Nations Unies

CAT/OP/KGZ/2

Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr. générale

15 juillet 2019

Français

Original : anglais

Anglais, espagnol, français et russe seulement

Sous-Comité pour la prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Visite effectuée au Kirghizistandu 11 au 22 septembre 2018 : observationset recommandations adressées au mécanismenational de prévention

Rapport établi par le Sous-Comité * , **

Table des matières

Page

I.Introduction3

II.Mécanisme national de prévention4

III.Recommandations adressées au mécanisme national de prévention5

A.Recommandations relatives aux questions juridiques, institutionnelles et structurelles5

B.Recommandations sur la méthode à suivre concernant les visites10

IV.Mesures à prendre15

Annexes

I.List of places of deprivation of liberty visited by the Subcommittee17

II.List of places of deprivation of liberty jointly visited by the national preventive mechanism and the Subcommittee18

III.List of officials and other persons with whom the Subcommittee met19

I.Introduction

1.Conformément au mandat que lui confère le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, le Sous-Comité pour la prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants a effectué sa deuxième visite au Kirghizistan du 11 au 22 septembre 2018. Le Kirghizistan a adhéré à la Convention contre la torture le 5 septembre 1997 et au Protocole facultatif le 29 décembre 2008.

2.La délégation du Sous-Comité était composée des membres dont le nom suit : Victor Zaharia (Chef de la délégation), Marija Definis-Gojanovic, Kosta Dragan Mitrovic, Abdallah Ounnir, June Caridad Pagaduan Lopez et Aneta Stanchevska. Elle était assistée de 3 spécialistes des droits de l’homme du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH), de 2 agents de sécurité de l’ONU et de 4 interprètes.

3.La délégation s’est rendue dans 22 lieux de privation de liberté, notamment dans des centres de détention temporaire et de détention provisoire, des colonies pénitentiaires, des institutions pour enfants, des hôpitaux psychiatriques et des centres de psychoneurologie (voir l’annexe I). Elle a rencontré les autorités kirghizes compétentes, des membres du mécanisme national de prévention, du Bureau du Médiateur et de la société civile, ainsi que le Coordonnateur résident des Nations Unies (voir l’annexe III).

4.Les principaux objectifs de la visite étaient les suivants : a) se rendre dans des lieux de privation de liberté de types divers en vue d’aider l’État partie à s’acquitter pleinement des obligations découlant du Protocole facultatif, de manière à mieux protéger les personnes privées de liberté contre le risque de torture et de mauvais traitements ; b) fournir des services consultatifs et une assistance technique au mécanisme national de prévention et examiner dans quelle mesure les autorités nationales kirghizes soutiennent ses travaux et donnent suite à ses recommandations, compte tenu des directives du Sous-Comité concernant les mécanismes nationaux de prévention (CAT/OP/12/5). Il s’agissait également pour la délégation de suivre l’application des recommandations formulées par le Sous‑Comité à la suite de la première visite qu’il avait organisée dans le pays du 19 au 28 septembre 2012 (CAT/OP/KGZ/1 et Corr.1). Cette deuxième visite a été pour le Sous‑Comité l’occasion d’examiner les progrès accomplis dans l’application des recommandations énoncées dans son précédent rapport, et de faire le point des autres mesures que l’État partie devrait prendre.

5.La délégation a rencontré des membres du mécanisme national de prévention, ce qui lui a permis d’examiner le mandat et les méthodes de travail de celui-ci, et de réfléchir à la meilleure manière de le rendre plus efficace. Pour mieux comprendre son mode de fonctionnement dans la pratique, la délégation a également visité, en compagnie de représentants du mécanisme, un lieu de privation de liberté choisi par celui-ci (voir l’annexe II). Cette visite a été conduite par le mécanisme, les membres de la délégation jouant le rôle d’observateurs.

6.À l’issue de la visite, la délégation a présenté, oralement et à titre confidentiel, ses observations préliminaires aux représentants de l’État et au mécanisme national de prévention.

7.Le présent rapport contient les observations et recommandations que la délégation adresse au mécanisme national de prévention. Ces recommandations sont conformes au mandat que le Sous-Comité tient des alinéas ii) et iii) de l’article 11 b) du Protocole facultatif, qui consiste à offrir au mécanisme une formation et une assistance technique, ainsi que des avis et d’autres formes d’aide. Conformément au paragraphe 2 de l’article 16 du Protocole facultatif, le présent rapport demeurera confidentiel, à moins que le mécanisme ne décide de demander au Sous-Comité de le rendre public.

8.Le Sous-Comité tient à appeler l’attention du Kirghizistan et du mécanisme national de prévention sur le Fonds spécial créé par le Protocole facultatif, étant entendu que, pour solliciter un financement auprès du Fonds spécial au titre de projets particuliers, l’État partie ne peut invoquer que les recommandations formulées par le Sous-Comité dans les rapports de visite qui ont été rendus publics.

9.Le Sous-Comité tient à exprimer sa gratitude au mécanisme national de prévention pour son aide et sa collaboration dans le cadre de la planification et de la réalisation de sa visite. Il l’encourage à faire siennes les recommandations énoncées dans le présent rapport, à y donner suite et à les intégrer à ses méthodes de travail et à sa planification stratégique.

II.Mécanisme national de prévention

10.Le 12 juillet 2012, le Kirghizistan a adopté la loi no 104 sur le mécanisme national de prévention, portant création du Centre national de prévention de la torture et des autres peines et traitements cruels, inhumains ou dégradants. Le Centre national a été enregistré comme organisme public et, à l’issue de sa première opération de recrutement, a débuté ses activités en mars 2014.

11.Le mécanisme national de prévention est composé de deux organes : le conseil de coordination, organe administratif supérieur, et un organe exécutif de 25 membres choisis par le directeur du mécanisme sur la recommandation du conseil de coordination. Géré par ce dernier, le mécanisme comprend 11 membres, à savoir le Médiateur, 2 membres du Parlement (dont l’un est désigné par la majorité parlementaire et l’autre par l’opposition) et 8 représentants de la société civile. Le conseil de coordination arrête la stratégie du mécanisme, adopte la méthode à suivre dans le cadre des visites de prévention, ainsi que le programme annuel de ces visites, présente des recommandations à l’État et analyse les lois et règlements. C’est également lui qui nomme le directeur et le directeur adjoint du mécanisme.

12.Selon la loi, le mécanisme national de prévention est une instance indépendante qui organise et mène ses activités en toute indépendance et est dotée de l’autonomie fonctionnelle et organisationnelle. La loi en question précise les modalités et procédures régissant la constitution du conseil de coordination et le recrutement des membres du personnel, ainsi que les droits et responsabilités des uns et des autres.

13.Le Sous-Comité note avec préoccupation que le conseil de coordination est actuellement paralysé et qu’il est dans l’impossibilité d’exercer les fonctions importantes qui lui ont été confiées. Le quorum nécessaire pour le lui permettre n’est en effet pas atteint du fait de la démission ou du départ de certains de ses membres et de l’apparente indolence du Parlement s’agissant d’organiser l’élection de nouveaux membres.

