Quarante-neuvième session

11-29 juillet 2011

Observations finales du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes

Djibouti

Le Comité a examiné le rapport unique de Djibouti valant rapport initial, deuxième et troisième rapports périodiques (CEDAW/C/DJI/1-3) lors de ses 991e et 992e séances, le 21 juillet 2011 (CEDAW/C/SR.991 et 992). La liste de questions suscitée au sein du Comité figure dans le document CEDAW/C/DJI/Q/1-3 et les réponses du Gouvernement de Djibouti se trouvent dans les documents CEDAW/C/DJI/Q/1-3/Add.1.

A.Introduction

Le Comité se félicite de la présentation par l’État partie de son rapport unique valant rapport initial, deuxième et troisième rapports périodiques, qui était détaillé et suivait en général les directives du Comité relatives à la préparation des rapports, même si certaines données ventilées par sexe manquaient et étaient en retard. Le Comité note avec satisfaction que le rapport unique a été préparé par un comité interministériel au cours d’un processus coordonné par divers ministères participants, des membres de l’Assemblée nationale, de la Commission nationale des droits de l’homme et des organisations de la société civile. Le Comité exprime à l’État partie sa satisfaction à la suite de la déclaration verbale présentée par le chef de sa délégation, des réponses écrites à la liste des questions posées par son groupe de travail d’avant session, ainsi que des éclaircissements donnés à la plupart des questions posées verbalement par le Comité.

Le Comité félicite l’État partie de s’être doté d’une délégation de haut niveau, dirigée par le Ministre de la promotion de la femme et de la planification familiale de la République de Djibouti, qui comprend des représentants de plusieurs ministères, ainsi que de la Commission nationale des droits de l’homme. Le Comité apprécie le dialogue constructif qui s’est déroulé entre la délégation et les membres du Comité, tout en notant que certaines de ses questions restent sans réponse.

Le Comité se réjouit de ce que l’État partie s’est engagé à mettre en œuvre les dispositions de la Convention malgré les nombreux défis auxquels il est confronté.

B.Aspects positifs

Le Comité applaudit à la ratification par l’État partie, depuis l’entrée en vigueur de la Convention pour cet État en 1998, des traités internationaux ci-après portant sur les droits de l’homme :

a)Le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, en 2002;

b)La Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, en 2002;

c)Les deux protocoles facultatifs se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, en 2002;

d)Les protocoles facultatifs à la Convention relative aux droits de l’enfant : celui concernant l’implication d’enfants dans des conflits armés et celui concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, en 2011;

e)Le Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif aux droits des femmes, en 2005.

Le Comité se réjouit de l’adoption, depuis l’entrée en vigueur de la Convention, des mesures législatives ci-après visant à éliminer la discrimination à l’égard des femmes :

a)Le Code de la famille (2002), qui fixe l’âge minimum du mariage à 18 ans pour les femmes et les hommes, mais avec des exceptions. Ce code améliore la situation économique des femmes dans les mariages polygames, abolit l’usage de la répudiation, et il pénalise le refus de la part d’un mari divorcé de payer une pension alimentaire (« abandon de famille »);

b)La modification en 2009 de l’article 333 du Code pénal (qui considère les mutilations génitales féminines comme un crime) afin de définir de pareilles mutilations et de pénaliser leur non-signalement, et celle de l’article 7 du Code de procédure pénale afin d’assouplir les conditions auxquelles les organisations de défense des droits des femmes doivent se plier pour saisir un tribunal au sujet de cas de mutilations génitales féminines;

c)La loi sur la traite des êtres humains (2007), qui considère comme un crime de perpétrer ou de faciliter la traite d’êtres humains et prévoit d’aider les victimes;

d)La loi sur le système d’enseignement (2000) qui institue l’enseignement gratuit et obligatoire pour les filles et les garçons âgés de 6 à 16 ans;

e)Le Code du travail (2006) qui prévoit, entre autres, 14 semaines de congés payés de maternité et trois jours de congés parentaux payés pour les pères.

Le Comité note aussi avec satisfaction l’adoption par l’État partie de diverses mesures institutionnelles et de politique, notamment :

a)La création en 2008 du Ministère de la promotion de la femme, du bien-être familial et des affaires sociales, qui a été renommé Ministère de la promotion de la femme et de la planification familiale chargé des relations avec le Parlement;

b)L’instauration en 2008 de la Commission nationale des droits de l’homme et d’un Comité interministériel chargé de coordonner la présentation des rapports aux organes de surveillance des traités;

c)La Stratégie nationale d’intégration des femmes dans le développement (2003-2010) et son plan d’action, qui visent à renforcer la participation des femmes à la vie politique et économique, à améliorer la santé des mères et des enfants, enfin, à favoriser l’accès des femmes et des filles à l’éducation et à l’alphabétisation.

C.Principales préoccupations et recommandations

Le Comité rappelle l’obligation souscrite par l’État partie de mettre en œuvre de façon systématique et continue toutes les dispositions de la Convention. Il considère en outre que les domaines de préoccupation et les recommandations signalés dans les présentes observations finales exigent que l’État partie leur consacre son attention dès maintenant et avant la présentation du prochain rapport périodique. En conséquence, le Comité prie instamment l’État partie de se concentrer sur ces domaines dans ses activités de mise en œuvre. Il devra axer son prochain rapport périodique sur les mesures qu’il a prises et sur les résultats qu’il aura obtenus. Le Comité prie l’État partie de présenter ces observations finales à tous les ministères pertinents, aux échelons national et régionaux, à l’Assemblée nationale et aux assemblées régionales, de même qu’aux magistrats, afin d’assurer qu’elles soient pleinement appliquées. Il recommande aussi que l’État partie tienne compte desdites o b servations finales pendant tout son processus de décentralisation.

