions d’habitants (RGPH 2, 2009) dont 50,7 % de femmes et 49,3 d’hommes) alors qu’elle n’était que de 8 986 100 habitants en 2004 et de 9 858 500 en 2007. L’indice synthétique de fécondité est de 6,3 enfants par femme en âge de procréer alors qu’il était encore de 5,6 enfants par femme en âge de procréer en 1996/1997 (EDST 1). Il évolue avec un taux de croissance de l’ordre de 3,6 % par an. Ce fort taux explique cette augmentation. Les niveaux de fécondité (6,3 enfants en moyenne par femme) et de mortalité infanto-juvénile (191 %) sont restés pratiquement stagnants en 2006 et le taux de mortalité maternelle a connu une détérioration exceptionnelle, passant de 827 décès pour 100 000 naissances vivantes en 1997 (EDST 1) à 1 099 décès maternels pour 100 000 naissances vivantes en 2004 (EDST 2).

27.Selon le RGPH1 de 1993, l’espérance de vie à la naissance était de 50,3 ans dont 33,6 ans pour les hommes et 38,6 ans pour les femmes. Cette espérance a augmenté puisque d’après le Rapport Mondial sur le Développement Humain de 2003, l’espérance de vie à la naissance était de 44,6 ans pour l’année 2001, 43,5 ans pour les hommes et 45,7 ans pour les femmes. Au bout de 10 ans donc, l’espérance de vie des hommes a connu une croissance de 10,9 ans et celle des femmes a augmenté de 9,1 ans.

28.La densité globale de la population est de 7,25 personnes au km2, et varie entre 1,5 et 80 personnes selon les régions.

Tableau 1:

Répartition de la population résidente, selon le type de population et le sexe.

Population totale par sexe selon la région de recensement

Masculin

Féminin

Total

Poids démo

graphique

Rapport de masculinité

% Femmes

Batha

253 706

273 325

527 031

4,7

93

51,9

Borkou

51 892

45 359

97 251

0,9

114

46,6

Chari baguirmi

309 019

312 766

621 785

5,6

99

50,3

Guera

267 032

286 763

553 795

5,0

93

51,8

Hadjer lamis

281 119

281 838

562 957

5,0

100

50,1

Kanem

172 172

182 431

354 603

3,2

94

51,4

Lac

227 290

224 079

451 369

4,0

101

49,6

Logone occidental

331 545

351 748

683 293

6,1

94

51,5

Logone oriental

388 031

408 422

796 453

7,1

95

51,3

Mandoul

308 671

328 415

637 086

5,7

94

51,5

Mayo kebbi est

367 655

401 523

769 178

6,9

92

52,2

Mayo kebbi ouest

273 300

291 787

565 087

5,1

94

51,6

Moyen chari

295 940

302 344

598 284

5,4

98

50,5

Ouaddai

353 168

378 511

731 679

6,5

93

51,7

Salamat

149 885

158 720

308 605

2,8

94

51,4

Tandjile

323 550

359 267

682 817

6,1

90

52,6

Wadi fira

237 735

257 198

494 933

4,4

92

51,9

Ville de N’Djamena

527 415

466 077

993 492

8,9

113

46,9

Barh el gazel

140 128

120 737

260 865

2,3

116

46,3

Ennedi

95 172

78 434

173 606

1,6

121

45,2

Sila

143 144

146 632

289 776

2,6

98

50,6

Tibesti

11 953

10 017

21 970

0,2

119

45,6

Tchad

5 509 522

5 666 393

11 175 915

100

97

50,7

Source: INSEED, RGPH2, 2009.

Grands groupes linguistiques

29.Le Tchad est une mosaïque linguistique. On distingue cinq grandes familles de langues parlées au Tchad: les langues de l’Est-Saharien, les langues tchadiques, les langues de l’Adamawa, les langues du Chari-Nil et l’arabe.

Les langues de l’Est-Saharien

30.Les langues de l’Est-Saharien sont parlées par des populations qui, depuis très longtemps, ont allié l’élevage et l’agriculture, même si de nos jours certaines se sont spécialisées dans l’élevage nomade. Il s’agit des populations parlant les langues suivantes: tedaga, dazaaga, beri, kanembou et kanouri.

31.Les populations qui parlent ces langues de nos jours sont connues depuis très longtemps. Elles étaient installées dans le Tibesti et dans sa périphérie, mais l’assèchement du Sahara les a contraintes soit à replier sur le massif montagneux (Tibesti, Ennedi), soit à se réfugier dans les oasis (Koufra, Faya), soit à devenir nomades, soit à émigrer loin dans le sud (Kanem, Bornou).

Les langues tchadiques (ou tchado-hamitiques)

32.Les langues tchadiques semblent liées aux civilisations dites «aquatiques» de la fin de l’âge de la pierre. Les locuteurs de ces langues sont: les Kotoko (avec les Boudouma et Kouri comme sous-groupes); les populations du Moyen Logone (Massa, Marba, Moussey, Lélé, Zimé, Gabri, Soumraï, Ndam, Nantchéré, Mouloui, Kabalay, Toumak, Guidar, etc.); les populations montagnardes du Guéra (Djongor, Dangleat, Bidio, Sokoro, Mogoum); les Moubi et voisins (Masmadje, Kadjaksé, Birguid, Toram) et enfin les Haoussa dont la plupart des locuteurs vivent au Niger et au Nigéria.

33.Les langues tchadiques sont assez anciennes dans la région et les Sao parlaient sans doute des langues de ce groupe. Ces langues sont apparentées aux langues des Berbères de l’Afrique du Nord, à l’ancienne langue des Égyptiens et aux langues sémitiques (hébreux, araméen, arabe).

Les langues de l’Est de l’Adamawa

34.Les langues de l’est de l’Adamawa sont les langues apparentées aux langues oubanguiennes. Les locuteurs les plus anciens des langues de cette famille ont occupé vraisemblablement le sud du bassin tchadien à une époque assez ancienne (plus de 2000 ans) et furent par la suite submergés par des vagues de peuplement plus récentes (tchadiennes, sara, etc.). Il reste trois îlots résiduels de cette présence ancienne: le groupe du Sud-Ouest tchadien (moundang, toupouri, mboum, kim, kéra, mesmé); le groupe day et enfin le groupe des langues apparentées au bouna (niellim, tounia, goula, famian).

Les langues de groupe Chari-Nil (Sara-Bongo-Baguirmien)

35.Ces langues sont les plus occidentales d’une famille dont l’essentiel des locuteurs est situé au Soudan.

36.On distingue deux sous-ensembles au Tchad: les langues apparentées au sara (madjingay, nar, ngama, goulaye, mbaye, ngambaye, mouroum, gor, laka, kabba, etc.) et au baguirmien (kenga, kouka, bilala, babalia, medogo, etc.). Le deuxième sous-ensemble est composé du mabang et y sont apparentés (kacheeré, massalit, massalat, koniéré, rounga, bakha); les Mimi, les Tama et apparentés (soungor, maranit, aboucharib, kibet), et les Dadjo.

Les langues du groupe dit Arabe

37.La présence des Arabes dans le bassin tchadien est attestée depuis le XIIIe siècle. Originaires d’Arabie, ils se répandirent dans le Tchad à partir du Soudan, puis de la Libye; à ces nomades s’ajoutent des commerçants soudanais et libyens qui établiront leurs comptoirs le long des pistes transsahariennes. Il existe plusieurs «parlers arabes» au Tchad, mais les arabophones de différents parlers se comprennent entre eux; grâce à la mobilité des Arabes par le nomadisme pastoral, le commerce et le prosélytisme musulman, plusieurs populations non arabes vont adapter leur langue. Puis cette langue se développe comme langue d’échange et de culture, pour devenir la langue véhiculaire la plus parlée du Tchad.

38.Dans cette mosaïque de langues parlées au Tchad, toutes ne sont pas répertoriées. Il y a aussi le phénomène du bilinguisme ou même du multilinguisme. Beaucoup de personnes utilisent leur langue pour communiquer entre elles au sein de leur groupe mais utilisent les langues véhiculaires (arabe et sara) pour communiquer avec les autres. Ce phénomène est plus visible dans les villes.

Religions

39.Au Tchad, la grande majorité de la population est croyante: 90 % de la population pratiquent des religions monothéistes. Il ressort du recensement général de la population de 1993 que les religions dominantes sont l’Islam et le Christianisme: 54 % de la population sont musulmans, 20 % catholiques et 14 %, protestants. 7 % de la population se déclarent animistes, 3 % sans religion et 2 % se disent indéterminés. A l’issue de l’examen des données de ce recensement, la population musulmane est plus nombreuse et on la trouve dans le nord et le centre du pays, tandis que le sud est à dominance chrétienne.

c)Situation politique

40.Le Tchad a accédé à l’indépendance le 11 août 1960. Les trois dernières décennies ont été marquées par des tensions politiques aiguës (guerres civiles, tensions politico-militaires au sein des élites en lutte pour le pouvoir, etc.) et une succession de régimes autocratiques caractérisés par une immense misère généralisée, une absence des libertés publiques, de démocratie et de respect des droits de l’homme.

41.Le changement de régime politique intervenu le 1er décembre 1990 a permis de jeter les bases du processus de démocratisation et du pluralisme politique. Ce processus a permis la mise en place des institutions républicaines (Haute Cour de Justice, Conseil Constitutionnel, Haut Conseil de Communication, Cours Suprême, Conseil Économique, Social et Culturel, etc.) et aussi l’organisation des élections présidentielles et législatives. Cela a permis également la création de nombreux partis politiques, associations et organes de presse privée.

42.La Constitution du 31 mars 1996 révisée par la loi no 08 /PR/2005 du 15 juillet 2005 fait du Tchad un État de droit assurant la sécurité des personnes et de leurs biens, associant formellement les citoyens à tous les niveaux de décision pour qu’ils prennent en charge progressivement leur propre destin dans la cohésion et la paix sociales. Cette Constitution a également consacré le principe de la séparation des pouvoirs.

43.Depuis les élections présidentielles de 2001 et législatives de 2002, les partis politiques de l’opposition démocratique n’ont cessé de réclamer l’amélioration des conditions d’organisation des élections au Tchad. Le déficit de dialogue politique a entraîné la dégradation de la confiance entre les acteurs politiques et entre les acteurs politiques et la population. Certains leaders politiques et une grande partie de la population ont boycotté le recensement électoral de 2005, le référendum constitutionnel de juin 2005 et la Présidentielle de mai 2006. Cette crise politique a entraîné la non-tenue des élections législatives. Le mandat des députés élus depuis 2002 a été prorogé à deux reprises laissant les députés dans une crise de légitimité.

44.Sous les auspices de l’Union Européenne, les partis de la majorité présidentielle et ceux de l’opposition démocratique ont signé l’accord politique du 13 août 2007 en vue du renforcement du processus démocratique. Cet accord met un accent particulier sur l’organisation d’élections libres et transparentes comme solution de sortie de la crise.

d)Situation administrative

45.La situation administrative du pays a évolué au gré des événements qui se sont succédé. Partie d’une commune (N’Djamena) créée en 1919, la loi no 15 du 22 mai 1962 a consacré le plein exercice des collectivités qui étaient au nombre de 7.

46.La Constitution de 1996 (article 2, Titre 12) définit et articule cette administration autour de 4 niveaux de collectivité territoriale décentralisée. Le statut de ces collectivités est défini par la loi organique no 2/PR/2000 du 16 février 2000 avec de nouveaux principes fondamentaux.

47.En prélude donc à une décentralisation poussée voulue par le peuple tchadien, des découpages territoriaux ont été opérés à un rythme soutenu. C’est ainsi que nous avons aujourd’hui 22 régions, 57 départements et 254 sous-préfectures. Les chefs-lieux de sous-préfecture correspondent désormais aux communes.

e) Situation économique

48.Jusqu’à un passé récent, l’économie tchadienne était dominée par les activités agropastorales et les services. Depuis l’entrée du pays dans le cercle des pays exportateurs de pétrole en 2003, son économie a connu une croissance rapide au cours des années 2001-2005, surtout en raison de l’intense activité due au lancement du projet pétrolier de Doba et à la construction de l’oléoduc y afférent. A également contribué à cette croissance l’intense activité dans les secteurs liés à la phase de construction du pipe-line, notamment le transport et le commerce.

49.Ainsi, à partir de 2001, la situation économique s’est considérablement améliorée. Le taux moyen de croissance du PIB a été porté à deux chiffres (15,32 %) sur la période 2001-2005. Ce taux a été tiré surtout par le secteur primaire (26,1 %) grâce à l’exploitation pétrolière dont la contribution moyenne au PIB a crû de 209,3 % entre 2004 et 2005 et a représenté près de la moitié (46,6 %) du PIB total en 2005. La croissance du PIB réel est passée de 11,5 % en 2001 à 14,3% en 2003, et après une forte accélération en 2004 (33,7 %), le rythme de croissance est maintenu en 2005 (7,9 %) en dépit du recul du secteur pétrolier (2,1 %). Par contre, la croissance du PIB réel non pétrolier a atteint 11,6 % (contre 2,2 % en 2004), sous l’effet d’une forte reprise de l’agriculture et des activités cotonnières.

50.Le taux de croissance du PIB a sensiblement diminué en 2006 (0,2 %) pour remonter à 1,4 % en 2007 sous l’effet conjugué d’une diminution progressive de la production pétrolière et d’un ralentissement de la croissance du PIB hors pétrole (4 % en moyenne). En effet, la contribution de l’économie non pétrolière à la valeur ajoutée a baissé progressivement depuis 2002; passant respectivement de 37,9 % du PIB à 20,9 % en 2007 pour le secteur primaire, de 14,2 % à 7,4% pour le secteur secondaire et de 43,9 % en 2002 à 27,9 % en 2007 pour le tertiaire.

51.Après un pic de 30,2 % en 2004, le taux de croissance du PIB réel par habitant a été en moyenne de 15,8 % sur la période 2003-2005. De 5,1 % en 2005, ce taux a connu une baisse progressive et profonde pour se situer à -1,3 % en 2007 en raison de la diminution progressive de la production pétrolière évoquée plus haut. Ces taux de croissance correspondent à un revenu national brut par habitant de 176 800 FCFA (250 200 US $) en 2004 et 210 700 FCFA (383.800 US $) en 2007.

52.L’exploitation pétrolière a donc entraîné une transformation fondamentale de la structure de la production et le principal défi de l’ère pétrolière demeure la diversification de l’économie et la dynamisation de tous les secteurs par des mesures visant à éviter la dualisation. Cette diversification par le réinvestissement du fruit de la croissance tirée par le pétrole dans les autres secteurs comme le rural qui mobilise près de 80 % de la population et dans les activités de transformation contribuerait à lutter contre la pauvreté à travers l’amélioration de la productivité du secteur et la création d’emplois additionnels.

53.L’évolution des prix est fortement tributaire des disponibilités alimentaires et de la demande provenant des activités pétrolières sur la période 2000-2007. Elle a marqué sur la période deux pics: une inflation à deux chiffres (12,4 %) en 2001 et une déflation poussée (2,0 %) en 2007. Sur toute la période, le niveau général des prix a évolué au rythme moyen de 4 %, ce qui augure des efforts à fournir pour la maîtrise de l’inflation dans le cadre du critère de convergence (inflation inférieure à 3 %) de la Commission de la Communauté Économique et Monétaire des États de l’Afrique Centrale (CEMAC).

54.De 35,1 % du PIB en 2001, le taux d’investissement global a chuté considérablement pour se situer à 21,6 % en 2005. Il a été en moyenne de 36,3 % sur la période 2001-2005 pour un taux moyen d’investissement hors pétrole d’environ 8 %. Négative en 2002 et 2003, l’épargne nationale a représenté 10,7 % du PIB en 2005 et restera positive en 2006 (environ 6 % du PIB).

55.Sur la période 2000-2007, l’investissement a connu une forte croissance dès l’année 2002 (30,5 % en moyenne). Comme conséquence, le taux d’investissement est resté robuste sur la période (en moyenne 28,4 %). Ce taux d’investissement sur la période est dû essentiellement aux travaux d’exploitation pétrolière (le taux d’investissement hors pétrole étant resté de manière générale faible (moins de 10 % en moyenne)). De même, l’investissement a été tiré par le secteur privé car le taux d’investissement public est resté également faible sur la période (en moyenne 5 %). Le taux d’investissement élevé (28,4 % en moyenne sur la période) et la croissance économique relativement inférieure (9,6 % en moyenne) à l’investissement indiquent une faible productivité du capital et de l’ensemble des facteurs. Dans l’ensemble, l’augmentation significative du taux d’investissement constatée depuis 2000 est un signe favorable traduisant un regain de dynamisme et de confiance dans les perspectives à moyen terme.

f)Situation sociale

56.Malgré l’exploitation du pétrole supposé réduire la pauvreté des populations, la situation sociale ne s’améliore guère compte tenu de certains facteurs. La situation sociale reste caractérisée par une pauvreté généralisée imputable aux programmes d’ajustement structurel réputés inspirés de l’extérieur et a conduit à une réflexion sur une nouvelle forme de développement que se proposent de soutenir désormais le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale (BM).

57.A cet effet, la FRPC du FMI articulée à l’IPPTE et le CAS de la BM consacrent les stratégies de réduction de la pauvreté comme cadre de base pour la mobilisation de l’appui des partenaires au développement et aux efforts des pays soucieux de sortir leur population de la pauvreté.

58.A la suite de la Table Ronde de Genève IV (1998), des consultations sectorielles ont permis d’élaborer des programmes centrés sur la pauvreté dans les secteurs prioritaires (Éducation, Santé et Affaires Sociales, Développement Rural, Infrastructure) en constituant ainsi une base solide pour le processus d’élaboration de la Stratégie Nationale de Réduction de la Pauvreté.

59.La concrétisation de l’engagement pris par le Gouvernement dans le cadre de l’IPPTE a donc débouché sur l’élaboration du Document de Stratégie Nationale de Réduction de la Pauvreté (DSRP) de juin 2003 revisé en 2008 à l’horizon 2015. Le DSRP est articulé autour de cinq axes stratégiques qui sont:

Promouvoir la bonne gouvernance;

Assurer une croissance forte et soutenue;

Développer le capital humain;

Améliorer les conditions des groupes vulnérables;

Restaurer et sauvegarder les écosystèmes.

60.Entré dans le cercle des pays exportateur de pétrole en 2004, le Tchad demeure l’un des pays les plus pauvres du monde. Il est classé 171ème sur 177 pays dans le Rapport mondial sur le développement humain 2007/2008. La pauvreté touche 55 % de la population. C’est principalement un phénomène propre au monde rural où vivent 87 % des pauvres du pays. L’accès aux services sociaux de base notamment à l’éducation et à la santé n’est pas totalement garanti. En effet, le pourcentage de la population analphabète demeure élevé, en particulier parmi les femmes, et les indicateurs de santé (mortalités maternelle et infantile) n’ont guère progressé. Au plan de l’emploi, l’enquête ECOSIT2 révèle des disparités régionales. Le taux de chômage global qui est de 22,6 % est l’un des facteurs de paupérisation des individus.

61.L’inflation a par ailleurs été très préjudiciable aux pauvres; elle a surtout concerné les biens et services de première nécessité. Les dépenses alimentaires moyennes par habitant et par an s’élèvent à 58 297 FCFA, soit 60 % du budget d’un ménage moyen. La dépense moyenne journalière normale par personne devrait être d’environ 5 000 FCFA, ce qui dépasse de loin la capacité de la majorité des ménages, surtout si le chef de famille n’a pas un revenu consistant ou se trouve en chômage effectif ou déguisé.

62.Par ailleurs la persistance des conflits armés à l’Est et au Sud-Est du Tchad a engendré une situation de crise humanitaire avec un nombre croissant de réfugiés soudanais, qui sont estimés à plus de 200 000 à l’Est plus ceux que la République centrafricaine estime être à plus de 30 000 au Sud du Tchad. À cela il convient d’ajouter le nombre des personnes déplacées (Tchadiens) du fait de la recrudescence des conflits intercommunautaires à l’intérieur du pays. Une telle situation ne fait que dégrader davantage la situation sociale déjà précaire.

63.Cette situation sociale est aggravée par la propagation du VIH/Sida dont le taux de prévalence est estimé à 3,3 % selon l’enquête de séroprévalence de 2005. Là encore les femmes et les enfants paient le plus lourd tribut.

64.Toutefois, l’amélioration des conditions de vie des populations fait partie des soucis constants du Gouvernement. Le Président de la République a placé son mandat 2006-2010 dans le «social» en ouvrant de grands chantiers pour l’amélioration des conditions de vie des populations.

B.Cadre institutionnel et juridique de protection des droits de l’homme

a)Cadre institutionnel

65.D’une manière générale, les autorités législatives, judiciaires et administratives veillent, dans l’exercice de leurs fonctions, au respect des principes des normes internationales en matière des droits de l’homme énoncés dans les instruments internationaux, régionaux et nationaux.

66.D’après la Constitution du 31 mars 1996, révisée par la loi constitutionnelle du 15 juillet 2005, le principe de l’exercice du pouvoir est fondé sur la séparation des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire (article 7). Cette Constitution fait obligation à ces différentes institutions de protéger les droits de l’homme dans tous les domaines de la vie.

La Présidence de la République et la Primature comme Institutions de protection des droits de l’homme

67.Conformément aux dispositions de la Constitution de la République du Tchad, le Pouvoir exécutif est exercé par le Président de la République, qui est le Chef de l’État, et par le Premier Ministre, qui est le Chef du Gouvernement. À ce titre, les fonctions du Président de la République pour ce qui est de la protection des Droits de l’Homme consistent à: veiller au respect de la Constitution, assurer par son arbitrage le fonctionnement régulier des pouvoirs publics ainsi que la continuité de l’État et se porter garant de l’indépendance de la justice, de la souveraineté et de l’unité nationale, de l’intégrité du territoire et du respect des accords internationaux.

68.Aux fins d’exiger du Président de la République sa loyauté dans l’exercice de ses fonctions, la Constitution lui impose de prêter publiquement serment devant le Conseil Constitutionnel, en présence des membres de l’Assemblée Nationale en jurant de: préserver, respecter, faire respecter et défendre la Constitution et les lois du Pays, remplir avec loyauté les hautes fonctions que la Nation lui a confiées, respecter et défendre la forme républicaine de l’État, préserver l’intégrité du territoire et l’unité de la Nation, tout mettre en œuvre pour garantir la justice à tous les citoyens tchadiens (article 70 de la Constitution).

69.Le Premier Ministre, Chef du Gouvernement, partage le Pouvoir exécutif avec le Président de la République, Chef de l’État. Pour ce faire, ses fonctions pour ce qui est de la protection des Droits de l’Homme au Tchad consistent à assurer la bonne exécution de la défense, de la sécurité publique et le maintien de l’ordre dans le respect des libertés et des droits de l’Homme.

70.Le Président de la République et le Premier Ministre suivent quotidiennement la situation des droits humains par l’intermédiaire de leurs conseillers aux droits humains.

L’Assemblée Nationale

71.Aux termes de l’article 122 de la Constitution, l’Assemblée Nationale adopte les lois qui fixent les règles concernant les droits civiques et les garanties fondamentales accordées aux citoyens dans l’exercice des libertés publiques.

72.L’Assemblée Nationale peut, sur sa propre initiative, interpeller le Gouvernement ou mener des enquêtes en cas de violations graves des droits de l’homme.