14.Le mécanisme national de prévention organise trois types de visite dans des lieux de privation de liberté : des inspections complètes, programmées par le conseil de coordination ; des inspections spéciales, comme suite aux plaintes reçues par le mécanisme ; des visites intermédiaires, qui permettent de suivre l’application des recommandations formulées à l’issue d’une visite précédente. À la suite de ces visites, le mécanisme établit des rapports et formule des recommandations dont un certain nombre sont rendus publics. Le Centre national adresse au Parlement, au plus tard le 1er mars de chaque année, un rapport annuel auquel il doit joindre ses états financiers. Il semble que, d’une façon générale, le Parlement ne se préoccupe guère d’examiner ces rapports. En effet, la séance qui devait être consacrée à l’examen du rapport de 2016 a été ajournée à plusieurs reprises et celle au cours de laquelle devait être examiné le rapport de 2017 ne s’était pas encore tenue au moment où le présent rapport a été rédigé. Les recommandations du mécanisme sont généralement prises à la légère par les hautes instances gouvernementales, mais semblent avoir un certain poids au plan opérationnel.

15.Le Sous-Comité constate une méprise quant au rôle du mécanisme, dont on attend notamment qu’il enquête sur des cas de torture et de mauvais traitements. De façon générale, l’efficacité du mécanisme est mesurée au nombre de plaintes qu’il reçoit et au nombre de procédures pénales intentées par les autorités, ce qui est contraire à l’esprit du Protocole facultatif et à la mission de prévention confiée par celui-ci au mécanisme national.

16.Le Sous-Comité constate également avec préoccupation que le nouveau Code pénal ne contient plus d’article érigeant en infraction l’entrave à l’exercice des activités du Centre national. Les dispositions régissant cette infraction figurent désormais dans un code des comportements répréhensibles, ce qui exonère de toute responsabilité pénale quiconque entrave ou compromet la mission du mécanisme ou l’exercice de ses activités.

17.Le Sous-Comité note que l’État alloue régulièrement des fonds au Centre national pour assurer son bon fonctionnement et l’exercice de ses activités, et que ces fonds sont versés en temps utile ; le mécanisme pourrait toutefois être en mesure de mieux remplir sa mission si des ajustements étaient apportés à son budget. Le Centre national a en effet besoin d’étoffer son personnel afin de pouvoir s’occuper de zones géographiques et de questions thématiques auxquelles sa composition actuelle ne lui permet pas de s’intéresser.

18.À titre d’observation générale, le Sous-Comité estime que le Gouvernement kirghize devrait redoubler d’efforts pour appuyer la mission du mécanisme national de prévention. Il doit avant tout bien appréhender cette mission telle que la prévoit le Protocole facultatif, avant de renforcer son appui financier et stratégique au mécanisme, notamment en en faisant mieux connaître les recommandations et en veillant à ce que celles-ci soient appliquées.

III.Recommandations adressées au mécanisme national de prévention

A.Recommandations relatives aux questions juridiques, institutionnelles et structurelles

1.Explication du mandat

19.Au cours de sa visite, la délégation a pris conscience de l’existence d’opinions divergentes au sujet de la mission du mécanisme national de prévention, y compris au sein du Centre national lui-même. La loi sur le mécanisme national de prévention (art. 5) porte création du Centre national en tant qu’organisme de droit public ayant pour mission d’aider les autorités nationales à remplir les obligations découlant du Protocole facultatif. L’article 6 de la même loi énumère les principales fonctions du mécanisme.

20.Toutefois, le Sous-Comité tient à appeler l’attention sur la mission des mécanismes nationaux de prévention telle qu’elle est énoncée dans le Protocole facultatif et à souligner que cette mission a un caractère préventif. Les mécanismes nationaux de prévention ne doivent pas réaliser d’inspections ni mener d’enquêtes comme suite à des plaintes reçues concernant des cas de torture ou de mauvais traitements, ni se prononcer sur ces plaintes, et ce même lorsque des cas de ce type se présentent pendant les visites qu’ils effectuent. En règle générale, le rôle d’un mécanisme national de prévention consiste à tenter de recenser des situations et à détecter des risques systémiques de torture, et à aider l’État concerné à maîtriser ces situations et ces risques, par exemple en adressant des recommandations concrètes et stratégiques aux responsables des lieux de privation de liberté après chaque visite, ainsi qu’aux autorités compétentes.

21. Le Sous-Comité invite le mécanisme national de prévention à dissiper toute ambiguïté dans l ’ esprit de son personnel et des membres du conseil de coordination quant à la portée de sa mission telle qu ’ elle est fixée par la loi et aux restrictions dont cette mission fait l ’ objet, afin que tous la comprennent de la même manière. Le mécanisme devrait procéder de même avec les interlocuteurs dont les missions pourraient coïncider partiellement avec la sienne ou s ’ en rapprocher, afin qu ’ ils puissent appréhender leurs fonctions respectives et définir des modalités de coopération.

22. Le Sous-Comité recommande au mécanisme de faire en sorte que les autorités nationales comprennent sa mission, en dissipant tout malentendu à ce propos et en faisant une mise au point au sujet des attentes qui ne cadrent pas avec les dispositions du Protocole facultatif, et d ’ engager à cette fin un dialogue direct avec les ministères et le Parlement. Ce faisant, le mécanisme devrait veiller à établir et à maintenir des voies de communication et de dialogue appropriées avec les autorités compétentes, et proposer l ’ organisation de séances de travail avec celles-ci.

23.Si la loi sur le mécanisme national de prévention n’habilite pas le mécanisme à traiter des plaintes de particuliers, celui-ci peut néanmoins, dans le cadre de sa mission, recevoir des plaintes déposées par des détenus au sujet de différentes questions. Comme le prescrit à juste titre la loi, il lui est conseillé d’éviter de traiter lui-même des plaintes individuelles pour des faits de torture ou de mauvais traitements, et de transmettre ces plaintes aux autorités compétentes en se tenant informé précisément et régulièrement de la suite qui leur est donnée. S’agissant des plaintes relatives à d’autres questions, telles que les conditions de détention, le mécanisme doit informer les personnes qu’il interroge des recours dont elles disposent pour porter plainte, et leur indiquer à qui adresser leur plainte. Le mécanisme peut, au cas par cas, conseiller les responsables des centres de détention sur les moyens de régler une question d’ordre humanitaire au sujet de laquelle il a reçu une plainte, mais il s’agit alors uniquement d’empêcher un préjudice irréparable et cela ne change rien au fait que le mécanisme ne peut ni ne doit traiter des plaintes individuelles. Ce nonobstant, il peut utiliser les données que les plaintes individuelles lui ont permis de recueillir et en analyser le contenu dans le but d’étudier, plus généralement, les tendances et les lacunes des systèmes juridique et pénitentiaire, et de formuler des recommandations à l’intention des autorités publiques.

24. Le Sous-Comité recommande au mécanisme national de prévention d ’ établir des directives claires concernant les modalités d ’ échanges et de suivi avec le Bureau du Médiateur, s ’ agissant en particulier des questions liées aux visites effectuées dans les lieux de privation de liberté et aux plaintes individuelles, afin d ’ éviter les doubles emplois et les empiètements sur leurs compétences respectives.

25. Le Sous-Comité recommande également au mécanisme national de prévention de s ’ assurer que la définition des lieux de privation de liberté donnée par la loi est suffisamment large, afin de ne pas limiter la portée de sa mission ni empêcher que certains de ces lieux relèvent de sa compétence du fait d ’ une définition juridique restrictive. Cette définition devrait s ’ étendre à des lieux et formes de détention non classiques, notamment mais non exclusivement au placement en résidence surveillée, aux internats et aux écoles islamiques (madrasas), ainsi qu ’ aux camps de réfugiés .

