Nations Unies

CCPR/C/109/D/1955/2010

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

28 novembre 2013

Français

Original: anglais

Comité des droits de l ’ homme

Communication no 1955/2010

Constatations adoptées par le Comité à sa 109e session(14 octobre-1er novembre 2013)

Communication p résentée par:

Zeyad Khalaf Hamadie Al-Gertani (représenté par un conseil, Nedzmija Kukricar)

Au nom de:

L’auteur

État partie:

Bosnie-Herzégovine

Date de la communication:

4 juin 2010 (date de la lettre initiale)

Références:

Décision prise par le Rapporteur spécial en application des articles 92 et 97 du Règlement intérieur, communiquée à l’État partie le 14 juin 2010 (non publiée sous forme de document)

Date de l ’ adoption des constatations:

1er novembre 2013

Objet:

Expulsion vers l’Iraq

Questions de procédure:

Épuisement des recours internes, griefs insuffisamment étayés

Questions de fond:

Risque de torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants en cas de renvoi dans le pays d’origine; principe du non‑refoulement; immixtion arbitraire et illégale dans la vie privée et la vie de famille; interdiction de la discrimination

Articles du Pacte:

6, 7, 9 (par. 1, 2 et 4), 13, 14, 17, 23, 24 et 26

Articles du Protocole facultatif:

2 et 5 (par. 2 b))

Annexe

Constatations du Comité des droits de l’homme au titre du paragraphe 4 de l’article 5 du Protocole facultatifse rapportant au Pacte international relatif aux droitscivils et politiques (109e session)

concernant la

Communication no 1955/2010 *

Présentée par:

Zeyad Khalaf Hamadie Al-Gertani (représenté par un conseil, Nedzmija Kukricar)

Au nom de:

L’auteur

État partie:

Bosnie-Herzégovine

Date de la communication:

4 juin 2010 (date de la lettre initiale)

Le Comité des droits de l ’ homme, institué en vertu de l’article 28 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques,

Réuni le 1er novembre 2013,

Ayant achevé l’examen de la communication no 1955/2010 présentée par Zeyad Khalaf Hamadie Al-Gertani en vertu du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques,

Ayant tenu compte de toutes les informations écrites qui lui ont été communiquées par l’auteur de la communication et l’État partie,

Adopte ce qui suit:

Constatations au titre du paragraphe 4 de l’article 5du Protocole facultatif

1.1L’auteur de la communication est Zeyad Khalaf Hamadie Al-Gertani, de nationalité iraquienne, né le 30 mars 1970. Il affirme être victime d’une violation par l’État partie des droits qui lui sont reconnus aux articles 6, 7, 9 (par. 1, 2 et 4), 13, 14, 17, 23, 24 et 26 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Lorsqu’il a présenté la communication, l’auteur se trouvait dans un centre de rétention de migrants situé dans la partie est de Sarajevo, où il attendait d’être renvoyé en Iraq. L’auteur est représenté par un conseil. Le Protocole facultatif est entré en vigueur pour l’État partie le 1erjuin 1995.

1.2Le 14 juin 2010, en application de l’article 92 du Règlement intérieur du Comité, le Rapporteur spécial chargé des nouvelles communications et des mesures provisoires a demandé à l’État partie, au nom du Comité, de ne pas renvoyer l’auteur en Iraq tant que sa communication serait à l’examen. Le 15 décembre 2010, l’État partie a informé le Comité que le renvoi de l’auteur avait été suspendu pour donner suite à la demande du Comité et que, comme il avait été estimé qu’il constituait une menace pour la sécurité de l’État partie, l’auteur continuerait de faire l’objet de mesures de contrôle (surveillance) au centre de rétention de migrants de Sarajevo, qu’il lui était interdit de quitter.

Rappel des faits

2.1L’auteur est un Arabe sunnite. Il affirme que la famille de sa mère était liée au régime de Saddam Hussein et, en particulier, que son frère faisait partie de la Garde républicaine. Il indique qu’en 1989, il a commencé son service militaire dans l’armée iraquienne; qu’en février ou mars 1991, il a déserté pendant l’occupation du Koweït par l’Iraq et qu’il s’est alors caché dans la banlieue de Bagdad, chez des parents. L’auteur affirme qu’il a ensuite appris, par des membres de sa famille, qu’il avait été condamné à mort par contumace et que, suite à sa désertion, son frère avait été renvoyé de l’armée et condamné à un an d’emprisonnement.

2.2L’auteur affirme s’être dissimulé pendant neuf mois à Mossoul et à Arbil, dans le Kurdistan iraquien. Il est parvenu à obtenir un faux passeport délivré par les «autorités du Kurdistan iraquien» et, ne se sentant pas en sécurité, il est parti République islamique d’Iran, puis au Pakistan et au Soudan. Il s’est ensuite rendu au Yémen, où il a séjourné onze mois. Il a obtenu un faux passeport yéménite, sous le nom d’Abdulla Seid Ali Ba‑Awra, qui était le nom d’un de ses amis, et s’est rendu en République arabe syrienne puis en Turquie. Il a ensuite gagné la Croatie et est arrivé en Bosnie‑Herzégovine en septembre 1995.

2.3En novembre 1995, il a épousé une femme de nationalité bosnienne. Ils ont trois enfants mineurs. Il s’est établi en Bosnie-Herzégovine et a trouvé du travail dans le secteur des voitures d’occasion. Le 4 janvier 1996, le Ministère de l’intérieur lui a accordé la nationalité bosnienne, sous le nom d’Abdulla Seid Ali Ba-Awra.

2.4L’auteur affirme qu’en 2003, il a déclaré sa véritable identité au bureau du Ministère de l’intérieur dans le canton de Zenica-Doboj, où il a expliqué que son nom complet était Zeyad Khalaf Hamadie Al-Gertani. Il n’a toutefois pas été pris au sérieux car il n’avait aucune preuve de son identité réelle. En 2005, son frère étant parvenu à obtenir une carte d’identité pour lui à Bagdad, il a présenté ce document aux autorités de l’État partie. Le 29 janvier 2007, il a été déchu de la nationalité bosnienne par la Commission d’État pour la révision des décisions de naturalisation des ressortissants étrangers, au motif qu’il l’avait obtenue sous une fausse identité.

2.5Le 3 ou 4 mai 2009, par décision du Service des étrangers, en application du paragraphe 2 b) et c) de l’article 99 de la loi sur la circulation et le séjour des étrangers et sur l’asile, l’auteur a été appréhendé et placé dans un centre de rétention de migrants situé dans la partie est de Sarajevo jusqu’au 3juin 2009, au motif qu’il était considéré comme une menace pour le système juridique, l’ordre public, la paix et la sécurité de la Bosnie‑Herzégovine, et qu’il y avait des doutes raisonnablesquant à sa véritable identité. L’auteur a présenté un recours contre cette mesure auprès de la Cour de Bosnie‑Herzégovine. Le 8 mai 2009, le recours de l’auteur a été rejeté. Par la suite, la mesure de rétention a été reconduite périodiquement. L’auteur est depuis lors maintenu en rétention.

