Nations Unies

CCPR/C/102/D/1756/2008

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale*

24 août 2011

Français

Original: anglais

C omité des droits de l’homme

102 e session

11-29 juillet 2011

Constatations

Communication no 1756/2008

Présentée par:

Turdukan Zhumbaeva (représentée par un conseil, M. Tair Asanov, avec l’assistance d’Open Society Justice Initiative)

Au nom de:

L’auteur et son fils décédé, Tashkenbaj Moidunov

État partie:

Kirghizistan

Date de la communication:

4 janvier 2008 (date de la lettre initiale)

Références:

Décision prise par le Rapporteur spécial en application de l’article 97 du Règlement intérieur, communiquée à l’État partie le 25 janvier 2008 (non publiée sous forme de document)

Date de l’adoption des constatations:

19 juillet 2011

Objet:

Décès en garde à vue

Questions de procédure:

Néant

Questions de fond:

Droit à la vie, interdiction de la torture, droit à un recours utile

Articles du Pacte:

2 (par. 3), 6 (par. 1), 7

Article du Protocole facultatif:

Néant

Le 19 juillet 2011, le Comité des droits de l’homme a adopté le texte ci-après en tant que constatations au titre du paragraphe 4 de l’article 5 du Protocole facultatif concernant la communication no1756/2008.

[Annexe]

Annexe

Constatations du Comité des droits de l’homme au titre du paragraphe 4 de l’article 5 du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques (102e session)

concernant la

Communication no 1756/2008 **

Présentée par:

Turdukan Zhumbaeva (représentée par un conseil, M. Tair Asanov, avec l’assistance d’Open Society Justice Initiative)

Au nom de:

L’auteur et son fils décédé, Tashkenbaj Moidunov

État partie:

Kirghizistan

Date de la communication:

4 janvier 2008 (date de la lettre initiale)

Le Comité des droits de l’homme, institué en vertu de l’article28 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques,

Réuni le19 juillet 2011,

Ayant achevé l’examen de la communication no1756/2008 présentée au nom de M. Tashkenbaj Moidunov (décédé) et de MmeTurdukan Zhumbaeva, en vertu du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques,

Ayant tenu compte de toutes les informations écrites qui lui ont été communiquées par l’auteur et l’État partie,

Adopte ce qui suit:

Constatations au titre du paragraphe 4 de l’article 5 du Protocole facultatif

1.L’auteur de la communication, datée du 4 janvier 2008, est MmeTurdukan Zhumbaeva, de nationalité kirghize. Elle présente la communication en son propre nom et au nom de son fils décédé, M.Tashkenbaj Moidunov, né en 1958. Elle affirme qu’ils sont victimes de violations par le Kirghizistan du paragraphe 1 de l’article 6 et de l’article 7 seuls et lus conjointement avec le paragraphe 3 de l’article 2 du Pacte. L’auteur est représentée par un conseil, M. Tair Asanov, qui est assisté par Open Society Justice Initiative.

Rappel des faits présentés par l’auteur

2.1Le 24 octobre 2004, M.Tashkenbaj Moidunov, fils de l’auteur, et sa femme se disputaient dans la rue lorsqu’une voiture de police s’est approchée; les policiers les ont interpellés pour trouble à l’ordre public et leur ont demandé de les suivre au commissariat de Bazar-Korgon. Au commissariat, M. Moidunov et sa femme ont été interrogés séparément. D’après la femme de M. Moidunov, le policier a exercé sur elle des pressions pour qu’elle rédige une plainte contre son mari dans laquelle elle affirmerait qu’il l’avait menacée avec un couteau et avait dit qu’il allait la tuer. Ayant peur de la police, elle a rédigé la plainte. Elle a ensuite été relâchée mais, peu après, les policiers l’ont rappelée au commissariat et lui ont demandé si elle savait que son mari était cardiaque. Lorsqu’elle est arrivée, elle a vu le corps de son mari étendu sur le sol.

2.2Un médecin d’ambulance a été appelé et il lui a été indiqué que M. Moidunov (la victime) s’était pendu au commissariat. Dans sa déposition datée du 18 novembre 2004, le médecin a affirmé qu’elle avait soigneusement examiné le cou de la victime mais n’avait constaté aucune marque de corde. Elle a déclaré avoir remarqué des marques de doigt rouges sur le cou de la victime et avoir demandé si cette dernière avait été étranglée, ce à quoi un policier avait répondu qu’apparemment la victime était cardiaque. Quand le médecin avait demandé pourquoi il avait été signalé au service des ambulances qu’un homme s’était pendu, le policier lui avait répondu «qu’ils avaient tous paniqué et parlé de pendaison».

