Nations Unies

CRC/C/NGA/CO/3-4

Convention relative aux droits de l’enfant

Distr. générale

21 juin 2010

Français

Original: anglais

Comité des droits de l’enfant

Cinquante-quatrième session25 mai-11 juin 2010

Examen des rapports soumis par les États parties en application de l’article 44 de la Convention

Observations finales: Nigéria

1.Le Comité a examiné les troisième et quatrième rapports périodiques du Nigéria, présentés en un seul document (CRC/C/NGA/CO/3-4), à ses 1505e et 1507e séances (CRC/C/SR.1505 et 1507), tenues le 26 mai 2010, et a adopté à sa 1541e séance, tenue le 11 juin 2010, les observations finales ci-après.

A.Introduction

2.Le Comité accueille avec intérêt les troisième et quatrième rapports périodiques du Nigéria, présentés en un seul document, ainsi que les réponses données par écrit à sa liste de points à traiter (CRC/C/NGA/Q/3-4/Add.1), et félicite l’État partie pour le caractère franc et critique du rapport. Il a apprécié la présence d’une délégation de haut niveau, conduite par le Ministre des questions féminines et du développement social et le dialogue constructif qu’il a pu avoir avec cette délégation.

B.Mesures de suivi adoptées et progrès accomplis par l’État partie

3.Le Comité se félicite des faits nouveaux positifs survenus dans la mise en œuvre de la Convention, dont:

a)L’adoption de dispositions législatives promulguant la loi de 2003 sur les droits de l’enfant dans 24 États de la Fédération;

b)La loi de 2005 d’application et d’administration de la loi interdisant la traite des personnes (Amendement);

c)L’adoption de politiques et de stratégies visant à renforcer l’application de la Convention, y compris:

i)Le Plan national d’action de 2008 pour la Convention relative aux droits de l’enfant et la loi sur les droits de l’enfant (2009-2015);

ii)Le Plan national d’action pour la promotion et la protection des droits de l’homme au Nigéria (2009-2013);

iii)La Politique nationale de l’enfance et la Politique nationale de la santé de l’enfant de 2007;

iv)Le Plan national d’action de 2007 pour les orphelins et les autres enfants vulnérables (2006-2010);

v)La Politique nationale et les directives relatives à la création d’institutions pour enfants au Nigéria et à leur surveillance;

vi)La Politique nationale pour la santé des adolescents (2006) et la Stratégie intégrée pour la santé maternelle, néonatale et infantile (2007);

vii)Le Plan d’action élaboré par la Commission nationale de la population en vue de la création d’un système d’enregistrement des naissances permanent et durable.

4.Le Comité se félicite également de la ratification par l’État partie des instruments suivants:

a)La Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille le 27 juillet 2009;

b)La Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées le 27 juillet 2009;

c)Le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants le 27 juillet 2009;

d)La Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide le 27 juillet 2009.

Principaux sujets de préoccupation et recommandations

1.Mesures d’application générales (art. 4, 42 et 44 (par. 6) de la Convention) et recommandations antérieures du Comité

5.Le Comité se félicite des efforts déployés par l’État partie pour donner suite aux préoccupations et aux recommandations exprimées à l’occasion de l’examen du deuxième rapport périodique de l’État partie en 2005 (voir CRC/C/15/Add.257). Il note toutefois avec préoccupation que certaines recommandations n’ont pas été suffisamment suivies d’effets.

6. Le Comité invite instamment l’État partie à prendre toutes les mesures nécessaires pour donner effet aux recommandations formulées dans les observations finales sur le deuxième rapport périodique qui n’ont pas encore été appliquées et pour donner la suite voulue aux recommandations concernant, entre autres, les systèmes de collecte de données, l’harmonisation des divers âges minimum et des définitions, la peine de mort, la justice pour mineurs, les châtiments corporels et les enfants handicapés, formulées dans les présentes observations finales sur les troisième et quatrième rapports périodiques, présentés en un seul document.

Législation

7.Le Comité accueille avec satisfaction la révision constitutionnelle en cours dans l’État partie et, dans ce contexte, la proposition d’intégrer la loi sur les droits de l’enfant à la liste des compétences partagées, ce qui la rendrait automatiquement applicable dans tous les États de la Fédération. Il reste toutefois préoccupé par le fait que la plupart des États du Nord de l’État partie n’ont pas encore adopté la loi sur les droits de l’enfant et par les informations selon lesquelles certains des États qui l’ont adoptée ont opté pour une définition de l’enfant qui n’est pas conforme à celle que donne la Convention. Le Comité regrette en outre que l’État partie n’ait pas procédé à une vérification complète de la compatibilité des dispositions du droit écrit, de la loi religieuse (charia) et du droit coutumier avec la Convention et la loi sur les droits de l’enfant.

8. Le Comité recommande vivement à l’État partie de veiller à ce que la loi sur les droits de l’enfant soit ajoutée à la liste des compétences partagées dans le cadre de la révision constitutionnelle en cours. Il lui recommande de procéder à un examen complet de la législation existante et du droit positif, afin de vérifier que toutes les lois en vigueur tant au niveau fédéral qu’au niveau des États, y compris les lois religieuses et coutumières, sont pleinement conformes à la Convention, comme le recommande aussi le Rapporteur spécial sur la liberté de religion ou de conviction. L’État partie est vivement encouragé à faire en sorte que les États qui n’ont pas encore adopté la loi sur les droits de l’enfant le fassent dans les plus brefs délais, ainsi qu’à poursuivre et à renforcer ses activités de sensibilisation à la Convention et à cette loi dans ces États.

Coordination

9.Le Comité prend note avec satisfaction du rôle de coordination que joue le Ministère fédéral des questions féminines et du développement social dans la mise en œuvre de la Convention dans l’État partie, de la création de ministères dévolus exclusivement aux questions relatives aux femmes et aux enfants dans tous les États et de comités d’application des droits de l’enfant aux niveaux de la Fédération et des États et au niveau local pendant la période considérée, le Comité reste préoccupé par l’absence de mécanisme garantissant la prise en considération des droits de l’enfant dans tous les ministères et la coordination des politiques et des programmes adoptés aux niveaux national, des États et local. Il juge préoccupantes les informations selon lesquelles le Ministère fédéral des questions féminines et du développement social ne dispose pas des ressources nécessaires pour s’acquitter efficacement de son mandat relatif aux droits de l’enfant, ni pour en faire sa priorité. Dans ce contexte, le Comité prend note avec satisfaction du projet de loi en attente d’adoption par l’Assemblée nationale, qui vise à créer un organisme de protection de l’enfance qui serait le principal organe de coordination relatif aux droits de l’enfant dans l’État partie.

10.Tout en prenant acte avec satisfaction des informations faisant état d’une collaboration constructive avec les dirigeants traditionnels (sultans, émirs et chefs) dans l’État partie, le Comité constate avec préoccupation qu’à l’heure actuelle, compte tenu du rôle central qui leur incombe dans l’application effective de la Convention et de la loi sur les droits de l’enfant sur le terrain, les autorités locales ne participent pas suffisamment à la coordination et à la mise en œuvre des politiques relatives aux droits de l’enfant au niveau local.

11. Le Comité, se référant à sa recommandation antérieure (CRC/C/15/Add.257, par. 15), recommande vivement à l’État partie d’adopter dans les meilleurs délais le projet de loi visant à créer un organisme de protection de l’enfance permanent et de veiller à ce que cet organisme soit doté d’un solide mandat de coordination, notamment interministérielle et intergouvernementale. Il lui recommande aussi fortement de définir des stratégies pour associer officiellement les chefs traditionnels et religieux à la réalisation effective des droits consacrés par la Convention au niveau local.

Plan national d’action

12.Le Comité se félicite de l’adoption, conformément à ses recommandations antérieures (CRC/C/15/Add.257, par. 18), du Plan national d’action pour la Convention relative aux droits de l’enfant et la loi sur les droits de l’enfant (2009-2015), qui fait des enfants une priorité des politiques de l’État et met l’accent sur la santé, l’éducation et la protection des enfants. Tout en notant avec satisfaction que l’État partie prend des mesures pour appliquer et financer le Plan d’action, il constate avec préoccupation que réaliser une évaluation fondée sur les résultats, sexospécifique et factuelle du coût de mise en œuvre de ce Plan reste un problème.

13. Le Comité recommande à l’État partie de veiller à la réalisation effective du Plan national d’action pour la Convention relative aux droits de l’enfant et la loi sur les droits de l’enfant (2009-2015), notamment en établissant et en mettant en œuvre un plan des dépenses doté d’indicateurs clairs et en allouant les ressources financières et humaines nécessaires à sa mise en œuvre.

Suivi indépendant

14.Le Comité se félicite à nouveau (CRC/C/15/Add.257, par. 20) qu’un rapporteur spécial sur les droits de l’enfant, chargé de contrôler et de collecter des données sur les violations des droits de l’enfant dans l’État partie, ait été nommé au sein de la Commission nationale des droits de l’homme. Il s’inquiète toutefois des ressources humaines et financières mises à sa disposition et regrette que le rapport de l’État partie ne donne aucune information sur son indépendance et ses activités, à la lumière notamment de la décision d’octobre 2007 du Comité international de coordination des institutions nationales de promotion et protection des droits de l’homme de rétrograder la Commission au statut B.

15. Le Comité invite instamment l’État partie à veiller à ce que la Commission nationale des droits de l’homme soit conforme aux Principes de Paris et dispose de ressources financières et humaines adéquates, notamment en faisant en sorte que le Rapporteur spécial sur les droits de l’enfant de la Commission soit facilement accessible aux enfants et doté de ressources suffisantes, compte tenu de l’Observation générale n o  2 sur le rôle des institutions nationales indépendantes de défense des droits de l’homme dans la protection et la promotion des droits de l’enfant.

