NATIONS UNIES

CRC

Convention relative aux droits de l ’ enfant

Distr.GÉNÉRALE

CRC/C/OPAC/TZA/CO/110 octobre 2008

FRANÇAISOriginal: ANGLAIS

COMITÉ DES DROITS DE L ’ ENFANT

Quarante ‑neuvième session

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉ SENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L ’ ARTI CLE 8 DU PROTOCOLE FACULTATIF À LA CONVENTION RELATIVE AUX DROITS DE L ’ ENFANT, CONCERNANT L ’ IMPLICATION D ’ ENFANTS DANS LES CONFLITS ARMÉS

Observations finales: République ‑Unie de Tanzanie

1.Le Comité a examiné le rapport initial de la République‑Unie de Tanzanie (CRC/C/OPAC/TZA/1) à ses 1363e et 1364e séances (CRC/C/SR.1363 et CRC/C/SR.1364), tenues le 29 septembre 2008, et a adopté, le 3 octobre 2008, les observations finales ci-après:

Introduction

2.Le Comité accueille avec intérêt le rapport initial présenté par l’État partie ainsi que les réponses à la liste des points à traiter (CRC/C/OPAC/TZA/Q/1/Add.1). Il se félicite du dialogue franc tenu avec une délégation interdisciplinaire de haut niveau.

3.Le Comité rappelle à l’État partie que les présentes observations finales devraient être rapprochées de ses précédentes observations finales adoptées à l’occasion de l’examen du deuxième rapport périodique (CRC/C/TZA/CO/2) et des observations finales concernant le rapport initial établi en application du Protocole facultatif concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants (CRC/C/OPSC/TZA/CO/1).

Aspects positifs

4.Le Comité se félicite de l’information selon laquelle les enfants âgés de moins de 18 ans ne peuvent pas prendre part à des hostilités et du fait que les forces de défense populaires de Tanzanie sont seulement composées d’engagés et que la conscription n’existe pas.

5.Le Comité se félicite également de la ratification par l’État partie des instruments ci‑après:

a)Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, en 2004;

b)La Convention no 182 (1999) de l’Organisation internationale du Travail (OIT) concernant l’interdiction des pires formes de travail des enfants et l’action immédiate en vue de leur élimination, en 2001;

c)La Charte africaine des droits et du bien‑être de l’enfant, en 2003;

d)Le Statut de Rome de la Cour pénale internationale, en 2002; et

e)La Convention sur l’interdiction de l’emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines terrestres antipersonnel et leur destruction, en 2000.

I. Mesures d ’ application générales

Législation

6.Le Comité se félicite de ce que plusieurs lois font actuellement l’objet d’un réexamen en vue de leur mise en conformité avec la Convention relative aux droits de l’enfant et les deux Protocoles facultatifs, en particulier le Protocole facultatif concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés. Il prend également note du projet visant à adopter une loi sur l’enfance. Toutefois, le Comité s’inquiète de l’absence de calendrier pour l’adoption de cette loi, de la simultanéité des deux et du fait que l’État partie n’a pas expressément transposé dans le droit interne le Protocole facultatif concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés.

7. Le Comité rec ommande à l ’ É tat partie de poursuivre et de mener à bien le processus visant à adopter une loi sur l ’ enfance et l ’ exhorte à parachever l e ré examen de la législation nationale conformément aux dispositions du Protocole facultatif.

Coordination

8.Le Comité regrette que les mécanismes de coordination existants soient inadaptés, qu’ils manquent d’effectifs et qu’ils aient des liens ténus avec les autorités locales. Tout en prenant note du plan visant à créer un organisme national chargé de la coordination des politiques à tous les niveaux, il est préoccupé par le manque de coordination effective, tant en Tanzanie continentale qu’à Zanzibar.

9. Le Comité recommand e qu ’ un organe national de haut niveau soit constitué , doté de ressources humaines et financières suffisantes pour garantir une coordination harmonisée, à la fois en Tanzanie continentale et à Zanzibar en vue de permettre l ’ exercice des droits des enfants et en particulier l ’ application du Protocole facultatif.