Le Ministère chargé des Droits de l’Homme et de la Promotion des Libertés

73.Le Ministère chargé des droits de l’homme et de la promotion des libertés a été créé suite à la volonté du Gouvernement de traduire dans les faits les engagements qu’il a pris par le biais des Conventions Internationales relatives à la protection des droits humains en 2005.

Le Ministère de l’Action Sociale, de la Solidarité Nationale et de la Famille

74.Le Ministère de l’Action Sociale, de la Solidarité Nationale et de la Famille (MASSNF) est le Département en charge de la mise en œuvre de la politique du Gouvernement en matière sociale. Il a pour mission la protection des couches vulnérables:

Protection des groupes vulnérables (femmes, enfants, personnes de troisième âge, victimes de sinistres, etc.);

Promotion des droits des femmes et des enfants.

75.Il fonctionne sur la base des règles et principes d’organisation établis dans le cadre du décret no 541/PR/PM/MASF du 12 juillet 2006 portant organigramme du MASSNF.

76.La stratégie d’intervention du MASSNF est fondée sur le développement du partenariat avec les différents acteurs.

Les Juridictions de droit commun

77.Les juridictions de droit commun connaissent des infractions portant atteinte aux droits de l’homme par le biais d’une action civile et/ou pénale intentée contre les auteurs des violations des droits de l’homme.

78.Sur le plan organisationnel actuel, conformément à la loi no 004 PR / 98 du 28 août 1998, il est institué un seul ordre de juridiction dont l’organe suprême est la Cour Suprême et qui comprend la Cour Suprême, les Cours d’Appel, les Cours Criminelles, les Tribunaux de 1ère Instance, les Tribunaux de Travail, les Tribunaux de Commerce et les Justices de Paix. Outre cet ordre de juridiction, il est également institué par la Constitution de 1996 d’autres institutions judiciaires spéciales telles que la Chambre Pour Enfants (loi no07/PR/99 du 06 avril 1999) et la Haute Cour de Justice (loi no 005 / PR / 2000 du 10 mars 2000).

79.A côté de ces juridictions, il est institué un Conseil Constitutionnel chargé de contrôler la constitutionnalité des lois, traités et accords internationaux, de régler les contentieux électoraux et les conflits de compétence entre les différents pouvoirs.

Le Haut Conseil de la Communication

80.C’est dans le cadre du respect des principes fondamentaux de la presse universelle que la Constitution de 1996 a institué le Haut Conseil de Communication.

81.C’est une institution indépendante dont les principales fonctions sont: veiller au respect des règles déontologiques en matière d’information et de communication, garantir la liberté de presse et l’expression pluraliste des opinions, réguler les rapports de communication entre les pouvoirs publics, les organes de presse et le public, assurer aux Partis Politiques un égal accès aux médias publics.

82.Le HCC a pour mission de garantir aux associations l’accès équitable aux médias publics ainsi que de donner des avis techniques de même que formuler des recommandations sur les questions touchant le domaine de l’information et les droits humains.

La Commission Nationale des Droits de l’Homme

83.La CNDH a été créée par la loi no 031/PR/ 94 du 09 septembre 1994 et placée sous l’autorité du Premier Ministre. Le décret no 163/PR/96 du 02 avril 1996 fixe les modalités de son fonctionnement et l’arrêté no 095/PM/96 du 31 décembre 1996 détermine son Règlement Intérieur.

84.Selon cet arrêté, la Commission Nationale des Droits de l’Homme est chargée de: formuler les avis au Gouvernement concernant les libertés et les Droits de l’Homme, y compris la condition de la Femme, les Droits de l’Enfant et des Personnes handicapées, et d’assister le Gouvernement et les autres Institutions nationales pour toutes les questions qui concernent les Droits de l’Homme au Tchad.

85.Elle participe à la révision de la législation en vigueur et à l’élaboration des nouvelles normes, en conformité avec la Charte des Droits de l’Homme et des Libertés adoptée par la Conférence Nationale Souveraine et les instruments juridiques régionaux et internationaux, et par là à la construction d’un État de Droit et au renforcement de la Démocratie.

86.Elle formule les avis sur les cas qui se rapportent à l’existence et aux actions d’une police politique, à la pratique de la torture, aux traitements inhumains et dégradants, à l’existence des lieux de détention secrète, aux disparitions forcées et aux transferts secrets.

87.Elle est autonome quant au choix des questions qu’elle examine sans sélectivité, par autosaisine. Elle est libre de ses avis qu’elle transmet au Gouvernement et dont elle assure la diffusion auprès de l’opinion publique.

88.Sur le plan organisationnel, la Commission Nationale des Droits de l’Homme est composée de trente et un (31) membres dont 8 femmes, trois (3) membres du Bureau, treize (13) membres titulaires, quatorze (14) membres suppléants et un (1) Secrétaire Administratif. D’après l’article 7 de la loi portant création de la CNDH, les membres sont des représentants des ministères (6), des représentants de la société civile (8), des représentants de confédérations syndicales. Les membres du Bureau exécutif sont élus par leurs pairs.

89.Le fonctionnement actuel de la CNDH ne respecte pas les Principes de Paris relatifs aux Institutions Nationales des Droits de l’Homme.

La Médiature de la République

90.La Médiature Nationale est instituée par le décret no 340/PR/PM/97 du 12 août 1997 portant création de la Médiature Nationale révisé par la loi no 031/PR/2009 du 11 décembre 2009 portant création de la Médiature de la République.

91.Le Médiateur de la République est chargé d’œuvrer pour la restauration et le maintien de la Paix civile et politique, ainsi que la défense des droits du citoyen face à l’administration publique. Aux termes de l’article 12 de la loi portant création de la Médiature de la République: «toute personne physique ou morale qui estime, à l'occasion d'une affaire la concernant, qu’un organisme visé à l'article 2 n'a pas fonctionné conformément à sa mission de service public peut, par réclamation individuelle, porter l'affaire à la Médiature de la République».

Autorités Traditionnelles et Coutumières

92.La Constitution de 1996 accorde aux Autorités Traditionnelles et Coutumières un rôle de garantes des us et coutumes. Pour ce faire, celles-ci concourent à l’encadrement des populations et appuient l’action des Collectivités Territoriales Décentralisées; elles sont les collaboratrices de l’Administration dans le respect des libertés et des droits de l’Homme.

b)Cadre juridique

i)Lois et règles prises dans le cadre de la protection des droits de l’homme

93.A travers la Constitution, les lois et les règlements de la République, le Tchad a toujours manifesté sa volonté de respecter les droits de l’homme et d’améliorer les conditions de vie de la population.

94.La Constitution du 31 mars 1996, révisée par la loi constitutionnelle no 08/PR/2005 du 15 juillet 2005, intervenue après la ratification de la Convention, prend en compte dans ses dispositions les préoccupations des Nations Unies sur les droits de l’homme. Dans son préambule, on peut lire: «Nous peuple tchadien affirmons par la présente constitution notre volonté…de bâtir un État de droit et une nation unie fondée sur les libertés publiques et les droits fondamentaux de l’homme, la dignité de la personne humaine». Il convient de faire remarquer que les droits des femmes ont été pris en compte à l’article 13 de ladite Constitution qui dispose que «les Tchadiens des deux sexes ont les mêmes droits et devoirs».

95.Il a été également proclamé solennellement dans ce même préambule:

Le «droit du Peuple Tchadien de résister et de désobéir à tout individu, à tout corps d’État qui prendrait le Pouvoir par la force ou l’exercerait en violation de la présente Constitution»;

L’«opposition totale du Peuple Tchadien à tout régime dont la politique se fonderait sur l’arbitraire, la dictature, l’injustice, la corruption, la concussion, le népotisme, le clanisme, le tribalisme, le confessionnalisme et la confiscation du Pouvoir» ;

L’«attachement du Peuple Tchadien aux principes fondamentaux des Droits de l’Homme tels que définis par la Charte des Nations Unies de 1945, la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme de 1948 et la Charte Africaine des Droits de l’Homme et du Peuple de 1981».

96.Les Libertés et Droits Fondamentaux sont contenus dans le chapitre I du titre II de la Constitution. Ils sont de deux ordres et comprennent, d’une part, les droits civils et politiques et, d’autre part, les droits économiques, sociaux et culturels.

Quelques repères relatifs aux droits et libertés proclamés

Les droits civils et politiques contenus dans la Constitution de 1996

97.Le droit à la vie et à la sûreté de la personne, l’interdiction de l’esclavage et l’interdiction des tortures, des traitements cruels, des châtiments inhumains et dégradants, sont pris en compte par la Constitution aux articles 17, 18,19 et 20.

98.Il est également fait mention du droit à un procès équitable en matière civile et pénale, de la présomption d’innocence, de la non-rétroactivité des lois pénales et du caractère personnel de la peine, ainsi que du droit au respect de la vie privée, de la vie familiale, du domicile et de la correspondance.

99.Les Libertés prévues par la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme du 10 décembre 1948 sont prises en compte par la Constitution du Tchad. Il s’agit de la liberté de conscience, de religion, d’expression, d’information, de réunion et d’association ainsi que de la liberté de constituer un syndicat et de faire la grève (art. 27, 28 et 29 de la Constitution).

100.Le droit à la libre circulation des biens et des personnes et l’égalité devant la loi sans distinction d’origine, de race, de sexe, de religion, d’opinion politique et de position sociale sont également prévus (art. 27 et 44 de la Constitution).

Les droits économiques, sociaux et culturels contenus dans la Constitution de 1996

101.L’accès aux emplois publics sans discrimination aucune sous réserve des conditions propres à chaque emploi, le droit à la juste rétribution des travailleurs en tenant compte de leurs services ou de leur production, et l’interdiction de léser un travailleur en raison de ses origines, de ses opinions, de ses croyances, de son sexe ou de sa situation matrimoniale constituent les droits fondamentaux reconnus par la Constitution.

102.Cette Constitution n’a pas perdu de vue le droit à la culture, à la création et à la jouissance des œuvres intellectuelles et artistiques. L’obligation est faite à l’État d’assurer la promotion et la protection du patrimoine culturel national ainsi que de la production artistique et littéraire, de même que d’assurer le droit à l’instruction, à la gratuité et à la laïcité de l’enseignement fondamental. Le droit du citoyen qui en raison de son âge ou de son inaptitude physique ou mentale se trouve dans l’incapacité de travailler et le droit à la sécurité sociale sont également expressément prévus dans la Constitution tchadienne.

103.Aussi, pour que tous ces droits soient effectifs et que les citoyens tchadiens puissent en jouir pleinement, la Constitution de 1996 a prévu entre autres: un État Unitaire avec des Collectivités Territoriales Décentralisées dotées de pouvoirs délibérants.

104.Plusieurs lois et Textes Réglementaires ont été adoptés en ce sens et constituent un cadre légal, et un outil nécessaire et indispensable, permettant aux gouvernants d’agir dans la légalité. Cet ensemble de lois et autres règles est destiné à protéger les Droits de l’Homme sur toute l’étendue du territoire national, et ce dans le respect de la primauté du droit.

ii)Harmonisation de la législation nationale par rapport aux instruments internationaux

105.Le Tchad a ratifié de nombreuses conventions internationales et régionales relatives aux Droits de l’Homme parmi lesquelles on peut citer:

a)Les instruments généraux: droits civils et politiques, droits économiques sociaux et culturels;

b)Les instruments relatifs aux questions spécifiques: discrimination raciale, crime de guerre et crime contre l’humanité, droit international humanitaire, torture, esclavage, traite des êtres humains et travail forcé;

c)Les instruments relatifs à la protection catégorielle: étrangers, réfugiés, femmes, enfants, combattants, prisonniers de guerre et personnes civiles (cf. annexes).

106.En ce qui concerne la transposition des Conventions Internationales dans le droit interne, la question se pose de savoir si leurs dispositions peuvent être invoquées devant les tribunaux et les autorités administratives. La réponse se trouve à l’article 222 de la Constitution.

107.En effet, l’application des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme au Tchad obéit aux conditions d’application des traités posées à l’article 222 de la Constitution, qui dispose que la ratification ou l’approbation des traités produit des effets sur le plan national dès promulgation et publication.

108.Mais lorsqu’il s’agit de l’application directe des différentes conventions internationales par les juridictions, se pose le problème de leur traduction directe sous la forme d’une loi ou d’un règlement administratif de sorte d’en permettre l’application par lesdites juridictions. Les responsables des juridictions affirment souvent ne pas reconnaître l’autorité de ces conventions, c’est-à-dire leur force obligatoire de lois supérieures.

109.C’est une question pertinente qui revient toujours dans les débats et qui n’a pas encore trouvé de réponse. En définitive, les autorités ont conscience qu’elles ont l’obligation de faire en sorte de mettre les dispositions de droit interne en conformité avec les conventions internationales librement ratifiées.

iii)Les voies de recours actuelles

110.La Constitution du Tchad reconnaît à tout citoyen l’accès aux juridictions sans discrimination aucune (article 14, alinéa1).

111.En cas de violation des droits fondamentaux de l’homme, les victimes peuvent s’adresser aux différents ordres de juridiction pour obtenir justice. A l’heure actuelle, le Tchad compte 20 tribunaux de première instance, 4 tribunaux du travail, des chambres pour enfants et 3 tribunaux de commerce, 33 justices de paix opérationnelles et 3 Cours d’Appel.

112.Par ailleurs, le système judiciaire actuel est composé de: cent soixante-dix-huit (178) magistrats dont dix-neuf (19) femmes, dont quatre (4) juges de Paix, soit un (1) magistrat pour environ quatre cent dix mille (410 000) habitants. Il convient de rappeler que la Cour d’Appel et le Tribunal de commerce de N’Djamena sont dirigés par des femmes. Cela est insuffisant pour les 11 175 915 millions d’habitants et surtout lorsqu’on sait que les femmes représentent 50,7 % de la population tchadienne.

113.En dehors des recours juridictionnels, les citoyens peuvent s’adresser à la CNDH en vertu des dispositions portant attribution de l’institution (art.11 du décret no 163 de 1996) et peuvent également s’adresser au Médiateur de la République.

114.Aux termes de la loi no 031/PR/2009 du 11 décembre 2009, la Médiature de la République constitue pour les citoyens une voie de recours pour la restauration et le maintien de la paix entre le citoyen et l’administration, sans discrimination aucune vis-à-vis des citoyens.

C.Mécanismes de diffusion et de suivi

a)Médias publics et privés

115.Au Tchad, il n’existe pas à proprement parler de mécanisme spécifique de diffusion des conventions internationales relatives aux droits de l’homme ratifiées par le Tchad. Le Gouvernement utilise les canaux traditionnels de diffusion des textes juridiques que sont le Journal Officiel, les médias publics et privés, les établissements scolaires et les organisations de la société civile. Cette information se fait par le biais des cours, des séminaires, des ateliers et des conférences-débats publics.

Les médias publics

116.Dans la plupart des cas, le Gouvernement passe par les médias publics pour mettre à la disposition des citoyens les informations relatives à la ratification des conventions internationales.

117.La Radio-diffusion Nationale Tchadienne (RNT) créée en 1955 et installée à N’Djamena est appuyée de 4 stations provinciales (Abéché, Faya, Moundou et Sarh) et d’une Radio Rurale dans sa sous-direction). Elle ne couvre pas l’ensemble du territoire tandis que La Télévision Nationale Tchadienne (TVT), créée en décembre 1987, ne couvre que la capitale N’Djamena sur un rayon de 80 km. À noter que les deux institutions ont donné naissance à l’Office Nationale de la Radio-diffusion et de la Télévision Tchadienne (ONRTV) qui est maintenant sur satellite.

118.L’Agence Tchadienne de Presse (ATP), créée en 1965, est théoriquement la source officielle d’information, mais elle ne dispose d’aucune structure régionale ni d’aucune infrastructure appropriée. L’Agence dispose depuis août 2010 d’un site web (http://infotchad.com/).

119.Le Journal Officiel (JO) qui est consacré aux publications officielles n’est généralement pas accessible à tout le monde compte tenu de l’analphabétisme élevé au sein de la population et de sa périodicité incertaine.

120.Ces médias publics étroitement surveillés par le pouvoir en place ont commencé à afficher une plus grande autonomie structurelle au début des années 90. Cette période a marqué l’avènement de la démocratie et apporté un souffle nouveau: les médias privés ont pris leur envol.

Les médias privés

121.Au moins une dizaine de journaux privés (Tchad et Culture, N’Djamena-bi-hebdo, Le Progrès, L’Observateur, Le Temps, Notre Temps, Le Miroir, Chronique des Droits de l’Homme, Le Grenier, Le Carrefour, La Voix, etc.) informent le public sur l’actualité et les questions économiques et sociales, notamment celles relatives aux droits de l’homme.

122.Un certain nombre de radios privées prennent la relève de la Radio Nationale Tchadienne en matière d’information. Il s’agit notamment de: FM Liberté (N’Djamena); Voix du Paysan (Doba), Lotikôh (Sarh), Brakoss (Moïssala), Al Nasr (N’Djamena), Dja FM (N’Djamena), Ngato FM (N’Djamena), Terre Nouvelle (Bongor) et La Voix de l’Espérance (N’Djamena), dont une dirigée par une femme. Ces radios privées diffusent largement en langues locales les informations relatives aux Droits de l’Homme. Elles s’affichent plus populaires de par leurs prises de position en faveur des groupes vulnérables et leur option de porter la vérité à la population. Néanmoins, elles sont limitées dans leur rayon d’écoute par la modicité des moyens matériels utilisés.

123.Non seulement la presse écrite n’est pas assez lue compte tenu du fort pourcentage d’analphabètes et de la pauvreté, mais il y a aussi le manque de moyens de transport aérien ou terrestre qui rend difficile la ventilation des journaux. Cette situation rend ainsi leur viabilisation économique difficile.

124.Les médias privés subissent de temps à autre tout le poids de la puissance publique qui peut prendre la forme de mises en garde, de multiples procès et de leur fermeture provisoire.

b)Autres mécanismes de diffusion

125.Des prospectus, affiches et bandes dessinées ont été utilisés par certains acteurs de la vie publique comme supports pédagogiques pour diffuser les conventions internationales. Ces acteurs sont:

1.Le Ministère de l’Action Sociale, de la Solidarité Nationale et de la Famille lors de la commémoration de la Semaine Nationale de la Femme Tchadienne (SENAFET) et des Journées internationales de la femme (8 mars), de la femme rurale (15 octobre) et de la Journée panafricaine de la femme (31 juillet); de la Journée de l’enfant africain (16 juin), de l’anniversaire de la Convention relative aux droits de l’enfant (20 novembre);

2.La Commission Nationale des Droits de l’Homme (CNDH), à l’occasion de la célébration de l’anniversaire de la déclaration des Droits de l’Homme et du Cinquantenaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme;

3.Le Système des Nations Unies notamment l’UNICEF, le PNUD et le FNUAP qui, à chaque occasion, rappellent au public l’engagement de l’ONU pour la promotion et la protection des droits de l’homme au Tchad;

4.Les associations des Droits de l’homme et les associations féminines dans le cadre de leurs activités diffusent largement les principes fondamentaux des droits de l’homme, surtout de la Convention relative aux droits de l’enfant et de la Convention;

5.Le Projet de Renforcement des Droits de l’homme et de la Gouvernance au Tchad (CHD/98/012) cofinancé par le PNUD et le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme a conduit de juin 2000 à octobre 2002 un vaste travail de sensibilisation, notamment en renforçant les capacités de certaines institutions nationales (Parlement, Cour Suprême, Conseil Constitutionnel, Commission Nationale des Droits de l’Homme, Télévision Nationale), de la Société civile en équipements et dans le domaine de la formation. et en traduisant dans les deux principales langues nationales (arabe et sara) les principaux instruments de protection des droits humains – dont la Convention.

Traduction

126.Certaines conventions relatives aux droits de l’homme sont traduites et diffusées au Tchad en arabe local et en sara. Il s’agit notamment de la Convention relative aux droits de l’enfant. De manière générale, les conventions sont synthétisées ou condensées en langues locales pour une meilleure compréhension du public.

127.La traduction et la vulgarisation des instruments juridiques internationaux restent l’apanage de la société civile, notamment des organisations des droits de l’homme, des associations féminines et autres ONG, qui à travers les temps d’antenne à la radio nationale et par le biais des radios communautaires et les séminaires de formation assurent la diffusion de ces instruments au niveau de la population.

128.En ce qui concerne la Convention, outre la traduction en arabe littéraire, il existe une traduction en arabe local réalisée dans le cadre du Projet de Renforcement des Droits de l’Homme et de la Gouvernance qui est diffusée auprès des radios locales et communautaires.

129.Dans le cadre de la traduction, un collectif des associations féminines de la place (CELIAF) a traduit les 12 points de Beijing en trois (3) langues: Sara, Arabe local, Ngambaye et en Moundang en 1999.

Débats Publics et Formation

130.Il y a effectivement eu des débats publics et des formations sur les instruments des Droits de l’Homme à travers des conférences-débats et des ateliers de validation des documents officiels du Tchad. Avec l’appui de l’UNICEF, des efforts ont été faits dans le cadre de la vulgarisation de la Convention relative aux droits de l’enfant en Français et en Arabe à l’endroit des groupes spécifiques que sont les magistrats, la police, les journalistes, les travailleurs sociaux et les associations.

131.Des débats publics ont été menés dans le cadre de la mise en œuvre de la Convention par rapport à trois projets de loi. Il s’agit du projet de code des personnes et de la famille, du projet de loi sur le quota et de la loi sur la santé de la reproduction en 2000-2001 et 2002. Les débats se poursuivent encore.

132.Le Ministère de l’Action Sociale, de la Solidarité Nationale et de la Famille (MASSNF) conduit des actions de vulgarisation et organise des débats dans les Centres Sociaux et sur les antennes de la radio sur les droits des femmes contenus dans la Convention.

133.Cette action est accentuée pendant les journées de commémoration de la femme, notamment pendant la Semaine Nationale de la Femme Tchadienne (1er au 8 mars). Le MASSNF a initié la programmation de l’émission «la voix de la femme tchadienne» sur les antennes de l’ONRTV tous les jeudis.

c)Organes de diffusion, de suivi et d’évaluation des conventions internationales relatives aux droits de l’homme

Les Organes étatiques

134.La diffusion et le suivi des conventions se fait actuellement via:

Les Départements ministériels;

La Commission permanente des Droits de l’Homme instituée au sein de L’Assemblée Nationale;

L’institut National des Sciences de l’Éducation (ISSED;

l’École Nationale d’Administration et de Magistrature (ENAM).

135.Ces deux dernières institutions assurent l’enseignement des Droits de l’Homme.

136.En ce qui concerne la Convention, le Ministère de l’Action Sociale, de la Solidarité Nationale et de la Famille a par l’arrêté no 0013/MASF/DG/02 créé un comité technique chargé de la rédaction des rapports sur l’application de la Convention.

137.Le Ministère de l’Action Sociale, de la Solidarité Nationale et de la Famille a mis en place en 2002 par le décret no 192/BRSGP/94 du 04 août 1994 un comité de suivi de la situation de l’enfant. Le rapport initial de la Convention relative aux droits de l’enfant a été élaboré et remis au Comité des droits de l’enfant de l’ONU.

138.En 2006, fut créé sous l’égide du Ministère des Droits de l’Homme et des Libertés un comité interministériel, en voie de redynamisation, devant intégrer les OSC. Un effort est en train d’être fait dans le cadre de la création des comités de suivi desdits instruments ratifiés par le Tchad.