Allocation de ressources

16.Le Comité se félicite des informations selon lesquelles les crédits budgétaires alloués à la santé et à l’éducation ont augmenté et les fonds économisés grâce au programme d’allégement de la dette seront investis dans des programmes en faveur des enfants. Il se félicite également des informations fournies par l’État partie selon lesquelles une rubrique relative à la santé maternelle et néonatale a été ajoutée dans le plan budgétaire de l’État pour 2010. Il prend note avec satisfaction de la mise en œuvre d’un programme complet de réforme de l’économie et de la lutte contre la corruption, qui comprend l’engagement de poursuites contre des agents de l’État et la création d’une équipe spéciale interorganisations de lutte contre la corruption. Il souhaite toutefois rappeler les préoccupations qu’il a déjà exprimées concernant l’insuffisance des crédits budgétaires alloués à l’enfance, le caractère endémique de la corruption (CRC/C/15/Add.257, par. 21) et les effets néfastes de celle-ci sur la protection et la promotion des droits de l’enfant. Le Comité juge très préoccupantes les informations selon lesquelles, les gouvernements des États et locaux n’étant pas tenus de présenter des rapports sur le budget et les dépenses au Gouvernement, ce dernier n’est pas en mesure de contrôler la manière dont les fonds sont dépensés.

17. Le Comité recommande vivement à l’État partie d’entreprendre une analyse budgétaire des ressources allouées à l’enfance et de charger un organe gouvernemental qu’il aura doté des moyens nécessaires de contrôler et d’évaluer l’utilisation de ces ressources. À cet effet, il engage l’État partie, en tenant compte des recommandations qu’il a formulées lors de sa journée de débat général sur le thème «Ressources pour les droits de l’enfant - responsabilité des États», à:

a) Prendre toutes les mesures nécessaires pour prévenir et combattre efficacement la corruption, notamment en renforçant l’application des mécanismes existants au titre du programme de lutte contre la corruption mis en place par l’État partie et en enquêtant sur tous les cas de corruption et en poursuivant les suspects;

b) Utiliser une approche axée sur les droits de l’enfant pour l’élaboration du budget de l’État en appliquant un système de suivi de l’affectation et l’emploi des ressources destinées aux enfants dans l’ensemble du budget, assurant ainsi la visibilité des investissements en faveur des enfants. Le Comité demande aussi instamment à l’État partie d’utiliser ce système de suivi pour évaluer de quelle manière les investissements réalisés dans tel ou tel secteur peuvent servir «l’intérêt supérieur de l’enfant», en veillant à mesurer l’incidence de ces investissements sur les filles d’une part et sur les garçons d’autre part;

c) Veiller à ce que les enfants soient consultés lors du processus d’élaboration du budget, comme le Parlement des enfants en a fait la demande au Gouvernement fédéral;

d) Dans la mesure du possible, donner suite à la recommandation de l’Organisation des Nations Unies quant à la mise en place d’une budgétisation fondée sur les résultats pour contrôler et évaluer l’efficacité de la répartition des ressources et, si nécessaire, faire appel à la coopération internationale à cette fin;

e) Définir des lignes budgétaires stratégiques pour venir en aide aux enfants défavorisés ou particulièrement vulnérables, notamment les orphelins, les enfants des rues et les enfants déplacés, et pour faire face aux situations susceptibles de requérir des mesures sociales volontaristes (comme l’enregistrement des naissances) et veiller à ce que ces lignes budgétaires soient protégées, même en cas de crise économique, de catastrophes naturelles ou d’autres situations d’urgence;

f) Définir des lignes budgétaires stratégiques pour les secteurs sociaux clefs, notamment la santé et l’éducation, pour les États du Nord de l’État partie, afin de remédier aux disparités existant dans la réalisation des droits économiques et sociaux des enfants;

g) Mettre en place un système de contrôle de l’affectation et de l’emploi des fonds du Gouvernement fédéral par les gouvernements des États et les autorités locales, afin d’améliorer la transparence.

Collecte de données

18.Le Comité prend note avec satisfaction de la création, pendant la période à l’étude, du Bureau national de statistique et de son département exclusivement dévolu aux statistiques relatives à l’enfant. Il se félicite de la création de la chaire «Convention relative aux droits de l’enfant» (CDE) à l’Université de Lagos et de l’Enquête initiale nationale qu’elle a entreprise sur la protection des enfants (y compris ses indicateurs). Le Comité constate toutefois qu’il reste à collecter et à analyser des données sur les enfants privés d’environnement familial, refugiés ou déplacés, en conflit avec la loi ou handicapés, ainsi que sur les familles monoparentales.

19. Le Comité encourage l’État partie à continuer de renforcer son système de collecte de données, notamment en le dotant de ressources financières et humaines suffisantes et en favorisant une coopération et une collaboration étroites entre les entités concernées telles que le Département du développement de l’enfant, les Comités de mise en œuvre des droits de l’enfant, le Bureau national de statistique, le Bureau d’information sur les droits de l’enfant du Ministère de l’intérieur (CRC/C/15/Add.257, par. 5), les universités et les partenaires de développement. Il recommande de publier des rapports annuels sur la situation des droits de l’enfant dans l’État partie et rappelle à l’État partie l’Observation générale n o  5 (2003) sur les mesures d’application générale.

Diffusion, formation et sensibilisation

20.Le Comité se félicite des efforts déployés par l’État partie pour faire mieux connaître les droits de l’enfant par des programmes de formation et de sensibilisation destinés aux principaux groupes cibles, mais regrette qu’il s’agisse surtout d’initiatives ponctuelles. Il regrette également l’absence de programmes de formation continus et complets sur la Convention et la loi sur les droits de l’enfant destinés aux principales catégories de professionnels, notamment les forces de l’ordre, le corps judiciaire, le personnel pénitentiaire, les professionnels de la santé, les travailleurs sociaux, les fonctionnaires des gouvernements locaux et les chefs traditionnels et religieux.

21. Le Comité recommande de dispenser de manière systématique une formation sur la Convention et la loi sur les droits de l’enfant à toutes les catégories de professionnels travaillant pour ou avec des enfants, en accordant la priorité aux policiers, aux juges, au personnel pénitentiaire et au personnel des institutions pour enfants, y compris en procédant à la révision nécessaire des manuels de formation et des procédures opérationnelles. À cet égard, il recommande de faire de la large diffusion des résultats relatifs à la protection de l’enfance de l’Enquête initiale nationale pour les groupes concernés un outil essentiel de sensibilisation à la situation des droits de l’enfant dans l’État partie.

22. Conscient de la richesse linguistique de l’État partie, le Comité recommande vivement que la Convention et la loi sur les droits de l’enfant soient traduites outre dans les trois principales langues locales (hausa, igbo et yoruba) dans les langues parlées dans la Fédération et qu’elles soient largement diffusées, en particulier dans les communautés rurales. À la lumière des paragraphes a) et d) de l’article 17 de la Convention, il encourage la participation active des médias.

Coopération avec la société civile

23.Le Comité se félicite que, selon l’État partie, les institutions de l’État travaillent en étroite collaboration avec les organisations de la société civile à faire avancer la mise en œuvre des droits de l’enfant, comme en témoigne le processus participatif ayant présidé à l’élaboration du rapport de l’État partie. Il constate toutefois avec préoccupation que l’État partie s’en remet à des organisations de la société civile pour fournir des services sociaux, notamment dans les domaines de la garde et de l’éducation des enfants, ce qui peut nuire à la position de l’État partie en tant que premier responsable de la réalisation des droits inscrits dans la Convention.

24. Le Comité encourage l’État partie à renforcer sa coopération avec la société civile pour améliorer la protection et la promotion des droits de l’homme dans l’État partie, et notamment de l’associer à la mise en œuvre des observations finales du Comité.

25. Le Comité reconnaît que les acteurs non gouvernementaux jouent un rôle important dans la fourniture de services aux enfants, mais il recommande à l’État partie de procéder à une évaluation approfondie du rôle qu’elles assument concernant la fourniture de services sociaux de base aux enfants, s’agissant en particulier de la gestion des institutions accueillant des enfants et de l’éducation. Il rappelle à l’État partie qu’il a pour obligation de veiller à ce que les prestataires de services non étatiques respectent la Convention (Observation générale n o  5 (2003) sur les mesures d’application générale, par. 44). À cet égard, l’État partie est vivement encouragé à instaurer un système de contrôle et d’évaluation continus des services sociaux fournis aux enfants par des entités privées, notamment en définissant des normes adéquates (voir la journée de débat général du Comité sur le thème: «Le secteur privé en tant que prestataire de service et son rôle dans la mise en œuvre des droits de l’enfant» (2002)).

Définition de l’enfant (art. 1er de la Convention)

26.Le Comité constate que la loi sur les droits de l’enfant donne une définition de l’enfant conforme à la Convention et fixe l’âge minimum du mariage à 18 ans, mais note avec une vive préoccupation que, dans certains États, les dispositions législatives incorporant la loi sur les droits de l’enfant dans l’ordre juridique interne fixent cet âge à 16 ans (État d’Akwa Ibom) ou donnent une définition de l’enfant fondée non sur l’âge, mais sur le critère de la «puberté» (État de Jigawa), critère qui serait utilisé pour justifier les mariages précoces. Il fait part à nouveau de l’inquiétude exprimée en 2005 concernant le fait que l’âge de la majorité varie énormément d’un État à l’autre et que, dans bien des cas, cet âge minimum est très bas (CRC/C/15/Add.257, par. 27).

27. Le Comité invite instamment l’État partie à veiller à ce que la définition de l’enfant donnée dans les dispositions législatives incorporant la loi sur les droits de l’enfant dans la législation des États soit pleinement conforme à celle de la Convention, notamment en modifiant les lois sur les droits de l’enfant récemment adoptées dans les États d’Akwa Ibom et de Jigawa. À cette fin, il engage l’État partie à intensifier son dialogue avec les chefs traditionnels et religieux et les autorités des États afin de faire mieux comprendre l’importance de considérer les personnes de moins de 18 ans comme des enfants ayant des droits et des besoins particuliers consacrés par la Convention. Le Comité recommande à cet effet à l’État partie de prendre exemple sur la récente campagne d’éradication de la poliomyélite.

Principes généraux (art. 2, 3, 6 et 12 de la Convention)

Non-discrimination

28.Le Comité note avec satisfaction que la Constitution comprend des dispositions relatives à la non-discrimination et se félicite que le projet de loi sur la lutte contre la discrimination soit sur le point d’être adopté par l’Assemblée nationale. Il reste toutefois préoccupé par le fait que la discrimination de facto à l’égard des enfants est généralisée et tolérée dans l’État partie, notamment la discrimination à l’égard des filles, mais aussi à l’égard des enfants handicapés, des enfants des rues et des enfants appartenant à des groupes minoritaires.

