Nations Unies

CCPR/C/106/D/1940/2010

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

4 décembre 2012

Français

Original: espagnol

C omité des droits de l’homme

Communication no 1940/2010

Constatations adoptées par le Comité à sa 106e session(15 octobre-2 novembre 2012)

Communication p résentée par:

Eligio Cedeño (représenté par un conseil,M. Emilio Berrizbeitia)

Au nom de:

L’auteur

État partie:

République bolivarienne du Venezuela

Date de la communication:

9 mars 2010 (date de la lettre initiale)

Références:

Décision prise par le Rapporteur spécial en application des articles 92 et 97 du Règlement intérieur, communiquée à l’État partie le 12 mai 2010(non publiée sous forme de document)

Date de l’adoption des constatations:

29 octobre 2012

Objet:

Déroulement de la procédure relativeà une affaire pénale

Questions de procédure:

Durée excessive de l’exercice des recours internes

Questions de fond:

Détention arbitraire; violation des garanties judiciaires

Article s du Pacte:

9 et 14 (par. 1, 2 et 3 a), b) et c))

Article du Protocole facultatif:

5 (par. 2 a) et b))

Annexe

Constatations du Comité des droits de l’homme au titre du paragraphe 4 de l’article 5 du Protocole facultatifse rapportant au Pacte international relatifaux droits civils et politiques (106esession)

concernant la

Communication no 1940/2010 *

Présentée par:

Eligio Cedeño (représenté par un conseil,M. Emilio Berrizbeitia)

Au nom de:

L’auteur

État partie:

République bolivarienne du Venezuela

Date de la communication:

9 mars 2010 (date de la lettre initiale)

Le Comité des droits de l’homme, institué en vertu de l’article 28 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques,

Réuni le 29 octobre 2012,

Ayant achevé l’examen de la communication no 1940/2010 présentée au nom de M. Eligio Cedeño en vertu du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques,

Ayant tenu compte de toutes les informations écrites qui lui ont été communiquées par l’auteur de la communication et l’État partie,

Adopte ce qui suit:

Constatations au titre du paragraphe 4 de l’article 5du Protocole facultatif

1.L’auteur de la communication est M. Eligio Cedeño, de nationalité vénézuélienne, né le 1er décembre 1964. Il se déclare victime de violations, par la République bolivarienne du Venezuela, des droits qui lui sont reconnus aux articles 2, 9 (par. 1, 2, 3 et 4) et 14 (par. 1, 2 et 3 a), b) et c)) du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Il est représenté par un conseil, M. Emilio Berrizbeitia.

Rappel des faits présentés par l’auteur

2.1L’auteur était Vice-Président des services financiers de Banco Canarias. Il affirme avoir fourni un soutien financier à des membres de l’opposition et à des personnalités de la société civile, ce qui lui a valu des représailles de la part du Gouvernement au pouvoir dans l’État partie.

2.2En février 2003, le Gouvernement a mis en place un système de contrôle des changes rigoureux. La Banque centrale du Venezuela (BCV) a été chargée de fixer les taux de change et la Commission de gestion des devises (CADIVI) a été créée pour administrer le régime de change. Tout achat de devises étrangères était dorénavant soumis à autorisation préalable de la CADIVI. Banco Canarias s’est enregistré comme cambiste autorisé à effectuer des opérations de change et autres transactions y relatives.

2.3En juin 2003, le consortium Microstar a demandé à la CADIVI, par l’intermédiaire de Banco Canarias, une somme importante en dollars des États-Unis destinée à acquérir des ordinateurs qui, d’après l’entreprise, avaient été expédiés au Venezuela et se trouvaient à la douane. La CADIVI a approuvé l’opération de change, sans savoir que les ordinateurs en question n’étaient jamais arrivés dans l’État partie et que les factures présentées par Microstar étaient fausses.

2.4Le 4 novembre 2003, le ministère public a ouvert une enquête à la suite d’une plainte déposée par l’Administration des douanes concernant de faux documents présentés au nom de Microstar par Banco Canarias agissant en qualité de cambiste. Le 29 novembre 2005, le Bureau du Procureur (Fiscalí a) a demandé la mise en examen de l’auteur pour contrebande par simulation d’importation et fraude fiscale. L’auteur a demandé l’abandon des poursuites en faisant valoir que les faits ne pouvaient pas lui être imputés, la CADIVI étant seule habilitée, selon la législation de l’État partie, à examiner et à autoriser les transactions financières. Les cambistes n’intervenaient qu’après avoir reçu l’autorisation de cette commission. Le Bureau du Procureur a ignoré la requête et poursuivi l’instruction de l’affaire. Par la suite, l’auteur a formé un recours en évocation (avocamiento) devant la Cour suprême, en faisant valoir qu’aucune suite n’avait été donnée à sa demande d’abandon des poursuites et que le Bureau du Procureur ne tenait pas compte de la responsabilité éventuelle de la CADIVI. Le 16 novembre 2006, la Cour suprême a enjoint le Bureau du Procureur de mettre en examen toutes les personnes susceptibles d’avoir participé aux faits à l’origine de la procédure. L’affaire a été confiée au tribunal pénal de première instance no 3 (circonscription judiciaire de la région métropolitaine de Caracas), dans l’exercice de ses fonctions de jugement. La juge chargée de l’affaire, non titulaire, a estimé que la demande d’abandon des poursuites présentée par l’auteur n’était pas fondée. Le Bureau du Procureur a continué d’instruire l’affaire sans tenir compte d’une éventuelle responsabilité de la CADIVI. De même que la juge, les représentants du ministère public étaient non titulaires et pouvaient donc être remplacés à tout moment, sans procédure disciplinaire préalable.

2.5Le 7 février 2007, le Bureau du Procureur a demandé à la juge du tribunal no 3 de placer l’auteur en détention préventive au motif que l’enquête menée à la suite de sa mise en examen avait fait apparaître une nouvelle infraction: il était soupçonné de détournement de fonds pour s’être approprié illégalement des devises appartenant à Banco Canarias afin de financer la transaction financière de Microstar. L’auteur affirme que la banque n’a jamais formulé de plainte de cet ordre et que ce chef d’inculpation ne figurait pas parmi les charges initialement retenues contre lui. Le Bureau du Procureur justifiait sa demande par le fait que l’auteur avait détourné des fonds, mais sans détailler les faits ou les éléments constitutifs de l’infraction. Le 8 février 2007, l’auteur s’est rendu spontanément aux autorités. La juge du tribunal no 3 a estimé, au vu du délit de détournement de fonds et du grave préjudice causé aux clients de Banco Canarias, qu’il y avait un risque de fuite et d’entrave à l’exercice de la justice et, sachant que l’auteur disposait de moyens économiques importants et notamment d’un avion personnel, a ordonné son placement en détention préventive. Elle n’a pas tenu compte des conditions prévues par la loi pour l’imposition d’une telle mesure, ni du fait que l’intéressé faisait déjà l’objet d’une interdiction de sortie du territoire. L’auteur a fait appel de la décision, mais la cour d’appel l’a débouté le 13 mars 2007. Par la suite, le Bureau du Procureur a reçu un rapport du Ministère de l’économie et des finances selon lequel les devises en cause provenaient d’une tierce partie sans lien avec Banco Canarias. Toutefois, il n’a pas communiqué cette information à la juge ni à la défense. Le 16 mars 2007, la juge du tribunal no 3 a répondu par la négative à la demande de l’auteur visant à avoir personnellement accès au dossier de l’affaire et à connaître l’étendue des charges retenues contre lui.