Les Organisations Non Gouvernementales

139.Il s’agit des organisations de la Société Civile que sont les Associations de Défense et de Promotion des Droits de l’Homme, les ONG de développement et les Associations Féminines.

Les Associations des Droits de l’Homme (ADH)

140.Pour plus d’efficacité cinq associations des Droits de l’Homme (APLFT, ATNV, TNV, LTDH et ATPDH) ont décidé de former un réseau de concertation et d’action: une radio associative (FM Liberté) a été créée pour «informer, former, éduquer».

141.Elles dénoncent régulièrement les violations des droits de l’Homme et dressent des rapports périodiques sur la situation des droits de l’Homme (arrestations et détentions arbitraires, exécutions extrajudiciaires, etc.).

142.Elles luttent pour l’établissement d’un État de droit, pour la démocratie et pour un développement durable. Elles font de la promotion et de la protection à travers diverses actions: des formations; des appuis juridiques aux victimes; des émissions radiophoniques telles «Notre dignité» par l’association Droits de l’Homme Sans Frontière, «Informer pour mieux sensibiliser» par l’ATPDH, «Allô mon avocat»; des productions théâtrales; des consultations juridiques par le biais des Boutiques des Droits de l’Homme et des cliniques juridiques, du Service d’écoute (ATPDH, APLFT, AFJT); et des publications telles La chronique des droits de l’homme de l’APLFT et La Lettrede la LTDH.

143.L’insuffisance des moyens matériels et humains fait que ces acteurs n’atteignent pas toujours les objectifs escomptés.

Les ONG de Développement

144.De nombreuses ONG opérant au Tchad ont une riche expérience dans le domaine de la vulgarisation des Droits de la femme. Ce sont des ONG telles que Acord, Intermon oxfam, World Vision Internationale, Assaild, Secadev, Inades-Formation, et d’autres.

145.Le Centre de Formation pour le Développement (CEFOD) dispose d’une banque des données juridiques destinée à informer la population; il édite des brochures sous forme simplifiée de vulgarisation juridique.

Les Associations de femmes

146.Les Associations de Femmes regroupées au sein de la Cellule de Liaisons et d’Information des Associations Féminines (CELIAF) mènent des actions en faveur des femmes pour la promotion et la défense de leurs Droits à travers des séminaires, conseils techniques, recherches et émissions radiodiffusées sur la Convention.

147.L’information sur les droits des femmes passe également par les activités des associations des femmes arabophones (UAFAT).

Les Syndicats

148.Il y a quatre centrales syndicales qui sont: l’Union des syndicats du Tchad, la Confédération Libre des Travailleurs du Tchad, la Confédération du Syndicat des Enseignants du Tchad et la Confédération Syndicale des Travailleurs du Tchad.

149.Ils jouent un grand rôle dans la consolidation des Droits de l’Homme et de la démocratie au Tchad en vulgarisant les instruments nationaux et internationaux sur les droits des travailleurs et sur les droits et devoirs du citoyen.

Les organisations religieuses

L’église Catholique

150.La Commission Nationale Justice et Paix de l’Église Catholique instituée par la Conférence épiscopale, installée dans les six diocèses, ainsi que la Coordination des Femmes catholiques font un travail de sensibilisation, d’information et de formation aux droits fondamentaux: enseignement quotidien de la doctrine sociale de l’Église qui prône le respect de la dignité de l’être humain, de l’équité et la justice.

151.Ce travail est appuyé par Radio Arc En Ciel et Lotikoh qui y consacrent aussi un temps d’antenne.

L’Église Protestante

152.L’Entente des Églises et Missions Évangéliques au Tchad (EEMET) et l’Organisation des Femmes Chrétiennes de l’Entente (l’OFCE) assurent la formation dans les domaines des Droits de l’Homme et de l’Éducation civique des jeunes et des émissions religieuses par la Radio «La Voix de l’Espérance».

Le Conseil Supérieur des Affaires Islamiques

153.Le Conseil Supérieur des Affaires Islamiques fait l’éducation aux droits de l’homme à travers les rencontres entre leaders religieux et croyants.

154.Des actions d’information et de sensibilisation de proximité sont menées par les membres de l’Union des Associations des Femmes Arabophones du Tchad (UAFAT) qui sont organisés au sein de groupes restreints.

II.Des différents articles de la Convention

Article 2Les dispositions législatives et autres pour lutter contre la discrimination

155.Dans le cadre de la mise en œuvre de la Convention, le Tchad a pris des mesures législatives, administratives et judiciaires pour lutter contre la discrimination.

Les mesures législatives

Dispositions d’ordre général

La Constitution du 31 mars 1996

156.La Constitution du Tchad, adoptée le 31 mars 1996 et révisée le 15 juillet 2005 dispose en son article 14 que:

«l’État assure à tous l’égalité devant la loi sans distinction d’origine, de race, de sexe, de religion, d’opinion politique ou de position sociale.

Il a le devoir de veiller à l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard de la femme et d’assurer la protection de ses droits dans tous les domaines de la vie privée et publique».

157.Les dispositions de l’article 14 posent de manière claire les principes de l’égalité et de la non-discrimination dans les relations hommes et femmes au Tchad. Elles garantissent les mêmes droits et libertés individuelles de l’homme et de la femme dans tous les domaines de la vie.

158.En vertu de cet article, la Constitution du Tchad interdit toute discrimination sur la base du sexe.

159.Le droit au travail est garanti par la Constitution en son article 32 qui dispose: «L’État reconnaît à tous les citoyens le droit au travail.

Il garantit au travailleur la juste rétribution de ses services ou de sa production. Nul ne peut être lésé dans son travail en raison de ses origines, de ses opinions, de ses croyances, de son sexe, ou de sa situation matrimoniale».

160.En outre, l’accès aux emplois publics est garanti à tout Tchadien sans discrimination aucune sous réserve des conditions propres à chaque emploi.

Autres lois

161.De manière générale, le Tchad respecte le principe d’égalité des chances entre les femmes et les hommes dans tous les domaines de la vie.

162.Le Code électoral du 18 septembre 2000, révisé par la loi no 003/PR/2009 du 7 janvier 2009, elle-même modifiée par la loi no 007/PR/2010 du 08 février 2010 portant modification de certaines dispositions de la loi no 003, rappelle dans ses dispositions celles de la Constitution qui consacrent l’égalité des hommes et des femmes devant la loi en son article 3, qui reconnaît aux Tchadiens des deux sexes âgés de dix huit (18) ans révolus le droit d’être électeurs.

163.En application de l’article 111 du même Code, tout citoyen tchadien peut faire acte de candidature et être élu.

164.La loi no 003/ PR/2000 du 16 févier 2000 portant régime électoral des Collectivités Territoriales Décentralisées. L’article 10 de cette loi reconnaît aux Tchadiens des deux sexes âgés de vingt-cinq (25) ans révolus le droit d’être élus au Conseil municipal, départemental ou régional.

165.La loi no 031 de septembre 1996, portant création de la Commission Nationale des Droits de l’Homme consacre le même principe de non-discrimination quant à l’accès à la Commission.

166.La loi no 005/PR/98 du 07 juillet 1998 portant organisation et fonctionnement du Conseil Supérieur de la Magistrature reconnaît également cette égalité.

167.Le projet de code des personnes et de la famille est en chantier depuis 1996. Il a été décidé par le décret no 617/PR/MASF/95 du 18 août 1995 portant création de la Commission d’élaboration du projet de code des personnes et de la famille. Le projet de code a été adopté lors d’un atelier national de validation en décembre 2000. Il a été réexaminé en août 2009 et février 2010 et attend d’être adopté par le Gouvernement puis l’Assemblée Nationale.

168.Ce projet de code des personnes et de la famille est un début de résultat de compromis entre les différentes pratiques liées à l’application de plusieurs droits par une population.

169.Ce projet viendra également combler le vide tel que souhaité par la Convention, qui demande aux États de s’engager «à assurer par voie de législation ou par d’autres moyens appropriés l’application effective du principe de l’égalité des hommes et des femmes».

Dispositions spécifiques

170.La loi no 19/PR/95 du 04 septembre 1995 portant Déclaration de Politique d’Intégration de la Femme au Développement (IFD). Dès la ratification de la Convention, le Tchad s’est attelé à la mise en place d’un mécanisme juridique pouvant permettre sa mise en œuvre effective en tant que loi interne.

171.Cette loi rappelle dans son préambule les principes fondamentaux régissant les droits de l’homme contenus dans la Déclaration universelle des droits de l’homme, les résolutions et recommandations des conférences internationales et régionales sur les femmes auxquelles le Tchad a pris part.

172.Elle consacre la volonté du Gouvernement de la République du Tchad d’intégrer la composante femme dans les plans de développement dans tous les secteurs de la vie publique et privée.

173.La loi sur l’IFD ne s’est pas seulement contentée de prévoir des axes stratégiques concernant tous les domaines des droits des femmes, mais elle a aussi le mérite de faire obligation au Gouvernement d’intégrer la composante femme dans les plans de développement et dans tous les secteurs. Elle a également le mérite de prévoir la création de mécanismes d’intégration.

174.La loi no 038/PR/96 portant Code du travail est prise en abrogation de celle de 1967. Cette loi comporte des dispositions spéciales sur le travail des femmes.

175.Le Projet de loi sur le quota élaboré en 1999 accorde aux femmes des avantages au niveau des postes de la prise de décision aussi bien politique qu’administratif. Mais elle tarde à être adoptée par le Gouvernement.

176.La loi no 006/ PR/02 du 15 avril 2002 portant Promotion de la Santé de Reproduction vient renforcer la politique de santé et s’intègre parfaitement aux dispositions de la Convention relatives à la santé des femmes. Elle a la particularité de reconnaître aux couples la liberté de procréation et de choix du nombre des enfants (art. 4, 5 et 6). La responsabilité de la santé de reproduction incombe désormais au couple et non au mari comme dans les anciens textes ou pratiques en vigueur au Tchad.

Les mesures administratives

177.L’article 3 de la Convention fait obligation aux États parties de prendre des mesures dans le domaine économique, politique et socioculturel en vue d’assurer le plein développement et le progrès des femmes dans le respect et la jouissance des droits de l’homme. Il est même recommandé aux États, à l’article 4, de prendre des mesures spéciales visant à accélérer l’instauration d’une égalité de fait entre homme et femme.

Le mécanisme d’intégration et de promotion de la femme

178.Le premier mécanisme d’Intégration de la Femme au développement fut le Secrétariat à la Promotion féminine auprès du Ministère de Travail créé le 21 octobre 1982. Le 24 juillet 1984, il devient un département à part entière dénommé «Ministère de la Promotion Féminine et des Affaires Sociales».

179.La Semaine Nationale de la Femme Tchadienne (SENAFET) fut instituée en 1990 et le Comité d’Intégration de la Femme au Développement (CNIFD) a été mis en place en 1991.

180.En 1995, faisant suite à la Déclaration de la Politique de Population (DPP), adoptée en 1994, le Ministère des Affaires Sociales et de la Promotion Féminine se voit confier son nouveau rôle de conceptualisation et de vigie par la loi no 19/PR/95 portant adoption de la Déclaration de la Politique d’Intégration de la Femme au Développement (DPIFD).

181.Les objectifs définis dans ces deux documents de politique montrent clairement la volonté de promouvoir la participation de la femme au développement.

182.Dans la DPP, trois objectifs spécifiques relatifs aux femmes ont été définis, à savoir:

Revaloriser le Statut Juridique et Socioéconomique de la Femme Tchadienne;

Renforcer ses capacités à exercer pleinement ses droits y compris ses droits à la reproduction;

Accroître sa participation au processus de développement, notamment par une éducation visant à promouvoir l’égalité des chances en matière d’éducation et d’emploi pour les deux sexes.

183.La DPIFD, quant à elle, affirme le caractère transversal du thème «femme et développement» et la nécessité de promouvoir la femme. Elle propose des stratégies en vue d’assurer la prise en charge des populations sur la base de l’équité et de l’égalité des chances entre les genres.

184.Le Ministère de l’Action Sociale, de la Solidarité Nationale et de la Famille est structuré de la manière suivante:

Un Secrétariat Général dirigé par une femme;

Deux Conseillers Techniques au Cabinet du Ministre dont une femme;

Six directions techniques dont deux dirigées par des femmes.

185.Le MASSNF est chargé de mettre en œuvre et de suivre l’application de la politique sociale et de la famille définie par le Gouvernement. A ce titre, il a la responsabilité de:

Faire de l’Information Éducation et Communication (IEC) en ce qui concerne la femme sur tous les plans;

Appliquer la politique définie par le Gouvernement, en matière de promotion de la femme;

Participer à la diffusion de l’information, à la sensibilisation et à l’éducation de la population en vue d’améliorer sa condition sociale;

Veiller à l’intégration de la femme à la prise de décision, au respect de l’égalité des sexes en matière d’éducation, de formation, d’emploi, etc.

186.À travers ses structures et les missions qui lui ont assignées, le Ministère dispose d’un cadre responsable de l’intégration de l’approche Genre qui est la Direction de la Promotion de la Femme. Celle-ci est chargée de:

Veiller à la mise en œuvre de la Politique d’Intégration de la femme au Développement et en assurer le suivi;

Contribuer à la prise en compte de l’approche «genre» dans les politiques et programmes nationaux, sectoriels et projets de développement.

Les mesures judiciaires

187.L’article 14 de la Constitution du Tchad dispose que: «L’État assure à tous l’égalité devant la loi sans distinction».

188.La protection juridictionnelle des droits des femmes, sur un même pied d’égalité avec les hommes, est effective à travers les tribunaux nationaux, les administrations et d’autres institutions de la République.

L’égal accès à la justice

189.La question qui se pose est de savoir si la législation tchadienne permet juridiquement de poursuivre et punir tous les cas de violences faites aux femmes.

190.En matière d’accès à la justice, la législation tchadienne reconnaît à la femme l’égalité devant la loi, au même titre qu’à l’homme. C’est ce qui ressort par exemple de l’article 252 du Code pénal qui reconnaît à tout individu le droit de répondre de ses actes s’il porte atteinte à l’intégrité corporelle ou mentale d’un autre.

191.Ainsi donc toute femme victime de violences physiques (coups et blessures volontaires) ou de violences relatives au non-respect des obligations résultant du mariage telles que le défaut d’entretien de la famille, l’abandon d’enfant ou de famille, peut saisir le juge et demander le versement de la pension alimentaire ou la réparation du préjudice subi.

192.Mais force est de constater que bon nombre de femmes ne portent pas plainte parce qu’elles ignorent leurs droits ou ont peur d’être mises au ban de la société ou de perdre leur mariage.

193.Les mesures d’ordre judiciaire les plus fréquentes sont entre autres:

Avec le Projet de réforme de la justice, les conditions de détention de la femme seront améliorées;

Les décisions judiciaires de ces dernières années montrent à suffisance que les magistrats prennent en compte les dispositions de la Convention.

194.Il faut noter que le Code civil, le Code de procédure civile, le Code pénal, le Code du commerce et le Code du travail pour ne citer que ceux-là consacrent l’égalité de tous devant la loi sans discrimination de sexe, de race, de religion ou d’opinion politique.

195.Malgré cette reconnaissance globale de l’égalité entre l’homme et la femme et la condamnation de la discrimination, on constate une persistance des faits et des pratiques contraires à ces principes proclamés par la Constitution et les autres lois de la République au niveau des administrations et des juridictions régionales.

196.Il n’existe pas des dispositions pénales discriminatoires à l’égard des femmes au Tchad. Des insuffisances existent et sont relatives au renforcement de certaines dispositions concernant les violences conjugales, coutumières, en matière de succession ou de harcèlement sexuel.

Les actions concrètes de l’État

197.Il s’agit notamment des mesures législatives, réglementaires et administratives parmi lesquelles on peut citer:

Dans le cadre de la loi portant Intégration de la Femme au Développement, le Gouvernement a adopté un plan d’action qui responsabilise les différents départements ministériels dans le processus d’intégration de la femme au développement compte tenu du caractère transversal de la dimension femme. Une manière pour le Gouvernement d’être en conformité avec les dispositions de la Convention ci-dessus citées.

198.Ce plan d’actions a ciblé cinq axes stratégiques prioritaires autour desquels tous les programmes et projets de développement doivent s’intégrer, à savoir:

Axe 1:L’amélioration du statut juridique de la femme;

Axe 2:La valorisation des ressources humaines féminines dans tous les secteurs;

Axe 3:La promotion économique de la femme;

Axe 4:L’amélioration des conditions de vie de la femme;

Axe 5:L’amélioration du cadre institutionnel de l’intégration de la femme au développement.

199.Les cinq axes prioritaires retenus par le Gouvernement intègrent bien les dispositions de la Convention relatives à l’amélioration de la condition sociojuridique de la femme tchadienne et à l’élimination des discriminations dont elle fait l’objet à tous les niveaux de la vie publique et privée.

200.L’institutionnalisation de la Semaine Nationale de la Femme Tchadienne (SENAFET) en1990 a permis au Gouvernement de mettre en œuvre la Convention en la renforçant par d’autres institutions, telles que:

Le Comité National d’IFD en 1991 (les points focaux de l’IFD ont été institués au niveau des départements ministériels);

La Journée panafricaine de la femme en 1995;

La Journée de la femme rurale en 1999.

201.Ces actions se situent dans la droite ligne du programme politique du Gouvernement du 4 juin 1997 qui donne expressément mission au Ministère de l’Action Sociale, de la Solidarité Nationale et de la Famille de poursuivre l’exécution de projets relatifs à l’intégration de la femme dans le processus de développement.

202.C’est à cet effet que le Gouvernement a pris des mesures incitatives relatives à l’éducation et à la scolarisation des filles en réduisant les droits d’inscription de 25 %.

Les actions concrètes de la société civile

203.De manière générale, les Associations de femmes et d’autres Associations des droits de l’homme et ONG ont joué et continuent de jouer un rôle important dans la lutte contre les discriminations à l’égard des femmes et des filles.

Activités de sensibilisation et de formation

204.Des Association telles que l’AFJT, la CELIAF, la LTDH, l’APLFT, l’ATPDH ont organisé des séances de sensibilisation et de formation des populations sur l’importance et le contenu des conventions relatives aux droits humains dont la Convention.

Activités de plaidoyer

205.Les Associations membres de la CELIAF et l’Association Tchadienne pour le bien-être Familial se sont investies dans l’action de plaidoyer pour amener les décideurs à prendre des mesures discriminatoires favorables aux femmes dans le domaine de la Santé de Reproduction.

206.Le Projet de code des personnes et de la famille en cours est également l’œuvre de plaidoyer des ADH et l’AFJT.

Études

207.L’AFJT a réalisé une étude comparative de la Convention et des lois nationales en 2000 avec l’appui de l’UNICEF.

208.Elle a également réalisé, avec l’appui du FNUAP, une étude sur la Condition Sociojuridique de la femme tchadienne en 2001.

Les contraintes à l’adoption et à l’application des mesures législatives et autres

209.La République du Tchad a pris diverses mesures pour modifier toutes lois, dispositions réglementaires ou coutumières qui constituent une discrimination à l’égard des femmes dans les domaines politiques, économiques, sociaux et culturels.

210.Cependant, leur application pose problème face à la persistance des pesanteurs socioculturelles et la difficulté pour l’État de faire évoluer les mentalités au rythme des engagements internationaux dans le domaine des droits humains.

211.Au Tchad, la législation nationale en matière civile est caractérisée par la coexistence du droit coutumier, du droit musulman et du droit moderne. Ceci est dû au fait que depuis l’accession du pays à l’indépendance, les autorités tchadiennes n’ont pas vraiment réussi à harmoniser les différentes pratiques locales avec le droit moderne hérité de l’ancienne puissance colonisatrice. Le Code napoléonien français de 1958 hérité de la décolonisation continue d’être appliqué par les juridictions nationales en matière civile à défaut d’un code civil à caractère national.

212.L’analyse de la situation sociojuridique de la femme tchadienne au regard de la Convention dénote une inadéquation de certains textes juridiques nationaux aux dispositions relatives à la révision des lois contraires et à l’harmonisation des instruments juridiques internationaux avec les lois internes.

213.La loi constitutionnelle en vigueur instaure une discrimination en accordant de la place à la coutume qui relègue déjà la femme au second plan et qui ne reconnaît pas l’égalité entre l’homme et la femme dans les domaines du mariage, du divorce, du droit de propriété et de la succession. Les articles 156, 157 et 158 sont explicites là-dessus. A titre d’exemple, l’article 157 dispose: «les règles coutumières et traditionnelles régissant les régimes matrimoniaux et les successions ne peuvent s’appliquer qu’avec le consentement des deux parties concernées. A défaut de consentement, la loi nationale est seule applicable. Il est de même en cas de conflit entre deux ou plusieurs règles coutumières». Or, il se trouve que la véritable loi nationale en matière civile est multiple (droit coutumier, droit musulman et droit civil). À cette disposition contradictoire de la Constitution de 1996 s’ajoute celle de la loi no 04 du 24 août 1998 portant organisation judiciaire qui autorise les assesseurs à siéger au niveau du tribunal. Les assesseurs sont les représentants des chefs coutumiers qui orientent les juges dans le sens de l’application de la coutume.

214.L’influence vivace de la coutume freine quelque peu l’application intégrale des dispositions de la Convention en ce moment. L’expérience a montré que les juges appliquent difficilement le droit positif. Ils sont également le reflet de leur société qui privilégie la pratique des us et coutumes à celle des lois modernes.

215.Un autre frein à l’application de la Convention est la non-adoption du Projet de Code des Personnes et de la Famille.

216.En effet, pour obéir à ses engagements internationaux, le Gouvernement tchadien a pris l’initiative de se doter d’un code des personnes et de la famille en 1996. Une Commission Nationale chargée de l’élaboration dudit code a été mise en place à cet effet. Après quatre années d’intenses travaux, la Commission a remis, officiellement le 16 février 2000, le projet au Gouvernement pour examen puis adoption par l’Assemblée Nationale.

217.Jusqu’à ce jour, le Gouvernement éprouve quelques difficultés à adopter ce projet, car une frange de la population dit ne pas reconnaître la valeur juridique de ce code parce que ses aspirations n’auraient pas été prises en compte par ledit projet. Il s’agit notamment de l’Union des cadres musulmans du Tchad qui a contesté le projet de code de la famille. Elle souhaite avoir un code spécifique inspiré du Coran qui réglemente les statuts de l’enfant et de la femme musulmans.

218.Il convient de faire remarquer qu’un consensus s’est dégagé au niveau de la Commission Nationale chargée de la Rédaction du Projet du Code de la Personne et de la Famille.

219.En 2002, sur instruction du Premier Ministre, il a été créé un Comité chargé de la relance du Projet de code des personnes et de la famille par l’arrêté no 0022/MASF/DG/02 du 10 septembre 2002.

220.Les dispositions du Code civil de 1958 relatives au mariage sont contraires à l’article 16 de la Convention, qui consacre l’égalité de l’homme et de la femme dans les relations matrimoniales. C’est ainsi que l’on peut lire aux articles:

213 du Code que: «le mari est chef de la famille»;

215 que: «Le choix de résidence de la famille appartient au mari et la femme est obligée d’habiter avec lui et il est tenu de la recevoir.»

221.L’ordonnance no 006/PR/84 portant statut des commerçants au Tchad donne la possibilité au mari d’une commerçante de s’opposer aux activités commerciales de sa femme. Cette ordonnance est toujours en vigueur. C’est une reprise de l’article 223 du Code civil de 1958 qui autorise le mari de la femme commerçante à mettre fin à ses activités s’il le juge nécessaire.