29. Le Comité demande à l’État partie de fournir davantage d’informations dans son prochain rapport périodique sur les mesures prises pour donner effet dans la pratique au principe de non-discrimination consacré par l’article 2 de la Convention, s’agissant en particulier de la discrimination à l’égard des filles, des enfants handicapés, des enfants des rues et des enfants appartenant à des groupes minoritaires. L’État partie est encouragé à envisager des programmes de discrimination positive visant à garantir aux filles un accès effectif à l’éducation et à prévenir les abondons scolaires précoces, notamment en renforçant les programmes existants, comme le projet relatif à l’égalité entre les sexes du Gouvernement fédéral.

Intérêt supérieur de l’enfant

30.Le Comité se félicite que la loi sur les droits de l’enfant dispose expressément que l’intérêt supérieur de l’enfant doit être la considération primordiale dans toutes les questions relatives aux enfants et accueille avec satisfaction les informations selon lesquelles les tribunaux de l’État partie fondent régulièrement leurs décisions sur ce principe. Il juge toutefois préoccupant que certaines pratiques contraires à ce principe comme à d’autres principes généraux de la Convention semblent être considérées comme tenant compte de l’intérêt supérieur de l’enfant. Au nombre de ces pratiques figurent le placement en centres d’éducation surveillée, d’enfants appartenant à des groupes vulnérables dans des foyers et le placement en détention d’enfants accusés de délits d’état et d’enfants enfermés dans leur propre intérêt, à la demande de leurs parents qui les jugent «incontrôlables».

31. Le Comité recommande vivement à l’État partie de veiller à ce que le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant soit explicitement reconnu dans les nouvelles dispositions législatives incorporant la loi sur les droits de l’enfant dans l’ordre juridique interne des États. Il invite instamment l’État partie à faire officiellement de l’intérêt supérieur de l’enfant un principe directeur des mesures concernant les enfants, notamment les décisions relatives aux enfants sans protection parentale et les décisions prises par le système de justice pour mineurs, en mettant les codes pénaux intégrant la charia en conformité avec ce principe et en veillant à son application dans la pratique.

Droit à la vie, à la survie et au développement

32.Tout en notant avec satisfaction que la loi sur les droits de l’enfant interdit la peine de mort, le Comité juge très préoccupantes les informations selon lesquelles une quarantaine de prisonniers se trouveraient dans le quartier des condamnés à mort pour des infractions commises alors qu’ils avaient moins de 18 ans. Il partage la vive préoccupation du Comité africain d’experts sur les droits et le bien-être de l’enfant concernant le caractère obligatoire de la peine de mort pour certaines infractions (y compris les crimes de hadd) dans les codes pénaux intégrant la charia, qui fait que, faute de définition de l’enfant en tant que personne âgée de moins de 18 ans et compte tenu que, dans certains États, la définition de l’enfant est fondée sur le critère de la puberté, des enfants pourraient être condamnés à mort. Le Comité est gravement préoccupé par l’incidence de la violence intercommunautaire et politique sur les enfants, et particulièrement par les informations selon lesquelles les forces de l’ordre se sont rendues coupables d’exécutions extrajudiciaires d’enfants. Les conflits ethniques seraient une des principales raisons pour lesquelles des enfants deviennent orphelins.

33. Le Comité recommande à l’État partie de saisir l’occasion de la révision de la Constitution en cours pour interdire expressément l’application de la peine de mort aux personnes de moins de 18 ans. Il invite instamment l’État partie à:

a) Revoir les dossiers de tous les prisonniers se trouvant dans le quartier des condamnés à mort pour des infractions commises avant l’âge de 18 ans, comme l’a recommandé le Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires;

b) Interdire dans la législation nationale l’application de la peine de mort aux personnes de moins de 18 ans, en procédant notamment aux adaptations nécessaires dans l’interprétation des codes pénaux intégrant la charia, conformément à la Convention;

c) Faire figurer dans son prochain rapport périodique des informations complètes sur toutes les mesures prises pour garantir aux enfants le droit à la vie, à la survie et au développement.

Respect de l’opinion de l’enfant

34.Le Comité se félicite de la création de parlements des enfants dans les 36 États de la Fédération, conformément à la recommandation du Comité (CRC/C/15/Add.257, par. 35), et de leur participation active à des instances nationales et internationales. Il note toutefois avec préoccupation que les enfants sont peu associés aux décisions les concernant dans les institutions pour enfants de tout genre, dans la communauté et dans la famille, ainsi que dans le cadre des procédures judiciaires et administratives. Le Comité regrette que le principe de la participation des enfants soit mal accepté, en particulier dans les zones rurales, et note avec satisfaction que l’État partie est conscient de cette situation.

35. À la lumière de l’article 12 de la Convention et compte tenu de l’Observation générale n o  12 (2009) sur le droit de l’enfant d’être entendu, le Comité invite instamment l’État partie à:

a) Renforcer l’efficacité du fonctionnement des parlements des enfants, en particulier l’exécution de leur mission de délibération et d’élaboration de projets de loi relatifs à l’enfance, et veiller à ce qu’ils comptent des représentants de tous les secteurs de la société, y compris des orphelins, des enfants handicapés, des enfants réfugiés et d’autres enfants ayant des besoins spéciaux;

b) Prendre des mesures efficaces pour que le droit de l’enfant d’être entendu soit respecté et appliqué dans toutes les procédures judiciaires civiles et pénales, ainsi que dans les procédures administratives, y compris celles qui concernent des enfants bénéficiant d’une protection de remplacement (CRC/C/GC/12, par. 97);

c) Prendre des mesures efficaces pour faire mieux comprendre l’intérêt de respecter le droit de l’enfant d’être entendu dans tous les établissements fréquentés par des enfants et à tous les niveaux de la société, en particulier au niveau communautaire, notamment par des activités de sensibilisation telles que le dialogue avec les chefs traditionnels et religieux et la formation des adultes et des enfants, y compris la formation par les pairs, afin que les enfants acquièrent des compétences qui leur permettent de participer effectivement à toutes les décisions les concernant.

Droits civils et libertés (art. 7, 8, 13 à 17, 19 et 37 a) de la Convention)

Enregistrement des naissances et préservation de l’identité

36.Le Comité prend note avec satisfaction des mesures prises par l’État partie pour améliorer l’enregistrement des naissances. Au nombre de ces mesures figurent l’élaboration d’un plan d’action portant sur la création de systèmes d’enregistrement des naissances permanents, la mise en place de dispositifs d’enregistrement des naissances dans tous les hôpitaux gouvernementaux, l’augmentation du taux d’enregistrement des naissances, qui est passé de 30,2 % en 2006 à 47 % en 2008, ainsi que l’association de la procédure d’enregistrement des naissances et des programmes de vaccination de routine. Le Comité prend note avec satisfaction des informations fournies par l’État partie sur l’organisation deux fois par an de la semaine de la santé maternelle, néonatale et infantile, durant laquelle il est procédé à l’enregistrement de naissances, et sur la mise en place en octobre 2009 d’un service de sages-femmes dans les zones rurales. Il reste toutefois préoccupé par le faible taux d’enregistrement des naissances, en particulier dans les zones rurales, et par le non-enregistrement des enfants nés ailleurs qu’à hôpital, en raison de la méconnaissance de la législation existante, du nombre restreint de centres d’enregistrement, des ressources financières limitées et de l’absence d’une infrastructure d’enregistrement efficace. Le Comité note avec préoccupation qu’en vertu de la loi no 69 de 1992 sur l’enregistrement obligatoire des naissances et des décès l’enregistrement de la naissance est payant s’il est effectué passé un délai de soixante jours après la naissance et dans les douze mois suivant celle-ci. Il est préoccupé par la persistance, dans certaines régions du pays, de la pratique consistant à apposer des marques tribales ou d’autres tatouages sur le corps de l’enfant à des fins d’identification.

37. Le Comité recommande à l’État partie de poursuivre et d’accentuer les efforts déployés pour que l’enregistrement des naissances soit gratuit et obligatoire pour tous les enfants. Il invite instamment à:

a) Sensibiliser à l’importance de l’enregistrement des naissances et faire mieux connaître la législation existante;

b) Allouer des ressources financières, humaines et autres suffisantes pour faciliter l’accès de la population des zones rurales à l’enregistrement et, en particulier, renforcer les programmes de formation destinés au personnel chargé d’enregistrer les naissances et aux sages-femmes;

c) Encourager les sages-femmes à signaler toutes les naissances à l’administration et leur dispenser une formation sur la manière de faire;

d) Modifier la loi n o  69 de 1992 sur l’enregistrement obligatoire des naissances et des décès de façon à garantir la gratuité de l’enregistrement des naissances, indépendamment du moment où il est fait, et, dans l’intervalle, prolonger indéfiniment la suspension de trois ans (2005-2008) du règlement des frais;

e) Faire en sorte que les organes de contrôle, en particulier les comités des États pour l’enregistrement des naissances, fonctionnent de manière efficace, notamment en les dotant de ressources adéquates;

f) Mettre en œuvre, notamment par le biais des médias, des programmes de sensibilisation à l’importance et à l’intérêt de l’enregistrement des naissances dans les zones rurales.

Torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

38.Le Comité prend note des projets de loi relatifs à la définition et à l’interdiction de la torture conformément à l’article premier de la Convention contre la torture et de la création d’une commission d’enquête sur les cas de torture. Il juge toutefois extrêmement préoccupantes les informations selon lesquelles la torture et d’autres formes de mauvais traitements sont couramment infligées pendant les gardes à vue, et plus préoccupantes encore les informations selon lesquelles des enfants âgés d’à peine 11 ans ont été détenus dans des conditions inhumaines au sein du Département des enquêtes pénales. À cet égard, le Comité est gravement préoccupé par le manque de données relatives au nombre et à la nature des plaintes pour torture et autres formes de mauvais traitements d’enfants privés de liberté.