2.Structure et indépendance

26.Le Sous-Comité prend note avec satisfaction de la présence de membres de la société civile au sein du conseil de coordination, qui est le noyau stratégique du mécanisme national de prévention. Toutefois, le fait que cet organe important soit actuellement paralysé par l’absence de quorum le préoccupe au plus haut point. Au moment où le présent rapport a été établi, quatre des huit membres de ce conseil représentant la société civile avaient soit démissionné, soit quitté leurs fonctions, et aucune nouvelle vacance de poste n’avait été annoncée. De plus, la personne qui occupera le poste de Médiateur n’a toujours pas été désignée et les deux parlementaires membres du conseil n’assistent qu’irrégulièrement à ses réunions.

27. Le Sous-Comité recommande au mécanisme national de prévention de rendre publique aussitôt que possible, par l ’ intermédiaire de son directeur, une invitation adressée aux organisations non commerciales pour qu ’ elles proposent des candidatures au conseil de coordination . Il estime que, dans les cas où le conseil ne peut pas prendre de décisions, le directeur du mécanisme devrait agir de façon à se prononcer avec le concours des membres restants du conseil, car la loi sur le mécanisme national de prévention (art. 5) dispose que le Centre national est géré à la fois par le conseil de coordination et par le directeur. Il s ’ agit d ’ assurer l ’ exercice continu du mandat du Centre national et son fonctionnement ininterrompu, et non de donner un motif d ’ inaction au mécanisme. D ’ un autre côté, le Centre national devrait mettre tout en œuvre pour obliger le Parlement à créer un comité de travail chargé d ’ étudier les candidatures au conseil de coordination .

28.Pendant sa mission, la délégation a été informée que le Parlement pourrait avoir l’intention de modifier les modalités de nomination du directeur du mécanisme national de prévention et, plus généralement, la mission du mécanisme.

29. À ce sujet, le Sous-Comité tient à rappeler que toute modification apportée à la loi sur le mécanisme national de prévention et ayant des incidences sur la structure actuelle de celui-ci doit permettre au mécanisme de conserver sa pleine indépendance, conformément aux articles 17 et 18 du Protocole facultatif.

30. À titre d ’ observation générale, le Sous-Comité recommande au mécanisme national de prévention d ’ adopter une attitude plus dynamique en ce qui concerne les questions liées à son fonctionnement et à sa mission, et d ’ assumer son indépendance telle que le Protocole facultatif et la législation nationale la lui confèrent. Il lui recommande aussi de respecter strictement les délais fixés par la loi applicable pour l ’ élection de nouveaux membres venus du Parlement ou des organisations de la société civile, et de coopérer avec toutes les parties prenantes, notamment en les invitant à faire en sorte que le quorum soit atteint en permanence au sein du conseil de coordination.

3.Ressources humaines et financières

31.Le Centre national compte actuellement 25 employés, pour la plupart juristes, chargés d’effectuer des visites dans les lieux de privation de liberté. Conformément à l’article 25 de la loi sur le mécanisme national de prévention, les groupes chargés des visites sur le terrain doivent comprendre au moins deux personnes, dont l’une doit être membre du conseil de coordination ou faire partie du personnel du Centre national.

32.Or, depuis la mise en place d’équipes régionales dans les régions de Naryn, Talas et Batken, le Centre national a eu des difficultés à s’acquitter de sa mission dans ces régions, car il ne dispose pas du personnel nécessaire pour la constitution des équipes de surveillance prévues par la loi. Pour mettre ses équipes sur pied, le mécanisme doit donc recruter des experts extérieurs au sein des organisations de la société civile. N’ayant pas saisi les modalités suivant lesquelles des experts extérieurs sont recrutés lorsque le besoin s’en fait sentir, s’agissant notamment des critères de sélection et de l’échelle de rémunération, le Sous-Comité demande au mécanisme national de prévention d’éclaircir ce point dans sa réponse au présent rapport.

33.Ce nonobstant, une attention particulière devrait être accordée aux critères de sélection de ces experts, en particulier à leur connaissance du sujet, à l’expérience qu’ils ont acquise en la matière, et à leur indépendance avérée ; à défaut, l’opération pourrait donner une image peu flatteuse du mécanisme national de prévention auprès des autres parties intéressées.

34. Le Sous-Comité rappelle au mécanisme national de prévention que l ’ évaluation de ses besoins financiers doit prendre en compte toutes les activités qu ’ impose le Protocole facultatif, y compris les frais de voyage et de transport, ainsi que les coûts afférents à la collaboration avec les experts extérieurs aux fins des visites sur le terrain et de la formation. C ’ est sur la base d ’ un état des lieux que le mécanisme peut procéder à une véritable évaluation des besoins et demander à l ’ État de lui allouer des crédits lui permettant de financer tous les besoins liés à sa mission.

35. Rappelant que le paragraphe 3 de l ’ article 18 du Protocole facultatif fait obligation aux États parties de dégager les ressources nécessaires au fonctionnement des mécanismes nationaux de prévention, le Sous-Comité réaffirme que le mécanisme national de prévention devrait demander à se voir allouer un budget suffisant pour l ’ exécution de toutes ses tâches essentielles et accorder l ’ autonomie institutionnelle dans l ’ utilisation de ses ressources. U ne ligne budgétaire spécifique devrait être créée à cet effet dans le budget annuel national (voir CAT/C/57/4 et Corr.1, annexe, par. 11 et 12). Les fonds alloués au mécanisme devraient être suffisants pour lui permettre de mener à bien son programme de visites, de faire intervenir des experts extérieurs selon que de besoin, d ’ accroître ses effectifs et de bénéficier régulièrement de formations, selon le plan de travail qu ’ il aura défini .

36.Afin de garantir l’indépendance fonctionnelle et opérationnelle du mécanisme national de prévention et de préciser la nature et l’importance des besoins supplémentaires, le mécanisme doit engager un dialogue constructif avec les autorités publiques compétentes pour déterminer ce dont il a besoin pour remplir comme il se doit sa mission, conformément aux dispositions du Protocole facultatif. Celui-ci ne lui interdit pas de collecter des fonds auprès d’organismes donateurs privés ou étrangers pour financer des activités extrabudgétaires non couvertes par les crédits alloués par l’État. Il convient de garder à l’esprit que ces collectes de fonds n’altèrent en rien l’indépendance du mécanisme, dont son autonomie financière est un gage essentiel.

37. Le Sous-Comité recommande au mécanisme national de prévention d ’ évaluer ses besoins financiers afin de mieux s ’ acquitter de la mission qui lui incombe au regard du Protocole facultatif, notamment le besoin d ’ experts extérieurs, les frais de voyage et, le cas échéant, le personnel supplémentaire, et de présenter aux autorités publiques des propositions concernant ses besoins financiers. Il doit le faire à la suite de la planification annuelle de ses activités, de manière à améliorer ses chances d ’ obtenir des ressources financières suffisantes.

4.Accès aux lieux de privation de liberté

38.La loi sur le mécanisme national de prévention suffit à fonder juridiquement l’accès à tous les lieux de privation de liberté au Kirghizistan. Toutefois, lors de sa création en 2012, le mécanisme a rencontré des problèmes allant du refus d’accès à de longs délais d’attente pour accéder à certains lieux de privation de liberté, en particulier ceux qui relevaient du Comité d’État de la sécurité nationale.

39.Le Sous-Comité note toutefois avec satisfaction que, le mécanisme ayant gagné en visibilité, le nombre d’incidents de ce genre a sensiblement diminué. Il y a encore quelques problèmes d’accès, dus à des personnes qui ne sont pas familiarisées avec la mission du mécanisme.

