Nations Unies

CRPD/C/FRA/CO/1

Convention relative aux droits des personnes handicapées

Distr. générale

4 octobre 2021

Français

Original : anglais

Comité des droits des personnes handicapées

Observations finales concernant le rapport initial de la France *

I.Introduction

1.Le Comité a examiné le rapport initial de la France à ses 539e, 540e et 541e séances, tenues en ligne les 18, 20 et 23 août 2021. Il a adopté les observations finales ci-après à sa 549e séance, tenue en ligne le 7 septembre 2021.

2.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport initial de la France, qui a été établi conformément aux directives concernant l’établissement des rapports, et remercie l’État partie des réponses écrites apportées à la liste de points.

3.Le Comité remercie l’État partie d’avoir accepté que l’examen de son rapport initial se déroule entièrement en ligne, compte tenu des circonstances exceptionnelles dues à la pandémie de maladie à coronavirus (COVID-19). Il se félicite du dialogue sincère et fructueux qu’il a eu avec la délégation, à la composition diversifiée et multisectorielle et dans laquelle les ministères compétents étaient représentés. Il se félicite également de la participation du Défenseur des droits, en sa qualité de mécanisme indépendant de suivi au titre de l’article 33 (par. 2) de la Convention, et de la Commission nationale consultative des droits de l’homme, en sa qualité d’institution nationale des droits de l’homme de l’État partie.

II.Aspects positifs

4.Le Comité accueille avec satisfaction les mesures que l’État partie a prises pour appliquer la Convention depuis qu’il l’a ratifiée en 2010. Il se félicite des mesures législatives qui ont été prises afin de promouvoir les droits des personnes handicapées, en particulier :

a)La modification, en juillet 2019, de l’article 371-1 du Code civil, qui interdit les châtiments corporels dans tous les contextes ;

b)L’adoption, en 2019, de la loi d’orientation des mobilités, qui prévoit la collecte et la publication de données sur l’accessibilité des transports ;

c)La prise, en 2019, du décret d’application de la loi pour une République numérique, qui prévoit des sanctions en cas de non-respect des obligations relatives à l’accessibilité numérique ;

d)L’adoption, le 23 mars 2019, de la loi no 2019-222, qui reconnaît le droit de vote des personnes handicapées sous tutelle ;

e)L’adoption de l’article L.5213-6 du Code du travail, qui impose l’obligation de proposer des aménagements raisonnables aux personnes handicapées et dispose que le refus d’apporter de tels aménagements constitue une forme de discrimination fondée sur le handicap.

5.Le Comité se félicite des mesures que l’État partie a prises pour se doter d’un cadre stratégique visant à assurer et à suivre l’application de la Convention sur son territoire, notamment la nomination de référents handicap parmi les hauts fonctionnaires des ministères et la création, en 2018, d’un comité interministériel du handicap. En outre, il note que le Défenseur des droits assure les fonctions de mécanisme indépendant de suivi au titre de l’article 33 (par. 2) de la Convention et qu’il travaille en coordination avec d’autres instances indépendantes de suivi, telles que la Commission nationale consultative des droits de l’homme.

6.Le Comité prend note des conférences nationales du handicap, qui permettent de renforcer le dialogue sur les droits des personnes handicapées et qui se tiennent régulièrement, et des politiques sectorielles d’application de la Convention. Il prend note, en particulier, de l’adoption, en 2019, de la Stratégie pour l’emploi des personnes en situation de handicap et de la création de comités chargés de suivre son exécution, et de l’adoption de la Stratégie nationale de santé sexuelle 2018-2020, qui inclut des mesures concernant les personnes handicapées, de politiques sectorielles relatives aux personnes ayant une maladie rare et de la Stratégie nationale 2018-2022 pour l’autisme.

III.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

A.Principes généraux et obligations générales (art. 1er à 4)

7.Le Comité est préoccupé par :

a)La déclaration interprétative concernant le terme « consentement » (art. 15, par. 1), que l’État partie a faite quand il a ratifié la Convention ;

b)Le fait que l’État partie n’a pas pris de mesures pour revoir et aligner sur la Convention sa législation et ses politiques nationales, départementales et municipales relatives au handicap, ainsi que ses lois et politiques fondées sur le modèle médical ou une vision paternaliste du handicap, notamment la définition du handicap figurant dans la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, qui est axée sur la prévention du handicap et le traitement médical des incapacités, y compris des handicaps psychosociaux et de l’autisme, et le modèle de la « prise en charge médico-sociale », qui perpétue le placement systématique des personnes handicapées en institution ;

c)Le manque d’informations sur l’application directe, par les tribunaux français, des droits garantis par la Convention ;

d)L’absence de stratégie nationale et de politiques publiques visant à satisfaire aux obligations découlant de la Convention ;

e)Le manque de sensibilisation des décideurs, des agents de l’État aux niveaux national et municipal, des professionnels du droit, notamment les juges, des enseignants, des médecins et des autres professionnels qui travaillent avec des personnes handicapées, aux droits de celles-ci.

8. Le Comité rappelle les recommandations que la Rapporteuse spéciale sur les droits des personnes handicapées a formulées dans son rapport sur sa visite en France , et recommande à l ’ État partie :

a) De revoir et retirer les déclarations interprétatives faites au moment de la ratification de la Convention, afin de donner effet aux dispositions de celle-ci, aux principes qu ’ elle contient et au modèle du handicap fondé sur les droits de l ’ homme tel que le décrit le Comité dans son observation générale n o  6 (2018) ;

b) De revoir ses lois et politiques relatives au handicap et de les harmoniser avec la Convention, notamment en transposant dans le droit interne le modèle du handicap fondé sur les droits de l’homme ;

c) D ’ adopter sans tarder une législation complète sur le handicap afin de donner effet à l’ensemble des dispositions de la Convention et de garantir que les juridictions françaises appliquent directement toutes celles qui peuvent être immédiatement invoquées devant les tribunaux ;

d) D’adopter une stratégie nationale globale afin de s’acquitter de ses obligations découlant de la Convention et de promouvoir l’établissement de dispositifs dans les territoires d’outre-mer, en étroite consultation avec les organisations de personnes handicapées, l’objectif étant de mettre en place un système coordonné de gestion de l’appui aux personnes handicapées dans l’ensemble des régions, départements et municipalités et dans les territoires d’outre-mer ;

e) De sensibiliser les fonctionnaires de tous rangs, les professionnels du droit, les juges, les procureurs et les professionnels qui travaillent avec des personnes handicapées au modèle du handicap fondé sur les droits de l’homme, et de renforcer leurs capacités en la matière, et de faire en sorte que les organisations de personnes handicapées soient associées à la conception et à la réalisation des formations dispensées aux fonctionnaires.

9.Le Comité note avec préoccupation que :

a)L’article premier de la loi no 2005-102 et l’article L.146-1 du Code de l’action sociale et des familles assimilent les associations de prestataires et de gestionnaires de services aux organisations de personnes handicapées, ce qui complique le passage effectif d’un système de prise en charge médicale en institution à un modèle de vie autonome et d’inclusion dans la société ;

b)Les personnes handicapées, par l’intermédiaire des organisations qui les représentent, participent peu aux consultations relatives aux lois et politiques publiques, notamment à celles menées par le Conseil national consultatif des personnes handicapées, et aux comités municipaux et intermunicipaux chargés des questions d’accessibilité.

10. Le Comité rappelle son observation générale n o 7 (2018) et recommande à l ’ État partie :

a) De réviser l’article premier de la loi n o 2005-102 afin de mettre en place des mécanismes transparents permettant de consulter étroitement les personnes handicapées, par l ’ intermédiaire des organisations qui les représentent, et de les faire participer activement aux processus décisionnels publics à tous les niveaux, notamment en ce qui concerne la réalisation et le suivi des objectifs de développement durable et l ’ établissement des rapports à ce sujet, et de renforcer les mécanismes existants  ;

b) De mener des consultations constructiv es avec les diverses organisations de personnes handicapées et de leur fournir un appui effectif, dans la droite ligne de l’observation générale n o 7, en accordant une attention particulière aux organisations de personnes ayant un handicap intellectuel, de personnes autistes, de personnes ayant un handicap psychosocial, de femmes handicapées, de personnes LGBTI handicapées, de personnes handicapées vivant en milieu rural, de personnes handicapées roms et de personnes ayant besoin d’une aide conséquente.