39. Le Comité engage instamment l’État partie:

a) À accélérer l’adoption du projet de loi de l’Assemblée nationale visant à interdire la torture et envisager d’introduire l’interdiction absolue de la torture dans la Constitution;

b) À prendre toutes les mesures nécessaires pour qu’aucune personne de moins de 18 ans ne soit soumise à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, conformément à l’alinéa a de l’article 37 de la Convention, notamment en mettant en place une surveillance indépendante des lieux de détention et en organisant des programmes de formation complets à l’intention des membres du personnel de sécurité et de police, en particulier des unités spéciales de police chargées des enfants en conflit avec la loi;

c) À créer un système efficace de recueil des plaintes et de collecte de données concernant les allégations de torture ou d’autres formes de mauvais traitement infligé aux enfants privés de liberté et à veiller à ce que toutes ces allégations fassent rapidement l’objet d’enquêtes en bonne et due forme et donnent lieu à des poursuites.

Châtiments corporels

40.Le Comité reste préoccupé par le peu, voire l’absence de mesures prises ou prévues par l’État partie pour donner suite à ses recommandations antérieures relatives à l’interdiction des châtiments corporels, notamment pour modifier les dispositions pertinentes du Code pénal et de la loi sur les enfants et les jeunes qui sont contraires aux obligations de l’État partie conformément à la loi sur les droits de l’enfant et à la Convention.

41. Le Comité engage instamment l’État partie à interdire les châtiments corporels dans tous les contextes, y compris ceux infligés au domicile et en vertu de la charia, comme il lui a déjà recommandé de le faire dans ses recommandations antérieures (CRC/C/15/Add.257, par. 38). En outre, le Comité recommande vivement à l’État partie de conduire des campagnes de sensibilisation pour que d’autres types de sanctions disciplinaires soient utilisés, d’une manière qui respecte la dignité humaine de l’enfant. Il attire l’attention de l’État partie sur l’Observation générale n o 8 (2006) sur le droit de l’enfant à une protection contre les châtiments corporels et les autres formes cruelles ou dégradantes de châtiments. À cet égard, le Comité recommande également à l’État partie de solliciter l’aide des chefs traditionnels et religieux dans ce domaine.

Suite donnée à l’étude des Nations Unies sur la violence à l’encontre des enfants

42.Le Comité se félicite du projet de loi sur l’élimination de la violence dans la société et de l’adoption par les États de lois interdisant les actes de violence contre les filles et les femmes pour appuyer le projet de loi fédérale. Néanmoins, le Comité exprime une nouvelle fois son inquiétude au sujet de la persistance de la violence contre les enfants, en particulier de la violence sexiste.

43. En ce qui concerne l’Étude des Nations Unies sur la violence à l’encontre des enfants, le Comité recommande à l’État partie:

a) De prendre toutes les mesures nécessaires pour mettre en œuvre les recommandations contenues dans l’Étude des Nations Unies sur la violence à l’encontre des enfants (A/61/299), en tenant compte des résultats et recommandations de la consultation régionale pour l’Afrique de l’Ouest, tenue au Mali du 24 au 25 mai 2005. En particulier, le Comité recommande à l’État partie d’accorder une attention particulière aux recommandations suivantes:

i) Interdire toutes les formes de violence contre les enfants;

ii) Renforcer l’engagement et l’action aux niveaux national et local;

iii) Promouvoir les valeurs non violentes et sensibiliser;

iv) Renforcer les capacités de tous ceux qui travaillent avec et pour les enfants;

v) Établir l’obligation de répondre de ses actes et mettre fin à l’impunité;

b) De faire de ces recommandations un instrument d’action en partenariat avec la société civile, et notamment avec la participation des enfants, pour que chaque enfant soit protégé contre toutes les formes de violence physique, sexuelle et psychologique, et de donner l’impulsion nécessaire à des actions concrètes s’inscrivant dans un calendrier précis pour prévenir et combattre les violences et les sévices de ce type;

c) Solliciter la coopération technique du Représentant spécial du Secrétaire général sur la violence à l’encontre des enfants, de l’UNICEF, du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH), de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et des autres organismes et organisations concernés.

Droit à la liberté de religion et de conviction

44.Le Comité prend note de la décision prise par le Gouvernement de créer le Conseil interreligieux nigérian pour faciliter le dialogue entre les différentes religions du pays, mais il constate avec préoccupation que les diverses tensions entre les communautés religieuses restreignent l’exercice par les enfants du droit à la liberté de religion et qu’en raison de ces tensions les gens craignent d’affirmer ouvertement leur appartenance religieuse. En outre, le Comité s’inquiète du fait que, dans certaines régions, la conversion à une autre religion est considérée comme une infraction grave et qu’elle est punie par des peines extrêmement sévères.

45. Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures qui s’imposent pour garantir aux enfants le libre exercice de leur religion et le respect de leur droit à la liberté de religion et de conviction. Il recommande également à l’État partie de favoriser un climat de tolérance religieuse et de ne pas stigmatiser les enfants, notamment en ne considérant pas le choix de la religion comme une infraction pénale.

Droits de l’enfant et entreprises

46.Le Comité est très préoccupé par les informations sur la dégradation de l’environnement et la pollution à grande échelle dans le delta du Niger, qui résultent de l’activité de l’industrie pétrolière dans cette zone, et par les incidences de cette activité sur la santé et le niveau de vie des enfants. Il juge également préoccupant que, selon les informations qui lui ont été données, la population du delta du Niger souffre de problèmes respiratoires, tels que l’asthme ou la bronchite, à cause des toxines libérées par la combustion du gaz. Il est aussi préoccupé par les effets négatifs des changements climatiques mondiaux sur les enfants, notamment dans le contexte de la désertification des États du Nord.

47. Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures immédiates pour remédier à ces problèmes et lutter contre la pollution et la dégradation de l’environnement dans le delta du Niger. Il faudrait notamment créer des organismes de surveillance indépendants chargés d’évaluer les conditions de sécurité dans l’industrie pétrolière et élaborer, en consultation avec la population, des normes appropriées en matière de responsabilité environnementale et sociale des entreprises. Le Comité recommande également à l’État partie de travailler en coopération avec les entreprises afin de faire prendre conscience aux enfants, aux parents, aux enseignants et à la population dans son ensemble des problèmes d’environnement, notamment des effets de l’extraction pétrolière sur la santé et sur les moyens de subsistance, et de la désertification croissante du nord et de ses effets sur la santé des enfants, comme la malnutrition, dans le cadre des programmes scolaires et de programmes de communication.

Environnement familial et protection de remplacement (art. 5, 18 (par. 1 et 2), 9 à 11, 19 à 21, 25, 27 (par. 4) et 39 de la Convention)

Environnement familial

48.Le Comité prend note avec satisfaction du cadre proposé dans la Stratégie nationale de développement et de démarginalisation économiques visant à fournir un appui aux groupes vulnérables, notamment aux parents célibataires et aux mères adolescentes, mais regrette que le rapport de l’État partie ne donne pas d’informations sur les mesures prises pour aider les parents, les tuteurs ou les membres de la famille élargie à donner à l’enfant une orientation et des conseils appropriés à l’exercice de ses droits et pour les aider à exercer leurs responsabilités éducatives. Il regrette également l’absence de données ventilées sur les familles monoparentales et note avec préoccupation que, selon les informations fournies, les mères célibataires seraient victimes de stigmatisation sociale.

49. Le Comité recommande à l’État partie de fournir des informations supplémentaires au sujet de l’application de l’article 5 et du paragraphe 2 de l’article 18 de la Convention dans son prochain rapport périodique. Il recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour soutenir, financièrement entre autres et de manière appropriée, des programmes qui aident les parents, notamment les mères célibataires, les ménages adolescents ou les tuteurs légaux, à exercer leurs responsabilités. En outre, il recommande à l’État partie d’adopter une loi sur la famille qui couvre tous les aspects de la question et servira de cadre aux politiques élaborées en la matière.

Enfants privés de milieu familial

50.Le Comité note avec satisfaction l’adoption du Plan national d’action pour les orphelins et les autres enfants vulnérables (2006-2010) et des directives et normes nationales relatives aux orphelins et aux autres enfants vulnérables, qui reposent sur une approche fondée sur les droits et sont guidés par l’intérêt supérieur de l’enfant. Le Comité se demande néanmoins avec préoccupation si les programmes sont adaptés et si les institutions ont les capacités d’appliquer efficacement ces textes compte tenu du nombre alarmant d’orphelins et d’autres enfants vulnérables. Il est particulièrement préoccupé par la situation des enfants rendus orphelins par le VIH/sida, des enfants des rues, notamment des enfants almajiri, et par le placement des orphelins dans des foyers pour jeunes délinquants où ils vivent parfois avec des adultes et des enfants en conflit avec la loi.

51. Le Comité demande instamment à l’État partie d’affecter, à titre prioritaire, des ressources suffisantes, notamment des ressources financières et humaines, pour garantir l’application effective des politiques et directives susmentionnées qui visent à assurer la protection et le bien-être des enfants privés de milieu familial. En particulier, il est demandé à l’État partie:

a) De prendre toutes les mesures nécessaires pour trouver d’autres structures d’accueil pour les enfants vivant actuellement dans des foyers pour jeunes délinquants, en vue de mettre un terme au placement des enfants sans famille dans ce type de foyers;

b) De proposer d’autres solutions de protection de remplacement telles que le placement en famille d’accueil, la kafalah de droit islamique et l’adoption;

c) De créer des organismes chargés de surveiller et d’évaluer les institutions accueillant des enfants dans tous les États pour veiller à ce qu’elles respectent les droits et l’intérêt supérieur de l’enfant, en prenant en compte la politique nationale et les directives relatives à la création d’institutions pour enfants et à leur surveillance.

d) D’adopter une législation réglementant la protection de remplacement et un cadre réglementaire parallèle soulignant les droits des enfants placés sous une telle protection, conformément aux lignes directrices relatives à la protection de remplacement pour les enfants, qui figurent dans la résolution 64/142 de l’Assemblée générale en date du 20 décembre 2009.

Adoption

52.Le Comité regrette que l’État partie n’ait pas fourni d’informations sur la pratique de l’adoption nationale et internationale et sur son ampleur. Il reste préoccupé par le fait que, selon les informations qui lui ont été communiquées et le deuxième rapport périodique de l’État partie (CRC/C/70/Add.2, par. 97) l’absence de lois uniformes sur l’adoption donne lieu à des abus. Il note que l’État partie n’autorise pas l’adoption internationale, et s’inquiète car cette pratique est en augmentation et n’est toujours pas réglementée. Le Comité exprime également sa grande inquiétude au sujet des «baby farms» où les enfants sont vendus à des adoptants potentiels qui les revendent à leur tour.