2.3Un expert médico-légal a effectué un premier examen le jour même. Il a déclaré que la victime ne présentait aucune fracture, griffure ou plaie. Le 25 octobre 2004, une autopsie a été réalisée par le même expert médico-légal, qui a décrit des lésions à l’arcade sourcilière, à la lèvre inférieure et au cou, et a conclu que le décès était dû à une asphyxie mécanique par pendaison au moyen d’un tissu souple. La présence d’alcool a été détectée dans le sang et les urines de la victime (3,27 ‰ dans le sang et 3,49 ‰ dans les urines). Interrogé le 25 avril 2005, l’expert a déclaré que les lésions observées sur le cou de la victime pouvaient avoir été provoquées par n’importe quel objet dur, y compris des doigts, mais qu’il n’avait cependant pas trouvé de marques de strangulation. À la question de savoir si l’asphyxie mécanique pouvait être due à une strangulation, l’expert médico-légal a répondu que les lésions sur le cou pouvaient avoir été causées par des ongles humains mais que l’examen histologique ne révélait aucun signe d’hémorragie, ce qui aurait été un indice de strangulation. Il a également indiqué que la fracture de la corne thyroïdienne pouvait résulter d’une pression manuelle.

2.4Dans sa première déposition datée du 24 octobre 2004, le commissaire principal du commissariat en question, M. Mantybaev, a déclaré que la victime et sa femme avaient été conduits au poste après s’être disputés dans la rue, ce qu’ils ont continué à faire dans les locaux de la police, et que la victime était sous l’emprise de l’alcool. La femme de la victime souhaitait porter plainte contre son mari et avait demandé à la police de le maintenir en garde à vue pour éviter les contacts. La victime, qui était assise dans le couloir, s’était soudain effondrée sur le sol en se tenant la poitrine de douleur. Le brigadier-chef, M. Abdukaimov, a fait la même déclaration, tout en précisant que la femme de la victime avait assisté au décès de son mari et qu’elle avait ensuite perdu connaissance.

2.5Le 9 novembre 2004, après un examen préliminaire des faits, le procureur adjoint a ouvert une enquête pénale en application de l’article 316 du Code pénal (négligence dans l’exercice des fonctions). Interrogé le 17 novembre 2004, le commissaire principal, M. Mantybaev, a donné une version différente des faits, déclarant qu’il était sorti de la pièce après avoir enregistré la plainte de la femme de la victime, et avait constaté que la victime n’était plus assise dans le couloir. Les policiers avaient fini par trouver l’homme dans la cellule d’internement administratif, où il s’était pendu avec son pantalon de sport. Après avoir pratiqué la réanimation cardio-pulmonaire, les policiers avaient appelé une ambulance. Le commissaire principal et le brigadier-chef s’étaient mis d’accord pour dire que la victime était morte d’une crise cardiaque, ne révélant la vérité que lors de l’enquête, effrayés par la tournure prise par les événements. Le 21 décembre 2004, la femme de la victime a déclaré dans sa déposition que son mari ne portait jamais de pantalon de sport et qu’il n’en possédait pas.

2.6Le 16 mai 2005, le commissaire principal, M. Mantybaev, a été inculpé des chefs suivants: 1) abus de pouvoir ayant entraîné la mort; 2) fausse déclaration dans l’exercice de ses fonctions; et 3) négligence ayant entraîné la mort sans intention de la donner. Il a également été accusé de violation d’une ordonnance du Ministère de l’intérieur qui fait obligation aux policiers de service de faire examiner par un médecin toute personne en état d’intoxication. L’inculpation de fausse déclaration découlait de ce que M. Mantybaev avait fait pour se couvrir, à savoir écrire dans le registre officiel que le corps de la victime avait été trouvé dans la rue et ne portait aucune trace de mort violente.

2.7Le 21 septembre 2005, le tribunal de district de Suzak a reconnu M. Mantybaev coupable de négligence dans l’exercice de ses fonctions ayant entraîné la mort sans intention de la donner, infraction visée au paragraphe2 de l’article 316 du Code pénal, et a rejeté les autres chefs d’inculpation. Le tribunal a considéré que M. Mantybaev n’avait pas organisé d’examen médical de la victime et n’avait pas pris de mesures pour empêcher celle-ci, qui était sous l’emprise de l’alcool, de se suicider. Un accord amiable étant intervenu entre la famille de la victime et M. Mantybaev, ce dernier a été exonéré de sa responsabilité pénale. À l’audience, le frère de la victime a confirmé avoir reçu une indemnisation (30000 soms kirghizes, soit approximativement 860dollars É.-U.) du commissaire principal; il a néanmoins demandé avec insistance que l’affaire fasse l’objet d’un complément d’enquête car il pensait que la victime avait été tuée par les policiers.

2.8L’auteur a formé un recours auprès du tribunal régional de Djalal-Abad, qui a estimé que le tribunal de première instance n’avait pas tenu compte des contradictions entre la déposition de M. Mantybaev et celles des autres témoins. Il a également estimé que le tribunal de première instance, dans l’application de la procédure de conciliation, n’avait pas tenu compte de la thèse des membres de la famille de la victime. Le tribunal de Djalal-Abad a invalidé la décision du tribunal de district de Suzak et ordonné que l’affaire soit rejugée. Cette décision a fait l’objet d’un recours en révision auprès de la Cour suprême formé par M. Mantybaev.