2.6Le 26 mars 2007, le Bureau du Procureur a requis la mise en accusation de l’auteur devant le tribunal no 3 pour détournement de fonds et complicité de contrebande par simulation d’importation. Plus tard, le 20 avril 2007, il a ajouté un troisième chef d’accusation, celui de complicité d’acquisition frauduleuse de devises étrangères. À l’audience préliminaire du 9 mai 2007, il a présenté un réquisitoire de caractère général, qui ne remplissait pas les conditions exigées par la loi. Malgré cela, la juge a admis la quasi-totalité des preuves présentées par l’accusation, a écarté la preuve documentaire présentée par l’auteur et a retenu uniquement les déclarations de deux des 15 témoins à décharge proposés par celui-ci. L’auteur a fait appel de cette décision, mais il a été débouté. Il soutient que la juge a bénéficié d’une promotion du fait de sa partialité, et qu’à la date de la présente communication au Comité, elle était Présidente des juridictions pénales de la circonscription judiciaire de la région métropolitaine de Caracas.

2.7En juin 2007, lors de la phase préliminaire, le Bureau du Procureur a demandé la récusation des deux premiers juges désignés de manière aléatoire. Bien que cette demande ait été rejetée, les intéressés se sont désistés sous l’effet de pressions extérieures. L’un d’eux a reçu une lettre de la Présidente de la Cour suprême lui laissant entendre qu’une non-récusation lui vaudrait une mise à pied immédiate. La récusation d’une troisième juge qui était proche de l’un des procureurs a été acceptée par la cour d’appel le 2 octobre 2007.

2.8Le 20 novembre 2007, l’auteur a formé un nouveau recours en évocation (avocamiento) devant la Cour suprême, en demandant à celle-ci de déclarer la nullité de la mesure privative de liberté le concernant, ainsi que de l’audience préliminaire et du renvoi devant la juridiction de jugement, et d’ordonner sa libération, au motif qu’il n’avait pas été inculpé dans les règles du délit de détournement de fonds invoqué pour justifier sa détention.

2.9La procédure orale s’est ouverte le 31 mars 2008. Après présentation des preuves, la présentation des conclusions des parties a été fixée au 9 juin 2008, mais aucun représentant du Bureau du Procureur n’est venu ce jour-là sans que cette absence ait été justifiée.

2.10Le 17 décembre 2008, le Bureau du Procureur a requis une prolongation de deux ans de la détention préventive sans motiver sa demande.

2.11En mars 2009, les avocats de l’auteur ont soumis l’affaire au Groupe de travail sur la détention arbitraire et au Rapporteur spécial sur l’indépendance des juges et des avocats.

2.12Le 18 mars 2009, la Cour suprême, par la décision no 2009-0008, a annoncé une restructuration complète du système judiciaire, d’une durée d’un an, pendant laquelle la Commission judiciaire était autorisée à suspendre, avec ou sans traitement, les juges et les membres du personnel administratif qui ne satisferaient pas à la procédure d’évaluation institutionnelle, et à pourvoir les postes ainsi devenus vacants. Aucun critère d’évaluation n’était défini dans la décision.

2.13Dans une décision en date du 7 mai 2009, la Cour suprême a conclu que l’auteur n’avait pas été officiellement mis en examen pour le délit de détournement de fonds et qu’il avait été privé du droit d’intervenir à cet égard, en violation du droit de chacun de se défendre, de faire entendre sa cause et d’être présumé innocent, puisque le Bureau du Procureur ne l’avait pas informé de la mise en évidence d’une nouvelle infraction et ne l’avait pas convoqué pour recueillir ses déclarations à ce sujet. La Cour suprême a déclaré par conséquent la nullité de tous les actes pris jusqu’alors, rétrogradant la procédure au stade de l’instruction préliminaire, et a accordé au ministère public un délai de trente jours pour demander une nouvelle mise en examen de l’auteur. Elle n’a toutefois pas fait libérer ce dernier. Les 26 et 27 mai 2009, le Bureau du Procureur a demandé la mise en examen de l’auteur pour détournement de fonds au préjudice de Banco Canarias, sans invoquer de faits nouveaux, et a requis une prolongation de la détention préventive. Le 4 juin 2009, le tribunal pénal de première instance no 27 (circonscription judiciaire de la région métropolitaine de Caracas), dans l’exercice de ses fonctions de jugement, a statué sur la demande. Il a ajouté deux ans à la durée maximale de la détention préventive, au motif que le dossier était volumineux et complexe. Le 18 juin 2009, le Bureau du Procureur a requis la mise en accusation de l’auteur pour détournement de fonds. L’auteur affirme que le tribunal aurait dû considérer cet acte comme tardif, compte tenu du délai imparti à cette fin par la Cour suprême, ainsi qu’il l’avait lui-même demandé le 11 juin 2009.

2.14Le 1er septembre 2009, le Groupe de travail sur la détention arbitraire a rendu l’avis no 10/2009. En l’absence de réponse de la part de l’État partie, il a conclu que la procédure engagée contre l’auteur avait été longtemps paralysée du fait de l’inertie du ministère public, et que sa détention, dont la durée avait dépassé la limite fixée par la loi de l’État partie, ainsi que le refus de lui accorder la liberté provisoire alors que rien ne démontrait qu’il eût l’intention de se soustraire à la justice, constituait une détention arbitraire, en violation des articles 9, 10 et 11 de la Déclaration universelle des droits de l’homme et des articles 9, 10 et 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Le Groupe de travail a demandé à l’État partie d’accorder la liberté provisoire à l’auteur jusqu’à la fin de la procédure et de veiller à éviter tout retard excessif.

2.15Le 8 octobre 2009, la cour d’appel a infirmé la décision du tribunal no 27 et ramené à huit mois la prolongation de la détention préventive. Cette extension devait être calculée à partir de l’échéance de la période initiale de deux ans, soit à compter du 8 février 2009, et prenait fin à la date de la décision de la cour d’appel. La libération de l’auteur n’a toutefois pas été ordonnée. Par la suite, l’affaire a été transférée au tribunal pénal de première instance no 39 (circonscription judiciaire de la région métropolitaine de Caracas), dans l’exercice de ses fonctions de jugement, qui s’est abstenu d’ordonner la libération de l’auteur malgré les demandes présentées dans ce sens par ses avocats. En conséquence, l’auteur a introduit un recours en habeas corpus. Le 15 octobre 2009, le Bureau du Procureur a saisi la cour d’appel pour lui demander de préciser la date à laquelle commençait à courir la prolongation de la détention préventive pour une durée de huit mois et, simultanément, a déposé un recours en amparo devant la Chambre constitutionnelle de la Cour suprême, alléguant qu’il y avait eu violation des droits constitutionnels de la «vindicte publique» du fait que la cour d’appel avait outrepassé sa compétence et modifié arbitrairement la durée de la prolongation de la détention préventive sans permettre aux parties de présenter leurs arguments à ce sujet. Le 20 octobre 2009, la Cour suprême a déclaré ce recours recevable, avec effet suspensif de l’arrêt de la cour d’appel. Simultanément, la cour d’appel a précisé que la prolongation de la détention préventive commençait à la date où elle rendait sa décision interprétative. Cette décision a eu pour effet de modifier celle du 8 octobre 2009, au mépris de l’autorité de la chose jugée. Par la suite, le juge de la cour d’appel qui avait pris part à la première décision et qui s’était dissocié de la décision interprétative a été rétrogradé à la fonction de juge de première instance.