B.Droits particuliers (art. 5 à 30)

Égalité et non-discrimination (art. 5)

11.Le Comité constate avec préoccupation que :

a)La définition actuelle de la discrimination n’inclut pas les formes multiples et croisées de discrimination fondées sur le handicap et sur d’autres motifs tels que l’âge, le sexe, l’origine ethnique, l’orientation sexuelle et l’identité de genre ;

b)Le refus de procéder à des aménagements raisonnables n’est pas considéré comme une forme de discrimination fondée sur le handicap dans toutes les sphères de la vie, mais seulement dans celles du travail et de l’emploi et de l’éducation dans le contexte des examens.

12. Le Comité rappelle son observation générale n o 6 (2018) sur l ’ égalité et la non ‑ discrimination et les cibles 10.2 et 10.3 des objectifs de développement durable, et recommande à l’État partie :

a) D’interdire les formes multiples et croisées de discrimination fondées sur le handicap et sur d’autres motifs tels que l’âge, le sexe, la race, l’origine ethnique, l’identité de genre, l’orientation sexuelle et toute autre situation, et d’adopter des stratégies visant à éliminer ces formes de discrimination ;

b) D’inscrire dans la législation antidiscrimination que le refus de procéder à des aménagements raisonnables est une forme de discrimination dans toutes les sphères de la vie.

Femmes handicapées (art. 6)

13.Le Comité relève avec inquiétude :

a)Le manque d’informations, notamment de données ventilées, sur la situation des femmes et des filles handicapées, et sur les effets de la législation et des politiques publiques sur l’exercice des droits que la Convention leur reconnaît ;

b)L’insuffisance des mesures qui sont prises pour promouvoir l’égalité des sexes dans les lois et politiques relatives au handicap et pour défendre les droits des femmes et des filles handicapées dans les lois et politiques relatives à l’égalité des sexes, et le manque de consultation et de participation effectives des femmes et des filles handicapées dans le contexte d’initiatives telles que le Forum Génération Égalité 2021.

14. Le Comité rappelle son observation générale n o 3 (2016) sur les femmes et les filles handicapées, les cibles 5.1, 5.2 et 5.5 des objectifs de développement durable et la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, et recommande à l’État partie :

a) De veiller à ce que les systèmes de collecte de données et les évaluations de l’impact de la législation et des politiques publiques comprennent des indicateurs et des données ventilées sur les femmes et les filles handicapées ;

b) D’intégrer les droits des femmes et des filles handicapées dans toutes les lois et politiques relatives à l’égalité des sexes et au handicap, et de promouvoir la participation effective des femmes et des filles handicapées, par l’intermédiaire des organisations qui les représentent, aux efforts déployés pour honorer les engagements pris pendant le Forum Génération Égalité.

Enfants handicapés (art. 7)

15.Le Comité note avec préoccupation :

a)Que les enfants handicapés sont exposés à des formes multiples et croisées de discrimination, notamment dans le domaine de l’éducation et du point de vue de l’accès aux services sociaux, du placement dans des établissements médico-sociaux, des mauvais traitements, et de la violence et des abus, y compris la violence sexuelle, en particulier dans les institutions ;

b)Que des enfants sourds ou malentendants sont forcés de porter un implant cochléaire, au détriment de l’apprentissage de la langue des signes et de leur inclusion dans la culture des sourds ;

c)Qu’il n’existe pas de mécanisme permettant aux enfants handicapés d’être consultés et de donner leur avis sur toutes les questions qui les concernent.

16. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De veiller à ce que les enfants handicapés soient pris en compte dans la législation sur la protection de l’enfance, d’adopter une stratégie spéciale, assortie d’un calendrier et de critères de référence, pour faciliter leur inclusion dans toutes les sphères de la vie, et de faire en sorte qu’ils bénéficient d’un environnement sûr et stimulant, respectueux de leur vie et de leur dignité, sur la base de l’égalité avec les autres enfants ;

b) De mettre en place des mécanismes permettant de garantir que les enfants handicapés ne soient pas forcés de porter des implants cochléaires, aient la possibilité d’apprendre la langue des signes et d’accéder à la culture des sourds et soient informés des effets des implants cochléaires sur leur vie ;

c) De créer des mécanismes qui tiennent compte de l’évolution des capacités des enfants handicapés, afin que ceux-ci puissent se forger leurs propres opinions et les exprimer librement à propos de toutes les questions qui les concernent, et que ces opinions soient dûment prises en considération, en fonction de leur âge et de leur maturité.

Sensibilisation (art. 8)

17.Le Comité constate avec préoccupation que :

a)Le handicap, en particulier l’autisme, les handicaps psychosociaux, les handicaps intellectuels et la trisomie 21, est associé à des stéréotypes négatifs ;

b)Les politiques et pratiques capacitistes sur lesquelles reposent le dépistage génétique prénatal des déficiences fœtales, en particulier de la trisomie 21 et de l’autisme, et le dépistage néonatal de la surdité dévalorisent les personnes handicapées ;

c)Les personnes handicapées ne sont guère présentes dans les espaces et les médias publics, notamment à la télévision ;

d)Certaines mesures de lutte contre le terrorisme perpétuent les stéréotypes négatifs et néfastes selon lesquels les personnes ayant un handicap psychosocial sont dangereuses et davantage susceptibles de se radicaliser ou de basculer dans le terrorisme.

18. Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre les mesures ci-après, en partenariat avec les organisations de personnes handicapées :

a) Adopter et appliquer une stratégie s’appuyant sur le modèle du handicap fondé sur les droits de l’homme afin d’éliminer les stéréotypes négatifs qui dévalorisent les personnes handicapées, notamment pour ce qui est du dépistage génétique prénatal, et mettre en œuvre les mesures que la Commission nationale consultative des droits de l’homme a recommandées dans le cadre de ses évaluations indépendantes périodiques des programmes nationaux visant à éliminer les stéréotypes ;

b) Adopter des mesures de nature à accroître la participation des personnes handicapées à la vie publique et à les rendre plus visibles ;

c) Éliminer les stéréotypes négatifs et néfastes à l ’ égard des personnes ayant un handicap psychosocial dans le contexte de la lutte contre la radicalisation et le terrorisme.

Accessibilité (art. 9)

19.Le Comité prend note avec préoccupation :

a)Des dispositions qui abaissent les seuils d’exigence en matière d’accessibilité pour les logements neufs, et des disparités régionales concernant le respect des normes d’accessibilité ;

b)De l’application limitée des normes d’accessibilité et du principe de conception universelle dans les services publics, ce qui empêche les personnes handicapées, en particulier les personnes autistes et les personnes ayant une déficience sensorielle ou un handicap intellectuel ou psychosocial, de participer pleinement à la vie sociale ;

c)Du retard pris dans l’exécution des plans relatifs aux normes d’accessibilité, notamment l’Agenda d’accessibilité programmée, à l’accessibilité des transports publics, de l’information et des moyens de communication, et à l’accessibilité des équipements et services ouverts ou fournis au public ;

d)Du peu de mesures prises pour faciliter la circulation et l’orientation à l’intérieur de tous les bâtiments ouverts au public ;

e)Des obstacles dans l’environnement de travail numérique qui empêchent les personnes handicapées d’avoir accès à l’information et aux moyens de communication, notamment aux sites Web des autorités publiques et aux logiciels.

