à l’égard des femmes

Quarante-quatrième session

20 juillet-7 août 2009

Observations finales concernant les deuxième

et troisième rapports périodiques (présentés

en un seul document) du Timor-Leste*

Le Comité a examiné les deuxième et troisième rapports périodiques du Timor-Leste présentés en un seul document (CEDAW/C/TLS/2-3) à ses 1357e et 1358e séances, le 11 novembre 2015 (voir CEDAW/C/SR.1357 et 1358). La liste des points et questions soulevés par le Comité figure dans le document paru sous la cote CEDAW/C/TLS/Q/2-3 et les réponses du Timor-Leste dans celui paru sous la cote CEDAW/C/TLS/Q/2-3/Add.1.

Introduction

Le Comité se félicite des deuxième et troisième rapports périodiques présentés en un seul document par l’État partie. Il remercie aussi l’État partie d’avoir répondu par écrit à la liste des points et questions soulevés par le groupe de travail d’avant–session et il se félicite de la présentation orale de la délégation et des précisions données en réponse aux questions posées par le Comité durant le dialogue.

Le Comité félicite l’État partie de la composition de sa délégation, qui était dirigée par la Secrétaire d’État pour le soutien et la promotion socio-économique des femmes, Veneranda Lemos, et qui comprenait des représentants du Ministère de l’éducation, du Ministère de la santé, du Ministère de la solidarité sociale, du Ministère de l’intérieur, du Ministère de la justice, du Ministère de l’administration de l’État, du Ministère de l’agriculture et de la pêche, du Secrétariat d’État pour promotion socioéconomique des femmes, du Secrétariat d’État pour la politique de l’emploi et la formation professionnelle, de la Cour d’appel et de la Mission permanente du Timor-Leste auprès de l’Office des Nations Unies et autres organisations internationales à Genève. Le Comité se félicite du fait que la délégation comprenait aussi des parlementaires. Il se réjouit du dialogue constructif qui s’est instauré entre la délégation et lui tout en notant que certaines questions n’ont pas reçu une réponse complète.

* Adoptées par le Comité à sa soixante-deuxième session (26 octobre-20 novembre 2015).

Aspects positifs

Le Comité se félicite des progrès réalisés depuis l’examen en 2009 du rapport initial de l’État partie (CEDAW/C/TLS/1) dans le cadre de la mise en place de réformes législatives, en particulier l’adoption des textes de loi ci-après :

a)Code du travail (loi n° 4/2012) le 21 février 2012, qui garantit l’égalité de chances et de traitement dans l’emploi et interdit le harcèlement sexuel verbal, non verbal et physique;

b)Code civil (loi n° 10/2011)  le 14 septembre 2011, qui prévoit l’égalité de droits des femmes et des hommes dans le mariage;

c)Loi n° 7/2011 portant modification de la loi électorale parlementaire et établissant les listes des candidats et de leurs suppléants, lesquelles doivent comprendre au moins une femme par groupe de trois candidats;

d)Loi contre la violence familiale (loin° 7/2010) du 3 mai 2010 qui pénalise la violence familiale, y compris la violence sexuelle, « même dans le mariage ».

Le Comité se félicite des efforts faits par l’État partie pour améliorer son cadre institutionnel et politique destiné à accélérer l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et à promouvoir l’égalité des sexes, comme en adoptant ce qui suit :

a)La stratégie nationale et le plan d’action 2014-2017 pour l’égalité des sexes et le secteur privé, en 2014;

b)Le plan national d’action 2012–2014 sur la violence sexiste, en 2012;

c)La résolution parlementaire n° 27/2011 portant création d’un groupe de travail sur le genre comme mécanisme intersectoriel de coopération et de coordination, en 2011;

d)La résolution parlementaire n° 12/2010 sur une budgétisation attentive à la problématique des sexes, en 2011.

Le Comité accueille avec satisfaction le fait qu’en 2009, depuis l’examen de son précédent rapport, l’État partie a accédé à la Convention des Nations Unies contre le crime transnational organisé et aux Protocoles visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, et contre la contrebande de migrants par terre, air et mer.

Principaux domaines de préoccupation et recommandations

Le Parlement

Le Comité souligne le rôle crucial du pouvoir législatif dans l'application intégrale de la Convention (voir la déclaration du Comité sur ses relations avec les parlementaires adoptée à sa quarante-cinquième session, en 2010). Il invite le Parlement national, conformément à son mandat, à prendre les mesures nécessaires pour la mise en œuvre des présentes observations finales d'ici à la présentation du prochain rapport périodique au titre de la Convention.

Définition de la discrimination et cadre législatif

Le Comité demeure préoccupé par le fait que ni la Constitution de l’État partie ni sa législation ordinaire ne comprennent de définition de la discrimination à l’égard des femmes conformément à l’article premier de la Convention. Il est préoccupé aussi par la décision de ne pas adopter de loi spécifique sur l’égalité des sexes et concernant l’absence de législation régissant le rapport entre le système juridique ordinaire et le système juridique traditionnel. Le Comité est préoccupé en outre par le retard mis à adopter plusieurs projets de loi qui ont des incidences sur la jouissance de leurs droits par les femmes, comme les projets de loi relatifs à la traite, à la possession de biens, à l’expropriation, au Fonds d’aide à l’acquisition de biens immobiliers et à l’enregistrement des actes d’état civil.

