Nations Unies

CAT/C/57/D/709/2015

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr. générale

17 août 2016

Français

Original : anglais

Comité contre la torture

Décision adoptée par le Comité au titre de l’article 22 de la Convention, concernant la Communication no 709/2015 * , **

Communication p résentée par :

C. N. (représenté par un conseil, Tage Goettsche)

Au nom de :

L’auteur

État partie :

Danemark

Date de la requête :

28 octobre 2015 (lettre initiale)

Date de la présente décision :

29 avril 2016

Objet :

Expulsion

Questions de procédure :

Risque de torture et de mauvais traitements

Questions de fond :

Fondement des griefs

Article de la Convention :

3

1.1L’auteur de la communication est C. N., de nationalité nigériane, né en 1977. Il affirme que son expulsion vers le Nigéria constituerait une violation par le Danemark de l’article 3 de la Convention. L’auteur est représenté par un conseil.

1.2Le 28 octobre 2015, le Comité, agissant par l’intermédiaire de son Rapporteur chargé des nouvelles requêtes et des mesures provisoires de protection, a décidé de ne pas présenter de demande de mesures provisoires en application de l’article 114 de son règlement intérieur, et a considéré qu’il n’avait pas besoin des observations de l’État partie pour se prononcer sur la recevabilité de la présente communication.

Rappel des faits présentés par le requérant

2.1Le requérant a demandé l’asile au Danemark en juin 2014 affirmant qu’il était persécuté au Nigéria par le Département des services de l’État et par un terroriste présumé, un certain A. U., qui croyait que le requérant l’avait dénoncé aux autorités. Le 3 avril 2014, le requérant a été arrêté par le Département des services de l’État car son numéro de téléphone était enregistré dans la liste des contacts du téléphone d’un terroriste qui s’était évadé de prison le 30 mars 2014. Le requérant a indiqué qu’un inconnu l’avait abordé deux fois à la gare routière d’Abuja, où il travaillait, et que cet homme lui avait proposé de l’argent pour qu’il garde deux sacs jusqu’à ce qu’une autre personne vienne les chercher. Après avoir passé deux jours au siège du Département des services de l’État à Asokoro, le requérant a été remis en liberté. Le 14 avril 2014, après l’explosion d’une bombe à la gare routière, il a vu A. U. au journal télévisé et constaté qu’il s’agissait de l’inconnu qui l’avait abordé. Peu de temps après, A. U. a contacté le requérant par téléphone, l’accusant de l’avoir dénoncé. Le Département des services de l’État a également contacté le requérant pour le convoquer à un autre interrogatoire. Cependant, l’un des agents du Département l’a averti qu’il serait arrêté s’il se présentait à cet interrogatoire. Le 19 mai 2014, le requérant a quitté le Nigéria.

2.2Le requérant est arrivé au Danemark en juin 2014, sans passeport ni documents de voyage valables. Le 1er septembre 2015, le Service danois de l’immigration a rejeté sa demande d’asile. Le 14 octobre 2015, la Commission de recours des réfugiés a rejeté son recours et confirmé la décision du Service de l’immigration, considérant que son récit n’était pas crédible. Suite à la décision de la Commission, le requérant a été arrêté le 18 août 2014, et deux documents ont été trouvés sur lui : une description manuscrite de l’itinéraire entre le Nigéria et le centre d’accueil pour demandeurs d’asile de Sandholm, au Danemark, et un modèle de demande d’asile établi sur ordinateur, comportant des blancs à remplir. Ces documents, de même que certaines contradictions dans son récit, ont fait que la Commission a pris sa décision à la majorité de ses membres.

Teneur de la plainte

3.Le requérant affirme que la décision de la Commission des recours des réfugiés a été arbitraire car tous les éléments de son récit ont été mis en doute sans que le stress qu’il vivait et que son état psychologique soient pris en considération, et qu’aucune enquête n’a été menée pour déterminer l’ampleur du risque qu’il courrait s’il était renvoyé au Nigéria. Le requérant soutient que, s’il était expulsé, il courrait un risque réel d’être tué par le Département des services de l’État ou par Boko Haram.

Délibérations du Comité

4.1Avant d’examiner une plainte soumise dans une requête, le Comité contre la torture doit déterminer si la requête est recevable en vertu de l’article 22 de la Convention. Le Comité s’est assuré, comme il est tenu de le faire conformément au paragraphe 5 a) de l’article 22 de la Convention, que la même question n’a pas été et n’est pas actuellement examinée par une autre instance internationale d’enquête ou de règlement.

4.2Le Comité relève qu’aux fins de l’espèce, le requérant a fait référence à un bref résumé traduit de la décision rendue le 14 octobre 2014 par la Commission de recours des réfugiés, sans donner plus de précisions sur ses allégations de persécution par le Département des services de l’État ou par A. U. au Nigéria. Le Comité relève également que le requérant n’a pas avancé d’arguments suffisants montrant en quoi les décisions des autorités danoises ont été arbitraires comme il l’affirme, hormis l’argument selon lequel les incohérences de son récit seraient dues au stress provoqué par les nombreux entretiens qu’il avait eus pendant la procédure d’asile. Le Comité observe toutefois que la décision de rejet de la demande d’asile rendue par les autorités de l’État partie n’était pas exclusivement fondée sur les incohérences du récit du requérant, mais qu’elle reposait aussi sur d’autres considérations, en particulier les deux documents qui avaient été trouvés sur lui au moment de son arrestation en août 2014 (voir par. 2.2 ci-dessus). Le Comité constate que le requérant n’a pas traité cette question dans sa lettre.

4.3Le Comité considère que, dans les circonstances de la cause, les renseignements succincts fournis par le requérant ne permettent ni d’établir qu’il court le risque d’être torturé au Nigéria par le Département des services de l’État ou par A. U., ni de vérifier si les décisions au sujet de sa demande d’asile qui ont été rendues par les autorités danoises de l’immigration et par d’autres organes ont véritablement été arbitraires. Le Comité conclut dès lors que le requérant n’a pas suffisamment étayé ses griefs aux fins de la recevabilité.

5.En conséquence, le Comité contre la torture décide :

a)Que la requête est irrecevable en vertu du paragraphe 2 de l’article 22 de la Convention ;

b)Que la présente décision sera communiquée à l’État partie et au requérant.