2.6Le 13 mai 2009, l’auteur a soumis une demande de protection internationale à la Direction chargée des questions d’asile au Ministère de la sécurité, conformément à la loi sur la circulation et le séjour des étrangers et sur l’asile, et a déclaré qu’il ne pouvait pas emmener sa femme et ses enfants, citoyens bosniens, dans un pays en guerre, où ils seraient exposés à des violations des droits de l’homme. Les 18 et 20 mai 2009, l’auteur a été interrogé par les autorités en présence de son avocat et d’un représentant du Haut‑Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés. Il a déclaré qu’il craignait d’être tué ou torturé s’il rentrait en Iraq, parce qu’il y avait été condamné à mort; il a ajouté que le pays était en proie à une guerre civile, que le Gouvernement était chiite, alors que lui était sunnite. Il a également affirmé que, lorsqu’il avait déserté, les personnes condamnées à la peine capitale par un tribunal militaire étaient immédiatement exécutées. C’était pour cette raison qu’il avait dû fuir rapidement et n’avait appris sa condamnation que plus tard, par des membres de sa famille. Il a déclaré que même s’il ne faisait pas l’objet d’une condamnation, il serait en danger en raison de son origine ethnique. Il a aussi indiqué qu’il appartenait à une famille sunnite connue, que plusieurs de ses parents avaient été exécutés et que sa famille s’était enfuie en République arabe syrienne ou à la frontière entre l’Iraq et la Syrie. En ce qui concernait l’utilisation d’un passeport yéménite au nom d’Abdulla Seid Ali Ba-Awra, l’auteur a déclaré qu’il n’avait pas utilisé son identité réelle pour se protéger des représailles du régime iraquien alors en place.

2.7Le 28 mai 2009, la demande d’asile de l’auteur a été rejetée par la Direction chargée des questions d’asile au Ministère de la sécurité, en application des articles 105, 106, par 4 a), 109, par. 6, 116, par 1 c) et 118 de la loi sur la circulation et le séjour des étrangers et sur l’asile, l’Agence du renseignement et de la sécurité de l’État partie ayant placé l’auteur sur la liste des personnes représentant une menace pour la sécurité de l’État. De surcroît, sa demande d’application du principe de non-refoulement n’était pas étayée, car ses récits manquaient de fiabilité et que les motifs fondant sa demande de protection n’étaient pas raisonnables. L’auteur avait un délai de quinze jours pour quitter le territoire de l’État partie. Il était précisé dans la décision que même si la situation des droits de l’homme en Iraq était inquiétante, les rapports internationaux indiquaient certes que les membres et sympathisants de l’ancien régime et ceux qui avaient été affiliés au Parti Baas couraient des risques, mais que le simple fait d’être sunnite n’exposait pas à de tels dangers. À ce sujet, la décision indiquait que l’auteur n’avait pas soutenu le régime précédent, comme le montrait sa désertion de l’armée; que son frère avait été exclu des rangs de la Garde républicaine et condamné par le régime précédent et que son allégation selon laquelle il appartenait à une famille sunnite connue n’était pas étayée. Sa supposée condamnation à mort − si condamnation il y avait eu − aurait été prononcée au milieu des années 1990, par les autorités d’un régime renversé en 2003 lorsque les chiites étaient arrivés au pouvoir, et rien n’indiquait que le nouveau régime exécuterait la sentence. De même, le 15 juillet 2007, un membre de la famille de l’auteur avait obtenu pour lui un certificat de nationalité à Bagdad. Le 11 mai 2008, l’auteur avait obtenu une copie de son passeport iraquien délivrée par l’ambassade d’Iraq à Vienne et valable jusqu’en 2016. De plus, quand les autorités de l’État partie avaient appliqué à l’auteur des mesures de contrôle (surveillance), sa femme avait pris contact avec l’ambassade d’Iraq à Belgrade pour demander de l’aide. Enfin, il était manifeste que, quelle que soit la violence qui régnait en Iraq, les sunnites ne faisaient pas l’objet de persécutions systématiques.

2.8Le 29 mai 2009, la Division chargée des questions d’asile du Ministère de la sécurité a prolongé les mesures de restriction de la liberté de circulation de l’auteur ainsi que l’interdiction de quitter les locaux du centre de rétention de migrants de Sarajevo pour une période de quatre-vingt-dix jours, à compter du 4 juin 2009.

2.9Le 10 juin 2009, l’auteur a formé auprès de la Cour de Bosnie-Herzégovine un recours contre le rejet de sa demande de protection internationale alléguant que celui-ci était arbitraire. Il a affirmé que la décision était le résultat d’une perception incorrecte et incomplète des risques qu’il courait en Iraq, que les conclusions selon lesquelles il représentait une menace pour l’ordre public ou la sécurité publique n’étaient ni justifiées ni étayées par la moindre preuve, et que, n’ayant pas tenu compte de la situation en Iraq en ce qui concernait les droits de l’homme, les autorités bosniennes n’avaient pas évalué correctement la situation factuelle et le risque auquel l’auteur serait exposé s’il était expulsé. L’auteur a fait valoir en outre que les rapports internationaux, consultés par les autorités, faisaient état d’un climat de violence, notamment dû aux agissements de milices sectaires sous l’influence des partis, et de violations des droits de l’homme. Quant à la situation de sa famille, il a affirmé que les autorités ne s’étaient pas posé la question de savoir quelles répercussions son départ aurait sur sa famille s’il était renvoyé, que l’assimilation de sa femme et de ses enfants dans la société iraquienne ne serait pas possible parce qu’ils étaient Bosniens, qu’ils ne parlaient pas l’arabe et qu’ils n’avaient aucun lien avec l’Iraq.

2.10Le 26 août 2009, le Ministère de la sécurité a prolongé les mesures de restriction de la liberté de circulation prises contre l’auteur pour une période de quatre-vingt-dix jours, compte tenu du fait que le recours qu’il avait formé était encore en cours d’examen.

2.11Le 18 novembre 2009, la Cour de Bosnie-Herzégovine a rejeté le recours formé par l’auteur contre la décision de le déchoir de la nationalité bosnienne. L’auteur a alors fait appel de cette décision auprès de la Cour constitutionnelle. Au moment où l’auteur a soumis sa communication au Comité, son appel était encore en cours d’examen.

2.12Le 23 novembre 2009, la Cour de Bosnie-Herzégovine a rejeté le recours de l’auteur contre le refus de protection internationale. La Cour a déclaré que lorsqu’il avait rejeté la demande de protection internationale formulée par l’auteur au titre des articles 105, 106 4) et 118 de la loi sur la circulation et le séjour des étrangers et sur l’asile, le Ministère de la sécurité avait examiné si l’auteur remplissait les conditions nécessaires pour que la protection lui soit accordée, conformément au principe de non-refoulement. Néanmoins, après examen complet et détaillé des informations données par l’auteur, le Ministère avait conclu que ses allégations concernant la crainte de subir des persécutions étaient sans fondement. La Cour a souligné que l’auteur avait quitté le territoire de l’État partie à plusieurs reprises en 1995, qu’avec sa famille, il s’était rendu en vacances à Dubaï et qu’il était allé en Hongrie où il avait présenté une demande d’asile qui avait été ensuite retirée. Il n’avait pas apporté de preuve de sa condamnation à mort au Ministère de la sécurité et, au cours des interrogatoires, il avait à maintes reprises évité de donner des réponses précises aux questions posées par les autorités. Sachant que l’auteur était considéré comme une menace pour l’ordre public et la sécurité de l’État, l’ordre de quitter le territoire de l’État partie était légal et ne constituait pas une violation du droit de l’auteur à la vie de famille et à la vie privée, car l’exercice de ces droits devait être compatible avec l’intérêt public et la sécurité de l’État. Comme il s’agissait d’une décision définitive, le 30 novembre 2009, le Ministère de la sécurité a pris contre l’auteur une mesure de contrôle (surveillance), et l’a placé dans le centre de rétention de migrants de Sarajevo, sans autorisation de sortie. Cette mesure a ensuite été renouvelée tous les trente jours.