Le Comité demande à l’État partie  :

a) de promulguer et de mettre en œuvre une loi-cadre sur l’égalité des sexes et d’inclure dans la Constitution ou dans la législation pertinente une définition de la discrimination contre les femmes qui englobe à la fois la discrimination directe et indirecte dans les domaines public et privé au sens de l’article premier de la Convention.

b) d’accélérer l’adoption, selon un calendrier précis, des projets de loi concernant la traite des personnes, la possession de biens, l’expropriation, le Fonds pour l’acquisition de biens immobiliers et l’enregistrement des actes d’État civil ;

c) de promulguer des dispositions législatives régissant les relations entre le système juridique ordinaire et le système traditionnel à l’issue d’un dialogue ouvert avec la société civile, notamment les organisations de femmes, concernant les incidences de cette loi sur la jouissance de leurs droits par les femmes.

Accès à la justice

Le Comité note qu’une organisation non-gouvernementale, Asistencia Legal ba Feto no Labarik, fournit une aide juridictionnelle aux femmes et aux filles en matière de droit pénal, civil et familial et que l’État partie a mis en place quatre tribunaux mobiles pour desservir les régions reculées dans 13districts. Le Comité n’en est pas moins préoccupé par :

a)le fait que les femmes continuent dans l’ensemble à recourir au système traditionnel de justice plutôt qu’au système officiel, ce qui limite la jouissance de leurs droits en perpétuant et en renforçant des normes sociales discriminatoires;

b)l’absence de véritable système d’assistance juridictionnelle dans l’État partie;

c)les retardsmis à saisir la justice d’affaires de violence sexiste et de violation des droits des femmes en raison de la diminution de 13 %des ressources humaines du système judiciaire en application de la résolution parlementaire n° 11/2014 et des résolutions gouvernementales n° 29/2014 et 32/2014;

d)le très faible pourcentage de femmes qui demandent une aide juridictionnelle en raison, notamment, de la faiblesse de leurs connaissances des notions élémentaires du droit, des obstacles que représente la langue et du petit nombre de tribunaux de district;

e)le manque de sensibilité des membres du pouvoir judiciaire à la problématique des sexes et l’absence de programmes réguliers de renforcement des compétences sur les droits des femmes et l’égalité des sexes à leur intention, ainsi que le manque d’information concernant la manière dont la Convention a été invoquée par les tribunaux nationaux.

Rappelant sa recommandation générale n°  33 (2015) sur l’accès des femmes à la justice, le Comité recommande à l’État partie  :

a) d’établir des procédures claires et précises concernant le dépôt de plainte pour discrimination à l’égard des femmes, de s’assurer que les femmes dont les droits ont été violés disposent de recours efficaces et impose des sanctions appropriées pour ces violations ;

b) d’établir un système efficace d’assistance juridictionnelle pour éliminer les obstacles économiques que rencontrent les femmes pour l’accès à la justice, notamment de faire en sorte que les frais de publication et d ’archivage de s documents , ainsi que les frais de justice , soient réduits pour les femmes disposant d’un faible revenu et annulés pour celles qui vivent dans la pauvreté ;

c) de revoir la résolution parlementaire n°  11/2014 et les résolutions gouvernementales n°  29/2014 et 32/2014 en vue d’atténuer leurs conséquences néfastes pour le traitement des affaires de violence sexiste et d’ autre violations des droits des femmes, d’assurer la continuité des procédures judiciaires et de prévenir les retards dans le traitement des affaires, notamment en vérifiant que les juges locaux sont habilités et mandatés pour traiter ces affaires dans le respect de la problématique hommes-femmes;

d) de faire en sorte que les femmes connaissent mieux leurs droits et améliorent leur culture juridique dans tous les domaines couverts par la Convention , et de prévoir davantage de ressources pour renforcer l’infrastructure et la qualité du système judiciaire officiel , et de le rendre plus accessible , en particulier dans les zones rurales, notamment en aid ant les femmes analphabètes ;

e) de s’assurer, notamment par l’enseignement de notions de droit et le renforcement des capacités , à ce que la Convention, le Protocole facultatif s’y rapport ant et s es recommandations générales so ie nt suffisamment connus et appliqués par toutes les autorités publiques et le pouvoir judiciaire comme cadre de référence pour les lois, les décisions de justice et les politiques relatives à l’égalité des sexes et à la promotion de la femme.

Mécanismes nationaux de promotion de la femme

Le Comité prend note des efforts de l’État partie pour institutionnaliser une budgétisation qui tienne compte de la problématique hommes–femmes et améliorer la coordination par l’établissement du groupe de travail interministériel sur la prise en compte de la problématique hommes–femmes, de l’entitéchargée de coordonner la mise en place du plan national d’action sur la violence sexiste et de groupes de travail nationaux et régionaux sur les questions d’égalité des sexes. Le Comité note toutefois avec préoccupation que :

a)les mécanismes de coordination en place souffrent du nombre limité des pouvoirs du Secrétariat d’État pour le soutien et la promotion socio-économique des femmes et de l’insuffisance de son budget et de ses ressources, ainsi que de la faiblesse des groupes de travail sur les questions d’égalité des sexes dans les divers ministères;

b)faute d’informations sur les différents postes budgétaires et de mécanismes de contrôle en place, il est impossible d’évaluer régulièrement les progrès accomplis dans la mise en œuvre des plans stratégiques de l’État partie sur les droits des femmes et l’égalité des sexes;

c)faute de données ventilées, il est impossible d’évaluer l’impact et l’efficacité des politiques budgétaires et des programmes qui tiennent compte de la problématique hommes–femmes visant à assurer aux femmes la jouissance de leurs droits humains sur un pied d’égalité avec les hommes.