222.La loi no 001/PR/99 portant gestion des revenus pétroliers révisée en 2006 est muette sur les intérêts spécifiques des femmes et des enfants.

Les contraintes d’ordre judiciaire

223.Il faut dire que, malgré l’existence des institutions judiciaires, la justice tchadienne souffre d’une grave crise pour les raisons suivantes:

Les magistrats ne sont pas indépendants dans la prise de leurs décisions du fait de la forte implication du Pouvoir Exécutif dans le fonctionnement de l’appareil judiciaire;

Les garanties constitutionnelles et juridiques ne sont valables que pour ceux qui ont le pouvoir et de gros revenus;

La faiblesse et le manque d’intégrité de certains magistrats, les conditions financières et matérielles de travail déplorables;

Le manque de personnel qualifié dans les institutions judiciaires et la persistance des justices parallèles au niveau communautaire;

L’abstraction de l’état de droit pour la majorité des populations du fait de l’illégalité qui continue d’être la règle.

224.La plupart des décisions judiciaires sont souvent prises en défaveur de la femme.

225.Les difficultés persistent au niveau des décisions judiciaires en matière successorale. Il s’agit notamment du problème de la vocation successorale de la veuve en matière immobilière au Tchad qui apparaît aux yeux de certains tenants des normes coutumières comme un objet de droit et non un sujet de droit.

226.En milieu musulman, l’immeuble fait partie de la masse successorale et la veuve en bénéficie. L’on relève cependant que le juge tchadien n’a pas toujours été attentif au sort de la veuve.

227.Il en est ainsi des exemples qui suivent.

228.Dans l’affaire Veuve A.C. contre O.C. (Répertoire 450/99) du 8 octobre 1999, où la Cour d’Appel n’a pas reconnu la validité de la donation entre époux. En l’espèce, la veuve. C. a déféré ses beaux-parents devant les juges à l’effet de procéder au partage de la succession de son mari. Mais la Cour d’Appel de N’Djamena déclare que la masse successorale comprend aussi l’immeuble en question et qu’ «en souscrivant au mariage officiel, les époux n’ont pas pour autant renoncé à leurs statuts coutumiers… [et] qu’il est de jurisprudence constant que les successions sont régies par la coutume du mari dès lors qu’elles ne sont pas contraires à l’ordre public».

229.Dans l’affaire H.L. contre veuve F.A. du 24 avril 1998 (Répertoire 209/98), la Cour d’Appel de N’Djamena a infirmé un jugement du Tribunal de Première Instance de N’Djamena qui a reconnu à la veuve F.A. un droit sur un immeuble appartenant à son mari défunt conformément aux documents présentés. Pour la Cour d’Appel, ce bien n’entre pas dans la masse successorale parce que le conseil de famille a déjà désigné les héritiers. Ainsi, la Cour d’Appel a accordé la primauté à la décision du conseil de famille, qui a décidé de soustraire cet immeuble de la masse successorale pour l’attribuer à des héritiers en concurrence avec la veuve, sur les droits de la veuve.

230.Dans l’affaire M.G. contre A.A. du 3 décembre 1999 (Répertoire 583/99): Veuve M.G. s’estime propriétaire d’un immeuble offert par son mari après quarante ans de vie commune. Cependant, à la mort de son mari, les frères du défunt décident de vendre l’immeuble, tout en reconnaissant à la veuve le huitième de la valeur de l’immeuble. Le recours de cette dernière devant la Cour d’Appel n’a obtenu aucun écho favorable.

Article 3Les droits civils et politiques

Les dispositions d’ordre législatif

La Constitution

231.Les droits civils et politiques des femmes, tels que prévus par la Convention, sont pris en compte par la Constitution tchadienne.

232.L’article 12 fait référence aux droits fondamentaux de l’homme qui sont reconnus à tous les citoyens et leur exercice garanti par l’État dans les formes prévues par la loi.

Autres lois

233.La loi no 17/PR/01 du 31 décembre 2001 portant Statut Général de la Fonction Publique consacre au même titre que les autres lois le principe de non-discrimination dans l’accès des Tchadiens des deux sexes à la fonction publique.

234.La loi no 19/PR/2008 du 4 août 2009 porte Charte des Partis Politiques.

235.Le Titre II de la création et du fonctionnement des Partis Politiques en ses articles 11 et 12 reconnaît à tout citoyen la liberté de créer un parti politique ou d’adhérer à un parti politique de son choix.

236.La loi no 021/PR/2000 du 18 septembre 2000 portant Code électoral, révisée en 2008, précitée en fait autant.

237.Cette loi en son article 3 reconnaît à tous les Tchadiens indépendamment de leur sexe le droit d’être électeur et d’être élu aux postes de décision.

238.La loi no 19/PR/95 portant adoption de la Politique d’Intégration de la Femme au Développement (DPIFD) adoptée en 1995 entend développer des stratégies de promotion et de responsabilisation des femmes tchadiennes dans la gestion des affaires publiques.

239.La loi no 003/ PR/2000 du 16 févier 2000 porte régime électoral des Collectivités Territoriales Décentralisées.

240.Le plein développement, le progrès des femmes et la jouissance des droits et des libertés fondamentales passe tout d’abord par l’exercice de leur droits à la citoyenneté, c’est-à-dire le droit de voter et d’être éligible à tous les postes électifs ou de décision.

241.C’est également la possibilité pour les femmes de pouvoir s’exprimer librement sans contrainte dans le cadre de leur participation à la gestion des affaires publiques. C’est ce qui ressort de l’article 3 du Code électoral précité.

Les difficultés face à la réalisation du plein épanouissement de la femme

242.Dans les relations familiales et matrimoniales, la femme n’a pas de droit. Elle est sous la dépendance du père ou du mari. La direction morale et matérielle de la famille est assurée par le mari en milieu rural surtout. La femme en tant que mère et épouse s’occupe des travaux ménagers, de l’éducation des enfants et de la corvée d’eau.

243.Dans les relations conflictuelles (divorce), la femme perd ses droits et ne peut se faire dédommager. Il revient toujours au mari le droit de demander le divorce ou même de le prononcer unilatéralement (cas de la répudiation).

244.Dans le domaine des violences ou de la discrimination, les femmes et les filles subissent quotidiennement des violences liées à leur statut sociojuridique.

245.Le droit de décider en tant que citoyenne à part entière ou de donner librement son consentement au mariage n’est pas effectif en pratique.

246.Les tabous alimentaires, les pratiques traditionnelles néfastes telles que l’excision, les scarifications, les mariages précoces, le lévirat et le sororat sont des obstacles à l’application effective de la Convention. Les femmes s’y complaisent encore dans la plupart des régions du Tchad.

247.Dans le domaine de la sécurité publique, les droits fondamentaux de la majorité des populations tchadiennes sont souvent massivement bafoués et violés: les violations des droits civils et politiques (traitements cruels inhumains, ou dégradants, assassinats en milieu rural et urbain) sont des pratiques courantes infligées par les agents de l’État:

Violation des droits des femmes devant l’Ambassade de France le 11 juin 2001 par les agents de sécurité de l’État lors d’une manifestation pacifique;

Détentions arbitraires et conditions carcérales dégradantes;

Mauvais traitements infligés aux femmes commerçantes par la police municipale sur les marchés.

248.Les cas relevés ci-dessus sont assez édifiants et témoignent de l’acuité du problème. Les auteurs de ces actes bénéficiant de la plus totale impunité et continuent d’utiliser les méthodes illégales contre les populations les plus démunies et les plus vulnérables.

249.Les problèmes liés à l’insécurité et à l’impunité quasi permanentes au Tchad freinent quelque peu l’application de la Convention et celle de toutes les conventions internationales ratifiées par le Tchad sur les Droits de l’Homme. Le cas des violences perpétrées par les forces de l’ordre est assez édifiant.

250.En effet, le Tchad est engagé dans un difficile processus de démocratisation et connaît de ce fait l’engagement de ses Forces Armées dans de nombreux conflits qui ont eu des effets dévastateurs: importantes pertes en vies humaines, flots de réfugiés et de personnes déplacées et multiples cas de viol et de violences à l’égard des femmes.

251.L’Armée qui devrait contribuer à garantir la sécurité collective des Tchadiens est utilisée tantôt par les hommes au pouvoir pour sévir contre les autres communautés, tantôt elle se met au service des groupes d’opposants qui cherchent à s’emparer du pouvoir. Dans de telles conditions, l’armée tchadienne n’apparaît plus comme une armée de brassage entre diverses communautés. Elle est transformée en plusieurs forces partisanes qui ne sont que des unités militaires monoethniques.

Article 4Les mesures discriminatoires positives et les mesures spéciales pour les femmes

Les mesures législatives

252.En dehors de la Constitution, qui condamne la discrimination dans tous les domaines, il n’existe pas de législation spécifique dans ce sens.

253.L’article 14, alinéa 2, parle de l’obligation de l’État d’assurer la protection des droits de la femme dans tous les domaines de la vie privée et publique. Cela suppose que l’État tchadien se doit de prendre des mesures favorables à l’épanouissement de la femme.

254.C’est ainsi que l’État a adopté des politiques et programmes qui favorisent les femmes dans les domaines ci-dessous cités.

Domaine politique

255.Le projet de loi sur le quota élaboré en 1999 accorde aux femmes des avantages au niveau des postes de la prise de décision aussi bien politique qu’administrative. Mais il tarde à être adopté par le Gouvernement.

256.La nomination des femmes aux postes de prise de décision et au niveau des services jadis réservés à la junte masculine, tels que le Secrétariat Général des Ministères, la Vice- Présidence de l’Assemblée Nationale et du Conseil Économique, Social et Culturel, les Préfectures et Sous Préfectures ou la Mairie.

Domaine de l’Éducation

257.L’engagement particulier de l’État en faveur des filles et des femmes a amené à l’adoption de mesures discriminatoires positives en faveur des filles, notamment à l’instauration de la discrimination positive dans le recrutement et la formation des filles dans les écoles professionnelles.

258.En outre, pour contribuer à l’amélioration de la situation des filles, des mesures d’accompagnement ont été prises en 1994. Il s’agit de:

L’arrêté no 300/MEN/DG/94 ayant pour objectif d’augmenter le taux de scolarisation des filles de 31 à 36 % en 1998 dans toutes les localités du Tchad ou ce taux est inférieur à 30 %;

L’arrêté no 290/MEN/SG/DGFA/2004 du 25 novembre 2004 portant création de la cellule technique de la scolarisation des filles au Ministère de l’Éducation Nationale, érigée en Direction de la Promotion de l’Éducation des filles par le décret no414/PR/PM/MEN/07 du 17 mai 2007.

Domaine de la Santé

259.La loi no 006/PR/02 du 15 avril 2002 portant Santé de Reproduction reconnaît aux hommes et aux femmes les mêmes droits en matière de santé de la reproduction. Cette loi pose le principe que toute personne peut mener une vie sexuelle responsable, satisfaisante et sans risque. Les membres du couple et les individus ont le droit de décider librement avec discernement du nombre de leurs enfants, de l’espacement des naissances et de disposer des informations nécessaires pour ce faire (art.3, 4, 6, 7 et 8).

260.L’avortement est désormais autorisé pour sauvegarder la vie de la femme enceinte. La femme mariée dont la vie pourrait être menacée par une grossesse peut, sur son seul consentement écrit, bénéficier d’une méthode de contraception irréversible (art.14 et 15).

Les difficultés de mise en œuvre des mesures discriminatoires positives

261.La société tchadienne est de type patriarcal et très poussée vers la non-valorisation de la femme. La pratique de la dot instaurée symboliquement par la société et payée par le mari ou sa famille a évolué pour devenir dans certains cas une sorte de prix d’acquisition occasionnant ainsi un assujettissement de la femme à son conjoint et aux membres de sa famille. Dans certaines cultures quand elle décède très tôt après son mariage ou laisse des enfants en bas âge, sa sœur cadette la remplace d’où la pratique du sororat.

262.Dans le domaine des activités de production, les tâches réservées aux femmes sont pour la plupart non rémunérées bien qu’elles prennent tout leur temps et énergie.

263.La situation des femmes rurales qui représentent près de 80 % des femmes est encore plus difficile en ce sens que c’est sur elles que repose une bonne partie de la production vivrière. L’essentiel du travail se fait manuellement, ce qui prend beaucoup de temps et d’énergie. Les multiples activités, telles que les corvées d’eau, de bois, etc., rendent nécessaire la sollicitation de la petite fille très tôt dans les travaux domestiques.

Article 5La modification des schémas et des modèles de comportement socioculturel

Les mesures législatives

La Constitution

264.L’article 14, alinéa 2, de la Constitution fait obligation à l’État de veiller à l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard de la femme et d’assurer la protection de ses droits dans tous les domaines de la vie publique et privée.

Les autres mesures législatives

265.Il existait des dispositions législatives contre certaines pratiques socioculturelles néfastes bien avant la ratification de la Convention.

266.C’est le cas du Code pénal de 1967 dont les dispositions interdisent les pratiques socioculturelles discriminatoires à l’égard des filles.

267.L’article 273 interdit l’attentat à la pudeur tenté ou consommé avec ou sans violence sur la personne d’un enfant de l’un ou l’autre sexe âgé de moins de 13 ans. L’auteur sera puni de deux à dix ans d’emprisonnement.

268.L’article 274 condamne le viol commis sur un enfant de moins de 13 ans.

269.La consommation du mariage coutumier avant que la fille n’ait atteint l’âge de 13 ans est également interdite à l’article 277 du Code pénal.

270.L’article 279 punit le proxénétisme d’un emprisonnement de six mois à deux ans et d’une amende de cinquante mille à un million de francs CFA sans préjudice de peines plus fortes.

Les mesures administratives

La lutte contre les pratiques traditionnelles néfastes à la femme

Actions du Gouvernement

271.Le Tchad a adopté officiellement en mars 2007 le plan d’Action Régional de l’OMS/AFRO pour accélérer l’élimination des mutilations génitales féminines.

272.En décembre 2001 s’est tenue une concertation avec les parlementaires, les professionnelles de la Santé, les partenaires au développement, les associations de la société civile sur la proposition des projets de loi portant santé de reproduction.

273.En mars 2002, réalisation d’une enquête sur la prévalence des MGF dans les départements du Mandoul et du Logone Oriental.

Actions des OSC

274.La lutte contre les pratiques traditionnelles néfastes, les violences faites aux femmes, les mutilations génitales féminines, etc., sont également des domaines de prédilection dans lesquels œuvrent les Associations des droits de l’homme et les Associations Féminines.

275.En 1997, recherche sur l’initiation féminine dans le Moyen Chari par l’ASTBEF.

276.Les pratiques traditionnelles néfastes retenues à l’atelier de consensus sur la Santé de Reproduction en 1999 sont les mutilations génitales féminines (MGF), les tabous alimentaires et les violences à l’égard des femmes. À cela il faut ajouter les mariages précoces et forcés.

277.Il ressort des différents débats que les mutilations génitales féminines sont pratiquées dans neuf localités des quatorze (14) anciennes préfectures du pays.

278.Suite à une réunion régionale sur les pratiques traditionnelles néfastes, il a été mis sur pied un comité national de lutte contre le phénomène en 1996 (CONACIAF). Dès lors, des actions de sensibilisation et de plaidoyer ont été menées tant au niveau national que dans les régions à travers ses démembrements. En 1997, l’ASTBEF a initié un projet de lutte contre les MGF avec l’appui de l’ambassade des États-Unis à l’issue de la conférence sur les barrières juridiques à la Santé de la Reproduction à Cotonou en mars 1997. Ce projet a permis de mener une vaste campagne de plaidoyer auprès des autorités administratives, politiques, traditionnelles et religieuses.

279.La synergie découlant de toutes ces actions a abouti à l’adoption et à la promulgation de la loi portant promotion de la santé de la reproduction en 2002, dont certaines dispositions interdisent la pratique de l’excision (art. 9).

280Les fistules vésico-vaginales ont été également prises en compte depuis cinq (5) ans dans un projet pour la prise en charge des fistules. En 2007, l’indice des fistules aux Tchad est estimé à 456 cas par an.

Les difficultés dans les efforts pour changer les stéréotypes

281.Malgré les actions menées par les pouvoirs publics, les partenaires et les OSC, le statut des femmes demeure fondamentalement caractérisé par une inégalité de traitement. Presque toutes les coutumes prônent l’infériorité de la femme face à l’homme sur tous les plans.

282.Toutes les religions pratiquées au Tchad reconnaissent des droits à la femme mais par ignorance ou par fanatisme religieux, certaines interprétations sont partisanes.

283.Ainsi, le rôle de la femme se limite à la procréation et à l’entretien du ménage. L’éducation de la petite fille est marquée par plus de devoirs que de droits alors que celle du petit garçon est marquée par des droits.

284.Aux pesanteurs socioculturelles s’ajoutent aussi l’analphabétisme élevé des femmes et leur extrême pauvreté qui ne leur permettent pas de revendiquer leurs droits. La division sexuelle du travail perpétrée par les coutumes entraîne de facto la surcharge des femmes par les travaux domestiques.

Article 6Le trafic des femmes et leur exploitation par la prostitution

Les mesures législatives

La Constitution

285.L’article 18 de la Constitution dispose que: «Nul ne peut être soumis ni à des sévices ou traitements dégradants et humiliants ni à la torture».

286.L’article19 de la Constitution se réfère aux bonnes mœurs en condamnant les pratiques néfastes sur les personnes en ces termes: «Tout individu a droit au libre épanouissement de sa personne dans le respect des droits d’autrui, des bonnes mœurs et de l’ordre public».

287.Le Tchad à travers les instruments juridiques nationaux et internationaux condamne le trafic des femmes et l’exploitation de la prostitution considérés comme des formes de violence. Il lutte également contre ce fléau en collaboration avec des partenaires (en exemple la lutte contre le trafic des enfants grâce à une coopération Tchad-Unicef en 1998).

Les autres mesures législatives

Le Code pénal de 1967

288.L’article 279 du Code pénal dispose que «sera considéré comme proxénète et puni d’un emprisonnement de six mois à deux ans et d’une amende de 50 000 à 1000 000 Frs sans préjudice des peines plus fortes, s’il y échet, celui ou celle:

1)qui, d’une manière quelconque, aide, assiste ou protège sciemment la prostitution d’autrui ou le racolage en vue de la prostitution;

2)qui, sous une forme quelconque, partage le produit de la prostitution; d’autrui ou reçoit les subsides d’une personne se livrant habituellement à la prostitution;

3)qui, vivant sciemment avec une personne se livrant habituellement à la prostitution ne peut justifier des ressources suffisantes pour lui permettre de subvenir seul à sa propre existence;

4)qui embauche, entraîne ou entretient même avec son consentement, une personne même majeure en vue de la prostitution, ou la livre à la prostitution ou à la débauche;

5)qui fait office d’intermédiaire, à un titre quelconque, entre personnes se livrant à la prostitution ou à la débauche et les individus qui exploitent ou rémunèrent la prostitution ou la débauche d’autrui».

289.Le Tchad s’est engagé pleinement dans la lutte contre la traite des êtres humains et particulièrement celle des femmes et des enfants avec l’appui de partenaires comme l’UNICEF dans le cadre de la lutte régionale avec les accords d’Abuja de 2006 et la ratification le 10 août 2009 du Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants.

Article 7Les femmes dans la vie politique et publique

Les mesures législatives

La Constitution

290.L’article 12 de la Constitution reconnaît à l’homme et à la femme les mêmes droits dans l’exercice des droits fondamentaux tels que les droits civils et politiques.

291.Cette disposition est renforcée à l’article 13 qui leur reconnaît les mêmes droits et les mêmes devoirs devant la loi.

292.Au plan politique, les femmes sont représentées dans les hautes fonctions de la République mais leur nombre ne reflète pas leur importance numérique.

293.Dans le domaine de la participation des femmes à la vie politique en particulier, les discriminations s’expriment par le nombre peu élevé de femmes dans les organes législatifs (17 % en 1996).

294.Au niveau du Parlement, la présente législature compte 9 femmes députées (6 %) sur 155 membres de l’Assemblée Nationale. La législature 1997-2002 comptait 2 députées (2 %) sur 120.

295.Les femmes-ministres au sein du Gouvernement représentent plus de 10 % depuis 2006. Elles ne représentaient que 3,4 % des membres du Gouvernement en 2000. Le Gouvernement de mars 2010 comporte 9 femmes (dont 5 Secrétaires d’État) sur 42 ministres, soit 21 %. C’est la plus forte proportion enregistrée dans l’histoire du Tchad.

296.Dans la haute administration, on compte une femme ambassadeur sur 24; 2 femmes préfètes sur 222; 3 femmes sous-préfets; 3 femmes maires en 2010; 6 femmes membres du Conseil Économique, Social et Culturel sur 30; 2 à la commission électorale en 2001 et toujours 2 en 2010.

297.La participation des femmes en politique et dans la haute administration demeure faible, mais leur rôle s’accroît.

298.Beaucoup de femmes excellent dans le secteur informel ou dans les petites fonctions d’assistantes sociales, d’éducatrices, d’agents de bureau ou dans les associations.

Les actions concrètes

299.Le Gouvernement a mis sur pied des programmes et projets conformément à l’article 2 de la Convention:

Programme IFD (1995);

Projet REPAFEM (1999);

Projet Genre (2001);

Projet Égalité et Équité du Genre (2006);

Programme d’éducation et de formation des femmes en milieu urbain et rural en vue de favoriser l’émergence d’une intelligentsia féminine.

Les difficultés d’application des droits politiques et économiques

300.Elles se traduisent par la difficile visibilité de l’impact de la Convention sur la condition juridique, sociale et économique de la femme.

301.Au Tchad, les femmes constituent 50,7 %(RGPH2) de la population avec un statut socioculturel mitigé, non valorisé et un pouvoir économique bas; 87 % des femmes sont analphabètes (Rapport du FNUAP de 1998). Ainsi elles ont d’énormes difficultés d’accès au savoir, aux opportunités économiques et politiques. Les données existantes ne font pas souvent une analyse approfondie et chiffrée de la question. Cela est également dû au fait qu’il n’existe pas au niveau national d’organe de coordination et de suivi ou d’évaluation de l’application des conventions internationales ratifiées par le Tchad.

Faible représentation des femmes dans la prise de décision

302.Au niveau de l’Administration publique, les stéréotypes relevant des coutumes et de la tradition continuent de jouer négativement sur les femmes. Quels que soient son niveau intellectuel et sa classe sociale, la femme est avant tout femme et est considérée comme telle par ses collaborateurs. Celles qui occupent des postes de responsabilité éprouvent souvent des difficultés à influer sur les décisions du fait de leur faible représentativité. Le faible niveau d’éducation et la faible scolarisation des filles limitent à long terme leur droit à occuper certains postes de responsabilité. C’est ainsi que la dimension femme était souvent oubliée dans le cadre de l’élaboration des programmes et projets de développement, jusqu’à une période récente.

303.À cette perception de la femme s’ajoute la méconnaissance des textes adoptés tant au niveau national qu’international par les autorités administratives et par les femmes elles-mêmes.

304.D’autres obstacles se dressent sur la voie de la participation de la femme à la gestion des affaires publiques. Ce sont entre autres:

Les considérations ethniques, régionalistes et religieuses érigées en règles d’or dans la responsabilisation des citoyens. Ce qui ne permet pas à chaque citoyen, surtout à la femme, de participer pleinement à la vie de la nation sur tous les plans;

Le silence de la femme dans la revendication de ses droits face aux multiples violences dont elle est victime.

