Nations Unies

CRC/C/OPAC/LVA/CO/1

Convention relative aux droits de l ’ enfant

Distr. générale

7 mars 2016

Français

Original : anglais

Comité des droits de l ’ enfant

Observations finales concernant le rapport soumis par la Lettonie en application du paragraphe 1 de l’article 8 du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés *

Le Comité a examiné le rapport initial de la Lettonie (CRC/C/OPAC/LVA/1) à sa 2062e séance (voir CRC/C/SR.2062), le 13 janvier 2016, et a adopté les observations finales ci-après à sa 2104e séance (CRC/C/SR.2104), le 29 janvier 2016.

I.Introduction

Le Comité accueille avec satisfaction le rapport initial de l’État partie ainsi que ses réponses écrites à la liste de points (CRC/C/OPAC/LVA/Q/1/Add.1). Il se félicite du dialogue constructif qu’il a eu avec la délégation multisectorielle de haut niveau de l’État partie.

Le Comité rappelle à l’État partie que les présentes observations finales doivent être lues en parallèle avec celles qu’il a adoptées, le 29 janvier 2016, au sujet de son rapport valant troisième à cinquième rapports périodiques au titre de la Convention (CRC/C/LVA/CO/3-5) et au sujet de son rapport initial au titre du Protocole facultatif concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants (CRC/C/OPSC/LVA/CO/1).

II.Observations générales

Aspects positifs

Le Comité se félicite que l’État partie ait adhéré aux instruments internationaux ci‑après ou les ait ratifiés :

a)Le Protocole contre la fabrication et le trafic illicites d’armes à feu, de leurs pièces, éléments et munitions, additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, en juillet 2004 ;

b)Le Statut de Rome de la Cour pénale internationale, en juin 2002 ;

c)La Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, en décembre 2001 ;

d) Les Conventions de Genève de 1949 et les Protocoles additionnels I et II s’y rapportant, en décembre 1991.

Le Comité accueille avec satisfaction les diverses mesures positives prises en vue de la mise en œuvre du Protocole facultatif, en particulier :

a)Les modifications apportées à la loi pénale pour éviter l’implication de nationaux dans des conflits armés contraires au droit international et pour limiter le financement des conflits armés, les campagnes d’information et tout autre type d’appui aux personnes prenant part à des conflits armés à l’étranger, en février 2015 ;

b)Le règlement no 1613 du Conseil des ministres sur les procédures d’octroi de l’assistance nécessaire aux enfants victimes d’activités illégales, en décembre 2009 ;

c)L’interdiction d’engager des mineurs à des fonctions professionnelles dans les institutions du Ministère de l’intérieur et de l’administration pénitentiaire, introduite dans la loi sur le déroulement de carrière des fonctionnaires de rang spécial du Ministère de l’intérieur et de l’administration pénitentiaire (art. 7, par. 1), adoptée en octobre 2006 ;

d)La déclaration faite par l’État partie lors de la ratification du Protocole facultatif, par laquelle il a fait savoir que l’âge minimum de l’enrôlement volontaire était fixé à 18 ans.

III.Mesures d’application générales

Diffusion et sensibilisation

Le Comité constate avec préoccupation que l’État partie n’a pas mené de campagnes de sensibilisation au Protocole facultatif, ni diffusé largement d’informations concernant les principes et les dispositions du Protocole facultatif auprès des membres des forces armées et du grand public, notamment des enfants et de leur famille.

Eu égard au paragraphe  2 de l ’article  6 du Protocole facultatif, le Comité recommande à l ’ État partie de redoubler d ’ efforts pour faire largement connaître les principes et les dispositions du Protocole facultatif aux membres des forces armées, au grand public et aux enfants en particulier, notamment en associant davantage les médias aux programmes de sensibilisation.

Formation

S’il note que les sujets liés à l’implication d’enfants dans les conflits armés sont abordés dans le cadre de plusieurs programmes de formation proposés par l’École nationale de police et l’École nationale des gardes frontière, le Comité regrette que les programmes des cours suivis par les militaires et les agents des forces de l’ordre, notamment ceux qui prennent part à des opérations de maintien de la paix, ne traitent pas spécifiquement des droits de l’enfant et des dispositions du Protocole facultatif.

Le Comité recommande que le Protocole facultatif soit systématiquement étudié dans le cadre de la formation dispensée à tous les groupes professionnels concernés, en particulier les forces armées, les membres des forces internationales de maintien de la paix, les agents des forces de l ’ ordre et des services d ’ immigration, les procureurs, les avocats, les juges, les travailleurs sociaux, les professionnels de la santé, les enseignants, les professionnels des médias et les responsables au niveau local et à celui des districts.

Données

Le Comité regrette qu’il n’y ait pas de données collectées sur les enfants demandeurs d’asile, réfugiés, migrants et non accompagnés qui entrent sur le territoire de l’État partie et pourraient avoir été enrôlés ou utilisés dans des hostilités à l’étranger.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ établir un mécanisme permettant de collecter des données exhaustives, ventilées par sexe, âge, nationalité et origine ethnique, concernant les enfants demandeurs d ’ asile, réfugiés, migrants et non accompagnés qui entrent sur le territoire de l ’ État partie et pourraient avoir été enrôlés ou utilisés dans des hostilités à l ’ étranger.

IV.Prévention

Instruction militaire

Le Comité note que dès l’âge de 10 ans les enfants peuvent participer à un mouvement volontaire dénommé « jeune garde », qui est rattaché au Ministère de la défense et dont l’objectif est d’éduquer les jeunes dans le domaine de la défense nationale. Il relève avec une vive préoccupation que le programme de cette « jeune garde » prévoit la participation des enfants à des activités supposant une formation militaire et le maniement d’armes.