40.Le Sous-Comité tient à rappeler au mécanisme national de prévention la portée de l’article 4 du Protocole facultatif, en ce qui concerne les lieux de privation de liberté. Au sens de cet article, on entend par privation de liberté toute forme de détention ou d’emprisonnement, ou le placement d’une personne dans un établissement public ou privé de surveillance dont elle n’est pas autorisée à sortir à son gré, ordonné par une autorité judiciaire ou administrative ou toute autre autorité publique. Les lieux et formes de privation de liberté comprennent non seulement les prisons et les postes de police, mais aussi le placement en résidence surveillée, les centres de transit fermés pour étrangers et demandeurs d’asile, les centres accueillant des enfants, les foyers sociaux, les hôpitaux et les établissements psychiatriques, et les établissements destinés au personnel militaire. Les internats spécialisés ou les écoles religieuses peuvent également être des lieux de privation de liberté.

41.Le Sous-Comité tient également à insister auprès du mécanisme national de prévention sur le fait que l’accès aux lieux de privation de liberté doit être inconditionnel, le mécanisme devant notamment avoir accès à tout quartier des centres de détention auquel il a demandé à pouvoir accéder, quel que soit, par exemple, le niveau de danger qu’il puisse présenter, ainsi qu’à tous les documents conservés au centre en question, notamment aux documents médicaux, judiciaires ou administratifs. Il en résulte que le mécanisme doit être autorisé, sans restriction aucune, à rencontrer tous les détenus afin de pouvoir s’entretenir avec eux en privé. Les autorités ne doivent donc pas limiter l’accès du personnel du mécanisme à leurs établissements en arguant de problèmes liés à la sécurité de ce personnel, qu’il s’agisse du comportement à haut risque de certains détenus ou des maladies contagieuses dont ils peuvent être porteurs, ou pour des raisons de confidentialité.

42. Le Sous-Comité recommande au mécanisme national de prévention de s ’ assurer qu ’ il a accès à tous les lieux de privation de liberté du pays et que ceux-ci font l ’ objet de visites périodiques, et que le programme de visites annuel se fonde sur une définition large des lieux de privation de liberté. Lorsqu ’ il décide du quartier à visiter, le mécanisme ne doit pas se laisser influencer par les observations du personnel du centre de détention concernant certains détenus et certains quartiers, et ne doit pas faire de distinction entre les différentes catégories de détenus lorsqu ’ il s ’ entretient avec ceux-ci et pour ce qui est du respect des conditions et garanties.

5.Visibilité et sensibilisation

43.Le Sous-Comité note avec satisfaction que la plupart des autorités que sa délégation a rencontrées connaissent l’existence du mécanisme national de prévention au Kirghizistan et en ont une idée générale. Toutefois, dans leur majorité, les autorités de l’État, y compris les membres du Parlement et de l’appareil judiciaire, n’ont pas encore bien compris la mission et la raison d’être de ce mécanisme. Cela met en évidence le manque de visibilité de celui-ci et montre que son rôle et la nature de ses activités demeurent mal connus, ce qui nuit à son efficacité. Le mécanisme et sa mission sont en outre très mal connus des autres parties intéressées, notamment des personnes privées de liberté, des acteurs de la société civile et du reste de la population. Pareille méconnaissance peut donner lieu à des attentes infondées et, à long terme, ternir la crédibilité du mécanisme.

44.De plus, le Sous-Comité a constaté qu’il restait beaucoup à faire pour que le mécanisme national de prévention soit bien appréhendé comme une institution distincte du Bureau du Médiateur. À l’évidence, les personnes privées de liberté ne saisissaient pas cette distinction. Le Sous-Comité est d’avis que cette absence de visibilité du mécanisme en tant qu’institution distincte peut nuire à l’efficacité et à la crédibilité de celui-ci et, partant, faire obstacle aux efforts faits pour prévenir la torture et les mauvais traitements.

45.Le Sous-Comité est également préoccupé par la confusion constatée entre le rôle du mécanisme national de prévention et ceux du Médiateur et du Bureau du Procureur général, d’autant plus que ces derniers sont eux-mêmes mandatés pour visiter les lieux de privation de liberté. Dans le cadre de toutes ses rencontres, de tous ses échanges écrits avec les autorités, et de toutes les visites qu’il effectue dans les lieux de privation de liberté, le mécanisme national de prévention devrait être clairement désigné en tant que tel, à savoir en tant qu’entité juridique chargée d’aider le Kirghizistan à remplir les obligations qui lui incombent au regard du Protocole facultatif.

46. Le Sous-Comité recommande au mécanisme national de prévention de se faire mieux connaître en tant qu ’ institution en menant des campagnes de sensibilisation et d ’ autres activités de promotion auprès d ’ un large éventail d ’ intervenants, notamment en élaborant des documents relatifs à sa mission et à ses activités, et en les distribuant dans les lieux de privation de liberté et aux autorités publiques compétentes, dans la société civile et aux avocats et membres de l ’ appareil judiciaire. Il s ’ agit de donner au mécanisme une identité distincte de celle des autres organes mandatés pour visiter les lieux en question et de celle de la société civile. Le Sous-Comité recommande aussi au mécanisme de prendre des dispositions de nature à faire mieux connaître sa mission et son travail et visant à les faire reconnaître comme la pièce maîtresse du système de prévention de la torture et des mauvais traitements dans le pays.

47. E n outre, il faudrait faire mieux connaître les rapports du mécanisme national de prévention afin d ’ encourager et d ’ aider les autorités à appliquer ses recommandations. Le mécanisme devrait, chaque fois que cela intéresse sa mission, rendre ses recommandations publiques afin de faire savoir dans quelle mesure l ’ État s ’ acquitte de ses obligations en matière de prévention de la torture. Les rapports annuels et les rapports thématiques du mécanisme peuvent favoriser le développement de son identité et promouvoir son image et sa mission auprès du public ; ils devraient, de ce fait, être rendus publics.

48. Le Sous-Comité recommande également au mécanisme national de prévention de rencontrer directement les autorités publiques compétentes, en particulier le Parlement, afin d ’ examiner la question de l ’ application de ses recommandations, conformément à l ’ article 22 du Protocole facultatif. Enfin, le mécanisme devrait diffuser ses rapports annuels et rendre publiques ses conclusions, notamment en les transmettant au Sous-Comité, aux fins énoncées dans le Protocole facultatif. Ces rapports annuels doivent être adressés au Parlement et publiés, que le Parlement ait ou non tenu des auditions à leur sujet, dans la mesure où le mécanisme est habilité à se servir de ses rapports comme il le juge utile aux fins de l ’ accomplissement de sa mission et, en particulier, de l ’ application de ses recommandations.

B.Recommandations sur la méthode à suivre concernant les visites

49.Afin d’aider et de conseiller le mécanisme national de prévention dans sa mission de protection des personnes privées de liberté, la délégation du Sous-Comité s’est rendue, avec le mécanisme, dans un lieu de privation de liberté (voir l’annexe II). Dans la présente section et à la lumière des observations relatives à cette visite conjointe, le Sous-Comité formule les recommandations suivantes concernant la préparation des visites des lieux de privation de liberté, la méthode à suivre pendant les visites et les mesures à prendre après les visites.