Assemblée nationale

Tout en réaffirmant qu’il incombe en premier lieu au Gouvernement, lequel est particulièrement comptable de cela, de veiller à ce que l’État partie s’acquitte pleinement de ses obligations en vertu de la Convention, le Comité souligne que l’application de ladite Convention est obligatoire pour tous les services gouvernementaux. Il invite l’État partie à inciter l’Assemblé nationale, conformément à ses procédures, à prendre au besoin les dispositions nécessaires à l’application des pr é sentes observations finales et à la prochaine présentation de son rapport de l’État partie en vertu de la Convention.

Visibilité de la Convention et recommandations générales du Comité

Tout en prenant note de ce que les traités internationaux ratifiés par l’État partie font partie de son droit national et ont une autorité supérieure à celle des lois nationales (art. 37 de la Constitution), le Comité s’inquiète de la perception selon laquelle les juges, les fonctionnaires et les responsables de l’application des lois ne seraient pas tenus d’appliquer la Convention, sous prétexte que le droit du pays tiendrait adéquatement compte de ses dispositions. Il est aussi préoccupé du fait que la Convention n’a pas été traduite et largement diffusée dans les langues nationales : l’afar, le somali et l’arabe. Il s’inquiète en outre parce que l’on ne connaît pas suffisamment les droits des femmes selon la Convention, sa notion d’égalité substantielle des sexes ni les recommandations générales du Comité au sein de tous les services gouvernementaux et de la magistrature, enfin, aux niveaux tant national que des régions. Le Comité se réjouit de l’adoption récente d’une loi sur l’aide juridique qui, ne se limite certes pas au cas des femmes, mais atténue l’incidence des frais de justice lesquels constituent un élément essentiel restreignant l’accès des femmes à la justice, le Comité se préoccupe de ce que les femmes, surtout dans les zones rurales, ne connaissent pas leurs droits selon la Convention. Et leur possibilité de les faire valoir est encore plus restreinte en raison de la persistance de stéréotypes, des mécanismes de justice traditionnelle, de l’analphabétisme, du manque d’accès à l’information et des autres difficultés qui surviennent dans la pratique pour saisir les tribunaux.

Le Comité recommande à l’État partie de :

a) Traduire et de diffuser largement la Convention dans toutes les langues du pays et de demander, au besoin, une aide internationale à cette fin;

b) Prendre des mesures pour que la Convention et les recommandations générales du Comité soit suffisamment connues et appliquées par tous les services gouvernementaux et par les magistrats aux niveaux du pays et des régions car elles constituent un cadre pour toutes les lois, les décisions des tribunaux et les politiques relatives à l’égalité des sexes et à la promotion de la femme;

c) Veiller à ce que la Convention fasse partie intégrante des connaissances juridiques et de la formation des juges et des magistrats, y compris ceux des tribunaux du statut personnel, des avocats et des procureurs, afin qu’une culture juridique favor a ble à l’égalité des femmes et des hommes et à la non-discrimination en raison du sexe s’implante fermement dans le pays;

d) Sensibiliser plus les femmes au sujet de leurs droits et des moyens propres à mieux les connaître, entre autres, grâce à des programmes sur les connaissances juridiques de base, et de veiller à mettre à la portée des femmes partout dans l’État partie des renseignements sur la Convention en recourant à tous les moyens appropriés, y compris aux médias;

e) Éliminer tous les obstacles auxquels les femmes peuvent être confrontées en accédant à la justice par le biais d’une application efficace de la loi sur l’aide juridique qui permette aux femmes pauvres de signaler les entorses à leurs droits découlant de la Convention en leur apprenant comment se prévaloir des recours juridiques contre la discrimination.

Harmonisation des lois

Le Comité salue les efforts accomplis par l’État partie pour renforcer les droits des femmes en matière de mariage et de divorce dans le Code de la famille. Ce code est fondé sur le droit coutumier, le droit islamique et des éléments de droit moderne. Cependant, le Comité s’inquiète de ce que l’État partie estime que les dispositions discriminatoires du Code de la famille, notamment celles sur le rôle du mari en tant que chef de la famille et celles qui privent les femmes d’une part égale d’héritage, ne sauraient être modifiées puisqu’elles participent de « valeurs socioculturelles et religieuses suprêmes ». Le Comité constate avec inquiétude que les dispositions du Code de la famille qui empêchent les femmes de prétendre aux mêmes droits que les hommes durant le mariage et sa dissolution sont incompatibles avec la Convention. Il rappelle que l’État partie a ratifié cette dernière sans formuler de réserves. Il est aussi préoccupé du fait que les litiges issus de violations des droits de la femme, notamment de violences sexuelles, sont souvent réglés conformément à la justice traditionnelle. Il en est ainsi, par exemple, du paiement d’une somme symbolique à la famille de la victime sans que cette dernière soit consultée ni indemnisée.