Le Comité recommande à l’État partie  :

a) de renforcer les ressources humaines, techniques et financières ainsi que le pouvoir décisionnel des mécanisme s nationa ux de promotion de la femme ainsi que des groupes de travail sur les questions d’égalité des sexes dans l’ensemble des instances gouvernementales;

b) de mettre en place, sous les auspices du Ministère des finances, des mécanismes de contrôle afin d’ évaluer régulièrement les progrès accomplis dans la mise en œuvre des plans stratégiques de l’État partie sur les droits des femmes et l’égalité des sexes;

c) de concevoir un système très complet visant à améliorer la collecte de données ventilées par sexe afin d’ évaluer l’impact et l’efficacité de s politiques budgétaires et de s programmes tenant compte de la problématique hommes-femmes vis a nt à assurer aux femmes la jouissance de leurs droits humains les femmes sur un pied d’égalité avec les hommes.

Stéréotypes et pratiques préjudiciables

Le Comité prend note des activités de sensibilisation de l’État partie visant à éliminer les stéréotypes discriminatoires et les pratiques préjudiciables, mais s’inquiète de la persistance de stéréotypes sexistes et de normes culturelles néfastes, ainsi que de pratiques préjudiciables comme le versement d’une dot (barlake), les mariages d’enfants ou les mariages forcés, et la polygamie.

Le Comité prie l’État partie  :

a) d’adopter au plus vite une stratégie globale comportant des objectifs et des calendriers clairs et précis en vue d’éliminer les stéréotypes discriminatoires et l es pratiques préjudiciables comme le versement d’une dot ( barlake ), les mariages d’enfants ou les mariages forcés , et la polygamie;

b) de renforcer les programmes de sensibilisation à l’intention du personnel judiciaire, des autorités policières , d es enseignants, d es parents et d es notables ainsi que d es femmes et d es hommes, d es filles et d es garçons, en particulier dans les zones rurales, concernant les effets désastreux de s stéréotypes discriminatoires et de s pratiques préjudiciables qui empêchent les femmes de jouir de leurs droits humains par les femmes.

Violences à l’égard des femmes

Le Comité prend note des mesures prises par l’État partie pour faire connaître la loi contre la violence familiale adoptée en 2010. Il déplore toutefois :

a)la mise en œuvre insuffisante du plan national d’action contre la violence sexiste pour cause de manque de ressources;

b)l’existence de violences familiales, notammentl’inceste et les violences sexuelles à l’égard des filles, le faible nombre de cas dénoncés par les victimes,qui ont peur d’être montrées du doigt ou de faire l’objet de représailles, l’indifférence générale des femmes et des hommes, notamment des chefs de la communauté, devant le caractère criminel de la violence familiale;

c)la non-application du devoir de diligence consistant à prévenir tous les crimes commis contre les femmes et les filles et à offrir réparation aux victimes;

d)le faible nombre d’enquêtes, de poursuites et de condamnations dans les cas présumées de viol et de violence sexuelle, les délais d’attente avant qu’une affaire de violence familiale n’arrive devant les tribunaux et les interruptions fréquentes de procédure, la légèreté des peines prononcées contre les auteurs de violence familiale, l’absence d’ordonnances de protection et le recours excessif à la médiation dans le système traditionnel de justice concernant les affaires de violence familiale;

e)l’absence de dispositions juridiques pénalisant le viol conjugal et qualifiant le viol de crime grave;

f)la non-application,par manque de ressources, de la loi sur la protection des témoins adoptée en 2009 pour et la protection insuffisante assurée aux témoins d’actes de violence contre des femmes;

g)l’insuffisance de l’assistance médicale, psychologique et juridictionnelle fournie aux femmes victimes de violence et l’absence de foyers d’accueil;

h)les possibilités de formation restreintes pour les juges, les procureurs, les avocats, les fonctionnaires de police, le personnel des services de santé et les travailleurs sociaux en ce qui concerne l’application de la législation érigeant en infraction pénale la violence à l’égard des femmes et la fourniture aux victimes d’un traitement adapté à leur sensibilité en tant que femmes;

i)l’absence de données fiables sur les poursuites effectuées et les condamnations prononcées dans les affaires de violence à l’égard des femmes.

Rappelant ses recommandations n°  19 (1992) sur la violence faite aux femmes et n°  33 (2015) sur l’accès des femmes à la justice, le Comité prie l’État partie  :

a) de faire en sorte que le plan national d’action sur la violence sexiste (2015–2019) soit promptement adopté, mis en œuvre et financé de manière adéquate ;

b) de mieux faire connaître le caractère criminel de la violence familiale et de veiller à ce que les victimes aient des recours en dépit de leur dépendance sociale et économique à l’égard de leur mari ;

c) de prendre les mesures qui s’imposent pour prévenir, examiner et réprimer toutes les infractions commises contre des femmes et des filles, qu’il s’agisse de protagonistes étatiques ou autres , et offrir réparation ;

d) de s’assurer que les affaires de violence familiale font l’objet de poursuites et que les auteurs sont dûment punis  ; les femmes victimes de violence familiale sont encouragées à le signaler à la police et ne se retrouvent pas obligées par le système de justice officiel ou traditionnel de se contenter d’une médiation par  ; les retards en matière de poursuite sont réduits ; la sécurité des victimes en cas de suspension nécessaire  ; des ordonnances de protection sont délivrées et appliqués quand cela est nécessaire  ; et une réparation adéquate est accordée aux victimes;

e) de modifier la législation de façon à qualifier le viol d’infraction pénale grave et à fixer des peines appropriées pour les auteurs, et d’ériger en infraction pénale le viol conjugal dans les mariages civils, religieux et traditionnels ainsi que dans les unions de fait ;

f) de donner sans tarder la priorité à la pleine application de la loi sur la protection des victimes adoptée en 2009 afin que les témoins d’actes de violence contre des femmes puissent jouir d’une protection adéquate ;