20. L e Com ité rappelle son observation générale n o 2 (2014) sur l’accessibilité et recommande à l’État partie :

a) D’abroger les dispositions de la loi n o 2018-1021 du 23 novembre 2018, qui abaissent les seuils d’exigence en matière d’accessibilité pour les logements neufs et, en consultation avec les organisations de personnes handicapées, d’adopter une stratégie visant à ce que les normes d’accessibilité pour les logements et les lieux d’hébergement soient progressivement respectées, afin que ces bâtiments soient, à terme, pleinement accessibles ;

b) D’adopter des stratégies en matière d’accessibilité et de sensibiliser la population au principe de conception universelle pour les personnes handicapées ;

c) De renforcer les mécanismes qui visent à rendre les transports publics accessibles aux personnes handicapées ;

d) De veiller à ce que les plans relatifs à l’accessibilité prévoient notamment la mise en place, dans les bâtiments et autres installations ouverts au public, d’une signalisation en braille et sous des formes faciles à lire et à comprendre (FALC), de formes d’aide humaine ou animalière et de médiateurs, et d’heures silencieuses dans les espaces publics ;

e) De faire en sorte que toutes les personnes handicapées aient accès aux technologies numériques, notamment aux logiciels d’entreprise, et de réviser le décret n o 2019-768 relatif à l’accessibilité des sites Web privés, publics et gouvernementaux aux personnes aveugles ;

f) D’appliquer, pour tous les sites Web publics, la Directive (UE) 2016/2102 du 26 octobre 2016 relative à l’accessibilité des sites Internet et des applications mobiles des organismes du secteur public et les Règles pour l’accessibilité des contenus Web 2.0 ;

g) D’harmoniser les lois et règlements nationaux avec la Directive (UE) 2019/882 du 17 avril 2019 relative aux exigences en matière d’accessibilité applicables aux produits et services et le Code des communications électroniques européen (Directive (UE) 2018/1972).

Droit à la vie (art. 10)

21.Le Comité est préoccupé par :

a)Le taux élevé de suicide chez les personnes autistes ou ayant un handicap psychosocial ;

b)Le nombre de décès de personnes handicapées placées en institution, en particulier pendant la pandémie de COVID-19.

22. Le Com ité recommande à l’État partie :

a) De renforcer les mesures visant à mettre en place une stratégie nationale de prévention du suicide chez les personnes handicapées, en ciblant en particulier les personnes autistes ou ayant un handicap psychosocial, et ce, en étroite concertation avec les personnes handicapées, par l’intermédiaire des organisations qui les représentent, et avec leur participation active ;

b) D’élaborer des mesures, en consultation avec les organisations de personnes handicapées et les mécanismes indépendants de suivi, afin d’engager en urgence la désinstitutionnalisation des personnes handicapées, de leur permettre de vivre de manière autonome et en toute sécurité dans la société et de protéger leur droit à la vie en cas de crise sanitaire.

Situations de risque et situations d’urgence humanitaire (art. 11)

23.Le Comité relève avec préoccupation :

a)Que peu de mesures tenant compte du handicap ont été prises pour pallier les effets disproportionnés de la pandémie de COVID-19 sur les personnes handicapées, qui ont plus de risque que les autres de contracter la maladie dans les institutions ;

b)Que le nombre d’hébergements à disposition des personnes handicapées dans le cadre des mesures générales de confinement prises pendant la pandémie de COVID-19 était insuffisant et que des hôpitaux auraient refusé d’admettre des personnes handicapées ;

c)Qu’il n’existe toujours pas de système d’alarme visuelle et sonore simultanée dans les espaces et services publics ;

d)Qu’il n’existe pas d’hébergements d’urgence pour les personnes handicapées, en particulier les enfants qui vivent dans des camps de réfugiés ou de demandeurs d’asile et les personnes d’origine rom.

24. L e Com ité recommande à l’État partie de se conformer aux orientations du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme sur la COVID-19 et les droits des personnes handicapées et à la note de synthèse du Secrétaire général sur l’inclusion du handicap dans la riposte à la COVID-19, et :

a) De prendre des mesures tenant compte du handicap pour pallier les effets disproportionnés de la pandémie de COVID-19 sur les personnes handicapées, notamment de procéder d’urgence à la désinstitutionnalisation de ces personnes, d’éviter qu’elles soient abandonnées à leur domicile, et de leur fournir le soutien dont elles ont besoin pour vivre au sein de la collectivité en toute sécurité ;

b) D’examiner l’application des mesures de protection visant à contenir la pandémie et de procéder aux aménagements qui s’imposent pour adapter ces mesures aux personnes handicapées, notamment en fournissant une assistance à domicile, des masques transparents pour les personnes sourdes et l’aide nécessaire dans le contexte de l’environnement de travail en ligne ;

c) De v eille r à ce que les informations concernant la pandémie soient accessibles à toutes les personnes handicapées, notamment au moyen de la langue des signes et de la reproduction des alarmes visuelles et sonores ;

d) De faire en sorte que les personnes handicapées, en particulier les enfants qui vivent dans des camps de réfugiés ou de demandeurs d’asile et les Roms, aient accès à des hébergements d’urgence et à une aide humanitaire dans les situations de risque, d ’ urgence humanitaire et de catastrophe naturelle .

Reconnaissance de la personnalité juridique dans des conditions d’égalité (art. 12)

25.Le Comité constate avec inquiétude :

a)Que certaines dispositions légales, en particulier l’article 459 du Code civil, nient le droit des personnes handicapées à la reconnaissance de leur personnalité juridique dans des conditions d’égalité et prévoient la déchéance de la capacité juridique et de l’autonomie et le placement sous tutelle ou curatelle sur la base d’une évaluation médicale des capacités mentales de la personne ;

b)Qu’il n’existe pas de mécanisme de prise de décisions accompagnée qui soit compatible avec la Convention et que certaines mesures perpétuent la prise de décisions substitutive et ne tiennent pas compte de la volonté et des préférences des personnes handicapées.

26. L e Com ité recommande à l’État partie, dans la droite ligne de son observation générale n o 1 (2014) sur la reconnaissance de la personnalité juridique dans des conditions d’égalité :

a) De revoir sa conception de la protection juridique et d’adopter un modèle du handicap fondé sur les droits de l’homme afin de garantir la reconnaissance de la personnalité juridique des personnes handicapées dans des conditions d’égalité et d’abroger les dispositions qui permettent la prise de décision s substitutive ;

b) De réorienter les ressources humaines et institutionnelles allouées à la prise de décision s substitutive vers la mise en place de mécanismes de prise de décision s accompagnée qui respectent la dignité, l’autonomie, la volonté et les préférences des personnes handicapées, quel que soit le degré ou le mode d’aide dont elles pourraient avoir besoin.

Accès à la justice (art. 13)

27.Le Comité est préoccupé par :

a)Les difficultés d’accès à la justice auxquelles font face les personnes handicapées soumises au régime de prise de décisions substitutive, celles qui sont toujours placées en institution ou qui suivent un traitement psychiatrique, notamment en milieu psychiatrique, ainsi que par la stigmatisation et les décisions de justice discriminatoires fondées sur le handicap ;

b)Les obstacles qui compliquent la tâche des personnes handicapées qui souhaitent faire appel des décisions relatives au traitement psychiatrique ;

c)Le manque d’accessibilité des installations de justice, y compris des postes de police, qui touche directement les justiciables et les fonctionnaires de justice handicapés, d’informations relatives aux aménagements procéduraux et aux aménagements en fonction de l’âge, et de mesures visant à ce que toutes les personnes handicapées disposent d’informations accessibles tout au long de la procédure ;

d)L’accès limité à l’aide juridictionnelle en raison de contraintes financières et le champ d’action restreint des services de conseil juridique indépendants.