2.16Le tribunal pénal de première instance no 31 (circonscription judiciaire de la région métropolitaine de Caracas), dans l’exercice de ses fonctions de contrôle, a été désigné par tirage au sort pour examiner la cause. Le 10 décembre 2009, la juge a décidé, au vu de l’avis du Groupe de travail sur la détention arbitraire, de l’absence du ministère public à l’audience pour la deuxième fois consécutive, et du fait qu’il n’existait pas de risque de fuite de la part de l’auteur, de remplacer la mesure de détention préventive par une mesure de mise en liberté provisoire assortie de l’obligation de se présenter tous les quinze jours au tribunal et de l’interdiction de quitter le territoire, avec consignation du passeport de l’intéressé.

2.17Lorsqu’ils ont eu connaissance de cette décision et de la libération de l’auteur, les agents de la Direction des services de renseignement (DISIP) ont investi les locaux du tribunal no 31 et ont arrêté − sans mandat − toutes les personnes présentes, y compris la juge, Mme M. L. A., et deux huissiers. La juge a été emmenée au siège de la DISIP. Le 11 décembre 2009, on a appris que le tribunal pénal no 1 (circonscription judiciaire de la région métropolitaine de Caracas), agissant en qualité de juridiction de contrôle, avait ordonné son placement en détention. Dans le même temps, la police cherchait l’auteur pour l’arrêter, en l’absence de toute décision judiciaire. Les avocats de l’auteur ont été la cible de manœuvres d’intimidation. L’un d’eux a été arrêté et emmené au siège de la Direction des renseignements militaires (DIM) où il a été interrogé pendant deux jours. Le 11 décembre 2009, au cours d’une émission diffusée par la radio et la télévision nationales, le Président de la République bolivarienne du Venezuela a évoqué l’affaire, accusant l’auteur d’être un «escroc» coupable de «fuite». Il a également qualifié la juge M. L. A. d’«escroc», insinuant qu’elle s’était laissé corrompre et demandant qu’elle soit condamnée à trente ans d’emprisonnement. Il a aussi accusé les avocats de l’auteur d’avoir bafoué la loi en préparant à l’avance la décision du juge. Enfin, il a appelé la Présidente de la Cour suprême et l’Assemblée nationale à prendre les mesures législatives voulues pour sanctionner la juge par la peine maximale.

2.18Le 12 décembre 2009, le Bureau du Procureur a requis la mise en examen de la juge M. L. A. devant le tribunal no 50, dans l’exercice de ses fonctions de contrôle, pour corruption, complicité de fuite, association de malfaiteurs et abus de pouvoir.

2.19Le 16 décembre 2009, le Président du Groupe de travail sur la détention arbitraire, le Rapporteur spécial sur l’indépendance des juges et des avocats et le Rapporteur spécial sur la situation des défenseurs des droits de l’homme ont publié un communiqué de presse conjoint au sujet de la détention de la juge M. L. A., dans lequel ils qualifiaient d’arbitraire la détention de l’auteur et exprimaient la crainte que ses avocats ne soient arrêtés prochainement.

2.20Le 18 décembre 2009, la nouvelle juge − non titulaire − en charge du tribunal no 31 a annulé la mesure de liberté provisoire avec obligation de comparution dont bénéficiait l’auteur, au motif que celui-ci ne s’était pas présenté au tribunal, et a délivré un mandat d’arrêt contre lui. Au vu des graves dangers qu’il courait, l’auteur s’est vu contraint de quitter le pays. À la date de la présente communication, il se trouvait aux États-Unis, où il a déposé une demande d’asile. Le 28 décembre 2009, à la demande du Bureau du Procureur, la Cour suprême du Venezuela a déclaré recevable la demande d’extradition de l’auteur.

Teneur de la plainte

3.1L’auteur affirme que l’État partie a violé ses obligations au regard des articles 2, 9 (par. 1, 2, 3, et 4) et 14 (par. 1, 2 et 3 a), b) et c)) du Pacte.

3.2L’auteur affirme que sa détention et la procédure engagée contre lui étaient contraires au paragraphe 2 de l’article 9 et au paragraphe 3 a) de l’article 14. Le Bureau du Procureur ne l’a pas convenablement informé de la nature des charges retenues contre lui. Il ne l’a pas non plus informé avant de modifier les chefs d’accusation dans son réquisitoire. Il a requis son placement en détention préventive pour détournement de fonds, alors que ce délit ne figurait pas parmi les charges retenues. En outre, pour motiver le placement en détention préventive et la mise en accusation, le Bureau du Procureur s’est limité à déclarer en termes généraux que l’auteur s’était approprié illégalement des fonds, sans détailler les faits ni expliquer en quoi ceux-ci étaient constitutifs d’une infraction. L’auteur n’a pas pu comprendre la nature des accusations portées contre lui ni des faits constitutifs de l’infraction alléguée. Par ailleurs, le 16 mars 2007, la juge du tribunal no 3 a rejeté sa demande d’avoir personnellement accès au dossier de l’affaire et de connaître l’étendue des charges retenues contre lui.

3.3L’auteur affirme que sa détention était également arbitraire au regard des paragraphes 1 et 3 de l’article 9. La détention ordonnée par le tribunal no 3 était motivée par la perpétration d’une infraction dont il n’avait pas été inculpé. On n’a pas tenu compte du fait qu’il s’était rendu spontanément aux autorités, que des liens le rattachaient au pays − où il gérait ses affaires et avait son domicile et sa famille − et qu’il était déjà sous le coup d’une interdiction de sortie du territoire. On n’a pas démontré non plus qu’il risquait d’entraver l’instruction ou de prendre la fuite. L’auteur n’a pas été libéré le 9 février 2009, lorsque la durée de sa détention privative a atteint deux ans, soit la limite prévue par l’article 244 du Code de procédure pénale. La mesure de détention a été prolongée à l’initiative du Bureau du Procureur, alors que celui-ci en avait fait la demande hors délai et sans invoquer des raisons sérieuses dûment étayées. L’auteur rappelle que la détention préventive ne saurait être utilisée comme une condamnation anticipée et doit viser uniquement à empêcher l’accusé d’entraver le cours de l’instruction ou de se soustraire à la justice.

3.4L’auteur n’a pas bénéficié en temps utile d’un contrôle de la légalité de sa détention comme l’exige le paragraphe 4 de l’article 9 du Pacte, puisque le recours qu’il a formé le 20 novembre 2007 devant la Cour suprême, pour demander sa libération au motif que sa détention avait été justifiée par un délit dont il n’avait pas été inculpé, a été examiné le 7 mai 2009, soit environ dix-huit mois plus tard. Bien qu’elle ait fait droit au recours, la Cour n’a pas ordonné la libération de l’auteur. En outre, même à supposer que la détention fût légale, elle aurait dû prendre fin le 8 février 2009, au terme de la période maximale de deux ans prévue par la loi. L’auteur ajoute qu’en tout état de cause, une détention, indépendamment de sa légalité au regard de la législation nationale, ne doit pas être arbitraire, c’est-à-dire que sa durée ne peut dépasser celle qui est raisonnablement nécessaire pour servir l’objectif recherché.