2.13Le 15 décembre 2009, l’auteur a présenté un recours auprès de la Cour constitutionnelle contre l’arrêt de la Cour de Bosnie-Herzégovine, ainsi qu’une demande de mesure provisoire visant la suspension de l’exécution de l’ordre d’expulsion. L’auteur affirmait que l’arrêt de la Cour de Bosnie-Herzégovine était illégal parce qu’il violait ses droits fondamentaux: interdiction de la torture, peine ou traitement inhumain ou dégradant, droit à la vie privée et à la vie de famille, droit à un recours utile, droit d’exercer librement ses droits sans subir de discrimination, droit de contester l’ordre d’expulsion et droit à un recours en révision, énoncés dans la Constitution et dans la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. L’auteur réitérait ses griefs et faisait observer que le Ministère de la sécurité n’avait pas expliqué pourquoi il considérait que l’indication «Abdulla Ba-Awra, né en 1974 au Koweït», qui apparaissait sur la liste des personnes classées comme constituant une menace pour la sécurité de l’État, correspondait en fait à l’auteur (Zeyad Khalaf Hamadie Al-Gertani, né le 30 mars 1970 à Bagdad). Il faisait également valoir qu’on ne pouvait pas renvoyer quelqu’un dans un lieu où il serait soumis à la torture ou à d’autres mauvais traitements graves, même s’il n’était pas le bienvenu ou qu’il était dangereux pour l’État qui examinait sa demande de protection internationale.

2.14Le 25 février 2010, la Cour constitutionnelle a rejeté la demande de l’auteur visant la suspension de l’exécution de l’ordre d’expulsion au motif qu’aucune décision n’avait été prise concernant son expulsion forcée du territoire de l’État partie s’il ne le quittait pas volontairement.

2.15Le 4 mai 2010, le Service des étrangers du Ministère de la sécurité a émis contre l’auteur un ordre d’expulsion assorti d’une d’interdiction de retour et d’établissement en Bosnie-Herzégovine d’une durée de cinq ans. L’auteur a fait appel de cet ordre le 12 mai 2010. Le 13 mai 2010, il a présenté une deuxième demande de mesure provisoire auprès de la Cour constitutionnelle, au motif qu’un ordre d’expulsion avait été émis contre lui. Le 28 mai 2010, le Ministère de la sécurité a rejeté l’appel formé contre l’ordre d’expulsion.

Teneur de la plainte

3.1L’auteur affirme que son renvoi en Iraq par l’État partie constituerait une violation des articles 6, 7, 13, 14, 17, 23, 24 et 26 du Pacte.

3.2D’après l’auteur, les autorités de l’État partie n’ont pas évalué correctement les risques qu’il courrait s’il était renvoyé en Iraq, notamment le risque réel d’être arrêté immédiatement, torturé et exécuté. Compte tenu de ces risques, son renvoi en Iraq par l’État partie constituerait une violation des articles 6 et 7 du Pacte. L’auteur affirme que les Arabes sunnites courent un risque particulier d’être arrêtés, torturés et exécutés pour leur prétendu lien avec des groupes armés sunnites ou leur appui à de tels groupes, qu’en Iraq le nombre d’exécutions appliquées de prétendus insurgés condamnés à mort est en hausse et que les autorités iraquiennes le considéreront comme lié au régime précédent ou à des groupes armés. Compte tenu des circonstances et de sa situation personnelle et familiale, il attirerait l’attention des autorités dès son arrivée à l’aéroport et serait considéré comme une menace potentielle, surtout s’il était renvoyé par la force de Bosnie-Herzégovine. Il court un risque réel d’être exécuté pour menace à la sécurité interne de l’Iraq, au seul motif qu’il est un Arabe sunnite lié à l’ancien régime et parce qu’il a été placé en rétention pour des motifs de sécurité en Bosnie-Herzégovine. De plus, la condamnation à la peine capitale qui a été prononcée contre lui pour désertion de l’armée iraquienne serait encore applicable, quand bien même elle a été décidée sous le régime précédent.

3.3En ce qui concerne les articles 13 et 14, lus conjointement avec le paragraphe 3 de l’article 2, l’auteur déclare que sa demande de protection internationale a été rejetée au motif qu’il représentait une menace pour l’ordre public et la sécurité nationale, mais qu’on ne lui a exposé aucun des motifs pour lesquels on estimait qu’il constituait une menace. Aucun fait, sans parler d’élément de preuve, concernant cette menace ne lui a été exposé et la question n’a même pas été mentionnée dans le cadre des procédures relatives à sa demande de protection internationale. Les autorités ont seulement évoqué une liste de noms de personnes qui, selon elles, représentaient une menace pour la sécurité. L’auteur fait valoir que l’allégation de menace pour la sécurité doit être corroborée si elle sert de fondement à une décision d’expulsion ou de détention prolongée. Il estime que les garanties procédurales qui sont définies à l’article 13 en ce qui concerne les expulsions n’ont donc pas été respectées et que sa cause n’a pas été entendue équitablement et publiquement, comme l’exige l’article 14 du Pacte.

3.4En ce qui concerne ses griefs de violation des articles 17, 23 et 24 du Pacte, l’auteur affirme que son placement en rétention et son éventuel renvoi constituent une immixtion arbitraire ou illégale dans sa vie privée et dans sa vie de famille. Sa femme et ses enfants mineurs ont la nationalité bosnienne, ne parlent pas l’arabe et n’ont aucun lien avec la culture iraquienne. Ils ne peuvent pas le suivre dans un pays en proie à la guerre civile, où la sécurité est déplorable. Dans de telles circonstances, l’exécution de l’ordre d’expulsion entraînerait dans la pratique l’éclatement de sa famille pour plusieurs années, et aurait des répercussions négatives sur le bien-être de ses enfants. À ce sujet, les autorités n’ont pas évalué correctement la gravité de l’immixtion dans la vie de famille de l’auteur ni les intérêts supérieurs de l’enfant, tels que définis à l’article 3 de la Convention relative aux droits de l’enfant. Renvoyant à l’Observation générale no 15 (1986) du Comité concernant la situation des étrangers au regard du Pacte, l’auteur rappelle que le Pacte ne reconnaît certes pas aux étrangers le droit d’entrer sur le territoire d’un État partie ou d’y séjourner et qu’en principe, il appartient à l’État de décider qui il admet sur son territoire, mais que, dans certaines situations, un étranger peut bénéficier de la protection du Pacte même en ce qui concerne l’entrée ou le séjour: tel est le cas si des considérations relatives au respect de la vie de famille entrent en jeu.

3.5En ce qui concerne le grief tiré de l’article 26, l’auteur affirme que la détermination de la menace pour la sécurité nationale faite par les autorités, qui a été le motif principal de la décision de le placer en rétention et de l’expulser du pays où il vivait depuis près de quinze ans, était fondée sur des préjugés à l’encontre des personnes d’origine arabe pratiquant l’islam.