2.9Le 27 décembre 2006, la Cour suprême a annulé la décision du tribunal régional de Djalal-Abad et confirmé celle du tribunal de district de Suzak. Elle a estimé que la culpabilité de M. Mantybaev avait été établie par la juridiction de première instance, qui avait à juste titre qualifié ses actes de négligence. La Cour suprême a également estimé que les arguments de l’auteur concernant les lacunes de l’enquête et l’existence de preuves établissant l’homicide relevaient de la spéculation.

Teneur de la plainte

3.1L’auteur fait valoir que l’État partie est responsable de la mort de la victime, qui a été arbitrairement privée de la vie pendant sa garde à vue. L’auteur rappelle la jurisprudence du Comité qui a toujours affirmé que l’État partie avait une responsabilité particulière à l’égard de la vie des personnes placées en détention et qu’il devait prendre des mesures suffisantes et appropriées pour la protéger. Elle rappelle aussi le principe du renversement de la charge de la preuve en cas de décès durant la détention. L’auteur affirme que la victime est décédée pendant la garde à vue par suite de l’emploi de la force par les policiers, qui était excessif et inutile et constitue de ce fait une violation du paragraphe 1 de l’article 6 du Pacte. Elle rappelle que, selon le rapport d’autopsie, le décès de la victime est dû à une asphyxie mécanique. Les conclusions livrées par l’expert médico-légal dans le cadre de l’enquête n’ont toutefois pas permis d’établir clairement si cette asphyxie mécanique était le résultat d’une pendaison ou d’une strangulation manuelle. L’auteur souligne que la victime était en bonne santé, sur le plan psychique et physique, lorsqu’elle a été emmenée au commissariat, et que l’enquête n’avait apporté aucune preuve contraire. Le médecin d’ambulance, qui a été la première à examiner le corps de la victime, avait noté des marques de doigt rouges sur le cou, ce qui a été confirmé par le rapport d’autopsie. L’auteur relève que les faits susmentionnés, qui ont été formellement établis par l’enquête, mettent en évidence la cause la plus probable du décès de la victime: la strangulation manuelle. Elle relève également que la thèse du suicide n’est pas plausible, la femme de la victime ayant déclaré dans sa déposition que son mari ne possédait pas de pantalon de sport; de plus, le pantalon de sport qui aurait été utilisé n’a fait l’objet d’aucune expertise médico-légale. La victime ne souffrait d’aucun trouble psychique qui l’aurait prédisposée au suicide et, compte tenu de son état d’ivresse sévère, elle n’avait ni la capacité physique ni le temps de se suicider, n’ayant été laissée sans surveillance que pendant une période très courte. L’auteur souligne également que les policiers, qui sont les principaux suspects, ont fait diverses tentatives pour dérouter l’enquête. Ils ont commencé par dire aux services ambulanciers que la victime s’était pendue, puis ont indiqué qu’elle avait eu une crise cardiaque, ils ont fait ensuite une déclaration officielle selon laquelle elle avait été trouvée morte dans la rue, avant de déclarer finalement qu’elle s’était pendue au moyen de son pantalon de sport.

3.2L’auteur affirme également que l’État partie n’a pas offert de recours utiles concernant le décès de la victime. Elle rappelle la jurisprudence du Comité qui a toujours affirmé que, dans des circonstances ayant entraîné la perte de la vie, une enquête approfondie devait être menée par un organe impartial, les auteurs des actes commis devaient être traduits en justice et une indemnisation devait être versée à la famille de la victime. L’auteur fait valoir que les autorités n’ont jamais réalisé d’enquête sur l’exécution arbitraire de la victime mais ont déclaré dans le réquisitoire à fin d’informer daté du 9 novembre 2004 qu’une enquête pénale était ouverte par suite de la découverte de la victime, qui s’était pendue. L’auteur affirme qu’à ce moment il n’existait aucun élément permettant de penser que la cause du décès pouvait être le suicide, les déclarations écrites des policiers indiquant que la victime avait succombé à une crise cardiaque. Ce n’est que le 13 décembre 2004 que le rapport d’autopsie a précisé que l’asphyxie mécanique pouvait avoir été provoquée par la pendaison. De plus, l’enquête a ajouté pleinement foi au dernier témoignage des policiers selon lequel la victime s’était pendue et n’a pas tenu compte des dépositions de l’auteur et du médecin d’ambulance. L’auteur souligne que les enquêteurs n’ont pas obtenu de description détaillée de la position du corps de la victime lorsqu’elle se serait pendue, n’ont pas procédé à une reconstitution des faits relatifs au suicide présumé, n’ont pas établi l’heure et le déroulement exacts des faits et n’ont pas demandé le dossier médical de la victime pour déterminer si elle avait des tendances suicidaires; ils n’ont pas non plus ordonné une expertise médico-légale du pantalon de sport qui aurait été utilisé par la victime pour se pendre et n’ont pas trouvé la somme d’argent liquide (6000soms kirghizes, soit approximativement 170 dollars É.-U.) que, d’après l’auteur, la victime avait dans sa poche. L’auteur affirme que les policiers n’ont jamais fait l’objet d’une enquête pour le meurtre de la victime. M. Mantybaev a été puni pour une infraction bien moins grave − négligence dans l’exercice de ses fonctions −, et le brigadier-chef de service, M. Abdukaimov, n’a jamais été inculpé ni jugé. L’auteur affirme que ce qui précède constitue une violation du paragraphe 3 de l’article 2 lu conjointement avec le paragraphe 1 de l’article 6 du Pacte.