1.Avant les visites

Stratégie et procédure

50.Le Sous-Comité note avec satisfaction que la loi sur le mécanisme national de prévention comporte une classification des types de visites de prévention réalisées par le mécanisme, au nombre de trois, ainsi qu’une explication succincte de la méthode à suivre pour chacun de ces trois types de visite. Toutefois, le mécanisme devrait mettre au point une méthode plus détaillée et distincte pour chaque type de visite et concernant les aspects que la loi n’aborde pas. La fréquence des visites peut varier, mais le mécanisme devrait faire en sorte que tous les lieux de détention soient régulièrement visités et que les visites restent inopinées.

51.Le Sous-Comité a appris que le mécanisme national de prévention avait dans le passé réalisé, et pourrait de nouveau réaliser, des visites conjointement avec le Bureau du Procureur général. Le Sous-Comité considère cette pratique comme étant en contradiction avec le but et la mission du mécanisme, qui consistent non pas à inspecter des lieux de détention, mais à prévenir la torture.

52. Le Sous-Comité rappelle au mécanisme national de prévention que, sa mission consistant à faire de la prévention, il devrait s ’ abstenir d ’ effectuer des visites conjointement avec d ’ autres entités publiques, en particulier le Bureau du Procureur général. Il s ’ agit en effet de préserver les principes d ’ indépendance et d ’ impartialité, le caractère préventif de la mission du mécanisme et le lien de confiance entre les personnes privées de liberté et le mécanisme.

53.Comme il l’a indiqué pendant la visite du Sous-Comité, le mécanisme national de prévention a, depuis sa création, réalisé plus de 4 000 visites dans des lieux de privation de liberté. Le Sous-Comité prend acte du grand nombre de visites effectuées, mais il rappelle au mécanisme que le nombre de visites ne constitue pas l’indicateur de résultats le plus fiable. Les indicateurs suivants le sont davantage : nombre de rapports présentés, nombre de recommandations formulées et nombre de celles auxquelles il a été donné suite, de celles qui ont été appliquées et de celles qui ne l’ont pas été, et diminution globale du nombre de cas de torture et de mauvais traitements et tendances dans ce domaine.

54. Le Sous-Comité recommande au mécanisme national de prévention d ’ adopter, en ce qui concerne non seulement les visites de prévention , mais aussi toutes ses autres activités et fonctions, une approche méthodologique qui soit fondée sur la notion de prévention de la torture . À cette fin, il lui est vivement recommandé d ’ adopter des procédures opérationnelles permanentes relatives aux visites, notamment une méthode applicable aux entretiens menés avec les personnes détenues dans des lieux de privation de liberté et avec le personnel de ces établissements, ainsi que des méthodes de suivi, et d ’ appliquer ces procédures de façon systématique. Celles-ci pourront être révisées en fonction des besoins et conformément à la mission du mécanisme national de prévention.

55. Il importe au plus haut point que le mécanisme national de prévention consacre suffisamment de temps à la préparation méticuleuse de chaque activité, en particulier des visites de prévention. Les membres de l ’ équipe qui effectue une visite doivent tous connaître à l ’ avance le rôle qui leur est assigné, savoir ce que l ’ on attend d ’ eux, et connaître la dynamique générale de la visite.

56. Le Sous-Comité recommande que tous les membres du mécanisme national de prévention, à savoir les membres du conseil de coordination, les agents du Centre national et les experts, suivent une formation à la méthode à appliquer dans le cadre des visites dans les lieux de privation de liberté, notamment à la planification et à l ’ organisation d ’ une visite.

57. Le Sous-Comité recommande au mécanisme national de prévention d ’ élaborer une stratégie ciblée pour chaque visite. Ces stratégies devraient correspondre au type et à la taille des établissements concernés, à la connaissance que le mécanisme a de la gravité des questions relatives aux droits de l ’ homme qui s ’ y posent et à sa capacité de suivre l ’ application de ses recommandations.

2.Pendant les visites

a)Visibilité

58.Le Sous-Comité note que les responsables du centre de détention où sa délégation s’est rendue en compagnie de membres du mécanisme national de prévention connaissaient les agents du mécanisme ; il relève toutefois avec préoccupation que le mécanisme ne s’est pas toujours fait connaître des autorités et ne leur a pas toujours bien indiqué la nature de sa mission, et qu’il ne s’est pas fait clairement reconnaître comme le mécanisme national de prévention. L’équipe visitante devrait être présentée d’une manière qui permette de la distinguer du personnel du centre de détention et des autres acteurs effectuant des visites dans des lieux de détention.

59. Le Sous-Comité recommande au mécanisme national de prévention d ’ expliquer clairement aux autorités, au début de chaque visite, sa mission et ses méthodes de travail, notamment la nécessité de mener des entretiens en privé. Il estime qu ’ en présentant aux autorités, d ’ une manière appropriée et complète, sa mission et le but de la visite, en particulier, le mécanisme renforcera sa visibilité et améliorera l ’ efficacité de ses interventions. En outre, l ’ équipe visitante devrait se faire clairement reconnaître comme représentante du mécanisme national de prévention, par exemple en portant un badge ou un gilet, et devrait présenter une brochure d ’ information aux autorités et aux détenus.

60. Le Sous-Comité estime que le personnel du mécanisme national de prévention devrait à tous moments garder une distance formelle avec celui du centre de détention, même s ’ il peut arriver qu ’ ils se connaissent bien. Cet élément de professionnalisme est très important pour le mécanisme s ’ il veut rester crédible et gagner la confiance des détenus.

b)Entretiens

61.Pendant la visite conjointe, le Sous-Comité a noté que les membres du mécanisme national de prévention n’ont pas été identifiés clairement comme tels, n’ont pas toujours informé les détenus qu’ils étaient envoyés par le mécanisme et n’ont pas été assez explicites quant à la nature de leur mission. Le principe de confidentialité et le caractère volontaire des entretiens n’ont presque jamais été mentionnés.

62.De plus, certains « échanges d’informations » avec les détenus, consistant notamment à présenter les membres du mécanisme national de prévention, ont été menés collectivement, en présence d’agents pénitentiaires. L’équipe de surveillance a eu du mal à choisir les personnes à interroger et a posé des questions ouvertes (exemple : « Avez-vous à vous plaindre de quelque chose ? ») à des groupes de détenus en présence de gardiens. De surcroît, une fois au moins, les membres du mécanisme ont suivi la recommandation de l’administration quant aux cellules à visiter et à celles qu’il fallait éviter.

63. Le Sous-Comité recommande aux membres du mécanisme national de prévention de se présenter aux personnes à interroger en indiquant leur nom et les fonctions qu ’ ils occupent au sein du mécanisme. La personne qui conduit l ’ entretien devrait expliquer la mission du mécanisme, en mettant plus particulièrement l ’ accent sur le caractère préventif de son action. Le consentement exprès de la personne interrogée devrait toujours être obtenu et il devrait être précisé que l ’ entretien est volontaire et confidentiel et qu ’ il peut y être mis fin à tout moment à la demande de la personne interrogée. Le Sous-Comité est d ’ avis qu ’ une présentation appropriée et complète de la mission du mécanisme permet de gagner la confiance de la personne interrogée et facilite la communication et l ’ échange d ’ informations. De plus, les membres du mécanisme ne devraient jamais prendre l ’ avis de l ’ administration, ou se laisser influencer par elle, quant à la question de savoir quelles personnes interroger ; c ’ est là une question qui doit être entièrement laissée à la discrétion du mécanisme. L ’ idée que les gardiens se font de la dangerosité des détenus ne devrait pas dissuader celui-ci de mettre en œuvre ses programmes de visites ni l ’ influencer à cet égard.