28. Le Comité rappelle les Principes et directives internationaux sur l’accès à la justice des personnes handicapées, établis en 2020 par la Rapporteuse spéciale sur les droits des personnes handicapées, et la cible 16.3 des objectifs de développement durable, et recommande à l’État partie :

a) De garantir l ’ accès à la justice des personnes soumises au régime de prise de décision s substitutive et de celles qui sont toujours placées en institution ou qui suivent un quelconque traitement psychiatrique , en abrogeant les dispositions légales qui restreignent la capacité juridique des personnes handicapées, de reconnaître la pleine capacité de ces personnes à prendre part à des procédures judiciaires dans différents rôles, y compris en tant que témoin, défendeur ou mis en cause, et de prendre des mesures pour éliminer les représentations culturelles et les attitudes discriminatoires au sein de la magistrature ;

b) De garantir le droit de faire appel de toute restriction de la liberté, y compris le traitement sans consentement, et de mettre en place un mécanisme indépendant de suivi et de signalement sur l’accès à la justice dans le système de santé mentale ;

c) De garantir l’accès physique aux installations de justice, notamment grâce à la conception universelle, et l’accès à l’information, y compris aux décisions de justice, tout au long de la procédure, ainsi que de renforcer les mesures visant à proposer des aménagements procéduraux et des aménagements en fonction de l’âge, en particulier aux personnes ayant une déficience visuelle ou auditive, aux personnes ayant un handicap intellectuel ou psychosocial et les personnes autistes − les aménagements en question incluant le recours à des modes de communication alternative et améliorée tels que la langue des signes, le braille, les formats numériques accessibles et le FALC, et à des intermédiaires et médiateurs indépendants, notamment des référents autismes ;

d) D’adopter un mécanisme chargé d’examiner les décisions relatives à l’accès à une aide juridictionnelle totale ou partielle dans toutes les branches du droit, de renforcer les capacités des services indépendants de conseil juridique dans les centres départementaux accueillant des personnes handicapées, et de garantir le droit de celles ‑ ci de faire appel des décisions qui restreignent leur liberté, notamment en ce qui concerne les traitements sans consentement.

Liberté et sécurité de la personne (art. 14)

29.Le Comité est préoccupé par :

a)Les dispositions du Code de la santé publique et ses modifications, qui autorisent le traitement psychiatrique forcé des personnes ayant un handicap psychosocial, la privation de liberté pour cause de handicap ou de dangerosité supposée, et le recours aux moyens de contention physique et à l’isolement ;

b)Le placement de personnes ayant un handicap psychosocial dans des unités fermées et sans leur consentement, notamment les hospitalisations et autres traitements hospitaliers non soumis à un contrôle judiciaire, et le délai de douze jours entre la date de l’hospitalisation et celle du contrôle effectif par le juge des libertés et de la détention, qui constitue une atteinte à la liberté de la personne et l’expose à des risques de contention chimique et de surmédication ;

c)La surreprésentation des personnes ayant un handicap psychosocial dans les institutions pénitentiaires, en raison du manque d’assistance fondée sur les droits de l’homme dans le domaine de la santé mentale à l’échelle locale, et les problèmes d’accessibilité et le manque d’aménagements raisonnables pour les personnes handicapées dans les établissements pénitentiaires ;

d)Les traitements ambulatoires obligatoires dans le contexte des injonctions de soins, qui ne font pas l’objet d’un contrôle judiciaire, et le risque que courent les personnes qui refusent le traitement d’être de nouveau hospitalisées sans leur consentement ou de perdre l’aide dont elles bénéficiaient.

30. L e Com ité rappelle les recommandations de la Rapporteuse spéciale sur les droits des personnes handicapées et engage l’État partie à :

a) Abroger toutes les dispositions légales qui autorisent le traitement sans consentement et les restrictions de la liberté dans les institutions ou les structures locales pour cause de handicap psychosocial ou de dangerosité supposée  ;

b) Prévenir le placement en institution, en particulier les hospitalisations prolongées ou à durée indéterminée, veiller à ce que les personnes handicapées puissent exercer leur droit au consentement libre et éclairé et élaborer des dispositifs d’aide fondés sur les droits de l’homme, y compris d’aide par les pairs, qui respectent la dignité, l’égalité, la liberté et l’autonomie de ces personnes ;

c) Faire en sorte que le juge des libertés et de la détention examine rapidement les décisions relatives au traitement sans consentement dans les établissements psychiatriques, pour réduire le délai de douze jours à la période la plus courte possible ;

d) Veiller à ce que les personnes handicapées privées de liberté aient droit à des aménagements raisonnables ;

e) Mettre un terme au traitement ambulatoire obligatoire et appliquer les orientations de l’Organisation mondiale de la Santé sur les services de santé mentale de proximité ( World Health Organization Guidance on community mental health services : Promoting person-centred and rights-based approaches ), comme l’Organisation le recommande dans son plan d’action global pour la santé mentale 2020-2030, qui a été approuvé par l’Assemblée mondiale de la Santé en 2021.

31. Le Comité engage également l’État partie à garder présentes à l’esprit ses obligations découlant de l ’ article 14 de la Convention et les directives du Comité relatives au droit à la liberté et à la sécurité des personnes handicapées dans le contexte de l ’ examen régional du projet de protocole additionnel à la Convention pour la protection des droits de l ’ homme et de la dignité de l ’ être humain relatif aux applications de la biologie et de la médecine, intitulé « Protection des droits de l ’ homme et de la dignité des personnes atteintes de troubles mentaux à l’égard du placement et du traitement involontaire s » , et à s’opposer à l’adoption du protocole. Il souligne que l’État partie devrait s’acquitter des obligations que lui impose la Convention d’une manière compatible avec le modèle du handicap fondé sur les droits de l’homme.

Droit de ne pas être soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (art. 15)

32.Le Comité est préoccupé par :

a)Le manque de mécanismes visant à garantir que les personnes ayant un handicap psychosocial, en particulier celles qui sont placées sous tutelle, puissent exercer leur droit au consentement libre et éclairé ;

b)Le caractère inhumain et dégradant des mesures privatives de liberté et des mesures prises dans les structures d’accueil et les établissements de santé mentale, et le recours à l’isolement et à la contention chimique et physique dans ces lieux, y compris à l’égard des enfants et des personnes autistes ;

c)Les informations sur la médication forcée et sur les « traitements intensifs » pratiqués dans les unités pour patients difficiles, et d’autres pratiques telles que la surmédication et le traitement par électrochocs ;

d)Le fait que les enfants ayant un handicap psychosocial et les enfants autistes sont particulièrement concernés par le recours aux traitements médicaux et à la surmédication.

33. L e Com ité recommande à l’État partie :

a) De mettre en place des dispositifs, notamment le suivi indépendant, le contrôle judiciaire des décisions et l’accès sans restriction aux dossiers médicaux, afin de prévenir toutes les formes de mauvais traitements, et d’introduire des normes fondées sur les droits de l’homme dans la législation relative à la santé mentale ;

b) De créer des mécanismes de signalement des cas de traitement cruel, inhumain ou dégradant, de mettre en place des voies de recours et des mesures de réparation pour les victimes et de veiller à ce que les auteurs de ces actes soient poursuivis et sanctionnés ;

c) De mettre un terme au « traitement intensif » des personnes ayant un handicap psychosocial et de fermer les unités pour patients difficiles ;

d) De prendre des mesures pour protéger les enfants handicapés toujours placés contre la surmédication et les mauvais traitements et de renforcer le contrôle indépendant des institutions, notamment en permettant l’accès en continu aux dossiers médicaux dans les établissements de santé mentale et les autres centres médico-sociaux et de prise en charge.

Droit de ne pas être soumis à l’exploitation, à la violence et à la maltraitance (art. 16)

34.Le Comité note avec inquiétude que :

a)Les personnes handicapées font l’objet de violences, y compris d’humiliations et de violences sexuelles, dans les structures d’accueil et les établissements de santé mentale et dans leur famille ;

b)Les femmes handicapées sont davantage exposées au harcèlement et à la violence fondée sur le genre ;

c)Les mécanismes de signalement à disposition des personnes handicapées victimes de mauvais traitements dans les structures d’accueil et les établissements de santé mentale sont très complexes, les victimes ont peur des représailles, bon nombre des plaintes sont rejetées et il n’existe pas de dispositif de recours ou de réparation.

35. Le Comité, rappelant la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, ainsi que les cibles 5.1, 5.2 et 5.5 des objectifs de développement durable, recommande à l’État partie :

a) D’adopter une stratégie de prévention des violences et de la maltraitance dans les structures d’accueil et les établissements de santé mentale, notamment de mettre sur pied des mécanismes de signalement des violences contre les personnes handicapées dans tous les contextes ;

b) De renforcer les mesures visant à protéger les femmes et les filles handicapées contre la violence fondée sur le genre et à prévenir ce type de violence, et de garantir la viabilité des mesures et le contrôle régulier de leur application ;

c) De prendre des mesures pour que les victimes de violence aient accès à la justice et à des voies de recours, à des mesures de réparation, notamment une indemnisation et la réadaptation au sein de la collectivité, et à une aide à l’inclusion sociale, et de veiller à ce que les auteurs des faits soient poursuivis et sanctionnés.