3.3L’auteur fait valoir en outre que la famille de la victime n’a jamais été dûment indemnisée du décès de son fils. Elle considère que la somme payée par M. Mantybaev n’était pas suffisante. Le frère de la victime a reçu une indemnisation de 30 000 soms kirghizes dans le cadre de la procédure de conciliation devant le tribunal de district de Suzak. L’auteur explique que, conformément au droit interne, la responsabilité de l’État ne peut être engagée pour le meurtre que si les policiers ayant agi en son nom sont condamnés au pénal; or, dans l’affaire à l’examen, les deux policiers concernés n’ont jamais été inculpés ni condamnés pour le meurtre de la victime. L’auteur ne peut donc pas introduire de poursuites contre l’État à raison des violations du paragraphe 3 de l’article 2 lu conjointement avec le paragraphe 1 de l’article 6 du Pacte.

3.4L’auteur fait valoir de surcroît que l’emploi illégal de la force par les policiers constitue une violation de l’article 7 du Pacte. Elle mentionne la jurisprudence du Comité qui affirme qu’il incombe à l’État partie de fournir une explication plausible des circonstances dans lesquelles une personne privée de liberté est blessée en détention, et d’apporter des éléments de preuve pour réfuter les allégations avancées. L’auteur affirme qu’au vu des preuves recueillies la victime a été blessée à divers endroits du visage et du cou et que les autorités compétentes de l’État partie n’ont donné aucune explication sur l’origine de ces lésions ni indiqué en quoi l’emploi de la force par les policiers était justifié par le but légitime d’assurer le maintien de l’ordre. L’auteur affirme que la victime n’avait pas de blessures au cou ni au visage avant sa détention et que la cause du décès qui a été avancée, à savoir le suicide par pendaison, n’explique pas les nombreuses ecchymoses et lésions décrites dans le rapport d’autopsie.

3.5L’auteur fait enfin valoir que les services du procureur n’ont pas mené d’enquête pour déterminer si le décès de la victime était dû à des actes de torture ou des mauvais traitements, malgré l’existence d’éléments de preuve solides tels que les multiples lésions sur le visage et le corps. Elle fait également valoir que l’importante somme d’argent que la victime avait dans sa poche (6 000 soms kirghizes, soit approximativement 170 dollars É.‑U.) n’a jamais été retrouvée. Elle affirme que cette situation constitue une violation du paragraphe 3 de l’article 2 lu conjointement avec l’article 7 du Pacte. Elle fait également observer que, bien que la torture soit une infraction pénale depuis 2003, le tribunal de district de Suzak a considéré que le commissaire principal ne relevait pas de la catégorie des «fonctionnaires», pour ce qui est d’une inculpation pour abus de pouvoir, et que cette décision a été confirmée par la Cour suprême. Les policiers ne pouvaient donc pas être tenus responsables de l’infraction de torture.

Observations de l’État partie sur la recevabilité et sur le fond

4.1Dans une note du 16 juin 2010, l’État partie a présenté des informations communiquées par le Bureau du Procureur général et par la Cour suprême. Le Bureau du Procureur général affirme que le 24 octobre 2004, à 17 heures, le corps de la victime a été trouvé dans la cellule du commissariat de Bazar-Korgon. Le corps portait des marques de pendaison. D’après l’autopsie, le décès de la victime est dû à une asphyxie mécanique par obturation des voies aériennes supérieures. Le 9 novembre 2004, les services du procureur ont ouvert une enquête pénale contre le commissaire principal, M. Mantybaev, pour négligence ayant entraîné la mort sans intention de la donner. Le 16 mai 2005, le commissaire principal a été inculpé de négligence et d’abus de pouvoir. Le 21 septembre 2005, le tribunal de district de Suzak l’a reconnu coupable de négligence. Cette décision a été confirmée par la Cour suprême.

4.2La Cour suprême affirme que, le 21 septembre 2005, M. Mantybaev a été reconnu coupable de négligence (art. 316, par. 2, du Code pénal) et qu’il a été exonéré de sa responsabilité pénale en raison de l’accord amiable intervenu entre la famille de la victime et lui (art. 66 du Code pénal). La Cour a expliqué à l’auteur la procédure à suivre pour engager une action civile en réparation du préjudice moral et matériel subi. L’auteur a formé un recours et la juridiction de deuxième instance, le tribunal régional de Djalal-Abad, a examiné l’affaire. Le 5 septembre 2006, cette juridiction a annulé la décision prise en première instance et a ordonné un nouveau procès. La décision du tribunal régional a été contestée dans le cadre d’un recours en révision devant la Cour suprême. Le 27 décembre 2006, la Cour suprême a annulé la décision du tribunal régional et confirmé le jugement du tribunal de première instance, qui est devenu définitif.