Observations de l’État partie sur la recevabilité de la communication

4.1Le 13 octobre 2010, l’État partie a fait part de ses observations sur la recevabilité de la communication.

4.2L’État partie souligne que l’auteur est entré illégalement en Bosnie-Herzégovine, sous le nom d’une autre personne, Abdulla Ba Awra Said Ali, en se faisant passer pour un ressortissant yéménite, et muni d’un passeport yéménite. Au vu des documents de l’ambassade d’Iraq, de l’Organisation internationale de police criminelle (Interpol) et d’autres éléments de preuve, les autorités ont conclu que l’identité réelle de l’auteur était Zeyad Khalaf Hamadie Al-Gertani. Les décisions de le déchoir de la nationalité bosnienne et de rejeter sa demande de protection internationale étaient fondées entre autres sur la menace qu’il représentait pour l’ordre public, la paix et la sécurité nationale, déterminée par l’Agence du renseignement et de la sécurité de l’État dans un document classé «confidentiel». L’auteur n’a demandé la protection internationale que deux ans après que la nationalité bosnienne lui a été retirée par l’État partie et lorsque certaines mesures de contrôle lui ont été imposées. L’État partie souligne que le but de la demande de l’auteur était de retarder son expulsion et qu’il s’agissait là d’un abus du droit de demander une protection internationale.

4.3L’auteur a formé un recours auprès de la Cour de Bosnie-Herzégovine contre la décision rendue par le Ministère de la sécurité le 28 mai 2010, dans laquelle celui-ci confirmait l’ordre d’expulsion émis contre lui. Néanmoins, au moment où l’État partie a soumis ses observations, la décision de la Cour était encore attendue.

4.4Le 28 juillet 2010, l’Office des étrangers a prolongé jusqu’au 5 septembre 2010 la mesure de contrôle (surveillance) concernant le placement de l’auteur en centre de rétention de migrants et la limitation de son droit de circuler librement. L’auteur a fait appel de cette décision auprès du Ministère de la sécurité. Le 29 juillet 2010, son appel a été rejeté. L’auteur a alors engagé une procédure auprès de la Cour de Bosnie-Herzégovine contre cette décision. Au moment où l’État partie a présenté ses observations, la Cour n’avait pas encore statué sur la question. L’État partie note également que l’ouverture d’une procédure contre la décision d’expulsion n’avait pas d’effet suspensif et n’en retardait donc pas l’exécution.

4.5Au cours de la procédure, le Ministère de la sécurité et la Cour de Bosnie‑Herzégovine ont examiné toutes les allégations de l’auteur. Les autorités ne se sont pas limitées à conclure que celui-ci constituait une menace pour la sécurité de l’État, mais ont également examiné sa requête à la lumière de l’article 91 de la loi sur la circulation et le séjour des étrangers et sur l’asile, et évalué le danger ou les risques allégués auxquels l’auteur serait exposé s’il était renvoyé en Iraq. L’État partie affirme qu’il n’a pas été porté atteinte aux droits de l’auteur au titre des articles 6, 13, 14, 17, 23, 24 et 26 du Pacte lors de l’examen de sa demande de protection internationale. Il ajoute qu’il pouvait imposer des restrictions au droit de l’auteur de circuler librement si des circonstances exceptionnelles l’exigeaient, par exemple pour protéger la sécurité nationale ou l’ordre public. De plus, la participation des autorités publiques à la protection des intérêts nationaux est une nécessité dans une société démocratique. Toute décision prise pour protéger les intérêts nationaux l’emporte sur le droit à la vie privée et le droit à la vie de famille.

4.6Au vu de ce qui précède, l’État soutient que, faute d’être suffisamment étayée, la communication de l’auteur devrait être déclarée irrecevable.

Observations de l’État partie sur le fond

5.1Le 15 décembre 2010, l’État partie a fait part de ses observations sur le fond de la communication.

5.2L’État partie indique qu’après la confirmation par la Cour de Bosnie‑Herzégovine, le 23 novembre 2009, du rejet de la demande de protection internationale présentée par l’auteur, il a continué d’appliquer des mesures de contrôle (surveillance) et interdit à l’auteur de quitter le centre de rétention de migrants de Sarajevo, ajoutant que ces mesures, prolongées de mois en mois par le Service des étrangers, avaient été examinées par le Ministère de la sécurité et par la Cour de Bosnie-Herzégovine, instances d’appel.

5.3L’État partie note que la décision de renvoyer l’auteur dans son pays d’origine est conforme aux articles 16, 88, par. 1, et 117 de la loi sur la circulation et le séjour des étrangers et sur l’asile, qui disposent que lorsqu’une demande de protection internationale est rejetée en vertu d’une décision définitive contraignante, l’intéressé est expulsé du pays. En ce qui concerne les mesures de contrôle, l’article 99 de la même loi dispose que l’étranger est placé sous surveillance pour que la décision d’expulsion puisse être exécutée et s’il y a des motifs raisonnables de croire qu’il constitue une menace pour l’ordre public ou la sécurité publique de l’État. En application de l’article 102, une telle mesure de contrôle ne peut durer plus de cent quatre‑vingts jours. Dans des circonstances exceptionnelles, s’il n’est pas possible d’éloigner l’étranger dans le délai de cent quatre‑vingts jours, la durée totale de la mesure de surveillance peut être prolongée pour une période supérieure à cent quatre‑vingts jours.

5.4L’État partie affirme de nouveau que le Ministère de la sécurité et la Cour de Bosnie-Herzégovine ont examiné et évalué les griefs de l’auteur, selon lesquels il courrait un risque grave de subir un traitement contraire au Pacte s’il était renvoyé en Iraq.

5.5À propos du grief de l’auteur concernant son droit à la vie privée et à la vie de famille, l’État partie affirme que ce droit n’est pas absolu et qu’il peut être restreint pour des raisons touchant à l’intérêt public. Les faits établis montrent précisément que l’auteur représente une «menace pour la société». Qui plus est, si le grief de l’auteur était correct, cela reviendrait à conférer une sorte d’immunité permanente aux étrangers se trouvant dans des situations analogues, ce qui serait contraire à la protection du droit à la vie privée et à la vie de famille.

5.6Les mesures de contrôle et de surveillance prises contre l’auteur ont été adoptées par les organes compétents, dans le cadre de la procédure légale prévue. Leur durée et leur prolongation au-delà de cent quatre‑vingts jours sont une conséquence des procédures engagées par l’auteur et de la décision prise par les institutions qui ont examiné ses demandes, dont la demande de mesures provisoires du Comité. Toutes ces mesures, ainsi que la décision relative à la demande de protection internationale faite par l’auteur, ont été examinées et analysées de manière équitable et approfondie par les autorités administratives et judiciaires.

5.7Pour ce qui est des griefs de violation des droits que l’auteur tient des articles 24 et 26 du Pacte, l’État partie estime qu’ils ne sont pas fondés. L’auteur a pu engager des procédures administratives et judiciaires pour contester toutes les décisions qui avaient été prises à son sujet sans discrimination, conformément à la loi sur la circulation et le séjour des étrangers et sur l’asile. Le Service des étrangers n’a pris aucune mesure relative à l’expulsion de l’auteur avant que la décision concernant sa demande de protection internationale ne devienne finale. De plus, dans ses allégations, l’auteur ne démontre pas, au-delà de la simple affirmation, en quoi il a été porté atteinte aux droits de ses enfants.