64. Le Sous-Comité recommande de choisir avec soin le lieu de l ’ entretien individuel afin que la teneur de cet entretien demeure confidentielle ; celui-ci doit en effet se dérouler hors de portée de voix et hors de la vue de tierces parties, quelles qu ’ elles soient, de manière que le principe qui consiste à ne pas nuire soit appliqué sans exception. Le mécanisme devrait en outre faire état de tout acte de représailles que les personnes interrogées pourraient avoir eu à subir comme suite à sa visite et encourager les intéressés à signaler ces actes et, s ’ il y a lieu, réaliser des visites de suivi.

65.Le Sous-Comité a constaté que les entretiens se déroulaient d’une manière très formelle et plutôt mécanique et dans un cadre désagréable, ce qui n’était pas propice à l’instauration d’une relation de confiance entre les membres du mécanisme national de prévention et les personnes interrogées. Qui plus est, peu d’informations étaient communiquées à la personne interrogée au sujet du mécanisme et des objectifs de la visite, ce qui pouvait donner lieu à des attentes infondées quant aux possibilités d’intervention du mécanisme dans des cas individuels. La personne qui conduit l’entretien devrait s’abstenir de tout contact informel avec les agents de détention, car cela peut jeter un doute sur la crédibilité et l’indépendance de cette personne et du mécanisme.

66. Le Sous-Comité recommande au mécanisme national de prévention de rencontrer individuellement les personnes détenues pour s ’ entretenir avec elles en privé. Le lieu de l ’ entretien doit permettre de créer un cadre où la personne interrogée se sente à l ’ aise ; on utilisera, si possible, des espaces que les personnes détenues connaissent bien. Il est également recommandé au mécanisme de préparer une petite brochure qui décrive sa mission et ses méthodes de travail, explique la notion de consentement éclairé et indique les coordonnées du mécanisme. Enfin, la personne qui conduit l ’ entretien devrait toujours entretenir des relations formelles et professionnelles avec les agents de détention.

67.Le Sous-Comité a remarqué que les membres du mécanisme se référaient de manière excessive à leurs listes de contrôle et à leurs questionnaires. S’il est vrai que la liste de contrôle les aide à se rappeler les objectifs de la visite, le fait de s’en tenir strictement à cette liste est contreproductif et perturbe le cours naturel de la conversation avec la personne interrogée. De plus, le Sous-Comité a constaté que le contenu de la liste de contrôle semblait poser des problèmes, car il ne tenait pas compte d’aspects essentiels de la mission du mécanisme et se focalisait trop sur les conditions matérielles de la détention.

68.Le Sous-Comité a noté qu’en plusieurs occasions, les entretiens avaient abordé des questions sans rapport avec la mission du mécanisme national de prévention, comme le motif de la détention, les demandes de libération ou d’autres questions de procédure judiciaire. Le Sous-Comité est conscient qu’il est difficile de faire en sorte que les entretiens restent axés sur la mission du mécanisme, mais il est convaincu que cette mission doit en être l’objectif premier. Pour que les entretiens restent focalisés sur la mission, les membres du mécanisme devraient s’abstenir de donner des conseils aux personnes qu’ils interrogent, de proposer leurs services et de faire des promesses qu’ils ne sont pas en mesure de tenir car elles ne s’inscrivent pas dans le cadre de la mission de prévention qui est la leur.

69. Le Sous-Comité rappelle que les entretiens ont pour objectif d ’ aider le mécanisme national de prévention à comprendre la situation des personnes privées de liberté afin de faire des recommandations visant à prévenir, à l ’ avenir, les cas de torture et de mauvais traitements. Dans l ’ éventualité où un entretien mettrait au jour d ’ autres problèmes, l ’ équipe de surveillance devrait appeler l ’ attention de la personne détenue sur les moyens et mécanismes appropriés permettant de résoudre ces problèmes, sans chercher à le faire elle-même, le rôle du mécanisme étant purement préventif. Le Sous-Comité rappelle également au mécanisme qu ’ il devrait limiter autant que possible l ’ utilisation de formulaires et de questionnaires normalisés, dans la mesure où l ’ utilisation systématique de listes de contrôle et de formulaires normalisés peut empêcher de prendre en considération les particularités de chaque cas.

70. Le Sous-Comité recommande à la direction du mécanisme national de prévention de veiller à ce que toutes les personnes chargées des visites de prévention aient été spécialement formées aux techniques d ’ entretien et de s ’ assurer que les personnes qui conduisent les entretiens ont pleinement assimilé la formation et ont, par exemple, participé avec succès à une simulation d ’ entretien.

c)Confidentialité

71.Au cours de la visite effectuée conjointement avec le mécanisme national de prévention, la délégation du Sous-Comité a constaté que les membres du mécanisme n’hésitaient pas à évoquer la teneur des plaintes en présence des gardiens et avec l’administration du lieu de détention, ce qui dénote chez eux une méconnaissance du principe de confidentialité et du fait que le non-respect de ce principe peut nuire aux détenus, qui demeurent dans le lieu de détention bien après la fin de la visite. Cela soulève de sérieuses préoccupations en ce qui concerne la confiance que les détenus peuvent avoir dans le mécanisme et sa position sur la question des représailles, ainsi que l’idée qu’ils s’en font.

72. Le Sous-Comité insiste sur l ’ importance du principe de confidentialité s ’ agissant des méthodes de travail du mécanisme national de prévention et de la réussite de ses interventions. Il recommande au mécanisme d ’ organiser à titre prioritaire une formation aux questions liées à la confidentialité et au principe consistant à ne pas nuire . Il importe au plus haut point que le mécanisme et ses équipes de surveillance sachent intégrer ces principes à leur travail afin de ne pas exposer les personnes détenues à une forme de représailles, quelle qu ’ elle soit.

d)Bilan de la visite à l’intention du directeur de l’établissement

73.Le Sous-Comité note avec préoccupation que, si un bref exposé a bien été présenté à l’administration de l’établissement à l’issue de la visite, il n’a pas été question des principaux problèmes mis en évidence au cours de celle-ci. Lors de ce compte rendu oral, qui portait principalement sur des plaintes individuelles, les membres du mécanisme n’ont pratiquement fait état d’aucun problème systémique. Le Sous-Comité a noté qu’avant la présentation de ce bilan, les membres de l’équipe de surveillance ne s’étaient concertés que sommairement au sujet des conclusions et recommandations à communiquer au directeur de l’établissement. De plus, l’équipe n’a pas appelé l’attention de l’administration sur la nécessité de protéger contre les représailles les détenus et les agents du centre de détention qui avaient été interrogés.

74. Le Sous-Comité recommande de présenter dès que possible aux responsables des établissements visités un bilan complet et constructif qui comporte les observations et recommandations préliminaires qui s ’ imposent et mette l ’ accent sur les questions qui appellent une intervention immédiate ou les problèmes urgents à caractère humanitaire .

e)Représailles

75.Le Sous-Comité juge inquiétant que le mécanisme national de prévention ne se soit doté d’aucune stratégie permettant d’empêcher que les personnes interrogées pendant les visites soient victimes de représailles ou de menaces de la part des agents des centres de détention ou de codétenus. Compte tenu de son travail et de ses interactions avec les détenus, il est indispensable que le mécanisme mette au point une méthode convenue et approuvée de prévention des représailles et l’inculque à tous ses membres.

