Nations Unies

CEDAW/C/TUR/CO/6/Add.1

Convention sur l ’ élimination de toutes les formes de discrimination à l ’ égard des femmes

Distr. générale

16 octobre 2012

Français

Original: anglais

Anglais, espagnol et français seulement

Comité pour l ’ élimination de la discrimination à l ’ égard des femmes

Cinquante-quatrième session

11 février-1er mars 2013

Observations finales du Comité pour l’éliminationde la discrimination à l’égard des femmes

Turquie

Additif

Renseignements communiqués par le Gouvernement turcsur la suite donnée aux observations finales du Comité (CEDAW/C/TUR/CO/6) *

1.En 2010, la Turquie a soumis son sixième rapport périodique au Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et a dépêché une délégation, dirigée par la Ministre d’État en charge de la condition féminine et de la famille, qui a présenté ledit rapport aux membres du Comité, conformément aux obligations énoncées dans la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, à laquelle la Turquie est partie depuis 1986.

2.Le Comité a évalué le rapport et formulé des observations finales à son sujet. Au paragraphe 48 de ses observations finales, il a demandé à la Turquie de lui fournir, dans un délai de deux ans, des renseignements écrits sur les mesures prises pour mettre en œuvre des recommandations figurant aux paragraphes 17 et 23.

3.Donnant suite à cette demande de «renseignements écrits», la Direction générale de la condition féminine, qui relève du Ministère de la famille et des politiques sociales de la République de Turquie, a rédigé le présent rapport, qui décrit l’action menée afin de mettre en œuvre les recommandations figurant aux paragraphes 17 et 23 des observations finales formulées par le Comité, le 30 juillet 2010 (CEDAW/C/TUR/CO/6). Pour établir son rapport, la Direction générale a recueilli les avis de représentants des institutions et des organismes publics pertinents, du monde universitaire et des organisations non gouvernementales qui œuvrent en faveur des droits fondamentaux de la femme.

A.Actions menées concernant l’interdiction du port du foulard(par. 17 des observations finales)

4.On trouvera ci-après des renseignements statistiques sur la situation des femmes qui portent le foulard, notamment en ce qui concerne l’emploi, et sur la réglementation relative au port du foulard à l’école primaire et secondaire, ainsi que dans l’enseignement supérieur.

1.Établissement de statistiques sur le port du foulard

5.Bien qu’il n’existe pas de loi régissant précisément le port du foulard au travail, à l’école ou encore dans la vie politique et publique en Turquie, des problèmes liés aux règles en vigueur se sont posés dans la pratique. L’interdiction du port du foulard correspondant à une certaine interprétation de facto des règles, aucun système d’enregistrement officiel ne permet d’en déterminer l’impact; les mêmes difficultés se posent en ce qui concerne la collecte de données officielles.

6.Si, au niveau officiel, il n’a pas été établi de données statistiques, en raison des connotations sociales de la question, en revanche, quelques études ont été réalisées par des organisations non gouvernementales.

7.Dans une étude intitulée «L’interdiction du port du foulard et la discrimination: port du foulard et carrière professionnelle», publiée en 2010 par la Fondation turque pour les études économiques et sociales (TESEV), Dilek Cindoğlu a recensé les problèmes, les discriminations et les obstacles auxquels se heurtent les femmes dans leur vie professionnelle en raison de l’interdiction du port du foulard. La Fondation a ensuite publié une étude en 2012, intitulée «L’interdiction du port du foulard − le point sur la situation», qui, faisant suite au rapport de 2010, vise à recenser les problèmes et à proposer des solutions pour venir à bout de la discrimination et des conséquences de l’interdiction du port du foulard dans les secteurs publics et privés, ainsi que dans la vie quotidienne.

8.Les répercussions du traitement réservé aux femmes qui portent le foulard sur le statut de la femme ont été examinées à la lumière des données présentées par Fatma Benli dans son article intitulé «Situation générale de la femme en Turquie et influence de l’interdiction du port du foulard sur l’index de l’égalité homme-femme», qui est publié sur le site Web du Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (http://www.osce.org/ odihr/39070).

9.L’Association éducative, culturelle et solidaire Hazar a réalisé une étude sur le terrain intitulée «La vérité voilée de la Turquie» en 2007. Du 5 janvier au 15 février 2007, 1 112 sujets, issus de neuf provinces (Adana, Ankara, Bursa, Diyarbakır, Erzurum, Istanbul, Izmir, Konya et Samsun), ont été interviewés lors d’entretiens de face à face et ont répondu à un questionnaire. L’objectif poursuivi était d’étudier les dimensions sociales et économiques de l’interdiction du port du foulard et d’analyser ses conséquences sur la situation de la femme.

10.Les résultats de ces études ne suffisant pas à expliquer le problème dans toutes ses dimensions, le Ministère de la famille et des politiques sociales et l’Institut turc de la statistique (TUIK) ont réalisé une étude commune sur l’interdiction du port du foulard. Cette étude a été formulée de manière à inclure parmi les sujets étudiés des étudiantes universitaires, des professeurs et des fonctionnaires, afin d’obtenir des données pertinentes. Ainsi, pour la première fois en Turquie, sous le soixante et unième Gouvernement, des mesures ont été prises pour révéler les conséquences de l’interdiction du port du foulard, qui est l’un des domaines de préoccupation évoqués dans les observations finales faites par le Comité concernant le sixième rapport périodique de la Turquie.

11.Des courriers ont alors été échangés et les ministères et les universités ont été officiellement priés de recueillir des données devant servir à une première étape de définition de l’échantillon de recherche. Les données finales à analyser seront collectées par l’Institut turc de la statistique, qui utilisera à cette fin des méthodes qualitatives de recherche. Les résultats de l’étude seront décrits dans le septième rapport périodique que la Turquie compte soumettre au Comité en 2014.

12.De son côté, la Fondation turque de recherche sur la politique économique a réalisé une enquête sur «Les incidences économiques de l’interdiction du port du foulard». Dans le cadre de cette enquête, trois questionnaires distincts ont été mis au point: le premier s’adresse à des groupes de femmes portant ou non le foulard, travailleuses ou ménagères, le deuxième à des hommes salariés dont la femme porte ou non le foulard, et le troisième à des dirigeants d’entreprises privées. Les résultats de cette enquête seront, eux aussi, évalués par l’Institut turc de la statistique et présentés au Comité par la Turquie dans son septième rapport périodique.

2.Établissements de l’enseignement primaire et secondaire

13.En Turquie, le port du foulard n’est autorisé ni à l’école primaire ni à l’école secondaire. Il n’existe qu’un réseau d’enseignement en Turquie, administré par le Ministère de l’éducation nationale. Le règlement du 22 juillet 1981 relatif aux «Normes vestimentaires des étudiants et des fonctionnaires travaillant dans les écoles dépendant du Ministère de l’éducation nationale et d’autres ministères» prévoit que «les élèves ne peuvent avoir la tête couverte dans l’enceinte de l’établissement scolaire» et que «les élèves peuvent porter un foulard durant les cours d’éducation coranique dans les écoles supérieures Imam Hatip» qui dispensent des cours d’éducation religieuse.