3.5Au sujet du grief de violation du paragraphe 3 de l’article 9 et du paragraphe 3 c) de l’article 14, l’auteur affirme qu’il n’a pas eu droit à une procédure adéquate et sans retard excessif. Il a été placé en détention préventive le 8 février 2007. Deux ans et dix mois plus tard, la procédure était au stade de l’instruction préliminaire. La lenteur considérable de la procédure était due au comportement du Bureau du Procureur, qui avait recours à des manœuvres dilatoires. Le 7 mai 2009, la Cour suprême a examiné la demande de libération dont l’auteur l’avait saisie près de dix-huit mois plus tôt, et a conclu que l’auteur n’avait pas été mis en examen dans les règles, ce qui emportait la nullité de l’acte d’accusation et de tous les actes subséquents. La procédure a repris avec une nouvelle demande de mise en examen présentée par le Bureau du Procureur le 26 ou le 28 mai 2009. La décision de la Cour suprême était non seulement tardive mais également inappropriée, du fait que l’ensemble de la preuve avait déjà été administré dans le cadre de la procédure ordinaire, initialement suspendue le 17 juin 2008, et que le recours examiné ne visait qu’à contester la mesure de détention préventive − une question qui aurait été tranchée si la Cour avait permis la poursuite de la procédure. Enfin, le 17 décembre 2008, le Bureau du Procureur a requis une prolongation de la détention préventive sans motiver cette demande.

3.6Les autorités judiciaires qui ont examiné la cause ne satisfaisaient pas aux conditions d’indépendance et d’impartialité requises par le paragraphe 1 de l’article 14 du Pacte. Le système de juges non titulaires en vigueur dans l’État partie va à l’encontre du droit des tribunaux à l’indépendance, du fait que ces juges n’ont aucune stabilité dans leurs fonctions et peuvent être remplacés de manière discrétionnaire, sans aucune procédure préétablie. Depuis 1999, le pouvoir exécutif intervient ouvertement dans l’administration de la justice et a fait de celle-ci un instrument de persécution des opposants politiques. Les juges et les procureurs non titulaires dont les décisions ne sont pas conformes à la volonté du pouvoir politique sont arbitrairement relevés de leurs fonctions et souvent soumis à une procédure disciplinaire. À l’inverse, ceux qui suivent les instructions données bénéficient souvent d’une promotion. Dans l’affaire concernant l’auteur, deux des juges étaient non titulaires et donc susceptibles d’être remplacés discrétionnairement pour des raisons politiques. La juge du tribunal no 31, qui a remplacé la mesure de détention préventive par une mesure de mise en liberté provisoire assortie de l’obligation de comparution, a subi des représailles du pouvoir exécutif, encouragées par le Président de l’État partie: elle a été immédiatement arrêtée et déférée à la justice. À la date de la présente communication, elle se trouvait en détention préventive.

3.7Les juges n’ont pas fait preuve d’impartialité. En novembre 2005, la juge titulaire du tribunal no 3 a mis l’auteur en examen pour contrebande par simulation d’importation et fraude fiscale, alors qu’en vertu de la loi, la responsabilité pénale de l’intéressé, en sa qualité de gérant d’une banque agissant comme cambiste pour des opérations de change, ne pouvait pas être engagée. La même juge a ordonné son placement en détention préventive, bien que cette mesure fût demandée au vu d’une infraction dont l’auteur n’avait pas été inculpé et qu’il n’y eût aucun risque de fuite de sa part. Le 16 mars 2007, la juge a rejeté la demande de l’auteur qui souhaitait avoir personnellement accès au dossier de l’affaire pour l’étudier avec ses avocats. Le 9 mai 2007, elle a présidé une audience préliminaire au cours de laquelle elle a admis toutes les preuves apportées par l’accusation, tout en écartant la quasi-totalité de preuve documentaire présentée par l’auteur. Le 24 septembre 2007, après s’être vu confier l’affaire et avoir pris des décisions à ce titre, la juge du tribunal no 27, dans l’exercice de ses fonctions de contrôle, a demandé sa récusation en raison de ses liens d’amitié manifestes avec la représentante du Bureau du Procureur. Cependant, le 4 juin 2009, l’affaire a de nouveau été assignée à cette même juge, qui a prolongé de deux années supplémentaires la détention préventive de l’auteur, bien que cette mesure n’eût pas été justifiée et fût contraire à la loi, le seul motif avancé étant l’ampleur du dossier. Qui plus est, la juge a ignoré le fait que la demande de prolongation de la détention était présentée trop tard par le Bureau du Procureur, au-delà du délai de trente jours fixé par la Cour suprême.

3.8Au sujet du droit de disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense, énoncé au paragraphe 3 b) de l’article 14 du Pacte, l’auteur fait valoir que ses avocats et lui-même n’ont pas eu accès sans réserve au dossier de l’affaire. Le 16 mars 2007, la juge du tribunal no 3 lui a refusé l’autorisation de consulter le dossier, et elle n’a pas admis à titre de preuve les documents soumis par la défense alors que ceux-ci démontraient de manière irréfutable que les devises locales utilisées pour la transaction Microstar provenaient de sources tierces et non d’un détournement de fonds au préjudice de Banco Canarias. Les avocats de la défense ont été empêchés d’étudier l’ensemble du dossier. Sous couvert de protection du secret de la défense nationale, le Bureau du Procureur a retenu illégalement, à l’insu de l’auteur, des communications officielles du Ministère de l’économie et des finances qui confirmaient que les devises vénézuéliennes utilisées pour la transaction Microstar étaient des instruments négociables provenant de tiers et que, par conséquent, l’auteur ne pouvait pas avoir détourné des fonds de Banco Canarias pour financer l’opération.

3.9Le droit à la présomption d’innocence consacré au paragraphe 2 de l’article 14 du Pacte n’a pas été respecté dans le cadre de la procédure engagée contre l’auteur. Celui-ci a été privé de la possibilité de rester en liberté et a été placé en détention préventive alors qu’aucune des conditions légalement requises pour ce faire n’était remplie. Il n’a pas été libéré à l’échéance de la période maximale de deux ans. La mesure de privation de liberté n’a pas non plus été levée après que la Cour suprême eut conclu le 7 mai 2009 que l’auteur n’avait pas été inculpé dans les règles, ce qui privait d’effet tous les actes antérieurs. Le 4 juin 2009, la période de détention préventive a été prolongée de deux années supplémentaires. La procédure contre l’auteur était motivée par des considérations politiques du pouvoir exécutif, ainsi qu’en témoigne la référence à l’affaire faite par le Président dans les médias le 11 décembre 2009.

3.10Les violations alléguées des articles 9 et 14 du Pacte qui découleraient d’actions ou omissions de la part des autorités de l’État partie constituent également une violation de l’article 2.