g) de renforcer l’assistance accordée aux femmes victimes de violence et les mesures de réadaptation en leur faveur en mettant en place un système qui leur assure une prise en charge complète et en prenant des mesures pour leur garantir l’accès à l’aide judiciaire, à un soutien médical et psychologique, à des foyers d’accueil et à des services de conseil et de réadaptation ;

h) de renforcer les activités de sensibilisation et d’éducation à l’intention des hommes et des femmes, des chefs coutumiers, des travailleurs sanitaires et sociaux, avec le soutien de la société civile, en vue d’éliminer les préjugés relatifs à la violence à l’égard des femmes, ainsi que la formation des juges, procureurs, agents de police et autres fonctionnaires chargés d’appliquer la loi concernant la rigoureuse application des dispositions du droit pénal réprimant la violence faite aux femmes ;

i) d’établir un système unifié de collecte de données et de présentation de l’information en matière de violence sexiste.

Violences à l’égard des femmes dans des situations de conflit

et leur accès à la justice

Le Comité note que le Gouvernement indonésien et l’État partie s’emploient à établir ensemble un programme de guérison à l’intention des survivantes, en particulier celles ayant survécu au viol, à l’esclavage sexuel et à d’autres actes de violence sexuelle commis durant l’occupation indonésienne en 1999. Il déplore toutefois que celles qui ont survécu à ces violences sexuelles continuent de souffrir de stigmatisation sociale et d’ostracisme, générateurs d’un sentiment de « honte », et de connaître un accès limité aux services ou soins en matière de santé médicale, psychologique, procréative et mentale. Il s’inquiète du fait que les projets de loi visant à établir un programme national de réparation et un institut pour la mémoire, qui ont été soumis au Parlement national en juillet 2010, n’ont toujours pas été adoptés.

Le Comité exhorte l’État partie  :

a) à veiller à ce qu’il n’y ait pas d’ impunité pour le viol, l’esclavage sexuel et autres actes de violence sexuelle commis pendant l’occupation indonésienne en 1999 ;

b) à appliquer les recommandations des rapports de la Commission Accueil, Vérité et Réconciliation et de la Commission Vérité et Amitié relatives à la réparation due aux femmes et aux filles qui ont été victimes de violations pendant cette période ;

c) à adopter sans tarder les lois concernant le programme national de réparation et l’institut pour la mémoire , et s’assurer qu’elles sont conformes à la Convention et autres normes internationales , et à mettre en place un programme global de réparation transformative tenant compte de la discrimination et des violence à l’égard des femmes et des filles.

Traite des êtres humains et exploitation de la prostitution

Le Comité déplore:

a)que l’avant-projet de loi visant à prévenir, combattre et punir la traite des personnes, qui est à l’ordre du jour depuis 2009, et le projet de plan national d’action pour combattre la traite des personnes (2010–2013), conçus par le groupe de travail interorganisations sur la traite des personnes, n’aient pas encore été adoptés;

b) que l’on manque de données sur l’importance de la traite et l’exploitation de la prostitution et, en particulier, sur le nombre d’affaires concernant des femmes et des filles, et que les travaux de recherche approfondis sur la traite et l’industrie du sexe dans l’État partie soient jusqu’ici limités;

c)qu’il n’y ait pas eu en 2013–2014 de condamnation dans l’État partie,, pour le crime de traite et une seule à ce jour en 2015, que les efforts d’identification des victimes demeurent insuffisants et que les services de soutien prévus pour les victimes ne soient pas, de ce fait, sous-utilisés;

d) que les sanctions pour proxénétisme et prostitution forcée ne soient pas imposés avec toute la rigueur qu’il faudrait;

e)que le personnel judiciaire et les fonctionnaires de police chargés des affaires de traite aient peu de connaissances et de compétences en ce qui concerne la problématique hommes–femmes.

Le Comité recommande à l’État partie  :

a) d’adopter sans plus tarder le projet de loi visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes , et d’actualiser et adapter le projet de plan d’action national contre la traite d’êtres humains ;

b) d’effectuer une étude sur l’incidence de la traite des femmes et des filles et de la prostitution dans l’État partie, et de continuer de mettre à jour les données;

c) de renforcer les mécanismes permettant d’enquêter sur la traite et poursuive et punisse les responsables; de renforcer également les programmes d’identification, de prévention et de protection des victimes de la traite et de l’exploitation sexuelle, ainsi que l’assistance et l’appui judiciaire qui leur sont accordés, en particulier aux travailleuses migrantes, en leur assurant, par exemple, l’accès à des foyers d’accueil, à une assistance judiciaire, médicale et psychosociale et à des possibilités d’exercer d’autres activités génératrices de revenus;

d) de poursuivre et condamner les personnes qui exploitent la prostitution des femmes et des filles ;

e) de mieux former les agents de la force publique et les spécialistes juridiques aux questions d’égalité des sexes dans le cadre de la traite des personnes.

Participation à la vie politique et publique

Le Comité se félicite des mesures spéciales qui ont été prises au niveau national et local pour augmenter la représentation des femmes au Parlement national ainsi que dans les conseils de village et de sous-village, grâce aux taux fixés dans la loi n° 7/2011 de juin 2011 et la loi n° 3/2009 de juin 2009. Le Comité n’en demeure pas moins préoccupé par le fait que :

a)dans l’État partie, les femmes continuent à se heurter à des obstacles pour l’accès à des postes décisionnels, notamment la discrimination dans le recrutement, les stéréotypes et mentalités discriminatoires contre leur participation à la vie politique et publique, la faiblesse du soutien des partis politiques et des familles et le peu de confiance;

b)la représentation des femmes aux postes décisionnels de l’appareil gouvernemental demeure faible (20 %) et la proportion de femmes chefs de village est extrêmement faible (2 %).