Diffusion et formation

10.Le Comité salue les efforts déployés par l’État partie pour faire traduire le Protocole facultatif en langue kiswahili afin d’en faciliter la diffusion à grande échelle. Il prend note également du programme de formation consacré aux droits de l’enfant, y compris le Protocole facultatif, destiné à des participants de divers échelons régionaux et locaux de Tanzanie continentale. Le Comité est toutefois préoccupé par le fait que des informations ayant spécifiquement trait au Protocole facultatif ne figurent pas encore dans tous les programmes de formation et d’enseignement. En outre, il s’inquiète de ce que la langue kiswahili utilisée dans la traduction du Protocole facultatif est trop technique et difficilement accessible.

11. Le Comité encourage l ’ État partie à continuer d e dispenser une formation relative au Protocole facultatif aux membres des forces armées et aux professionnels de l ’ enfance , tels que les enseignants, les autorités s ’ occupant d ’ enfants requérants d ’ asile et d ’ enfants réfugiés originaires de pays touchés par d es conflits armés, les avocats et les juges, les médias et la police dans la partie continentale de la Tanzanie et à Zanzibar. En outre, il recommande à l ’ État partie de redoubler d ’ efforts pour diffuser le Protocole facultatif à grande échelle et en particulier auprès des enfants et de leurs parents par le biais, notam ment, des programmes scolaires de tous niveaux dans le cadre de l ’ éducation aux droits de l ’ homme et par la publication d ’ une ve rsion plus accessible du Protocole en kiswahili .

Collecte de données

12.Le Comité est préoccupé par l’absence de données sur les anciens enfants soldats requérants d’asile dans la République‑Unie de Tanzanie, en particulier dans le nord‑ouest du pays.

13. Le Comité recommande qu ’ un système global de collecte de données soit mis en place afin de garantir que des données, ventilées notamment par âge, sexe, origine socioéconomique et zone géographique, portant en particulier sur les enfants requérants d ’ asile et les enfants migrants, soient systématiquement recueillies et analysées car il s ’ agit d ’ outils essentiels pour évaluer la mise en œuvre des politiques. L ’ État partie devrait à cet égard solliciter l ’ aide d ’ organismes et de programmes des Nations Unies , tels que le Haut ‑Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) et le Fonds des Nations Unies pour l ’ enfance (UNICEF).

Contrôle indépendant

14.Le Comité réaffirme la préoccupation qu’il avait exprimée lors de l’examen du deuxième rapport périodique de la Tanzanie en application de la Convention (CRC/C/TZA/CO/2) concernant le fait que tous les enfants du pays n’avaient pas facilement accès à la Commission pour la promotion des droits de l’homme et de la bonne gouvernance.

15. Le Comité recom mande à l ’ État partie d ’ allouer les ressources humaines et financières nécessaires pour garantir que tous les enfants puissent, aux niveaux local et régional, avoir facilement accès à la Commission pour la promotion des droits de l ’ homme et de la bonne gouvernance pour porter plainte en cas de violation de leurs droits, y compris de ceux visés par le Protocole facultatif.

II. Prévention

Engagement volontaire

16.Le Comité se félicite de ce que l’engagement obligatoire n’existe pas dans l’État partie et que l’âge minimum de l’engagement volontaire dans les forces armées nationales est de 18 ans, mais il note que dans des circonstances exceptionnelles la législation autorise l’enrôlement de personnes de moins de 18 ans. Il est par ailleurs préoccupé par le fait que les lacunes du système d’enregistrement des naissances puissent permettre l’enrôlement de personnes de moins de 18 ans.

17. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ envisager de réviser sa législation afin de proscrire l ’ enrôlement de toute personne de moins de 18 ans . I l l ’ encourage p ar ailleurs à améliorer son système d ’ enregistrement des naissances.

Enregistrement des naissances

18.Le Comité se félicite du fait qu’une nouvelle entité responsable de la restructuration du système d’enregistrement des naissances (Registration, Insolvency and Trusteeship Agency‑RITA), soit désormais opérationnelle et que sa campagne de sensibilisation à l’importance de l’enregistrement des naissances soit efficace et qu’un grand nombre de nouveau‑nés et d’enfants aient été enregistrés. Il juge toutefois toujours préoccupant le très faible niveau d’enregistrement des naissances dans le pays, en particulier dans les régions reculées et en milieu rural, ce qui pose d’importantes difficultés pour l’application du Protocole facultatif.