Commentaires de l’auteur sur les observations de l’État partie

6.1Dans ses réponses datées du 31 décembre 2010 et du 4 mars 2011, l’auteur a donné ses commentaires au sujet des observations de l’État partie sur la recevabilité et sur le fond.

6.2L’auteur informe le Comité qu’il a fait appel auprès de la Cour de Bosnie-Herzégovine de la décision confirmant l’ordre d’expulsion prise par le Ministère de la sécurité le 28 mai 2010 et qu’il a demandé que des mesures provisoires soient prises car la demande d’appel n’avait pas d’effet suspensif automatique au titre du paragraphe 3 de l’article 4 de la loi sur la circulation et le séjour des étrangers et sur l’asile, et du paragraphe 1 de l’article 18 de la loi sur les conflits administratifs. Néanmoins, la Cour de Bosnie-Herzégovine a refusé de prendre une décision concernant la demande de mesures provisoires et a simplement renvoyé la question au Ministère de la sécurité, qui a rejeté cette demande le 11 juin 2010. Par conséquent, le recours formé auprès de la Cour de Bosnie-Herzégovine n’a pas constitué un recours utile pour contester les ordres d’expulsion du territoire. De plus, le fait de renvoyer l’examen de la demande de mesures provisoires à une partie à la procédure d’appel − le Ministère − porte gravement atteinte au droit à une procédure équitable.

6.3En ce qui concerne sa demande de mesures provisoires auprès de la Cour constitutionnelle, l’auteur estime qu’en raison du délai excessif nécessaire à la Cour constitutionnelle pour rendre un arrêt sur ce type de demande, dans la pratique, ce recours ne peut pas être considéré comme un recours utile pour contester une décision d’expulsion qui constituerait une violation des droits qu’il tient des articles 6 et 7 du Pacte. Lorsque l’ordre d’expulsion a été émis à son encontre, l’auteur a porté l’affaire devant la Cour constitutionnelle et a demandé des mesures provisoires. Toutefois, lorsqu’il a soumis sa communication au Comité, le 31 décembre 2010, aucune décision n’avait encore été prise par la Cour. Enfin, l’auteur soutient que, comme l’État partie l’a reconnu dans ses observations, la procédure d’appel contre la décision d’exécuter l’expulsion n’a pas d’effet suspensif sur l’ordre d’expulsion conformément aux articles 4 (par. 3), 89 (par. 5) et 93 (par. 2 et 3) de la loi sur la circulation et le séjour des étrangers et sur l’asile.

6.4Le 27 novembre 2010, la Cour constitutionnelle a rendu son arrêt au sujet de l’appel formé par l’auteur contre la décision du Ministère de la sécurité en date du 28 mai 2009, et contre l’arrêt de la Cour de Bosnie-Herzégovine en date du 23 novembre 2009, qui rejetaient tous deux la demande de protection internationale présentée par l’auteur. La Cour constitutionnelle a rejeté la demande de l’auteur et déclaré qu’«il ne pouvait y avoir de lien entre la procédure administrative/judiciaire à l’issue de laquelle la demande de protection internationale présentée par le requérant avait été rejetée, et la violation du droit de ne pas être soumis à la torture ou à un traitement inhumain ou dégradant». La Cour constitutionnelle a également conclu que l’ordre d’expulsion et le refus d’accorder la protection internationale ne constituaient pas une immixtion arbitraire dans la vie de famille de l’auteur. Compte tenu de ce qui précède, l’auteur affirme qu’il a épuisé tous les recours internes et qu’il n’y a plus aucun recours utile à sa disposition au niveau national pour empêcher son renvoi en Iraq.

6.5L’auteur soutient qu’au cours des procédures, on ne lui a jamais présenté de faits ou d’éléments de preuve concernant la menace qu’il constituait pour la sécurité nationale ou l’ordre public. Ni le Ministère de la sécurité ni la Cour de Bosnie-Herzégovine n’ont donné les motifs pour lesquels il constituait une menace pour la sécurité de l’État partie, se limitant à citer une liste dans laquelle, selon leurs dires, figurait son nom. Même si son nom figurait effectivement sur cette liste, l’État partie ne pouvait pas ne pas tenir compte du fait qu’il était tenu de ne pas renvoyer ni expulser une personne vers un pays où elle serait soumise à un traitement contraire aux articles 6 et 7 du Pacte. L’auteur affirme que l’État partie ne formule aucune observation au sujet du risque auquel il serait soumis s’il était expulsé. De plus, comme l’État partie a pris contact avec les autorités iraquiennes aux fins de le renvoyer en Iraq, il est clair que les autorités iraquiennes sont parfaitement au courant des circonstances de son éventuel renvoi, ce qui accroît les risques qu’il soit arrêté à son arrivée en Iraq.

6.6L’auteur affirme que sa communication initiale n’évoquait aucunement le caractère arbitraire ou la durée excessive des mesures de contrôle qui lui étaient appliquées, en particulier son maintien en rétention, parce que la Cour constitutionnelle restait saisie de ces questions et qu’il considérait que cette procédure était un recours utile. Néanmoins, face aux observations réitérées de l’État partie concernant ces mesures et au fait qu’il est en rétention depuis vingt‑deux mois, l’auteur fait valoir que dans la pratique les procédures engagées auprès de la Cour constitutionnelle se sont révélées inefficaces pour ce qui est de le protéger contre une violation de l’article 9 du Pacte.

6.7L’auteur estime douteux l’argument selon lequel son placement initial en rétention a servi à garantir la possibilité de l’expulser et considère qu’il a plutôt été décidé pour des raisons préventives fondées sur la menace, non corroborée, qu’il était censé représenter pour la sécurité. Il fait observer que, lorsqu’elles l’ont placé dans le centre de rétention, les autorités n’avaient pas encore engagé la procédure d’exécution de l’ordre d’expulsion.

6.8Le caractère arbitraire du placement de l’auteur en rétention se dégage aussi du fait que le Ministère de la sécurité n’a imposé aucune mesure de contrôle à l’époque où il a été déchu de la nationalité bosnienne en 2007. Alors que les circonstances n’avaient pas fondamentalement changé, plus de deux ans plus tard, le 4 mai 2009, il a été considéré comme une menace pour la sécurité de l’État partie et placé dans un centre de rétention. L’analyse de cette mesure faite par la Cour de Bosnie-Herzégovine est, elle aussi, arbitraire. Dans son arrêt du 30 avril 2010, la Cour a accepté la demande d’appel contre la décision prise par le Ministère de la sécurité en date du 27 avril 2010, qui prolongeait la rétention de l’auteur, parce que cette décision posait des problèmes au regard de l’article 5 de la Convention européenne des droits de l’homme. Le 4 mai 2010, le même ministère a rendu une nouvelle décision par laquelle il prolongeait la rétention. Paradoxalement, alors que le Ministère n’avait tenu aucun compte de l’arrêt de la Cour du 30 avril 2010, l’appel formé par l’auteur contre cette dernière décision a été rejeté par la Cour le 12 mai 2010. Cette approche incohérente de la Cour confirme le fait que la rétention de l’auteur équivaut à une privation de liberté arbitraire, contraire aux paragraphes 1, 2 et 4 de l’article 9 du Pacte.