Le Comité rappelle sa recommandation générale n o  21 (1994) relative à l’égalité dans le mariage et les rapports familiaux, et il invite l’État partie à modifier les dispositions discriminatoires du Code de la famille afin de les aligner sur la Convention. Il conseille à l’État partie de s’inspirer des expériences réussies d’autres États parties de la région qui ont revu la législation sur le statut personnel et la famille à la lumière d’interprétations progressistes du Coran et conformément à la Convention. Il recommande aussi à l’État partie de prendre des mesures en vue de signaler à l’opinion publique qu’il est important de punir les violations des droits des femmes au moyen de mécanismes judiciaires plutôt que coutumiers afin que les victimes disposent de recours efficaces et puissent obtenir réparation. Il recommande aussi de former les juges, les magistrats et les policiers pour les inciter à appliquer les lois pertinentes en tenant dûment compte des considérations de sexe, conformément à la Convention.

Mécanisme national de promotion de la femme

Tout en saluant la création d’un mécanisme national pour la promotion de la femme, qui comprend le Ministère de la promotion de la femme, des bureaux régionaux, et des responsables de la coordination pour l’égalité des sexes dans différents services de l’administration, le Comité s’inquiète du fait que l’on a pas suffisamment renforcé la capacité et les ressources du mécanisme national, surtout au niveau régional, pour garantir la coordination et la mise en œuvre effectives de la stratégie nationale d’intégration de la femme dans le développement ainsi que la mise en avant des droits de la femme dans les stratégies de développement social et économique.

Rappelant sa recommandation générale n o  6 (1988) et les orientations fournies par le Programme d’action de Beijing, surtout eu égard aux conditions du fonctionnement efficace des mécanismes nationaux, le Comité recommande à l’État partie :

a) De renforcer le mécanisme national existant à tous les niveaux en le dotant de ressources humaines, techniques et financières adéquates pour mieux formuler, mettre en œuvre, encadrer, coordonner et contrôler l’élaboration et l’application des lois ainsi que des mesures promouvant sur le terrain l’égalité des sexes. Il convient aussi d’intégrer la perspective axée sur l’équité entre les sexes dans toutes les lois et les politiques;

b) De dispenser une formation sur l’égalité des sexes aux femmes et aux hommes qui travaillent au Ministère de la promotion de la femme, y compris dans ses bureaux régionaux, et dans d’autres services gouvernementaux aux échelons national et régionaux;

c) De s’attacher à promouvoir en priorité les droits des femmes, la non-discrimination et l’égalité des sexes, en tenant notamment compte des recommandations du Comité concernant l’élaboration et la mise en œuvre de la politique nati o nale d’égalité des sexes;

d) D’inclure dans la politique nationale d’égalité des sexes une approche axée sur les résultats, notamment des indicateurs et des buts précis;

e) De renforcer les capacités, l’indépendance et les ressources de la Commission nationale des droits de l’homme. Ainsi que d’étendre le mandat de cette commission en matière de promotion des droits de la femme, conformément aux principes concernant le statut des institutions nationales pour la protection des droits de l’homme (Principes de Paris) (résolution 48/134, annexe, adoptée par l’Assemblée générale).

Stéréotypes et pratiques nuisibles

Tout en prenant acte des mesures prises par l’État partie pour éliminer les attitudes culturelles discriminatoires et criminaliser certaines pratiques nuisibles, le Comité est préoccupé par la persistance des normes, pratiques et traditions préjudiciables, ainsi que d’attitudes patriarcales et de stéréotypes profondément enracinés concernant les rôles, les responsabilités et l’image attribuées aux femmes et aux hommes dans tous les domaines de la vie. Il craint aussi que pareilles coutumes et pratiques ne perpétuent la discrimination à l’égard des femmes et ne se traduisent par l’inégalité des femmes sur de nombreux plans, y compris leur participation à la vie publique et économique, à la prise de décisions, au mariage et aux rapports familiaux. Le Comité note que ces stéréotypes contribuent aussi à la persistance de la violence à l’égard des femmes ainsi que des pratiques nuisibles, telles que les mutilations génitales des femmes, la polygamie et le mariage précoce, et il s’inquiète de ce que l’État partie n’a pas pris de mesures suffisantes à long terme et systématiques pour modifier ou éliminer les stéréotypes, les valeurs culturelles discriminatoires et les pratiques nuisibles.

Le Comité prie instamment l’État partie :

a) De mettre en place une stratégie globale pour éliminer les pratiques et les stéréotypes discriminatoires à l’égard des femmes, en application des articles 2 f) et 5 a) de la Convention. Ces mesures devraient comprendre des efforts menés de concert avec la société civile, pour éduquer et sensibiliser la population à cet égard, qui soient axés sur les femmes et les hommes, à tous les niveaux de la société y compris les chefs traditionnels et religieux;

b) De lutter contre les pratiques nuisibles telles que les mutilations génitales féminines, la polygamie et le mariage précoce en créant des programmes publics d’éducation à leur sujet et en les interdisant efficacement, en particulier dans les zones rurales;

c) D’employer des moyens novateurs pour mieux expliquer l’égalité des femmes et des hommes, puis de continuer à collaborer avec les médias pour promouvoir une image positive et non stéréotypée de la femme;

d) D’évaluer l’impact de ces mesures afin de mettre en évidence et de pallier toute lacune éventuelle.

Mutilations génitales féminines

S’il se félicite des nombreuses dispositions prises par l’État partie pour faire mieux comprendre leurs conséquences néfastes, le Comité constate avec préoccupation que les mutilations génitales féminines restent très répandues (touchant 93 % des femmes), surtout dans les zones rurales, et que les cas de mutilations ne sont généralement pas signalés, et ne donnent lieu ni à des poursuites ni à des sanctions. Il s’inquiète aussi de ce que ces mutilations entraînent souvent des complications obstétriques, des césariennes, des saignements excessifs, des accouchements prolongés et des décès maternels, surtout dans le cas des infibulations, forme extrême de mutilation génitale féminine, qui sont largement pratiquées au sein de l’État partie.