Commentaires de l’auteur

5.1Le 11 janvier 2011, l’auteur a présenté ses commentaires relatifs aux observations de l’État partie et a noté que ce dernier avait simplement répété qu’une personne avait été inculpée de négligence mais que sa responsabilité pénale avait été écartée en raison d’un accord amiable conclu avec la famille de la victime; l’État partie ne présente toutefois aucun argument en réponse aux allégations de violation des droits de l’homme. L’auteur réitère ses griefs initiaux et affirme qu’il n’y a toujours pas eu d’enquête efficace sur le décès de son fils, ajoutant que le versement d’une contribution aux frais funéraires a mis fin aux procédures judiciaires. Elle souligne que l’État partie ne peut se soustraire à ses obligations juridiques internationales − mener une enquête efficace et impartiale sur le décès de la victime et veiller à ce que les responsables de ce décès répondent de leurs actes − en appliquant une procédure qui permet l’exonération de la responsabilité pénale.

5.2L’auteur note que le jugement du tribunal de district de Suzak présente des contradictions dans son appréciation de l’accord qui serait intervenu entre M. Mantybaev et la famille de la victime. Dans le résumé des moyens de preuve, le tribunal mentionne la déclaration de M. Mantybaev qui a indiqué avoir conclu un accord amiable avec la famille de la victime, et note également la déposition du frère de la victime dans laquelle celui-ci déclare que le décès de son frère cadet pourrait être élucidé si M.Abdukaimov était retrouvé et demande en conséquence un complément d’enquête à cette fin. En dépit de cette contradiction, le tribunal de district de Suzak a conclu qu’il y avait eu accord amiable et il a ainsi exonéré M. Mantybaev de sa responsabilité pénale. Dans le cadre de l’appel devant le tribunal régional de Djalal-Abad, l’auteur a affirmé qu’elle pensait que son fils avait été tué par M. Abdukaimov, qui est en fuite, et elle a demandé que des mesures juridiques soient prises pour permettre son arrestation. L’auteur note que rien n’indique que le procureur ait été en désaccord avec sa conviction. Elle note également que la juridiction de deuxième instance a convenu qu’il n’y avait pas eu d’accord amiable et a demandé que l’affaire soit rejugée en raison des incohérences et des lacunes de l’enquête.

5.3L’auteur appelle l’attention sur l’article 66 du Code pénal, sur la base duquel M. Mantybaev a été exonéré de sa responsabilité pénale, et note que tant le tribunal de district que la Cour suprême ont considéré que des chefs d’accusation liés au décès d’une personne en garde à vue pouvaient être qualifiés d «infraction mineure» et que le versement d’une modeste contribution aux frais funéraires suffisait à réparer le préjudice financier résultant du décès d’un membre d’une famille.

5.4L’auteur rappelle la jurisprudence du Comité et relève que l’État partie est tenu de traduire en justice les auteurs des actes incriminés et d’adapter la sanction au degré de gravité de la violation des droits de l’homme. Le Comité a estimé que les recours purement disciplinaires ou administratifs n’étaient pas suffisants ou utiles. L’auteur fait valoir qu’elle n’a pas renoncé à son droit à l’établissement de la vérité concernant les circonstances du décès de son fils ni à son droit de faire traduire en justice ceux qui en sont responsables. Le fait que la famille n’a pas refusé une modeste contribution aux frais funéraires ne saurait être considéré comme une renonciation indiscutable à ses droits, faite sur la base du consentement éclairé et en pleine connaissance de cause. Sa recherche de la justice au moyen des recours qu’elle a formés et la communication qu’elle a présentée au Comité montrent à l’évidence que l’auteur n’a jamais eu l’intention de renoncer à faire valoir ses droits.

5.5Pour conclure, l’auteur répète que, du fait qu’aucune explication plausible du décès, découlant d’une enquête indépendante et efficace, n’a été donnée, le Comité devrait conclure que son fils a été victime d’une exécution arbitraire. Elle rappelle également les nombreuses lacunes de l’enquête, ajoutant que M. Abdukaimov a disparu après sa première déposition et que rien n’indique qu’on ait essayé de retrouver sa trace. De plus, l’importante somme d’argent (6 000 soms kirghizes) qui était en possession de la victime n’a jamais été retrouvée. De surcroît, la famille n’a pas été associée à l’enquête et les résultats de celle-ci n’ont jamais été rendus publics.