3.11En ce qui concerne l’épuisement des recours internes, l’auteur indique qu’à la date de la présente communication au Comité, près de quatre ans après sa mise en examen demandée par le Bureau du Procureur en 2005, la procédure n’avait pas encore atteint le stade de l’audience préliminaire, et il n’avait donc toujours pas été jugé ni condamné en première instance. Les actions engagées contre lui devant les tribunaux de l’État partie sont par conséquent excessivement longues, d’autant qu’il était sous le coup d’une ordonnance de placement en détention préventive durant toute cette période. L’auteur fait valoir qu’en l’espèce le retard de la procédure ne peut s’expliquer par la complexité de l’affaire ni par le comportement de la défense dans l’exercice des voies de recours.

3.12La même question n’a pas été soumise à une autre instance internationale d’enquête ou de règlement. L’auteur fait observer que, du fait de sa nature juridique, l’avis rendu par le Groupe de travail sur la détention arbitraire et sa demande tendant à ce que l’auteur soit remis en liberté jusqu’à l’issue de la procédure et qu’il soit jugé avec toutes les garanties d’un procès équitable, ainsi que les communiqués de presse et les lettres du Rapporteur spécial sur l’indépendance des juges et des avocats et du Rapporteur spécial sur la situation des défenseurs des droits de l’homme, ne constituent pas une procédure d’examen au sens du paragraphe 2 a) de l’article 5 du Protocole facultatif. Ils ne sont donc pas incompatibles avec une décision du Comité, et ne supposent pas non plus une répétition des procédures internationales.

Observations de l’État partie sur la recevabilité et le fond de la communication

4.1Le 27 avril 2012, l’État partie a soumis au Comité ses observations sur la recevabilité et le fond de la communication, en se référant à une mise à jour du rapport du ministère public établi le 9 octobre 2009 comme suite à la demande du Groupe de travail sur la détention arbitraire.

4.2L’État partie décrit les actes de procédure pris par les juges et le Bureau du Procureur relativement à la mise en examen de l’auteur, à sa mise en accusation et à son renvoi devant la juridiction de jugement pour les délits d’acquisition frauduleuse aggravée de devises étrangères, de détournement de fonds et de complicité de contrebande. Au sujet du délit de détournement de fonds, l’État partie explique que le Bureau du Procureur a conduit une enquête puis retenu ce chef d’accusation parce que l’auteur, avec la participation de Microstar, et en sa qualité de Vice-Président de Banco Canarias, avait soustrait plusieurs millions de dollars des réserves en devises de la Banque centrale du Venezuela (BCV). Après plusieurs opérations, cet argent a finalement été placé sur un compte bancaire à l’étranger, au nom de la société Cedel International Investment, dont étaient actionnaires le frère de l’auteur et Banco Canarias, dont l’auteur était lui-même actionnaire. Dans ses demandes présentées à la BCV, l’auteur a déclaré sous serment que Microstar satisfaisait à toutes les conditions requises par la loi pour le traitement des transactions financières. La BCV a donc agi en accordant foi à cette déclaration.

4.3L’auteur n’a pas été restreint dans son droit à la défense. Ses avocats ou lui-même ont eu accès aux actes procéduraux dès l’ouverture de l’enquête en 2003, puis tout au long de la procédure.

4.4La plus grave des infractions imputées à l’auteur est passible d’une peine maximale supérieure à dix ans d’emprisonnement, ce qui signifie, conformément au paragraphe 1 de l’article 251 du Code de procédure pénale, qu’il existait légalement une présomption de fuite et que le ministère public était tenu de demander la privation judiciaire de liberté à titre préventif. En outre, l’auteur disposait d’importants moyens économiques lui permettant de quitter le pays à tout moment. Compte tenu de cette aisance économique et de ses relations avec les institutions financières, il pouvait faire pression sur ses coïnculpés, les témoins, les victimes ou les experts pour les inciter à faire de fausses déclarations au tribunal. L’auteur a exercé son droit de recours contre la décision de prolongation de sa détention préventive, rendue par le tribunal no 39 et confirmée par la cour d’appel le 13 mai 2007.

4.5Le 7 mai 2009, la Cour suprême a fait droit au recours en évocation formé par l’auteur concernant le délit de détournement de fonds et a déclaré la nullité des actes de procédure relatifs à cette infraction au motif que celle-ci ne figurait pas parmi les chefs d’inculpation retenus. La Cour a toutefois maintenu les effets de l’acte d’accusation du 26 mars 2007 pour les délits d’acquisition frauduleuse de devises étrangères et de contrebande par simulation d’importation, ainsi que la mesure de détention provisoire prononcée contre l’auteur. Ladite mesure a été contestée par l’auteur devant la cour d’appel, qui l’a débouté le 13 mars 2007. La prolongation de la détention préventive pour une durée de deux années supplémentaires a été demandée par le ministère public en vertu de l’article 244 du Code de procédure pénale et accordée par le tribunal no 27 le 4 juin 2009. La procédure suivie par la Cour suprême témoigne du respect des garanties judiciaires et montre que l’auteur n’a pas été privé de ses droits, d’autant que, contrairement aux conclusions de la Cour, il a bien été informé par le Bureau du Procureur qu’il était mis en examen également pour un délit présumé de détournement de fonds, ainsi qu’il ressort du procès-verbal de l’audience préliminaire tenue le 9 février 2007 devant le tribunal no 3.

4.6Au sujet du manque d’impartialité présumé des tribunaux, l’État partie indique que, selon son système juridique, la même juridiction de contrôle statue sur la recevabilité des poursuites et sur l’admissibilité des preuves et rend l’ordonnance de renvoi devant la juridiction de jugement. Cela ne signifie pas pour autant qu’elle procède à une évaluation concluante des éléments de preuve ou de la responsabilité pénale de l’accusé. Par conséquent, le droit d’être jugé par un tribunal impartial n’est pas compromis.

4.7Le retard dans l’examen de la cause s’explique par le fait que la décision sur le recours en évocationa eu pour effet de suspendre la procédure orale et d’annuler tout ce qui avait été fait précédemment, d’où la nécessité de recommencer la procédure. L’auteur, dans le cadre de sa défense, a exercé tous les recours ordinaires ou extraordinaires qui lui étaient ouverts pour contester les décisions prises au cours de la procédure. Par exemple, les audiences préliminaires prévues le 9 mai et le 7 juin 2007 devant le tribunal no 3 ont été reportées à sa demande. En 2009, il s’est formé quatre fois en appel, pour contester, respectivement, la mise en accusation du ministère public, dont il estimait qu’elle avait été présentée hors délai, la prolongation de sa détention préventive, l’irrecevabilité de la demande de récusation de la juge de contrôle, et la mise sous séquestre de ses biens.

4.8Le 4 novembre 2009, le tribunal no 39 a condamné M. G. A., coïnculpé dans l’affaire pour complicité de détournement de fonds, à une peine de six ans d’emprisonnement. M. G. A. a reconnu les accusations portées contre lui par le Bureau du Procureur. Sa déclaration de culpabilité engageait directement la responsabilité pénale de l’auteur, du fait que la participation de celui-ci, de même que celle de fonctionnaires de la CADAVI, avait nécessairement été requise vu la complexité des transactions financières frauduleuses effectuées.