14.Certains pensent que les filles quittent l’école plus vite que les garçons à cause de la disposition qui leur interdit de porter le foulard dans l’enceinte des établissements scolaires et pourtant, le fossé entre filles et garçons à l’école primaire s’est considérablement réduit, grâce aux mesures prises récemment en matière d’éducation. D’après les données recueillies pour l’année scolaire 2011/12, le taux de scolarisation des garçons est de 98,77 % contre 98,56 % pour les filles.

3.Établissements de l’enseignement supérieur

15.La situation des étudiantes qui portent un foulard dans les établissements de l’enseignement supérieur a changé depuis que la Turquie a présenté son rapport au Comité en 2010. Dans une lettre officielle du Conseil de l’enseignement supérieur en date du 23 juillet 2010, il est indiqué que «nul ne peut être expulsé du cours par l’enseignant en raison de sa tenue vestimentaire».

16.La règle qui voulait que la photographie à soumettre dans le dossier de candidature à l’admission à l’enseignement supérieur devait correspondre à certaines conditions (tête découverte, visage de face, facilement reconnaissable, photo prise dans les six derniers mois) a également disparu du manuel relatif aux quotas et à l’inscription dans l’enseignement supérieur, publié le 5 juillet 2011 par le Centre de sélection et de placement des étudiants.

17.L’article 17 (annexe: 25/10/1990 − art.3670/12) de la loi relative à l’enseignement supérieur, applicable dans toutes les universités du pays en 2012, prévoit que «chacun a le droit de s’habiller comme il l’entend dans les établissements de l’enseignement supérieur pourvu qu’il ne contrevienne pas aux lois en vigueur»; cette disposition concerne toutes les tenues vestimentaires. Depuis lors, on a constaté une diminution du nombre de plaintes présentées par des particuliers auprès de la Commission des droits de l’homme de la Grande Assemblée nationale de Turquie et du Bureau des droits de l’homme relevant du Premier Ministre. On peut donc dire que l’interdiction du port du foulard a été levée à l’université.

18.La levée de cette interdiction dans les établissements de l’enseignement supérieur devrait entraîner une amélioration de la situation des femmes en ce qui concerne l’accès à l’instruction.

4.Port du foulard et marché du travail

19.Les statistiques relatives à l’emploi des femmes et à leur présence sur le marché du travail en Turquie révèlent que les femmes qui travaillent sont moins nombreuses que les hommes et qu’elles sont beaucoup plus touchées par le chômage et la pauvreté. La situation de l’emploi des femmes en Turquie n’est pas satisfaisante. Selon les données de 2011 présentées par l’Institut turc de la statistique, le taux de participation des femmes au marché du travail est de 28,8 %, leur taux d’emploi de 25,6 % et leur taux de chômage de 11,3 %.

20.Les études réalisées sur le sujet citent diverses raisons pour expliquer le niveau peu élevé de participation des femmes à la vie économique.

21.Lorsque, dans le contexte de l’urbanisation, les femmes des zones rurales, qui accomplissaient traditionnellement un travail familial non rétribué, quittent les campagnes et migrent vers la ville, elles trouvent difficilement un emploi, parce que la nature du marché du travail y est différente. Comme elles ne possèdent pas le niveau scolaire et les qualifications professionnelles requis en ville, elles disparaissent du marché du travail ou travaillent dans l’économie parallèle, où elles sont peu rémunérées.

22.L’actuelle interdiction du port du foulard est citée comme l’une des raisons de la faible présence des femmes sur le marché du travail, mais il n’existe aucune donnée statistique officielle sur la question, à l’exception de quelques rares études (voir la section consacrée aux statistiques sur le port du foulard).

23.La tenue vestimentaire des fonctionnaires est réglementée à l’annexe de l’article 19 de la loi no 657 relative à la fonction publique. Il y est spécifié que les fonctionnaires doivent se conformer à la tenue vestimentaire prévue par la loi, les arrêtés d’application et les directives. Des sanctions disciplinaires sont prévues à l’article 125 de la même loi, qui dispose que «l’atteinte au code vestimentaire» fait partie des actes et comportements entraînant un rappel à l’ordre.

24.En ce qui concerne le secteur privé, certaines organisations non gouvernementales estiment que, malgré le fait qu’aucune loi ne traite de cette question, le nombre d’emplois que peuvent occuper les femmes qui portent le foulard est limité.

25.L’étude relative à l’interdiction du foulard, intitulée «La vérité voilée de la Turquie», évoque le traitement injuste subi par les travailleurs qui portent le foulard. D’après cette recherche, 32 % de ces femmes n’avaient jamais travaillé auparavant; 20,8 % d’entre elles disent qu’elles n’avaient pas pu trouver d’emploi à cause du foulard; 17,8 % indiquent qu’elles sont forcées d’occuper un poste sans contact avec le public; 17,1 % disent qu’elles ont dû accepter des postes ne correspondant pas à leur profession; 12,7 % sont moins bien payées; 10,8 % pensent que leur productivité a baissé à cause de l’interdiction du port du foulard; 10,2 % indiquent qu’elles ont été licenciées de leur emploi; 6,7 % disent qu’elles ont été privées du droit de choisir un emploi; 6 % indiquent qu’elles ont dû porter une perruque; 3,2 % disent qu’elles n’ont pas pu faire carrière; 2,3 % indiquent qu’elles ont été soumises à des sanctions ou qu’elles ont perdu leur emploi; 1,9 % indiquent qu’elles ont dû enlever leur foulard; 1,3 %, qu’elles ont dû quitter leur emploi; 1,1 %, qu’elles ont dû occuper des postes de travail où le port du foulard n’était pas un problème; et 1,4 %, qu’elles n’ont jamais eu de problème à cause de l’interdiction du port du foulard.

26.Comme il a été indiqué plus haut, les recherches menées sont limitées par certaines restrictions, qui ne permettent pas de dresser un tableau exhaustif de la situation. On disposera de données officielles lorsque les études qui seront menées par l’Institut turc de la statistique et la Fondation turque de recherche sur la politique économique seront achevées.

B.Législation relative à la lutte contre la violence à l’égard des femmes (par. 23 des observations finales)

27.Pour l’État turc, la violence à l’égard des femmes est une discrimination et une atteinte aux droits de l’homme; l’État a donc accordé toute l’attention voulue à ce problème en préparant le rapport qu’il a soumis au Comité. Dans le cadre de l’application du «principe de tolérance zéro concernant les violences faites aux femmes», un vaste ensemble de mesures ont été prises, grâce à l’action de toutes les institutions et tous les organismes publics et des organisations non gouvernementales, coordonnée par la Direction générale de la condition féminine, au Ministère de la famille et des politiques sociales. L’application de ces mesures est devenue l’une de nos priorités politiques.