Le Comité rappelle ses recommandations générales n o  14 (1990) relative à l’excision, et n o  19 (1992) sur la violence à l’égard des femmes, ainsi que les recommandations faites à l’État partie à l’occasion de l’Examen périodique universel concernant Djibouti (A/HRC/11/16, par. 67.18, 67.25, 68.3 et 68.8) et par le Comité des droits de l’enfant (CRC/C/DJI/CO/2, par. 56). Il prie instamment à l’État partie :

a) De garantir l’application effective de l’article 333 du Code pénal sur les mutilations génitales féminines qui prévoit une peine d’emprisonnement de cinq ans en poursuivant et en punissant convenablement leurs auteurs ainsi que leurs complices ou ceux qui s’abstiennent de signaler ce crime, et de fournir au Comité des renseignements sur le nombre de rapports, de poursuites, de condamnations, et les pe i nes imposées aux coupables;

b) D’intensifier ses campagnes de sensibilisation et ses efforts de formation à l’intention des familles, des praticiens, des communautés, des chefs traditionnels et religieux, du personnel de santé, des juges et des magistrats, y compris ceux des tribunaux du statut personnel, les procureurs et les policiers, avec l’appui d’organisations de la société civile, afin d’expliquer que les mutilations génitales féminines sont une forme de discrimination et de violence sexiste, et qu’il faut y mettre fin ainsi qu’aux croyances culturelles qui les justifient;

c) D’informer les familles, les communautés, les praticiens, les enseignants et le personnel de la santé des conséquences néfastes des mutilations génétiques féminines sur la santé procréative des femmes et des filles.

Violence à l’égard des femmes

Le Comité note que des mesures ont été prises pour lutter contre la violence à l’égard des femmes, telles que la distribution par l’État partie de guides destinés aux juges, aux avocats et à la société civile sur les recours juridiques et l’assistance aux victimes, ainsi que l’établissement par l’Union nationale des femmes djiboutiennes (UNFD), la principale organisation de défense des droits des femmes de l’État partie, de cellules d’écoute, d’information et d’orientation, notamment dans le camp de réfugiés d’Ali Adeh, pour soutenir les victimes de violence sexiste. Il prend aussi note de l’intention de l’État partie de revoir sa législation sur la violence à l’égard des femmes. Il est toutefois préoccupé par le fait que : ces dernières ne signalent que rarement les cas de violence sexiste, qui font généralement l’objet d’un règlement familial; que le viol conjugal n’est pas incriminé et que l’avortement à la suite d’un viol est illégal. Il s’inquiète aussi à la suite des rapports selon lesquels des actes de violence sexuelle seraient commis dans le camp d’Ali Adeh sans que les victimes n’aient accès à la justice.

Conformément à sa recommandation générale n o  19 (1992) sur la violence à l’égard des femmes, le Comité demande à l’État partie :

a) De poursuivre les auteurs de tous les actes de violence familiale et sexuelle commis à l’encontre d’une femme ou d’une fille, sur plainte de la victime ou d’office, et de leur infliger la peine qui s’impose;

b) D’envisager de modifier le Code pénal, afin de criminaliser le viol conjugal et de décriminaliser l’avortement en cas de viol;

c) De dispenser une formation obligatoire aux juges, procureurs et aux policiers afin qu’ils appliquent à la lettre les dispositions pertinentes du Code pénal;

d) D’inciter les femmes et les filles qui sont victimes d’actes de violence à signaler leur cas à la police, en les sensibilisant au caractère criminel de ces actes, en luttant contre la stigmatisation des victimes et en apprenant aux personnes chargées de l’application de la loi ainsi qu’au personnel médical des procédures normalisées qui tiennent compte des considérations de sexe pour s’occuper des victimes, enfin, enquêter efficacement sur les plaintes déposées;

e) De s’assurer que le projet de politique nationale d’égalité des sexes que prépare le Ministère de la promotion de la femme privilégie la lutte contre la violence à l’égard des femmes;

f) De renforcer l’assistance aux victimes et l’aide à leur réinsertion en leur prêtant des services d’aide juridique et d’accompagnement psychologique gratuits, en créant des centres d’accueil pour femmes battues et en soutenant les organisations de défense des droits des femmes qui viennent en aide aux victimes, y co m pris, mais pas uniquement, l’UNFD;

g) De garantir la sécurité physique des femmes et des filles réfugiées dans le camp d’Ali Adeh en augmentant le nombre des personnes chargées de l’application des lois dans ce camp et en fournissant une aide juridique gratuite à celles qui sont victimes de violence notamment sexuelle;

h) De collecter des données ventilées par sexe sur le nombre de plaintes déposées, de poursuites engagées et de condamnations prononcées, ainsi que sur les peines infligées aux auteurs d’actes de violence familiale et sexuelle, afin de les fournir au Comité.

Traite et exploitation de la prostitution

Le Comité reconnaît qu’il est difficile pour l’État partie de répondre aux besoins du grand nombre de réfugiés et de migrants qui arrivent ou transitent sur son territoire. Il prend note des mesures que l’État partie a prises, grâce à la conclusion d’accords de coopération avec d’autres pays de la sous-région, pour lutter contre la traite des êtres humains, en particulier des femmes et des enfants, lesquels sont souvent la proie d’abus de la part des trafiquants et soumis au travail forcé et à une exploitation sexuelle dans les pays de destination. Il constate aussi que l’État partie collabore, de plus, avec l’Organisation internationale pour les migrations, (qui a récemment ouvert un centre pour migrants à Obock) et que de la traite des êtres humains a été criminalisée. Il remarque, cependant, avec inquiétude que l’État partie ne dispose que d’une capacité limitée à faire respecter la loi sur la traite et à prêter assistance aux victimes; que le nombre des trafiquants poursuivis et condamnés est faible; et le manque de protection des femmes et des enfants, lesquels risquent de devenir des victimes de la traite.