305.Il faut aussi relever que l’absence d’un décret d’application et la faible publicité faite autour de la Convention par le Gouvernement n’ont pas permis de bien la faire connaître au niveau de l’administration publique.

306.Cette insuffisance de vulgarisation fait que le principe de l’égalité des sexes prôné par la Convention est mal interprété par les tenants des pratiques coutumières.

Article 8Les femmes et leur représentation dans les instances internationales

Les mesures législatives

307.Il n’existe pas de politique particulière de promotion de l’accès des femmes aux postes au sein des organisations internationales. Mais il existe une volonté politique dans ce sens en vertu de la reconnaissance de l’égalité des droits des personnes des deux sexes.

La Constitution

308.L’article13 de la Constitution affirme l’égalité des Tchadiens des deux sexes pour ce qui concerne leurs droits et devoirs. L’accès aux postes de décision au niveau international est soumis aux mêmes conditions qu’au niveau national.

Les actions concrètes

309.Jusqu’en 2007, l’on comptait deux femmes tchadiennes à des postes de décision au niveau des Organisations Internationales:

FAO au MALI;

PNUD au BURKINA FASO.

Article 9Le droit à la nationalité

Les mesures législatives

La Constitution

310.En conformité avec la Convention, la Constitution tchadienne traite du droit à la nationalité sans discrimination. L’article 11 dispose que: «Les conditions d’acquisition et de perte de la nationalité tchadienne sont fixées par la loi.»

Autres lois

311.L’ordonnance no 33/PG-INT du 14 août 1962, portant Code de la Nationalité tchadienne, définit la nationalité comme: «un lien de droit qui, depuis le 11 août 1960, date de l’accession du Tchad à la souveraineté internationale rattache les individus à l’État».

312.Le Code tchadien de la nationalité consacre dans son article 17 l’égalité absolue de l’homme et de la femme en matière de nationalité. L’acquisition de la nationalité tchadienne par l’effet du mariage est envisagée exactement de la même manière pour l’homme et pour la femme, puisque l’époux étranger d’une Tchadienne peut devenir Tchadien dans les mêmes conditions que l’étrangère qui épouse un Tchadien.

313.En cas de divorce, l’état civil précise que les effets personnels du divorce ne se limitent pas seulement à la liberté de refaire sa vie, une modification partielle doit s’ensuivre. Ces effets sont relatifs au nom et à la nationalité. En droit moderne tchadien, le Code de la nationalité n’est pas clair sur ce problème. Il faut donc admettre que la dissolution du mariage n’a pas d’effet sur la nationalité. En tout état de cause, il faut reconnaître qu’on assiste à une dualité de droit.

Article 10Le droit à l’éducation et à la formation professionnelle

Les mesures législatives

La Constitution

314.Le droit à l’éducation est reconnu a tous les Tchadiens par la Constitution en son article 35. Il est dit ceci: «tout citoyen a droit à l’instruction » (art. 35, al. 1). L’article 35, alinéa 3, dispose que «L’enseignement fondamental est obligatoire.»

315.Il est également fait obligation à l’État tchadien et aux Collectivités Territoriales Décentralisées de créer les conditions et les institutions qui assurent et garantissent l’éducation des enfants (article 36 de la Constitution).

Les autres mesures législatives

316.La loi no 16/PR/06 du 13 mars 2006 portant orientation du système éducatif tchadien dispose en son article 4 que: «le droit à l’éducation et à la formation est reconnu à tous sans distinction d’âge, de sexe, d’origine régionale, sociale, ethnique ou confessionnelle».

317.L’éducation en général s’est révélée être un instrument de changement efficace du statut des femmes. On constate une augmentation marquée des inscriptions, qui s’accompagne d’un accès à l’école plus aisé pour les filles. Cela prouve que le Gouvernement s’est engagé à instaurer l’égalité entre les filles et les garçons à l’école.

Les mesures administratives

318.D’une manière générale, le Tchad a fait des efforts dans le domaine de l’éducation. Le droit à l’éducation pour tous sans distinction est affirmé par toutes les constitutions qui se sont succédé au Tchad. Cet intérêt s’est également manifesté à travers son adhésion aux différentes conventions internationales relatives aux Droits de l’Enfant. Les différents plans nationaux mettent l’accent sur des programmes d’éducation et de formation ayant pour but d’assurer l’égalité des hommes et des femmes à tous les niveaux.

319.En effet, le droit à l’éducation est retenu comme élément fondamental d’établissement de l’équité et de l’égalité entre l’homme et la femme par le Gouvernement. Les taux d’alphabétisation de 1997 étaient de 45 % pour les hommes et de 23 % pour les femmes. Tandis qu’en 2001, ils étaient de 53 % pour les hommes et de 35,8 % pour les femmes. Au bout de trois (3) ans, le taux d’alphabétisation des hommes a augmenté de 8 %. Tandis que celui des femmes a connu une progression de 12,8 %.

320.Le taux brut de scolarisation des filles au primaire est passé de 32 % en 2005 à 78,8 % en 2008. Le taux brut au premier cycle du secondaire est passé de 10,5 % en 2004 à 17,7 % en 2007, le taux brut en second cycle est passé de 4,2 % en 2004 à 9,9 % en 2007.

Enseignement Primaire

321.Dans le domaine de l’éducation, aucune restriction n’est faite entre filles et garçons. La solarisation des filles est une des priorités du Gouvernement (cf. Stratégie EFE / 1990). La mise en place de la Cellule Technique de Promotion de la scolarisation des filles au sein du Ministère de l’Éducation nationale en 1994 en témoigne.

322.La scolarisation des filles est une des priorités du Gouvernement tchadien si l’on se réfère au document de stratégie exposant la politique gouvernementale en matière d'Éducation-Formation-Emploi (EFE, 1990). En 1994, une Cellule technique de promotion de la scolarisation des filles a été mise en place au sein du Ministère de l’Éducation Nationale par l’arrêté no 300/MEN/DG/94 avec pour objectif de porter le taux de scolarisation des filles de 31 % à 36 % en 1998 dans les inspections où ce taux est inférieur ou égal à 30 %. Cette cellule a notamment contribué à sensibiliser les populations au fait que chaque petite fille doit pouvoir aller à l’école.

323.Une discrimination positive a été instaurée par le Ministère de l’éducation. Au niveau du secondaire et du primaire, les frais d’inscription des filles ont été revus à la baisse par rapport à ceux des garçons.

324.L’accès et le maintien des filles à l’école sont aussi encouragés par les Programmes de Coopération Tchad-Unicef, particulièrement depuis le début des années 90, à la suite de la Conférence de Jomtien sur l’Éducation Pour Tous (1989).

325.Aujourd’hui, l’accent mis sur l’éducation des filles apparaît clairement dans le Plan national d’action de l’Éducation pour tous d’ici à l’an 2015, adopté par le Tchad en 2002, où deux des objectifs fondamentaux sont ainsi formulés:

1. «Faire en sorte que d’ici à 2015, tous les enfants, en particulier les filles, les enfants en difficulté et ceux qui appartiennent à des minorités ethniques, aient la possibilité d’accéder à un enseignement primaire obligatoire et gratuit, de qualité et de le suivre jusqu’à son terme»;

2. «Éliminer les disparités entre les sexes dans l’enseignement primaire et secondaire d’ici à 2005 et instaurer l’égalité dans ce domaine en 2015 en veillant notamment à assurer aux filles un accès équitable et sans restriction à une éducation de base de qualité avec les mêmes chances de réussite».

326.Le Programme d’Appui à la Réforme du Système Éducatif au Tchad (PARSET) à l’horizon 2005-2006, soutenu par la Banque mondiale, comprend également des objectifs spécifiques à la scolarisation des filles.

327. Les Principales Stratégies mises en œuvre pour la Scolarisation des filles sont les suivantes:

Plaidoyer, sensibilisation et mobilisation sociale auprès des leaders d’opinion, des parents d’élèves, des élèves filles elles-mêmes par des campagnes de sensibilisation;

Formation et renforcement des capacités des enseignants en approche genre et des organisations féminines locales en gestion des activités génératrices de revenus;

Allégement des charges domestiques des filles et des femmes par la dotation des groupements féminins en divers équipements: moulins, décortiqueuses, charrettes et porte-tout, fûts en plastique;

Appui aux parents par la dotation des filles inscrites à l’école en fournitures et manuels scolaires;

Instauration d’un système de cours de rattrapage pour les filles en difficulté d’apprentissage (tutorat);

Réalisation de forage pour que les écoles bénéficient d’un point d’eau;

Réalisation de latrines séparées filles /garçons pour améliorer la qualité d’accueil des écoles;

Missions de suivi et évaluation tant au niveau central par la Cellule Technique de Promotion de la Scolarisation des Filles et l'Unicef que par les Comités sous-préfectoraux au niveau décentralisé. Ces comités ont été mis en place dès 1995 pour augmenter les taux de scolarisation des filles dans les zones où ce taux était inférieur à 30 %.

Les contraintes

Maintien des filles à l’école

328.Le maintien des filles à l’école demeure problématique même dans les zones d’intervention des projets de scolarisation des filles.

329.Ainsi en 1999-2000, selon les statistiques du Ministère de l’Éducation Nationale, les filles représentaient 44,9 % de l’effectif des élèves inscrits au CP1 (premier niveau au primaire) dans les écoles publiques et seulement 25,7 % des effectifs des élèves de CM2 (dernier niveau du primaire). L’exemple de Mao qui est donné ci-dessous est explicite. Il ne constitue malheureusement pas une exception, même si la diminution des effectifs de filles dans d’autres inspections est moins spectaculaire.

330.On trouvera illustrée dans le tableau ci-dessous la chute vertigineuse des effectifs de filles au fur et à mesure de leur progression scolaire.

Tableau 10

Évolution d'une cohorte réelle d'élèves de Mao (cohorte limitée aux élèves qui n’ont pas redoublé)

Année scolaire

95/96

CP1

96/97

CP2

97/98

CE1

98/99

CE2

99/00

CM1

00/01

CM2

Effectifs

2 280

1 197

532

338

185

67

% par rapport aux effectifs du CP1

100 %

52,5 %

23,33 %

14,82 %

8,11 %

2,93 %

331.Les principaux obstacles sur la voie de la scolarisation des filles, tant pour leur accès que pour leur maintien, couramment relevés sont les suivants:

Le poids des coûts d’opportunité que doivent assurer les filles scolarisées (travaux domestiques et activités génératrices de revenus pour la survie de la famille);

Le mariage précoce, encouragé par les traditions, l’avantage de la dot et le souci des parents de préserver la vertu des filles en les soustrayant au danger du harcèlement sexuel des garçons à l’école;

Les préjugés entretenus par certains parents vis-à-vis de l’école moderne qui, pour eux, sape les fondements et les pratiques culturelles de la société traditionnelle;

Le chômage que subissent les jeunes diplômés et qui émousse la bonne perception que les parents et les enfants ont de l’école;

La pauvreté des familles;

L'éloignement de l'école ou l’insécurité sur le chemin conduisant à l'école;

L'environnement physique de l'école (infrastructures et équipements inappropriés, manque de latrines séparées pour les filles);

L'insatisfaction des parents par rapport aux maîtres;

Le manque de manuels didactiques;

Les préjugés sexistes véhiculés par les manuels didactiques, les enseignants et les élèves-garçons.

Enseignement Secondaire Général

332.Dans l’enseignement secondaire, la proportion des filles est de 20,6 % dans les établissements publics et de 27,0 % dans les établissements privés au 1er cycle en 1999-2000. Pour l’année 2001/2002, l’enseignement secondaire général comptait 149 467 élèves dont 30 603 filles, soit 21,43 % toutes catégories et disciplines confondues. Le Tchad ne compte qu’un seul lycée féminin qui a ouvert ses portes à N’Djamena en 2000, et dont la vocation est de contribuer à la promotion de la scolarisation des filles dans le secondaire, des filles qui représentent à peu près le quart de la population des garçons.

333.Au Ministère de l’Éducation Nationale, une division de l’Éducation féminine a été créée; elle est placée sous la responsabilité de la Direction de la Formation et de l’Action Pédagogique et dispense des cours dans 12 centres de Formation Féminins.

334.Dans le domaine de la formation des formateurs, le recrutement des femmes à l’ENASS (École Nationale des Agents Sociaux et Sanitaires) est encouragé car elles sont mieux indiquées pour l’encadrement des petits enfants. A l’École Normale des Instituteurs, les femmes sont prioritaires depuis l’adoption de la mesure sur le quota qui donne droit d’office à 30 % des places aux femmes pour pouvoir rétablir l’équilibre avec les hommes. De même qu’une faveur est faite aux filles en ce qui concerne les inscriptions dans les établissements publics. Leurs frais d’écolage sont réduits par rapport à ceux des garçons.

Enseignement Technique et Formation Professionnelle

335.L’Enseignement technique et la formation professionnelle à finalité d’emploi comprennent un ensemble d’institutions, de structures et d’unités chargées d’assurer l’interface entre le système scolaire et le monde du travail, d’une part, et la qualification des jeunes et adultes en situation d’emploi à des tâches professionnelles, d’autre part. Plusieurs ministères sont impliqués dans ce dispositif, notamment le Ministère de l’Éducation Nationale, le Ministère de la Culture, de la Jeunesse et des Sports, le Ministère de la Fonction Publique du Travail et de la Promotion de l’Emploi, le Ministère de l’Agriculture et le Ministère de l’Industrie, du Commerce et de l’Artisanat.

336.Au sein du Ministère de l’Éducation Nationale, le dispositif se présente comme suit:

Un Lycée d’Enseignement Technique Industriel;

Deux lycées d’enseignement technique commercial;

Un collège d’enseignement technique;

14 centres d’apprentissage dont 10 opérationnels.

337.L’effectif des élèves dans les lycées et collèges d’enseignement technique était de 2009 élèves en 1999 (1 539 dans les lycées techniques), parmi lesquels on dénombrait 38,7 % de filles réparties dans leur grande majorité dans les filières commerciales, soit un chiffre de 66,6 % avoisinant le secondaire général. L’enseignement technique privé représente seulement 4,8 % du total.

338.L’Enseignement technique et professionnel a, au cours de la période 1999-2000, formé 31,0 % d’institutrices sur 1.321 à l’École Nationale des Instituteurs et 11,3 % des femmes sur les 160 élèves de l’Institut Supérieur des Sciences de l’Éducation (ISSED).

339.Le Ministère de l’Action Sociale et de la Famille avec la contribution des partenaires a créé des Centres d’Éducation Communautaire Urbaine et périurbaine (CECR/U) en 1997 dans les zones d’intervention de l’UNICEF. Ces centres ont pour objectif de libérer la petite fille de la garde de ses petit (e)s frères/sœurs pour l’envoyer à l’école et de libérer la mère pour lui permettre de vaquer à ses activités quotidiennes tout en suivant les cours d’alphabétisation.

340.On trouvera dans le tableau ci-dessous la répartition des effectifs d’élèves suivant le sexe dans les établissements techniques.

Tableau Effectif des Filles des Lycées Techniques et professionnels:

Année scolaire

G

F

T

2005-2006

1902

1353

3255

2006-2007

2059

1345

3404

2007-2008

2057

1395

3452

2008 -2009

2242

1346

3588

2009-2010

2329

1688

40177

Source: DAPRO/MEN 2010.

Alphabétisation

341.En ce qui concerne l’alphabétisation, les objectifs nationaux précisent que l’enseignement de base vise en priorité la population féminine. L’une des actions préconisées par le Gouvernement est l’élaboration de programmes spéciaux pour l’alphabétisation des femmes afin de porter le taux d’alphabétisation à 60 % d’ici l’an 2010.

342.En 2007, on comptait déjà 2.697 centres d’alphabétisation dans tout le Tchad. En 2008-2009, on a enregistré 133 485 apprenants adultes parmi lesquels 69 520 femmes. Ces chiffres n’étaient que de 37 166 en 2000.

343.L’analphabétisme est un phénomène important. Les femmes en sont les grandes victimes particulièrement en zone rurale. Les programmes d’alphabétisation mis en œuvre pour juguler un analphabétisme chronique dans le pays rencontrent des difficultés liées: i) au doublement des effectifs d’apprenants avec une forte proportion de femmes; ii) à la sous-qualification des alphabétiseurs et à l’inadéquation des programmes; iii) à la pénurie d’infrastructures et de moyens logistiques.

L’Enseignement Supérieur et la Recherche Scientifique

344.Ce sous-secteur qui comprend cinq Universités, une dizaine d’Instituts Universitaires et quelques institutions privées est confronté à 4 problèmes majeurs:

1.Le développement de l’enseignement sans rapport avec les capacités de l’État et le marché de l’emploi (les effectifs sont passés de 2356 en 1 996 à 5.280 en 1999, soit une hausse de 124 %);

2.La faible qualification des enseignants et les difficultés de les qualifier au niveau national du fait de l’inexistence destructures appropriées;

3.La très forte prédominance des effectifs des filières littéraires, juridiques et économiques (82 %) sur les filières scientifiques (14,2 %);

4.Enfin l’insuffisance ou l’absence pédagogique adéquate permettant d’assurer une formation de qualité.

345.Dans le supérieur, au cours de l’année académique 1999/2000, on a enregistré 6.765 inscriptions, les filles représentant 14,2 % de celles-ci. Le personnel féminin enseignant ne représente que 3 % du corps professoral. Il faut retenir que dans l’enseignement supérieur, il n’y a pas de discrimination positive en faveur des femmes.

Article 11Le droit de la femme à l’emploi

Les mesures législatives

La Constitution

346.Concernant la discrimination en matière d’emploi, l’article 31 de la Constitution tchadienne dispose que: «L’accès aux emplois publics est garanti à tout Tchadien sans discrimination aucune, sous réserve des conditions propres à chaque emploi».

347.En outre, l’article 32 dispose que: «L’État reconnaît à tous les citoyens le droit au travail».

348.La discrimination est spécifiée en son alinéa 3:«Nul ne peut être lésé dans son travail en raison de ses origines, de ses opinions, de ses croyances, de son sexe ou de sa situation matrimoniale».

Autres lois

349.Les autres dispositions législatives traitent de manière générale de la non-discrimination telle que prévue par la Convention. C’est le cas du Code du Travail de 1996 et de la loi portant statut général de la Fonction Publique.

Le Code du Travail de 1996

350.La loi no 038/PR/96 portant Code du travail est prise en abrogation de celle de 1967. Cette loi comporte des dispositions spéciales relatives au travail des femmes.

351.L’article 6 de ce Code interdit à tout employeur la prise en considération du critère de sexe, en ce qui concerne l’embauchage, la formation professionnelle, l’avancement, la rémunération, l’octroi d’avantages sociaux, la discipline ou la rupture de contrat.

352.Elle attire l’attention des employeurs sur les décisions à prendre concernant les travailleurs en considération de leur sexe. Il s’agit des décisions, en matière d’embauche, de promotion, de rémunération, d’octroi d’avantages, de discipline ou de rupture du contrat de travail. Cette loi instaure une discrimination positive à l’endroit des femmes en son article 109 qui dispose que: «En cas d'état pathologique médicalement constaté et résultant soit de la grossesse, soit de l'accouchement, les durées des congés prénatal et postnatal peuvent être augmentées, respectivement, de trois semaines».

353.Pendant les périodes visées aux articles précédents, la femme a droit aux soins gratuits à la charge de l’employeur, dans les conditions prévues par les conventions collectives existantes tant que ceux-ci ne seront pas couverts par la Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS), article 110 du Code du Travail.

354.Elle a droit pendant une période de quinze mois à compter de la naissance de l’enfant à des repos pour allaitement. La durée totale de ces repos ne peut dépasser une heure par journée de travail, elle est considérée et payée comme temps de travail (article 111).

355.En son article 3, la loi no 038/PR/96 du 11 décembre 1996 portant Code du travail dispose que: «Est considéré comme travailleur ou salarié, quels que soient son sexe et sa nationalité, toute personne physique, qui s’est engagé à mettre son activité professionnelle moyennant rémunération sous la direction et l’autorité d’une personne appelée employeur».

356.L’article 6 ajoute que: «Sous réserve des dispositions expresses du présent Code ou de tout autre texte de nature législative ou réglementaire protégeant les femmes et les enfants, ainsi qu’en ce qui concerne les dispositions relatives à la condition des étrangers, aucun employeur ne peut prendre en considération les sexes, l’âge ou la nationalité des travailleurs en matière d’embauchage, la conduite et la répartition du travail, de la formation professionnelle, l’avancement, la promotion, la rémunération, l’octroi d’avantages sociaux, la discipline ou la rupture du contrat de travail.»

357.L’article 7 soutient que «Aucun employeur ne peut, pour arrêter les décisions prévues à l’article 6, prendre en considération l’appartenance ou la non-appartenance à un syndicat, l’activité syndicale, l’origine ou les opinions notamment religieuses et politiques du travailleur».

358.La loi no 17/PR/01 du 31 Décembre 2001 portant statut général de la fonction publique dispose en son article 5 que: «L’accès aux emplois publics est ouvert à égalité de droits, sans distinction de genre, de religion, d’origine, de race, d’opinion politique, de position sociale».

359.De plus, l’article 10 de ladite loi énonce que «La liberté d’opinion est reconnue aux fonctionnaires. Aucune discrimination ne peut être faite entre fonctionnaires en fonction de leur sexe, de leurs opinions politiques, syndicales, philosophiques, religieuses»..

360.Dans le domaine de l’emploi, il n’existe pas de dispositions spécifiques aux femmes. Toutes les dispositions législatives et réglementaires sont d’ordre général et reconnaissent les droits à l’emploi sur la base de l’égalité entre l’homme et la femme. Il en est de même en matière de salaires.

361.La répartition des fonctionnaires par catégorie et par sexe indique qu’en 2004 les femmes représentent à peine 12 % des effectifs de la fonction publique et forment 6 % de ceux de la catégorie A contre 9,7 % en B, 19,7 % en C et 11,9 % en D. Dans le domaine des professions intellectuelles et scientifiques, on dénombre 8 % de femmes.

Les dispositions spécifiques

362.L’article 6 du Code du travail interdit à tout employeur de prendre en considération le critère de sexe, en ce qui concerne l’embauchage, la formation professionnelle, l’avancement, la rémunération, l’octroi d’avantages sociaux, la discipline ou la rupture de contrat.

363.Cette loi instaure une discrimination positive à l’endroit des femmes en son article 109 en ces termes «En cas d’état pathologique médicalement constaté et résultant soit de la grossesse soit de l’accouchement, les durées des congés prénatal et postnatal peuvent être augmentées, respectivement, de trois semaines».

364.Le Code insiste sur l’aspect prise en charge de la femme enceinte en obligeant l’employeur à l’article 110 «Pendant les périodes visées aux articles précédents, la femme a droit aux soins gratuits à la charge de l’employeur, dans les conditions prévues par les conventions collectives existantes tant que ceux-ci ne seront pas couverts par la Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS)».

365.De manière spécifique, on peut noter l’évolution du Code du travail de 1996 qui protège les droits des femmes dans certaines de ses dispositions.