Protection de l’intégrité de la personne (art. 17)

36.Le Comité constate avec préoccupation que :

a)Les femmes handicapées sous tutelle peuvent être soumises à un avortement ou une stérilisation avec le consentement de tiers, notamment de personnes de confiance, de membres de leur famille ou de leur tuteur ;

b)Des enfants autistes sont soumis à des traitements qui visent à « faire disparaître » leur autisme, ce qui constitue une atteinte à leur identité, et au « packing », en dépit des déclarations publiques selon lesquelles cette pratique est interdite ;

c)Des personnes intersexes sont soumises à des interventions médicales sans leur consentement.

37. L e Com ité recommande à l’État partie :

a) D’interdire la stérilisation et l’avortement des femmes handicapées sans leur consentement, y compris lorsqu’ils sont pratiqués à la demande de membres de leur famille, d’un tuteur ou d’une personne de confiance ou avec le consentement de tiers ;

b) De faire cesser le recours aux traitements visant à normaliser des enfants autistes et d’adopter des mesures pour que les enfants et adultes handicapés qui ont subi de tels traitements obtiennent réparation pour la violation de leurs droits, notamment qu’ils soient indemnisés pour les effets de ces traitements sur leur intégrité physique et mentale ;

c) D’interdire la pratique consistant à soumettre des personnes intersexes à des interventions médicales sans leur consentement.

Droit de circuler librement et nationalité (art. 18)

38.Le Comité note avec inquiétude que les gens du voyage et les Roms handicapés doivent souvent faire face à de graves difficultés dues à leur mode de vie. Il est aussi préoccupé par le manque de données sur leur situation et par l’absence de politiques publiques visant à surmonter ces difficultés et à protéger leurs droits.

39. Le Comité recommande à l ’ État partie de collecter systématiquement des données sur les conditions de vie des gens du voyage et des Roms handicapés et le respect des droits qu’ils tiennent de la Convention, et de veiller à ce qu’ils bénéficient des aménagements nécessaires, y compris lorsqu’ils sont demandeurs d ’ asile ou réfugiés et en particulier l orsqu’il s’agit d’ enfants .

Autonomie de vie et inclusion dans la société (art. 19)

40.Le Comité note avec préoccupation que :

a)Certaines réglementations et structures et certains choix budgétaires encouragent le placement des enfants et des adultes handicapés, en particulier des personnes qui ont besoin d’une aide plus conséquente, dans des établissements qui leur sont réservés, y compris dans des « institutions médico-sociales » et des services spécialisés, notamment dans des petites structures d’accueil appelées « habitat inclusif » ou « habitat partagé » ;

b)Des enfants handicapés sont internés dans des hôpitaux psychiatriques et d’autres institutions, y compris dans des États parties tiers, principalement la Belgique ;

c)Les autorités publiques, les professionnels et les fonctionnaires ne sont guère conscients des effets négatifs du placement en institution sur les personnes handicapées, et il n’existe pas de stratégie ou de plan d’action visant à mettre fin à cette pratique ;

d)Peu de dispositions ont été prises pour permettre aux personnes handicapées de vivre de manière autonome dans la société et il n’y a pas assez de logements indépendants accessibles et abordables, l’aide individualisée est insuffisante et l’égalité d’accès aux services de proximité n’est pas garantie.

41. Le Comité rappelle son observation générale n o 5 (2017) sur l ’ autonomie de vie et l ’ inclusion dans la société et recommande à l ’ État partie de prendre les mesures ci ‑ après en consultation avec les organisations de personnes handicapées :

a) Mettre fin au placement des enfants et adultes handicapés, y compris dans les petites structures d’accueil, et adopter à cet effet une stratégie nationale et des plans d’action qui soient assortis d’échéances, de ressources techniques, humaines et financières, de dispositions relatives à leur application et au suivi et de mesures visant à soutenir la transition de la vie en institution à la vie dans la société ;

b) Garantir l’application de l’accord concernant le moratoire sur le placement des personnes handicapées en Belgique, et renforcer les mesures d’aide aux familles d’enfants handicapés et les efforts déployés pour respecter le droit des personnes handicapées à l’autonomie de vie et à l’inclusion dans la société ;

c) Inscrire dans la loi le droit à l’autonomie de vie et à l’inclusion dans la société et prendre des mesures pour donner effet à ce droit, et élaborer des mesures de sensibilisation, y compris des campagnes, sur le sujet et sur les effets néfastes que le placement a sur les personnes handicapées ;

d) Faire en sorte que les personnes handicapées bénéficient d’un soutien pour vivre de manière autonome et dans la société, par exemple grâce à des crédits budgétaires qu’elles peuvent gérer elles-mêmes et à une assistance personnalisée, et à ce qu’elles puissent prendre leurs propres décisions, contrôler leur vie et choisir où et avec qui elles vivent, conformément à l’observation générale n o 5 (2017) ;

e) Prendre des mesures pour que les personnes handicapées aient à leur disposition des logements accessibles et d ’ un coût abordable, qu ’ elles puissent choisir elles-mêmes, en dehors de toute structure collective ;

f) Fixer des échéances concernant l’accessibilité totale des services de proximité et activités de base, tels que l’éducation, la santé, le travail et l’emploi.

Mobilité personnelle (art. 20)

42.Le Comité est préoccupé par le peu de progrès faits s’agissant de garantir la mobilité des personnes handicapées, notamment en ce qui concerne l’accès à des dispositifs d’aide à la mobilité de qualité et abordables.

43. Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures, notamment d’adopter des règlements et des programmes en métropole et dans les territoires d’outre-mer, pour garantir l’accès :

a) Aux transports publics, y compris pour les propriétaires de chien guide ;

b) À des places de stationnement gratuites pour les détenteurs de la carte mobilité inclusion ;

c) À des dispositifs d’aide à la mobilité de qualité, à des appareils et des technologies d’assistance et à de s formes d ’ aide humaine ou animalière et à des médiateur s, en faisant en sorte qu’ils soient gratuits ou abordables.

Liberté d’expression et d’opinion et accès à l’information (art. 21)

44.Le Comité note avec préoccupation :

a)Que les services de diffusion et le contenu audiovisuel, notamment les débats publics et les films en français, y compris à la télévision, ne sont pas toujours accessibles ;

b)Que la langue des signes n’est reconnue que dans certains domaines tels que l’éducation ;

c)Que l’interprétation en langue des signes n’est pas considérée comme une profession, que peu de critères régissent le métier et qu’il y a trop peu de formations spécialisées pour les interprètes ;

d)Que peu d’informations sont disponibles sur les mesures prises pour faciliter l’exercice, par les personnes handicapées, de leur droit à la liberté d’expression et d’opinion, y compris la liberté de demander, recevoir et communiquer des informations et des idées, sur la base de l’égalité avec les autres et en recourant à tous moyens de communication de leur choix.

45. L e Com ité recommande à l’État partie :

a) De garantir l’accessibilité des services publics et privés de diffusion et du contenu audiovisuel, grâce à l’interprétation en langue des signes, aux sous-titres, à l’audiodescription et au recours à des formes accessibles aux personnes handicapées et que celles-ci p euv ent utiliser  ;

b) De reconnaître la langue des signes française comme langue officielle, notamment dans la Constitution, et de favoriser l’accès et le recours à la langue des signes dans toutes les sphères de la vie ;

c) De reconnaître le statut professionnel des interprètes en langue des signes, d’établir des critères professionnels pour ce type d’interprétation et de dispenser systématiquement une formation complète aux futurs interprètes ;

d) De développer les moyens, modes et formes de communication alternative et améliorée et tous les autres moyens accessibles que les personnes handicapées choisissent d’utiliser, notamment le braille, le FALC et le recours à des référents autisme pour les échanges et procédures avec l’administration publique.