Le Comité engage vivement l ’ État partie à prendre des mesures pour interdire les cours d ’ instruction militaire qui comprennent une formation au maniement des armes à feu pour les mineurs de 18  ans en général et dans la « jeune garde  » en particulier, ainsi qu ’ à établir une surveillance régulière de la «  jeune garde  » pour veiller à ce que le programme et le personnel enseignant respectent les dispositions du Protocole facultatif.

Éducation aux droits de l’homme et éducation pour la paix

Le Comité regrette que l’État partie n’ait pas indiqué si les conscrits et les soldats en service actif recevaient régulièrement un enseignement obligatoire sur les droits de l’homme et sur la paix, notamment sur les dispositions du Protocole facultatif.

Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre les mesures nécessaires pour introduire une éducation relative aux droits de l ’ homme et une éducation à la paix et aux dispositions du Protocole facultatif dans le programme obligatoire des conscrits et des personnes qui effectuent un service militaire actif.

V.Interdiction et questions connexes

Lois et réglementations pénales en vigueur

Le Comité prend acte des informations données par l’État partie dans ses réponses à la liste des points (CRC/C/OPAC/LVA/Q/1/Add.1, par. 26), selon lesquelles l’article 8 du Statut de Rome de la Cour pénale internationale, qui établit la responsabilité pénale pour l’enrôlement et l’utilisation d’enfants aussi bien dans les forces armées nationales que dans des groupes armés non étatiques, a été incorporé dans l’article 74 de la loi pénale. Il note toutefois avec préoccupation que ledit article 74 ne mentionne pas l’enrôlement et l’utilisation d’enfants dans un conflit armé dans la liste non exhaustive des crimes de guerre et ne les prévoit que de manière implicite. Il relève aussi avec préoccupation qu’il n’est pas expressément dit dans la loi pénale que la responsabilité pénale s’applique aussi aux groupes armés non étatiques.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ incriminer expressément l ’ enrôlement de min eurs de 18  ans ainsi que leur utilisation, leur implication et leur participation dans des hostilités par les forces armées et par des groupes armés non étatiques.

Compétence extraterritoriale et extradition

Le Comité prend note du fait que la législation de l’État partie lui permet d’exercer sa compétence extraterritoriale lorsque des infractions qui portent atteinte aux intérêts de l’État partie ou de ses habitants sont commises par des étrangers n’ayant pas de permis de séjour permanent sur son territoire. Il relève cependant avec préoccupation que l’extradition est subordonnée à la condition de la double incrimination.

Le Comité invite instamment l ’ État partie à supprimer la condition de la double incrimination aux fins de l ’ extradition pour les infractions visées par le Protocole facultatif.

VI.Protection, réadaptation et réinsertion

Mesures adoptées pour protéger les droits des enfants victimes

Le Comité prend note des renseignements communiqués par l’État partie indiquant qu’il n’y a pas, sur son territoire, d’enfants victimes d’actes interdits par le Protocole facultatif, y compris parmi les enfants demandeurs d’asile, réfugiés, migrants et non accompagnés. Néanmoins, il note avec préoccupation qu’aucun mécanisme n’a été mis en place pour repérer à un stade précoce les enfants demandeurs d’asile, réfugiés, migrants et non accompagnés entrant sur le territoire de l’État partie qui pourraient avoir été enrôlés ou utilisés dans des hostilités à l’étranger.

Le Comité recommande à l ’ État partie de mettre en place des mécanismes permettant de repérer à un stade précoce les enfants réfugiés, demandeurs d ’ asile, migrants et non accompagnés qui viennent de pays connaissant ou ayant connu des conflits armés et qui pourraient avoir été impliqués dans des hostilités. Il lui recommande également de veiller à ce que le personnel chargé de ce repérage soit formé aux droits de l ’ enfant, à la protection des enfants et aux techniques d ’ entretien respectueuses des enfants. Il lui recommande en outre d ’ élaborer des protocoles et des services spécialisés afin que ces enfants puissent recevoir une aide appropriée en vue de leur réadaptation physique et psychologique et de leur réinsertion sociale.

VII.Assistance et coopération internationales

Coopération internationale

Le Comité recommande à l ’ État partie de poursuivre et de resserrer sa coopération avec le Comité international de la Croix-Rouge et avec le Représentant spécial du Secrétaire général pour le sort des enfants en temps de conflit armé, et d ’ étudier la possibilité d ’ accroître sa coopération avec le Fonds des Nations Unies pour l ’ enfance et d ’ autres organismes des Nations Unies dans la mise en œuvre du Protocole facultatif.

VIII.Suivi et diffusion

Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre toutes les mesures voulues pour garantir la pleine application des présentes recommandations, notamment en les transmettant au Parlement, aux ministères concernés, dont le Ministère de la défense, à la Cour suprême et aux autorités locales, pour examen et suite à donner.

Le Comité recommande que le rapport initial et les réponses écrites de l ’ État partie ainsi que les présentes observations finales soient largement diffusés, y compris − mais pas seulement − par le biais de l ’ Internet, auprès du grand public, des organisations de la société civile, des mouvements de jeunesse, des groupes professionnels et des enfants, afin de susciter un débat et de faire connaître le Protocole facultatif, son application et son suivi.

IX.Prochain rapport

Conformément au paragraphe  2 de l ’ article  8 du Protocole facultatif, le Comité prie l ’ État partie de faire figurer un complément d ’ information sur l ’ application du Protocole facultatif et sur la suite donnée aux présentes observations finales dans le prochain rapport périodique qu ’ il soumettra en application de l ’ article  44 de la Convention relative aux droits de l ’ enfant.