1.Renforcement de la législation

a)Modification de la Constitution

28.Le principe de l’égalité des sexes était déjà explicitement établi dans la Constitution, mais deux dispositions le concernant ont été ajoutées en 2004 et en 2010. En 2004, la phrase suivante a été ajoutée à l’article 10 de la Constitution: «Hommes et femmes ont des droits égaux et l’État est le garant de cette égalité dans la pratique». Ensuite, en 2010, il a été précisé que: «les mesures à prendre à cette fin ne peuvent être considérées comme contraires au principe d’égalité». L’État a été investi d’une responsabilité qui va au-delà de la prévention de la discrimination fondée sur le sexe; en effet, il est tenu de formuler des stratégies, d’adopter des règlements et de prendre des mesures afin d’assurer l’égalité des droits et des chances aux deux sexes. En disposant que «les mesures à prendre ne peuvent pas être considérées comme contraires au principe d’égalité», la Constitution prévoit la possibilité de prendre des mesures de discrimination positive. La Turquie est l’un des rares pays à avoir introduit une disposition d’une nature aussi révolutionnaire dans sa Constitution.

b)La Convention d’Istanbul

29.La Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (Convention d’Istanbul) a été adoptée le 7 avril 2011 à Strasbourg par le Comité des ministres du Conseil de l’Europe et ouverte à la signature à Istanbul le 11 mai 2011. À ce jour, elle a été signée par 18 États et la Turquie l’a ratifiée le 24 novembre 2011. Au niveau interne, elle est entrée en vigueur le 8 mars 2012, après publication au Journal officiel, et les instruments de ratification ont été déposés au Conseil de l’Europe le 14 mars 2012, la Turquie devenant ainsi le premier État partie à la Convention d’Istanbul.

c)Loi no 6284 relative à la protection de la famille et à la prévention de la violenceà l’égard des femmes

30.La loi no 6284 relative «à la protection de la famille et à la prévention de la violence à l’égard des femmes» a été élaborée par le Ministère de la famille et des politiques sociales; elle vise à élargir la portée de la loi no 4320 relative à la protection de la famille, à remédier aux faiblesses que présentait son application et à procéder aux modifications législatives exigées par la Convention d’Istanbul.

31.Élaborée à l’issue d’une vaste consultation des procureurs chargés de la question de la violence à l’égard des femmes, des juges aux affaires familiales, des représentants des organisations non gouvernementales de femmes, des responsables du barreau de chacune des 16 provinces possédant une municipalité métropolitaine et après l’examen de l’avis écrit de tous les organismes et institutions publics pertinents, et des organisations non gouvernementales, la nouvelle loi a été adoptée par la Grande Assemblée nationale turque à l’unanimité le 8 mars 2012 et est entrée en vigueur après publication au Journal officiel no 28239 du 20 mars 2012.

32.La nouvelle loi no 6284 a entraîné des modifications tenant compte des points soulignés au paragraphe 23 des observations finales du Comité: la loi no 4320 a été revue et renforcée; toutes les formes de violence à l’égard des femmes ont été interdites; les femmes et les filles victimes de violence ont désormais accès immédiatement à des mécanismes d’appui et de protection, dont l’ordonnance de protection; les auteurs d’actes de violence sont poursuivis et sanctionnés; des dispositions spéciales ont été ajoutées sur la mise en place de programmes de formation et de campagnes de sensibilisation à l’intention des fonctionnaires, des magistrats, des agents des forces de l’ordre et des agents sanitaires, pour faire en sorte qu’ils participent à la lutte contre la violence et qu’ils assurent un appui approprié aux victimes. Un certain nombre d’initiatives ont aussi été lancées pour mettre en place des services complémentaires de conseil et d’appui, notamment des centres de prévention et de contrôle de la violence et des centres d’hébergement pour femmes, où la loi garantit l’hébergement temporaire des victimes de la violence; il est précisé qu’au besoin, celles-ci peuvent aussi être accueillies dans les centres récréatifs publics. La loi prévoit également l’établissement d’une coopération entre les centres de prévention et de surveillance de la violence et les organisations non gouvernementales.

33.Les mesures prévues dans la loi no 6284 relative à la protection de la famille et à la prévention de la violence à l’égard des femmes sont les suivantes:

a)La loi couvre tous les membres de la famille et ne permet aucune forme de discrimination fondée sur la situation matrimoniale, en application de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes; elle a donc une plus grande portée pratique que la loi no 4320. L’objectif principal visé par la nouvelle loi est de «définir la réglementation relative aux mesures à prendre pour protéger les femmes victimes ou victimes potentielles de la violence, ainsi que les enfants et les membres de la famille, ou encore les victimes de harcèlement, et de prévenir la violence». Les principes d’exécution de la loi et des services connexes ont aussi été définis;

b)La notion de «violence à l’égard des femmes» a été définie, conformément à la Convention d’Istanbul; elle inclut la violence physique, verbale, sexuelle, économique ou psychologique;

c)Les mesures de prévention et de protection à prendre concernant la victime et l’auteur effectifs ou potentiels des actes de violence sont précisées dans la loi;

d)Les autorités locales sont habilitées à émettre des ordonnances de protection visant notamment l’hébergement et l’aide financière temporaire, l’appui psychologique, professionnel, juridique ou social, la protection ex officio temporaire, ou encore l’accès aux services de garderie; de plus, il a été décidé que, pour permettre une intervention rapide, l’ordonnance de protection (hébergement et protection temporaire) peut aussi être délivrée par un responsable de la police locale et aucun document ou élément de preuve ne peut être demandé durant la période couverte par ladite ordonnance;

e)La loi prévoit qu’en cas de danger de mort, le juge peut délivrer une ordonnance de protection prévoyant le changement de lieu de travail et de résidence de la personne protégée, la protection de ses droits sur le domicile familial, ainsi que le changement de ses documents d’identité et de tout autre document d’information personnelle, dans le cadre de la loi relative à la protection des témoins;

f)Les ordonnances de prévention qui peuvent être délivrées par le juge contre l’auteur effectif ou potentiel portent sur les points suivants: interdiction de commettre tout acte comportant des menaces, des insultes, du mépris ou de l’humiliation; interdiction de pénétrer au domicile familial, le logement étant attribué à la personne protégée; interdiction de s’approcher de la ou des personne(s) protégée(s), d’endommager les effets personnels et les biens du ménage; si celui qui est visé par l’ordonnance détient une arme ou occupe une fonction publique qui exige le port de l’arme, il doit remettre celle-ci à l’autorité pertinente; il peut être traité voire hospitalisé s’il est alcoolique ou toxicomane. La loi prévoit qu’en cas d’urgence, les ordonnances de prévention peuvent aussi être délivrées par les responsables de la police locale, mais qu’elles doivent être soumises au juge, pour approbation, dans les vingt-quatre heures;