Observations complémentaires de l’État partie

7.1Le 21 juin 2011 et les 10 janvier, 18 mai et 9 octobre 2012, l’État partie a présenté des observations complémentaires.

7.2L’État partie maintient que les allégations de l’auteur relatives aux mesures de surveillance dans le centre de rétention de migrants de Sarajevo sont imprécises. La prolongation de sa rétention est raisonnable et justifiée par des raisons d’intérêt public et de sécurité publique. Dans les décisions qui ont imposé puis prolongé ces mesures, la surveillance a d’abord été imposée aux fins d’obtenir l’identité de l’auteur et parce qu’il était considéré comme une menace pour la sécurité de l’État partie. Par la suite, cette mesure a été justifiée par la nécessité de garantir l’exécution de l’ordre d’expulsion et parce que l’auteur représentait toujours, aux yeux de l’État, une menace pour la sécurité nationale. Cette mesure a aussi été prolongée pour donner suite à la demande de mesures provisoires formulée par le Comité et tenir compte des conclusions des autorités, qui continuaient de penser que l’auteur représentait une menace pour la sécurité de l’État partie; et du fait qu’il n’avait pas de permis de séjour en Bosnie-Herzégovine. L’auteur a eu la possibilité de contester ces mesures auprès du Ministère de la santé et de la Cour de Bosnie‑Herzégovine. La durée de la mesure de surveillance ne peut donc pas être reprochée à l’État partie. En outre, malgré la complexité de l’affaire, les décisions des autorités concernant les mesures de surveillance, la demande de protection internationale présentée par l’auteur et l’ordre d’expulsion ainsi que les appels formés ensuite par l’auteur ont été prises rapidement.

7.3Le Service des étrangers n’était pas obligé d’informer l’auteur des motifs pour lesquels il constituait une menace pour la sécurité de l’État, puisque les motifs légaux d’imposition de la mesure de surveillance avaient été clairement présentés dans la décision initiale, en date du 4 mai 2009. À ce sujet, la mesure n’était pas fondée sur le fait que la nationalité bosnienne de l’auteur faisait l’objet d’une procédure de déchéance, mais sur des informations et des éléments de preuve pertinents qui concouraient à démontrer qu’il existait des doutes raisonnables quant à son identité. Par conséquent, la décision d’imposer une mesure de surveillance et toutes les décisions prises aux fins de prolonger cette mesure ont été adoptées dans le respect de l’article 9 du Pacte.

Observations complémentaires de l’auteur

8.1Le 15 novembre 2011 et les 27 mars et 23 juillet 2012, l’auteur a envoyé des observations complémentaires. Il répète les griefs qu’il avait précédemment formulés, au sujet du risque qu’il courrait s’il était renvoyé en Iraq, du caractère arbitraire et de la durée de la mesure de surveillance qui lui est imposée et, enfin, de son droit à une vie de famille.

8.2L’auteur fait valoir que la lenteur des procédures et la durée de la mesure de surveillance ne peuvent pas lui être imputées. Les procédures qu’il a engagées étaient fondées sur le droit à un recours utile qu’il tient du paragraphe 3 de l’article 2 du Pacte.

8.3L’auteur remet en cause, au regard de l’article 9 du Pacte, la légalité de la prolongation de sa rétention après le 14 juin 2010, date à laquelle le Comité a adressé une demande de mesures provisoires à l’État partie pour lui demander de ne pas l’expulser tant que sa communication était à l’examen. De plus, son placement en rétention au moment où les autorités ont examiné sa demande de protection internationale n’était pas conforme à la loi et était contraire à l’article 143 de la loi sur la circulation et le séjour des étrangers et sur l’asile, qui prévoit que le chapitre VI (sur l’accueil et la surveillance/rétention des étrangers) n’est pas applicable aux demandeurs d’asile. Pendant l’examen de sa demande, les autorités ne pouvaient lui imposer que des mesures ayant pour effet de restreindre sa liberté de mouvement, ce qui n’incluait pas la privation de liberté pour une période de cent quatre‑vingts jours. Il y a donc eu violation des droits qu’il tient des paragraphes 1, 2 et 4 de l’article 9 du Pacte.

Délibérations du Comité

Examen de la recevabilité

9.1Avant d’examiner toute plainte soumise dans une communication, le Comité des droits de l’homme doit, conformément à l’article 93 de son règlement intérieur, déterminer si la communication est recevable en vertu du Protocole facultatif se rapportant au Pacte.

9.2Le Comité s’est assuré, comme il est tenu de le faire conformément aux dispositions du paragraphe 2 a) de l’article 5 du Protocole facultatif, que la même affaire n’était pas en cours d’examen devant une autre instance internationale d’enquête ou de règlement.

9.3En ce qui concerne la condition fixée au paragraphe 2 b) de l’article 5 du Protocole facultatif, le Comité renvoie à sa jurisprudence et rappelle qu’il détermine si les recours ont été épuisés au moment où il examine la communication. En l’espèce, le Comité constate que la demande de protection internationale présentée par l’auteur a été rejetée par la Cour de Bosnie-Herzégovine le 23 novembre 2009 et que la Cour constitutionnelle a conclu que cette décision était légale le 27 novembre 2010. Le Comité prend note du fait que l’État partie reconnaît que la procédure d’appel contre l’ordre d’expulsion rendu par le Service des étrangers le 4 mai 2010 ne suspend pas l’expulsion; il observe également que les demandes de mesures provisoires faites par l’auteur, soumises dans le cadre de ces procédures, ont été rejetées. Le Comité note aussi que l’auteur a formé des recours contre les mesures de surveillance (ordonnances de mise en détention) et leur prolongation auprès des autorités administratives et judiciaires, sans succès. En l’absence de toute observation de l’État partie à ce sujet, le Comité conclut que le paragraphe 2 b) de l’article 5 du Protocole facultatif ne fait pas obstacle à la recevabilité de la communication.

9.4Le Comité prend note des griefs que l’auteur tire des articles 6, 7, 13 et 14 du Pacte, à savoir que les autorités n’ont pas évalué correctement le risque auquel il serait soumis s’il était renvoyé en Iraq et qu’elles n’ont pas tenu compte de sa situation personnelle et des événements qu’il avait vécus en Iraq avant son départ. Il affirme aussi que sa demande de protection internationale a été refusée au motif qu’il représentait une menace pour l’ordre public et la sécurité nationale, et qu’il ne lui a été présenté aucun fait ni aucun élément de preuve concernant cette menace, les autorités s’étant contentées d’indiquer que son nom figurait sur une liste de personnes qui, selon elles, représentaient une menace pour la sécurité. Dans ce contexte, son droit à un recours utile pour contester la légalité de son expulsion vers l’Iraq a été sérieusement mis à mal.