Respect de la vie privée (art. 22)

46.Le Comité constate avec préoccupation que les décrets nos 2019-412 et 2018-383 relatifs à la base de données HOPSYWEB nuisent à la protection des données à caractère personnel, en particulier celles des personnes ayant un handicap psychosocial, étant donné qu’ils autorisent la mise en relation des données relatives au suivi des personnes en soins psychiatriques sans consentement avec le fichier des personnes surveillées pour radicalisation terroriste, renforçant ainsi la surveillance et le contrôle des activités des personnes concernées dans le domaine de l’emploi et du logement public.

47. L e Com ité recommande à l’État partie d’abroger les décrets en question et de mettre un terme à la collecte discriminatoire de données sur les personnes ayant un handicap psychosocial, notamment à la mise en relation des données relatives au suivi des personnes en soins psychiatriques sans consentement avec le fichier des personnes surveillées pour radicalisation terroriste , et de prévenir l’utilisation des données et dossiers médicaux de ces personnes sans leur consentement ou avec le consentement d’un tiers.

Respect du domicile et de la famille (art. 23)

48.Le Comité constate avec inquiétude :

a)Qu’en application du droit commun, un tuteur ou un tiers peut s’opposer au mariage de personnes handicapées sous tutelle ou dont la capacité juridique est limitée ;

b)Que les allocations d’invalidité, en particulier la prestation de compensation du handicap et l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé, restent insuffisantes, ne sont pas associées aux mêmes critères sur tout le territoire de l’État partie et ne couvrent pas toutes les dépenses nécessaires ;

c)Que le calcul de l’allocation aux adultes handicapés restreint l’autonomie des femmes handicapées parce qu’il prend en compte les revenus de leur conjoint ou combine les prestations que perçoivent les femmes handicapées mariées avec celles de leur partenaire, et que la réduction du revenu de solidarité active pour les couples de personnes handicapées qui vivent ensemble et pour les parents d’enfants handicapés a eu des répercussions négatives ;

d)Que des enfants seraient séparés de leurs parents contre leur volonté en raison du handicap de l’enfant ou de l’un ou des deux parents ;

e)Que les enfants handicapés et leur famille, en particulier les parents ayant un handicap intellectuel ou psychosocial, ne bénéficient pas, à un stade précoce, d’un large éventail d’informations et de services, dont des services d’accompagnement.

49. L e Com ité recommande à l’État partie :

a) De sensibiliser l’opinion au fait que les personnes handicapées ont les mêmes droits que les autres en ce qui concerne le mariage et les questions familiales, et de prendre des mesures pour que des tiers ne puissent plus s’opposer au mariage de personnes handicapées en raison de préjugés ou de stéréotypes ;

b) De recenser, en collaboration avec les organisations de personnes handicapées, les obstacles à l’exercice des droits parentaux et de s’attacher à éliminer les stéréotypes qui portent atteinte au droit des personnes handicapées de fonder une famille ;

c) De réformer la prestation de compensation du handicap afin que tous les parents handicapés qui peuvent y prétendre y aient accès, d’harmoniser les critères d’éligibilité sur tout son territoire et d’accroître l’aide fournie, en tenant compte des coûts réels induits par le handicap ;

d) De réformer les règles relatives à l’allocation aux adultes handicapés afin de séparer le revenu de la personne concernée de celui de son/sa conjoint(e), de prendre des mesures pour promouvoir et garantir l’autonomie et l’indépendance des femmes handicapées qui vivent en couple, et de renforcer les mesures d’aide aux couples de personnes handicapées et aux parents d’enfants handicapés ;

e) D’interdire que les enfants soient séparés de leurs parents en raison du handicap de l’enfant ou de celui de l’un de ses parents ou des deux, et de faire en sorte que le placement dans un environnement familial sûr soit l’unique type de protection de remplacement dont bénéficient les enfants handicapés ;

f) De fournir, à un stade précoce, un large éventail d’informations et d’offrir un soutien global aux enfants handicapés et à leur famille, en particulier aux parents autistes et aux parents ayant un handicap intellectuel ou psychosocial, afin de les aider à exercer leurs droits liés à la vie de famille.

Éducation (art. 24)

50.Le Comité est préoccupé par le nombre élevé d’enfants handicapés inscrits dans des structures d’éducation ségrégative, notamment des structures d’accueil médico-sociales ou des classes séparées dans des écoles ordinaires, car cela perpétue la stigmatisation et l’exclusion. Il est également préoccupé par :

a)Le manque de données statistiques sur les enfants handicapés scolarisés à temps plein ou partiel, notamment dans les territoires d’outre-mer, et sur l’accès des enfants handicapés roms, demandeurs d’asile, réfugiés ou en situation irrégulière à l’éducation inclusive ;

b)Le refus de certaines écoles d’admettre les enfants ayant un handicap intellectuel ou psychosocial et les enfants autistes ;

c)Le manque d’aide individualisée, notamment d’aménagements raisonnables pour répondre aux besoins des enfants handicapés en matière d’éducation, qui pénalise plus particulièrement les enfants autistes et ceux ayant une trisomie 21 ;

d)L’absence d’aménagements raisonnables, en particulier pour les enfants sourds, dans le contexte de la fermeture des écoles pendant la pandémie de COVID-19 ;

e)L’insuffisance de l’instruction en langue des signes française et sur la langue des signes française ;

f)Le fait que le braille et le FALC ne sont pas enseignés aux personnes aveugles ou ayant une déficience visuelle ou un handicap intellectuel, et qu’ils ne sont ni appris ni utilisés par ces personnes ;

g)Les informations selon lesquelles des enfants handicapés seraient victimes de violence, notamment de harcèlement scolaire ;

h)Les obstacles auxquels se heurtent les étudiants handicapés qui veulent obtenir une aide et l’absence de mesures visant à faciliter la mobilité des étudiants handicapés qui souhaitent se rendre à l’étranger, sur la base de l’égalité avec les autres.

51. Le C omité rappelle son observation générale n o 4 (2016) sur le droit à l’éducation inclusive et les cibles 4.5 et 4.a des objectifs de développement durable, et recommande à l’État partie de renforcer les mesures visant à ce que tous les enfants handicapés bénéficient d’une éducation inclusive et de qualité, y compris dans les territoires d’outre-mer. L’État partie devrait rapidement appliquer les recommandations que la Rapporteuse spéciale sur les droits des personnes handicapées a formulées à cet égard . Le Comité recommande également à l’État partie :

a) D’élaborer des systèmes pour collecter des données sur les enfants handicapés qui soient ventilées par âge, lieu de résidence, sexe et origine ethnique, et pour recueillir des informations sur les taux d’inscription et de fréquentation scolaires, et de faire en sorte que les enfants handicapés roms, demandeurs d’asile, réfugiés ou qui sont en situation irrégulière aient effectivement accès à l’éducation ;

b) De mettre en place des systèmes qui permettent aux parents et aux tuteurs de porter plainte et de demander réparation si une école refuse d’admettre leur enfant en raison de son handicap ;

c) D’établir un cadre qui donne effet au droit des enfants handicapés d’obtenir une aide individualisée et de voir leurs besoins éducatifs particuliers satisfaits grâce à des aménagements raisonnables, notamment dans le contexte des examens, en particulier pour les enfants autistes et ceux ayant une trisomie 21 ;

d) D’adopter des programmes à l’échelle municipale et d’associer les acteurs privés et publics à la fourniture de l’aide aux enfants handicapés dans le contexte de la pandémie de COVID-19 ;

e) D’assurer l’enseignement en langue des signes française dès les premières années d’école et de promouvoir la culture des sourds dans des contextes éducatifs inclusifs ;

f) De garantir l’enseignement du braille et du FALC, ainsi que leur apprentissage et leur utilisation par les personnes aveugles et les personnes ayant une déficience visuelle ou un handicap intellectuel ;

g) De prendre des mesures pour éliminer le harcèlement et les violences scolaires à l’égard des enfants handicapés ;

h) D’adopter des programmes assortis d’échéances et d’objectifs précis afin de promouvoir l’accès des personnes handicapées à l’enseignement supérieur, et de veiller à ce que les jeunes handicapés puissent obtenir un appui individualisé grâce à des aménagements raisonnables dans l’enseignement supérieur, notamment en vue de faciliter la mobilité de ceux qui souhaitent se rendre à l’étranger et l’accès à la langue des signes.