4.9Le 20 octobre 2009, la Cour suprême a déclaré recevable le recours en amparo formé le 15 octobre 2009 par le Bureau du Procureur contre l’arrêt de la cour d’appel qui avait ramené à huit mois la prolongation de la détention préventive. Cette décision de la Cour suprême a emporté un effet suspensif de l’arrêt de la cour d’appel, laquelle a reçu l’ordre d’informer le tribunal de première instance qui instruisait la demande principale qu’aucun acte visant à exécuter l’arrêt en question ne devait être pris tant que le recours en amparo était à l’examen. Cependant, la juge M. L. A. en charge du tribunal no 31 a ignoré l’ordre expressément donné par la Cour suprême et, par une mesure illégale, a remplacé la détention préventive de l’auteur par une mise en liberté provisoire, au cours d’une audience à laquelle aucun représentant du ministère public n’était présent.

Commentaires de l’auteur sur les observations de l’État partie

5.1Le 22 mai 2012, l’auteur a fait part de ses commentaires sur les observations de l’État partie. Il relève que ces observations consistent en un rapport établi comme suite à la demande d’informations du Groupe de travail sur la détention arbitraire, qu’elles ne font aucune mention des informations que lui-même a fournies au Comité, et qu’elles portent principalement sur son éventuelle responsabilité pénale alors que cette question n’est pas à l’examen. Il ajoute que, l’État partie n’ayant pas contesté la recevabilité de la communication, il convient d’en déduire qu’il la considère comme recevable.

5.2Au sujet de son grief de violation du paragraphe 3 de l’article 9 et du paragraphe 3 c) de l’article 14 du Pacte, l’auteur répète que la procédure engagée contre lui s’est prolongée au-delà d’un délai raisonnable et que ce retard ne peut être expliqué uniquement par la complexité de l’enquête ou de l’affaire, qu’il ne peut pas lui être imputé, et que l’État partie n’a pas démontré comment le droit d’être jugé dans un délai raisonnable avait été respecté en l’espèce. L’auteur fait observer en particulier qu’au cours des dix-huit mois qu’a duré l’examen de son recours en évocation par la Cour suprême, qui l’a jugé recevable le 17 juin 2008, la procédure pénale a été suspendue et aucun juge n’était chargé d’instruire la cause ou de contrôler son maintien en détention. L’auteur relève en outre que le paragraphe 1 de l’article 251 du Code de procédure pénale est contraire au paragraphe 3 de l’article 9 du Pacte et incompatible avec le caractère exceptionnel de la détention préventive, du fait qu’il établit comme principe général l’existence d’un risque de fuite dès lors que l’infraction présumée est passible d’une peine égale ou supérieure à dix ans d’emprisonnement. L’auteur ajoute qu’en tout état de cause sa détention était arbitraire parce que l’application de cette disposition exige que soient réunies les conditions prévues à l’article 250 du Code de procédure pénale, à savoir l’existence de motifs sérieux de penser que l’inculpé a commis une infraction ou a participé à sa commission; or, dans son cas, il n’a pas été démontré qu’il existât des circonstances justifiant la détention.

5.3La décision du 10 décembre 2009, par laquelle la détention préventive de l’auteur a été remplacée par une mise en liberté provisoire assortie de l’obligation de comparution, était conforme au droit. Une demande tendant à modifier une mesure de placement en détention préventive n’est pas subordonnée aux exigences et formalités de l’instruction préliminaire et son examen ne requiert pas la présence du ministère public ni la tenue d’une audience. La juge a pris cette décision conformément aux dispositions de l’article 264 du Code de procédure pénale, qui exige de s’interroger sur la nécessité du maintien de la mesure privative de liberté et de la remplacer par une mesure moins sévère dès lors que les circonstances initiales ayant justifié son imposition ont changé. En outre, la juge a fondé sa décision sur le fait que la détention avait été déclarée arbitraire par le Groupe de travail sur la détention arbitraire.

5.4L’auteur affirme qu’Interpol, à la demande de l’État partie, a diffusé une notice internationale contre un groupe de banquiers, dont lui-même, mais l’a ensuite annulée en vertu de l’article 3 de son Statut, estimant que la demande était motivée par des raisons politiques.

Délibérations du Comité

Examen de la recevabilité

6.1Avant d’examiner toute plainte soumise dans une communication, le Comité des droits de l’homme doit, conformément à l’article 93 de son règlement intérieur, déterminer si la communication est recevable en vertu du Protocole facultatif se rapportant au Pacte.

6.2Conformément au paragraphe 2 a) de l’article 5 du Protocole facultatif, le Comité doit s’assurer que la même question n’est pas déjà en cours d’examen devant une autre instance internationale d’enquête ou de règlement. Il relève que le 1er septembre 2009 le Groupe de travail sur la détention arbitraire a rendu l’avis no 10/2009, dans lequel il conclut au caractère arbitraire de la détention préventive de l’auteur. Le Comité rappelle que le paragraphe 2 a) de l’article 5 du Protocole facultatif s’applique uniquement lorsque la même question que celle qui lui est soumise est en cours d’examen devant une autre instance internationale d’enquête ou de règlement. Le Groupe de travail ayant achevé l’examen de l’affaire avant que la présente communication ne soit soumise au Comité, celui-ci ne s’interrogera pas sur le point de savoir si l’examen d’un cas par le Groupe de travail sur la détention arbitraire constitue une procédure devant «une autre instance internationale d’enquête ou de règlement» au sens du paragraphe 2 a) de l’article 5 du Protocole facultatif. En conséquence, le Comité considère qu’il n’y a pas d’obstacle à la recevabilité de la présente communication au titre de cette disposition.

6.3En ce qui concerne l’épuisement des recours internes, le Comité relève que l’auteur a soulevé ses griefs relatifs aux articles 9 et 14 du Pacte pendant la procédure engagée contre lui. Cette procédure est restée toutefois au stade de l’instruction depuis que l’auteur a été mis en examen par le Bureau du Procureur en 2005. Dès lors que la question de l’épuisement des recours internes est étroitement liée aux allégations de fond, le Comité considère que le paragraphe 2 b) de l’article 5 du Protocole facultatif ne fait pas obstacle à la recevabilité de la communication.

6.4Le Comité prend note des griefs soulevés par l’auteur au titre du paragraphe 3 a) de l’article 14 du Pacte. L’auteur fait valoir qu’il n’a pas été informé en temps utile des infractions qui lui étaient imputées et que l’acte d’accusation présenté par le Bureau du Procureur au tribunal no 3 ne contenait pas d’informations détaillées sur les faits en cause. L’auteur avance en outre que la deuxième demande de mise en examen, présentée par le Bureau du Procureur pour le délit de détournement de fonds les 26 et 27 mai 2009, après que tous les actes de procédure pris jusqu’alors eurent été annulés, était pareillement dépourvue d’informations détaillées et n’invoquait aucun fait nouveau. Le Comité relève que l’auteur a contesté par la voie judiciaire la légalité de ces actes et qu’à la suite de cela, le 7 mai 2009, la Cour suprême a conclu que l’auteur n’avait pas été inculpé dans les règles du délit de détournement de fonds et a déclaré la nullité des actes de procédure relatifs à ce chef d’inculpation. Au vu de cette décision, le Comité estime que les autorités de l’État partie ont donné la suite voulue au grief de l’auteur, lequel n’a donc pas lieu d’être soulevé devant le Comité. Par conséquent, ce grief est irrecevable en vertu de l’article 2 du Protocole facultatif.