g)Si l’auteur des violences est le seul soutien de famille, le juge peut également prendre des décisions au cas par cas concernant la garde, la tutelle, la pension alimentaire et les droits de communication personnelle, même si la victime des violences ne l’exige pas. Si l’époux qui doit payer la pension alimentaire est couvert par la sécurité sociale, la pension sera prélevée ex officio de son salaire sans que la personne protégée doive en faire la demande;

h)S’il y a une enquête, des poursuites ou une condamnation liées au port d’arme, ou à la toxicomanie, les dispositions pertinentes de mise à l’épreuve restent applicables;

i)La loi prévoit que quiconque a une raison fondée de croire qu’un acte violent est commis peut alerter les autorités et la police; tout fonctionnaire qui reçoit une telle information est tenu d’en informer les autres fonctionnaires compétents, qui doivent sans tarder prendre les mesures opportunes;

j)La période fixée dans l’ordonnance de protection ou de prévention que délivre le juge, à la demande du Ministère, de la police, du ministère public ou encore de la victime, est de six mois à la première infraction. Néanmoins, la période fixée et l’ordonnance délivrée peuvent être modifiées, étendues ou prolongées, en fonction de la violence ou du risque de violence;

k)Il ne doit pas être produit d’élément de preuve ou de document pour obtenir une ordonnance de protection; celle-ci est émise et appliquée sans retard et tout refus d’accorder une telle ordonnance ne peut être signifié qu’à la personne protégée;

l)La loi prévoit qu’au besoin, l’ordonnance de protection, les renseignements relatifs à l’identité de la personne protégée et aux membres de sa famille, ou tout autre renseignement et adresse pouvant révéler leur identité sont classés confidentiels dans tous les registres officiels;

m)La loi prévoit que la personne faisant l’objet de la mesure d’éloignement a le droit de présenter une objection à l’ordonnance de protection, dans un délai de deux semaines, auprès du juge aux affaires familiales;

n)Conformément à la loi, les agents de la police locale sont habilités à mettre en œuvre les ordonnances de protection et/ou de prévention;

o)Le fait de ne pas avoir notifié ou annoncé l’ordonnance de protection ou de prévention aux parties concernées n’empêche pas la mise en œuvre de l’ordonnance;

p)Lorsqu’une ordonnance d’hébergement a été émise et que le Ministère ne peut pas fournir à l’intéressée des solutions d’hébergement, celle-ci est accueillie temporairement dans un centre récréatif, un dortoir ou une infrastructure analogue des organismes et institutions publics, à la demande de l’autorité locale; cette mesure est prise en urgence ou à la demande du Ministère ou de la police locale;

q)Les missions de la police prévues dans le cadre de la présente loi doivent être accomplies par un nombre suffisant d’agents formés aux droits de l’homme, de l’enfant et de la femme, et à l’égalité des sexes;

r)Dans le cadre de la surveillance technique, des outils et des méthodes techniques peuvent être employés pour mettre en œuvre l’ordonnance délivrée par le juge; néanmoins, les enregistrements audio et vidéo de personnes ne peuvent en aucun cas être écoutés, regardés ou enregistrés;

s)La loi prévoit que l’auteur est condamné à une peine d’emprisonnement de trois à dix jours s’il viole l’ordonnance de prévention et de quinze à trente jours, en cas de récidive. La période totale d’emprisonnement ne peut pas dépasser six mois. Lorsque l’infraction se produit dans le cadre d’un autre acte incriminé, l’auteur fait l’objet d’une enquête et de poursuites distinctes;

t)La loi prévoit des services d’appui et la mise en place de «centres de prévention et de surveillance de la violence», qui fonctionneront sept jours sur sept et vingt-quatre heures sur vingt-quatre, et fourniront des services d’appui et de contrôle de la mise en œuvre des ordonnances de protection et de prévention;

u)Les centres de prévention et de surveillance de la violence s’acquitteront des missions suivantes:

i)Mettre au point une banque de données relative aux ordonnances de protection et de prévention, aux décisions de privation de liberté et à l’exécution de ces décisions, et établir un registre des ordonnances de prévention et de protection émises;

ii)Demander, si nécessaire, qu’une ordonnance de protection soit émise et exécutée;

iii)Élaborer et mettre en œuvre des programmes de prévention de la violence individuels et collectifs;

iv)Accroître le nombre de centres d’appel créés au Ministère de la famille et des politiques sociales et suivre les demandes présentées à ces centres;

v)Coopérer avec les organisations non gouvernementales qui œuvrent pour venir à bout de la violence;

vi)Indiquer leurs droits aux personnes protégées, leur signaler les institutions qui peuvent les aider à trouver un emploi et à résoudre d’autres questions connexes, prendre des mesures pour qu’elles suivent des formations professionnelles;

vii)Suivre les résultats des ordonnances de protection et leurs effets sur les personnes;

viii)Aider la personne protégée à résoudre ses problèmes financiers et psychosociaux;

ix)Établir un rapport détaillé relatif aux informations contextuelles, concernant la victime de la violence, l’auteur, leur famille, leur niveau d’instruction, leur situation personnelle, financière et psychologique, à la demande du juge;

x)Garantir la participation de l’auteur à des programmes de formation et de réadaptation visant à modifier l’attitude et le comportement en aidant à comprendre et à gérer la colère et le stress, et à prévenir la violence; veiller à ce que l’intéressé soit traité ou examiné dans une institution médicale s’il présente un problème de toxicomanie ou d’alcoolisme, ou souffre de troubles mentaux; prendre des mesures pour lui faire suivre des cours de formation professionnelle;

v)La loi no 6284 prévoit que le Ministère de la famille et des politiques sociales est chargé de coordonner l’action des institutions concernées, d’encourager les institutions et organismes publics ainsi que les entreprises privées à collaborer avec lui, et de veiller à ce que le personnel de ces organismes soutienne l’action des fonctionnaires du Ministère, si nécessaire;

w)La loi prévoit que les agents de tous les organismes et institutions publics et associations professionnelles suivent un programme de formation sur «les droits fondamentaux de la femme et l’égalité des sexes»; de plus, des cours consacrés aux droits fondamentaux de la femme et à l’égalité des sexes sont incorporés dans les programmes des écoles primaires et secondaires;