53. Le Comité recommande à l’État partie de fournir, dans son prochain rapport périodique, des informations supplémentaires concernant l’application de l’article 21 de la Convention. Il l’encourage vivement à harmoniser les lois nationales sur l’adoption nationale avec la loi sur les droits de l’enfant et veiller à ce qu’elles soient conformes à la Convention, y compris en ce qui concerne la kafalah. Tout en lui rappelant que l’adoption internationale est une mesure de dernier recours pour les enfants sans famille, le Comité demande instamment à l’État partie:

a) De ratifier la Convention de La Haye de 1993 sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale;

b) De poursuivre ses efforts pour éliminer les «baby farms», notamment en achevant de les localiser, en veillant à ce que les enfants victimes de cette pratique soient libérés et secourus, en menant des enquêtes et en engageant des poursuites contre les responsables.

Maltraitance et délaissement

54.Le Comité note que l’État partie reconnaît que les enfants des rues sont victimes de violences, et en particulier de harcèlement sexuel, et que des enfants sont aussi maltraités dans leur famille. Il regrette toutefois qu’aucune information n’ait été donnée sur l’ampleur de la maltraitance et sur les formes qu’elle prend, ainsi que sur les cadres législatif et administratif mis en place pour prévenir toutes les formes de violence, de maltraitance et de délaissement et pour protéger les enfants.

55. Le Comité demande instamment à l’État partie:

a) De mettre en place un système efficace de collecte de données et de suivi des cas de violence, de maltraitance ou de délaissement;

b) D’établir un mécanisme pour assurer une coordination efficace entre les différentes autorités chargées de recevoir les plaintes pour maltraitance et de mener des enquêtes, notamment les unités spéciales, les services pilotes de réception des plaintes émanant de mineurs et les bureaux des droits de l’homme de la police nigériane et le Rapporteur spécial sur les droits de l’enfant de la Commission nigériane des droits de l’homme;

c) De lancer des programmes complets de formation et de sensibilisation sur les thèmes de la prévention et de la répression de la maltraitance et de la protection des enfants à l’intention des professionnels de la santé, des forces de l’ordre, des juges et des procureurs.

Santé et bien-être (art. 6; 18 ( par. 3); 23 et 24; 26 et 2 ( par. 1 à 3) de la Convention)

Enfants handicapés

56.Le Comité salue la sincérité dont l’État partie a fait preuve au sujet des importants problèmes auxquels se heurtent la protection et le respect des droits des enfants handicapés. Il prend note avec satisfaction des informations relatives à l’étude menée actuellement sur les enfants handicapés avec le soutien de l’UNICEF. Il prend également acte des informations fournies sur les structures d’éducation spécialisée pour enfants handicapés, mais s’inquiète des disparités régionales dans l’accès à de telles structures. Il est en outre préoccupé par l’absence d’information sur la suite donnée à ses recommandations précédentes concernant les enfants handicapés (CRC/C/15/Add.257, par. 46 et 47), et note en particulier qu’aucune politique globale concernant les enfants handicapés n’a été élaborée. Il constate en outre que l’État partie a recours à des définitions et des termes péjoratifs et insultants pour désigner les enfants handicapés.

57. Le Comité demande instamment à l’État de prendre des mesures en vue de la ratification de la Convention relative aux droits des personnes handicapées et d’adopter toutes les mesures nécessaires pour appliquer ses recommandations précédentes concernant les enfants handicapés (CRC/C/15/Add.257, par. 47). Le Comité recommande vivement à l’État partie:

a) D’adopter une politique nationale relative aux enfants handicapés, en se fondant, entre autres, sur les résultats de l’étude en cours, et d’envisager de créer un organe de coordination qui contribuerait à cibler les besoins spécifiques des enfants handicapés;

b) De poursuivre ses efforts pour garantir l’accès de tous les enfants handicapés à l’éducation et aux services de santé dans tous les États et pour remédier aux disparités géographiques existantes en matière de disponibilité des services sociaux.

Santé et soins de santé

58.Le Comité prend note avec satisfaction des efforts importants que l’État partie a accomplis dans le domaine de la santé, en particulier l’adoption de la politique nationale de santé (2005), la Stratégie intégrée pour la santé maternelle, néonatale et infantile (2007), les programmes de vaccination, notamment les directives révisées concernant la répartition des fonds pour l’utilisation efficace du fonds de l’Alliance mondiale pour les vaccins et la vaccination, et l’amélioration de l’accès à l’eau potable. Il prend également note avec satisfaction de la mise en place de services de santé maternelle et infantile gratuits dans 18 États du Nord ainsi que des progrès sensibles accomplis l’année précédente dans la lutte contre la poliomyélite grâce aux mesures prises par les dirigeants locaux dans les zones rurales des États du Nord. Le Comité salue également l’adoption, en mars 2010, du Plan national stratégique de développement de la santé et note avec satisfaction que le Gouvernement a l’intention d’augmenter le budget alloué au secteur de la santé (actuellement 4 % dans le projet de budget de 2010).

59.Le Comité reste néanmoins vivement préoccupé par le taux élevé de mortalité infantile, juvénile et maternelle (le deuxième au monde) et par la forte incidence de maladies évitables telles que le paludisme, le VIH/sida et la diarrhée. Il est extrêmement préoccupé par les disparités importantes entre les régions du Nord et les régions du Sud en ce qui concerne la couverture vaccinale, le pourcentage très faible d’enfants bénéficiant d’une vaccination complète, le taux de malnutrition, l’incidence des maladies infantiles, et la forte corrélation entre l’accès aux soins de santé (y compris les soins prénatals et postnatals) et les niveaux d’instruction et de revenus.

60. Le Comité, rappelant les recommandations formulées en 2008 par le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes (CEDAW/C/NGA/CO/6, par. 31 à 34) demande instamment à l’État partie, à titre prioritaire:

a) De renforcer la capacité de son système de santé décentralisé à répondre aux besoins, notamment en assurant la mise en œuvre effective des deuxième et troisième phases de la Stratégie intégrée pour la santé maternelle, néonatale et infantile, en donnant la priorité aux États du Nord les plus défavorisés;

b) D’élargir la couverture des programmes nationaux de vaccination, en particulier dans les zones rurales;

c) De considérer la nutrition comme une priorité nationale et de fournir des ressources suffisantes pour la mise en œuvre de programmes de nutrition et pour garantir leur pleine intégration dans les structures de santé gouvernementales;

d) De renforcer les mesures prises pour que les habitants − et en particulier les parents, participent aux programmes relatifs aux soins prénatals et postnatals, à la santé de l’enfant, à la nutrition et à la planification familiale et se les approprient;

e) D’étudier la corrélation entre l’accès aux soins de santé et l’éducation des filles en vue de lutter contre la mortalité maternelle et de donner aux femmes les moyens de prendre des décisions concernant leur santé;

f) D’adopter le plus rapidement possible le projet de loi nationale sur la santé, qui prévoit une ligne de financement directement destinée aux soins de santé primaires, et de veiller à ce qu’il garantisse le droit de l’enfant de jouir du meilleur état de santé physique et mentale possible, conformément à la loi sur les droits de l’enfant;

g) De modifier la Constitution pour faire du droit de l’enfant de jouir du meilleur état de santé physique et mentale possible un droit constitutionnel et pour préciser les responsabilités et les pouvoirs respectifs du Gouvernement fédéral, des gouvernements des États et des autorités locales en ce qui concerne la fourniture de soins de santé;

h) D’honorer son engagement, qu’il a pris conformément à la résolution de 2006 du C omité régional de l’Afrique de l’OMS intitulée «Financement de la santé: une stratégie pour la région africaine», d’allouer au minimum 15 % de son budget annuel à l’amélioration du secteur de la santé, et de continuer à solliciter la coopération et l’assistance techniques de l’UNICEF et de l’OMS;

i) De garantir l’accès à des services de santé maternelle et infantile gratuits dans tous les États de la fédération et de prendre des mesures pour appliquer le Plan national d’assurance maladie sur l’ensemble du territoire.

Santé des adolescents

61.Le Comité prend acte de l’élaboration de la Politique nationale de la santé et du développement des adolescents (2006), ainsi que du projet relatif à la santé des adolescents et à la prévention du VIH/sida, aux soins et à la prise en charge et des directives sur la santé des adolescents. Il constate également avec satisfaction que la santé des adolescents est l’un des indicateurs du Plan national stratégique de développement de la santé et salue l’accord, signé par tous les gouverneurs des États, qui vise à mettre en œuvre ce plan, ainsi que les efforts faits pour trouver les fonds nécessaires à l’élargissement de l’accès aux contraceptifs. Le Comité note également avec satisfaction que les droits en matière de procréation et la santé maternelle figurent dans les programmes scolaires. Il reste cependant préoccupé par les problèmes de santé auxquels les adolescents doivent faire face, tels que les complications après avortement et les décès de jeunes filles à la suite d’avortements non médicalisés, l’absence d’informations et de services relatifs à la santé procréative pour les adolescents, le très faible pourcentage d’adolescents qui utilisent un préservatif lors de leur première relation sexuelle, la législation restrictive en ce qui concerne l’avortement, l’existence de frais médicaux et la prévalence du VIH et des infections sexuellement transmissibles (IST).

62. Le Comité recommande à l’État partie, compte tenu de son Observation générale n o 4 (2003) sur la santé et le développement de l’adolescent, de continuer à renforcer ses activités et ses services dans le cadre de son Programme national de santé de l’adolescent et de ses autres projets. Il recommande vivement à l’État partie, entre autres:

a) De supprimer les frais médicaux et prendre d’autres mesures pour que les adolescentes aient accès à des soins de santé abordables, notamment aux services de santé procréative, et d’adopter des mesures pour prévenir les grossesses non désirées;

b) De prendre toutes les mesures nécessaires pour associer la société civile, en particulier les communautés et les ONG locales, à la mise en œuvre de la Politique nationale de la santé et du développement des adolescents selon une approche allant de la base vers le sommet;

c) De garantir l’accès des adolescents à des contraceptifs gratuits, notamment des préservatifs, dans les établissements sanitaires et les écoles, et d’élaborer et d’appliquer des programmes de sensibilisation adaptés aux enfants sur l’utilisation des contraceptifs;

d) D’inscrire l’éducation sexuelle pour les garçons et les filles au programme scolaire et d’entreprendre, au niveau communautaire, des programmes de sensibilisation sur les droits et la santé en matière de procréation;

e) D’examiner les recommandations formulées par le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes concernant le réexamen et la modification de la législation de l’État partie sur l’avortement (CEDAW/C/NGA/C/06, par. 34).