9.5Le Comité observe que lors de l’examen de sa demande de protection internationale, l’auteur a été interrogé par les autorités à deux reprises, les 18 et 20 mai 2009, en présence de son conseil et d’un représentant du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés; durant la procédure, il n’a donné aucun document pour étayer ses griefs concernant le risque auquel il serait exposé s’il était expulsé vers l’Iraq, en particulier eu égard à sa condamnation à mort. Le Comité relève aussi que, grâce à sa famille, l’auteur a été en mesure d’obtenir des documents d’identité des autorités iraquiennes à Bagdad et de les présenter dans le cadre de la procédure de déchéance de la nationalité bosnienne. Après le placement en rétention de l’auteur, sa femme a contacté l’ambassade iraquienne pour obtenir de l’aide. Le Comité remarque également que la demande de protection internationale formulée par l’auteur a été examinée par le Ministère de la sécurité puis par la Cour de Bosnie-Herzégovine et la Cour constitutionnelle. En rejetant cette demande, le Ministère de la sécurité et les tribunaux ne se sont pas seulement intéressés aux préoccupations exprimées concernant la sécurité de l’État partie; ils ont aussi examiné les griefs de l’auteur concernant le risque éventuel qu’il courrait s’il était expulsé vers l’Iraq, et sont parvenus à la conclusion que l’auteur n’avait pas besoin de protection internationale. À la lumière de ces considérations, le Comité estime que les griefs tirés par l’auteur des articles 6, 7, 13 et 14 n’ont pas été suffisamment étayés aux fins de la recevabilité et conclut qu’ils sont irrecevables en vertu de l’article 2 du Protocole facultatif.

9.6Le Comité prend aussi note du grief présenté par l’auteur au titre de l’article 26, à savoir que la détermination selon laquelle il constituait une menace pour la sécurité nationale était fondée sur des préjugés contre les personnes d’origine arabe pratiquant l’islam. Il considère que ce grief n’a pas été suffisamment étayé aux fins de la recevabilité et le déclare irrecevable en vertu de l’article 2 du Protocole facultatif.

9.7Le Comité prend note des griefs que l’auteur tire des paragraphes 1, 2 et 4 de l’article 9 du Pacte selon lesquels le 4 mai 2009 il a été placé sous contrôle (surveillance) dans un centre de rétention de migrants à Sarajevo au motif qu’il représentait une menace pour la sécurité nationale de l’État partie, qu’il est retenu dans ce centre depuis lors et que malgré le recours qu’il a formé auprès du Ministère de la sécurité et des tribunaux contre cette mesure et les décisions en vertu desquelles elle a été prolongée, en pratique, il a été incapable de contester les motifs sur lesquels reposait cette mesure car l’État partie ne les lui a pas exposés, pas plus que les éléments de preuve qui l’avaient amené à conclure qu’il constituait une telle menace. Le Comité considère qu’aux fins de la recevabilité, l’auteur a fourni assez de détails et d’arguments en faveur des griefs qu’il a présentés au titre des paragraphes 1, 2 et 4 de l’article 9 du Pacte et les déclare recevables.

9.8S’agissant des griefs de l’auteur au titre des articles 17, 23 et 24 du Pacte, le Comité considère qu’aux fins de la recevabilité, l’auteur a fourni assez de détails et d’arguments et les déclare recevables.

Examen au fond

10.1Conformément au paragraphe 1 de l’article 5 du Protocole facultatif, le Comité des droits de l’homme a examiné la présente communication en tenant compte de toutes les informations qui lui ont été communiquées.

10.2En ce qui concerne le grief tiré par l’auteur des paragraphes 1, 2 et 4 de l’article 9 selon lequel sa rétention était arbitraire, le Comité note que l’auteur a été placé sous surveillance (détention) dans un centre de rétention de migrants à Sarajevo, qu’il n’a pas été autorisé à quitter. Selon l’État partie, cette mesure a été imposée à l’origine pour permettre l’établissement de son identité et parce qu’il était considéré comme une menace pour la sécurité de l’État partie. Par la suite, cette mesure a été justifiée par le souci de garantir l’exécution de la mesure d’expulsion et parce que l’auteur était encore considéré comme une menace. Enfin, cette mesure a aussi été prolongée pour donner suite à la demande de mesures provisoires faite par le Comité et tenir compte des conclusions des autorités, qui estimaient qu’il représentait une menace pour la sécurité de l’État partie, et du fait qu’il n’avait pas de permis de séjour en Bosnie-Herzégovine. Du point de vue de l’État partie, le maintien de l’auteur en rétention est raisonnable et clairement justifié par des raisons d’intérêt public et la durée de la mesure ne peut pas lui être reprochée.

10.3 Le Comité rappelle que l’adjectif «arbitraire» employé au paragraphe 1 de l’article 9 n’est pas synonyme de «contraire à la loi» mais doit recevoir une interprétation plus large qui englobe le caractère inapproprié, l’injustice, le manque de prévisibilité et le non-respect des garanties judiciaires. La rétention pendant une procédure de contrôle de l’immigration n’est pas arbitraire en soi, mais elle doit être justifiée, raisonnable, nécessaire et proportionnée compte tenu des circonstances et faire l’objet d’un réexamen périodique. Il faut étudier les éléments utiles au cas par cas et envisager des moyens moins intrusifs d’obtenir le même résultat, comme l’obligation de se présenter à la police, le versement d’une caution ou d’autres moyens d’empêcher le demandeur de passer dans la clandestinité; il faut en outre que la décision fasse l’objet d’un réexamen périodique et d’un contrôle juridictionnel, conformément au paragraphe 4 de l’article 9. Le Comité rappelle aussi qu’en vertu du paragraphe 2 de l’article 9 du Pacte, tout individu arrêté sera informé, au moment de son arrestation, des raisons de cette arrestation, et que cette disposition ne vise pas seulement l’arrestation du chef d’infractions pénales.

10.4Le Comité relève que l’auteur est maintenu en détention depuis 2009. Le 4 mai 2009 l’Agence du renseignement et de la sécurité a informé le Service des étrangers que l’auteur était considéré comme une menace pour l’ordre public, la paix et la sécurité de l’État partie. Le même jour, le Service des étrangers a arrêté l’auteur et l’a placé dans le centre de rétention de migrants de Sarajevo jusqu’au 3 juin 2009 en application du paragraphe 2 b) et c) de l’article 99 de la loi sur la circulation et le séjour des étrangers et sur l’asile, au motif qu’il était considéré comme une menace pour le système juridique, l’ordre public, la paix et la sécurité de la Bosnie-Herzégovine, et qu’il y avait des doutes raisonnables quant à sa véritable identité Le 8 mai 2009, la Cour de Bosnie-Herzégovine a rejeté l’appel formé par l’auteur contre cette mesure. Par la suite, cette mesure et les décisions en vertu desquelles elle a été prolongée ont aussi fait l’objet de recours de la part de l’auteur. Toutefois, l’auteur n’a jamais été informé des raisons ou des éléments de preuve qui ont amené les autorités à conclure qu’il constituait une menace pour la sécurité nationale ni reçu d’explication précise concernant les raisons pour lesquelles il ne pouvait recevoir aucune information à ce sujet. D’après les éléments fournis par les parties, le Comité conclut que les tribunaux qui ont examiné les mesures de rétention n’ont ni étudié le bien-fondé de cette appréciation ni expliqué les raisons pour lesquelles ils ne pouvaient pas eux‑mêmes être informés des critères sur lesquels cette appréciation était fondée. En conséquence, le Comité estime que, si les informations dont disposait l’État partie ont pu justifier l’arrestation et le placement initial de l’auteur en rétention, l’État partie n’a en revanche pas justifié en quoi il était nécessaire de maintenir l’auteur en rétention depuis 2009, et n’a pas démontré que d’autres mesures, moins intrusives, n’auraient pu aboutir au même résultat. Par conséquent, le Comité considère que le placement en rétention de l’auteur constitue une violation des droits garantis à ce dernier par le paragraphe 1 de l’article 9 du Pacte.