x)La loi impose de nouvelles responsabilités aux médias, en ce qui concerne leur participation aux campagnes de sensibilisation. La Radiotélévision turque (TRT), ainsi que les autres chaînes de télévision et radio nationales, régionales et locales sont tenues de diffuser des documents que doivent leur fournir le Ministère ou d’autres institutions, relatifs aux mécanismes et aux politiques de protection de la femme et de l’enfant, et de lutte contre la violence à l’égard des femmes;

y)Si une ordonnance d’aide financière temporaire est émise, la personne protégée qui en bénéficie, qui doit avoir plus de 16 ans, reçoit un montant journalier qui équivaut au maximum à un trentième du salaire minimum et qui est fixé annuellement. S’il y a plus de deux personnes protégées, le montant est augmenté de 20 % par personne supplémentaire. Le montant correspondant à l’aide financière temporaire est prélevé sur les revenus de l’auteur des violences. En cas de fausse déclaration, le montant octroyé à la personne protégée est récupéré;

z)Toute personne faisant l’objet d’une ordonnance de protection, qui ne bénéficie pas des services de santé parce qu’elle n’a pas d’assurance-santé, peut bénéficier de l’assurance-santé générale. La loi dispose que les frais de réadaptation des personnes qui, faisant l’objet d’une ordonnance de protection, ne bénéficient pas de l’assurance-santé générale, sont couverts par le Ministère de la famille et des politiques sociales;

aa)La loi prévoit la gratuité de toute la procédure relative aux ordonnances (demande, procédure et exécution); il n’est prélevé aucune taxe;

bb)S’il l’estime nécessaire, le Ministère de la famille et des politiques sociales peut se porter partie dans toute affaire légale, judiciaire ou administrative et dans toute procédure ex parte engagée pour acte de violence ou risque de violence à l’égard de femmes, d’enfants et de membres de la famille.

d)Restructuration des centres d’hébergement

34.Les 21 et 22 septembre 2011, des représentants du Ministère de la famille et des politiques sociales, des responsables des directions provinciales, des représentants des municipalités et des organisations non gouvernementales de femmes qui offrent des services d’hébergement ont tenu une réunion de consultation pour analyser la question de l’amélioration de la qualité des centres d’hébergement pour femmes et de l’augmentation de leur nombre. Un nouveau modèle d’hébergement a été présenté et examiné, l’objectif étant d’améliorer et d’étendre les services offerts aux victimes de la violence. Il a également été organisé une table ronde visant à examiner les résultats de la réunion de consultation. Dans ce cadre, un projet de règlement relatif aux centres d’hébergement a été élaboré par le groupe de travail établi après les réunions visant le renforcement de la qualité et de la quantité des centres d’hébergement de femmes; ce projet devrait inclure des dispositions sur les qualifications du personnel, ainsi que sur les normes de fonctionnement de ces centres et sur le budget souple qui leur est alloué. Ce projet de règlement doit encore être complété, à la lumière d’études et autres activités.

2.Activités de formation et programmes visant les exécutants

35.Des «Protocoles de formation» ont été signés avec les ministères compétents, afin de sensibiliser et de former davantage le personnel des institutions et organismes qui s’occupent d’aider les victimes «de violence à l’égard des femmes ou de violence intrafamiliale, et qui fournissent des services relatifs à l’égalité des sexes»; cette formation porte «sur une approche favorable aux victimes de la violence et sur l’application de la législation»:

a)Le «Protocole de formation des agents des forces de l’ordre à la prévention de la violence contre les femmes et aux procédures à suivre dans ce cadre» a été signé par le Ministre de l’intérieur en décembre 2006; 45 000 policiers ont été formés de 2006 à 2012;

b)Le «Protocole relatif à l’augmentation de la capacité institutionnelle des services offerts aux adultes et aux enfants victimes de violence, et à la mise en place de la coopération» a été signé en octobre 2009 par la Direction générale de la condition féminine, la Direction générale des services sociaux et de la protection de l’enfance et la Direction générale de la sécurité. Dans le cadre de ce protocole, un formulaire d’enregistrement de violences intrafamiliales a été mis au point et distribué à tous les postes de police par l’intermédiaire du réseau de la police nationale (Pol-Net). L’évaluation des risques courus par la victime est établie par la police au moyen de ce formulaire; l’attention du service à qui le formulaire est soumis étant ainsi attirée, il est plus aisé de prévenir les situations dangereuses. Un projet concernant le «rôle des agents des forces de police dans la prévention de la violence faite aux femmes et la formation de formateurs» a également été mis en place, dans le cadre du Protocole. L’objectif poursuivi est de former un groupe de formateurs, habilités à organiser tout type de formation, de séminaires, de symposiums et d’activités scientifiques concernant la prévention de la violence intrafamiliale, dans le cadre de la Direction générale de la sécurité, et de former un modèle de réaction policière aux affaires de violences intrafamiliales. Ce projet s’est concrétisé en février 2011: 19 officiers de police et 4 psychologues y ont participé;

c)Le «Protocole de formation sur le rôle du personnel de santé dans la prévention de la violence à l’égard des femmes et aux procédures à suivre» a été signé par le Ministère de la santé et est entré en vigueur en février 2008. Dans son cadre, 65 000 agents du personnel de santé ont été formés dans les 81 provinces du pays;

d)Le «Protocole relatif au rôle du système judiciaire dans la prévention de la violence à l’égard des femmes et aux procédures à suivre» a été signé par le Ministère de la justice en avril 2009. Trois cent vingt-six juges aux affaires familiales et procureurs ont été formés;

e)Le «Protocole de formation du personnel religieux à la prévention de la violence à l’égard des femmes et aux procédures à suivre» a été signé par le Ministre d’État responsable de la famille et des affaires sociales et le Ministre d’État responsable des affaires religieuses; des activités de formation ont été lancées dans ce contexte à Ankara en avril 2010. Ce protocole vise, dans un premier temps, à former 12 000 membres du personnel religieux de l’Anatolie centrale. La deuxième étape du projet sera mise en œuvre dans certaines provinces d’autres régions où des responsables religieux seront désignés à cet effet par le Ministère des affaires religieuses et les bureaux de conseil familial du Département. Dans ce cadre, quelque 100 000 responsables religieux seront formés d’ici à 2015. La formation de 100 responsables religieux appelés à devenir formateurs à leur tour est maintenant terminée;

f)Des programmes de formation de trois jours relatifs à «l’égalité des sexes» sont organisés pour permettre à des cadres travaillant dans les institutions et les organismes publics d’échanger des connaissances et des expériences au sujet des difficultés, des causes, des résultats et des solutions en matière d’égalité des sexes, d’améliorer leurs connaissances et de se sensibiliser à la question, de sorte que la question de l’égalité hommes-femmes soit intégrée dans tous les aspects de leur travail. Les programmes de formation ont été mis en œuvre pour les directeurs régionaux des zones rurales, qui œuvrent en faveur des femmes sur le terrain. Les programmes de formation visant les directeurs des centres publics de formation ainsi que les directeurs régionaux de l’agriculture, de l’éducation nationale et des services sociaux des 81 provinces que compte la Turquie ont été exécutés de mars 2009 à octobre 2011. Des programmes de formation ont aussi été mis en œuvre pour les directeurs, les experts et les spécialistes de l’assistance qui travaillent dans les services centraux et les services sur le terrain de l’Agence turque pour l’emploi d’octobre à décembre 2011 et se poursuivent encore. Deux mille trois cents fonctionnaires ont participé à des programmes de formation en 2012;