Santé mentale

63.Le Comité est préoccupé par l’absence d’informations au sujet de la santé mentale et du bien-être affectif des enfants et des adolescents et note avec satisfaction qu’au cours du dialogue constructif l’État partie a reconnu avec franchise qu’il convenait de redoubler d’efforts dans ce domaine.

64. Le Comité recommande à l’État partie de réaliser une étude complète sur la santé mentale des enfants et des adolescents et d’élaborer dans ce domaine une stratégie bénéficiant de ressources suffisantes.

Pratiques traditionnelles préjudiciables

65.Le Comité exprime sa vive inquiétude au sujet du très grand nombre de mariages précoces de filles dans les États du Nord et des effets de cette pratique sur l’exercice par ces jeunes filles d’autres droits, en particulier le droit à l’éducation. Le Comité prend note avec satisfaction de l’adoption par certains États de lois qui interdisent de déscolariser les filles pour les marier. Il prend acte de l’approche multidisciplinaire adoptée par l’État partie pour sensibiliser la population et faire évoluer les mentalités en ce qui concerne les mutilations génitales féminines, et note que les scarifications et les mutilations génitales féminines constituent des infractions punissables en vertu de la loi sur les droits des enfants, mais il est préoccupé par le pourcentage élevé de femmes qui ont subi des mutilations génitales. Il regrette que l’État partie n’ait pas donné d’informations actualisées sur les mesures qu’il a prises pour prévenir et éliminer les pratiques traditionnelles préjudiciables, et notamment sur les progrès accomplis dans l’application de ses recommandations précédentes (CRC/C/15/Add.257, par. 54 à 58).

66. Le Comité engage instamment l’État partie, à titre de priorité:

a) À prendre rapidement des mesures pour lutter contre la pratique du mariage précoce dans les États du Nord;

b) À mettre en œuvre des programmes de sensibilisation concernant l’interdiction du mariage précoce consacrée par la loi sur les droits des enfants et à veiller à ce que les États intègrent cette interdiction dans leur législation pour tous les enfants de moins de 18 ans;

c) À concevoir et mettre en œuvre des programmes complets de sensibilisation portant sur les effets néfastes du mariage précoce sur le droit des filles à la santé, à l’éducation et au développement, en ciblant en particulier les chefs traditionnels et religieux, les parents et les parlementaires des États, ainsi que des programmes portant sur l’interdiction légale de retirer des enfants de l’école pour les marier;

d) À éliminer les mutilations génitales féminines et les autres pratiques traditionnelles préjudiciables, notamment en adoptant une législation interdisant les mutilations génitales féminines et à entreprendre des programmes de sensibilisation destinés aux parents, aux femmes et aux filles, aux chefs de familles et aux chefs religieux et aux dignitaires traditionnels et faisant appel à leur participation.

Enfants accusés de sorcellerie

67.Le Comité prend note avec satisfaction des mesures adoptées par l’État partie pour lutter contre le phénomène des enfants accusés de sorcellerie, notamment l’adoption d’une législation interdisant cette pratique dans l’État d’Akwa Ibom, l’arrestation des responsables et l’engagement de poursuites, la mise en œuvre de programmes de réadaptation et de sensibilisation et l’application de projets de réunification familiale qui ont donné de bons résultats. Il reste néanmoins extrêmement préoccupé par la stigmatisation des enfants accusés de sorcellerie, qui serait courante dans l’État partie, et des informations selon lesquelles ces enfants sont torturés, maltraités, abandonnés ou même tués du fait de la stigmatisation et des persécutions dont ils font l’objet. Le Comité est particulièrement préoccupé par le fait que certaines églises et l’industrie cinématographique inciteraient à croire aux enfants sorciers et par le fait que les enfants déjà vulnérables, notamment les enfants issus de familles défavorisées et les enfants handicapés, risquent plus que les autres d’être accusés de sorcellerie. À cet égard, le Comité se dit vivement préoccupé par les informations selon lesquelles des enfants sont tués arbitrairement, alors qu’on cherche à leur faire avouer qu’ils sont sorciers ou lors de rituels d’exorcisme.

68. Le Comité invite instamment l’État partie à redoubler d’efforts pour lutter contre la croyance en la sorcellerie et les accusations de sorcellerie à l’égard des enfants. En particulier, le Comité encourage instamment l’État partie:

a) À incriminer, aux niveaux de la Fédération et des États, le fait d’accuser un enfant de sorcellerie et les mauvais traitements qui en résultent, et à veiller à ce que les auteurs d’infractions liées à des accusations de sorcellerie soient poursuivis en justice;

b) À dispenser aux membres des forces de l’ordre et aux procureurs une formation sur les dispositions pénales incriminant de tels actes;

c) À mettre en place, à l’intention du grand public et des chefs religieux, des programmes de sensibilisation, notamment en coopération avec les organisations de la société civile et les médias, pour lutter contre la croyance en la sorcellerie chez les enfants;

d) À règlementer les institutions religieuses qui ont recours à de telles pratiques et à leur demander d’adopter des politiques de protection de l’enfance;

e) À entreprendre une étude approfondie sur les causes et les conséquences de ce phénomène.

VIH/sida

69.Le Comité prend acte des mesures prises par l’État partie pour lutter contre l’épidémie de VIH/sida, notamment du projet relatif à la santé des adolescents et à la prévention du VIH/sida, aux soins et à la prise en charge et du programme d’allaitement maternel exclusif pour les mères infectées par le VIH/sida. Il prend note de l’élargissement des programmes de prévention de la transmission du VIH de la mère à l’enfant et leur intégration dans d’autres dispositifs de soins de santé. Il regrette néanmoins que les programmes d’information et de sensibilisation demeurent insuffisants pour prévenir efficacement de nouvelles infections par le VIH/sida. Il est également préoccupé par le nombre élevé d’enfants rendus orphelins (1,8 million) par le VIH/sida dans l’État partie.

70. Le Comité appelle l’attention de l’État partie, sur son Observation générale n o  3 (2003) relative au VIH/sida et aux droits de l’enfant et lui recommande:

a) De poursuivre l’élaboration et le renforcement des politiques et programmes visant à apporter soins et soutien aux enfants infectés ou touchés par le VIH/sida, en particulier les enfants rendus orphelins par le VIH/sida, notamment en améliorant la capacité des familles élargies ou de la communauté de s’occuper de ces enfants;

b) De renforcer la sensibilisation des adolescents aux méthodes de prévention du VIH/sida, notamment au moyen de cours d’éducation sexuelle à l’école, en utilisant activement les medias et en menant des campagnes de sensibilisation.

7.Éducation, loisirs et activités culturelles (art. 28, 29 et 31 de la Convention)

Éducation, y compris formation et orientation professionnelles

71.Le Comité prend note avec satisfaction des mesures adoptées par l’État partie pour mettre en œuvre son Programme en faveur de l’éducation élémentaire universelle gratuite (1999) et pour améliorer la qualité de l’éducation, parmi lesquelles un examen de la représentation des hommes et des femmes dans les programmes scolaires. Il salue également l’augmentation de l’allocation budgétaire accordée au secteur de l’éducation, l’accroissement du taux de scolarisation dans le primaire et l’amélioration des infrastructures. Le Comité prend note de l’adoption de l’Initiative pour la formation professionnelle et de l’élaboration de programmes spéciaux de formation professionnelle pour aider les enfants issus des milieux socioéconomiques modestes ou appartenant à d’autres groupes vulnérables. Il note également avec satisfaction que l’État partie a entrepris d’intégrer les écoles religieuses dans le système scolaire officiel et d’y affecter des malams (enseignants) dûment formés. Cependant, il reste gravement préoccupé par:

a)Le pourcentage élevé d’enfants en âge d’être scolarisés qui ne fréquentent pas d’établissement scolaire;

b)Le très faible taux de réussite scolaire dans le primaire à l’échelle nationale et le faible taux net de scolarisation dans le secondaire;

c)La persistance de disparités géographiques importantes en matière de taux de scolarisation et d’établissements scolaires;

d)La persistance d’inégalités entre les sexes en matière de scolarisation et de taux de persévérance scolaire dans les États du Nord;

e)Le fait que l’enseignement soit payant et que le droit à l’éducation gratuite et obligatoire ne figure pas dans la Constitution, et les informations selon lesquelles les parents qui refusent de scolariser leurs enfants peuvent faire l’objet de sanctions;

f)L’inadéquation et le manque d’accessibilité des programmes de formation professionnelle pour de nombreux enfants, notamment les enfants en conflit avec la loi.

72. Le Comité engage vivement l’État partie à tenir compte de son Observation générale n o  1 (2001) sur les buts de l’éducation et:

a) À faire en sorte que l’enseignement primaire soit effectivement gratuit et obligatoire pour tous les enfants sans discrimination, notamment en supprimant les frais de scolarité;

b) À veiller à ce que le droit à l’enseignement gratuit et obligatoire soit intégré dans la Constitution dans le cadre de la révision constitutionnelle;

c) À continuer d’augmenter les dépenses publiques consacrées à l’éducation, en particulier à l’enseignement primaire, en s’attachant notamment à éliminer les disparités entre les sexes et entre les régions en ce qui concerne l’exercice du droit à l’éducation et à améliorer la qualité de l’enseignement, notamment en veillant à ce que les parents ne soient pas obligés de supporter de charge financière pour l’enseignement et les matériels pédagogiques;

d) À continuer d’intensifier ses efforts pour intégrer les écoles religieuses, y compris les écoles pour enfants almajiri, dans le système scolaire officiel et de proposer une formation d’enseignant aux malams;

e) À promouvoir l’éducation préscolaire pour les enfants et à s’efforcer tout particulièrement d’en faire bénéficier, dès leur plus jeune âge, les enfants des groupes vulnérables et des groupes vivant loin des écoles;

f) À prendre des mesures efficaces pour garantir l’égalité d’accès à l’enseignement secondaire, en particulier dans les zones rurales et dans les régions du nord-ouest et du nord-est de l’État partie , en promouvant la scolarisation des filles;

g) À poursuivre et à intensifier ses efforts pour que tous les enfants et en priorité les enfants des groupes vulnérables aient accès à la formation professionnelle.