Le Comité recommande à l’État partie  :

a) D’accélérer l’adoption d’un plan d’action national de lutte contre la traite des êtres humains, en particulier des femmes et des filles y compris réfugiées et migrantes;

b) De bien faire respecter la loi sur la traite des êtres humains en poursuivant et en punissant comme il convient les trafiquants et en prêtant assistance aux victimes de cette traite;

c) De continuer à sensibiliser et à former les fonctionnaires chargés de l’application de la loi pour qu’ils appliquent à la lettre les dispositions pertinentes du Code pénal;

d) De mettre en place des mécanismes appropriés d’identification précoce, de prise en charge et de soutien des victimes de la traite, notamment des femmes et des filles réfugiées et migrantes;

e) De donner aux femmes réfugiées et migrantes accès à une activité rémunératrice en leur octroyant des microcrédits et en leur permettant d’avoir un travail indépendant, afin de réduire le risque qu’elles se prostituent pour survivre et de d e venir des victimes de la traite des êtres humains;

f) De collecter des données ventilées par sexe sur le nombre de poursuites et de condamnations de trafiquants, et de les faire figurer dans son prochain rapport périodique.

Participation à la vie politique et publique

Le Comité se félicite de ce que la loi de 2002 instaurant un quota de 10 % de femmes dans les listes de candidats des partis politiques se soit traduite par une augmentation du nombre de ces dernières au sein de l’Assemblé nationale, où des femmes ont été élues à 9 des 65 sièges pourvus en 2009 (des femmes ont aussi été élues dans les conseils régionaux et municipaux). Il remarque aussi qu’un quota de 20 % pour les femmes au sein des postes supérieurs de l’administration a été instauré par décret en 2008, qu’il y a actuellement trois femmes ministres, et que le nombre de juges de sexe féminin, notamment dans les tribunaux du statut personnel, a nettement augmenté. Il est toutefois préoccupé par la faible participation des femmes à la vie politique et publique, en particulier dans des postes de responsabilité, ainsi que dans l’administration locale et dans le service diplomatique.

Le Comité rappelle ses recommandations générales n o  23 (1997) sur les femmes dans la vie politique et publique, et n o  25 (2004) sur les mesures temporaires spéciales et recommande à l’État partie :

a) D’augmenter les quotas existants et de veiller à les faire respecter, y compris par l’imposition de sanctions adéquates, ainsi que d’en adopter de nouveaux pour les femmes qui postulent un poste dans la fonction publique nationale, régionale ou municipale, afin d’accélérer une représentation égale des femmes et des hommes dans les corps politiques élus et désignés, surtout à des postes de responsabilité, et dans l’administration locale;

b) D’allouer des fonds adéquats aux femmes candidates, y compris celles de l’opposition, au titre du financement public destiné aux campagnes électorales;

c) De promouvoir la collaboration des femmes au sein des organisations de la société civile, des partis politiques, des syndicats et des autres associations, notamment à des postes de responsabilité;

d) De veiller à ce que les femmes, y compris celles souffrant d’un handicap, puissent participer de façon adéquate et avoir voix au chapitre en matière de planification, d’exécution, de suivi et d’évaluation des politiques de développement et des projets communautaires;

e) De prendre des mesures de discrimination positive pour accroître le nombre de femmes diplomates, notamment d’ambassadrices;

f) De donner une formation en matière d’égalité des sexes à des politiciens, des journalistes, des enseignants, ainsi que des chefs traditionnels et religieux, notamment de sexe masculin, pour mieux faire comprendre qu’une participation entière, égale, libre et démocratique des femmes et des hommes à la vie politique et publ i que est une exigence nécessaire à l’application intégrale de la Convention.

Éducation

Tout en se félicitant des mesures prises par l’État partie pour accroître l’accès des filles à l’instruction primaire, par exemple en rapprochant les écoles des localités rurales, en créant un nouveau Ministère de l’enseignement préscolaire, en accroissant le nombre de garderies et de crèches, en octroyant des bourses et des rations alimentaires aux filles et en prenant des mesures destinées aux parents pour les inciter à envoyer leurs filles à l’école, surtout dans les zones rurales, le Comité s’inquiète :

a)De la faible progression du taux de scolarisation des filles dans le primaire, surtout dans les zones rurales, malgré les mesures prises par l’État partie;

b)Du faible taux de scolarisation des filles au secondaire, surtout dans les zones rurales, et de l’importance de l’écart entre les taux de scolarisation des filles et celui des garçons à ce niveau;

c)De la priorité accordée aux domaines traditionnellement réservés aux personnes de sexe féminin, comme la couture, la cuisine et la coiffure, dans les formations professionnelles, ainsi que dans l’enseignement technique et professionnel destiné aux femmes et aux filles, car cela risque de confiner celles-ci dans des emplois mal rémunérés dans leurs futures professions;

d)Du faible taux d’alphabétisation des femmes, surtout dans les zones rurales.