g)La question de la violence faite aux enfants et aux femmes et de la violence intrafamiliale est traitée dans les programmes de formation interne organisés pour renforcer l’expérience et les connaissances professionnelles des travailleurs sociaux (psychologues, pédagogues, assistants sociaux) qui travaillent dans les tribunaux de la famille et de la jeunesse du Ministère de la justice. Des programmes de formation ont été mis en œuvre de mars à mai 2012 et le Ministère de la famille et des politiques sociales a fourni l’appui spécialisé nécessaire dans ce cadre;

h)Un protocole de coopération a été signé par le Ministère d’État responsable de la famille et des affaires sociales et le Ministère des sciences, de l’industrie et de la technologie le 10 février 2012; il vise à améliorer la participation des femmes, des personnes handicapées, des familles des morts pour la patrie et des anciens combattants à l’activité économique et à améliorer la situation des femmes en matière d’emploi. Ce protocole vise également l’amélioration de l’entrepreneuriat et de l’emploi des femmes;

i)Un protocole a été signé entre le Ministère d’État responsable de la famille et des affaires sociales et le Ministère du travail et de la sécurité sociale, le 17 février 2012. Il définit les actions suivantes, qui contribueront à améliorer l’autonomisation des femmes et leur participation à la vie économique, à réconcilier la vie professionnelle et la vie familiale, notamment en multipliant le nombre de garderies, à inclure l’égalité des sexes et la question des droits de la femme dans les modules du programme de formation professionnelle des chômeurs organisé par l’Agence turque pour l’emploi et à organiser des activités visant à améliorer les conditions de vie et de travail des travailleuses saisonnières agricoles. Il a également été prévu de faciliter l’accès aux services de l’Agence turque pour l’emploi pour les femmes victimes de violences, les femmes dont la sortie de prison est prévue dans un délai de moins de douze mois, les veuves, les femmes abandonnées par leur mari, les femmes dont le mari est en prison ou les divorcées;

j)Le Ministère de la famille et des politiques sociales et le Conseil de l’enseignement supérieur ont signé un protocole de coopération qui prévoit que l’égalité des sexes et la lutte contre la violence à l’égard des femmes font désormais partie des matières enseignées à l’université et que le principe de la discrimination positive en faveur des filles est appliqué au système d’allocation de bourses;

k)Le Ministère de la famille et des politiques sociales et le Commandement général de la gendarmerie ont signé un protocole de coopération relatif aux programmes de formation sur la violence à l’égard des femmes, la violence intrafamiliale, l’égalité des sexes, les méthodes d’approche des victimes de la violence et l’amélioration de la formation et de la coopération en vue de l’application de la loi, le 12 avril 2012. Dans ce cadre, un certain nombre d’activités seront organisées, dont des cours sur l’égalité des sexes et la prévention de la violence à l’égard des femmes, qui seront donnés dans les écoles dépendant du Commandement général de la gendarmerie; les soldats et les sous-officiers suivront eux aussi une formation sur cette question, ainsi que sur le phénomène des meurtres commis au nom de la tradition ou de l’honneur; des dépliants d’orientation et d’information seront remis aux victimes de la violence qui se rendent dans les postes de police ou de gendarmerie pour y obtenir de l’aide. Pour la première fois, la question de la violence à l’égard des femmes est devenue un cours à part entière dans les écoles qui dépendent du Commandement général de la gendarmerie;

l)Pour présenter les dispositions de «la loi relative à la protection de la famille et à la prévention de la violence», entrée en vigueur le 20 mars 2012, 16 réunions ont été organisées dans 16 provinces réparties dans les sept régions de la Turquie; y ont participé les gouverneurs adjoints, les directeurs provinciaux et les directeurs adjoints des ministères chargés de la politique de la famille et des affaires sociales, les directeurs provinciaux de la santé, les directeurs provinciaux de l’éducation nationale, les directeurs provinciaux de la sécurité sociale, les commandants provinciaux de la gendarmerie, les directeurs provinciaux de la sécurité, les travailleurs sociaux provinciaux, le personnel responsable des centres intégrés, les dirigeants des centres d’hébergement, les chefs de district de la sécurité, les commandants de district de la gendarmerie, les gouverneurs de district, les procureurs et procureurs principaux, ainsi que les représentants de la Commission de la justice aux niveaux des provinces et des districts. Ces réunions ont été suivies par 5 600 participants issus des 81 provinces turques.

3.Campagnes de sensibilisation

36.On trouvera ci-après une liste des campagnes de sensibilisation qui ont été menées:

a)Les programmes de formation à la citoyenneté que suivent tous les soldats et sous-officiers traitent de l’instruction des filles, de l’emploi des femmes et de leur participation aux processus décisionnels, des violences faites aux femmes, des crimes d’honneur, des droits fondamentaux de la femme et de l’égalité des sexes. Tous les modules de formation, de même que les panneaux et matériels didactiques, ont été conçus par la Direction générale de la condition féminine et soumis à l’état-major turc. Ce sont 450 000 soldats et sous-officiers qui participent chaque année à ces programmes de formation;

b)La déclaration intitulée «Comptez sur moi» souligne l’importance de la participation des hommes à la lutte contre la violence à l’égard des femmes. Conçue dans le contexte du 25 novembre, Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, elle a été signée par le Premier Ministre puis par les parlementaires de sexe masculin. Au total, plus de 15 000 signatures masculines ont été recueillies de novembre 2011 à mars 2012;

c)Divers documents (affiches, dépliants et manuels) sont publiés et des courts métrages réalisés pour attirer l’attention sur le problème de la violence contre les femmes et sensibiliser le grand public à la lutte contre ce fléau. Par exemple, des brochures ont été distribuées dans le cadre du 8 mars et de la semaine du 25 novembre. Lors des matches de football de première division joués le 25 novembre, les joueurs sont entrés sur le terrain en brandissant des banderoles sur lesquelles on pouvait lire «Stop à la violence contre les femmes», l’objectif poursuivi étant d’attirer l’attention du public sur ce problème. Autre mesure à signaler, les billets de la loterie nationale du tirage du 9 mars 2012 illustraient le thème de la Journée internationale de la femme du 8 mars;

d)Des séminaires sur les médias et l’égalité des sexes sont organisés depuis 2008 pour sensibiliser les étudiants en communication de diverses facultés de Turquie à la question de l’égalité des sexes et au problème des violences faites aux femmes. Ces séminaires durent cinq jours, dont les deux premiers sont entièrement consacrés à des exposés. Dans ce contexte, certaines activités ont été organisées avec la coopération de l’Université de la méditerranée et de la faculté d’économie d’Izmir en juillet et en novembre 2010;

e)Depuis 2008, le rôle des professionnels des médias locaux dans la lutte contre la violence à l’égard des femmes fait l’objet d’activités et de séminaires consacrés à la rédaction d’informations. Il s’agit de sensibiliser ces professionnels à la question du respect de l’égalité des sexes et à l’importance de la lutte contre la violence sexiste. À ce jour, 170 professionnels des médias ont participé à de tels séminaires. Ces programmes de formation ont été organisés dans les provinces de Kars et d’Antalya en 2010.