8.Mesures de protection spéciales (art. 22, 30, 38, 39, 40, 37 b) à d) et 32 à 36 de la Convention)

Enfants demandeurs d’asile et enfants réfugiés

73.Le Comité note que l’État partie accueille un certain nombre de réfugiés et de demandeurs d’asile, pour la plupart des femmes et des enfants, originaires de pays qui sont impliqués dans un conflit ou en sortent. Il note que les enfants réfugiés jouissent des droits consacrés par la loi sur les droits de l’enfant au même titre que les Nigérians et accueille avec satisfaction les informations selon lesquelles certains enfants réfugiés reçoivent un enseignement scolaire et les écoles ont été rénovées pour faciliter l’intégration des enfants réfugiés; il est cependant préoccupé par le manque de données ventilées sur les enfants réfugiés et les enfants demandeurs d’asile dans ce domaine. En outre, le Comité s’inquiète vivement du fait que les enfants réfugiés ne puissent pas bénéficier du système national de protection de l’enfance.

74. Le Comité invite instamment l’État partie:

a) À inclure de toute urgence les enfants réfugiés dans le système national de protection de l’enfance;

b) À prendre toutes les mesures voulues pour garantir aux enfants réfugiés une protection conforme à ses obligations au titre du droit international relatif aux droits de l’homme et aux réfugiés, en tenant compte de l’Observation générale n o  6 (2005) du Comité relative au traitement des enfants non accompagnés et des enfants séparés en dehors de leur pays d’origine;

c) À accroître les ressources financières et humaines allouées à la Commission nationale pour les réfugiés afin d’établir des statistiques fiables sur le nombre, l’âge, le sexe et la nationalité des enfants réfugiés et demandeurs d’asile;

d) À procéder aux modifications législatives nécessaires de façon à ce que le fait qu’un enfant ait été recruté ou utilisé dans les hostilités constitue un motif recevable aux fins de l’octroi du statut de réfugié et du non-refoulement.

Enfants déplacés

75.Le Comité prend note des informations données dans les réponses écrites de l’État partie sur les mesures visant à améliorer la situation des personnes déplacées, notamment la modification de la loi sur la Commission nationale pour les réfugiés en vue d’élargir les attributions de la Commission au titre du mandat délivré par le Président sur les personnes déplacées et l’avant-projet de loi portant amendement de cette loi, et qui concerne les personnes déplacées. Cependant, le Comité reste préoccupé par l’absence de cadre politique et législatif global relatif aux personnes déplacées qui permettrait de s’attaquer efficacement au problème des enfants déplacés, en particulier ceux dont le déplacement est dû aux troubles et aux violences politiques et intercommunautaires récentes, aux inondations et aux expulsions, et de garantir leur réintégration dans la société sur le long terme. L’absence de système de collecte de données sur les personnes déplacées est une autre préoccupation du Comité.

76. Le Comité invite instamment l’État partie à prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir les droits et le bien-être des enfants déplacés, et notamment:

a) À adopter une politique nationale générale relative aux personnes déplacées, dans le cadre de laquelle un organisme serait spécifiquement chargé de l’enregistrement, du suivi et de la protection des personnes déplacées, y compris des enfants;

b) À faire en sorte que, d’ici la mise en place d’une telle politique, la Commission nationale pour les réfugiés et la Croix-Rouge du Nigéria reçoivent les ressources nécessaires pour protéger et garantir les droits des enfants déplacés.

Enfants des groupes minoritaires

77.Le Comité est préoccupé par le manque d’informations relatives aux minorités dans le rapport de l’État partie, en particulier concernant la communauté Ogoni (région du delta du Niger). En outre, il est préoccupé par la discrimination dont sont victimes les minorités ethniques et note que les dispositions de la Politique nationale relative à l’éducation conférant un statut spécial aux trois langues principales (Hausa, Igbo et Yoruba) peuvent être considérées comme discriminatoires. Il note qu’aucune stratégie n’a été élaborée pour proposer aux minorités des programmes scolaires appropriés prenant en compte le droit des enfants des groupes minoritaires à recevoir un enseignement dans leur langue.

78. Le Comité invite instamment l’État partie:

a) À réaliser une étude analytique afin de répondre de manière appropriée aux besoins des minorités, en particulier à ceux de la communauté Ogoni;

b) À faire en sorte que les enfants des groupes minoritaires aient le même accès à l’éducation et les mêmes chances d’obtenir des qualifications que les autres enfants grâce à l’introduction de programmes appropriés qui leur reconnaissent le droit de recevoir un enseignement dans leur langue.

Enfants touchés par des conflits armés

79.Le Comité est profondément préoccupé par les effets sur les enfants des violences politiques qui ont secoué le pays ces dernières années, des troubles intercommunautaires et interreligieux et des conflits armés qui touchent le delta du Niger et d’autres régions de l’État partie. Le Comité prend note avec une grande inquiétude des allégations selon lesquelles des enfants figureraient parmi les victimes des récents massacres survenus à Jos en mars 2010, et des informations faisant état d’exécutions arbitraires par les services de sécurité lors des violences qui ont éclaté dans l’État du Plateau en novembre 2008. Le Comité prend acte du processus de paix engagé récemment dans le delta du Niger et des opérations de désarmement concomitantes, mais constate les difficultés rencontrées pour assurer l’éducation et l’emploi à long terme des enfants ayant participé aux combats.

80. Le Comité engage vivement l’État partie à prendre des mesures pour empêcher toute violation du droit à la vie, à la survie et au développement des enfants touchés par des conflits violents et des troubles sur son territoire. Il demande instamment à l’État partie de prendre dûment en considération les recommandations figurant dans la décision du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale en date du 11 mars 2010.

81. Le Comité engage instamment l’État partie à mettre en œuvre des programmes visant à offrir une éducation aux enfants vivant dans la région du delta du Niger, et à mettre en place, conformément à l’article 39 de la Convention, des activités de réadaptation et de réinsertion pour assurer la réinsertion sociale de ces enfants à long terme.

Exploitation économique, y compris le travail des enfants

82.Le Comité prend note des campagnes de sensibilisation menées pour lutter contre l’exploitation économique des enfants, de l’enquête réalisée en 2008 pour déterminer l’ampleur et la nature du travail des enfants, des informations fournies sur la création d’unités chargées du travail des enfants dans chaque État, et de l’élaboration d’un projet de politique relative au travail des enfants. Il reste cependant vivement préoccupé par le nombre très important d’enfants qui prennent part aux pires formes de travail, et en particulier par les informations faisant état de travail forcé d’enfants originaires de pays voisins et victimes de traite dans l’agriculture, le bâtiment et les activités extractives. Le Comité note que la loi sur le travail (1990) et la loi sur les droits de l’enfant comprennent des dispositions interdisant les pires formes de travail des enfants et que, selon les informations fournies, le droit du travail fait actuellement l’objet d’une révision en ce qui concerne le travail des enfants; il reste toutefois préoccupé par le fait que l’État partie n’ait pas établi une liste exhaustive des types de travail dangereux qui ne doivent pas être exécutés par des enfants de moins de 18 ans.

83. Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures appropriées pour éliminer l’exploitation du travail des enfants. Le Comité exhorte en particulier l’État partie:

a) À veiller à ce que les unités chargées du travail des enfants disposent des ressources nécessaires pour renforcer leurs activités de surveillance, en coopération étroite avec le Département du développement de l’enfant et le Ministère fédéral des affaires féminines et du développement social;

b) À dresser une liste exhaustive des types de travail dangereux ou constituant une forme d’exploitation, interdits aux personnes de moins de 18 ans ainsi que le recommande la Commission d’experts de l’OIT pour l’application des conventions et recommandations;

c) À veiller à ce que les sanctions prévues contre les personnes violant la législation relative au travail des enfants soient effectivement appliquées, notamment en faisant mieux connaître les normes internationales relatives au travail des enfants aux inspecteurs du travail, à la population et aux forces de l’ordre.

Enfants des rues

84.Le Comité prend note des efforts réalisés par l’État partie pour offrir aux enfants des rues des solutions adaptées à leurs conditions difficiles. Il estime que la pauvreté endémique a des effets directs sur les enfants et en pousse un grand nombre dans la rue, où ils se livrent à des activités de colportage ou à d’autres formes de travail pour accroître le revenu familial. Le Comité est également alarmé de constater que le nombre d’enfants des rues est en augmentation et que ces enfants sont souvent poursuivis au pénal pour des «délits d’état», tels que le vagabondage ou l’école buissonnière.

85. Le Comité recommande à l’État partie:

a) D’entreprendre une étude approfondie et une analyse statistique sur les causes et l’ampleur du phénomène des enfants des rues au Nigéria;

b) D’élaborer une stratégie nationale d’aide aux enfants des rues;

c) D’empêcher que d’autres enfants, y compris les almajiri , se retrouvent à vivre et à travailler dans la rue, en veillant à ce que les enfants des rues soient suffisamment nourris, soient habillés et hébergés et aient accès aux soins de santé ainsi qu’à l’éducation , notamment à une formation pour l’acquisition de compétences professionnelles ou pratiques, afin de contribuer à leur développement général;

d) D’abroger les lois incriminant le vagabondage et l’école buissonnière et les autres «délits d’état» commis par des enfants.

Vente, traite et enlèvements

86.Le Comité salue les mesures législatives, administratives et éducatives prises par l’État partie pour lutter contre la traite des enfants, et dont fait état le rapport, en particulier la création d’unités de lutte contre la traite au sein des services de répression, dont l’Agence nationale pour l’interdiction de la traite des êtres humains et autres questions connexes, l’augmentation du nombre d’enfants victimes de la traite qui sont secourus et l’ouverture d’enquêtes, l’engagement de poursuites et la condamnation des auteurs, ainsi que l’adoption d’un plan national d’action relatif à la traite des personnes (2006). Cependant, le Comité reste préoccupé par l’ampleur du problème de la traite des enfants et par le fait que l’État partie reste un pays d’origine, de transit et de destination pour la traite des enfants. Il constate avec beaucoup d’inquiétude que la grande majorité des victimes de la traite secourues sont des filles exploitées sexuellement et que rares sont les poursuites qui aboutissent. Le Comité note également avec préoccupation que les obligations internationales contractées par l’État partie en matière de protection contre la traite ne sont pas suffisantes, notamment en ce qui concerne la traite internationale d’enfants.