La maternité

366.Le Code du travail protège la femme enceinte. En effet, dans l’article 12 «il est interdit à tout employeur de faire travailler une femme enceinte dans les quatre semaines précédant la date présumée de l’accouchement ainsi que dans les six semaines suivant l’accouchement». Le Code donne aussi le droit à la femme de suspendre son contrat de travail pendant une période qui commence six semaines avant la date présumée de son accouchement et s’achève huit semaines après cet accouchement. Si l’accouchement a lieu avant la date présumée, la femme peut prolonger la période de suspension de son contrat après l’accouchement pour atteindre les 14 semaines auxquelles elle a droit. Si l’accouchement a lieu après la date présumée, la femme devra reprendre son travail huit semaines après l’accouchement.

367.S’il est médicalement constaté que la grossesse ou l’accouchement ont entraîné des pathologies, la durée des congés d’avant et d’après l’accouchement peut être augmentée de trois semaines avant et après l’accouchement. Pendant cette période la femme a droit aux soins gratuits. Ces soins sont à la charge de l’employeur s’ils ne sont pas couverts par la Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS) et cette prise en charge s’effectue dans les conditions prévues par la convention collective existante.

368.L’article 111 prévoit que pendant une période de quinze mois à compter de la naissance de l’enfant, la mère a droit à des repos pour allaitement. La durée totale de ses repos ne peut dépasser une heure par journée de travail, elle est considérée et payée comme temps de travail.

369.Pendant la grossesse, aucun employeur ne peut licencier une femme, sauf en cas de faute lourde ou en cas d’impossibilité de poursuivre le contrat. Aucun licenciement n’est possible pendant les périodes de congé prénatal et postnatal, que la femme use de son droit aux congés ou non. En cas de violation de ces règles, la femme a droit à une indemnité forfaitaire égale à 12 mois de salaire. A cette indemnité peuvent s’ajouter d’autres indemnités résultant du licenciement.

370.La femme enceinte ou la femme se trouvant dans les 15 mois qui suivent l’accouchement peut rompre le contrat de travail sans préavis et sans avoir de ce fait, à payer une quelconque indemnité. L’employeur qui fait travailler ou licencie une femme enceinte, ou qui a accouché pendant la durée des congés de maternité, est puni d’une amende de 147.000 à 294.000 FCFA, et en cas de récidive d’une amende de 588.000 à 882.000 FCFA.

371.La femme a droit à des repos d’une durée minimale de 12 heures consécutives. En plus des congés de maternité, la femme a droit à un congé annuel de quatre semaines. Cette durée peut être augmentée par voie de convention collective en faveur des mères de famille.

Le travail de nuit de la femme

372.Le Code du travail protège la femme en ce qui concerne le travail de nuit. Les heures de travail de nuit englobent la période allant de 22 heures à 5 heures du matin. Le travail de nuit des femmes est interdit dans les industries, sauf si la femme occupe des fonctions d’encadrement ou n’intervient pas dans les services impliquant un travail manuel, ou encore si elle travaille dans un établissement occupé par les membres d’une même famille.

373.La durée du travail des ouvriers ou des employés des deux sexes ne peut excéder 39 heures par semaine. Dans les établissements agricoles et assimilés, cette durée ne peut excéder 2.400 heures par an.

374.En fait, aucune restriction légale n’est faite à la femme mais trois (3) facteurs sont à l’origine de son sous-effectif. Il s’agit des facteurs socioculturels, de la maternité et de l’éducation.

375.En matière salariale, aucune donnée ne permet d’affirmer que la femme fait l’objet de discrimination même si les employeurs jugent souvent leur rendement faible.

376.L’article 246 du Code de travail dispose que «tout employeur est tenu d’assurer, pour un même travail ou un travail de valeur égale, l’égalité de rémunération entre les salariés, quels que soient leur origine, leur nationalité, leur sexe et leur âge».

377.L’article 247 du même Code dispose que les différents éléments composant la rémunération doivent être établis selon des normes identiques pour les hommes et les femmes et consacre ainsi le principe de non-discrimination. Ces dispositions sont conformes à la Convention sur l’égalité de rémunération adoptée en 1951 par l’OIT et ratifiée par le Tchad le 29 juin 1966.

Article 12Le droit à la santé et à la planification familiale

378.Il existe une forme de lutte contre la discrimination dans le domaine des soins de santé et de l’accès aux services médicaux, y compris à la planification familiale. Le Tchad a souscrit à plusieurs Déclarations, Chartes ou Conventions Internationales portant sur les problèmes de santé, notamment relatives aux Soins de Santé Primaires (SSP), à l’Initiative de Bamako et à la Stratégie Africaine de Développement Sanitaire.

379.Entre 1998 et 2010, des progrès ont été réalisés dans la mise en œuvre de la Convention dans le domaine de la santé, conformément aux recommandations de l’article 12.

Les mesures législatives

La Constitution

380.Le droit à la santé est reconnu à tout citoyen par l’article 37, alinéa 2, de la Constitution du Tchad en ces termes: «l’État et les Collectivités Territoriales ont le devoir de veiller au bien- être de la famille.»

D’autres mesures

381.La loi no 006/ PR/2002 du 15 avril 2002 portant Promotion de la Santé de Reproduction vient renforcer ce droit à la santé et s’intègre parfaitement dans les dispositions de la Convention relatives à la santé des femmes. Elle a la particularité d’accorder aux couples la liberté en matière de procréation et dans le choix du nombre d’enfants (art. 4, 5 et 6). C’est dire que la responsabilité de la santé de reproduction incombe désormais au couple et non pas seulement au mari comme c’est le cas dans la mentalité collective.

382.Cette loi rappelle dans ses dispositions quelques grands principes fondamentaux des droits de l’homme. En son article 3, elle dispose que: «Tous les individus sont égaux en droits et en dignité en matière de Santé de Reproduction sans discrimination aucune fondée sur l’âge, le sexe, la fortune, la religion, l’ethnie, la situation matrimoniale ou sur toute autre situation».

383.Cette loi reconnaît également à tout individu le droit de décider librement des questions ayant trait à la santé de reproduction, de choisir librement de ne pas se marier ou de se marier et de fonder une famille (art. 5).

384.Cette loi, dans son article 9, condamne explicitement les mutilations génitales en ces termes: «Toute personne a le droit de n’être pas soumise à la torture et à des traitements cruels, inhumains ou dégradants sur son corps en général et sur ses organes de reproduction en particulier. Toutes formes de violences telles que les mutilations génitales féminines (M.G.F.), les mariages précoces, les viols domestiques et les sévices sexuels sur la personne humaine sont interdites».

385.Aussi, désormais, tout individu qui enfreint à cette loi encourt-il les sanctions prévues en son article 18 en ces termes: «sera puni d’un emprisonnement de cinq (5) mois à cinq (5) ans et d’une amende de cent mille (100.000) francs CFA à cinq cent mille (500.000) francs CFA ou de l’une de ces peines seulement quiconque aura, par pratique, par écrit, discours, publicité ou propagande enfreint les dispositions de la présente loi».

386.La loi 019/PR/2007 du 15 novembre 2007 portant lutte contre les IST/VIH/Sida et protection des Personnes Vivant avec le VIH/Sida prend en compte les groupes de femmes et d’hommes devenus vulnérables par la pandémie.

387.La loi no 19/PR/95 porte adoption de la Déclaration de la Politique d’Intégration de la Femme au Développement.

Les actions concrètes

Les progrès réalisés dans le domaine de la santé de reproduction

388.Comme souligné précédemment, à l’instar des autres pays, le Tchad a fait siennes toutes les recommandations des conférences internationales et les a traduites en politiques et programmes, notamment dans le domaine de l’égalité des sexes et des droits à la santé en matière de reproduction. Il y a lieu de signaler avant la ratification de la Convention deux faits majeurs dans ce domaine:

1.La promulgation de l’ordonnance no 008/PR/93 de janvier 1993 réglementant la pratique de la contraception au Tchad;

2.La participation du Tchad à la Conférence Internationale sur la population et le développement du Caire en septembre 1994.

389.À ces deux faits viennent s’ajouter:

1995: La participation à la Conférence mondiale sur les femmes, Beijing;

1996: La participation du Tchad au Forum sur l’enseignement de la SR dans les écoles et facultés de médecine en Afrique du Centre et de l’Ouest;

1997: L’adoption de la Stratégie Régionale de Santé de la Reproduction à Sun City en Afrique du Sud;

1997: Le lancement du plan d’Action Régional sur l’accélération et l’élimination des mutilations sexuelles féminines comme stratégie de réduction de la morbidité et de la mortalité maternelles;

1998: Le lancement de la décennie régionale de Santé de la Reproduction 1998-2007;

1999: L’atelier National de consensus sur la SR au Tchad et l’adoption du concept SR et de ses composantes prioritaires;

1999: La création du Programme National de Santé de la Reproduction (PNSR);

2003; Le lancement des travaux d’élaboration d’une politique nationale de SR et des normes et protocole de procédures.

Politique Nationale de Santé

390.Le Ministère de la Santé Publique, en collaboration avec ses partenaires, a élaboré et adopté le 04 mai 2007 une nouvelle Politique Nationale de Santé couvrant la période 2007-2015 pour tenir compte de la situation de la santé maternelle qui se serait dégradée selon l’EDST 2 de 2004.

391.La nouvelle Politique Nationale de Santé a pour objectif global «d’assurer à la population l’accès aux services de base de qualité pour accélérer la réduction de la mortalité et de la morbidité afin de contribuer à l’atteinte des OMD à l’horizon 2015 ». Comme on peut le constater, elle s’est élaborée sur la base de la vision globale de la Stratégie Nationale de Croissance et de Réduction de la Pauvreté (SNCRP), tout en se conformant aux autres engagements en matière de santé auxquels le Tchad a souscrit, notamment les objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) à l’horizon 2015 dont la SNCRP constitue le plan de mise en œuvre.

392.Cette nouvelle Politique Nationale Sanitaire est assortie de six (6) orientations stratégiques, dont la quatrième est consacrée exclusivement à la santé du couple mère-enfant: «l’amélioration de la prestation de soins de qualité aux femmes et aux enfants». Pour sa mise en œuvre, une feuille de route pour l’accélération de la réduction de la mortalité maternelle et néonatale a été élaborée avec comme objectifs généraux:

La réduction des ¾ du taux de la mortalité maternelle, soit de 1 099 à 275 décès pour 100.000 NV d’ici 2015;

La réduction des 2/3 du taux de mortalité infantile; soit de 194 à 64 pour 1000 NV.

393.Les axes stratégiques suivants ont été définis:

Améliorer l’accessibilité géographique des services de santé maternelle, néonatale et infantile;

Améliorer la disponibilité et la qualité des services de santé maternelle, néonatale et infantile;

Promouvoir l’utilisation des services de santé maternelle, néonatale et infantile;

Améliorer la disponibilité des informations stratégiques et la gestion des services de santé;

Par rapport à ces axes, des mesures spécifiques ont été prises par les autorités nationales au plus haut niveau, à savoir:

L’instauration de la gratuité des soins obstétricaux d’Urgence;

Le traitement Présomptif Intermittent aux femmes enceintes avec distribution gratuite des MIILD;

La gratuité des produits contraceptifs dans les structures sanitaires publiques.

394.Le Gouvernement est appuyé dans ces actions par ses partenaires, notamment les ONG, le FNUAP, les Formations Sanitaires Confessionnelles et les OSC.

395.De cette politique nationale de santé découlent les documents de politique sectorielle ou programmes et projets suivants:

2008: Adoption de la politique nationale de santé de reproduction;

2009: Adoption de la Feuille de Route Nationale pour l’Accélération de la Réduction de la Mortalité Maternelle, Néonatale et Infantile;

2008: Élaboration du Plan National de Développement Sanitaire (PNDS);

2008: Création d’un centre national de référence pour la Santé de Reproduction et la prise en charge des fistules;

2006: Création de la Direction de la Santé de Reproduction au MSP;

2009: Construction de l’Hôpital de la mère et de l’Enfant.

396.Ainsi, la pauvreté de la population entrave dangereusement son accès aux services de santé. A cette pauvreté s’ajoute l’obstacle fondamental que constituent les distances qui séparent les communautés des centres de santé.

397.En décembre 1995 s’est tenue à N’Djamena une conférence sous-régionale sur les profils de population au Sahel. Il s’agissait à travers cette conférence de mettre à la disposition de tout couple les moyens ou l’information nécessaire lui permettant de choisir librement et en toute connaissance de cause l’espacement et le nombre d’enfants.

398.Financé par la Banque mondiale, ce projet se structure autour de trois orientations, à savoir le renforcement des capacités du Ministère de la Santé Publique au niveau central; l’assistance aux services de santé, la nutrition et le bien-être familial dans les préfectures du Guéra et de la Tandjilé; l’appui au secteur pharmaceutique.

Les prestations publiques des services de planification familiale

399.Les informations disponibles en matière de prévalence contraceptive chez les femmes de 15 à 49 ans convergent. Selon les EDST, la prévalence serait passée de 1,2 à 3 % entre les deux enquêtes (1996 et 2004) mais cette prévalence montre des disparités entre milieu urbain et rural. En effet, la prévalence est de 10 % en milieu urbain (dont 14 % à N’Djamena et 7 % dans les autres villes) contre 1 % en milieu rural. Les méthodes de contraception les plus utilisées sont le Condom (36 %), la pilule (35 %) et les injections (32 %).

400.Plusieurs ONG et cliniques privées sont très actives dans le domaine de la planification familiale. Parmi celles-ci on peut citer l’ASTBEF, une ONG nationale reconnue d’utilité publique. Dans le cadre du projet SR/BEF/SS exécuté conjointement par le Gouvernement et l’ASTBEF, des cliniques modèles de l’ASTBEF ont été mises en place. Pour le moment, il existe la clinique modèle de l’ASTBEF à N’Djamena et celle de Moundou. Ces cliniques offrent différents services en matière de contraception et de planification familiale.

401.Quatre méthodes de contraception y sont proposées. Il s’agit de la pilule, des injectables (Dépo-provera® et Noristérat ®), des préservatifs et des spermicides.

402.Les principaux obstacles à la fréquentation des cliniques de l’ASTBEF sont l’analphabétisme et les réticences religieuses. A cause de leur analphabétisme, les femmes n’arrivent pas souvent à respecter les heures de prise des pilules, qui sont rigoureuses.

403.C’est pourquoi, les méthodes de contraception par injection sont le plus souvent réclamées. Quant aux réticences religieuses, elles sont dues essentiellement à un manque d’information.

404.Le niveau d’instruction n’intervient dans l’utilisation des contraceptifs qu’à partir du secondaire ou plus. Le pourcentage des femmes utilisant une méthode contraceptive passe de 7,0 % parmi celles qui n’ont pas d’instruction ou qui ont une éducation primaire (2,7 % et 7,5 % à l’EDST) à 18,6 % pour les femmes ayant fait des études secondaires ou supérieures (24,3 % à l’EDST).

405.L’objectif affiché dans le projet FNUAP/Gouvernement/ASTBEF c’est de développer la composante Santé de Reproduction/Bien-Être Familial dans les centres de santé, dans les hôpitaux et dans les cliniques de l’ASTBEF. Cet objectif vise à porter le taux de prévalence contraceptive qui est actuellement de 3 % à 15 % d’ici 2015.

406.L’utilisation de la contraception à l’heure actuelle a été mentionnée par seulement 7,9 % des femmes mariées ou vivant en union. Cette proportion n’était que de 4,1 % en 97 à l’EDST. Les méthodes traditionnelles avec (5,8 %) et plus particulièrement la Méthode de l’Aménorrhée Lactationnelle (MAL) sont les plus répandues au Tchad (2,6 % à l’EDST). La proportion des femmes qui utilisent le DIU, les injections ou les préservatifs est quasiment nulle (0,3 %). Seulement 2,0 % des femmes mariées ou vivant avec un homme utiliserait une méthode contraceptive moderne (1,2 % à l’EDST) et particulièrement la pilule. On est loin d’atteindre l’un des objectifs fixés par le PRONAFET (Programme National pour l’Action en Faveur de l’Enfant Tchadien), à savoir un taux de prévalence contraceptive moderne de 10,0 % en l’an 2002 (MPC, 1994, p.6).

407.La population tchadienne a un comportement pronatalité lié au prestige et à la satisfaction que procure une descendance nombreuse. De ce fait, les questions liées à la planification familiale sont considérées comme tabous et synonymes de dépravation des mœurs.

Mutilations Génitales Féminines

408.De l’enquête nationale sur la pratique de l’excision menée en 1991 par le CONACIAF avec l’appui de l’UNICEF il ressort que l’excision est pratiquée sur presque tout le territoire national, à l’exception de BET, Kanem-Lac, Mayo Kebbi Est et Ouest et du Logone Occidental.

409.Selon la classification de l’OMS, la forme d’excision la plus pratiquée correspond aux types I et II à savoir: I- excision du prépuce avec ou sans ablation partielle ou totale du clitoris; II- excision du prépuce et du clitoris et ablation partielle ou totale des petites lèvres.

410.Les résultats de l’EDST 2 de 2004 révèlent une prévalence nationale de 45 % avec de très grandes disparités entre les groupes ethniques (0 à 5 % dans le BET et Mayo Kebbi, 38 % en pays sara et 95 % dans le Ouaddaï).

411.Du point de vu santé, les résultats de la même enquête montrent que près des ¾ des femmes excisées ont eu au moins une complication (65 % des saignements excessifs, 57 % des difficultés à uriner, 27 % gonflement de la zone génitale, 14 % des infections et 13 % des problème de cicatrisation).

Principaux acteurs de la lutte contre l’excision

412.Les institutions et organisations qui ont mené des actions dans ce domaine sont:

Le FNUAP. Le Fonds appuie le programme national pour la santé de reproduction de l’ASTBEF et soutient les groupements féminins ruraux dans leurs programmes de prévention par la sensibilisation;

L’ASTBEF mène des actions de plaidoyer auprès des autorités administratives et législatives pour améliorer la situation juridique ainsi que de sensibilisation dans ses zones d’implantation;

Le CONACIAF. Ce dernier œuvre dans les mêmes domaines que l’ASBEF par le biais de ses organes décentralisés;

La GTZ. Cette organisation appuie, à travers le projet de santé en matière de reproduction, les organisations féminines de Sarh.

Accès aux services de santé

413.De manière générale, au Tchad, la disponibilité des services de santé pose problème par rapport à la dynamique démographique.

414.La structure du système sanitaire du Tchad est pyramidale et s’organise à trois niveaux (périphérique, intermédiaire et centrale) avec à la base le District sanitaire qui est le niveau opérationnel. En 2008, sur 1 051 zones de responsabilité, 326 n’étaient pas fonctionnelles. Et presque toutes situées en zone rurale.

415.Les données médicales sont les suivantes:

4 lits d’hôpital pour 10 000 habitants.

Les ratios en personnel donnent 1 médecin pour 27 471 habitants; 1 SFDE pour 10 534 femmes en âge de procréer.

416.La concentration des moyens humains et matériels dans les grands centres urbains est considérable: en 2007, 63 % des médecins et 64 % des infirmières et des sages-femmes exerçaient à N’Djamena, qui rassemble moins de 9 % de la population. En 2002, sur 55 hôpitaux de district, 24 seulement offraient des soins obstétricaux d’urgence complets.

417.On constate une utilisation très inégalitaire des ressources publiques de santé sur le territoire et qui exclut massivement les populations rurales. Il s’agit là d’un des problèmes majeurs de gouvernance auquel le secteur doit faire face.

418.La concentration des moyens publics dans les villes, et notamment à N’Djamena, va de pair avec une forte insuffisance de l’offre de soins dans le monde rural. Ce phénomène est renforcé par l’absence totale d’intérêt du secteur privé de santé pour le monde rural, notamment à cause de l’absence de demande solvable.

419.La gouvernance du secteur public n’est pas en mesure d’assurer un déploiement des ressources tenant compte des inégalités, notamment au détriment du monde rural. Cette situation est renforcée par les fortes résistances du personnel qualifié par rapport à des affectations hors des grandes villes.

420.La pauvreté de la population entrave dangereusement son accès aux services de santé. A cette pauvreté s’ajoute l’obstacle fondamental à savoir les distances qui séparent les communautés des centres de santé.

Accès à l’eau potable

421.Le taux global d'accès à l'eau résultant de l'agrégation des données du secteur concédé et du secteur non concédé indique qu’en 2008 environ 40 % de la population tchadienne avait accès à une source d'eau sainecontre 29 % en 2004, 31% en 2005, 34 %, en 2006 et 35 % en 2007. L’inventaire des ouvrages couvrant l’ensemble du territoire n’est pas encore lancé. Or, seul un inventaire des ouvrages hydrauliques couvrant l’ensemble du territoire permet d’avoir une bonne connaissance du secteur.

422.Le taux d’accès à l’eau potable dans les zones urbaines et semi-urbaines était de l’ordre de 26 % en 2000. Il a peu évolué depuis et atteindrait 28 % en 2010. Un retard important est constaté en matière d’équipements et d’infrastructures hydrauliques pour ces agglomérations.

423.En 1998, la situation a favorablement évolué. Le graphique 1 indique que les ménages pauvres n’ont pratiquement pas accès à l’eau potable (seulement 0,12 %). Ils utilisent presque exclusivement l’eau des puits traditionnels mal protégée contre les souillures diverses, et celle des marigots et des mares qu’ils partagent souvent avec les animaux. Par contre, plus de 62 % des ménages non pauvres ont accès à l’eau potable. Cependant, si l’on tient compte du fait que cette eau pourrait être souillée au cours des différentes manipulations effectuées lors du transport et de la conservation, la proportion des ménages non pauvres consommant de l’eau potable devient plutôt faible. Le transport d’eau de boisson tant en milieu rural qu’en milieu urbain représente une grande corvée pour la femme. Elle est obligée de parcourir des kilomètres dans certains endroits à la recherche de l’eau des mares et des fleuves.

424.La plupart des maladies épidémiques, telles que la fièvre typhoïde ou le choléra, trouvent leur origine dans l’eau de boisson de mauvaise qualité. Ainsi, les ménages pauvres ont de fortes chances d’être affectés par ces maladies alors qu’ils ne disposent pas de moyens financiers suffisants pour se faire soigner adéquatement.

VIH/Sida

425.L’enquête de séroprévalence de 2005 conduit à un taux de prévalence de 3,3 %. Ce taux est confirmé par la proportion des femmes enceintes entre 15 et 49 ans qui étaient infectées en 2006, soit 4 %.

426.Le taux de prévalence cache de fortes disparités au sein de la population que révèle l’enquête de séroprévalence. Ce sont les milieux urbains qui sont les plus frappés par la pandémie: la prévalence atteint 7 % en milieu urbain, contre 2,3 % en milieu rural. N’Djamena est la ville la plus touchée: 8,3 %. Selon les régions, le Logone oriental affiche la plus forte prévalence (9,8 %) et le Ouaddaï la plus faible (1,2 %).

427.Une analyse entre 2003 et 2009 à Bol, près du lac Tchad, montre une forte progression du phénomène: la prévalence chez les femmes enceintes y est passée de 5 à 9,5 %.

428.Enfin, on dispose d’informations inquiétantes sur une population à risque: une enquête réalisée en 2009 auprès de prostituées montre que la séroprévalence générale y atteint 20 % (25,5 % à N’Djamena, 27,5 % à Kélo).