Le Comité recommande à l’État partie  :

a) d’adopter des mesures, notamment des mesures temporaires spéciales , et de mettre en place des services de soutien visant à promouvoir l’égale représentation des femmes dans la vie politique et publique à tous les niveaux, notamment aux postes décisionnels, y compris des mesures spécifique pour éliminer les stéréotypes et la discrimination qui empêchent cette participation ;

b) d’adopter des mesures, y compris des mesures temporaires spéciales, pour accroître le pourcentage de femmes chefs de village au moyen de la nouvelle loi électorale, qui sera examiné par le Parlement national en 2016, et de mettre en place une formation ciblée à l’intention de s candidates actuelles et futures et des femmes qui exercent une fonction publique afin de leur apprendre à mener des campagnes politiques et de développer leurs capacités matière de leadership et de négociation .

Les femmes et la paix et la sécurité

Le Comité note qu’en 2013 l’État partie a entrepris de définir un plan d’action national pour mettre en œuvre la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité sur les femmes et la paix et la sécurité.

Le Comité prie l’État partie de faire diligence pour adopter le plan d’action national visant à mettre en œuvre la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité sur les femmes et la paix et la sécurité, en coopération avec les associations de femmes, et de prendre en considération la totalité du programme du Conseil de sécurité concernant les femmes et la paix et la sécurité , conformément aux résolutions 1820 (2008), 1888 (2009), 1889 (2009) 2122 (2013) et 2242 (2015), ainsi que l’observation générale n°  30 (2013) du Conseil de sécurité sur le rôle des femmes dans la prévention des conflits, dans les conflits et dans les situations d’après conflit.

Éducation

Le Comité se félicite du fait que l’État partie prend des mesures pour assurer aux filles l’égalité d’accès à l’éducation. Il se félicite aussi du fait qu’en 2011 le Ministère de l’éducation a lancé la politique de « tolérance zéro » contre les irrégularités administratives du secteur de l’éducation, la dissimulation des cas de violence sexuelle, les châtiments corporels et les autres formes de violence dans les écoles, mais regrette qu’elle ne soit pas véritablement mise en œuvre. Le Comité est préoccupé en outre par le fait que :

a)le taux d’abandon scolaire chez les filles demeure très élevé, se situant à près de 50 % entre le primaire et le secondaire, en raison des grossesses précoces, de violence sexiste et de l’absence d’installations sanitaires dans les écoles, notamment en milieu rural;

b)les efforts qui ont été faits pour réduire le pourcentage élevé de femmes analphabètes n’ont pas été suffisants;

c)la politique de réintégration permettant aux jeunes femmes de retourner à l’école à l’issue de leur grossesse, examinée depuis 2010, n’a pas encore été établie;

d)le programme de santé et de droits sexuels et procréatifs n’est pas très étendu et est conçu principalement du point de vue de la biologie sans tenir compte de la problématique hommes-femmes;

e)les sanctions prévues pour harcèlement et violence sexuels dans les écoles sont clémentes et que les enseignants coupables de violence sexuelle sont simplement transférés dans d’autres écoles;

f)l’on manque de données ventilées sur le nombre de cas signalés de violence sexuelle en milieu scolaire et les sanctions imposées aux coupables.

Le Comité recommande à l’État partie  :

a) de redoubler d’efforts pour retenir les filles et les jeunes femmes à l’école à tous les niveaux, notamment en mettant en place des installations sanitaires adéquates répondant à l’attente des deux sexes ainsi qu’un système sûr de transport scolaire , en leur assurant un cadre éducatif sans discrimination ni violence, en incitant davantage les parents à envoyer leurs filles à l’école, en éliminant les mariages précoces et forcés et en faisant prendre conscience aux collectivités , aux familles, aux élèves, aux enseignants et aux chefs communautaires , surtout aux hommes, de l’importance de l’éducation des filles et des femmes ;

b) d’ accélérer son action contre l’analphabétisme, notamment chez les femmes rurales, en mettant en œuvre des programmes d’alphabétisation dans les langues locales et en portugais ;

c) d’adopter et de mettre en œuvre sans plus tarder une politique officielle de réin tégration à l’intention des jeunes femmes et des filles qui ont quitté l’école pour cause de grossesse précoce et interdi s e l es mesures disciplinaires contre les filles enceintes , que ce soit dans les écoles publiques ou privées ;

d) de mettre en place des programmes complets sur la santé et les droits sexuels et procréatifs comme partie intégrante des programmes scolaires à tous les niveaux, de sorte que les filles et les garçons reçoivent des informations adaptées à leur âge sur les questions d’égalité des sexes, l’inégalité de s pouvoir s entre les sexes , l e s comportement s sexuel s responsable s, la prévention des grossesses précoces et l es maladies transmises sexuellement ;

e) de prendre des mesures pour encourager les femmes et les filles à signaler à la police l es actes de violence commis dans des établissements scolaires , de mettre en œuvre la politique de « tolérance zéro  » en ce qui concerne la violence sexuelle et le harcèlement sexuel à l’école et de veiller à ce que les auteurs, y compris les enseignants, soient dûment punis ;

f) de fournir dans son prochain rapport périodique des données ventilées sur le nombre de cas signalés de violence sexuelle commis dans les écoles et les sanctions prises contre les coupables.