6.5En ce qui concerne le droit de disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de la défense, énoncé au paragraphe 3 b) de l’article 14 du Pacte, le Comité prend note des arguments de l’auteur, à savoir que: le tribunal no 3 a rejeté le 16 mars 2007 sa demande tendant à avoir personnellement accès au dossier de l’affaire; il n’a pas été inculpé dans les règles du délit de détournement de fonds, ce qui l’a privé du droit de se défendre; le Bureau du Procureur a omis de lui communiquer, ainsi qu’au juge, un rapport du Ministère des finances qui concluait que les devises utilisées provenaient d’une tierce partie non liée à Banco Canarias; et ses avocats n’ont pas eu accès à tous les documents nécessaires pour assurer sa défense. Le Comité estime toutefois que l’auteur, qui a été assisté d’un conseil pendant toute la procédure, n’a pas expliqué en détail comment il avait été empêché de préparer sa défense ou d’avoir accès à des moyens de preuve décisifs. Par conséquent, le Comité considère que ce grief n’a pas été suffisamment étayé aux fins de la recevabilité et le déclare également irrecevable en vertu de l’article 2 du Protocole facultatif.

6.6Le Comité estime que l’auteur a suffisamment étayé aux fins de la recevabilité les griefs formulés au titre de l’article 9 et des paragraphes 1, 2 et 3 c) de l’article 14 du Pacte, et note que les autres conditions de recevabilité sont satisfaites. Il en conclut que ces griefs sont recevables et passe à leur examen sur le fond.

Examen au fond

7.1Conformément au paragraphe 1 de l’article 5 du Protocole facultatif, le Comité des droits de l’homme a examiné la présente communication en tenant compte de toutes les informations qui lui ont été communiquées par les parties.

7.2En ce qui concerne les griefs soulevés au titre du paragraphe 1 de l’article 14 du Pacte, le Comité prend note de ce que, selon l’auteur, les autorités judiciaires intervenues dans la procédure n’étaient pas indépendantes parce que l’État partie a établi un système de juges non titulaires qui n’ont aucune stabilité dans leurs fonctions et qui peuvent être remplacés discrétionnairement sans procédure préalable; en outre, ceux qui ne se conforment pas aux instructions du pouvoir exécutif feraient l’objet de représailles. Le Comité note aussi que, selon l’auteur, les juges et les procureurs qui sont intervenus dans la procédure étaient non titulaires, et que la juge du tribunal no 31, Mme M. L. A., a agi conformément à la loi lorsqu’elle l’a fait libérer, mais qu’elle a été arrêtée immédiatement après − sans mandat − à titre de représailles. Le Comité prend note également des arguments de l’État partie, qui affirme que les autorités judiciaires ont donné la suite voulue aux recours introduits par l’auteur, notamment en ce qui concerne son recours en évocation, et que la juge du tribunal no 31 a été arrêtée uniquement parce qu’elle avait méconnu la décision de la Cour suprême qui, à la suite du recours en amparo introduit par le ministère public le 15 octobre 2009, avait suspendu les effets de l’arrêt par lequel la durée de prolongation de la détention préventive avait été ramenée à huit mois.

7.3Le Comité relève que l’État partie n’a pas contesté le statut de non-titulaire des autorités judiciaires qui sont intervenues dans la procédure concernant l’auteur. Il relève également que la juge du tribunal no 31 a été arrêtée le jour où elle avait ordonné la remise en liberté de l’auteur et que le lendemain, le Président de l’État partie a fait référence à l’une des juges dans les médias, en la qualifiant d’«escroc» et en disant qu’une peine sévère devrait lui être imposée. Le Comité rappelle que les États doivent prendre des mesures garantissant expressément l’indépendance du pouvoir judiciaire et protégeant les juges de toute forme d’ingérence politique dans leurs décisions, en fixant des procédures claires et des critères objectifs en ce qui concerne la nomination, la rémunération, la durée du mandat, l’avancement, la suspension et la révocation des magistrats, ainsi que les mesures disciplinaires dont ils peuvent faire l’objet. Une situation dans laquelle les fonctions et les attributions du pouvoir judiciaire et du pouvoir exécutif ne peuvent pas être clairement distinguées et dans laquelle le second est en mesure de contrôler ou de diriger le premier est incompatible avec le principe de tribunal indépendant. Le Comité considère que l’arrestation de la juge du tribunal no 31 pourrait avoir été demandée par le pouvoir exécutif, vu les allusions faites publiquement par le Président de la République et compte tenu en particulier du fait que la décision de modifier la mesure de détention prise contre l’auteur était expressément fondée sur l’avis du Groupe de travail sur la détention arbitraire. Au vu de ces faits, ainsi que du statut provisoire des autorités judiciaires impliquées dans la procédure, le Comité conclut que, dans la présente espèce, l’État partie a porté atteinte à l’indépendance des tribunaux, en violation du paragraphe 1 de l’article 14 du Pacte.

7.4Au sujet du grief de violation du paragraphe 2 de l’article 14, le Comité note que l’auteur affirme avoir été atteint dans son droit à la présomption d’innocence du fait qu’il a été privé de sa liberté à titre préventif alors qu’aucune des conditions légalement requises pour l’application de cette mesure n’était remplie, et que les poursuites engagées contre lui étaient motivées par des considérations politiques. Le Comité note également qu’après la remise en liberté de l’auteur le Président de la République, au cours d’une émission diffusée par la radio et la télévision nationales, a parlé de l’auteur en le qualifiant d’«escroc», insinuant que sa libération avait été illégalement orchestrée par ses avocats et la juge du tribunal no 31; l’État partie n’a pas réfuté ni expliqué ces déclarations du Président devant le Comité. À ce propos, celui-ci rappelle que le rejet d’une demande de libération sous caution ne porte pas atteinte à la présomption d’innocence. Cependant, d’une manière générale, toutes les autorités publiques ont le devoir de s’abstenir de préjuger de l’issue d’un procès, par exemple de s’abstenir de faire des déclarations publiques affirmant la culpabilité de l’accusé. Par conséquent, étant donné qu’aucun tribunal n’avait statué sur la responsabilité pénale de l’auteur, le Comité considère que l’évocation directe de l’affaire par le Président de la République, ainsi que la manière dont il en a parlé, a porté atteinte au principe de la présomption d’innocence, consacré au paragraphe 2 de l’article 14 du Pacte, dont jouit tout accusé tant que sa culpabilité n’a pas été établie par une décision judiciaire.

7.5Au sujet des griefs que l’auteur soulève au titre du paragraphe 3 c) de l’article 14 au motif qu’il n’a pas été jugé dans un délai raisonnable et sans retard excessif, le Comité prend note des arguments de l’État partie, qui affirme que la lenteur de la procédure ne peut lui être imputée, que le retard s’explique par le recours en évocation de l’auteur auquel la Cour suprême a fait droit en annulant tous les actes procéduraux relatifs au délit de détournement de fonds, et qu’aussi bien l’auteur que le ministère public, dans l’exercice de leurs droits et obligations, ont fait usage de tous les recours qui leur étaient ouverts pour contester les diverses mesures prises dans le cadre de la procédure.