429.Selon le rapport de l’Enquête Nationale Comportementale et de Prévalence du VIH (VIH) les données du tableau suivant révèlent que le taux de prévalence du VIH est plus élevé chez les femmes (4,0 %) que chez les hommes (2,6 %). Une femme présente 1,5 fois plus de risque de contracter la maladie qu’un homme. Autrement dit, sur 5 séropositifs, 3 sont des femmes. Quel que soit le milieu de résidence, la prévalence du VIH reste toujours élevée chez les femmes. Cette situation pourrait s’expliquer en partie par le fait que les femmes sont plus exposées et plus vulnérables que les hommes vis-à-vis de l’infection du VIH. En effet, les pratiques sociales (relations sexuelles coercitives, dépendance des femmes dans le mariage, persistance des pratiques traditionnelles néfastes) constituent des éléments majeurs qui exposent les femmes à un plus grand risque d’attraper le virus du SIDA comparativement aux hommes.

430.On trouvera ci-dessous une ventilation de la prévalence du VIH/SIDA.

Tableau Prévalence du VIH/SIDA par sexe selon le milieu de résidence

Milieu de résidence

Sexe

Masculin

Féminin

Ensemble

Séropositif %

Effectif

Séropositif %

Effectif

Séropositif %

Effectif

Urbain

5,8

788

8,0

892

7,0

1 680

Rural

1,8

2 800

2,8

2 982

2,3

5 782

Ensemble

2,6

3 588

4,0

3 874

3,3

7 462

431.La connaissance par la population des moyens de prévention est indispensable si l’on veut lutter efficacement contre la propagation du virus. Il a été demandé aux personnes interrogées ce qui pouvait être fait pour éviter de contracter ce virus. À cette question, seulement 55 % de femmes (tableau x) ont déclaré qu’on pouvait limiter les risques de contracter le VIH/SIDA en utilisant le condom. En outre, 78 % des femmes ont cité la limitation des rapports sexuels à un seul partenaire fidèle et non infecté comme moyen de prévention du VIH/SIDA. Globalement, 46 % des femmes ont cité simultanément ces deux moyens de prévention. Quelle que soit la variable considérée, à l’exception de l’âge et de la ville de résidence, on n’observe pas de disparité. En fonction de l’âge, on note que les jeunes femmes de 15 à 19 ans (48 %) connaissent le moins fréquemment ces deux moyens de prévention (34 %) que les plus âgées, notamment celles qui sont âgées entre 40 et 44 ans (­56 %). La différence selon l’état matrimonial fait apparaître quelques disparités. En effet, la proportion de celles qui connaissent les deux moyens pour éviter de contracter le VIH/SIDA est plus faible chez les femmes célibataires (38 %) et atteint 48 % chez celles qui sont en union. Par contre, les femmes résidant à Abéché sont relativement plus nombreuses à connaître ces deux moyens (56 %). En considérant le niveau d’instruction, il apparaît que les femmes de niveau primaire (45 %) sont proportionnellement les moins nombreuses à citer ces deux moyens permettant de réduire le risque de contracter le VIH/SIDA. Pour les femmes qui ont au moins le niveau secondaire, cette proportion est de 50 %.

432.S’agissant du troisième moyen qui consiste à s’abstenir de rapports sexuels, au moins huit femmes sur dix sont de cet avis. Les jeunes femmes de 15 à 19 ans (84 %) qui sont de cet avis sont proportionnellement les plus nombreuses. Il en est de même des célibataires (85 %). Par rapport à la ville de résidence, ce sont les femmes résidant à Abéché (98 %) qui ont cité le plus fréquemment ce moyen.

Cadre de lutte contre le VIH/SIDA

433.Un certain nombre de structures ont été mises en place par le Gouvernement et la communauté des bailleurs en vue de s’attaquer à ce phénomène. Des programmes nationaux (PNLS, PPLS, PLNP) menés avec l’assistance des partenaires de développement, notamment la Banque mondiale, l’Union Européenne, les Institutions du système des Nations Unies et certaines ONG d’exécution, contribuent fortement à la lutte contre la morbidité et la mortalité.

434.Ces programmes sont les suivants:

Mise en place du Comité National de Lutte contre le Sida (CNLS), instance interministérielle chargée d’assurer la coordination au niveau politique;

La Commission Technique de Lutte contre le Sida (CTLS), organe technique chargé d’élaborer les stratégies de prévention et de lutte contre le Sida;

Création de la Coordination de suivi et d’évaluation (organe multisectoriel);

Le Programme National de Lutte contre le Sida, organe exécutif du comité fonctionnel;

L’ONUSIDA, qui aide à l’élaboration d’un plan stratégique 1999-2003;

Le PNLS, par exemple, s’est fixé pour objectif la réduction du taux de prévalence des IST/VIH/SIDA grâce à la multiplication des campagnes de sensibilisation en vue de changer le comportement de la population, la formation et le recyclage du personnel de la santé à la prise en charge correcte des IST/VIH/SIDA par la vulgarisation des préservatifs masculins et féminins;

Mise en place de noyaux Sida dans tous les départements ministériels.

435.On trouvera ci-dessous la ventilation par zone et par groupe d’âge des résultats de sensibilisation des femmes à la lutte contre le sida.

Tableau 12

Pourcentage des femmes âgées de 15 à 49 ans qui connaissent un endroit où elles peuvent aller faire un test du SIDA et qui ont été testées, Tchad, 2000

Zones

Pourcentage de femmes connaissant un endroit pour être testé

Pourcentage ayant été testé

Si testé, pourcentage ayant été informé du résultat

Effectif des femmes

N’Djamena

26,1

3,1

82,4

676

Autres villes

16,2

1,5

66,7

775

Ensemble urbain

20,8

2,2

76,9

1451

Rural

5,0

0,4

18,2

4453

15-19

8,2

0,2

70,6

1156

20-24

10,4

1,5

64,7

979

25-29

9,0

0,9

32,4

1124

30-34

10,6

1,1

80,0

824

35-39

8,5

1,1

47,8

748

40-44

6,7

0,4

34,4

534

45-49

7,2

1,1

42,0

539

Aucun

5,5

0,6

19,0

4470

Primaire

15,7

0,9

80,2

953

Secondaire & +

34,3

5,7

90,9

305

Total

8,9

0,9

54,9

5905

Source: EMIT, janvier 2001.

436.Rares sont les femmes qui ont effectué un test de dépistage du SIDA (0,9 %). Autrement dit, la réduction de 80,0 % du risque de transmission fœtoplacentaire chez toutes les femmes séropositives, telle que fixée par le PRONAFET en l’an 2002 (MPC, 1994, p. 4), ne pourra pas devenir une réalité dans un contexte de faible dépistage. Cette proportion reste très faible quel que soit le milieu de résidence. Même à N’Djamena, elle n’est que de 3,1 %. La proportion des femmes rurales ayant été testée est quasiment nulle (0,4 %). Le niveau faible des femmes ayant fait le test du SIDA dans un pays à majorité rurale laisse présager que le taux de prévalence du VIH exprimé à partir des statistiques disponibles n’est que la partie visible de l’iceberg. Cependant, 54,9 % des femmes ayant effectué le test de dépistage ont reçu le résultat. Il existe cependant des disparités entre les milieux de résidence et les groupes d’âge, par rapport au fait de recevoir les résultats. Par rapport à l’âge, les femmes de 30 à 34 ans sont relativement plus nombreuses que les autres, et le niveau d’instruction influe également. En effet, les femmes de 30 à 34 ans sont relativement plus nombreuses que celles des autres groupes d’âges à connaître le résultat du test, suivies respectivement des adolescentes (15 à 19 ans) et de celles âgées de 20 à 24 ans. Enfin, les femmes qui n’ont reçu aucune instruction ont moins de chances que les femmes plus instruites d’être soumises à un test de dépistage et moins de chances de recevoir le résultat de leur test.

Les contraintes majeures

437.Malgré les efforts déployés, on note une:

Insuffisance quantitative et qualitative au niveau du personnel;

Faible couverture géographique sanitaire (sur 1 051 Zones de Responsabilité, 326 sont non fonctionnelles);

Réticence des agents à servir dans les zones rurales;

Persistance du poids de la tradition et de la pauvreté.

Article 13Les droits économiques des femmes et leur accès aux moyens de production

Les mesures législatives

La Constitution

438.L’exercice par les femmes des activités économiques est garanti par la Constitution en son article12 qui dit: «Les libertés et les droits fondamentaux sont reconnus et leur exercice garanti aux citoyens dans les conditions et les formes prévues par la Constitution et la loi».

439L’article 58 de la Constitution dispose que l’État garantit la liberté d’entreprise. Cet article vient conforter la position de la précédente.

440.Les femmes au Tchad constituent une proportion très importante de la main-d’œuvre dans les secteurs informel et agropastoral où elles représentent environ 86 % de la population active. Elles subissent la pauvreté de manière inégale. En particulier, celles qui dirigent un ménage la subissent dans une proportion de 22 %.

441.Cet état de fait rappelle l’affirmation quasi mondialisée à propos de la femme: «la pauvreté se conjugue au féminin» ou «la pauvreté est de sexe féminin».

442.Selon l’Étude de la Perception sur le Bien-être et la Pauvreté (EPBP) faite par le PNUD en avril 2000 au Tchad, la pauvreté se manifeste par une absence de revenus et de ressources productives suffisantes pour assurer des moyens d’existence viables, une mauvaise santé, une morbidité et une mortalité accrues du fait des maladies, des discriminations sociales, etc. Ce qui montre que la femme ne contrôle pas ou peu les décisions et les moyens de production. Ce pouvoir se trouve limité par rapport à celui des hommes. Et c’est pour pallier cette insuffisance que les gouvernements et les partenaires au développement ont mis en place des projets et programmes en vue de réduire cet écart. Au Tchad, il n’existe aucun texte spécifique régissant les droits d’accès des femmes au crédit et aux moyens de production. Sur le plan juridique, elle a les mêmes droits que l’homme.

Accès aux crédits

443.Il faut noter que la femme est au centre du développement socioéconomique. C’est ainsi que, conscients des inégalités sociales dont elle est victime, l’État, la communauté des bailleurs de fonds et certaines ONG pratiquent tous de la discrimination positive en lui accordant des crédits.

444.Il faut remarquer que l’autorisation administrative d’exercice commercial institué par l’ordonnance no 006/PR/84 du 12 avril 1984 portant statut des commerçants est le premier document administratif que le Ministère du Commerce, de l’Industrie et de l’Artisanat délivre à toute personne physique ou morale désirant exercer un commerce en République du Tchad.

445.Il serait judicieux de déterminer la proportion de femmes qui exercent des activités commerciales de manière formelle par rapport à la proportion d’hommes.

446.Le tableau ci-dessous permet de constater l’évolution de la situation des femmes.

Tableau 13

Rapport national du Tchad sur la mise en œuvre des plates-formes de DAKAR

Année

Hommes

%

femmes

%

Total

%

2000

661

90,18 %

72

9,82 %

733

100 %

2001

874

93,08 %

65

6,92 %

939

100 %

2002

992

92,20 %

84

7,8 %

1 0 76

100 %

2003

478

90,02 %

53

9,98 %

531

100 %

Source: doc rapport national du Tchad sur la mise en œuvre des plates-formes de Dakar et de Beijing: janvier 2004.

447.Les différentes données prouvent à suffisance que le déséquilibre entre les deux sexes dans le domaine des affaires est remarquable.

448.Deux raisons majeures peuvent justifier ce déséquilibre:

1.Le manque d’information;

2.L’insuffisance des moyens financiers.

449.Il faut remarquer ici que 97 % des femmes qui ont obtenu leur autorisation sont classées dans les catégories E et F, c'est-à-dire des détaillants et petits détaillants, du fait de leur marge de manœuvre très réduite (manque de ressources, mobilité réduite, faible accès à la formation, faible capacité managériale).

Les actions spécifiques du Gouvernement et des partenaires financiers

450.En collaboration avec le FNUAP et la Banque africaine de développement, le Gouvernement a initié et mis en place les projets Réduction de la Pauvreté des Femmes (REPAFEM) et Genre au sein du Ministère de l’Action Sociale avec pour objectif d’accorder des crédits aux groupements féminins.

451.Le même type de projet est mis en place au Ministère du Plan dans le cadre du partenariat Gouvernement tchadien/Union Européenne au niveau des régions. Il s’agit du Projet Micro Réalisations (PMR) qui prend également en compte la dimension femme.

452.Le Fonds de Soutien aux Activités en matière de Population (FOSAP), qui est une des composantes du projet Population et Lutte contre le SIDA (PPLS), bénéficie du concours financier de l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID) via le crédit no 2692 CD. Ce crédit est destiné à favoriser le développement des petites activités génératrices de revenus. Il s’agit de microcrédits destinés aux couches défavorisées et aux femmes qui faute de garantie ne peuvent pas accéder au crédit bancaire formel.

Projet mis en œuvre par la Direction de la Promotion Féminine avec l’appui du FNUAP

453.L’amélioration de la condition de la femme est un aspect très important des problèmes et des programmes de population, et le développement durable ne pourra pas se faire sans une participation totale et à égalité des femmes.

454.Au Tchad, la population essentiellement rurale (78 %) compte 52 % de femmes. Celles-ci représentent une énorme force de travail mal utilisée du fait du poids des traditions encore tenaces qui font que très souvent les femmes sont marginalisées et leurs droits bafoués. Elles ne jouissent pas du fruit de leur travail et le statut social et le rôle qui leur sont dévolus par la société ne leur permettent pas de s’épanouir ni de participer au développement en tant que partenaires et bénéficiaires actives. La santé des populations est précaire et les femmes et les enfants sont les plus touchés.

455.Le FNUAP, en tant qu’agence qui contribue à résoudre les problèmes de population, dans son programme d’assistance au Tchad, s’est prononcé en faveur de l’amélioration des conditions de la femme et a financé les activités des projets CHD/97/P02 «Appui au secteur population et stratégies de développement», composante «revalorisation du statut socioéconomique de la femme», CHD/98/P04 «Appui à la revalorisation du statut socio-économique de la femme» et le projet CHD/00/P07 «Genre».

456.A travers ces projets, le FNUAP poursuit l’objectif qui consiste à améliorer la qualité de vie de toutes les couches de la population dans le cadre d’un développement socioéconomique intégré et harmonieux et surtout à contribuer à la revalorisation du statut socioéconomique de la femme.

457.Ces différents projets ont été exécutés par la Direction de la Promotion de la Femme du Ministère de l’Action Sociale et de la Famille en collaboration avec la Direction des Ressources Humaines actuellement Direction de l’Enseignement Agricole, de la Formation Rurale et des Programmes du Ministère de l’Agriculture.

458.Le projet CHD/94/P04 a démarré en décembre 1994 et pris fin en février 1997. La continuité des activités dudit projet s’est faite avec le projet CHD 98/P02 qui a été mis en œuvre en mars 1997 et le projet CHD/9/P04 dont les activités ont démarré en novembre 1998 et pris fin en décembre 2000.

Cas du projet genre appuyé par le FNUAP

459.Le projet CHD/00/P07 «genre», actuellement en cours, couvre trois (3) années: 2001-2003.

460.Le Fonds des Nations Unies pour la population en partenariat avec le Tchad appuie le Ministère de l’Action Sociale et de la Famille dans le renforcement des pouvoirs économiques des femmes. Cet appui vise à renforcer les moyens d’action des femmes surtout en milieu rural pour améliorer leurs conditions de vie et leur statut.

461.Dans le cadre de ce projet, deux stratégies sont développées, à savoir:

La sensibilisation et l’éducation continue des femmes concernant le bien-être familial, le statut et le rôle de la femme dans la communauté et la promotion de la scolarisation des filles;

L’appui financier et technique aux groupements féminins ruraux par la mise à disposition de crédits pour le renforcement de leur pouvoir d’achat à travers des activités génératrices de revenus.

462.Le projet couvre cinq cents (500) groupements dans plus de 400 villages. Selon la coordinatrice du projet, deux cent treize (213) groupements féminins ont bénéficié de crédits dans les villages.

463.En fait, le spectre de la guerre civile, qui a endeuillé des familles, a provoqué l’exode des hommes partis soit en exil, soit à la recherche d’un travail. La précarité dans laquelle vivent les fonctionnaires civils et militaires engendrée par la fermeture de certaines unités industrielles et la nécessité pour les veuves et les orphelins d’assurer leur subsistance ont amené progressivement les femmes à devenir piliers de la famille et donc à s’investir entièrement pour mieux se prendre en charge.

Les actions spécifiques des institutions privées

Cas des institutions bancaires accordant des crédits

464.La FINANCIAL BANK est la seule institution bancaire qui tente de favoriser l’accès massif des femmes aux crédits mais cette expérience demeure toujours dans le secteur informel. Cet effort doit être soutenu davantage par l’action gouvernementale car il convient de remarquer que la contribution des femmes aux activités économiques du pays est fondamentale. Celui-ci résulte non seulement de la volonté politique de promouvoir les femmes mais également de l’introduction au Tchad des matériels et outils d’allégement des tâches tant domestiques qu’agricoles (points d’eau, moulins, etc.). La femme peut alors économiser du temps pour se consacrer aux activités génératrices de revenu.

465.Au Tchad, l’accès des femmes au crédit moderne, quel qu’en soit le montant, est un phénomène nouveau. Les femmes n’en comprennent pas toujours les mécanismes. Elles restent encore attachées au système traditionnel de tontine qui garde une valeur sociale. Les femmes gèrent le montant à leur gré, alors que les crédits octroyés par les organismes ou les institutions ont des destinations bien précises.

Cas des ONG

466.Il s’agit d’ONG telles que VITA/PEP, SECADEV, OXFAM/INTERMON, INADES-FORMATION, ACCORD et d’autres qui contribuent à la lutte contre la pauvreté des femmes.

467.Le tableau figurant ci-dessous indique les montants attribués par les ONG.

Tableau 14

Situation des ONG accordant des crédits

VITA/PEP

Années

1991

1995

1999

2000

2001

Montant annuel des crédits attribués

Part des femmes dans les crédits

241 694 991 12 %

1 060 829 495 43 %

599 303 999 47 %

398 777 000 36 %

233 209 001 38 %

SECADEV

Années

1991

1995

1999

2000

2001

45 725 575

(+/-) 35 %

18 324 990

(+/-) 35 %

14 639 715

(+/-) 35 %

468.VITA/PEP est la toute première institution spécialisée en microcrédit à s’installer au Tchad. L’examen des statistiques de son évolution laisse voir une progression dans le nombre et le montant des crédits attribués, dans la proportion des femmes bénéficiaires de 1991 à 1999; puis une décroissance régulière et continue de ces indicateurs. Par contre, SECADEV n’a commencé à accorder des crédits qu’à partir de 1999. La part des femmes dans les crédits reste stationnaire sur les trois (3) ans.

Limite à l’exercice des droits économiques des femmes

469.Elles sont surtout perceptibles dans le domaine de l’accès des femmes aux moyens de production tels que la terre, le crédit et autres. Le faible pouvoir économique des femmes ne leur donne pas accès à ces moyens car l’accès au crédit bancaire, par exemple, nécessite la détention d’une garantie (hypothèque). Le Tchad ne compte qu’une douzaine de femmes entrepreneurs à l’heure actuelle.

Article 14La femme rurale

470.Selon les dispositions de cet article, les États doivent assurer sur la base de l’égalité de l’homme et de la femme la participation des femmes rurales au développement et à ses avantages et un traitement égal dans les réformes foncières et agraires et dans les projets de développement rural.

471.On constate, cependant, que les pesanteurs socioculturelles limitent fondamentalement les chances des femmes d’accéder aux ressources nationales que constituent la terre et les autres moyens de production. En plus de cet handicap, souvent elles ne disposent pas de biens mobiliers ou de biens durables pouvant leurs permettre d’avoir accès à des crédits importants.

Les mesures législatives

La Constitution

472.L’article 14 de la Constitution précitée en matière d’égalité prend aussi en compte la situation de la femme rurale.

L’action du gouvernement

473.Depuis quelque temps, les Ministères de l’Agriculture et de l’Action Sociale et de la Famille se penchent davantage sur la situation de la femme rurale.

474.Des programmes de formation et des renforcements de leurs capacités sont en chantier dans le cadre d’institutions telles que l’ONDR (Office National de Développement Rural) et le CFPA (Centre de Formation et de Production Agricole), qui assurent des formations en alphabétisation et en gestion. Avec l’aide des partenaires au développement, le Gouvernement introduit désormais des technologies appropriées en milieu rural pour alléger les tâches et réduire les frais d’écolage des femmes (moulins à mil, décortiqueuses, moulin à pâte d’arachide, etc.). L’institutionnalisation de la SENAFET et de la Journée de la femme rurale par le Gouvernement a permis aux femmes rurales de participer aux débats et aux discussions relatives à leurs problèmes spécifiques: une manière de reconnaître et de mettre en valeur le rôle et la place de la femme rurale dans la vie d’un pays.

475.La femme tchadienne participe pleinement à la vie économique du pays même si ses efforts sont souvent méconnus. Elles représentent 45,9 % des ressources en travailleurs dans le secteur agricole. Or, ce secteur exige des moyens de transport adéquats. De plus, ses activités dans les zones rurales nécessitent des déplacements constants variant de 2 à 5 km par jour en fonction des activités (recherche d’eau et de bois de chauffe, travaux champêtres, marché, centres socio-médicaux, etc.).

476.Les déplacements pour se rendre sur les marchés hebdomadaires sont estimés à 10 % des activités. Les moyens de transport utilisés sont les charrettes ou à dos d’animal (approximativement 30 %) suivis de très loin par les véhicules à moteur (11%). En outre, la bicyclette et la pirogue sont utilisées par environ 2 et 1 % des femmes par rapport aux hommes. Pour 80 % de la population, le transport des produits agricoles est une préoccupation majeure car il constitue une part importante part de la charge des travaux dévolus aux paysans, et la femme y joue un rôle moteur.

477.Malheureusement, lorsque la famille dispose d’un moyen de transport aussi rudimentaire soit-il, celui-ci est exclusivement utilisé par l’homme du fait que les tâches de la femme sont considérées à tort comme étant secondaires, et donc non prioritaires.

478.Des efforts sont faits à travers le Programme des Transports en Milieu Rural (PTMR) financé par la Banque mondiale pour réduire les injustices existantes dans l’accès limité des femmes aux moyens de transport.

Appui des ONG de développement

479.De nos jours, des ONG telles que AFRICARE, ACORD, APICA, etc. et certains particuliers mettent en place des unités de production de matériel agricole dans différentes régions du pays. De plus, un appui financier direct est développé à travers la mise en place de crédits octroyés pour l’achat de charrettes à traction animale et de porte-tout. Certaines ONG se sont même investies dans la réalisation de pistes rurales désenclavant ainsi plusieurs villages.

480.Dans le même ordre d’idées, des ONG telles que VITA/PEP, INTERMON/OXFAM et SECADEV s’efforcent dans le cadre de leurs activités d’apporter un appui solide dans ce domaine en vue d’inciter à un changement de comportement. L’impact de ces types d’appui se mesure dans le changement de comportement des femmes dans leurs relations familiales et communautaires.

481.Des ONG telles que INADES formation, INTERMON, ACCORD et SECADEV mettent en avant dans leurs domaines d’intervention les droits des femmes. Elles ont très tôt intégré la dimension genre dans leurs activités.

482.Leurs appuis sont orientés vers le renforcement des capacités organisationnelles, matérielles et financières des populations rurales:

La formation et la sensibilisation de la population rurale féminine aux questions de genre;

La formation des animateurs villageois;

La transformation des produits et leur écoulement;

L’épargne des femmes et l’octroi de crédits aux femmes dans le cadre des activités génératrices de revenus.