Le Comité demande à l’État partie de continuer à prendre des mesures afin de garantir aux filles et aux femmes un accès égal à tous les niveaux de l’éducation, et notamment :

a) De supprimer les obstacles à l’éducation des femmes et des filles, comme les attitudes culturelles négatives, le mariage précoce, les tâches ménagères excessives, le faible nombre de femmes dans le corps enseignant, le manque de sécurité et les problèmes de santé liés aux mutilations génitales féminines;

b) De sensibiliser les parents, les communautés, les enseignants, les chefs traditionnels et les fonctionnaires, surtout de sexe masculin, à l’importance de l’éducation des femmes et des filles;

c) De prendre des mesures de discrimination positive comme la formation et le recrutement d’enseignantes;

d) De veiller à la sécurité des filles et de répondre à leurs besoins en matière de santé, notamment en ouvrant plus d’écoles près des localités rurales ou en construisant des latrines séparées, en bon état, surtout dans les écoles primaires;

e) D’accorder des bourses publiques aux filles et de prendre, y compris des subventions pour décharger les filles de leurs tâches ménagères des mesures pour inciter les parents à envoyer leurs filles à l’école;

f) D’offrir des possibilités d’éducation adéquates aux filles et aux garçons handicapés en les intégrant dans un programme d’enseignement ordinaire;

g) De donner accès à une formation technique et professionnelle qui facilite la réinsertion professionnelle des jeunes filles déscolarisées, en les orientant aussi vers des carrières traditionnellement dominées par des hommes, par exemple dans les secteurs des services, du commerce et de la logistique liés au port de Djibouti;

h) D’introduire des programmes d’alphabétisation des adultes, surtout à l’intention des femmes des zones rurales.

Emploi

Tout en prenant note de la protection que le Code du travail accorde aux femmes et des efforts déployés par l’État partie afin de créer des activités rémunératrices pour les femmes, le Comité continue de s’inquiéter de la discrimination dont ces dernières font l’objet sur le marché du travail, notamment :

a)Du taux de chômage très élevé des femmes;

b)De la forte proportion des femmes occupant des emplois non rémunérés ou faiblement rémunérés dans l’économie informelle sans pouvoir bénéficier d’une protection sociale;

c)De l’application apparemment laxiste de l’article 137 du Code du travail qui pose le principe « à travail égal, salaire égal »;

d)De l’accès limité des femmes au crédit pour créer leur propre petite entreprise;

e)De rapports sur des pratiques discriminatoires en matière d’emploi comme le licenciement de femmes pendant ou après leur grossesse, malgré les dispositions juridiques en vigueur;

f)De l’absence de législation interdisant le harcèlement sexuel sur le lieu de travail;

g)De l’exploitation des filles dans les pires formes de travail des enfants, y compris comme employées de maison.

Le Comité recommande à l’État partie :

a) D’intensifier les formations techniques et professionnelles pour les femmes, y compris dans les domaines traditionnellement dominés par les hommes et dans le secteur agricole;

b) De recourir à la Caisse nationale de sécurité sociale notamment pour les travailleurs du secteur informel, y compris de sexe féminin, ou de confier au ministère chargé de l’officialisation du secteur informel le soin d’élaborer un mécanisme n a tional distinct de protection sociale pour ces travailleurs;

c) De faire respecter à la lettre le principe « à travail égal, salaire égal », au moyen d’une sensibilisation, de sanctions adéquates et d’inspections du travail, enfin, d’envisager de modifier l’article 259 du Code du travail pour le faire concorder avec l’article 137;

d) D’élargir l’accès des femmes au microfinancement et au microcrédit à de faibles taux d’intérêt par l’entremise du Fonds pour le développement social, de l’Agence de développement social, des associations de crédit mutuel, et de la Caisse populaire d’épargne et de crédit afin que les femmes puissent avoir une activité rémunératrice et créer leur propre entreprise;

e) De collecter des données ventilées sur la situation des femmes et des hommes dans les secteurs privé et informel afin de contrôler et d’améliorer les conditions de travail des femmes;

f) D’envisager de modifier le Code du travail afin d’interdire harcèlement sexuel sur le lieu de travail et d’accroître les peines en cas de licenciement pour cause de grossesse;

g) De protéger les filles et les garçons de l’exploitation par le travail, en augmentant les inspections et les amendes infligées aux employeurs, conformément à la Convention concernant l’interdiction des pires formes de travail des enfants et l’action immédiate en vue de leur élimination (1999) [Convention n o  182 de l’OIT], de réglementer et de contrôler les conditions de travail des employés de maison, en particulier des filles, et d’envisager de ratifier la Convention sur les travailleuses et travailleurs domestiques, 2011 (Convention n o  189 de l’OIT).

Santé

Le Comité note les mesures importantes que l’État partie a prises pour étendre les services de santé de base aux localités rurales, réduire la mortalité maternelle et accroître l’accès des femmes et des filles à la planification familiale et aux services de santé reproductive. Il prend aussi note de l’intention de l’État partie de réviser sa législation sur l’avortement. Il s’inquiète toutefois :

a)Du fort taux de mortalité maternelle, y compris en milieu hospitalier, imputable à des complications obstétricales, des mutilations génitales, une grossesse précoce, un avortement non médicalisé et d’autres facteurs;

b)Du manque de services obstétriques d’urgence et de soins postnataux, surtout dans les zones rurales;

c)Du faible taux d’utilisation de contraceptifs (22,5 %), ce qui expose les femmes et les filles au risque d’infection par le VIH/sida, à d’autres maladies sexuellement transmissibles et aux grossesses précoces;

d)De l’absence de données non ventilées sur les grossesses précoces et les avortements non médicalisés;

e)De la forte prévalence du VIH/sida chez les femmes, de l’efficacité limitée des efforts déployés pour prévenir la transmission materno-fœtale, de la stigmatisation des personnes vivant avec le VIH/sida qui fait obstacle à leur accès aux services d’appui, au conseil-dépistage volontaire, et du manque de connaissances des femmes et des filles sur les moyens de prévention du VIH/sida.