Emploi

Le Comité constate avec préoccupation :

a)que même si le processus de ratification a bien avancé, l’État partie n’est toujours pas partie à la Convention de 1951 sur l’égalité de rémunération (n° 100) et la Convention de 1958 concernant la discrimination (emploi et profession) (n°111) de l’Organisation internationale du Travail;

b)qu’il existe une discrimination en matière de recrutement et d’avancement, les femmes devant être plus qualifiées que les hommes pour accéder aux mêmes postes décisionnels;

c)que la plupart des femmes sont totalement exclues de la population active, 78 % de celles qui en font partie étant engagées dans le secteur informel, sans couverture sociale appropriée, et 86 % des femmes et des filles handicapées n’ayant aucun accès à une formation professionnelle;

d)que l’on manque d’information sur le nombre de plaintes que le Conseil des relations du travail et le Conseil pour l’arbitrage des conflits du travail ont reçu de travailleuses depuis l’adoption du code du travail en 2012, sur leur nature et sur les sanctions prises contre les employeurs coupables de violations.

Le Comité recommande à l’État partie  :

a) de déposer au plus vite ses instruments de ratification de la Convention de 1951 sur l’égalité de rémunération ( n°  100) et de la Convention de 1958 concernant la discrimination (emploi et profession), ( n°  111) de l’Organisation internationale du Travail;

b) de mettre en place des mesures pour éliminer la discrimination en matière de recrutement et d ’avancement dont souffrent les femmes, notamment des mécanismes permettant de garantir et contrôle le respect de la législation en place dans le secteur public comme dans le secteur privé ;

c) de renforcer les programmes qui ont pour but de réduire le chômage des femmes et favorise leur accès à l’emploi formel et à la sécurité sociale, adopte une politique de l’emploi tenant compte de la problématique hommes-femmes qui mette l’accent sur les femmes handicapées, et contrôle les conditions de travail des femmes dans le secteur non structuré de l’économie, plus particulière dans l’agriculture, de sorte qu’elles disposent d’une protection sociale, notamment en matière de maternité ;

d) de rendre compte dans son prochain rapport périodique de l’application des dispositions du C ode du travail contre la discrimination, de l’écart de rémunération moyen entre les sexes et du nombre de plaintes déposées ces dernières années par les travailleuses auprès du Conseil des relations du travail et du Conseil d’arbitrage des relations de travail, de leur nature et des sanctions prises contre les employeurs coupables de violations.

Santé

Le Comité note que le plan stratégique national de la santé pour 2011-2030 présente la santématernelle et la santé juvénile comme les deux plus hautes priorités des programmes nationaux de santé. Il note aussi que l’État partie a établi un protocole médical des options en matière d’avortement. Il est toutefois préoccupé par le fait :

a)que l’amendement en date du 15 juillet 2009 de l’article 141 du Code pénal (décret-loi n° 19/2009) a encore réduit la possibilité d’avorter en toute sécurité et légalement en stipulant que l’avortement est légal uniquement quand il est nécessaire pour protéger la vie de la mère et que, dans ce cas, il doit être autorisé par un groupe de trois médecins, et en donnant la possibilité à d’autres professionnels de la santé de s’y opposer;

b)que le système d’information sanitaire ne rend pas compte du nombre de décès maternels et que le taux de mortalité maternelle dans l’État partie demeure le plus élevé de l’Asie de l’Est;

c)que les femmes souffrent de sous-nutrition et de carences en micronutriments;

d)que les femmes et les filles, notamment dans les régions reculées et rurales, ont beaucoup de mal à trouver des services de santé sexuelle et procréative, plus particulièrement des services qualifiés de soins périnatals, anténatals et postnatals, ainsi que des renseignements en matière de planification de la famille, et que les soins médicaux d’urgence demeurent extrêmement limités en milieu rural.

Le C omité recommande que l’État partie  :

a) modifie l’article 141 du C ode pénal afin de légaliser l’avortement en cas de viol, d’inceste, de danger pour la santé de la femme enceinte et d’atteinte grave à la santé du fœtus, et de supprimer l’obligation d’obtenir l’autorisation d’un groupe de trois médecins ;

b) envisage d’utiliser le Guide technique du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme concernant l’application d’une approche fondée sur les droits de l’homme à la mise en œuvre des politiques et des programmes visant à réduire la morbidité et la mortalité maternelles évitables (A/HRC/21/22) et redouble d’efforts pour réduire la mortalité maternelle en offrant des services de santé sexuelle et procréative adéquats, notamment l’accès aux services anténatals, natals et postnatals, en prévenant et en traitant l’anémie , et en faisant en sorte que l es décès maternels soient déclar és , ces cas faisant obligatoirement l’objet d’un examen , et en créant un comité interministériel de haut niveau chargé de contrôler l’examen des décès maternels et la suite donnée ;

c) renforce les mesures visant à réduire la malnutrition et les carences en micronutriments, en privilégiant les adolescentes, les femmes enceintes et les enfants , et établir des mécanismes pour assurer le suivi des allocations financières et des dépenses effectives d es ministères de tutelle et d’ autres institutions d’État ;

d) renforce les mesures de sorte que toutes les jeunes femmes, les adolescentes et les femmes rurales aient accès à des services de santé sexuelle et procréative ainsi qu’à des soins de santé d’urgence, et d’améliorer la qualité des services de planification de la famille, de sensibilisation et d’orientation, notamment dans les zones rurales, de même qu e l’accès à des information s sur la santé sexuelle et procréative confidentielles, adaptées à l’âge et aux jeunes et tenant compte de leurs besoins , à l’intention des femmes et des filles, quelle que soit leur situation conjugale.