Santé (art. 25)

52.Le Comité prend note avec inquiétude des informations selon lesquelles les personnes handicapées, en particulier celles qui sont encore placées en institution, n’auraient pas suffisamment accès aux vaccins contre la COVID-19. Il prend également note des principaux obstacles que rencontrent les personnes handicapées en ce qui concerne l’accès aux services de santé, en particulier :

a)Le défaut d’application du principe de conception universelle et le manque d’aménagements, en particulier pour les personnes sourdes ou malentendantes ;

b)Les obstacles en matière d’accès aux soins de santé que rencontrent les personnes en institution ou en milieu pénitentiaire, en particulier dans le contexte de la pandémie de COVID-19 ;

c)Les obstacles qui empêchent les femmes handicapées d’avoir accès aux services de santé sexuelle et reproductive, à l’éducation sexuelle, à la contraception et aux soins gynécologiques ;

d)Le manque de sensibilisation et de formation du personnel médical et administratif des établissements de santé à la diversité et aux droits des femmes handicapées.

53. Compte tenu des liens entre l ’ article 25 de la Convention et les cibles 3 .7 et 3.8 des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l’État partie :

a) De veiller à ce que les personnes handicapées et leurs réseaux aient accès en priorité aux vaccins contre la COVID-19, dans les mêmes conditions que les autres, et à ce que les services de santé leur soient accessibles, en particulier en élaborant des programmes de santé publique visant à atteindre les personnes handicapées les plus marginalisées et en proposant des services de transport accessibles vers les centres de soins, notamment les centres de vaccination ;

b) D’assurer le développement de la conception universelle pour les appareils et équipements médicaux et les établissements de soins de santé, de promouvoir les investissements dans ce domaine et de renforcer les mesures visant à fournir aux personnes handicapées des informations accessibles sur les soins de santé ;

c) De veiller à ce que les plans de redressement comprennent des mesures visant à garantir l’accès des personnes handicapées aux soins de santé, en accordant une attention particulière aux personnes qui sont encore placées en institution et à celles qui sont dans un établissement pénitentiaire ;

d) De fournir aux femmes et aux filles handicapées des soins de santé sexuelle et reproductive adaptés et accessibles, et de consulter les organisations de femmes handica pées au sujet des lacunes et des mesures à prendre pour y remédier ;

e) D’élaborer, en étroite collaboration avec les organisations de personnes handicapées, des programmes de sensibilisation et de formation à la diversité et aux droits des personnes handicapées à l’intention du personnel médical et administratif des établissements de santé, notamment dans le contexte des études supérieures de santé.

Travail et emploi (art. 27)

54.Le Comité est préoccupé par :

a)Les taux élevés de chômage et d’emploi à bas salaire parmi les personnes handicapées, et la ségrégation de celles-ci dans des lieux de travail protégés qui associent logement et emploi ;

b)Les taux élevés de chômage et d’emploi à temps partiel chez les femmes handicapées, la surreprésentation de celles-ci dans les emplois précaires et les difficultés qu’elles rencontrent s’agissant des perspectives de carrière et de l’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle ;

c)Le faible niveau de qualifications professionnelles chez les personnes handicapées, qui ont peu accès aux programmes de formation professionnelle, notamment aux programmes qui les aideraient à obtenir des postes dans la recherche ;

d)Le manque de sensibilisation des employeurs et leur réticence à procéder à des aménagements raisonnables et à appliquer le principe de la conception universelle.

55. Le Comité recommande à l ’ État partie, dans la droite ligne de la cible 8.5 des objectifs de développement durable :

a) D’éliminer progressivement tous les environnements de travail séparés, de renforcer les mesures visant à mettre effectivement un terme aux emplois protégés et d’adopter une stratégie assortie d’échéances et de jalons visant à ce que toutes les personnes handicapées aient accès au travail et à l’emploi sur le marché du travail général, quels que soient leur handicap et le degré d’assistance dont elles ont besoin, et soient réellement intégrées dans les environnements de travail, dans le secteur privé comme dans le secteur public ;

b) De contrôler les conditions de travail de toutes les personnes handicapées et de veiller à ce que celles-ci ne reçoivent pas une rémunération inférieure au salaire minimum ;

c) D’encourager l’emploi des femmes handicapées sur le marché du travail général, en faisant en sorte qu’elles soient informées des possibilités de soutien individualisé, qu’elles puissent effectivement en bénéficier grâce à des aménagements raisonnables et que des mesures concrètes soient prises pour leur permettre de concilier vie professionnelle et vie personnelle ;

d) D’élaborer des campagnes de sensibilisation visant à promouvoir la participation des femmes handicapées au monde du travail et à faire évoluer les mentalités qui empêchent que les capacités et les contributions de ces femmes dans tous les secteurs du marché du travail général soient reconnues, sur la base de l’égalité avec les autres ;

e) De veiller à ce que les personnes handicapées aient accès aux programmes généraux d’orientation technique et professionnelle, de formation professionnelle et continue et d’orientation vers l’emploi sur la base de l’égalité avec les autres, et de prendre des mesures pour soutenir les personnes handicapées qui souhaitent travailler dans la recherche en mettant en place une planification pluriannuelle dans les instituts de recherche ;

f) De faire en sorte que le droit d’obtenir un soutien individualisé au moyen d’aménagements raisonnables sur le lieu de travail soit respecté par les employeurs des secteurs public et privé, et de renforcer les mesures visant à favoriser l’offre d’aménagements raisonnables sur le lieu de travail et la communication d’informations à ce sujet.

Niveau de vie adéquat et protection sociale (art. 28)

56.Le Comité note avec inquiétude que :

a)Les mesures d’aide offertes aux personnes handicapées ne sont pas les mêmes en fonction de l’âge, ce qui est problématique en particulier pour les personnes de plus de 60 ans, et qu’il existe aussi des disparités entre les zones urbaines et rurales ;

b)L’allocation aux adultes handicapés est plafonnée et qu’elle ne permet donc pas de couvrir tous les coûts liés au handicap, et que le projet de loi relatif au nouveau calcul de cette allocation a été retiré ;

c)Les personnes handicapées, en particulier celles qui ont besoin d’une aide conséquente, sont exposées au risque de vivre dans la pauvreté ;

d)Les personnes qui ont été placées en institution, notamment les personnes ayant un handicap psychosocial et qui ont été soumises à un traitement psychiatrique obligatoire, courent un risque accru d’être sans-abri.

57. Compte tenu des liens entre l ’ article 28 de la Convention et la cible 1.3 des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D’évaluer l’application à l’échelle nationale et régionale des lois et politiques relatives au handicap afin que toutes les personnes handicapées aient accès à l’assistance dans des conditions d’égalité, quel que soit leur âge, de rationaliser les procédures municipales d’appui les concernant, et de leur fournir des informations sur leurs droits et sur les prestations auxquelles elles peuvent prétendre dans des formats accessibles, notamment le FALC ;

b) De revoir les dispositions relatives à l’octroi et au montant de l’allocation aux adultes handicapés, en consultation avec les organisations de personnes handicapées ;

c) De rationaliser les mécanismes d’aide de la sécurité sociale afin qu’ils soient accessibles à toutes les personnes handicapées, l’objectif étant de lutter contre la pauvreté ;

d) D’élaborer et d’exécuter des programmes visant à créer des logements accessibles et de renforcer les dispositifs d’appui fondés sur les droits de l’homme afin qu’ils couvrent les dépenses liées au handicap et que toutes les personnes handicapées puissent jouir d’un niveau de vie adéquat.

Participation à la vie politique et à la vie publique (art. 29)

58.Le Comité est préoccupé par :

a)Le manque d’accessibilité des procédures, des installations et du matériel de vote, ainsi que des campagnes électorales, en particulier pour les personnes ayant un handicap intellectuel ;

b)Les obstacles législatifs qui empêchent les personnes handicapées sous tutelle de se présenter aux élections locales et nationales ;

c)Le faible niveau de participation des personnes handicapées à la vie publique et politique, y compris aux campagnes électorales.