4.Services de conseil et d’appui aux victimes de la violence

37.Les mécanismes nationaux de protection de l’égalité des sexes ont trouvé leur forme finale dans un décret-loi publié au Journal officiel le 8 juin 2011 et la Direction générale de la condition féminine est devenue l’un des principaux services du Ministère de la famille et des politiques sociales créé peu auparavant.

38.En application de la réglementation la plus récente, les responsabilités de la Direction générale de la condition féminine sont les suivantes:

a)Diriger et coordonner les services sociaux de protection, de prévention, d’éducation, d’amélioration, de conseil et de réadaptation, pour le compte du Ministère;

b)Coordonner les activités visant la définition de politiques et de stratégies nationales de prévention de la discrimination à l’égard des femmes, la protection des droits fondamentaux des femmes et du statut social de la femme, ainsi que la promotion de leur rôle dans tous les domaines de la vie sociale; mettre en œuvre, surveiller et évaluer l’exécution de ces politiques et stratégies;

c)Recenser les principes, les procédures et les normes relatives aux services sociaux fournis par les institutions et organisations publiques, les organisations bénévoles ainsi que les personnes physiques et morales et veiller à ce qu’ils soient conformes à la loi;

d)Prévenir toute forme de discrimination à l’égard des femmes, mener des activités et projets visant à améliorer les droits de la femme et apporter un appui à de telles activités;

e)Sensibiliser la société en l’informant et en l’éclairant sur les droits fondamentaux de la femme;

f)Prévenir activement toutes les formes de violence à l’égard des femmes, dont les meurtres commis au nom de la tradition ou de l’honneur, le harcèlement et les sévices, et fournir un appui aux femmes qui cherchent des solutions aux problèmes posés par la vie familiale et sociale;

g)Promouvoir activement le progrès de la condition féminine dans tous les domaines, dont la santé, l’éducation, la culture, l’emploi et la sécurité sociale, et renforcer la participation des femmes aux mécanismes de décision.

39.La lutte contre la violence à l’égard des femmes fait partie des domaines d’action dont est chargée la Direction générale de la condition féminine qui, selon la directive sur son organisation et ses fonctions, élaborée en application du décret-loi relatif à l’organisation et aux fonctions du Ministère, relève du Ministère de la famille et des politiques sociales. C’est ainsi que la prévention de toutes les formes de violence, de harcèlement et de sévices dont les femmes sont victimes, et l’appui aux femmes qui cherchent des solutions aux problèmes posés par la vie familiale et sociale font partie des principales tâches de la Direction générale. Pour mener à bien ces missions, la Direction générale a été dotée d’une structure plus exécutive, qui a pour mission de mettre au point des stratégies et de devenir un mécanisme plus efficace sur le terrain, grâce à son organisation provinciale et à un budget adapté aux besoins.

40.La gestion et l’administration des centres d’hébergement pour femmes ont également été confiées à la Direction générale de la condition féminine; il existe actuellement 60 centres, qui ont une capacité d’accueil de 1 427 places. Cette disponibilité est complétée par 28 structures d’hébergement municipales et trois autres centres, gérés par des organisations non gouvernementales, qui offrent leurs services à des entités privées et aux victimes de la traite des êtres humains. En mars 2012, le pays comptait 88 centres d’hébergement pour femmes mais d’autres refuges devraient bientôt ouvrir leurs portes.

Centres d ’ hébergement pour femmes (dépendant de la Direction générale de la condition féminine)

Année

Nombre

Capacité

2010

43

943

2011

53

1 180

2012

60

1 427

41.Les centres d’hébergement pour femmes sont définis dans la loi comme des «organismes de services sociaux d’hébergement où des personnes, femmes ou hommes, soumis à des violences physiques, émotionnelles, sexuelles ou économiques, et leurs enfants, le cas échéant, peuvent trouver un logement temporaire, en attendant que leurs problèmes financiers et psychosociaux soient résolus».

42.Selon la réglementation en vigueur, la durée de l’hébergement est de trois mois. Cette durée peut être portée à six mois sur proposition de la direction du centre et avec l’approbation de la direction provinciale. À la fin de la période, la situation de la femme est évaluée par la Commission de coordination et d’examen, qui vise à éviter tout éventuel problème que risque de poser l’application de la disposition relative à l’extension du séjour jusqu’à ce que les problèmes soient résolus.

43.Une allocation de logement est offerte aux femmes qui quittent le centre; leurs enfants reçoivent une aide à l’éducation; des protocoles de coopération sont signés avec les municipalités afin que celles-ci aident les femmes à trouver un emploi; un certain nombre d’initiatives ont été lancées avec l’administration responsable de la politique du logement, pour qu’il soit proposé des studios aux femmes (et à leurs enfants) qui, ayant trouvé un emploi, quittent les centres d’hébergement temporaire.

44.Avant de quitter les centres, les femmes sont informées des services de protection et de prévention qui existent et des organisations où elles trouveront une aide gratuite en cas de besoin. Dans ce contexte, elles reçoivent des informations sur les centres de conseil familial et sur les centres locaux. Les victimes peuvent aussi demander qu’un lien soit établi avec des membres de la famille ou avec leur époux, à des fins thérapeutiques, pour tenter de résoudre les problèmes qui les avaient amenées à se réfugier au centre d’hébergement.

45.Des études techniques sont menées pour déterminer comment aider les femmes à dépasser le traumatisme qu’elles ont subi et à conserver des relations saines dans des contextes non violents (cette aide est fournie par des psychologues, des assistants sociaux et des pédagogues qui travaillent dans les centres d’hébergement pour femmes) et une aide est apportée aux victimes afin qu’elles puissent conserver le mode de vie qu’elles souhaitent. Les femmes reçoivent également une aide visant à leur permettre de restaurer des relations familiales plus saines, grâce à une formation professionnelle dispensée dans les centres communautaires provinciaux et les centres de conseil familial proches du lieu de résidence familiale, lorsqu’elles souhaitent retrouver leur famille ou leur époux, et qu’elles souhaitent recevoir un tel appui.