Avantages économiques et sociaux et autonomisation économique des femmes

Le Comité se félicite de l’engagement pris par l’État partie de donner priorité à l’autonomisation économique des femmes, notamment par l’accès au crédit, leur participation à des programmes d’investissement et leur présence dans les secteurs productifs de l’économie. Il reste toutefois préoccupé par le fait que:

a)les investissements très bas dans les programmes de protection sociale destinés aux ménages les plus pauvres ainsi que les soins que requièrent les personnes handicapées au sein de la famille ont un effet disproportionné sur les femmes;

b)le programme « bolsa da mae » (porte-monnaie de la mère) perd de l’importance par rapport au régime de pension des anciens combattants, qui reçoit les allocations budgétaires les plus élevées;

c)l’autonomisation économique des femmes n’est pas suffisamment intégrée aux stratégies globales de réduction de la pauvreté et de développement de l’État partie et que l’accès des femmes au crédit, y compris au micro crédit, demeure insuffisant.

Le Comité recommande à l’État partie  :

a) de poursuivre ses efforts pour transformer le régime provisoire de sécurité sociale en un système universel et adopte des mesures spécifiques pour garantir une protection sociale adéquate à toutes les femmes, en particulier aux femmes et aux filles qui prennent soin des personnes handicapées de la famille et qui ont été déplacées pour cause de violence familiale ;

b) d’augmenter la part du budget national allouée au programme « bolsa da mae  » afin de combler l’écart avec d’autres programmes destinés aux hommes, ainsi que l’allocation mensuelle donné aux ménages qui ont une femme à leur tête ;

c) d’adopter une stratégie cohérente d ’autonomisation économique des femmes, qui s’inscrive dans les stratégies globales de développement de l’État partie, s’accompagne d’indicateurs adéquats et de mécanismes de contrôle et comprenne comme élément clé l’accès au crédit, aux marchés, à la terre et à d’ autres ressources productives , sur un pied d’égalité avec les hommes.

Femmes rurales

Le Comité constate avec inquiétude que :

a)l’ensemble des trois lois foncières –la loi sur l’expropriation, le fonds de financement de l’immobilier et le régime spécial de définition des droits de propriété - n’a toujours pas été adopté depuis 2014 et que si cette situation se poursuit, les inégalités pourraient se creuser davantage, entraînant ainsi de nouvelles violations des droits des femmes;

b)les femmes rurales n’ont qu’un accès limité à la terre et à d’autres ressources du fait des obstacles juridiques et socioculturels à leur droit d’hériter, et n’ont guère voix au chapitre concernant l’utilisation de la terre;

c)les grands projets d’infrastructures rurales donnant lieu à des expulsions, des acquisitions et des déplacements violent les droits des femmes à une compensation et une restitution des terres équitables;

d)les femmes des zones rurales continuent à n’avoir guère, ou pas du tout, accès aux soins d’un personnel compétent au moment de l’accouchement, de même que durant la période anténatale et postnatale, ainsi qu’aux services de planification de la famille, à la justice, à l’éducation, à une eau non polluée, à l’électricité, à la terre et aux projets générateurs de revenus.

Le C omité recommande à l’État partie  :

a) d’ adopte r sans plus tarder l’ensemble des trois lois foncières et de faire en sorte que les femmes rurales aient le même accès à la terre que les hommes, notamment en les sensibilisant à l’importance de l’égalité d’accès pour les femmes à la terre, comme facteur de développement et pour promouvoir l’égalité de fait des femmes et des hommes, et en encourageant l’établissement de titres de propriété commune ou uniquement pour les femmes ;

b) de faire en sorte que le nouveau régime juridique régissant la propriété foncière soit en parfaite conformité avec le cadre juridique international relatif aux droits de l'homme concernant les expulsions , et que les femmes obtiennent une indemnisation juste et équitable, notamment la restitution des terres sur un pied d’égalité avec les hommes ;

c) de veille r à ce que les intérêts des communautés locales, y compris les femmes rurales, soient protégés lors de l’élaboration de politiques foncières et de l’attribution des terres, y compris par un véritable processus consultatif ;

d) de faire en sorte que les femmes rurales aient accès aux services de base et aux infrastructures, tels que soins de santé adéquats, éducation, transports publics, alimentation, eau et assainissement, possibilités génératrices de revenus et protection sociale, de même qu’à des ressources et à des technologies agricoles dans des conditions d’égalité avec les hommes et avec les femmes vivant en zone urbaine.

Femmes handicapées

Le Comité note que l’État partie a une politique nationale sur les droits des personnes handicapées, mais il constate avec préoccupation que cette politique n’est ni véritablement mise en œuvre nicontrôlée. Il constate également avec inquiétude que l’adoption du plan national d’action en faveur des personnes handicapées se fait toujours attendre. Par ailleurs, il s’inquiètedu fait que les femmes et les filles handicapées continuent d’être marginalisées, montrées du doigt, exposées à des actes de violence et à de multiples formes de discrimination en raison de leur sexe et de leur handicap, notamment concernant l’accès à l’éducation, à l’emploi, aux soins de santé et à la justice.

Le Comité recommande à l’État partie  :

a) de prendre des mesures pour éliminer la discrimination à l’égard des femmes handicapées, y compris par des campagnes nationales de sensibilisation ainsi que par des programmes de renforcement des capacités d es spécialistes qui travaillent avec elles, comme les enseignants, le personnel soignant et les travailleurs sociaux, les membres de la police et du système judiciaire, afin de prévenir la discrimination à l’égard des filles et des femmes qui souffrent d’un handicap ;

b) de prendre des mesures, y compris des mesures temporaires spéciales, pour assurer aux femmes et aux filles handicapées une éducation ouverte à tous et une formation professionnelle , et empêcher qu’elles soient discriminées en matière de recrutement ;

c) d’améliorer l’accès à tous les équipements et services de santé, notamment l es services sexuels et procréatifs, et élargi ssent le champ des services de santé spécialisés pour les femmes et les filles atteintes d’un handicap ;

d) d’adopter des mesures pour réduire l’exposition d es femmes et d es filles atteintes d’un handicap aux actes de violence et de veiller à ce que celles qui en sont victimes aient un accès adéquat à une assistance médicale, psychosociale et juridique , à des foyers et à des programmes de protection et d’indemnisation à l’intention des victimes et des témoins.