Réponses complémentaires de l’État partie

6.Le 18 juillet 2011, l’État partie a fait parvenir des réponses complémentaires. Il rappelle longuement les faits ainsi que le déroulement de la procédure engagée suite au décès du fils de l’auteur, renvoie à ses précédentes observations sur le fond et affirme qu’il n’y a aucune raison de réviser les décisions rendues par les tribunaux dans la présente affaire.

Délibérations du Comité

Examen de la recevabilité

7.1Avant d’examiner toute plainte soumise dans une communication, le Comité des droits de l’homme doit, conformément à l’article 93 de son règlement intérieur, déterminer si la communication est recevable en vertu du Protocole facultatif se rapportant au Pacte.

7.2Le Comité s’est assuré, comme il est tenu de le faire conformément aux dispositions du paragraphe 2 a) de l’article 5 du Protocole facultatif, que la même affaire n’était pas en cours d’examen devant une autre instance internationale d’enquête ou de règlement.

7.3Concernant la question de l’épuisement des recours internes, le Comité note que, selon les informations présentées par l’auteur, tous les recours internes disponibles, y compris devant la Cour suprême, ont été épuisés. En l’absence de toute objection de l’État partie, le Comité considère que les conditions énoncées au paragraphe 2 b) de l’article 5 du Protocole facultatif sont remplies.

7.4Le Comité considère que l’auteur a suffisamment étayé, aux fins de la recevabilité, ses griefs tirés du paragraphe 1 de l’article 6 et de l’article 7 seuls et lus conjointement avec le paragraphe 3 de l’article 2 du Pacte, et il procède par conséquent à leur examen quant au fond.

Examen au fond

8.1Conformément au paragraphe 1 de l’article 5 du Protocole facultatif, le Comité des droits de l’homme a examiné la présente communication en tenant compte de toutes les informations qui lui ont été communiquées par les parties.

8.2Le Comité relève que, si l’État partie a communiqué des informations sur les procédures internes et sur les faits de l’espèce, il n’a fourni aucun élément concernant le bien-fondé des griefs précis formulés par l’auteur. Dans ces conditions, il convient d’accorder le crédit voulu aux allégations de l’auteur, dans la mesure où elles sont suffisamment étayées.

8.3Le Comité note que, dans l’après-midi du 24 octobre 2004 (à 16 h 30 d’après l’acte d’inculpation daté du 16 mai 2005), la victime et sa femme ont été priés de suivre des policiers au commissariat de Bazar-Korgon à la suite d’une dispute qualifiée de trouble à l’ordre public. La victime a été placée en garde à vue, sa femme a été relâchée. D’après les informations communiquées par l’État partie, le fils de l’auteur est décédé le 24 octobre 2004 à 17heures (17 h 20 d’après le jugement du tribunal de district de Suzak). Le Comité note que, selon la déposition du médecin d’ambulance en date du 18 novembre 2004, la victime ne portait pas de marques de strangulation mais portait au cou des marques de doigt rouges. Le Comité note également que, selon la déposition qu’il a faite le 25 avril 2005, l’expert médico-légal qui a examiné le corps de la victime le 25 octobre 2004 en présence de médecins et de deux membres de la famille de la victime a constaté des griffures sur l’arcade sourcilière, sous le menton, au cou et sur le bras droit, ainsi qu’une plaie ouverte sur le côté gauche du cou de la victime. L’expert a déclaré que les blessures pouvaient avoir été provoquées par quelque chose de dur tel que des ongles ou un poing et que l’examen histologique avait permis de conclure que le décès était dû à une asphyxie mécanique. L’asphyxie mécanique pouvait avoir été provoquée par la pendaison au moyen d’un tissu souple. Interrogé sur le point de savoir si une strangulation manuelle pouvait être la cause du décès, l’expert a indiqué qu’il n’avait constaté aucune griffure des tissus cervicaux ou de la peau mais que la fracture de la corne thyroïdienne pouvait résulter d’une pression manuelle.

8.4Le Comité note également la décision du tribunal de district de Suzak en date du 21 septembre 2005, qui est fondée sur la déposition de M. Mantybaev dans laquelle il avait affirmé que la victime s’était pendue dans la cellule au moyen de son pantalon de sport. Le jugement n’indique toutefois pas si d’autres moyens de preuve ont été examinés, et ne tient pas compte des contradictions entre les différentes déclarations de M. Mantybaev. Le Comité note que le frère de la victime a demandé avec insistance que le policier en second soit retrouvé et que l’affaire soit rejugée. Le tribunal a néanmoins conclu qu’un accord amiable était intervenu entre le commissaire principal et la famille de la victime, ce qui exonérait M. Mantybaev de sa responsabilité pénale. Saisi en appel, le tribunal régional de Djalal-Abad a constaté le 5 septembre 2006 que, au cours de l’enquête préliminaire, M. Mantybaev, M.Abdukaimov et la femme de la victime avaient donné des versions différentes du décès de la victime et que la procédure judiciaire n’avait pas permis de résoudre ces contradictions. Il a aussi précisé que la famille de la victime ne semblait pas satisfaite de l’accord intervenu puisqu’elle avait demandé que l’affaire soit rejugée. Il a conclu que l’affaire devait être rejugée sur la base d’un examen exhaustif et objectif de toutes les circonstances. Le Comité note que, dans son arrêt du 27 décembre 2006, la Cour suprême a conclu que la négligence pénale avait été établie par les dépositions du représentant de la victime et des témoins, ainsi que par l’expertise médico-légale et d’autres éléments du dossier, mais elle n’a toutefois pas donné plus de précisions sur son appréciation des éléments dont elle était saisie. Elle a aussi noté qu’il y avait eu un accord amiable entre la famille de la victime et l’accusé, qui avait versé à cette dernière 30000soms kirghizes, et que les arguments du conseil de la victime à propos des incohérences de l’enquête relevaient de la spéculation.