59. Le Com ité recommande à l’État partie :

a) De garantir l’accessibilité des procédures, des installations et du matériel de vote, ainsi que des campagnes électorales à toutes les personnes handicapées, notamment en mettant en place des mesures d’aide (recours aux modes de communication alternative et améliorée) pour les personnes ayant un handicap intellectuel ;

b) D’abroger l’article L200 du Code électoral, qui empêche les personnes soumises au régime de prise de décision s substitutive de se présenter aux élections nationales et locales ;

c) De veiller à ce que les personnes handicapées puissent effectivement participer pleinement à la vie publique et politique sur la base de l’égalité avec les autres, notamment en garantissant leur droit de voter et de se présenter aux élections et en leur donnant la possibilité de le faire.

Participation à la vie culturelle et récréative, aux loisirs et aux sports (art. 30)

60.Le Comité prend note avec préoccupation du manque d’informations sur les mesures qui ont été prises pour appliquer le Traité de Marrakech visant à faciliter l’accès des aveugles, des déficients visuels et des personnes ayant d’autres difficultés de lecture des textes imprimés aux œuvres publiées et sur l’accès des personnes handicapées aux lieux où se déroulent des activités sportives, récréatives et touristiques, ainsi que du manque d’activités ludiques, récréatives, de loisir et sportives pour les enfants handicapés. Il est aussi préoccupé par le manque d’appui aux organisations de sportifs malentendants et par le manque d’intérêt porté aux Deaflympics (Jeux olympiques pour les personnes sourdes).

61. L e Com ité recommande à l’État partie :

a) De prendre les mesures voulues pour sensibiliser l’opinion à la question de l’accessibilité des œuvres publiées aux personnes handicapées et de fixer des objectifs pour accroître le nombre d’œuvres publiées accessibles, conformément à la loi n o 2018 ‑ 771 du 5 septembre 2018, qui transpose dans le droit interne le Traité de Marrakech visant à faciliter l’accès des aveugles, des déficients visuels et des personnes ayant d’autres difficultés de lecture des textes imprimés aux œuvres publiées ;

b) D’allouer des crédits budgétaires à la promotion du droit des personnes handicapées, en particulier des enfants, de participer à la vie culturelle et aux activités sportives et récréatives et aux loisirs, sur la base de l’égalité avec les autres ;

c) De prendre des mesures pour valoriser les Deaflympics et favoriser leur développement, en consultation avec les organisations de personnes handicapées.

C.Obligations particulières (art. 31 à 33)

Statistiques et collecte des données (art. 31)

62.Le Comité note avec préoccupation qu’il n’y a pas de collecte systématique de données ventilées sur la situation des personnes handicapées dans toutes les sphères de la vie, principalement parce que le recensement national ne contient aucune question sur le handicap.

63. L e Com ité rappelle le bref questionnaire du Groupe de Washington sur les situations de handicap et le marqueur de politique du Comité d’aide au développement de l’Organisation de coopération et de développement économiques sur l’inclusion et l’autonomisation des personnes handicapées, et recommande à l’État partie de mettre en place des systèmes de collecte de données sur la situation des personnes handicapées qui permettent de ventiler les données selon plusieurs facteurs tels que l’âge, le sexe, l’orientation sexuelle et l’identité de genre, le lieu de résidence, la situation socioéconomique et l’origine ethnique. Ces systèmes devraient couvrir toutes les sphères de la vie et aussi recueillir des informations sur la violence à l’égard des personnes handicapées. Le Comité recommande également à l’État partie de promouvoir des projets de recherche participative en coopération avec les personnes handicapées sur les questions qui les concernent.

Coopération internationale (art. 32)

64.Le Comité note avec inquiétude que l’inclusion sociale des personnes handicapées et l’abandon du placement en institution ne sont toujours pas des priorités des programmes d’investissement internationaux, notamment ceux des fonds structurels européens et du Fonds européen d’investissement. Il note également avec préoccupation que les organisations de personnes handicapées ne sont pas systématiquement associées et consultées dans le cadre des programmes internationaux de coopération multilatérale.

65. L e Com ité recommande à l’État partie de faire du respect des droits des personnes handicapées, notamment du droit de vivre de manière autonome et d’être inclus dans la société, une condition d’octroi de l’aide dans tous ses programmes et projets de coopération internationale. L’État partie devrait garantir la participation, l’inclusion et la consultation réelles et sans restriction des personnes handicapées, par l’intermédiaire des organisations qui les représentent, dans le contexte de la conception, de l’application, du suivi et de l’évaluation de tous ces programmes et projets .

Application et suivi au niveau national (art. 33)

66.Le Comité note avec préoccupation :

a)Que les fonctionnaires ne suivent pas systématiquement de programme de renforcement des capacités concernant l’application de la Convention, notamment dans les territoires d’outre-mer ;

b)Qu’il ne dispose pas d’informations sur la présence de personnes handicapées au sein des mécanismes indépendants de suivi de l’application de la Convention et sur les dispositifs mis en place pour accroître la participation des organisations qui représentent les personnes handicapées aux activités de ces mécanismes.

67. L e Com ité recommande à l’État partie :

a) De renforcer, pour tous les domaines visés par la Convention, les capacités des référents handicap, notamment du secrétaire général du Comité interministériel du handicap , des hauts fonctionnaires chargés des questions de handicap et d’inclusion dans chaque ministère et des référents des territoires d’outre-mer, afin que ceux-ci appliquent les dispositions de la Convention pour toutes les questions liées aux personnes handicapées ;

b) D’accroître les ressources humaines, techniques et financières allouées au Défenseur des droits, afin qu’il puisse s’acquitter de son mandat relatif au suivi de l’application de la Convention ;

c) De prendre des mesures pour accroître la diversité au sein des mécanismes indépendants de suivi, notamment de nommer des personnes handicapées, y compris des femmes, en tant que membres de ces organes ;

d) De veiller à ce que les personnes handicapées et les diverses organisations qui les représentent soient effectivement associées au suivi de l’application de la Convention.

IV.Suivi

Diffusion de l’information

68. Le Comité insiste sur l’importance de toutes les recommandations qui figurent dans les présentes observations finales. S’agissant des mesures qu’il convient de prendre d’urgence, il appelle l’attention de l’État partie sur les recommandations contenues aux paragraphes 30 et 31 (liberté et sécurité de la personne) et 41 (autonomie de vie et inclusion dans la société).

69. Le Comité demande à l’État partie de mettre en œuvre les recommandations figurant dans les présentes observations finales. Il lui recommande de transmettre les présentes observations finales, pour examen et suite à donner, aux membres du Gouvernement et de l’Assemblée nationale, aux responsables des différents ministères, aux autorités locales et aux membres des professions concernées, tels les professionnels de l’éducation, de la santé et du droit, ainsi qu’aux médias, en utilisant pour ce faire les stratégies de communication sociale modernes.

70. Le Comité encourage vivement l’État partie à associer les organisations de la société civile, en particulier les organisations de personnes handicapées, à l’élaboration de ses rapports périodiques.

71. Le Comité prie l’État partie de diffuser largement les présentes observations finales, notamment auprès des organisations non gouvernementales et des organisations de personnes handicapées, ainsi qu’auprès des personnes handicapées elles-mêmes et de leurs proches, dans les langues nationales et minoritaires, notamment en langue des signes, et sous des formes accessibles telles que le FALC. Il lui demande aussi de les diffuser sur le site Web public consacré aux droits de l’homme.

Prochain rapport périodique

72. Le Comité prie l’État partie de lui soumettre son rapport valant deuxième à cinquième rapports périodiques le 18 mars 2028 au plus tard et d’y faire figurer des renseignements sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations figurant dans les présentes observations finales. I l invite également l’État partie à envisager de soumettre ce rapport en suivant la procédure simplifiée, dans le cadre de laquelle il établit une liste de points au moins un an avant la date prévue pour la soumission du rapport et l’État partie y apporte des réponses qui constituent son rapport périodique.