Conformément à sa recommandation générale n o  24 (1999) sur l’article 12 de la Convention (femmes et santé), le Comité prie l’État partie de :

a) Continuer à décentraliser les structures de santé, de former des agents sanitaires des collectivités et des équipes sanitaires mobiles en matière d’orientation des femmes vers les services de santé maternelle, et de remédier à l’absence de services obstétriques d’urgence dans les zones rurales;

b) Collecter des données non ventilées sur la prévalence et de lutter contre les grossesses précoces et les avortements non médicalisés, au moyen de la sensibilisation, de la criminalisation de l’avortement dans les cas de viol et lorsque la vie ou la santé d’une femme ou d’une jeune fille enceinte est en danger, enfin de fournir des services d’avortement médicalisé et d’accompagnement postavortement;

c) Faire connaître les moyens contraceptifs existants, en particulier en intégrant l’éducation sexuelle dans les programmes scolaires, surtout au secondaire, et d’inciter les jeunes et les hommes à utiliser des préservatifs masculins, ce qui est une solution sûre et peu coûteuse;

d) Fournir aux femmes et aux hommes atteints du VIH/sida des traitements antirétroviraux gratuits, et de continuer à sensibiliser les mères et, plus particulièrement, les pères vivant avec le VIH/sida au fait qu’il est important de prévenir la transmi s sion materno-fœtale;

e) Mener de activités de sensibilisation pour déstigmatiser les personnes vivant avec le VIH/sida, ou qui sont infectées, et les groupes à risque, dont les travailleurs du sexe, afin de leur permettre d’avoir accès à des services d’appui et de conseil-dépistage volontaire.

Femmes rurales

Tout en notant que 80 % de la population de l’État partie vit dans des zones urbaines, le Comité est préoccupé du fait que les femmes rurales sont particulièrement touchées par la pauvreté, l’insécurité alimentaire, le manque d’eau potable sûre, et les mauvaises conditions climatiques telles que la sécheresse.

Le Comité recommande à l’État partie de poursuivre ses efforts afin de :

a) Créer des activités rémunératrices pour les femmes des zones rurales;

b) Fournir aux bergères et aux bergers, dont les troupeaux sont décimés par la sécheresse et qui sont pauvres d’autres moyens d’existence;

c) Améliorer l’accès des femmes et des filles à de l’eau potable sûre et à des infrastructures d’assainissement adéquates dans les zones rurales en construisant de nouveaux puits, en installant des robinets et en faisant des installations sanitaires;

d) Inciter les collectivités agropastorales à s’installer à proximité de sources d’eau nouvellement aménagées pour accroître leur sécurité alimentaire et faciliter leur accès à de l’eau destinée à leur consommation personnelle et à l’irrigation.

Groupes de femmes défavorisées

Le Comité est préoccupé par le manque de données ventilées sur la situation des personnes de sexe féminin qui sont confrontées à des formes multiples de discrimination, telles que les femmes âgées, les filles orphelines et vulnérables, les femmes handicapées, ainsi que les femmes réfugiées et les migrantes.

Le Comité recommande à l’État partie :

a) De collecter des données ventilées sur la situation des personnes de sexe féminin confrontées à des formes multiples de discrimination, telles que les femmes âgées, les filles orphelines et vulnérables, les handicapées, ainsi que les réfugiée et migrantes, et d’inclure ces données dans son prochain rapport périodique;

b) D’adopter des mesures, notamment temporaires spéciales conformément au paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention, pour éliminer pareille discrimination, notamment en matière de vie politique et publique et dans les domaines de l’éducation, de l’emploi et de la santé, ainsi que de protéger les femmes défavorisées contre la violence, les abus et l’exploitation, enfin, d’inclure des renseignements sur ces mesures dans son prochain rapport.

Discrimination à l’égard des femmes dans le mariage et les rapports familiaux

Le Comité s’inquiète du fait qu’en vertu du Code de la famille de 2002 :

a)Les femmes ne peuvent s’unir dans les liens du mariage qu’avec le consentement d’un tuteur (art. 7) et elles ne peuvent se marier à un non-musulman que si ce dernier se convertit à l’islam (art. 23);

b)Il est nécessaire de donner à l’épouse une dot (mahr) pour que le mariage soit valide (art. 7, 20 et 21);

c)Les dérogations concernant l’âge minimum du mariage (18 ans) sont autorisées pourvu qu’elles soient autorisées par le tuteur légal de la mineure ou par un juge (art. 14);

d)La polygamie demeure, mais sous réserve que certaines garanties d’ordre financier soient accordées à la première femme de l’homme polygame (art. 22);

e)Le mari est le chef de la famille et sa femme doit respecter ses prérogatives (art. 31);

f)Seul le mari peut demander le divorce sans donner de justification; par contre, pour divorcer la femme doit fournir une preuve des préjudices qu’elle a subis (art. 39, par. 2) ou elle doit autrement, renoncer à ses droits de femme divorcée, et risque d’être tenue de verser des dommages et intérêts à son ex-mari;

g)La part d’héritage de la femme est inférieure de moitié à celle d’un homme, et celle d’une fille équivaut à la moitié de celle d’un garçon (art. 101 et suivant).