10.5En ce qui concerne les griefs tirés du paragraphe 2 de l’article 9, le Comité considère qu’un objectif majeur de l’obligation exigeant que tout individu arrêté soit informé des raisons de son arrestation est de permettre à l’intéressé d’obtenir sa libération s’il estime que les raisons avancées ne sont pas valables ou sont mal fondées; et que les raisons doivent inclure non seulement le fondement général de l’arrestation mais aussi des éléments de fait suffisants pour donner une indication du fond de la plainte. Dans ces circonstances, le Comité estime que l’insuffisance des informations fournies par les autorités administratives à l’auteur lorsqu’il a été placé dans le centre de rétention de migrants de Sarajevo et aux tribunaux au sujet des raisons pour lesquelles il était considéré comme une menace pour la sécurité a porté préjudice, dans la pratique, à son droit d’exercer un recours judiciaire pour demander sa libération. Par conséquent, le Comité conclut que le fait que l’État partie n’ait pas informé l’auteur des raisons de son arrestation constitue une violation du droit que tient l’auteur du paragraphe 2 de l’article 9 du Pacte.

10.6Le Comité estime qu’en vertu du paragraphe 4 de l’article 9 du Pacte les tribunaux qui examinent la légalité de la détention doivent prendre en considération tous les facteurs pertinents à cette fin. À la lumière des éléments dont il est saisi, le Comité estime que les tribunaux n’ont pas eu accès aux informations qui ont amené l’Agence du renseignement et de la sécurité à conclure que l’auteur représentait une menace pour l’ordre public, la paix et la sécurité de l’État partie et ne se sont pas interrogés sur les raisons pour lesquelles eux-mêmes ne pouvaient pas être informés des critères sur lesquels cette conclusion était fondée. Le Comité conclut que l’examen de la légalité de la rétention par les tribunaux de l’État partie n’a pas satisfait les critères requis en la matière par le paragraphe 4 de l’article 9 et qu’il y a donc eu violation de cette disposition du Pacte.

10.7Le Comité prend note des griefs de l’auteur au titre des articles 17, 23 et 24 du Pacte, selon lesquels son placement en rétention et son éventuelle expulsion constituent une immixtion arbitraire et illégale dans sa vie privée et sa vie de famille car ils entraîneraient l’éclatement de la cellule familiale, ce qui aurait des effets néfastes sur le bien-être de ses enfants. Sa femme et ses enfants sont Bosniens, ne parlent pas l’arabe et n’ont aucun lien avec la culture iraquienne. De surcroît, ils ne peuvent pas suivre l’auteur dans un pays en proie à la guerre civile où la sécurité est déplorable. Le Comité prend aussi note de l’argument de l’État partie selon lequel le droit à la vie privée et à la vie de famille n’est pas un droit absolu et peut être restreint pour des raisons d’intérêt public.

10.8Le Comité rappelle sa jurisprudence selon laquelle le fait de séparer quelqu’un de sa famille en l’expulsant peut constituer une immixtion dans la vie de famille, en violation du paragraphe 1 de l’article 17 du Pacte. Dans les cas où une partie d’une famille doit quitter le territoire de l’État partie alors que l’autre a le droit de rester, les critères pour établir si l’immixtion dans la vie de famille des intéressés est ou non arbitraire ou peut ou ne peut pas être justifiée objectivement doivent être considérés eu égard à l’importance des motifs avancés par l’État partie pour expulser l’intéressé d’une part et à la situation de détresse dans laquelle la famille et ses membres se trouveraient suite à l’expulsion d’autre part.

10.9En l’espèce, le Comité observe que l’expulsion de l’auteur entraînerait des difficultés considérables pour sa famille. Si la femme et les enfants mineurs de l’auteur décidaient d’émigrer en Iraq pour ne pas séparer la famille, ils devraient vivre dans un pays dont la culture et la langue ne leur sont pas familières. Le Comité relève aussi qu’en décidant d’expulser l’auteur, la Cour de Bosnie-Herzégovine et la Cour constitutionnelle se sont bornées à évoquer le fait que l’auteur était considéré comme une menace pour la sécurité nationale sans examiner comme elles l’auraient dû le bien-fondé de cet argument. En outre, ces juridictions n’ont pas donné à l’auteur la possibilité de s’exprimer sur la supposée menace qu’il représentait pour la sécurité et de contribuer ainsi à un examen approprié des effets de son expulsion sur la situation de sa famille. En l’absence d’explication claire de l’État partie sur les raisons pour lesquelles l’auteur constituait une menace pour la sécurité du pays ou pour lesquelles des renseignements à ce sujet ne pouvaient être communiqués, le Comité est d’avis que l’État partie n’a pas démontré que l’immixtion dans la vie de famille de l’auteur était justifiée par des motifs sérieux et objectifs. En conséquence, le Comité estime que, dans les circonstances de l’espèce, l’expulsion de l’auteur constituerait une violation des articles 17 et 23 du Pacte.

10.10Ayant conclu à une violation des dispositions susmentionnées, le Comité décide de ne pas examiner séparément les griefs présentés par l’auteur au titre de l’article 24 du Pacte.

11.Le Comité des droits de l’homme, agissant en vertu du paragraphe 4 de l’article 5 du Protocole facultatif se rapportant au Pacte, constate que les faits dont il est saisi font apparaître une violation des paragraphes 1, 2 et 4 de l’article 9, et que l’expulsion de l’auteur vers son pays d’origine constituerait une violation des articles 17 et 23 du Pacte.

12.En vertu du paragraphe 3 a) de l’article 2 du Pacte, l’État partie est tenu d’assurer à l’auteur un recours utile, consistant notamment en une indemnisation adéquate. Il devrait soit libérer l’auteur dans des conditions appropriées soit lui donner l’occasion de contester tous les motifs sur lesquels sa rétention est fondée. Il devrait en outre procéder à un réexamen complet des raisons invoquées pour justifier la décision d’expulser l’auteur vers l’Iraq et des effets que son expulsion aurait sur son droit à la vie de famille, avant toute tentative de renvoi de l’auteur vers son pays d’origine. L’État partie est en outre tenu de veiller à ce que des violations analogues ne se reproduisent pas à l’avenir.

13.Étant donné qu’en adhérant au Protocole facultatif l’État partie a reconnu que le Comité avait compétence pour déterminer s’il y avait eu ou non violation du Pacte et que, conformément à l’article 2 du Pacte, il s’est engagé à garantir à tous les individus se trouvant sur son territoire et relevant de sa juridiction les droits reconnus dans le Pacte, le Comité souhaite recevoir de l’État partie, dans un délai de cent quatre‑vingts jours, des renseignements sur les mesures prises pour donner effet à ses constatations. L’État partie est invité en outre à rendre publiques les présentes constatations et à les diffuser largement dans la langue officielle de l’État partie.

[Adopté en anglais (version originale), en espagnol et en français. Paraîtra ultérieurement en arabe, en chinois et en russe dans le rapport annuel du Comité à l’Assemblée générale.]