8.5Le Comité note le grief de l’auteur qui affirme que son fils est décédé pendant la garde à vue en raison de l’emploi excessif et inutile de la force par les policiers, étant donné qu’il était en bonne santé sur le plan physique et psychique, avant d’être placé en garde à vue, que, d’après la femme de la victime, cette dernière ne possédait aucun pantalon de sport qu’elle aurait pu utiliser pour se pendre, que le pantalon de sport produit comme moyen de preuve n’a jamais fait l’objet d’une expertise médico-légale, et qu’en raison de son état d’ivresse la victime n’avait ni la capacité physique ni le temps de se pendre. Le Comité note également la déclaration de l’auteur selon laquelle le fait d’avoir accepté une modeste contribution aux frais de funérailles ne signifiait pas qu’elle renonçait à son droit à l’établissement de la vérité concernant les circonstances du décès de son fils ni à son droit de faire traduire en justice ceux qui en sont responsables.

8.6À propos du grief de l’auteur relatif à la privation arbitraire de la vie de son fils, le Comité rappelle son Observation générale no6 sur le droit à la vie et sa jurisprudence, et réaffirme que l’État partie assume la responsabilité de prendre soin de la vie des individus qu’il arrête et place en détention et que les enquêtes pénales et les poursuites qui en découlent doivent faire partie des recours disponibles en cas de violation des droits de l’homme protégés notamment par l’article6. Il rappelle en outre son Observation générale no31 selon laquelle, lorsque les enquêtes révèlent la violation de certains droits reconnus dans le Pacte, les États parties doivent veiller à ce que les responsables soient traduits en justice.

8.7Le Comité rappelle que la charge de la preuve ne saurait incomber uniquement à l’auteur d’une communication, d’autant plus que celui-ci et l’État partie n’ont pas toujours un accès égal aux éléments de preuve et que, souvent, seul l’État partie dispose des informations nécessaires. Il ressort implicitement du paragraphe 2 de l’article 4 du Protocole facultatif que l’État partie doit enquêter de bonne foi sur toutes les allégations de violation du Pacte formulées contre lui et contre ses représentants, et donner au Comité les informations dont il dispose.

8.8Le Comité fait observer que l’État partie et ses autorités judiciaires n’ont pas expliqué comment ils étaient arrivés à la conclusion que la victime s’était suicidée pendant la garde à vue, compte tenu, en particulier, de la déposition de l’expert médico-légal, qui a déclaré que la fracture de la corne thyroïdienne pouvait être due à une pendaison au moyen d’un tissu souple ou à une pression manuelle, ainsi que de la déposition du médecin d’ambulance, qui n’a relevé aucune marque de strangulation mais a constaté des marques de doigt rouges sur le cou de la victime. Le Comité relève aussi que M. Mantybaev a donné trois versions différentes du décès de la victime; pourtant, le tribunal de première instance et la Cour suprême de l’État partie ont apparemment ignoré les incohérences entre ces différentes dépositions et se sont fondés uniquement sur la dernière déposition du commissariat principal, dans laquelle celui-ci indiquait avoir trouvé la victime pendue au moyen de son pantalon de sport dans la cellule. Le Comité fait observer en outre que les autorités judiciaires de l’État partie n’ont examiné aucune déposition du brigadier chef, M. Abdukaimov. Le Comité conclut que, étant donné les circonstances de l’espèce et en l’absence d’arguments convaincants de l’État partie réfutant l’allégation de l’auteur qui affirme que son fils a été tué pendant sa garde à vue, et compte tenu en outre des informations résultant de l’expertise médico-légale qui ne concordent pas avec les arguments de l’État partie, celui-ci est responsable de la privation arbitraire de la vie du fils de l’auteur, en violation du paragraphe 1 de l’article 6 du Pacte.