7.6Le Comité relève que l’auteur a été mis en examen pour la première fois en 2005, puis officiellement mis en accusation en mars 2007 et placé en détention préventive du 8 février 2007 au 10 décembre 2009. À la date de la présente communication, le 9 mars 2010, aucun tribunal n’avait statué sur son éventuelle responsabilité pénale, la procédure se trouvant toujours au stade de la mise en état. Le Comité note également que les audiences prévues ont été suspendues à plusieurs reprises en raison de l’absence des représentants du ministère public, et que le recours en évocation introduit par l’auteur le 19 novembre 2007 a été déclaré recevable par la Cour suprême sept mois plus tard, le 17 juin 2008, et examiné dix-huit mois plus tard, le 7 mai 2009.

7.7Le Comité rappelle que le caractère raisonnable de la durée d’une procédure judiciaire doit être évalué au cas par cas, compte tenu de la complexité de l’affaire, du comportement de l’accusé et de la manière dont les autorités administratives et judiciaires ont traité l’affaire. Dans les circonstances de l’espèce, il estime que l’État partie, dans ses observations, n’a pas expliqué de manière satisfaisante en quoi la lenteur de la procédure serait imputable au comportement de l’auteur ou à la complexité de l’affaire. Par conséquent, le Comité estime que la procédure engagée contre l’auteur a subi un retard contraire aux dispositions du paragraphe 3 c) de l’article 14 du Pacte.

7.8En ce qui concerne le grief de violation de l’article 9 du Pacte, le Comité prend note de l’argument de l’auteur selon lequel le placement en détention préventive ordonné par le tribunal no 3 était arbitraire car les conditions requises par la loi pour l’application de cette mesure n’étaient pas remplies; l’auteur n’a pas été immédiatement informé de la nature des charges retenues contre lui, qui avaient motivé son arrestation; il n’a pas bénéficié d’un contrôle juridictionnel rapide de la légalité de sa détention et il n’a pas été jugé dans un délai raisonnable. L’auteur fait valoir en outre qu’il n’a pas été libéré lorsque sa détention a atteint la durée maximale de deux ans, le 8 février 2009, alors qu’aucune raison sérieuse ou décision officielle ne justifiait un maintien en détention. Selon lui, la décision de prolongation de la détention prise par le tribunal no 27 le 4 juin 2009, et infirmée par la cour d’appel le 8 octobre 2009, n’était pas fondée en droit. Le Comité prend note également des arguments de l’État partie, qui fait valoir que l’auteur, grâce à ses relations et à ses moyens économiques, pouvait facilement prendre la fuite, que le Bureau du Procureur était tenu de demander son placement en détention préventive puisque, conformément au paragraphe 1 de l’article 251 du Code de procédure pénale, il convient de présupposer l’existence d’un risque de fuite dès lors que l’infraction en cause est passible d’une peine égale ou supérieure à dix ans d’emprisonnement, comme en l’espèce, et, enfin, que l’auteur a eu accès à tous les moyens de défense et à tous les recours voulus pour contester cette mesure.

7.9Le Comité relève que le 8 février 2007, lorsqu’il a appris que le Bureau du Procureur avait demandé son placement en détention préventive, l’auteur s’est présenté spontanément aux autorités, qui l’ont placé en détention préventive en vertu de l’ordonnance rendue par le tribunal no 3. Le 13 mars 2007, le cour d’appel a rejeté le recours formé par l’auteur contre cette mesure. Le 19 novembre 2007, l’auteur a formé devant la Cour suprême un recours en évocation qui a été déclaré partiellement fondé dix-sept mois plus tard, le 7 mai 2009. Le Comité relève également que la durée légale maximale de la mesure de placement en détention préventive arrivait à échéance le 8 février 2009. L’auteur n’a toutefois pas été libéré et, bien que la loi prévoie la possibilité de prolonger la détention si des raisons sérieuses le justifient, cette prolongation n’a été ordonnée que le 4 juin 2009. La détention préventive a été remplacée le 10 décembre 2009 par une mesure de mise en liberté provisoire, eu égard, entre autres, à l’avis rendu par le Groupe de travail sur la détention arbitraire. Cette mesure a toutefois été annulée le 18 décembre 2009 et remplacée par une nouvelle ordonnance de placement en détention.

7.10Le Comité rappelle que la détention préventive doit être exceptionnelle et aussi brève que possible. En outre, elle doit être non seulement légale, mais également raisonnable et nécessaire à tous égards, par exemple pour éviter que l’intéressé ne prenne la fuite, ne soustraie ou modifie des preuves ou ne commette une nouvelle infraction. Au vu des informations reçues, le Comité estime que l’État partie n’a pas donné de raisons suffisantes autres que la simple présomption de fuite pour justifier le placement initial de l’auteur en détention préventive et la prolongation ultérieure de cette mesure, ou pour expliquer pourquoi il ne pouvait prendre d’autres mesures pour empêcher une éventuelle fuite, ou pourquoi la prolongation de la détention n’a été ordonnée que plusieurs mois après l’expiration du délai de deux ans. S’il est vrai que l’auteur a fini par quitter le pays en dépit du mandat d’arrêt délivré contre lui par le tribunal no 31 le 18 décembre 2009, le Comité constate que cette fuite était motivée par les irrégularités du procès, ainsi qu’il ressort des paragraphes qui précèdent. Il en conclut que la détention préventive de l’auteur était contraire aux dispositions de l’article 9 du Pacte.

8.Le Comité des droits de l’homme, agissant en vertu du paragraphe 4 de l’article 5 du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, constate que les faits dont il est saisi font apparaître une violation de l’article 9 et des paragraphes 1, 2 et 3 c) de l’article 14 du Pacte.

9.Conformément au paragraphe 3 a) de l’article 2 du Pacte, l’État partie est tenu de fournir à l’auteur un recours utile, et en particulier: a) au cas où l’auteur serait jugé, de garantir que le procès soit assorti de toutes les garanties judiciaires prévues à l’article 14 du Pacte; b) de garantir qu’il ne sera pas placé en détention préventive pendant la durée de la procédure; et c) de lui accorder une réparation, notamment sous la forme d’une indemnisation appropriée. Il est également tenu de veiller à ce que des violations analogues ne se reproduisent pas à l’avenir.

10.Étant donné qu’en adhérant au Protocole facultatif, l’État partie a reconnu que le Comité avait compétence pour déterminer s’il y a eu ou non violation du Pacte et que, conformément à l’article 2 du Pacte, il s’est engagé à garantir à tous les individus se trouvant sur son territoire et relevant de sa juridiction les droits reconnus dans le Pacte et à assurer un recours utile et exécutoire lorsqu’une violation a été établie, le Comité souhaite recevoir de l’État partie, dans un délai de cent quatre-vingts jours, des renseignements sur les mesures prises pour donner effet à ses constatations. L’État partie est invité en outre à rendre publiques les présentes constatations et à les diffuser largement.

[Adopté en espagnol (version originale), en anglais et en français. Paraîtra ultérieurement en arabe, en chinois et en russe dans le rapport annuel du Comité à l’Assemblée générale.]