76.D’autre part, le Sous-Comité regrette vivement que le mécanisme national de prévention n’ait pas respecté le principe de confidentialité et ait révélé au directeur du centre de détention l’identité des personnes interrogées, y compris des mineures, ainsi que la teneur de leurs plaintes. Dans le cadre de ses activités, le mécanisme doit mettre tout en œuvre pour éviter de nuire, même lorsque des relations de confiance et d’amitié ont été instaurées entre l’équipe de surveillance et le personnel de l’établissement. Le Sous-Comité souligne qu’il importe de toujours chercher à protéger les personnes détenues qui ont été interrogées contre d’éventuelles représailles, même lorsque le risque semble minime.

77.Le Sous-Comité a relevé que, dans le cadre du compte rendu oral présenté à l’issue de la visite, le mécanisme national de prévention n’avait pas indiqué aux responsables de l’établissement que toute forme d’intimidation ou de représailles visant des personnes privées de liberté constituait un manquement aux obligations de l’État partie.

78. Le Sous-Comité recommande vivement au mécanisme national de prévention d ’ élaborer à titre prioritaire une méthode et une stratégie d ’ ensemble en matière de prévention des représailles, et de s ’ assurer que ses membres en connaissent la teneur et sachent comment les mettre en œuvre. Cette approche devrait être axée sur la prévention, la confidentialité et le principe consistant à ne pas nuire .

79. Le Sous-Comité recommande au mécanisme national de prévention de toujours considérer qu ’ il existe un risque d ’ intimidation, de sanctions ou de représailles et, partant, de prendre des dispositions pour parer à ce risque. À titre de mesure préventive, la question d ’ éventuelles représailles devrait toujours être mentionnée. Outre les précautions susdites, le mécanisme devrait rappeler aux autorités que toute forme de représailles est inadmissible et sera signalée, et qu ’ il suivra chaque cas afin de s ’ assurer que les auteurs d ’ actes de représailles ont été dûment sanctionnés. Le mécanisme devrait également, entre autres choses, effectuer des visites de suivi préventives.

3.Après la visite

a)Rapports établis à l’issue des visites

80.Le Sous-Comité a pris note avec satisfaction de la pratique établie, bien que non prévue par la loi, consistant, pour le mécanisme national de prévention, à établir des rapports à l’intention des autorités compétentes entre deux et sept jours après la visite d’un lieu de privation de liberté.

81.Le Sous-Comité encourage cette pratique, mais il constate que le rapport établi à l’issue de la visite effectuée avec sa délégation contenait trop d’informations factuelles et se concentrait sur les constatations faites par le mécanisme à propos de questions mineures, sans rendre compte des conclusions que la visite avait permis de tirer sur des questions systémiques. Les recommandations formulées dans le rapport ne correspondaient pas nécessairement à ces conclusions. De plus, le rapport n’évaluait pas dans quelle mesure le centre de détention avait appliqué les recommandations formulées lors de la visite précédente.

82. Le Sous-Comité recommande au mécanisme national de prévention de continuer d ’ observer la pratique consistant à établir, à l ’ issue de chaque visite, un rapport faisant état des différents sujets de préoccupation et contenant des recommandations (CAT/OP/12/5, par. 36 et 37). S ’ il le juge utile dans le cadre de sa mission, le mécanisme pourra rendre ce rapport public, tout en garantissant la confidentialité des données à caractère personnel .

83. Le Sous-Comité recommande au mécanisme national de prévention de former ses membres aux techniques d ’ établissement de rapports, à la formulation de recommandations et aux stratégies de suivi. Il convient de garder à l ’ esprit que chaque rapport de visite devrait être principalement axé sur la prévention, sur la mise en évidence des problèmes qui se posent et sur la présentation de solutions sous la forme de recommandations pratiques. Ces dernières doivent être concrètes et fondées, devraient pouvoir déboucher sur des mesures de prévention réalisables permettant de remédier aux insuffisances des systèmes et des pratiques, et devraient également tenir compte des normes nationales et internationales régissant la prévention de la torture et autres mauvais traitements, et notamment des recommandations du Sous-Comité. Une fois le rapport transmis, le mécanisme devrait élaborer une stratégie de suivi des recommandations et d ’ utilisation du rapport comme support d ’ échange avec les responsables de l ’ établissement visité et les ministères compétents.

b)Établissement de rapports annuels

84.Le Sous-Comité constate que le mécanisme national de prévention s’est abstenu de publier ceux de ses rapports annuels qui n’avaient pas été examinés par le Parlement. Il ne connaît pas, en outre, les procédures suivies par le mécanisme aux fins de l’établissement de ses rapports annuels.

85. Conformément à l ’ article 23 du Protocole facultatif, le Sous-Comité invite le mécanisme national de prévention à étudier les moyens qui pourraient lui permettre de rendre publics ses rapports annuels, qu ’ ils aient été ou non examinés par le Parlement. Le mécanisme pourrait, par exemple, diffuser ces rapports en indiquant qu ’ ils doivent être examinés par le Parlement à une date déterminée.

IV.Mesures à prendre

86. Le Sous-Comité félicite le mécanisme national de prévention de sa volonté de prévenir la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et de l ’ ardeur avec laquelle il s ’ emploie à atteindre cet objectif. Il relève en outre que la loi sur le mécanisme est plutôt solide et recommande au mécanisme de se concentrer sur ses méthodes de travail et pratiques internes, en donnant suite aux recommandations formulées par le Sous-Comité dans le présent rapport.

87. Comme indiqué dans le présent rapport, il est particulièrement important que le mécanisme national de prévention veille à ce que sa mission soit bien comprise tant par les membres de son personnel que par ceux de son conseil de coordination. Cela suppose que le mécanisme détermine ce qu ’ il doit et ne doit pas faire dans l ’ exercice de son mandat, ainsi que les lacunes et les besoins en matière de formation s ’ agissant, par exemple, de la planification stratégique, de la méthodologie et des méthodes de travail, en prévoyant notamment une stratégie en matière de confidentialité et de représailles et les protocoles nécessaires à la mise en œuvre rapide de celle-ci.

88. Le Sous-Comité rappelle que le mécanisme national de prévention devrait mettre à profit l ’ indépendance que lui confèrent le Protocole facultatif et la législation nationale. Il appartient au mécanisme de se faire le champion de la cause de la prévention de la torture dans les lieux de privation de liberté et d ’ aider le Kirghizistan à remplir les obligations découlant du Protocole facultatif . À cet égard, le mécanisme ne devrait pas hésiter à se faire publiquement l ’ avocat de sa propre mission lorsqu ’ il se heurte à des obstacles, et à dissiper les malentendus et les attentes fallacieuses des autorités lorsque celles-ci évaluent l ’ utilité d ’ un mécanisme national de prévention au Kirghizistan.

89. Le Sous-Comité recommande en outre au mécanisme national de prévention de coopérer plus étroitement, au plan international, avec les autres mécanismes de ce type pour renforcer ses capacités, échanger des informations, mettre en commun les pratiques et améliorer ses méthodes de travail, de manière à mieux s ’ acquitter des responsabilités dont le Protocole facultatif l ’ a investi.

90. Le Sous-Comité voit dans sa visite et dans le présent rapport le prolongement d ’ un dialogue constructif avec le mécanisme national de prévention du Kirghizistan. Il fait savoir que le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l ’ homme est prêt à fournir au mécanisme une assistance technique et des conseils pour le rendre mieux à même de prévenir la torture et les mauvais traitements dans tous les lieux de privation de liberté de l ’ État partie et d ’ atteindre leur objectif commun de prévention.