483.A INADES-Formation, par exemple, les programmes des deux dernières années et des trois années à venir mettent l’accent sur le droit à la citoyenneté et sur l’appui au renforcement des pouvoirs économiques des femmes dans trois filières (karité, arachide et séchage de produits périssables) à quatre niveaux:

La production agricole;

La transformation des produits agricoles;

La commercialisation des produits;

La gestion comptable et financière des petites entreprises.

484.INADES commémore la Journée internationale de la femme et la Journée de la femme rurale avec le Ministère de l’Action Sociale et de la Famille.

485.L’ONG Intermon/Oxfam vient en appui aux Associations et groupements tchadiens mixtes et féminins. Dans ses interventions, elle utilise l’approche genre pour amener les Organisations féminines à se prendre en charge afin de contrôler les domaines socioéconomiques jadis considérés comme des domaines masculins.

486.Elle met un accent particulier sur le renforcement des capacités juridiques et économiques des femmes en vue d’influencer positivement les comportements.

487.Le même procédé est utilisé par ACCORD et SECADEV, qui mettent l’accent sur le renforcement des pouvoirs socioéconomiques des organisations paysannes sur la base de l’égalité hommes/femmes. Elles organisent à cet effet des séances de sensibilisation et des débats communautaires pour encourager le dialogue.

488.Les ONG de développement travaillent en conformité avec les dispositions de la Convention et l’impact de leurs actions est visible en milieu rural. Les femmes discutent et agissent le plus souvent sans sentiment d’infériorité dans les groupements et organisations paysannes.

Le droit de propriété

489.La loi no 24 du 22 juillet 1967 toujours en vigueur porte sur le régime de la propriété foncière et des droits coutumiers. Dans ce texte, il est fait allusion aux procédés de contestation de propriété qui se fait par immatriculation. Seuls les fonds de terre et les bâtiments sont susceptibles d’immatriculation par le conservateur de la propriété foncière. Selon l’article 4 de la loi, seuls les propriétaires et copropriétaires peuvent se voir délivrer un titre foncier. Le texte ne fait pas de distinction entre les sexes. Il n’existe pas à proprement parler de textes spécifiques aux femmes et à leur accès au droit de propriété.

490.Dans la pratique, la situation varie voire évolue. En milieu urbain, il est plus facile pour les femmes d’acquérir de grands domaines qu’en milieu rural. Cependant, la situation varie en fonction de la capacité financière des femmes, et cela même dans les villages. Aussi, les femmes s’organisent en groupements pour pouvoir acquérir des biens immobiliers.

Article 15Les droits civils et l’égalité devant la loi

491.En s’engageant dans la Convention, le Tchad a pris des mesures appropriées pour éliminer la discrimination à l’égard des femmes dans leurs relations avec les hommes devant la loi.

Les mesures législatives

La Constitution

492.L’égalité entre l’homme et la femme devant la loi est consacrée par la Constitution tchadienne de 1996 (art.13 et 14).

493.Cependant, il convient de remarquer qu’en attendant l’adoption d’un code tchadien des personnes et de la famille, les droits civils des femmes sont pour le moment non uniformes dans la pratique.

Domaine de l’équité et de l’égalité

494.Du point de vue de la législation, en l’espèce la question de l’équité et de l’égalité ne pose pas problème.

495.Le problème se pose avec acuité au niveau du contrôle exercé par les femmes sur les ressources et les revenus. Dans le cadre des activités agricoles et économiques, la femme n’est pas seule responsable de ses revenus. Son mari a un droit de regard et de gestion sur les revenus de sa femme, qui vont servir à l’entretien du ménage ou au mariage du mari avec une nouvelle épouse, et très rarement à l’épanouissement de la femme au foyer.

496.La non-valorisation de son rôle et la division inégale du travail maintiennent la femme rurale dans une situation de dominée. Ainsi, après les travaux champêtres, elles doivent préparer le repas, faire la corvée d’eau, s’occuper des enfants et du mari. «La qualité d’une femme se mesure au temps de travail et à la rugosité de ses mains» dit un adage dans une bonne partie des communautés tchadiennes.

497.Le Code pénal de 1967 a prévu des dispositions qui répriment les actes de violence commis à l’encontre des femmes.

498.Les violences familiales, domestiques, morales ou physiques exercées sur les femmes sont sanctionnées en vertu des articles du Code pénal, qui réprime les atteintes à l’intégrité physique, morale, les atteintes aux mœurs, les atteintes à la morale publique, de même que les atteintes à l’intégrité et à l’unité de la famille. Ainsi, selon l’article 277, CP, la consommation du mariage avant que la jeune fille ait atteint l’âge de 13 ans est assimilée à un viol et punie comme tel.

499.L’article 253 du Code pénal assimile l’excision féminine et les mutilations sexuelles aux autres violences ayant entraîné une incapacité de travail de plus de 20 jours et punit ces infractions d’un emprisonnement de 1 à 5 ans et d’une amende de cent mille (100.000) francs CFA.

La Société Civile

500.Le développement du mouvement associatif et son dynamisme sont révélateurs du degré de maturité acquis par ces composantes de la société civile dans le domaine de la sensibilisation de la population aux instruments juridiques internationaux et nationaux, à la promotion et à la protection des droits des femmes et des enfants au Tchad.

501.De manière générale, les organisations de la société civile font un grand travail dans le cadre de la promotion des droits et libertés des citoyens. Il s’agit des Associations des Droits de l’Homme communément appelés ADH, des organisations non gouvernementales, des syndicats, de l’Organisation des Acteurs non étatiques, des organisations religieuses et professionnelles, des organisations féminines, etc.

502.Leurs actions tant individuelles que collectives au sein des réseaux ou plates-formes sont déterminantes pour le changement des comportements, malgré le manque de statistiques officielles permettant d’avoir une idée sur l’impact réel en termes de changement des comportements et des mentalités au sein de la population: par exemple, la position des gens au sujet du mariage forcé, des violences domestiques liées à la bastonnade et à la succession, bref le rôle et la place de la femme dans une société en pleine mutation.

Les associations de défense des Droits l’Homme

503.Les Associations de défense et de promotion des Droits de l’Homme au Tchad ont été créées avec le déclenchement du processus démocratique en 1990: Ligue Tchadienne des Droits de l’Homme (LTDH), Association Tchadienne pour la Promotion des Droits de l’Homme (ATPDH.), Association Tchadienne pour la Non-violence(ATNV), Tchad Non Violence (TNV), Association pour la Promotion et la Défense des Libertés Fondamentales au Tchad (APLFT), Réseau des Associations des Droits de l’Homme, CIVITAS-TCHAD, etc.

504.Ces associations font un énorme travail dans le cadre de la promotion des droits et des libertés des citoyens. Elles dénoncent les violations des droits de l’homme et produisent des rapports périodiques sur les arrestations, les détentions, les exécutions extrajudiciaires, la situation des prisonniers politiques, la situation des enfants des rues et la condition de la femme.

505.Hormis leur travail de lobbying, ces associations ont pris conscience de la nécessité de mobiliser la population pour qu’elle apprenne à protéger et à défendre ses droits et ses libertés. A cet effet, elles ont organisé, dans tout le pays, des séances de formation et de sensibilisation aux droits humains, à la démocratie, aux élections, au règlement pacifique des conflits (agriculteurs-éleveurs), à la médiation, etc. La qualité de leur travail en ont fait des interlocutrices incontournables pour les bailleurs de fonds sur tous les dossiers sensibles comme le programme d’ajustement structurel ou le dossier pétrole.

506.En particulier, on notera les formations suivantes:

Formation civique de la population par le collectif des ADH et ONG dans 9 préfectures en 1996;

Formation des militants des droits de l’homme pour l’observation des élections présidentielles et législatives en 1996 et 2001;

La LTDH a organisé 8 séances de formation et de sensibilisation aux droits des femmes entre 1997 et 2000;

L’ATPDH a fait de même avec une dizaine de séances de sensibilisation, de formation et d’information des populations.

507.Parmi ces organisations, il en existe une qui s’est spécialisée dans le domaine de l’éducation civique, CIVITAS-Tchad. Elle vient d’élaborer un projet de programme d’éducation civique et morale pour les cycles de l’enseignement primaire et secondaire. Présentement, elle collabore avec le Ministère de l’Éducation Nationale pour la mise en œuvre de ce programme qui, il faut le souligner, est le premier du genre au Tchad.

508.Pour des raisons d’efficacité, ces organisations de droits de l’homme sont organisées en réseau de concertation et d’action: elles sont à l’initiative de la création d’une radio privée libre dénommée «RADIO FM LIBERTÉ». Cette radio associative a pour mission principale l’information, la formation, la culture et l’éducation.

Les syndicats

509.Les syndicats de travailleurs ont joué un grand rôle, depuis 1991, pour la consolidation des droits de l’Homme et la démocratie au Tchad. De nos jours, on compte plusieurs centrales syndicales dont les trois plus importantes sont: l’Union des Syndicats du Tchad (UST), la Confédération Libre des Travailleurs du Tchad (CLTT) et le Syndicat des enseignants du Tchad (SET). La formation civique de leurs membres est régulièrement assurée, à N’Djamena comme dans le reste du pays, par des séminaires, des ateliers ou des sessions de formation.

510.Leurs thèmes principaux portent sur les instruments nationaux et internationaux de défense des travailleurs, les droits et devoirs du citoyen, la démocratie, les élections, le travail des femmes et des enfants, le sort des retraités, etc.

511.Plusieurs facteurs affaiblissent les syndicats tchadiens, notamment: les difficultés administratives ou politiques auxquelles ils se heurtent, les tentatives, souvent maladroites, de récupération, l’insuffisance, voire la précarité de leurs ressources, la montée du chômage ou la destruction des outils de production (par les fréquents pillages et détournements), le manque d’engagement des fonctionnaires (depuis que l’État fait l’effort de payer régulièrement les salaires, du moins pour ceux de la Capitale), la méfiance des travailleurs qui croient, à tort ou à raison que les structures syndicales ne les ont pas servis comme il se doit, etc.

Les associations féminines

512.Les femmes représentent 50,7 % de la population tchadienne. Beaucoup sont organisées en Associations à caractère économique, social et culturel. Leur importance dans la production agricole et les activités commerciales est plus qu’évidente.

513.Mais leur fort taux d’analphabétisme limite considérablement leurs actions. La proportion des femmes qui militent pour l’instauration de la démocratie et les droits des femmes est faible. Celles qui s’engagent réellement se recrutent essentiellement parmi les intellectuelles. On citera, notamment, l’Association des Femmes Juristes du Tchad (AFJT), qui se distingue par son travail systématique en faveur de la promotion des droits de la femme et de l’enfant, par l’organisation de séminaires et de conférences-débats, par ses services de conseils juridiques, etc. L’AFJT s’investit dans des actions de recherche, de formation et d’éducation des femmes concernant leurs droits. Elle offre un cadre idéal de conseil juridique aux femmes, organise des séminaires à leur intention sur des sujets liés à la bonne gouvernance comme «Femme et fonction élective», «les violences à l’égard des femmes». De 1999 à 2002 elle a apporté une assistance juridique et judiciaire aux femmes victimes de violences conjugales et familiales. Ainsi, soixante-quinze (75) dossiers ont été déposés auprès des tribunaux locaux. Il s’agit des problèmes liés à la pension alimentaire, aux dommages-intérêts, aux coups et blessures volontaires et à la succession.

514.Les associations féminines se distinguent surtout par le dynamisme et l’engagement qui caractérisent certaines d’entre elles. On peut, à titre d’exemple, citer l’Union des Groupements des Femmes du secteur Informel (SAID-AL-AWINE), l’Union des Femmes pour la Paix (UFEP), le Conseil des Femmes pour l’Éducation et la Paix (CFEP), la Mutuelle des Femmes du secteur Informel (MUFESI), le Comité National des Femmes Travailleuses et l’association FORET-FAWE, ainsi que le Forum des Éducatrices Tchadiennes, qui s’occupe de l’éducation des filles.

515.A l’heure actuelle, on dénombre au Tchad environ 1 007 associations et groupements féminins dont plus d’une centaine est affiliée à la CELIAF. Plusieurs sont organisés en réseau pour être plus efficaces.

Les réseaux d’associations de protection et de défense des droits des femmes

516.Ayant pris conscience du rôle qu’elles peuvent jouer dans la lutte pour l’amélioration des conditions de vie des femmes et en vue de mieux assurer la défense des intérêts de leurs membres, la plupart des organisations féminines travaillent en réseau. Parmi les principaux réseaux on trouve la CELIAF, qui a été créée en 1996 avec les objectifs suivants:

Créer un espace d’échange et de réflexion pour les associations féminines;

Assurer la collecte et la vulgarisation des documents importants nationaux et internationaux relatifs à la promotion des femmes;

Aider à la réflexion sur les stratégies de développement au féminin;

Constituer une banque de données disponible et accessible pour les associations féminines.

517.A ce jour, elle compte 400 Associations et groupements féminins et 13 000 femmes membres. Elle est structurée en 9 antennes régionales qui travaillent directement avec les organisations de base.

518.Pour atteindre ses objectifs, la CELIAF organise des actions d’information et de sensibilisation des femmes et s’efforce de renforcer les capacités techniques et organisationnelles des organisations de femmes, l’écoute et l’assistance apportée aux femmes, la vulgarisation des textes juridiques relatifs aux femmes, le plaidoyer et la participation active à l’élaboration des programmes et politiques du pays.

519.Treize Associations Féminines Arabophones sont regroupées au sein de «l’Union des Associations Féminines Arabophones» (UAFAT). L’Union a pour objectif de coordonner les activités de ses organisations-membres . Un effort particulier est déployé par cette association pour réclamer la traduction en langue arabe de tous les documents relatifs aux femmes.

520.L’Organisation des Femmes Chrétiennes de l’Entente (OFCE) mène des actions de développement en faveur des femmes par le biais de formations pratiques , par exemple la fabrication de produits locaux tels que la confiture, la tomate concentrée, etc.

521.L’Association des Professionnelles Africaines de la Communication, section Tchad (APAC), tente de traduire les résolutions de BEIJING sur le rôle de la presse dans la promotion de la femme. Cette association vise à:

Faciliter l’accès des femmes à l’information sur leurs droits;

Lutter contre la diffusion d’images négatives et stéréotypées sur les femmes dans les médias;

Exploiter tous les moyens de communication en vue de promouvoir l’équité et l’égalité des chances et les droits des femmes.

522.D’une manière générale, toutes ces associations féminines tendent vers un seul et même objectif qui est la défense des droits des femmes, leur éducation et leur formation aux fins de promouvoir le développement au féminin.

523.Un des traits caractéristiques des associations de la société civile tchadienne est le regroupement de celles-ci dans des réseaux. Ainsi, on trouve par exemple le Réseau des Femmes du Sahel, le Réseau des Femmes pour la paix, le Réseau des Femmes pour l’Afrique Centrale, le Réseau de l’Association des Africaines pour la Communication, le Réseau des Femmes Ministres et Parlementaires, le Réseau des Parlementaires pour la population et le Développement, ou encore le Réseau de Plaidoyer de la Société Civile, qui par le nombre des associations qui le composent constitue en ce moment le plus grand réseau dans le paysage de la Société Civile Tchadienne.

524.S’agissant précisément du Réseau de Plaidoyer, son développement est, en grande partie, lié à la négociation du projet pétrole. En effet, dans le cadre de ces négociations, pour mieux faire entendre leurs préoccupations et défendre leurs points de vue sur les enjeux et risques liés à l’exploitation pétrolière, les associations de la société civile sont à l’initiative de la mise en place d’un réseau de plaidoyer.

525.Essentiellement orienté vers l’exécution, le plaidoyer vise avant tout obtenir le soutien des autres et leur adhésion à une politique donnée. C’est dans cette optique que 51 délégués représentant les différentes organisations de la société civile (ONG, ADH, syndicats, organisations paysannes, associations féminines, OANET dont la présidente est une femme, etc.) ont tenu les 3 et 4 juin 1999 à N’Djamena une assemblée générale constitutive du Réseau de Plaidoyer de la Société Civile tchadienne.

Article 16L’égalité dans le mariage et le droit de la famille

La Constitution

526.En proclament l’égalité juridique entre l’homme et la femme en ses articles 13 et 14, la Constitution du Tchad entend garantir aux couples dans leurs relations de mariage une responsabilité partagée dans tous les domaines de la vie.

Les autres mesures

Le Code civil de 1958

527.En attendant la codification du projet de code tchadien des personnes et de la famille, les droits de la femme dans le mariage sont régis par le Code civil français en vigueur hérité de la période coloniale de 1958 et l’ordonnance 03/INJ du 2 juin 1961 réglementant l’état civil au Tchad.

L’ordonnance 03 / INJ du 2 juin 1961 sur l’état civil

528L’article 11 de cette ordonnance fait obligation à l’officier de l’état civil, avant d’enregistrer les déclarations de mariage, de s’assurer que les prescriptions concernant l’âge minimum et le consentement des conjoints ont été respectées.

529.En ce qui concerne les conditions de fond du mariage, l’article 144 du Code civil dispose que «l’homme avant 18 ans révolus, la femme avant 15 ans révolus ne peuvent contracter mariage».

530.En ce qui concerne les conditions de forme du mariage, c’est la monogamie qui est valable en droit moderne, la polygamie n’est pas reconnue par le Code civil de 1958 applicable au Tchad.

531.En effet, l’article 147 du Code civil dispose: «qu’on ne peut contracter un second mariage sans la dissolution du premier».

532.L’article 11, alinéa 6, de l’ordonnance de 1961 reconnaît à la femme le droit de demander la dissolution du mariage si les époux ont renoncé à la polygamie au moment de la célébration du mariage.

533.L’article 11, alinéa 6, dispose que «les conjoints peuvent déclarer que l’époux renonce à la polygamie et qu’en cas de violation de cette clause, le mariage pourra être rompu à la demande de l’épouse avec ou sans le remboursement de la dot».

534.L’article 11, alinéa 6, fait allusion au droit d’option qui est reconnu à la femme en cas de mariage monogamique.

535.En ce qui concerne la dissolution du mariage, le Code civil de 1958 a prévu le divorce judiciaire par faute et par consentement mutuel et contient des dispositions qui protègent les droits des femmes en ce qui concerne le partage des biens et la garde des enfants.

536.Le Projet de code des personnes et de la famille (PCPF) est un texte législatif inspiré de la Convention visant à renforcer la protection de la femme dans le domaine civil, politique et économique. Le PCPF a relevé l’âge du mariage pour la fille à 17 ans.

537.Le PCPF a élevé le rôle de la femme au niveau de la direction de la famille en soulignant que «les époux assurent ensemble les mêmes responsabilités au cours du mariage et dans les rapports familiaux.».

538.Le PCPF reconnaît à la femme mariée la pleine capacité de passer des actes juridiques et d’ester en justice pour défendre ses droits. Il faut souligner que le PCPF est toujours en chantier.

Les droits successoraux de la femme

539.Le droit successoral coutumier animiste ne reconnaît pas à la veuve le droit à la succession. Dans certaines localités, non seulement elle est exclue de la succession, mais elle fait partie de la masse successorale. Le droit musulman lui accorde1/8èmequand elle vient à la succession avec d’autres héritiers ou ¼ quand elle est l’unique héritière.

540.Par contre, l’homme, dans les mêmes conditions, a droit au ¼ ou à la moitié selon les cas.

541.En ce qui concerne les droits successoraux de la femme, la Convention en son article 16 traite globalement des rapports familiaux sur la base de l’égalité entre l’homme et la femme. Une disposition qui trouve son équivalent à l’article 743 du CPPF, qui dispose que «le conjoint survivant contre lequel il n’existe pas de jugement de séparation de corps passé en force de la chose jugée est appelé à la succession même lorsqu’il existe des parents dans les conditions fixées par l’article 738».

542.Le PCPF protège les droits successoraux des femmes parce qu’il permet à la femme mariée d’aller à la succession en présence des enfants légitimes et des parents du défunt.

543.Le délit d’abandon de famille est également réprimé par le Code pénal. Le mari est condamné à verser une pension alimentaire à sa femme lorsqu’il refuse d’honorer son engagement.

Les relations conflictuelles

544.En ce qui concerne la dissolution du mariage, l’article 289 du projet de code de la famille dispose que: «le divorce peut être prononcé, soit sur la demande conjointe des époux, soit sur la demande de l’un des époux et acceptée par l’autre». En matière d’héritage l’égalité entre filles et garçons est déterminée par le Code civil de 1958 et les intérêts de la femme sont protégés. La garde de l’enfant est confiée l’un des parents après une enquête sociale et en tenant compte de l’intérêt supérieur de l’enfant.

545.Le Code des pensions civiles et militaires est également favorable à la veuve et le lévirat y est interdit.

III.Conclusion

546.Le Tchad a ratifié diverses conventions internationales relatives aux droits de l’homme. Il a même ajusté sa législation en vue de la rendre conforme auxdites conventions. Des mesures administratives et juridiques, bien qu’insuffisantes, ont pu apporter un début de solution aux problèmes spécifiques des femmes. La volonté s’est effectivement manifestée mais il est encore difficile à l’heure actuelle de fournir des données comparatives entre 1995 et 2010 étant donné l’absence d’un organe de suivi tout comme de coordination des progrès réalisés au niveau national en faveur des femmes dans le cadre de l’application de la Convention. A cette difficulté s’ajoutent la diversité et la disparité des actions qui ont été menées par les différents intervenants pendant cette période. Ces disparités empêchent d’évaluer leur impact.

547.Il faut cependant faire remarquer que des efforts restent à faire dans les domaines relatifs à la révision des textes nationaux existants et à l’adoption de nouveaux textes législatifs et réglementaires en vue de leur harmonisation avec la Convention. Cette action permettra au Gouvernement d’écarter certaines contradictions qui demeurent dans la situation de droit et de fait au regard des dispositions de la Convention.

548.Des efforts ont été réalisés dans les domaines de l’éducation et de la scolarisation des filles, ces dernières années, et ont donné des résultats probants.

549.Il faut également noter la forte participation des femmes en tant que candidates aux diverses consultations électorales en 1997 et en 2002.

550.Les pratiques coutumières évoluent vers davantage de liberté et d’égalité entre hommes et femmes. Mais force est de constater que la pénétration du droit moderne et de la Convention dans les mœurs se fait plutôt lentement.

551.Le problème de l’application de la Convention se pose surtout compte tenu:

De l’inexistence d’un comité national de suivi et d’évaluation de la Convention;

Du faible niveau de connaissance des différents engagements pris par l’État tchadien de la part d’une bonne partie de population et des autorités politiques, administratives et judiciaires;

De la persistance de lois contraires aux dispositions de la Convention;

De la difficulté d’harmonisation des instruments juridiques internationaux par rapport aux textes nationaux de manière générale.

552.Les points suivants restent et demeurent complexes. Il s’agit de la dépendance personnelle de la femme mariée, de sa propre perception de son rôle, de la discrimination successorale à l’égard des filles et des femmes et des violences qui sont considérées comme des pratiques normales qui ne méritent pas d’être rendues publiques.

553.A cette situation s’ajoute celle de la faible utilisation par les femmes de leurs droits (pour celles qui les connaissent): autant de problèmes qui méritent d’être pris au sérieux par le Gouvernement s’il veut honorer ses engagements vis-à-vis de la Convention. Des efforts conjoints du Gouvernement, de la société civile et des femmes elles-mêmes pourraient apporter des solutions adéquates à ces différents blocages.