46.L’un des objectifs poursuivis par la Direction générale de la condition féminine dans sa lutte contre la violence à l’égard des femmes, est de «restructurer les centres d’hébergement pour femmes». Il s’agit de normaliser les conditions matérielles, de renforcer la qualité et la quantité des équipes d’accueil, d’établir un réseau de communication commun aux centres, et d’ouvrir des refuges spécialisés. Dans ce cadre, l’objectif est d’ouvrir au moins un refuge, un guichet unique, un centre d’appels (Allô 183) et un centre de prévention et de surveillance dans chacune des 81 provinces d’ici à 2015, tout en augmentant la capacité totale des refuges pour qu’elle atteigne 3 000 places. Il est actuellement procédé à l’élaboration de la législation d’application afin de parvenir à cet objectif.

47.Il existe un autre mécanisme important dans ce cadre d’action: les services de conseil aux femmes qui ont subi des violences ou qui risquent d’en subir et qui ont besoin d’appui. Dans ce cadre:

a)La ligne «Allô 183» offre des services aux femmes et aux enfants qui ont subi des violences ou qui risquent d’en subir, et qui ont besoin d’une aide psychologique, juridique ou financière, et doivent avoir accès à de tels services dans les délais les plus brefs; ce service de permanence téléphonique leur donne les coordonnées des organisations locales auxquelles elles peuvent faire appel;

b)Le Conseil de la Commission juridique des droits de la femme et les centres de conseil aux femmes, affiliés aux barreaux, œuvrent en faveur de la réalisation de l’égalité entre les hommes et les femmes dans les lois fondamentales telles que le Code civil, et offrent gratuitement des conseils aux femmes qui sont mal informées sur les droits de la femme, et qui ne savent pas à quels services s’adresser ou comment y faire appel;

c)La Commission des droits de la femme de l’Union des barreaux turcs, composée de représentants des barreaux comptant une commission des droits de la femme, vise à résoudre les problèmes posés par toute forme de discrimination à l’égard des femmes, y compris les violences intrafamiliales;

d)Divers services aux victimes de violence sont également fournis par des organisations non gouvernementales et des services juridiques et psychologiques sont également disponibles dans les centres de conseil et d’hébergement;

e)Les conseils psychologiques et juridiques et l’assistance financière sont fournis aux femmes victimes de violences dans 48 centres de conseil familial et dans 95 centres locaux du Ministère de la famille et des politiques sociales; le besoin d’hébergement est évalué et les femmes concernées sont dirigées vers les services pertinents;

f)Quarante centres locaux pluridisciplinaires, concernés par le projet de développement du sud-est de l’Anatolie, géré par l’administration régionale du Ministère du développement, offrent aux femmes des services d’éducation, d’orientation et de formation professionnelle;

g)Des services d’appui psychosocial sont fournis dans les cas de violence intrafamiliale dans les 103 unités d’intervention d’urgence et d’appui psychosocial créées dans le cadre des services d’urgence des hôpitaux de 51 provinces;

h)Le Ministère de la famille et des politiques sociales a lancé un programme dans le cadre duquel chaque famille dispose d’un spécialiste de l’appui social à la famille;

i)Le nombre des postes de première intervention, qui rendent des services d’intervention rapide et facilement accessible pour les femmes, est en augmentation et les services fournis par ces centres sont améliorés dans toutes les provinces, dans l’ensemble du pays;

j)La création de centres de prévention et de surveillance de la violence, dans le contexte de la loi relative à la protection de la famille et à la prévention des violences à l’égard des femmes, est en cours.

5.Coopération avec les organisations non gouvernementaleset autres parties prenantes

48.Les organisations non gouvernementales, qui jouent un rôle clef dans la mise en place de la démocratie au niveau national et servent de passerelle entre l’État et la société, accomplissent une œuvre remarquable en soutenant le rôle social des femmes et l’égalité des sexes. L’adéquation des politiques publiques aux besoins et aux demandes de la société dépend grandement de l’efficacité de la coopération entre les organisations non gouvernementales et les pouvoirs publics. Le Ministère de la famille et des politiques sociales, qui est chargé de veiller au respect de l’égalité des sexes dans notre pays, a inclus les représentantes des organisations non gouvernementales actives dans le domaine des droits de la femme, à toute élaboration, mise en œuvre et surveillance de son action, et continuera à agir de la sorte à l’avenir.

49.Au cours de la préparation et de l’adoption par le Parlement de la loi sur la protection de la famille et la prévention de la violence à l’égard des femmes, un certain nombre de consultations ont été organisées.

50.Dans ce cadre, les réunions organisées ont rassemblé les participants suivants:

a)Les dirigeants des barreaux de 17 provinces ayant une municipalité métropolitaine, le 13 septembre 2011;

b)Quelque 100 représentants d’organisations non gouvernementales et les représentants d’institutions concernées, le 19 septembre 2011;

c)Vingt juges aux affaires familiales d’Ankara et deux procureurs chargés des affaires de violence intrafamiliale, le 22 septembre 2011;

d)Une réunion a été organisée avec une équipe de représentantes de 236 organisations non gouvernementales de femmes, le 22 octobre 2011;

e)Soixante-huit institutions et organismes publics ont formulé un avis écrit au sujet du projet de loi. Dans ce contexte, un certain nombre de réunions ont été organisées auxquelles des organisations non gouvernementales et des universitaires ont été conviés, le 27 décembre 2011, le 12 janvier 2012 et le 15 janvier 2012;

f)Des séminaires ont été organisés du 4 au 6 avril 2012 pour recueillir les avis des organisations non gouvernementales de femmes, dans le cadre de la rédaction du projet de directives sur les centres d’hébergement.

C.Conclusion

51.Au vu des travaux réalisés au sujet de la situation des femmes qui portent le foulard, qui sont décrits dans la première section du présent document, et des évolutions positives observées récemment dans la lutte contre la violence à l’égard des femmes, nous espérons que, dans notre prochain rapport périodique, nous pourrons donner au Comité des éléments d’information plus concrets sur ces questions.

52.Nous souhaitons faire part de notre volonté de poursuivre notre action et nos études sur ces deux questions, avec la coopération de toutes les parties prenantes (autorités locales, organisations non gouvernementales, organismes commerciaux, secteurs privés et médias), y compris les institutions publiques. Les modifications apportées à la législation en vigueur sont encore toutes récentes et l’exécution de cette nouvelle législation ne fait que commencer.

53.Nous souhaitons également indiquer aux membres du Comité que nous sommes pleinement conscients des problèmes liés à la mise en œuvre de la Convention dans notre pays et espérons que les mesures que nous avons prises jusqu’ici illustreront notre volonté inébranlable de venir à bout de ces problèmes.