87. Le Comité engage instamment l’État partie à poursuivre ses efforts pour protéger les enfants de la traite et de la vente, et notamment:

a) À mener des campagnes dans les médias et à poursuivre le dialogue et la sensibilisation pour faire connaître les critères d’identification des victimes et les mécanismes de surveillance;

b) À s’attaquer aux causes profondes du problème et à améliorer la situation des enfants vulnérables, en particulier des filles, par la réinsertion économique et la réadaptation des victimes;

c) À intensifier les programmes de formation proposés aux agents des forces de l’ordre et les campagnes de sensibilisation visant en particulier les parents;

d) À inviter la Rapporteuse spéciale sur la traite des personnes, en particulier les femmes et les enfants, et la Rapporteuse spéciale sur la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants à se rendre dans l’État partie;

e) À renforcer la prévention de la traite des enfants à l’étranger, en particulier dans le cadre du programme 2009-2013 du Fonds européen de développement;

f) À prendre toutes les mesures nécessaires pour mener des enquêtes sur les cas de traite d’enfants et poursuivre et condamner les auteurs, conformément à la législation nationale;

g) À établir des passerelles entre le système d’asile et le système de protection des victimes de la traite afin que les enfants victimes de la traite aient accès à la procédure d’asile et que les enfants demandeurs d’asile qui pourraient avoir été victimes de la traite puissent bénéficier d’une aide à la réadaptation et à la réinsertion;

h) Envisager de ratifier le Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants.

Exploitation sexuelle et violences sexuelles

88.Même s’il se félicite que l’exploitation sexuelle et les violences sexuelles figurent parmi les cinq priorités de l’enquête initiale nationale sur la protection de l’enfant, le Comité est préoccupé par le manque d’informations données sur ce problème par le rapport du Nigéria. Il est profondément préoccupé par les informations selon lesquelles un nombre élevé d’enfants ont subi des formes de violence sexuelle, y compris à l’école, et par le fait que ces violences ne sont pas signalées à la police. Il exprime aussi sa vive inquiétude devant le nombre élevé d’enfants victimes de la traite qui font l’objet d’une exploitation sexuelle ou qui sont vendus à l’étranger, principalement en Europe, à des fins d’exploitation sexuelle. Le Comité est également préoccupé par les informations selon lesquelles des petites filles, en particulier des orphelines et des filles qui vivent dans la rue, sont contraintes de se prostituer dans les villes de l’État partie.

89. Le Comité engage instamment l’État partie à prendre des mesures effectives pour prévenir et combattre l’exploitation sexuelle des enfants. Il lui recommande en particulier:

a) De mettre en place des politiques et des stratégies appropriées pour lutter efficacement contre l’exploitation sexuelle des enfants, notamment en diffusant auprès des autorités compétentes les conclusions de l’enquête initiale nationale sur la protection de l’enfance traitant de l’exploitation sexuelle des enfants;

b) De lancer une campagne de sensibilisation pour éradiquer les violences sexuelles à l’école, en coopération étroite avec les parents, les enseignants, l’administration des établissements et les enfants;

c) De mettre en place à l’intention des forces de l’ordre des formations approfondies et d’autres types de programmes de sensibilisation sur l’exploitation sexuelle et les violences sexuelles dont sont victimes les enfants et d’envisager la nomination de personnel ou la création d’unités ayant des compétences spécialisées sur le sujet;

d) D’élaborer et de mettre en œuvre des politiques et des programmes de prévention, de réadaptation et de réinsertion sociale appropriés pour les enfants victimes conformément à la Déclaration et au Programme d’action ainsi qu’à l’Engagement mondial adoptés lors des Congrès mondiaux contre l’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales de 1996, 2001 et 2008 ainsi qu’aux conclusions des autres conférences internationales sur la question.

Administration de la justice pour mineurs

90.Le Comité salue l’introduction dans la nouvelle loi sur les droits de l’enfant d’un chapitre consacré aux enfants en conflit avec la loi, et se félicite de la création de tribunaux pour enfants pour juger les jeunes délinquants. Il regrette toutefois qu’à ce jour de tels tribunaux n’aient été mis en place que dans huit États. Il prend également note du renforcement de la formation dispensée aux juges, aux magistrats et aux agents des forces de l’ordre concernés par la justice pour mineurs et de la création d’unités de police spécialisées chargées des enfants. Cependant, le Comité rappelle qu’il est gravement préoccupé par le fait qu’en vertu de la charia la peine de mort soit applicable à des personnes de moins de 18 ans (CRC/C/15/Add.257, par. 32). Il est aussi très préoccupé par les informations selon lesquelles il n’y a pas d’âge minimum de la responsabilité pénale et une personne de moins de 18 ans peut être jugée, privée de liberté et placée dans un centre de réadaptation, voire dans un lieu de détention. Le Comité s’inquiète en outre du nombre d’enfants toujours détenus dans des prisons pour adultes, des mauvais traitements dont ils sont victimes en garde à vue ainsi qu’en détention avant jugement, et de ce qu’il n’y ait pas de règles de procédure pénale prévues pour les procès devant les tribunaux pour enfants.

91. Le Comité recommande une nouvelle fois à l’État partie de veiller à ce que le système de justice pour mineurs soit entièrement conforme à la Convention, en particulier aux articles 37, 39 et 40, ainsi qu’à d’autres normes pertinentes, notamment l’Ensemble de règles minima des Nations Unies concernant l’administration de la justice pour mineurs (Règles de Beijing), les Principes directeurs des Nations Unies pour la prévention de la délinquance juvénile (Principes directeurs de Riyad), les Règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté (Règles de La Havane), les Directives de Vienne relatives aux enfants dans le système de justice pénale et l’Observation générale n o 10 du Comité (2007) sur les droits de l’enfant dans le système de justice pour mineurs. À cet égard, le Comité recommande à l’État partie, entre autres:

a) De prendre des mesures garantissant, avec effet immédiat, que la peine de mort et la peine de prison à perpétuité ne puissent être appliquées pour les infractions commises par des personnes de moins de 18 ans;

b) D’envisager de relever l’âge minimum de la responsabilité pénale à 12 ans au moins, en envisageant la possibilité de l’augmenter encore, conformément aux recommandations formulées par le Comité dans son Observation générale n o  10 (2007) sur les droits de l’enfant dans le système de justice pour mineurs;

c) D’envisager d’établir des règles de procédure spécialisées pour que les garanties soient respectées lors des audiences devant les tribunaux pour enfants;

d) De limiter par des dispositions législatives la durée de la détention avant jugement des enfants;

e) De poursuivre les efforts entrepris pour que les enfants qui sont placés dans un centre de réadaptation ou un lieu de détention soient toujours séparés des adultes, qu’ils aient des conditions de détention sûres et adaptées aux enfants, et qu’ils gardent un contact régulier avec leur famille;

f) De veiller à ce que les enfants ne soient placés en détention qu’en dernier ressort et pour la durée la plus courte possible et à ce que leur détention fasse l’objet d’une révision régulière;

g) De mettre en place un organe indépendant chargé de superviser les conditions de placement, et de recevoir et d’examiner les plaintes déposées par les enfants en détention;

h) D’adopter une politique nationale de prévention et de promotion de mesures de substitution à la détention, telles que les mesures de déjudiciarisation, la liberté conditionnelle, la psychothérapie, les travaux d’intérêt général ou les peines avec sursis, et y recourir dans la mesure du possible, conformément aux dispositions de la loi sur les droits des enfants;

i) De fournir aux enfants, victimes ou accusés, une aide juridique appropriée et d’autres formes d’assistance à un stade précoce de la procédure et tout au long de la procédure judiciaire;

j) De mettre en place, dans chaque État de la Fédération, des unités spéciales de police chargées des enfants, et de veiller à ce qu’elles reçoivent une formation sur la loi et la Convention sur les droits de l’enfant;

k) D’achever rapidement la mise en place de tribunaux de la famille dans tous les États et de veiller à ce qu’ils disposent des ressources humaines et financières nécessaires;

l) De demander une assistance technique supplémentaire dans le domaine de la justice pour mineurs et de la formation des policiers au Groupe interinstitutions sur la justice pour mineurs qui regroupe l’ONUDC, l’UNICEF, le HCDH et des ONG.

Ratification d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme

92. Le Comité encourage l’État partie à ratifier les Protocoles facultatifs à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant d’une part la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants et, d’autre part, l’implication d’enfants dans les conflits armés, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, la Convention contre la torture et la Convention relative aux droits des personnes handicapées et le Protocole facultatif s’y rapportant.

a)Suivi et diffusion

Suivi

93. Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures voulues pour assurer la pleine application des présentes recommandations, notamment en les communiquant aux membres de l’Assemblée nationale, à la Cour suprême, aux ministères compétents tant au niveau fédéral qu’au niveau des États (en particulier aux Ministères des affaires féminines et du développement social, de la santé, de l’éducation et de la justice), aux Parlements des enfants et, dans la mesure du possible, aux gouvernements locaux, pour examen et suite à donner.

Diffusion

94. Le Comité recommande en outre que les troisième et quatrième rapports périodiques présentés en un seul document, les réponses écrites de l’État partie ainsi que les recommandations connexes (observations finales) du Comité soient largement diffusés dans les principales langues du pays, notamment (mais non exclusivement) sur Internet, et dans la presse et les médias audiovisuels, auprès du grand public, des organisations de la société civile, des associations de jeunes, des associations professionnelles et des enfants, afin de susciter un débat et de faire connaître la Convention, son application et son suivi.

b)Prochain rapport

95. Le Comité invite l’État partie à soumettre ses cinquième à huitième rapports périodiques en un document unique avant le 18 novembre 2016. Ce rapport ne devrait pas dépasser 120 pages (voir le document CRC/C/118). Le Comité compte que l’État partie présentera ensuite un rapport tous les cinq ans, comme le prévoit la Convention.

96. Le Comité invite également l’État partie à soumettre un document de base actualisé conformément aux directives harmonisées pour l’établissement de rapports qui s’appliquent aux documents de base communs, telles qu’approuvées en juin 2006 à la cinquième réunion intercomités des organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme (HRI/MC/2006/3).