19. Le Comité rappelle la recommandation qu ’ il avait formulée lors de l ’ examen du deuxième rapport périodique de la Tanzanie en application de la Convention (CRC/C/TZA/CO/2, par. 32). En particulier, l ’ État partie devrait garantir l ’ enregistrement gratuit des naissances et introduire des unités mobiles d ’ enregistrement des naissances pour atteindre les zones reculées dans l ’ ensemble du pays.

III. Interdiction et questions connexes

Législation pénale et réglementation en vigueur

20.Le Comité est préoccupé par l’absence de législation spécifique interdisant l’implication d’enfants dans des hostilités.

21. Le Comité recommande à l ’ État partie:

a) De veiller à ce que la violation des dispositions du Protocole facultatif relatives à l ’ enrôlement et à l ’ implication d ’ enfants dans des hostilités soit explicitement érigée en infraction par la législation;

b) D ’ établir sa compétence extraterritoriale pour ces crimes lorsqu ’ ils sont commis par une personne ou contre une personne qui est un ressortissant de l ’ État partie ou qui a d ’ autres liens avec lui; et

c) De veiller à ce que les codes, manuels, et autres directives militaires soient conformes aux dispositions et à l ’ esprit du Protocole facultatif.

IV. Protection, réadaptation et réinsertion

Aide à la réadaptation physique et psychologique

22.Tout en appréciant la coopération entre l’État partie et le HCR, le Comité note que l’État partie accueille un nombre élevé d’enfants requérants d’asile et migrants, y compris un certain nombre d’anciens enfants soldats venant de zones touchées par des conflits armés. Il s’inquiète de ce qu’aucune mesure particulière ne soit prise pour identifier ces enfants afin de leur fournir une aide spécifique.

23. Le Co mité recommande à l ’ État partie d ’ évaluer la situation des enfants entrant en Tanzanie qui auraient pu être enrôlés ou impliqués dans des hostilités à l ’ étranger, et de leur fournir une assistance multidisciplinaire et adaptée à leur culture en vue de faciliter leur réadaptation physique et psychologique conformément au paragraphe 3 de l ’ article 6 du Protocole facultatif.

V. Assistance et coopération internationales

24.Tout en notant que l’État partie a adopté, en 2002, la loi sur les armes et munitions interdisant le commerce et l’exportation d’armes légères, le Comité reste préoccupé par le fait qu’il n’existe aucune restriction spécifique au transport d’armes à travers la République‑Unie de Tanzanie, alors que ces armes sont destinées à des pays où les enfants peuvent être enrôlés ou impliqués dans des hostilités.

25. Le Comité recommande à l ’ État partie de renforcer encore son cadre normatif en interdisant expressément la vente d ’ armes à des pays où l ’ on sait que des enfants ont été enrôlés ou impliqués dans des hostilités ou dans lesquelles ils pourraient l ’ être.

26. Le Comité recommande en outre que l ’ État partie, conformément à l ’ article 7 du Protocole facultatif, renforce sa coopération pour la mise en œuvre dudit Protocole, y compris en matière de prévention de toute activité contraire à celui ‑ci et de réadaptation et de réinsertion sociale des personnes victimes d ’ actes contraires à ces dispositions, au moyen notamment de la coopération technique et de l ’ assistance financière.

VI. Suivi et diffusion

Suivi

27. Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre toutes les mesures voulues pour garantir la pleine application des présentes recommandations, notamment en les transmettant aux membres du Parlement de l ’ Union , à la Chambre des représentants de Zanzibar, au Ministère de la défense et aux autorités locales, s ’ il y a lieu, afin que ceux ‑ci les examinent et y donnent suite.

Diffusion

28. Le Comité recommande que le rapport initial présenté par l ’ État partie et les observations finales adoptées par le Comité soient largement diffusés auprès du grand public afin de susciter un débat et de faire mieux connaître le Protocole facultatif, son application et son suivi.

VII. Prochain rapport

29. Conformément au paragraphe 2 de l ’ article 8 du Protocole facultatif , le Comité prie l ’ État partie de fournir de plus amples informations sur l ’ application du Protocole facultatif dans le prochain rapport périodique qu ’ il présentera au titre de la Convention relative aux droits de l ’ enfant et conformément à l ’ article 44 de celle ‑ci, et qui est attendu le 9 janvier 2012.

-----