8.9Le Comité note le grief de l’auteur qui affirme que le rapport d’autopsie a fait état de diverses blessures sur le visage et le cou de son fils et que l’État partie n’a pas expliqué dans quelles circonstances ce dernier avait été blessé durant la garde à vue. Le Comité constate que les allégations de l’auteur au sujet des blessures de la victime sont confirmées par le rapport d’autopsie du 25 octobre 2004. Il note également que les autorités de l’État partie ne se sont pas intéressées à l’origine de ces blessures. Le Comité rappelle que l’État partie est responsable de la sécurité de toute personne placée en détention et que dès lors qu’une personne est blessée en détention il incombe à l’État partie d’apporter des éléments pour réfuter les allégations avancées. L’État partie n’a fourni aucune information indiquant qu’une enquête avait été menée par les autorités soit dans le contexte d’une instruction pénale, soit dans le cadre de la présente communication, pour répondre aux allégations précises et étayées de l’auteur. Dans ces conditions, le Comité considère que les griefs de l’auteur sont avérés et ont été corroborés par le rapport d’autopsie officiel, et conclut en conséquence à une violation de l’article 7 du Pacte à l’égard du fils de l’auteur.

8.10En ce qui concerne les griefs tirés du paragraphe 1 de l’article 6 et de l’article 7 du Pacte au motif que l’État partie avait manqué à son obligation procédurale de mener une enquête en bonne et due forme sur le décès de la victime et sur les allégations de torture et de prendre les mesures appropriées d’instruction et de réparation, le Comité rappelle que, selon sa jurisprudence établie, une enquête pénale suivie de poursuites est indispensable pour remédier aux violations de droits de l’homme tels que ceux qui sont protégés par le paragraphe 1 de l’article 6 et l’article 7 du Pacte. Le Comité relève que, dans le réquisitoire à fin d’informer daté du 9 novembre 2004, il est considéré comme établi que la victime s’est pendue et il n’est ainsi pas tenu compte de la thèse de l’auteur selon laquelle son fils a fait l’objet d’une exécution arbitraire. Le commissaire principal du commissariat de Bazar-Korgon, M. Mantybaev, a été reconnu coupable de négligence mais a été exonéré de sa responsabilité pénale au motif qu’un accord amiable aurait été conclu entre l’accusé et la famille de la victime. Le Comité note les allégations de l’auteur qui soutient que les autorités n’ont pas obtenu de description détaillée de la position du corps de la victime, qu’il n’a pas été procédé à une reconstitution de la pendaison présumée, que l’heure et le déroulement exacts des faits n’ont pas été établis, que le dossier médical de la victime n’a pas été demandé pour déterminer si elle avait des tendances suicidaires, qu’il n’a pas été ordonné d’expertise médico-légale du pantalon de sport, que la somme d’argent liquide que le fils de l’auteur aurait eue dans sa poche n’a jamais été retrouvée et que le point de savoir si le décès est dû à des actes de torture ou des mauvais traitements n’a jamais été déterminé. Le Comité note également que le brigadier-chef, M. Abdukaimov, n’a jamais été inculpé ni jugé. En l’absence de toute explication de l’État partie sur les incohérences de l’enquête pénale, et sur les raisons pour lesquelles un des deux responsables présumés n’a jamais été inculpé ni jugé, et au vu des documents détaillés dont il est saisi, le Comité conclut que l’État partie n’a pas enquêté en bonne et due forme sur les circonstances du décès du fils de l’auteur et sur les allégations de torture et de mauvais traitements, et qu’il a ainsi privé de fait l’auteur d’un recours, en violation des droits que l’auteur tient du paragraphe 3 de l’article 2 lu conjointement avec le paragraphe 1 de l’article 6 et l’article 7.

9.Le Comité des droits de l’homme, agissant en vertu du paragraphe 4 de l’article 5 du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, constate que les faits dont il est saisi font apparaître une violation, par le Kirghizistan, des droits garantis au paragraphe 1 de l’article 6 et à l’article 7 du Pacte, à l’égard du fils de l’auteur, et des droits garantis au paragraphe 3 de l’article 2 lu conjointement avec le paragraphe 1 de l’article 6 et l’article 7 du Pacte, à l’égard de l’auteur.

10.Conformément au paragraphe 3 a) de l’article 2 du Pacte, l’État partie est tenu d’assurer à l’auteur un recours utile. Ce recours devrait comprendre une enquête impartiale, efficace et approfondie sur les circonstances du décès de son fils, des poursuites à l’encontre des responsables et une entière réparation, sous la forme notamment d’une indemnisation appropriée. L’État partie est en outre tenu de veiller à ce que des violations analogues ne se reproduisent pas à l’avenir.

11.Étant donné qu’en adhérant au Protocole facultatif, l’État partie a reconnu que le Comité avait compétence pour déterminer s’il y avait eu ou non violation du Pacte et que, conformément à l’article 2 du Pacte, il s’est engagé à garantir à tous les individus se trouvant sur son territoire et relevant de sa juridiction les droits reconnus dans le Pacte, le Comité souhaite recevoir de l’État partie, dans un délai de cent quatre-vingts jours, des renseignements sur les mesures prises pour donner effet à ses constatations. L’État partie est invité en outre à rendre publiques les présentes constatations.

[Adopté en anglais (version originale), en espagnol et en français. Paraîtra ultérieurement en arabe, en chinois et en russe dans le rapport annuel du Comité à l’Assemblée générale.]