91. Le Sous-Comité rappelle que la prévention de la torture constitue pour l ’ État partie une obligation permanente de large portée, et qu ’ un bon mécanisme national de prévention peut largement améliorer la probabilité de voir cette obligation remplie. Il invite le mécanisme à réviser et à renforcer ses méthodes de travail et à veiller à ce que ses membres tirent parti des formations dispensées pour pouvoir mieux s ’ acquitter des responsabilités qui lui incombent au regard du Protocole facultatif, notamment en se prévalant de l ’ aide du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l ’ homme aux fins de la mise en œuvre des recommandations formulées dans le présent rapport.

92. Le Sous-Comité invite également le mécanisme national de prévention à lui communiquer ses rapports annuels et réaffirme qu ’ il est disposé à l ’ aider à atteindre leur objectif commun, qui est de prévenir la torture et les mauvais traitements, et à concrétiser les engagements pris.

93. Le Sous-Comité recommande au mécanisme national de prévention du Kirghizistan d ’ engager le dialogue avec lui au sujet de l ’ application de ses recommandations, conformément à l ’ article 12 d) du Protocole facultatif, et de le faire dans les six mois suivant la réception du présent rapport. Il lui recommande également d ’ entamer des discussions avec lui sur les modalités de ce dialogue au moment où il soumettra sa réponse au présent rapport .

94. Le Sous-Comité recommande au mécanisme national de prévention de rendre public le présent rapport et lui demande de l ’ informer de sa décision sur cette question .

Annexe I

List of places of deprivation of liberty visited by the Subcommittee

I.Temporary detention places (“IVS”) and other places under Police

1.Leninskiy District Police Station in Bishkek

2.Osh Oblast (Province) Police Department

3.GOM Ak-Bura (City Police Division) in Osh

4. GOM Sulaiman- To’o (City Police Division) in Osh

5.Reception and distribution centre (for undocumented persons) in Osh

6.IVS of Bishkek City Police Department

7.IVS of Osh City Police Department

8.IVS of Jalal-Abad City Police Department

9.IVS of Kara-Suu District Police Department

10.IVS of Uzgen District Police Department

11.IVS of Suzak District Police Department

II.Pretrial detention places (“SIZO”) under the State Penitentiary Service (“GSIN”)

1.Facility # 21 in Bishkek (referred to as “SIZO # 1” informally)

2.Facility # 25 in Osh (referred to as “SIZO # 5” informally)

3.SIZO in Jalal Abad

III.Detention places under the National Security Committee

1.SIZO of the National Security Committee in Bishkek

2.SIZO of the National Security Committee in Osh

IV.Correctional detention places (“colonies”) under GSIN

1.Colony # 27 in Bishkek

2.Colony # 19 in Bishkek

3.Colony # 42 in Osh

V.Facilities for Children and Adolescents

1.Juvenile Crime Prevention Centre in Bishkek

2.Children’s psycho-neurological facility in Belovodosk

VI.Medical facilities

Chym-Korgon Psychiatric Hospital

Annexe II

List of places of deprivation of liberty jointly visited by the national preventive mechanism and the Subcommittee

IVS GUVD of Bishkek

Annexe III

List of officials and other persons with whom the Subcommittee met

I.National level

A.Authorities

1.Coordinating Council of Human Rights

2.Natalia Nititenkov, Parliament

3.Ainurd Altybaevai, Parliament

4.Mivlan Zheenchoroevi, Parliament

5.Taalaibek Mambetaitov, Parliament

6.Kozhokulova Asel Turusbekovna, Third Secretary of Ministry of Foreign Affairs

7.Syrgatayeva Aynura Kulmamatovng, Deputy Head of International Department, State Services of Execution of Punishment

8.Baybosunov Azamat Medetovich, Inspector, State Services of Execution of Punishment

9.Oskon Bayev K.Zh., Deputy Head of SVR Department, Ministry of Internal Affairs

10. Bekemov T.I., Chief Inspector, Ministry of Internal Affairs

11.Balmuhambetov T.B., Inspector, Ministry of Internal Affairs

12. Sarybayev Sh.K., Inspector, Ministry of Internal Affairs

13. Bonushev M.Sh., Deputy Head of SKM Department, Ministry of Internal Affairs

14. Makhmutov R.A., Head of SS Department, Ministry of Internal Affairs

15. Zhaynosboyev A., Deputy Head of SPENM Department, Ministry of Internal Affairs

16. Sadiyeva A.K., Chief Inspector of GSh Department, Ministry of Internal Affairs

17.Khamdamov Zh.M., Deputy Head of GSh Department, Ministry of Internal Affairs

18.Turgun Bayeva, Chief Specialist, Ministry of Labour and Social Development

19.Omuskamova S.T., Specialist, Ministry of Education and Science Zhorgoyev A.U., State Committee of National Security

20.Amrakulov I.A., State Committee of National Security

B.National Preventive Mechanism

1. Sulaimanov Nurdin, Director

2.Dinara Sayarova, Deputy Director

3.Dzhabbarov Litkin, Member of Coordinating Council

4.Numetova Dilyara

5.Maydunov Bokat

6. Turdubekova Nazgul

7.Zhaparov Kamaldin

8.Kasplekulov Banyt

9.Begolieva Altynai

C.Ombudsman

1. Kolopov A.S., Head of Department (Torture)

2. Yerlan Alimbaev, Deputy Ombudsman

3.Sunzhow Toktomambetou, Specialist on External Affairs

D.General Prosecutor’s Office

1.Karmabekov U.K.

2.Tiklek Kudaiarov

3.Asylbels Akmatov

4.Dzhamilia Wzhamanbaeva

5.Jyrgal Ismailov

E.Bar Association

1. Toktomambetov Stalbek

2. Sparov Nurjaz

3.Kyigyrova Arman

4.Jyrgal Babaeu

F.United Nations Agencies and International Organizations

1. Resident Coordinator of the UN Country Team of Kyrgyzstan

2. UNFPA

3.OHCHR

4.WFP

5.UNICEF

6. UNAIDS

G.Civil society

1.Coalition against Torture

2.Human Rights Movement

3.Soros Foundation

4.Open Spectrum

5.Center Alternativa HRM

6.CPPI

7.Bir Duino (One World)

8.Kylym Shamy

Regional level

A.Authorities

1.Office of the Public Prosecutor in Osh

2.Ministry of Internal Affairs – Osh City and Province Police Departments

3. Nurdinov Malik, Head of the Department of Internal Affairs of the Osh province

4.Ibraim uulu Ulanbek, Deputy Prosecutor of the Jalal-Abad region

5.Abdyrasulov Rustam, Deputy Prosecutor of the Osh city

6. Shakiev Emilbek, Deputy Head of the SIZO of the State Committee for National Security of the Osh city and Osh province

7.Isakov Rustambek, Representative of the Security Service of the State Committee for National Security of the Osh city and Osh province

8. Karamurzaeva Aizahamal, Third Secretary of the Plenipotentiary Representation of the Ministry of Foreign Affairs in the South

9.Bekturov Nurlan, Senior Prosecutor of the Prosecutor’s Office of the Osh province

10.Chekirgozov Nuraly, Deputy Head of the SIZO No. 5

B.Civil society

1.Positive Dialogue

2.Friend

3.ECHR

4.Bir Duino (One World)

5.Center for Cooperation for International Protection