Le Comité rappelle l’article 16 de la Convention, qui est relatif à l’égalité des femmes et des hommes dans le mariage et les rapports familiaux de même que sa recommandation générale n o  21 (1994). Il prie donc l’État partie d’éliminer la discrimination à l’égard des femmes et des filles pour toutes les questions relatives au mariage, aux rapports familiaux et à la succession en abrogeant ou en modifiant les dispositions discriminatoires précédentes du Code de la famille, afin de les rendre conformes à la Convention, dans un délai précis.

Protocole facultatif

Le Comité prend note de la déclaration de la délégation selon laquelle le processus de ratification du Protocole facultatif à la Convention a été amorcé et il prie l’État partie d’accélérer ses efforts pour ratifier ledit protocole.

Modification du paragraphe 1 de l’article 1 de la Convention

Le Comité incite l’État partie à accélérer l’acceptation de la modification du paragraphe 1 de l’article 20 de la Convention concernant le moment de la réunion du Comité.

Déclaration et programme d’action de Beijing

Le Comité prie instamment l’État partie d’avoir, en s’acquittant de ses obligations en vertu de la Convention, pleinement recours à la Déclaration et programme d’action de Beijing qui renforce les dispositions de la Convention. Il demande à l’État partie d’inclure des renseignements à ce sujet dans son prochain rapport p é riodique.

Objectifs du Millénaire pour le développement

Le Comité souligne qu’une application pleine et entière de la Convention est indispensable pour atteindre les objectifs du Millénaire pour le développement. Il demande que l’on intègre une perspective soucieuse de l’équité entre les sexes et un désir explicite de refléter les dispositions de la Convention dans tous les efforts qui vise à réaliser les objectifs du Millénaire pour le développement. Il demande à l’État partie d’inclure des renseignements à ce sujet dans son prochain rapport périodique.

Diffusion

Le Comité demande que l’on diffuse largement à Djibouti les présentes observations finales afin de mettre le peuple, les fonctionnaires, les politiciens, les parlementaires et les organisations de femmes et de défense des droits de l’homme au courant des mesures qui ont été prises pour assurer l’égalité de droit et de fait des femmes et des hommes, ainsi que les autres mesures nécessaires pour ce faire. Il recommande que la diffusion inclue celle faite à l’échelon des collectivités locales. Il incite l’État partie à organiser une série de réunions pour parler des progrès accomplis dans l’application des présentes observations finales. Le Comité demande à l’État partie de diffuser largement, en particulier auprès des organisations de femmes et de défense des droits de l’homme, les recommandations générales du Comité, la Déclaration et le Programme d’action de Beijing ainsi que les textes issus de la vingt-troisième session extraordinaire de l’Assemblée générale sur le thème « Les femmes en l’an 2000 : égalité entre les sexes, développement et paix au XXI e  siècle ».

Ratification d’autres traités

Le Comité note que l’adhésion de l’État partie aux neufs principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme permettrait aux femmes de jouir davantage de leurs droits fondamentaux et de leurs libertés dans tous les domaines de l’existence. Le Comité incite donc l’État partie à envisager de ratifier les traités auxquels il n’est pas encore partie, comme la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, la Convention relative aux droits des personnes handicapées et la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les di s paritions forcées.

Suivi des observations finales

Le Comité demande à l’État partie de fournir dans un délai de deux ans, des renseignements écrits sur les mesures qui ont été prises pour mettre en œuvre les recommandations contenues dans les paragraphes 19 et 21 ci-dessus.

Assistance technique

Le Comité recommande à l’État partie de chercher une assistance technique internationale accrue et de se prévaloir de l’assistance technique pour élaborer et appliquer un programme complet visant à mettre en œuvre les recommandations qui précèdent et la Convention dans son ensemble. Le Comité prie aussi l’État partie de renforcer sa coopération avec les institutions spécialisées et les programmes du système des Nations Unies, y compris ONU-Femmes, la Division de statistique, le Programme des Nations Unies pour le Développement, le Fonds des Nations Unies pour l’enfance, le Fonds des Nations Unies pour la population, l’OMS, et le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme.

Préparation du prochain rapport

Le Comité demande à l’État partie de veiller à ce que tous les ministères et tous les organismes publics participent largement à la préparation de son prochain rapport périodique et consultent, pour ce faire, diverses organisations de femmes et de défense des droits de l’homme.

Le Comité demande à l’État partie de répondre aux préoccupations exprimées dans les présentes observations finales dans son prochain rapport périodique en vertu de l’article 18 de la Convention. Il invite l’État partie à présenter son prochain rapport périodique en juillet 2015.

Le Comité invite l’État partie à suivre les directives harmonisées pour l’établissement des rapports présentés en vertu des traités internationaux sur les droits de l’homme, y compris les directives sur un document de base commun et des documents spécifiques pour les traités qui ont été adoptés lors de la cinquième réunion intercomités des organes relatifs aux droits de l’homme, en juin 2006 (HRI/MC/2006/3 et Corr.1). Les directives d’établissement des rapports spécifiques à des traités adoptés par le Comité lors de sa quarantième session en janvier 2008 (A/63/38, annexe I) doivent être suivies de concert avec les directives harmonisées d’établissement des rapports figurant sur un document de base commun. Elles constituent ensemble les directives harmonisées sur la présentation des rapports en vertu de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. La longueur du document relatif à la Convention doit être d’un maximum de 40 pages, et celle du document de base commun ne doit pas dépasser 80 pages.