Mariage et relations familiales

Le Comité note avec inquiétude :

a)que l’adoption du projet de code concernant l’enregistrement des actesd’état civil a pris du retard;

b)que l’âge minimum du mariage est fixé à 17ans pour les garçons et pour les filles et que les garçons et les filles de 16ans peuvent contracter mariage avec le consentement de leurs parents;

c)que le système de divorce fondé sur la faute inscrit dans le Code civil désavantage les femmes, notamment celles qui sont victimes de violence familiale;

d)que l’article1494 du Code civil dispose qu’en cas de divorce ou de décès, un homme peut se remarier au bout de 180jours alors qu’une femme doit attendre 300jours;

e)que le Code civil ne reconnaît pas les relations hétérosexuelles de fait alors que la très grande majorité des femmes sont dans des unions de fait;

f)que les systèmes traditionnels d’héritage continuent à exclure les femmes de la propriété foncière;

g)que les mariages traditionnels ou religieux sont rarement inscrits à l’état civil, et donc, en cas deséparation ou de décès la femme voit ses droits à l’héritage ou à la propriété lésés.

Le Comité recommande à l’État partie:

a) d’adopter sans tarder le code concernant l’enregistrement des actes d’ é tat civil et de s’assurer qu’il est en parfaite conformité avec la Convention ;

b) de porter l’âge minimum d u mariage à 18 ans pour les filles et les garçons , conformément à la recommandation générale conjointe n°  31 du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et n°  18 du Comité des droits de l’enfant sur les pratiques préjudiciables (2014) ;

c) d’adopter un système de divorce sans faute et de modifier en conséquence le Code civil ;

d) de réviser à prioritaire dans des délais clairement définis , les dispositions discriminatoires existantes relatives au mariage et aux relations familia les afin de les rendre pleinement conformes aux articles 2 et 16 de la Convention et donc supprimer de l’article 1494 du Code civil l’obligation d’observer une période de viduité ou prévoir une période identique pour les hommes et les femmes ;

e) de modifier le Code civil de sorte que l es unions de fait soient reconnus et que les droits des femmes à la terre et aux biens soient protégés dans ces unions;

f) de veiller à ce que le système traditionnel ne prenne pas le pas sur les lois et les politiques foncières pour l’administration pratique des terres;

g) de faire en sorte que tous les mariages traditionnels et religieux soient inscrits à l’état civil.

Modification du paragraphe 1 de l’article 20 de la Convention

Le Comité encourage l’État partie à accepter, dès que possible, la modification apportée au paragraphe 1 de l’article 20 de la Convention concernant son temps de réunion.

Déclaration et Programme d’action de Beijing

Le Comité demande à l’État partie de s’appuyer sur la Déclaration et le Programme d’action de Beijing dans ses efforts de mise en œuvre des dispositions de la Convention.

Programme de développement durable à l’horizon 2030

Le Comité demande qu e la mise en œuvre du programme de développement durable à l’horizon 2030 se fasse dans le respect d’une véritable égalité des sexes , conformément au x dispositions de la Convention .

Diffusion

Le Comité rappelle l’obligation qu’a l’État partie d’appliquer de façon systématique et continue les dispositions de la Convention. Il encourage vivement l’État partie à accorder une attention prioritaire à l’application des présentes observations finales et recommandations d’ici à la présentation du prochain rapport périodique. Il demande donc que ses observations finales soient diffusés en temps opportun, et dans les langues officielles de l’État partie, aux institutions d’État pertinentes à tous les niveaux (national, régional, local), en particulier au Gouvernement, aux ministères, au Parlement national et au pouvoir judiciaire, afin d’en assurer l’application intégrale. Il encourage l’État partie à collaborer avec toutes les parties prenantes, comme les organisations patronales, les syndicats, les organisations de défense des droits de l’homme et les organisations féminines, les universités, les instituts de recherche et les médias. Il recommande en outre que c es observations finales soient diffusées de manière appropriée au niveau locale, pour en permettre l’ application. De plus, le Comité demande à l’État partie de continuer de diffuser auprès de tous les intéressés la Convention, le Protocole facultatif s’y rapportant et l a jurisprudence concernant celle-ci , ainsi que s es recommandations générales.

Assistance technique

Le Comité recommande à l’État partie de lier l’application de la Convention à ses efforts de développement et de se prévaloir à cet égard de l’assistance technique régionale ou internationale dans ce domaine.

Ratification d’autres traités

Le Comité note que l'adhésion de l'État partie aux neuf principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme permettrait aux femmes de jouir de leurs droits fondamentaux dans tous les aspects de la vie. Il encourage donc l'État partie à envisager de ratifier la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées et la Convention relative aux droits des personnes handicapées, à laquelle il n'est pas encore partie.

Suite donnée aux observations finales

Le Comité invite l’État partie à fournir par écrit, dans un délai de deux ans, des informations sur les mesures qu’il aura prises pour donner suite aux recommandations figurant aux paragraphes 13 a) et b) et 35 a), b) et c) ci-dessus.

Élaboration du prochain rapport

Le Comité invite l’État partie à remettre son quatrième rapport périodique en novembre 2019.

Le Comité invite l'État partie à suivre les directives harmonisées pour l’établissement de rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, englobant le document de base commun et les rapports pour chaque instrument (HRI/GEN/2/Rev.6 , chap. I).